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Le patriotisme français, ce reproche fait aux juifs

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Alors que son mouvement a été critiqué par le rabbin de Metz lors d’une cérémonie commémorative, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé un mélange des genres et exprimé le souhait de « rétablir le droit à la laïcité dans les cérémonies publiques ». Pourtant, l’islamo-gauchisme et le rejet de la laïcité par de nombreux militants de la France insoumise commencent, par ailleurs, à être bien documentés.


L’ire de Jean-Luc Mélenchon a été déclenchée par le Grand Rabbin de Metz et de Moselle, Bruno Fiszon, au point que l’ancien parlementaire et ministre considère comme « une provocation religieuse la mise en cause de LFI » lors de la cérémonie de commémoration de la rafle de Vel d’Hiv, le dimanche 20 juillet dernier au Fort-Queuleu.
Pour sa part, le Grand Rabbin de Metz et de Moselle, titulaire d’un diplôme de vétérinaire et spécialiste des questions relatives à l’abattage rituel, considère qu’en procédant à « l’instrumentalisation du conflit israélo-palestinien, La France Insoumise (…) attise les braises. » Il a exprimé ainsi la crainte croissante de nombre de juifs de l’hexagone.

Français juifs contre Nouvelle France

Un représentant institutionnel ou un rabbin doivent-ils, dans notre République, limiter leur parole à la déploration des juifs morts pendant la Shoah, lors de manifestations publiques auxquelles sont conviés tous les élus, lesquels communient sans exception dans le refus légitime de toute résurgence d’un antisémitisme de persécution tel que la France le connut et le subit ?
Devient-il, maintenant, inapproprié de s’inquiéter avec vivacité de la liaison perfide entretenue par certains entre les agissements d’Israël et les conséquences pour les juifs de France ou d’autres pays ? Derrière cette interrogation se tapit la clé d’une haine qui, au passé comme au présent, frappe des concitoyens en raison de leur confession car ils se revendiquent patriotes.

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Les Français juifs anciens combattants de la Première Guerre mondiale avaient manifesté un patriotisme infiniment supérieur à celui des collaborateurs zélés des nazis, qui procédaient à leur arrestation. L’affaire Dreyfus avait déjà démontré comment un officier de commandement coupable de trahison avait tout tenté pour faire condamner un patriote juif et français.
« Français d’abord et Juif d’abord », écrivait de manière lumineuse le Grand Rabbin Haguenau voici un siècle. Or Jean-Luc Mélenchon espère pour la France une autre langue et un autre peuple. Les juifs, en accord ou non avec le pouvoir politique en situation de gouverner, ont toujours aimé la France telle qu’elle est, participant à leur pleine manière à la vie nationale.
Se télescopent ainsi deux conceptions se situant aux antipodes l’une de l’autre, voire radicalement différentes. Ceux qui veulent transformer la France et changer sa nature ne peuvent supporter ceux qui, souvent venus d’ailleurs comme beaucoup d’autres, aiment notre pays comme il est, car ils mesurent le bienfait que représente son existence.

Une mécanique perverse est enclenchée

Dès lors, l’attaque contre les juifs de France va reposer sur un syllogisme: prendre appui sur les agissements d’Israël avec lesquels tout juif est supposément en accord pour discréditer ceux qui, dans notre pays, croient en notre vie républicaine telle qu’elle est, avec ses lignes de force, ses qualités et ses défauts. Cela accréditera l’idée qu’ils deviennent nécessairement attaquables.

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Cette stratégie, parce qu’elle se révèle efficace auprès des esprits assiégés par les images de Gaza, est particulièrement perverse, dangereuse et nuisible. Que ses concepteurs ne s’étonnent pas des dégâts qu’ils peuvent encore causer, ni de devoir en répondre. Chacun peut intégrer que les immenses souffrances passées des juifs en France appellent la retenue.
C’est explicitement ce qu’a rappelé le Grand Rabbin Bruno Fiszon, pendant le temps dédié d’une commémoration lors de laquelle il n’était pas interdit, même aux plus sectaires, de réfléchir. Rappelons qu’il n’est pas obligatoire d’être antisémite pour faire profession d’antisémitisme, catégorie dans laquelle se complaisent des velléitaires prétendument opposés.

QUE SONT LES JUIFS POUR LA FRANCE ?

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Corruption sur Terre et paranoïa dans les airs

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À Téhéran, les mollahs aux abois n’aiment pas les espions… ni les opposants, ni les trafiquants de drogue, ni les chansons tristes. Les religieux tentent de réactiver la fibre nationaliste et pendent à tour de bras dans les prisons.


Il y a tout juste un mois, le monde retenait son souffle alors que l’escalade entre Israël et l’Iran battait son plein. Au cours de ce que l’on peut appeler désormais la guerre des 12 jours, la République islamique a déploré la mort de mille de ses ressortissants, dont quelques figures majeures du régime.

Devant la Chine à la fin de l’année ?

À l’intérieur, la répression ne faiblit pas. Le 25 juillet dernier, Mehdi Hassani et Behrouz Ehsani ont été exécutés. Les deux hommes avaient été condamnés à mort en janvier pour « rébellion armée », « inimitié envers Dieu » et « corruption sur Terre », en lien avec leur appartenance supposée à l’organisation d’opposition des Moudjahidines du peuple (MeK), au terme d’un procès qui a duré cinq minutes. Ils s’ajoutent à la liste des 612 détenus exécutés au cours du premier semestre 2025.

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Le chiffre est deux fois plus élevé que pour le premier semestre 2024 (297 exécutions alors). De quoi écraser le rival saoudien dans ce macabre exercice, et égaler ou dépasser la Chine à la fin de l’année. L’agence Fars News, proche des Gardiens de la révolution, évoque le souvenir de l’été 1988, quand les opposants à l’ayatollah Khomeini, de la gauche aux royalistes en passant par les Moudjahidines du peuple, avaient été exécutés. En moins de trois semaines, entre 2 800 et 5 000 détenus avaient été abattus dans les geôles iraniennes.

Téhéran, nid d’espions

Plus de 40 % des personnes exécutées en 2025 l’ont été à cause d’activités liées à la drogue. Pour le reste des condamnés, il s’agit d’accusations « fourre-tout », comme celle d’« inimitié envers Dieu » ou de « corruption sur Terre », accusations tirées du droit islamique, bien utiles pour mener la guerre aux opposants politiques et aux minorités religieuses. La guerre des 12 jours n’a pas freiné la paranoïa au sein de la République islamique à l’égard de ceux qui collaborent « avec des États hostiles », bien au contraire : plus de 700 Iraniens et un nombre indéterminé de ressortissants étrangers ont été arrêtés, d’après les médias persans.

Les autorités iraniennes ont par exemple affirmé avoir démantelé un réseau d’espionnage lié au Mossad, qui aurait été impliqué dans des assassinats ciblés de scientifiques, des sabotages industriels et des infiltrations de sites militaires et nucléaires, avec des agents non pas iraniens ou israéliens… mais indiens, pour certains techniciens, logisticiens ou ingénieurs civils employés à Bahreïn, aux Émirats arabes unis ou à Oman, ayant un accès logistique, administratif ou informatique à des structures régionales stratégiques.

La mue nationaliste des mollahs

Il faut dire que même les paranoïaques ont de bonnes raisons d’être inquiets. Si l’objectif israélien de renverser le régime de Téhéran a échoué, l’opposition perse continue de réclamer des changements. L’opposant réformiste Mir Hossein Moussavi a publié, le 10 juillet, une déclaration appelant à la libération des prisonniers politiques et à la rédaction d’une nouvelle Constitution. Il a été rejoint par 800 personnalités politiques. La déclaration se dissocie de toute allégeance à une puissance étrangère ennemie, proposant une troisième voie, « celle du peuple, qui trace une route indépendante, pour conjurer la répression et l’autoritarisme tout comme la guerre et l’agression extérieure ».

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En réaction, Téhéran semble « iraniser » sa propagande depuis la guerre des 12 jours, ajoutant aux références chiites d’autres plus nationalistes. C’est ainsi que des chants patriotiques datant de l’époque de l’invasion anglo-soviétique ressurgissent. « Aujourd’hui, Iran et islam ne font qu’un », a soutenu un clerc ultra-conservateur en marge des festivités de l’Achoura.

Face à la menace extérieure et aux dissensions internes, le régime doit activer la fibre nationale et encourager l’union sacrée.

Au lendemain de la guerre du Golfe, Saddam Hussein avait dû « réislamiser » le régime baasiste (ajoutant même les mots Allahu akbar sur le drapeau) pour tenir une nation rendue exsangue par les sanctions internationales ; trente-cinq ans plus tard, l’ennemi iranien doit faire le chemin inverse, pour résister à la double pression de l’extérieur et de l’intérieur.

Quand l’hypocrisie et la moraline façonnent la mode vestimentaire

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Depuis plusieurs mois, l’enseigne à bas coût chinoise Shein concentre les critiques – pour le plus grand bonheur de toutes ses concurrentes finalement guère plus vertueuses.


Les rapports d’associations et d’ONG se multiplient pour condamner les pratiques du géant Shein et d’autres plateformes de la mode à bas-prix. Dernier en date : une enquête d’Action Aid France et de China Labor Watch, selon laquelle l’emploi d’une main d’œuvre chinoise à bas coût, des conditions de travail dégradées ou encore l’absence de droits sociaux dans les usines de production mandatées par Shein sont les conséquences d’un système qui invite à toujours plus de rentabilité. Mais en pointant du doigt Shein, on évite de mettre l’accent sur les enseignes beaucoup moins vertueuses. Les consommateurs ne méritent-ils pas des enquêtes plus objectives et mettant les idéologies de côté ?

Inefficacité des bons sentiments

Qui n’a jamais vu, ces dernières années, des campagnes choc montrant des hommes et des femmes travaillant d’arrache-pied derrière des machines à coudre pour produire des vêtements destinés à habiller les quatre coins du globe ? Ces images ont pour but de sensibiliser, à raison, l’opinion occidentale quant au respect des droits du travail en République populaire de Chine. Pourtant, si les images heurtent, force est de constater qu’elles n’ont guère changé les choses. Notre société fait part d’une indignation qui ne sera que passagère puisque le lendemain, la plupart d’entre nous commandera sur Shein, Temu, Kiabi ou Amazon, la dernière paire de baskets à la mode.

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Inefficaces, ces charges à l’encontre de certaines enseignes chinoises sont par ailleurs souvent injustes. C’est un fait peu connu, mais si la « fast fashion », et plus directement l’industrie textile chinoise à travers Shein, est depuis longtemps dans le viseur des ONG, c’est pourtant elle qui a mis en œuvre un code de conduite qu’elle impose à l’ensemble de ses fournisseurs.

L’enseigne propose de nombreuses initiatives visant à l’amélioration des conditions de travail et à l’évolution des normes et des standards au sein d’un pays comme la Chine. Elle s’y oblige, pas nécessairement animée par un sens de l’éthique supérieur, mais par pur pragmatisme, car elle se sait scrutée en raison des controverses passées, présentes et à venir dans un monde où le moindre faux-pas est exploité par la concurrence et/ou par des idéologies ayant un agenda politique à respecter.  

L’écologie détournée

Mais c’est en France que l’on vient porter le plus vif écho à la polémique grâce au relai médiatique et à l’influence grandissante dans le lexique commun de mots comme « résilience » et « sobriété ».  Bien sûr qu’il faut mettre tout en œuvre pour réduire l’empreinte carbone, pour veiller à ne pas exploiter davantage les énergies fossiles, bien sûr qu’il faut améliorer les conditions de travail et les droits des citoyens, qu’ils soient Chinois ou non, mais on ne pourra le faire en se basant sur des rapports tronqués et artificiels. « On voit la paille dans l’œil du voisin mais pas la poutre dans le sien… » dit l’Évangile de Luc. Ainsi, il conviendra d’éviter les interrogations fâcheuses, celles qui piquent nos sociétés plutôt que des pays lointains. Pourquoi les gens consomment-ils de la mode à bas-prix ? Peut-être parce qu’ils n’ont plus les moyens de faire autrement. Quelles raisons expliquent l’abandon du moindre projet de relance, de restauration d’une filière textile en France ?  

