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Wokisme: la télévision publique mène son enquête…

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Promis: avec son émission consacrée à la prétendue «dictature des bien-pensants», elle n’avait aucune idée en tête!


Le 5 novembre, le journaliste Tristan Waleckx se promettait de tout nous dire sur le wokisme dans l’émission hebdomadaire Complément d’enquête qu’il anime sur France 2. Plusieurs questions le tarabustent : « le “wokisme” est-il réellement un danger pour notre pays ? » ; les adversaires du wokisme ont-ils raison de parler de « dictature des bien-pensants ? » ; le wokisme « serait-il un “nouvel obscurantisme”, comme le qualifient certains hommes