Les vrais problèmes sont mis de côté

Songeons-nous un seul instant à ces problématiques alors que tant d’énergies, d’efforts, d’actions et même d’argent sont diligentés pour aboutir à une enquête à charge de plusieurs mois sur le « mastodonte chinois du textile ultra bon marché. » C’est la croissance, la grande responsable pour ces idéologues et bien-pensants qui estiment que les activités économiques sont inconciliables avec la responsabilité sociétale des entreprises. La sémantique utilisée est celle de la culpabilité… Messieurs les responsables de Shein, le jury révolutionnaire des Fouquier-Tinville vous condamne à la perpétuité incompressible tout comme il condamne les citoyens à adopter un comportement en phase avec leur doxa de l’éco-suicide. Pire encore, ces mêmes contempteurs du libéralisme affirment que Shein rendrait « obsolète le principe même de collection d’été ou d’hiver. » On croit rêver, ces gens-là n’auraient-ils jamais acheté pendant les soldes d’été ou… d’hiver ?

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Le « méchant capitaliste » peut proposer « des prix dérisoires grâce à l’exploitation d’une main d’œuvre invisible »… Les propos sont confondants de candeur et de béatitude. L’hypocrisie veut que ces personnes d’Action Aid France ou encore du China Labor Watch, souvent des bobos huppés des centres-villes, fassent le choix de fringues non-lavées et déchirées… Pour faire « stylé », tu comprends ? Alors on va s’employer à nourrir nos consciences de ce qui a de plus beau au fond de leurs âmes : « Travailleurs et travailleuses, unissez-vous ! Non à l’exploitation à grande échelle, à l’absence de sécurité sociale et aux discriminations de genre… » Oui, même le genre y passe dans ce rapport digne d’une fourberie de Scapin. On y précise que Shein est le 100ème plus gros émetteur de CO2 dans le monde mais on ne parle pas des 99 autres qui la précèdent. On y critique les nouveaux produits, on fait des comparaisons insolites entre une plateforme et une autre, on y stipendie la supply chain, l’existence d’entrepôts en Pologne ou en Italie. Excusez du peu mais aurions-nous encore le droit de respirer demain ? 

Trois piliers sont nécessaires pour changer nos comportements et nos usages : la relance industrielle en France garantissant la reconquête du pouvoir d’achat des Français, le retour à une véritable éducation reposant sur des valeurs et des principes et la mise en œuvre d’une société de consommateurs éclairés quant à ses prochains achats, quant à ses choix, économiques, écologiques ou sociétaux. Sur ce dernier point, on serait en droit de se demander pourquoi on s’abstient de critiquer les marques françaises qui fabriquent leurs produits en Chine, ne faisant guère mieux que Shein ? On a pu l’observer, ces derniers mois, avec la polémique à propos de Decathlon dont l’un des fournisseurs employait de la main d’œuvre issue de la minorité musulmane ouïghoure particulièrement persécutée en Chine. Le silence règne. A contrario, il faudrait inviter ces fournisseurs à réviser leurs standards pour améliorer les conditions de vie de leurs salariés. Dans le grand jeu de la concurrence internationale, il serait intéressant de déchiffrer les raisons précises, cachées et obscures de ce type de rapport. Pour faire plus court, à qui profite le crime ? Une question d’une mode pas vraiment éphémère…

Jacques Benoist-Méchin: l’ordre et le désir


Qui pour rassembler Proust, Pompidou, Hitler et le colonel Kadhafi dans un même salon ? Réponse : un écrivain collaborationniste, arabisant et homosexuel, baron d’Empire, qui répond au nom de Jacques Benoist-Méchin (1901-1983).

Éric Roussel, le biographe des présidents de la Ve République, raconte les mille et une vies de cet orientaliste amoureux des lettres et des beaux plafonds dans Jusqu’au bout de la nuit, aux éditions Perrin. L’ouvrage n’est pas une réhabilitation ; elle aurait été de toute façon difficilement publiable. Ses faits de collaboration et son « intelligence avec l’ennemi » le rendent « indigne de la nation » en 1947, après un procès en Haute Cour d’épuration. Il échappe de peu au peloton d’exécution… Fait original : il connaît une seconde vie et une seconde gloire après-guerre, cette fois littéraire.

Jacques Benoist-Méchin fut d’abord un jeune homme de bonne famille, rêveur, timide et emprunté. Sa famille bourgeoise et mondaine néglige un peu son éducation. Le milieu littéraire parisien le repère et l’adopte, remarquant ses qualités de polyglotte. Dans ce Paris d’avant-guerre, délicieusement littéraire et cosmopolite, où l’on croise Hemingway, Joyce, Fitzgerald ou Ezra Pound place de la Contrescarpe, il est bien vu de pouvoir, comme lui, traduire Kafka et Joyce. Il croise le légendaire magnat de la presse William Randolph Hearst (lequel a inspiré le personnage de Citizen Kane), mais s’en détourne vite, un peu écœuré par le management à l’américaine et la quête permanente du scoop journalistique. « Ses vrais talents sont ailleurs », précise Roussel. Cette expérience professionnelle nourrit un profond dégoût pour le Nouveau Monde : « J’étais allergique à l’Amérique (…) tout était calculé en fonction de cette espèce d’optimisme béat qui veut que tous les talents, toutes les vertus soient récompensés, que le bien c’est d’être riche, le mal d’être pauvre, que quelqu’un de pauvre est forcément mauvais… » La vieille Europe sera son seul secours.

L’Europe, l’Europe…

Benoist-Méchin rêve d’Europe. En lecteur cosmopolite, il aimerait que le vieux continent s’unisse et affirme sa culture commune. En 1918, il supplie son père – il n’a que 17 ans – de faire jouer ses relations parisiennes pour adoucir le traité de Versailles et empêcher un démembrement de l’Allemagne qui conduirait « à une nouvelle guerre mondiale ».

L’occupation de la Rhénanie l’indigne. Un séjour en Allemagne achève de le « germaniser ». Son Histoire de l’armée allemande en 1936 lui ouvre les portes des cercles dirigeants nazis : il donne des conférences à partir de ses travaux sur l’armée allemande devant le gratin du IIIe Reich. Précoce, il commence presque la collaboration en 1938. Benoist-Méchin bascule et adhère au PPF de Doriot, le premier (et presque le seul) parti fasciste français. La défaite vient, et Benoist-Méchin entonne l’air du « Je vous l’avais dit » : « Ayant perdu à un degré inimaginable le sens du réel, [la République française] n’a jamais voulu regarder les choses en face, ni prendre conscience des problèmes qu’elle avait à résoudre. Par un fléchissement inexcusable de sa raison et de sa vitalité, elle s’est constamment refusée à tout effort, à tout sacrifice. » 1936, le Front populaire, l’esprit de jouissance, les congés payés, l’oisiveté prolétaire sont, selon lui, responsables de la défaite militaire. L’antienne est bien connue. Marc Bloch lui réglera son sort dans L’Étrange Défaite.

Non pas collaborer, mais « cobelligérer »

Quand De Gaulle fait le pari, le 18 juin, d’une victoire anglo-saxonne, Jacques Benoist-Méchin et Pierre Laval font à l’inverse le pari d’une victoire allemande. Il n’y a pas de fascination romantique pour les charmes frelatés du fascisme, comme chez Drieu la Rochelle ou Robert Brasillach ; c’est d’ailleurs là son originalité parmi les écrivains collabos. Avec franchise – et sans doute froideur logique – il pense que la France doit se positionner pour l’après-guerre du côté des gagnants, c’est-à-dire « avec son vainqueur » et entrer en guerre aux côtés de l’Allemagne, ou « cobelligérer » et assumer un véritable basculement d’alliance. Ce qui revient à aller plus loin que Pétain. Il assiste Laval au ministère. Le calcul était un peu fou : rien, dans l’attitude constante des autorités d’occupation, ne ressemblait à un traitement de faveur pour la France… Condamné à mort par la Haute Cour en 1947, il végétera à Clairvaux avant de sortir en 1954 au bénéfice d’une grâce générale. La réhabilitation viendra plus tard. Soixante jours qui ébranlèrent l’Occident, sans renier grand-chose, raconte le déclenchement de la guerre, célèbre le génie politique du général de Gaulle et trouve quelques lecteurs dans le gratin politique.

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Déçu de l’Europe, Jacques Benoist-Méchin passe à l’Orient et devient un spécialiste reconnu du monde arabe. Il se fait aussi l’avocat passionné de la cause palestinienne. La lecture d’Un printemps arabe aurait influencé le durcissement de la position du général de Gaulle envers Israël. Il est introduit un peu partout : à Alger, en Libye, où Kadhafi le reçoit sous sa tente en plein désert. Par beau temps, il bronze et divague ; il rêve d’une fusion entre l’Orient et l’Occident, ou d’une conversion de l’Europe à l’islam. Autant frotter la lampe d’Aladin… Divagateur, narrateur, il excelle cependant dans le genre de la biographie historique – négligée par l’Université – et compose une série de portraits de passeurs entre Orient et Occident : Lyautey, Bonaparte, Cléopâtre, Alexandre le Grand…

Roussel, psychanalyste de l’uniforme

La biographie d’Éric Roussel soulève et résout aussi quelques mystères savoureux. Benoist-Méchin a entretenu une relation d’un genre particulier et particulièrement inattendu avec Adrienne Monnier. Tous deux étaient homosexuels… On apprend qu’un enfant a été conçu et avorté. Joyce aurait ainsi changé la célèbre et magistrale fin d’Ulysse – laquelle est connue dans l’histoire littéraire pour avoir fixé le genre du monologue intérieur – sous les conseils de Benoist-Méchin. Surtout, on apprend comment il échappe à la mort en 1947. Malin, il avait quelques dossiers sous le coude.

Proust et Joyce, le Paris cosmopolite et l’Allemagne nazie, le pacifisme et la cobelligérance, Hitler et De Gaulle, Pompidou et Nasser, le grand Occident et l’islam, Cléopâtre et Kadhafi, la bohème et la centrale de Clairvaux… un tel mélange défie un peu l’entendement. Il faut le talent de biographe de Roussel pour déceler, dans l’apparent chaos, une unité de vie, ou plutôt une esthétique. Il y a chez Benoist-Méchin une pente, et presque une pulsion, vers l’ordre – non pas celui « juste » de Ségolène Royal – mais sensuel. L’esthète proustien des années de formation s’est dédoublé en un esthète de l’histoire et même en un esthète du pouvoir épris de virilité… Roussel psychanalyse délicatement l’homosexualité de Benoist-Méchin (dont faisait déjà état Patrick Buisson dans 1939-1945, années érotiques). L’intellectuel emprunté frémissait facilement devant les parades de bottes, les uniformes bien coupés et les gestes carrés de ces hommes de rue, nazis ou révolutionnaires panarabes, qui arrivent au pouvoir. De la brutalité à l’autorité : un pouvoir aux accents phalliques et homoérotiques. « Vous n’imaginez pas combien Kadhafi jeune était beau », confie-t-il. Benoist-Méchin était doué d’une lucidité intime sur les êtres, mais d’un sens politique souvent désastreux. Le tragique des impuissants que le pouvoir fascine…

416 pages

Jusqu'au bout de la nuit: Les vies de Jacques Benoist-Méchin

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Ces dames à l’heure du Tea

Aux États-Unis, l’application réservée aux femmes controversée Tea vient de subir une fuite massive de données affectant environ 72 000 images, dont des selfies et pièces d’identité utilisées pour la vérification des utilisatrices. Tea permet de partager anonymement des informations sur les hommes célibataires, afin d’identifier leurs éventuels comportements « problématiques ».


Ces jours-ci, une application américaine réservée aux femmes en mal de rencontres via internet fait beaucoup parler d’elle. Tea est son nom. Voilà quelques jours, ses dirigeants se glorifiaient d’avoir enregistré plus de quatre millions d’utilisatrices. En fait, ce chiffre des plus flatteurs risque bien de se voir sérieusement revu à la baisse, des piratages intrusifs en quantité ayant été détectés. Ainsi le veut la modernité galopante de ce siècle. À peine croit-on avoir mis en place un cybersystème inviolable qu’il se trouve aussitôt allègrement violé.

Adopte un mec

Mise à la disposition exclusive de la gent féminine, l’application Tea a été créée en 2023 par un certain Sean Cook. Le but : « donner aux femmes les outils dont elles ont besoin pour faire des rencontres en toute sécurité dans un monde qui néglige leur protection. » L’intention est louable, même si on ne peut s’empêcher de considérer qu’il y aurait comme une légère contradiction à rechercher la sécurité maximale tout en s’aventurant à titiller Cupidon du côté de parfaits inconnus. Sans doute faut-il croire que la réalisation de certains fantasmes féminins aura toujours des raisons que la raison ne connaît pas.

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Donc, la dame en recherche s’inscrit sur Tea en envoyant un selfie, et l’application va se charger de l’informer sur le degré de dangerosité, d’insécurité, de toxicité de ou des individus qu’elle a sélectionnés sur tel ou tel site de rencontres. Le type est-il marié, a-t-il un casier judiciaire, est-il sur plusieurs plans du même tonneau à la fois, d’autres femmes ont-elles eu affaire à lui et qu’en disent-elles… Un détail amusant : cela marche un peu comme à la plage avec drapeaux de couleurs. Drapeau vert, baignade autorisée, rouge s’abstenir…

La sphère masculiniste remontée

On s’en doute, tout cela n’est guère du goût de ces messieurs. Ils se dressent bec et ongles contre l’application. « Atteinte à la vie privée, dépotoir à ragots, fausses informations… » Tout cela, qui plus est, dans leur dos, à leur insu puisque l’accès leur est strictement interdit.

Il est vrai que, pour certaines qui n’auraient pas trouvé auprès de tel partenaire de rencontre toute la satisfaction qu’elles en espéraient, la tentation de régler leurs comptes pourrait être forte. À chacun de nos lecteurs, à chacune de nos lectrices, d’imaginer la teneur de commentaires inspirés par le dépit, la jalousie, la rancœur ou encore un vieux fonds de misandrie plus ou moins taquine.

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Mais à la vérité, ne serait-il pas de très longue tradition que des dames, entre elles, à l’heure du thé par exemple, s’échangent ce genre de confidences, volontiers acerbes, ironiques, graveleuses ? Nous avons cette scène de salon, au XVIIIème siècle, où, soudain, une marquise, entourée de dames, lâche cette question qui manifestement la démangeait « Pensez-vous que Monsieur le Conseiller soit une bonne jouissance ? » Tea n’aurait donc pas inventé grand-chose. De tous temps semble-t-il les femmes ont parfaitement su, d’un mot, d’un trait, nous étiqueter, nous marquer au fer. Cela est plus que certain. Que ce soit à l’heure du thé ou en toute autre circonstance.

Faites ce que je dis, pas ce que je fais…

Cependant, parmi les critiques énoncées à l’encontre de l’application, il en est une qui semble particulièrement pertinente. Si au lieu d’être féminine Tea était exclusivement masculine, et que les commentaires, les informations déballées aient pour cibles des femmes, elle aurait probablement été fermée dès le premier jour, sans tambours ni trompettes. À juste titre, d’ailleurs… Tel n’est pas le cas pour Tea.

Mais, au fond, l’important, l’essentiel n’est-il pas que ces dames continuent encore et toujours à parler de nous ? Si elles venaient à s’en abstenir, à en être empêchées, je crois que ce serait pour nous, vaniteux que nous sommes, comme une petite mort…

30 GLORIEUSES - LA DÉCONSTRUCTION EN MARCHE

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Pour les connaisseurs des relations entre l’Amérique et Israël, les deux pays ont évidemment coordonné leurs attaques. En épaulant son allié et ami Bibi pour détruire ou paralyser les capacités nucléaires iraniennes, Trump a renié son engagement de ne plus lancer l’Amérique dans des guerres. Mais face au succès affiché, sa base MAGA le soutient avec enthousiasme.


Tout s’est passé soudainement et rapidement. Le 21 juin, alors qu’il venait de faire savoir, quelques heures auparavant, qu’il prendrait sa décision de bombarder ou non les sites nucléaires iraniens « au cours des deux semaines à venir », Donald Trump donne l’ordre à sept bombardiers furtifs B-2 Spirit, chargés des fameuses bombes « Bunker Busters » pesant chacune 14 tonnes, de pilonner les usines d’enrichissement d’uranium de Fordo et Natanz. En réponse, Téhéran prétend avoir déjà déplacé son programme atomique et lance des frappes de représailles contre la base américaine d’Al-Udeid, au Qatar. Prévenus par les Iraniens, les Américains ne déplorent aucune perte.

Contradiction

L’enchaînement inattendu des événements laisse perplexe. Alors que les Américains viennent d’élire un président opposé à toute participation à des guerres extérieures, les États-Unis ont pris les armes aux côtés des Israéliens. Cette contradiction apparente soulève de nombreuses questions. Que savait Trump quand Netanyahou a lancé les premiers bombardements sur l’Iran ? Comment la base MAGA réagit-elle à des événements qui, selon certains commentateurs, sonnent le glas d’une promesse électorale ? Le président américain payera-t-il un prix politique ? Ses décisions de juin 2025 finiront-elles par plonger le Proche-Orient dans une conflagration générale, où les États-Unis seront de nouveau empêtrés ? On peut déjà répondre clairement à quelques-unes de ces questions.

Lorsque Benyamin Netanyahou lance, une semaine avant celle des Américains, une attaque aérienne contre l’Iran le 13 juin, tout le monde s’interroge : « A-t-il prévenu Donald ? » Ces deux-là sont de proches alliés. Au cours de son premier mandat, Trump a apporté un soutien inconditionnel au premier ministre israélien, allant jusqu’à transférer l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem. « Bibi », après quatre ans de relations de plus en plus difficiles avec Joe Biden, n’a pas caché sa joie de retrouver son vieil ami Républicain à la Maison-Blanche. Au cours des six premiers mois de la nouvelle administration Trump, les deux hommes se sont fréquemment rencontrés et peu de connaisseurs doutent qu’ils aient échangé au sujet de leurs projets pour l’Iran.

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Par exemple Larry Haas, ancien responsable de l’administration Clinton et ex-directeur de la communication du vice-président Al Gore : « Au cours de ces derniers mois, le président Trump a surpris Israël avec certaines de ses actions, en particulier l’accord séparé qu’il a conclu avec les rebelles houtis. Malgré tout, je n’arrive pas à croire que Netanyahou puisse lancer des frappes contre les installations nucléaires iraniennes sans en prévenir la Maison-Blanche. La frappe américaine ultérieure semble faire partie d’une stratégie américano-israélienne plus large visant à paralyser ou à détruire la capacité nucléaire naissante de l’Iran une fois pour toutes. »

Même son de cloche chez l’historien Irwin Gellman, auteur d’une biographie monumentale de Richard Nixon : « Tout comme Jack Kennedy et David Ben Gourion ont sans doute discuté de ce qu’Israël ferait à un ennemi potentiel, je ne doute pas un seul instant que Netanyahou ait discuté de son attaque initiale contre l’Iran avec Trump. » Il ajoute que les deux dirigeants sont « très complices. Du moins, dans l’esprit de Bibi ».

Reste à savoir ce que sera la réaction de la base MAGA après ce qui ressemble fortement à un reniement de l’engagement pris par Trump dès l’annonce de sa première candidature présidentielle il y a dix ans.

Le matin du 18 juin, soit trois jours avant les frappes américaines, Steve Bannon, ancien conseiller de Trump, et porte-parole de l’aile radicale du courant MAGA, donne une conférence de presse matinale à Washington, organisée par le très réputé Christian Science Monitor. Il prône la prudence : « Si nous sommes forcés d’attaquer l’Iran militairement, il ne faut pas le faire demain, après-demain ou le jour suivant. Le président devrait prendre son temps et bien réfléchir en consultant ses conseillers. » Se déclarant ami d’Israël, l’animateur du podcast très populaire « War Room » critique néanmoins l’attaque des installations nucléaires par Tsahal, qu’il voit comme une tentative irresponsable de « changer » le régime iranien, voire de le « détruire ».

Si Bannon n’a pas tort quant à l’objectif ultime de Netanyahou, il se trompe sur la décision de Trump. Il rappelle qu’en 2016, nombre d’experts ont annoncé la défaite de Trump lors de la primaire de Caroline du Sud parce que son opposition aux « forewer wars» guerres sans fin » ( était selon eux insultante dans « l’un des États les plus patriotiques de l’Union ». Et Bannon d’expliquer comment Trump a néanmoins triomphé sur son rival, Jeb Bush, l’ancien gouverneur de Floride, en associant son image à celle de son frère George W. Bush, responsable de la guerre en Irak. Puis, se tournant vers le présent et l’Iran, il déclare, catégorique : « Nous ne voulons plus de guerres éternelles », avant d’attaquer la chaîne Fox News, qu’il accuse de faire de la propagande belliqueuse vingt-quatre heures sur vingt-quatre exactement comme à l’époque de l’invasion de l’Irak. Selon lui, les journalistes de la chaîne d’information continue sont aux antipodes de l’esprit MAGA. Mais dans quelle mesure Bannon l’incarne-t-il lui-même ?

Une révolte des Républicains peu crédible

Bob Livingston, ex-président de la puissante commission budgétaire de la Chambre basse du Congrès, ne croit pas à une révolte des élus républicains. Certes deux représentants au Congrès, le très libertaire Thomas Massie (Kentucky), et  la figure de l’alt-right Marjorie Taylor Greene (Georgie) s’opposent de façon véhémente au bombardement de l’Iran, « mais pas beaucoup d’autres », note-t-il. « Exprimer bruyamment leur opposition est une chose, mais je ne peux pas concevoir que même Massie et Greene se rangent du côté des démocrates pour limiter le pouvoir du commandant en chef. »

Si une majorité des élus restent fidèles à Trump, il en va de même pour les militants. Selon Marc Rotterman, journaliste de Caroline du Nord spécialisé dans les affaires publiques, « une majorité de la base MAGA est d’accord avec la décision du président Trump de détruire les installations nucléaires iraniennes ». C’est aussi l’opinion de Bill Ballenger, grand expert de la vie politique au Michigan : « Il y aura quelques dissensions au sein de la base MAGA, mais dans l’ensemble, ils acceptent la décision de Trump. »

A lire aussi, Stéphane Simon et Pierre Rehov: Lève-toi et tue le premier !

Il ne faut pas oublier le prestige dont jouit Donald Trump en tant que fondateur et chef incontesté du courant MAGA. De même que Ronald Reagan, largement considéré comme l’incarnation du mouvement conservateur moderne, se faisait pardonner chaque fois qu’il quittait sa ligne strictement conservatrice (comme quand en 1982 il est revenu sur une partie des réductions d’impôts de l’année précédente), Trump est excusé par sa base pour son intervention dans le conflit irano-israélien. « Les électeurs MAGA adulent Trump et lui font confiance, affirme Henry Olsen, chroniqueur respecté et auteur d’un livre sur les cols bleus qui votent républicain. Ils sont prêts à approuver son action dans tel ou tel domaine jusqu’à ce qu’il échoue sans reculer, ce qui n’est pas encore arrivé. Beaucoup d’influenceurs MAGA sur le Net exercent peu d’influence sur leur public, surtout quand ils critiquent Trump. »

Ravitaillement en vol d’un bombardier furtif B‑2 Spirit de l’US Air Force. Les sept B‑2 engagés dans l’opération « Midnight Hammer » ont largué quatorze bombes GBU‑57 (MOP) sur les complexes nucléaires de Fordo, Natanz et Ispahan, les 21 et 22 juin 2025. D.R.

Au moment où ces lignes sont écrites, début juillet, rien ne suggère que le bombardement américain de l’Iran conduira à un déploiement de troupes dans un conflit auquel le président est pressé de mettre fin. Ni que les fidèles de Trump pourraient l’abandonner ou même le critiquer. La situation est bien résumée par Christopher Nicholas, conseiller politique chevronné des républicains en Pennsylvanie : « La majorité de sa base sera parfaitement à l’aise avec l’intervention militaire, pourvu que celle-ci s’arrête à peu près là. »

Trump peut-il se présenter comme un artisan de la paix ? À 5 h 30, le 24 juin, sur le point de partir pour le sommet de l’OTAN à La Haye, il essaye de se placer au-dessus des deux adversaires, en déclarant aux journalistes présents : « Nous avons essentiellement deux pays qui se battent depuis si longtemps et avec tant d’acharnement qu’ils ne savent plus ce qu’ils foutent » (« …what the f*ck they’re doing »).Au-delà de ses fanfaronnades et de ses grossièretés, les spécialistes du trumpisme sont convaincus que le président est déterminé à éviter d’impliquer les États-Unis dans une lutte entre des ennemis jurés.

Dans un article récent publié dans Foreign Affairs, Lawrence D. Freedman, professeur émérite d’études de guerre au King’s College de Londres, voit dans l’échec de la guerre américaine en Afghanistan (la plus longue de l’histoire des États-Unis), comme dans l’enlisement de la guerre russe en Ukraine, la preuve que la force armée est incapable d’apporter des victoires décisives : selon lui la puissance militaire se transforme de nos jours inmanquablement en impuissance politique[1]. Trump n’a pas dit autre chose, le 13 mai, lors d’un discours capital à Riyad, en Arabie saoudite, durant lequel il a explicitement rejeté l’idée selon laquelle des changements positifs au Proche-Orient pourraient être imposés par la force. Il est donc très peu probable qu’il aille plus loin dans son soutien opérationnel à Netanyahou ou qu’il fasse quoi que ce soit de nature à lui aliéner une base qui continue de soutenir avec autant d’enthousiasme.


[1] « The Age of Forever Wars », Foreign Affairs, 14 avril 2025.

À double face

À la recherche de l’esprit français


L’esprit n’est d’aucune terre en particulier, et s’il se trouve circonscrit à un village (ou un pays), il déchoit. Mais l’esprit n’existe pas non plus dans une pureté désincarnée, sans aucun lien avec des paysages, des rues, des souvenirs, et surtout sans la langue où il se déploie. La particularité de l’esprit français est d’avoir promu les jeux de l’esprit, la beauté de l’esprit : l’esprit pour lui-même. Dans Le Livre du courtisan, Castiglione regrette, au début du XVIe siècle, la brutalité des Français qui méprisent les lettres et n’aiment que la noblesse des armes. La France, sur le modèle italien, se transformerait bientôt en une société de cour, où l’agglomération des courtisans, la prétention, la vanité et l’ennui allaient donner au mot d’esprit, et à l’esprit, une place nouvelle. Qui n’a pas d’esprit en France se confond avec le vulgaire, fût-il un Grand de la République. La France a pris la dimension d’un salon universel, où l’on pique (« ça pique ! »), où l’on débite des paradoxes, où l’on aime critiquer des films, des matchs (« on refait le match »), des livres (« t’en as pensé quoi ? »). Dans le meilleur des cas, l’esprit français est un bretteur faussement grincheux, animé par le goût de la bagarre, le sens de la drôlerie et le panache des causes perdues. Dans le pire des cas, cet esprit n’a rien d’élevé : « Les autres parties du monde ont des singes ; l’Europe a des Français. Cela se compense » (Schopenhauer).

Croûtes et confidences

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Dans Une confession, Véronique de Bure nous parle de son expérience professionnelle auprès de Jean Guitton tout en nous racontant une histoire d’adultère plus obscure.


Charmant et émouvant : il n’est pas de termes plus justes pour qualifier le bref, juvénile et très féminin compagnonnage intellectuel que vécut, quelque temps avant sa mort en 1999, l’académicien français et confident de Paul VI, Jean Guitton, avec la jeune éditrice Véronique de Bure.

À dire vrai, le « clou » du livre n’a qu’un maigre intérêt, à l’image de bien des tromperies conjugales. Notez-le au passage : adultère est un mot laid, bien peu sexy, qui rime avec adulte, austère, sévère ; quant à adultérin, il consomme avec vipérin. Non, ce qui intéresse en l’occurrence, c’est ce que nous révèle de lui-même un homme alerte, espiègle parfois, à en être presque coquin, content de lui mais sans orgueil, et dont la curiosité envers la jeunesse est redoublée lorsque cette dernière s’incarne en une douce jeune fille à particule. Oui, le snobisme faisait partir des gentils travers de notre homme quand ce n’était pas la haute idée qu’il se faisait de sa peinture.

A lire aussi, Emmanuel Tresmontant: Le goût du large!

Visiez-vous l’Académie ? Il convenait, lorsque vous lui rendiez visite, de ne pas tomber dans le piège des compléments littéraires. Il vous laissait parler pour, enfin, vous couper en vous disant : Raté ! De l’avis général, ses portraits étaient des croûtes (sauf peut-être, selon nous, cette sorte de diptyque de Pascal et Spinoza où, tout, en montrant une forte ressemblance, le visage du premier de nos philosophes montre des traits concaves et le second, convexes), mais c’était de l’artiste-peintre qu’il voulait que l’on dise grand bien.

‘‘Autrice’’ étant à bannir, nous dirons que notre jeune auteur réussit d’autant mieux à se souvenir du babil de ce sage que ni l’un, ni l’autre ne se prennent au sérieux. On a plutôt affaire à un grand-père dont la chasteté, de fait, n’éteint nullement mais plutôt active et réactive un œil rieur d’une incroyable lucidité, le mot, pour un peu, flirtant avec lubricité.

« Autorisée », ou non, une future biographie de Jean Guitton devra faire grand cas des anecdotes à la fois doctes, amusées et amusantes sur un sage se confiant, dans ces derniers temps, à celle qui était peut-être pour lui comme sa petite-fille rêvée.

Véronique de Bure, Une confession, Flammarion, 185 p.

L’ère de la calomnie

Le président d’Avocats sans frontières accuse Le Monde, l’AFP et France Inter de plaider en faveur du Hamas


Qui aurait pu croire qu’un jour le Hamas tiendrait la plume de journalistes devenus ses auxiliaires ? J’affirme que ce moment est survenu.

Il y a d’abord Le Monde, dont la spécialité est d’aller recueillir les accusations de l’extrême gauche israélienne, qui n’a rien à envier aux autres extrêmes gauches mondiales. Alors que depuis près de deux ans, chaque jour, le quotidien vespéral publie les états d’âme, parfois honorables, de pacifistes israéliens s’étalant au long des pages, je mets au défi le journal à la dérive sans fin, de montrer une fois, rien qu’une fois, les états d’âme d’un Palestinien après le Grand Pogrom.

C’est dans le creux de cette différence immorale de traitement que gîte l’impossibilité d’un règlement.

J’affirme surtout que l’AFP, devenue une sorte de Pravda capitaliste, a décidé de considérer les affirmations propagandistes de l’organisation terroriste islamiste comme dignes de foi, et qu’elle les reprend sans la moindre précaution. Dans le même temps, elle néglige délibérément de publier les commentaires ou démentis d’une armée d’un État démocratique agressé.

A lire aussi : Amir, victime d’un festival de haine anti-israélienne en Belgique

Pour entrer plus avant dans les détails, peu après le 7-Octobre, l’AFP – suivie par Le Monde et quelques autres médias – a fait le choix plus que discutable de publier les bilans victimaires de la « Défense civile » de Gaza ou du « ministère de la Santé » du même territoire. Mais je dois ajouter que ces médias eurent l’honnêteté professionnelle et morale minimale de préciser que ces organisations précitées aux noms humanitaires ronflants… étaient dirigées par le Hamas, ce que tout le monde savait au demeurant.

Seulement, sauf à être crédule, on pouvait imaginer que des informations livrées par une organisation pogromiste qui joue à qui perd-son-enfant-gagne tout en protégeant ses tueurs sous les écoles, ne se caractériseraient pas par une priorité donnée à la vérité. Qu’importe, telle fut l’habitude observée.

Mais il y a pire à présent. Car j’affirme solennellement que depuis plus d’un an, l’AFP, Le Monde, France Inter, France Info et consorts délivrent à chaque heure, et sans précautions, les accusations et bilans mensongers de la « Défense civile », sans publier les démentis de l’armée israélienne, mais SURTOUT en cachant désormais que le Hamas se cache en réalité derrière. On comprend bien que ce mensonge par omission dissimule à peine le désir de renforcer la crédibilité d’une organisation qui, sinon, en serait totalement dénuée.

Derrière le mensonge se cachent d’encore plus tristes réalités.

La première est que nombre de journalistes ne sont plus que des militants, qui accordent plus d’importance à leur combat idéologique qu’à leur devoir professionnel de publier la réalité factuelle.

La seconde est leur détestation pathologique d’Israël.

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Une Somme de tueurs!

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Avec Il pleut des tueurs, Dominique Zay propose un thriller vif et inquiétant, ancré dans la bonne ville d’Amiens où il s’en passe des belles…


L’énigme d’un thriller peut déjà être difficile à résoudre lorsqu’il n’y a qu’un suspect et/ou un criminel. Dans Il pleut des tueurs, dernier roman policier de Dominique Zay, les assassins ou les assassins potentiels, on ne les compte plus tant ils sont nombreux ; d’où le titre.
Ancrée à Amiens, dans la Somme, que raconte l’histoire ?

Organisation mafieuse

Quand Clara, la nièce adorée d’Alban, est laissée pour morte, victime d’un chauffeur fugitif, il fait appel à son vieux camarade Yan Zadek, un détective privé très efficace mais un brin particulier. Le principal suspect, Julien Bacquet, est déjà inquiété pour un féminicide (le samedi 9 mars 2024, il a zigouillé sa légitime, Guyslaine Bacquet), meurtre dont s’accuse un certain Bruno Rousselot. On comprend que là, l’affaire se complique. La sexy sexa, Eugénie Klein, 68 ans, veuve depuis quinze ans d’un vieux mari riche et cardiaque, tente d’expliquer à Yan que Rousselot n’a rien à se reprocher puisque, le soir du méfait, « il était avec moi… dans mon lit. » Il est vrai que le Bacquet se révèle un personnage carrément horrible et peu recommandable : « Le peu de cas qu’il faisait de la nature humaine avait davantage diminué derrière les barreaux au contact de plus pourris que lui, et la seule chose qui trouvait grâce à ses yeux aujourd’hui résidait dans la visite de cette escort-girl ukrainienne qui venait le masser intégralement tous les samedis. » Coupable idéal ? Trop idéal ?

A lire aussi: Dans la peau du poète Constantin Cavafy

Zadek cherche, s’accroche en bon enquêteur têtu. Il finit par découvrir, grâce à la toujours appétissante Eugénie, que derrière tout ça se cache une terrible organisation criminelle, une mafia sans morale aucune, Miss T, « c’est Thémis à l’envers, miss T/ Thémis, la déesse de la justice chez les Grecs, la loi divine (…) »

Bref et brutal

Pour certains, on s’en doute, cela se terminera très mal, très très mal… Yan, lui, à la faveur d’une promenade dans un parc, connaîtra un véritable coup de foudre pour Mona, une délicieuse métisse, qu’il retrouvera un peu plus tard et qui deviendra sa maîtresse : « Comme dans la chanson de Souchon, l’odeur de Mona serait dorénavant son alcool profond ».

Ce roman de Dominique Zay séduit par sa rapidité, ses chapitres uppercut d’une brièveté vivifiante, et par son intrigue bien ficelée. De plus, la ville d’Amiens y est parfaitement bien décrite jusque dans ses plus obscurs recoins. Un bon polar.

Il pleut des tueurs, Dominique Zay. Aubane éditions ; 198 pages.

Le patriotisme français, ce reproche fait aux juifs

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Marseille, novembre 2023 © SOPA Images/SIPA

Alors que son mouvement a été critiqué par le rabbin de Metz lors d’une cérémonie commémorative, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé un mélange des genres et exprimé le souhait de « rétablir le droit à la laïcité dans les cérémonies publiques ». Pourtant, l’islamo-gauchisme et le rejet de la laïcité par de nombreux militants de la France insoumise commencent, par ailleurs, à être bien documentés.


L’ire de Jean-Luc Mélenchon a été déclenchée par le Grand Rabbin de Metz et de Moselle, Bruno Fiszon, au point que l’ancien parlementaire et ministre considère comme « une provocation religieuse la mise en cause de LFI » lors de la cérémonie de commémoration de la rafle de Vel d’Hiv, le dimanche 20 juillet dernier au Fort-Queuleu.
Pour sa part, le Grand Rabbin de Metz et de Moselle, titulaire d’un diplôme de vétérinaire et spécialiste des questions relatives à l’abattage rituel, considère qu’en procédant à « l’instrumentalisation du conflit israélo-palestinien, La France Insoumise (…) attise les braises. » Il a exprimé ainsi la crainte croissante de nombre de juifs de l’hexagone.

Français juifs contre Nouvelle France

Un représentant institutionnel ou un rabbin doivent-ils, dans notre République, limiter leur parole à la déploration des juifs morts pendant la Shoah, lors de manifestations publiques auxquelles sont conviés tous les élus, lesquels communient sans exception dans le refus légitime de toute résurgence d’un antisémitisme de persécution tel que la France le connut et le subit ?
Devient-il, maintenant, inapproprié de s’inquiéter avec vivacité de la liaison perfide entretenue par certains entre les agissements d’Israël et les conséquences pour les juifs de France ou d’autres pays ? Derrière cette interrogation se tapit la clé d’une haine qui, au passé comme au présent, frappe des concitoyens en raison de leur confession car ils se revendiquent patriotes.

A lire aussi, Céline Pina: Quel antisioniste êtes-vous ?

Les Français juifs anciens combattants de la Première Guerre mondiale avaient manifesté un patriotisme infiniment supérieur à celui des collaborateurs zélés des nazis, qui procédaient à leur arrestation. L’affaire Dreyfus avait déjà démontré comment un officier de commandement coupable de trahison avait tout tenté pour faire condamner un patriote juif et français.
« Français d’abord et Juif d’abord », écrivait de manière lumineuse le Grand Rabbin Haguenau voici un siècle. Or Jean-Luc Mélenchon espère pour la France une autre langue et un autre peuple. Les juifs, en accord ou non avec le pouvoir politique en situation de gouverner, ont toujours aimé la France telle qu’elle est, participant à leur pleine manière à la vie nationale.
Se télescopent ainsi deux conceptions se situant aux antipodes l’une de l’autre, voire radicalement différentes. Ceux qui veulent transformer la France et changer sa nature ne peuvent supporter ceux qui, souvent venus d’ailleurs comme beaucoup d’autres, aiment notre pays comme il est, car ils mesurent le bienfait que représente son existence.

Une mécanique perverse est enclenchée

Dès lors, l’attaque contre les juifs de France va reposer sur un syllogisme: prendre appui sur les agissements d’Israël avec lesquels tout juif est supposément en accord pour discréditer ceux qui, dans notre pays, croient en notre vie républicaine telle qu’elle est, avec ses lignes de force, ses qualités et ses défauts. Cela accréditera l’idée qu’ils deviennent nécessairement attaquables.

A lire ensuite, Elisabeth Lévy: Philippe Val, sioniste d’honneur

Cette stratégie, parce qu’elle se révèle efficace auprès des esprits assiégés par les images de Gaza, est particulièrement perverse, dangereuse et nuisible. Que ses concepteurs ne s’étonnent pas des dégâts qu’ils peuvent encore causer, ni de devoir en répondre. Chacun peut intégrer que les immenses souffrances passées des juifs en France appellent la retenue.
C’est explicitement ce qu’a rappelé le Grand Rabbin Bruno Fiszon, pendant le temps dédié d’une commémoration lors de laquelle il n’était pas interdit, même aux plus sectaires, de réfléchir. Rappelons qu’il n’est pas obligatoire d’être antisémite pour faire profession d’antisémitisme, catégorie dans laquelle se complaisent des velléitaires prétendument opposés.

QUE SONT LES JUIFS POUR LA FRANCE ?

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Corruption sur Terre et paranoïa dans les airs

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Des femmes iraniennes passent devant un immeuble ciblé pendant la guerre de 12 jours entre l’Iran et Israël, dans un quartier résidentiel de Téhéran, le 19 juillet 2025 © Pacific Press/Shutterstock/SIPA

À Téhéran, les mollahs aux abois n’aiment pas les espions… ni les opposants, ni les trafiquants de drogue, ni les chansons tristes. Les religieux tentent de réactiver la fibre nationaliste et pendent à tour de bras dans les prisons.


Il y a tout juste un mois, le monde retenait son souffle alors que l’escalade entre Israël et l’Iran battait son plein. Au cours de ce que l’on peut appeler désormais la guerre des 12 jours, la République islamique a déploré la mort de mille de ses ressortissants, dont quelques figures majeures du régime.

Devant la Chine à la fin de l’année ?

À l’intérieur, la répression ne faiblit pas. Le 25 juillet dernier, Mehdi Hassani et Behrouz Ehsani ont été exécutés. Les deux hommes avaient été condamnés à mort en janvier pour « rébellion armée », « inimitié envers Dieu » et « corruption sur Terre », en lien avec leur appartenance supposée à l’organisation d’opposition des Moudjahidines du peuple (MeK), au terme d’un procès qui a duré cinq minutes. Ils s’ajoutent à la liste des 612 détenus exécutés au cours du premier semestre 2025.

A lire aussi, John Gizzi: B-2 or not B-2

Le chiffre est deux fois plus élevé que pour le premier semestre 2024 (297 exécutions alors). De quoi écraser le rival saoudien dans ce macabre exercice, et égaler ou dépasser la Chine à la fin de l’année. L’agence Fars News, proche des Gardiens de la révolution, évoque le souvenir de l’été 1988, quand les opposants à l’ayatollah Khomeini, de la gauche aux royalistes en passant par les Moudjahidines du peuple, avaient été exécutés. En moins de trois semaines, entre 2 800 et 5 000 détenus avaient été abattus dans les geôles iraniennes.

Téhéran, nid d’espions

Plus de 40 % des personnes exécutées en 2025 l’ont été à cause d’activités liées à la drogue. Pour le reste des condamnés, il s’agit d’accusations « fourre-tout », comme celle d’« inimitié envers Dieu » ou de « corruption sur Terre », accusations tirées du droit islamique, bien utiles pour mener la guerre aux opposants politiques et aux minorités religieuses. La guerre des 12 jours n’a pas freiné la paranoïa au sein de la République islamique à l’égard de ceux qui collaborent « avec des États hostiles », bien au contraire : plus de 700 Iraniens et un nombre indéterminé de ressortissants étrangers ont été arrêtés, d’après les médias persans.

Les autorités iraniennes ont par exemple affirmé avoir démantelé un réseau d’espionnage lié au Mossad, qui aurait été impliqué dans des assassinats ciblés de scientifiques, des sabotages industriels et des infiltrations de sites militaires et nucléaires, avec des agents non pas iraniens ou israéliens… mais indiens, pour certains techniciens, logisticiens ou ingénieurs civils employés à Bahreïn, aux Émirats arabes unis ou à Oman, ayant un accès logistique, administratif ou informatique à des structures régionales stratégiques.

La mue nationaliste des mollahs

Il faut dire que même les paranoïaques ont de bonnes raisons d’être inquiets. Si l’objectif israélien de renverser le régime de Téhéran a échoué, l’opposition perse continue de réclamer des changements. L’opposant réformiste Mir Hossein Moussavi a publié, le 10 juillet, une déclaration appelant à la libération des prisonniers politiques et à la rédaction d’une nouvelle Constitution. Il a été rejoint par 800 personnalités politiques. La déclaration se dissocie de toute allégeance à une puissance étrangère ennemie, proposant une troisième voie, « celle du peuple, qui trace une route indépendante, pour conjurer la répression et l’autoritarisme tout comme la guerre et l’agression extérieure ».

A lire aussi, Gil Mihaely: Iran: le déclin de l’empire des Mollahs

En réaction, Téhéran semble « iraniser » sa propagande depuis la guerre des 12 jours, ajoutant aux références chiites d’autres plus nationalistes. C’est ainsi que des chants patriotiques datant de l’époque de l’invasion anglo-soviétique ressurgissent. « Aujourd’hui, Iran et islam ne font qu’un », a soutenu un clerc ultra-conservateur en marge des festivités de l’Achoura.

Face à la menace extérieure et aux dissensions internes, le régime doit activer la fibre nationale et encourager l’union sacrée.

Au lendemain de la guerre du Golfe, Saddam Hussein avait dû « réislamiser » le régime baasiste (ajoutant même les mots Allahu akbar sur le drapeau) pour tenir une nation rendue exsangue par les sanctions internationales ; trente-cinq ans plus tard, l’ennemi iranien doit faire le chemin inverse, pour résister à la double pression de l’extérieur et de l’intérieur.

Quand l’hypocrisie et la moraline façonnent la mode vestimentaire

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Fashionistas à Paris, mars 2019 © Mauro Del Signore/SIPA

Depuis plusieurs mois, l’enseigne à bas coût chinoise Shein concentre les critiques – pour le plus grand bonheur de toutes ses concurrentes finalement guère plus vertueuses.


Les rapports d’associations et d’ONG se multiplient pour condamner les pratiques du géant Shein et d’autres plateformes de la mode à bas-prix. Dernier en date : une enquête d’Action Aid France et de China Labor Watch, selon laquelle l’emploi d’une main d’œuvre chinoise à bas coût, des conditions de travail dégradées ou encore l’absence de droits sociaux dans les usines de production mandatées par Shein sont les conséquences d’un système qui invite à toujours plus de rentabilité. Mais en pointant du doigt Shein, on évite de mettre l’accent sur les enseignes beaucoup moins vertueuses. Les consommateurs ne méritent-ils pas des enquêtes plus objectives et mettant les idéologies de côté ?

Inefficacité des bons sentiments

Qui n’a jamais vu, ces dernières années, des campagnes choc montrant des hommes et des femmes travaillant d’arrache-pied derrière des machines à coudre pour produire des vêtements destinés à habiller les quatre coins du globe ? Ces images ont pour but de sensibiliser, à raison, l’opinion occidentale quant au respect des droits du travail en République populaire de Chine. Pourtant, si les images heurtent, force est de constater qu’elles n’ont guère changé les choses. Notre société fait part d’une indignation qui ne sera que passagère puisque le lendemain, la plupart d’entre nous commandera sur Shein, Temu, Kiabi ou Amazon, la dernière paire de baskets à la mode.

A lire aussi, Jean-Jacques Netter: Le Mur des comptes

Inefficaces, ces charges à l’encontre de certaines enseignes chinoises sont par ailleurs souvent injustes. C’est un fait peu connu, mais si la « fast fashion », et plus directement l’industrie textile chinoise à travers Shein, est depuis longtemps dans le viseur des ONG, c’est pourtant elle qui a mis en œuvre un code de conduite qu’elle impose à l’ensemble de ses fournisseurs.

L’enseigne propose de nombreuses initiatives visant à l’amélioration des conditions de travail et à l’évolution des normes et des standards au sein d’un pays comme la Chine. Elle s’y oblige, pas nécessairement animée par un sens de l’éthique supérieur, mais par pur pragmatisme, car elle se sait scrutée en raison des controverses passées, présentes et à venir dans un monde où le moindre faux-pas est exploité par la concurrence et/ou par des idéologies ayant un agenda politique à respecter.  

L’écologie détournée

Mais c’est en France que l’on vient porter le plus vif écho à la polémique grâce au relai médiatique et à l’influence grandissante dans le lexique commun de mots comme « résilience » et « sobriété ».  Bien sûr qu’il faut mettre tout en œuvre pour réduire l’empreinte carbone, pour veiller à ne pas exploiter davantage les énergies fossiles, bien sûr qu’il faut améliorer les conditions de travail et les droits des citoyens, qu’ils soient Chinois ou non, mais on ne pourra le faire en se basant sur des rapports tronqués et artificiels. « On voit la paille dans l’œil du voisin mais pas la poutre dans le sien… » dit l’Évangile de Luc. Ainsi, il conviendra d’éviter les interrogations fâcheuses, celles qui piquent nos sociétés plutôt que des pays lointains. Pourquoi les gens consomment-ils de la mode à bas-prix ? Peut-être parce qu’ils n’ont plus les moyens de faire autrement. Quelles raisons expliquent l’abandon du moindre projet de relance, de restauration d’une filière textile en France ?  

Les vrais problèmes sont mis de côté

Songeons-nous un seul instant à ces problématiques alors que tant d’énergies, d’efforts, d’actions et même d’argent sont diligentés pour aboutir à une enquête à charge de plusieurs mois sur le « mastodonte chinois du textile ultra bon marché. » C’est la croissance, la grande responsable pour ces idéologues et bien-pensants qui estiment que les activités économiques sont inconciliables avec la responsabilité sociétale des entreprises. La sémantique utilisée est celle de la culpabilité… Messieurs les responsables de Shein, le jury révolutionnaire des Fouquier-Tinville vous condamne à la perpétuité incompressible tout comme il condamne les citoyens à adopter un comportement en phase avec leur doxa de l’éco-suicide. Pire encore, ces mêmes contempteurs du libéralisme affirment que Shein rendrait « obsolète le principe même de collection d’été ou d’hiver. » On croit rêver, ces gens-là n’auraient-ils jamais acheté pendant les soldes d’été ou… d’hiver ?

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Le « méchant capitaliste » peut proposer « des prix dérisoires grâce à l’exploitation d’une main d’œuvre invisible »… Les propos sont confondants de candeur et de béatitude. L’hypocrisie veut que ces personnes d’Action Aid France ou encore du China Labor Watch, souvent des bobos huppés des centres-villes, fassent le choix de fringues non-lavées et déchirées… Pour faire « stylé », tu comprends ? Alors on va s’employer à nourrir nos consciences de ce qui a de plus beau au fond de leurs âmes : « Travailleurs et travailleuses, unissez-vous ! Non à l’exploitation à grande échelle, à l’absence de sécurité sociale et aux discriminations de genre… » Oui, même le genre y passe dans ce rapport digne d’une fourberie de Scapin. On y précise que Shein est le 100ème plus gros émetteur de CO2 dans le monde mais on ne parle pas des 99 autres qui la précèdent. On y critique les nouveaux produits, on fait des comparaisons insolites entre une plateforme et une autre, on y stipendie la supply chain, l’existence d’entrepôts en Pologne ou en Italie. Excusez du peu mais aurions-nous encore le droit de respirer demain ? 

Trois piliers sont nécessaires pour changer nos comportements et nos usages : la relance industrielle en France garantissant la reconquête du pouvoir d’achat des Français, le retour à une véritable éducation reposant sur des valeurs et des principes et la mise en œuvre d’une société de consommateurs éclairés quant à ses prochains achats, quant à ses choix, économiques, écologiques ou sociétaux. Sur ce dernier point, on serait en droit de se demander pourquoi on s’abstient de critiquer les marques françaises qui fabriquent leurs produits en Chine, ne faisant guère mieux que Shein ? On a pu l’observer, ces derniers mois, avec la polémique à propos de Decathlon dont l’un des fournisseurs employait de la main d’œuvre issue de la minorité musulmane ouïghoure particulièrement persécutée en Chine. Le silence règne. A contrario, il faudrait inviter ces fournisseurs à réviser leurs standards pour améliorer les conditions de vie de leurs salariés. Dans le grand jeu de la concurrence internationale, il serait intéressant de déchiffrer les raisons précises, cachées et obscures de ce type de rapport. Pour faire plus court, à qui profite le crime ? Une question d’une mode pas vraiment éphémère…

Jacques Benoist-Méchin: l’ordre et le désir

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Perrin.

Qui pour rassembler Proust, Pompidou, Hitler et le colonel Kadhafi dans un même salon ? Réponse : un écrivain collaborationniste, arabisant et homosexuel, baron d’Empire, qui répond au nom de Jacques Benoist-Méchin (1901-1983).

Éric Roussel, le biographe des présidents de la Ve République, raconte les mille et une vies de cet orientaliste amoureux des lettres et des beaux plafonds dans Jusqu’au bout de la nuit, aux éditions Perrin. L’ouvrage n’est pas une réhabilitation ; elle aurait été de toute façon difficilement publiable. Ses faits de collaboration et son « intelligence avec l’ennemi » le rendent « indigne de la nation » en 1947, après un procès en Haute Cour d’épuration. Il échappe de peu au peloton d’exécution… Fait original : il connaît une seconde vie et une seconde gloire après-guerre, cette fois littéraire.

Jacques Benoist-Méchin fut d’abord un jeune homme de bonne famille, rêveur, timide et emprunté. Sa famille bourgeoise et mondaine néglige un peu son éducation. Le milieu littéraire parisien le repère et l’adopte, remarquant ses qualités de polyglotte. Dans ce Paris d’avant-guerre, délicieusement littéraire et cosmopolite, où l’on croise Hemingway, Joyce, Fitzgerald ou Ezra Pound place de la Contrescarpe, il est bien vu de pouvoir, comme lui, traduire Kafka et Joyce. Il croise le légendaire magnat de la presse William Randolph Hearst (lequel a inspiré le personnage de Citizen Kane), mais s’en détourne vite, un peu écœuré par le management à l’américaine et la quête permanente du scoop journalistique. « Ses vrais talents sont ailleurs », précise Roussel. Cette expérience professionnelle nourrit un profond dégoût pour le Nouveau Monde : « J’étais allergique à l’Amérique (…) tout était calculé en fonction de cette espèce d’optimisme béat qui veut que tous les talents, toutes les vertus soient récompensés, que le bien c’est d’être riche, le mal d’être pauvre, que quelqu’un de pauvre est forcément mauvais… » La vieille Europe sera son seul secours.

L’Europe, l’Europe…

Benoist-Méchin rêve d’Europe. En lecteur cosmopolite, il aimerait que le vieux continent s’unisse et affirme sa culture commune. En 1918, il supplie son père – il n’a que 17 ans – de faire jouer ses relations parisiennes pour adoucir le traité de Versailles et empêcher un démembrement de l’Allemagne qui conduirait « à une nouvelle guerre mondiale ».

L’occupation de la Rhénanie l’indigne. Un séjour en Allemagne achève de le « germaniser ». Son Histoire de l’armée allemande en 1936 lui ouvre les portes des cercles dirigeants nazis : il donne des conférences à partir de ses travaux sur l’armée allemande devant le gratin du IIIe Reich. Précoce, il commence presque la collaboration en 1938. Benoist-Méchin bascule et adhère au PPF de Doriot, le premier (et presque le seul) parti fasciste français. La défaite vient, et Benoist-Méchin entonne l’air du « Je vous l’avais dit » : « Ayant perdu à un degré inimaginable le sens du réel, [la République française] n’a jamais voulu regarder les choses en face, ni prendre conscience des problèmes qu’elle avait à résoudre. Par un fléchissement inexcusable de sa raison et de sa vitalité, elle s’est constamment refusée à tout effort, à tout sacrifice. » 1936, le Front populaire, l’esprit de jouissance, les congés payés, l’oisiveté prolétaire sont, selon lui, responsables de la défaite militaire. L’antienne est bien connue. Marc Bloch lui réglera son sort dans L’Étrange Défaite.

Non pas collaborer, mais « cobelligérer »

Quand De Gaulle fait le pari, le 18 juin, d’une victoire anglo-saxonne, Jacques Benoist-Méchin et Pierre Laval font à l’inverse le pari d’une victoire allemande. Il n’y a pas de fascination romantique pour les charmes frelatés du fascisme, comme chez Drieu la Rochelle ou Robert Brasillach ; c’est d’ailleurs là son originalité parmi les écrivains collabos. Avec franchise – et sans doute froideur logique – il pense que la France doit se positionner pour l’après-guerre du côté des gagnants, c’est-à-dire « avec son vainqueur » et entrer en guerre aux côtés de l’Allemagne, ou « cobelligérer » et assumer un véritable basculement d’alliance. Ce qui revient à aller plus loin que Pétain. Il assiste Laval au ministère. Le calcul était un peu fou : rien, dans l’attitude constante des autorités d’occupation, ne ressemblait à un traitement de faveur pour la France… Condamné à mort par la Haute Cour en 1947, il végétera à Clairvaux avant de sortir en 1954 au bénéfice d’une grâce générale. La réhabilitation viendra plus tard. Soixante jours qui ébranlèrent l’Occident, sans renier grand-chose, raconte le déclenchement de la guerre, célèbre le génie politique du général de Gaulle et trouve quelques lecteurs dans le gratin politique.

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Déçu de l’Europe, Jacques Benoist-Méchin passe à l’Orient et devient un spécialiste reconnu du monde arabe. Il se fait aussi l’avocat passionné de la cause palestinienne. La lecture d’Un printemps arabe aurait influencé le durcissement de la position du général de Gaulle envers Israël. Il est introduit un peu partout : à Alger, en Libye, où Kadhafi le reçoit sous sa tente en plein désert. Par beau temps, il bronze et divague ; il rêve d’une fusion entre l’Orient et l’Occident, ou d’une conversion de l’Europe à l’islam. Autant frotter la lampe d’Aladin… Divagateur, narrateur, il excelle cependant dans le genre de la biographie historique – négligée par l’Université – et compose une série de portraits de passeurs entre Orient et Occident : Lyautey, Bonaparte, Cléopâtre, Alexandre le Grand…

Roussel, psychanalyste de l’uniforme

La biographie d’Éric Roussel soulève et résout aussi quelques mystères savoureux. Benoist-Méchin a entretenu une relation d’un genre particulier et particulièrement inattendu avec Adrienne Monnier. Tous deux étaient homosexuels… On apprend qu’un enfant a été conçu et avorté. Joyce aurait ainsi changé la célèbre et magistrale fin d’Ulysse – laquelle est connue dans l’histoire littéraire pour avoir fixé le genre du monologue intérieur – sous les conseils de Benoist-Méchin. Surtout, on apprend comment il échappe à la mort en 1947. Malin, il avait quelques dossiers sous le coude.

Proust et Joyce, le Paris cosmopolite et l’Allemagne nazie, le pacifisme et la cobelligérance, Hitler et De Gaulle, Pompidou et Nasser, le grand Occident et l’islam, Cléopâtre et Kadhafi, la bohème et la centrale de Clairvaux… un tel mélange défie un peu l’entendement. Il faut le talent de biographe de Roussel pour déceler, dans l’apparent chaos, une unité de vie, ou plutôt une esthétique. Il y a chez Benoist-Méchin une pente, et presque une pulsion, vers l’ordre – non pas celui « juste » de Ségolène Royal – mais sensuel. L’esthète proustien des années de formation s’est dédoublé en un esthète de l’histoire et même en un esthète du pouvoir épris de virilité… Roussel psychanalyse délicatement l’homosexualité de Benoist-Méchin (dont faisait déjà état Patrick Buisson dans 1939-1945, années érotiques). L’intellectuel emprunté frémissait facilement devant les parades de bottes, les uniformes bien coupés et les gestes carrés de ces hommes de rue, nazis ou révolutionnaires panarabes, qui arrivent au pouvoir. De la brutalité à l’autorité : un pouvoir aux accents phalliques et homoérotiques. « Vous n’imaginez pas combien Kadhafi jeune était beau », confie-t-il. Benoist-Méchin était doué d’une lucidité intime sur les êtres, mais d’un sens politique souvent désastreux. Le tragique des impuissants que le pouvoir fascine…

416 pages

Jusqu'au bout de la nuit: Les vies de Jacques Benoist-Méchin

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Ces dames à l’heure du Tea

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© Jonathan Raa/Sipa USA/SIPA

Aux États-Unis, l’application réservée aux femmes controversée Tea vient de subir une fuite massive de données affectant environ 72 000 images, dont des selfies et pièces d’identité utilisées pour la vérification des utilisatrices. Tea permet de partager anonymement des informations sur les hommes célibataires, afin d’identifier leurs éventuels comportements « problématiques ».


Ces jours-ci, une application américaine réservée aux femmes en mal de rencontres via internet fait beaucoup parler d’elle. Tea est son nom. Voilà quelques jours, ses dirigeants se glorifiaient d’avoir enregistré plus de quatre millions d’utilisatrices. En fait, ce chiffre des plus flatteurs risque bien de se voir sérieusement revu à la baisse, des piratages intrusifs en quantité ayant été détectés. Ainsi le veut la modernité galopante de ce siècle. À peine croit-on avoir mis en place un cybersystème inviolable qu’il se trouve aussitôt allègrement violé.

Adopte un mec

Mise à la disposition exclusive de la gent féminine, l’application Tea a été créée en 2023 par un certain Sean Cook. Le but : « donner aux femmes les outils dont elles ont besoin pour faire des rencontres en toute sécurité dans un monde qui néglige leur protection. » L’intention est louable, même si on ne peut s’empêcher de considérer qu’il y aurait comme une légère contradiction à rechercher la sécurité maximale tout en s’aventurant à titiller Cupidon du côté de parfaits inconnus. Sans doute faut-il croire que la réalisation de certains fantasmes féminins aura toujours des raisons que la raison ne connaît pas.

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Donc, la dame en recherche s’inscrit sur Tea en envoyant un selfie, et l’application va se charger de l’informer sur le degré de dangerosité, d’insécurité, de toxicité de ou des individus qu’elle a sélectionnés sur tel ou tel site de rencontres. Le type est-il marié, a-t-il un casier judiciaire, est-il sur plusieurs plans du même tonneau à la fois, d’autres femmes ont-elles eu affaire à lui et qu’en disent-elles… Un détail amusant : cela marche un peu comme à la plage avec drapeaux de couleurs. Drapeau vert, baignade autorisée, rouge s’abstenir…

La sphère masculiniste remontée

On s’en doute, tout cela n’est guère du goût de ces messieurs. Ils se dressent bec et ongles contre l’application. « Atteinte à la vie privée, dépotoir à ragots, fausses informations… » Tout cela, qui plus est, dans leur dos, à leur insu puisque l’accès leur est strictement interdit.

Il est vrai que, pour certaines qui n’auraient pas trouvé auprès de tel partenaire de rencontre toute la satisfaction qu’elles en espéraient, la tentation de régler leurs comptes pourrait être forte. À chacun de nos lecteurs, à chacune de nos lectrices, d’imaginer la teneur de commentaires inspirés par le dépit, la jalousie, la rancœur ou encore un vieux fonds de misandrie plus ou moins taquine.

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Mais à la vérité, ne serait-il pas de très longue tradition que des dames, entre elles, à l’heure du thé par exemple, s’échangent ce genre de confidences, volontiers acerbes, ironiques, graveleuses ? Nous avons cette scène de salon, au XVIIIème siècle, où, soudain, une marquise, entourée de dames, lâche cette question qui manifestement la démangeait « Pensez-vous que Monsieur le Conseiller soit une bonne jouissance ? » Tea n’aurait donc pas inventé grand-chose. De tous temps semble-t-il les femmes ont parfaitement su, d’un mot, d’un trait, nous étiqueter, nous marquer au fer. Cela est plus que certain. Que ce soit à l’heure du thé ou en toute autre circonstance.

Faites ce que je dis, pas ce que je fais…

Cependant, parmi les critiques énoncées à l’encontre de l’application, il en est une qui semble particulièrement pertinente. Si au lieu d’être féminine Tea était exclusivement masculine, et que les commentaires, les informations déballées aient pour cibles des femmes, elle aurait probablement été fermée dès le premier jour, sans tambours ni trompettes. À juste titre, d’ailleurs… Tel n’est pas le cas pour Tea.

Mais, au fond, l’important, l’essentiel n’est-il pas que ces dames continuent encore et toujours à parler de nous ? Si elles venaient à s’en abstenir, à en être empêchées, je crois que ce serait pour nous, vaniteux que nous sommes, comme une petite mort…

30 GLORIEUSES - LA DÉCONSTRUCTION EN MARCHE

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B-2 or not B-2

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Donald Trump à la Maison-Blanche, Washington, 21 juin 2025, après avoir ordonné l’opération militaire contre des sites nucléaires iraniens © Ron Sachs/CNP/AdMedia/SIPA

Pour les connaisseurs des relations entre l’Amérique et Israël, les deux pays ont évidemment coordonné leurs attaques. En épaulant son allié et ami Bibi pour détruire ou paralyser les capacités nucléaires iraniennes, Trump a renié son engagement de ne plus lancer l’Amérique dans des guerres. Mais face au succès affiché, sa base MAGA le soutient avec enthousiasme.


Tout s’est passé soudainement et rapidement. Le 21 juin, alors qu’il venait de faire savoir, quelques heures auparavant, qu’il prendrait sa décision de bombarder ou non les sites nucléaires iraniens « au cours des deux semaines à venir », Donald Trump donne l’ordre à sept bombardiers furtifs B-2 Spirit, chargés des fameuses bombes « Bunker Busters » pesant chacune 14 tonnes, de pilonner les usines d’enrichissement d’uranium de Fordo et Natanz. En réponse, Téhéran prétend avoir déjà déplacé son programme atomique et lance des frappes de représailles contre la base américaine d’Al-Udeid, au Qatar. Prévenus par les Iraniens, les Américains ne déplorent aucune perte.

Contradiction

L’enchaînement inattendu des événements laisse perplexe. Alors que les Américains viennent d’élire un président opposé à toute participation à des guerres extérieures, les États-Unis ont pris les armes aux côtés des Israéliens. Cette contradiction apparente soulève de nombreuses questions. Que savait Trump quand Netanyahou a lancé les premiers bombardements sur l’Iran ? Comment la base MAGA réagit-elle à des événements qui, selon certains commentateurs, sonnent le glas d’une promesse électorale ? Le président américain payera-t-il un prix politique ? Ses décisions de juin 2025 finiront-elles par plonger le Proche-Orient dans une conflagration générale, où les États-Unis seront de nouveau empêtrés ? On peut déjà répondre clairement à quelques-unes de ces questions.

Lorsque Benyamin Netanyahou lance, une semaine avant celle des Américains, une attaque aérienne contre l’Iran le 13 juin, tout le monde s’interroge : « A-t-il prévenu Donald ? » Ces deux-là sont de proches alliés. Au cours de son premier mandat, Trump a apporté un soutien inconditionnel au premier ministre israélien, allant jusqu’à transférer l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem. « Bibi », après quatre ans de relations de plus en plus difficiles avec Joe Biden, n’a pas caché sa joie de retrouver son vieil ami Républicain à la Maison-Blanche. Au cours des six premiers mois de la nouvelle administration Trump, les deux hommes se sont fréquemment rencontrés et peu de connaisseurs doutent qu’ils aient échangé au sujet de leurs projets pour l’Iran.

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Par exemple Larry Haas, ancien responsable de l’administration Clinton et ex-directeur de la communication du vice-président Al Gore : « Au cours de ces derniers mois, le président Trump a surpris Israël avec certaines de ses actions, en particulier l’accord séparé qu’il a conclu avec les rebelles houtis. Malgré tout, je n’arrive pas à croire que Netanyahou puisse lancer des frappes contre les installations nucléaires iraniennes sans en prévenir la Maison-Blanche. La frappe américaine ultérieure semble faire partie d’une stratégie américano-israélienne plus large visant à paralyser ou à détruire la capacité nucléaire naissante de l’Iran une fois pour toutes. »

Même son de cloche chez l’historien Irwin Gellman, auteur d’une biographie monumentale de Richard Nixon : « Tout comme Jack Kennedy et David Ben Gourion ont sans doute discuté de ce qu’Israël ferait à un ennemi potentiel, je ne doute pas un seul instant que Netanyahou ait discuté de son attaque initiale contre l’Iran avec Trump. » Il ajoute que les deux dirigeants sont « très complices. Du moins, dans l’esprit de Bibi ».

Reste à savoir ce que sera la réaction de la base MAGA après ce qui ressemble fortement à un reniement de l’engagement pris par Trump dès l’annonce de sa première candidature présidentielle il y a dix ans.

Le matin du 18 juin, soit trois jours avant les frappes américaines, Steve Bannon, ancien conseiller de Trump, et porte-parole de l’aile radicale du courant MAGA, donne une conférence de presse matinale à Washington, organisée par le très réputé Christian Science Monitor. Il prône la prudence : « Si nous sommes forcés d’attaquer l’Iran militairement, il ne faut pas le faire demain, après-demain ou le jour suivant. Le président devrait prendre son temps et bien réfléchir en consultant ses conseillers. » Se déclarant ami d’Israël, l’animateur du podcast très populaire « War Room » critique néanmoins l’attaque des installations nucléaires par Tsahal, qu’il voit comme une tentative irresponsable de « changer » le régime iranien, voire de le « détruire ».

Si Bannon n’a pas tort quant à l’objectif ultime de Netanyahou, il se trompe sur la décision de Trump. Il rappelle qu’en 2016, nombre d’experts ont annoncé la défaite de Trump lors de la primaire de Caroline du Sud parce que son opposition aux « forewer wars» guerres sans fin » ( était selon eux insultante dans « l’un des États les plus patriotiques de l’Union ». Et Bannon d’expliquer comment Trump a néanmoins triomphé sur son rival, Jeb Bush, l’ancien gouverneur de Floride, en associant son image à celle de son frère George W. Bush, responsable de la guerre en Irak. Puis, se tournant vers le présent et l’Iran, il déclare, catégorique : « Nous ne voulons plus de guerres éternelles », avant d’attaquer la chaîne Fox News, qu’il accuse de faire de la propagande belliqueuse vingt-quatre heures sur vingt-quatre exactement comme à l’époque de l’invasion de l’Irak. Selon lui, les journalistes de la chaîne d’information continue sont aux antipodes de l’esprit MAGA. Mais dans quelle mesure Bannon l’incarne-t-il lui-même ?

Une révolte des Républicains peu crédible

Bob Livingston, ex-président de la puissante commission budgétaire de la Chambre basse du Congrès, ne croit pas à une révolte des élus républicains. Certes deux représentants au Congrès, le très libertaire Thomas Massie (Kentucky), et  la figure de l’alt-right Marjorie Taylor Greene (Georgie) s’opposent de façon véhémente au bombardement de l’Iran, « mais pas beaucoup d’autres », note-t-il. « Exprimer bruyamment leur opposition est une chose, mais je ne peux pas concevoir que même Massie et Greene se rangent du côté des démocrates pour limiter le pouvoir du commandant en chef. »

Si une majorité des élus restent fidèles à Trump, il en va de même pour les militants. Selon Marc Rotterman, journaliste de Caroline du Nord spécialisé dans les affaires publiques, « une majorité de la base MAGA est d’accord avec la décision du président Trump de détruire les installations nucléaires iraniennes ». C’est aussi l’opinion de Bill Ballenger, grand expert de la vie politique au Michigan : « Il y aura quelques dissensions au sein de la base MAGA, mais dans l’ensemble, ils acceptent la décision de Trump. »

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Il ne faut pas oublier le prestige dont jouit Donald Trump en tant que fondateur et chef incontesté du courant MAGA. De même que Ronald Reagan, largement considéré comme l’incarnation du mouvement conservateur moderne, se faisait pardonner chaque fois qu’il quittait sa ligne strictement conservatrice (comme quand en 1982 il est revenu sur une partie des réductions d’impôts de l’année précédente), Trump est excusé par sa base pour son intervention dans le conflit irano-israélien. « Les électeurs MAGA adulent Trump et lui font confiance, affirme Henry Olsen, chroniqueur respecté et auteur d’un livre sur les cols bleus qui votent républicain. Ils sont prêts à approuver son action dans tel ou tel domaine jusqu’à ce qu’il échoue sans reculer, ce qui n’est pas encore arrivé. Beaucoup d’influenceurs MAGA sur le Net exercent peu d’influence sur leur public, surtout quand ils critiquent Trump. »

Ravitaillement en vol d’un bombardier furtif B‑2 Spirit de l’US Air Force. Les sept B‑2 engagés dans l’opération « Midnight Hammer » ont largué quatorze bombes GBU‑57 (MOP) sur les complexes nucléaires de Fordo, Natanz et Ispahan, les 21 et 22 juin 2025. D.R.

Au moment où ces lignes sont écrites, début juillet, rien ne suggère que le bombardement américain de l’Iran conduira à un déploiement de troupes dans un conflit auquel le président est pressé de mettre fin. Ni que les fidèles de Trump pourraient l’abandonner ou même le critiquer. La situation est bien résumée par Christopher Nicholas, conseiller politique chevronné des républicains en Pennsylvanie : « La majorité de sa base sera parfaitement à l’aise avec l’intervention militaire, pourvu que celle-ci s’arrête à peu près là. »

Trump peut-il se présenter comme un artisan de la paix ? À 5 h 30, le 24 juin, sur le point de partir pour le sommet de l’OTAN à La Haye, il essaye de se placer au-dessus des deux adversaires, en déclarant aux journalistes présents : « Nous avons essentiellement deux pays qui se battent depuis si longtemps et avec tant d’acharnement qu’ils ne savent plus ce qu’ils foutent » (« …what the f*ck they’re doing »).Au-delà de ses fanfaronnades et de ses grossièretés, les spécialistes du trumpisme sont convaincus que le président est déterminé à éviter d’impliquer les États-Unis dans une lutte entre des ennemis jurés.

Dans un article récent publié dans Foreign Affairs, Lawrence D. Freedman, professeur émérite d’études de guerre au King’s College de Londres, voit dans l’échec de la guerre américaine en Afghanistan (la plus longue de l’histoire des États-Unis), comme dans l’enlisement de la guerre russe en Ukraine, la preuve que la force armée est incapable d’apporter des victoires décisives : selon lui la puissance militaire se transforme de nos jours inmanquablement en impuissance politique[1]. Trump n’a pas dit autre chose, le 13 mai, lors d’un discours capital à Riyad, en Arabie saoudite, durant lequel il a explicitement rejeté l’idée selon laquelle des changements positifs au Proche-Orient pourraient être imposés par la force. Il est donc très peu probable qu’il aille plus loin dans son soutien opérationnel à Netanyahou ou qu’il fasse quoi que ce soit de nature à lui aliéner une base qui continue de soutenir avec autant d’enthousiasme.


[1] « The Age of Forever Wars », Foreign Affairs, 14 avril 2025.

À double face

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© Hassah Assouline / Causeur

À la recherche de l’esprit français


L’esprit n’est d’aucune terre en particulier, et s’il se trouve circonscrit à un village (ou un pays), il déchoit. Mais l’esprit n’existe pas non plus dans une pureté désincarnée, sans aucun lien avec des paysages, des rues, des souvenirs, et surtout sans la langue où il se déploie. La particularité de l’esprit français est d’avoir promu les jeux de l’esprit, la beauté de l’esprit : l’esprit pour lui-même. Dans Le Livre du courtisan, Castiglione regrette, au début du XVIe siècle, la brutalité des Français qui méprisent les lettres et n’aiment que la noblesse des armes. La France, sur le modèle italien, se transformerait bientôt en une société de cour, où l’agglomération des courtisans, la prétention, la vanité et l’ennui allaient donner au mot d’esprit, et à l’esprit, une place nouvelle. Qui n’a pas d’esprit en France se confond avec le vulgaire, fût-il un Grand de la République. La France a pris la dimension d’un salon universel, où l’on pique (« ça pique ! »), où l’on débite des paradoxes, où l’on aime critiquer des films, des matchs (« on refait le match »), des livres (« t’en as pensé quoi ? »). Dans le meilleur des cas, l’esprit français est un bretteur faussement grincheux, animé par le goût de la bagarre, le sens de la drôlerie et le panache des causes perdues. Dans le pire des cas, cet esprit n’a rien d’élevé : « Les autres parties du monde ont des singes ; l’Europe a des Français. Cela se compense » (Schopenhauer).

Croûtes et confidences

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La romancière et éditrice Véronique de Bure © JM HAEDRICH/SIPA

Dans Une confession, Véronique de Bure nous parle de son expérience professionnelle auprès de Jean Guitton tout en nous racontant une histoire d’adultère plus obscure.


Charmant et émouvant : il n’est pas de termes plus justes pour qualifier le bref, juvénile et très féminin compagnonnage intellectuel que vécut, quelque temps avant sa mort en 1999, l’académicien français et confident de Paul VI, Jean Guitton, avec la jeune éditrice Véronique de Bure.

À dire vrai, le « clou » du livre n’a qu’un maigre intérêt, à l’image de bien des tromperies conjugales. Notez-le au passage : adultère est un mot laid, bien peu sexy, qui rime avec adulte, austère, sévère ; quant à adultérin, il consomme avec vipérin. Non, ce qui intéresse en l’occurrence, c’est ce que nous révèle de lui-même un homme alerte, espiègle parfois, à en être presque coquin, content de lui mais sans orgueil, et dont la curiosité envers la jeunesse est redoublée lorsque cette dernière s’incarne en une douce jeune fille à particule. Oui, le snobisme faisait partir des gentils travers de notre homme quand ce n’était pas la haute idée qu’il se faisait de sa peinture.

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Visiez-vous l’Académie ? Il convenait, lorsque vous lui rendiez visite, de ne pas tomber dans le piège des compléments littéraires. Il vous laissait parler pour, enfin, vous couper en vous disant : Raté ! De l’avis général, ses portraits étaient des croûtes (sauf peut-être, selon nous, cette sorte de diptyque de Pascal et Spinoza où, tout, en montrant une forte ressemblance, le visage du premier de nos philosophes montre des traits concaves et le second, convexes), mais c’était de l’artiste-peintre qu’il voulait que l’on dise grand bien.

‘‘Autrice’’ étant à bannir, nous dirons que notre jeune auteur réussit d’autant mieux à se souvenir du babil de ce sage que ni l’un, ni l’autre ne se prennent au sérieux. On a plutôt affaire à un grand-père dont la chasteté, de fait, n’éteint nullement mais plutôt active et réactive un œil rieur d’une incroyable lucidité, le mot, pour un peu, flirtant avec lubricité.

« Autorisée », ou non, une future biographie de Jean Guitton devra faire grand cas des anecdotes à la fois doctes, amusées et amusantes sur un sage se confiant, dans ces derniers temps, à celle qui était peut-être pour lui comme sa petite-fille rêvée.

Véronique de Bure, Une confession, Flammarion, 185 p.

L’ère de la calomnie

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© AP Photo/Louise Delmotte/SIPA

Le président d’Avocats sans frontières accuse Le Monde, l’AFP et France Inter de plaider en faveur du Hamas


Qui aurait pu croire qu’un jour le Hamas tiendrait la plume de journalistes devenus ses auxiliaires ? J’affirme que ce moment est survenu.

Il y a d’abord Le Monde, dont la spécialité est d’aller recueillir les accusations de l’extrême gauche israélienne, qui n’a rien à envier aux autres extrêmes gauches mondiales. Alors que depuis près de deux ans, chaque jour, le quotidien vespéral publie les états d’âme, parfois honorables, de pacifistes israéliens s’étalant au long des pages, je mets au défi le journal à la dérive sans fin, de montrer une fois, rien qu’une fois, les états d’âme d’un Palestinien après le Grand Pogrom.

C’est dans le creux de cette différence immorale de traitement que gîte l’impossibilité d’un règlement.

J’affirme surtout que l’AFP, devenue une sorte de Pravda capitaliste, a décidé de considérer les affirmations propagandistes de l’organisation terroriste islamiste comme dignes de foi, et qu’elle les reprend sans la moindre précaution. Dans le même temps, elle néglige délibérément de publier les commentaires ou démentis d’une armée d’un État démocratique agressé.

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Pour entrer plus avant dans les détails, peu après le 7-Octobre, l’AFP – suivie par Le Monde et quelques autres médias – a fait le choix plus que discutable de publier les bilans victimaires de la « Défense civile » de Gaza ou du « ministère de la Santé » du même territoire. Mais je dois ajouter que ces médias eurent l’honnêteté professionnelle et morale minimale de préciser que ces organisations précitées aux noms humanitaires ronflants… étaient dirigées par le Hamas, ce que tout le monde savait au demeurant.

Seulement, sauf à être crédule, on pouvait imaginer que des informations livrées par une organisation pogromiste qui joue à qui perd-son-enfant-gagne tout en protégeant ses tueurs sous les écoles, ne se caractériseraient pas par une priorité donnée à la vérité. Qu’importe, telle fut l’habitude observée.

Mais il y a pire à présent. Car j’affirme solennellement que depuis plus d’un an, l’AFP, Le Monde, France Inter, France Info et consorts délivrent à chaque heure, et sans précautions, les accusations et bilans mensongers de la « Défense civile », sans publier les démentis de l’armée israélienne, mais SURTOUT en cachant désormais que le Hamas se cache en réalité derrière. On comprend bien que ce mensonge par omission dissimule à peine le désir de renforcer la crédibilité d’une organisation qui, sinon, en serait totalement dénuée.

Derrière le mensonge se cachent d’encore plus tristes réalités.

La première est que nombre de journalistes ne sont plus que des militants, qui accordent plus d’importance à leur combat idéologique qu’à leur devoir professionnel de publier la réalité factuelle.

La seconde est leur détestation pathologique d’Israël.

Journal d'un prisonnier

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Une Somme de tueurs!

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Le romancier français Dominique Zay. DR.

Avec Il pleut des tueurs, Dominique Zay propose un thriller vif et inquiétant, ancré dans la bonne ville d’Amiens où il s’en passe des belles…


L’énigme d’un thriller peut déjà être difficile à résoudre lorsqu’il n’y a qu’un suspect et/ou un criminel. Dans Il pleut des tueurs, dernier roman policier de Dominique Zay, les assassins ou les assassins potentiels, on ne les compte plus tant ils sont nombreux ; d’où le titre.
Ancrée à Amiens, dans la Somme, que raconte l’histoire ?

Organisation mafieuse

Quand Clara, la nièce adorée d’Alban, est laissée pour morte, victime d’un chauffeur fugitif, il fait appel à son vieux camarade Yan Zadek, un détective privé très efficace mais un brin particulier. Le principal suspect, Julien Bacquet, est déjà inquiété pour un féminicide (le samedi 9 mars 2024, il a zigouillé sa légitime, Guyslaine Bacquet), meurtre dont s’accuse un certain Bruno Rousselot. On comprend que là, l’affaire se complique. La sexy sexa, Eugénie Klein, 68 ans, veuve depuis quinze ans d’un vieux mari riche et cardiaque, tente d’expliquer à Yan que Rousselot n’a rien à se reprocher puisque, le soir du méfait, « il était avec moi… dans mon lit. » Il est vrai que le Bacquet se révèle un personnage carrément horrible et peu recommandable : « Le peu de cas qu’il faisait de la nature humaine avait davantage diminué derrière les barreaux au contact de plus pourris que lui, et la seule chose qui trouvait grâce à ses yeux aujourd’hui résidait dans la visite de cette escort-girl ukrainienne qui venait le masser intégralement tous les samedis. » Coupable idéal ? Trop idéal ?

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Zadek cherche, s’accroche en bon enquêteur têtu. Il finit par découvrir, grâce à la toujours appétissante Eugénie, que derrière tout ça se cache une terrible organisation criminelle, une mafia sans morale aucune, Miss T, « c’est Thémis à l’envers, miss T/ Thémis, la déesse de la justice chez les Grecs, la loi divine (…) »

Bref et brutal

Pour certains, on s’en doute, cela se terminera très mal, très très mal… Yan, lui, à la faveur d’une promenade dans un parc, connaîtra un véritable coup de foudre pour Mona, une délicieuse métisse, qu’il retrouvera un peu plus tard et qui deviendra sa maîtresse : « Comme dans la chanson de Souchon, l’odeur de Mona serait dorénavant son alcool profond ».

Ce roman de Dominique Zay séduit par sa rapidité, ses chapitres uppercut d’une brièveté vivifiante, et par son intrigue bien ficelée. De plus, la ville d’Amiens y est parfaitement bien décrite jusque dans ses plus obscurs recoins. Un bon polar.

Il pleut des tueurs, Dominique Zay. Aubane éditions ; 198 pages.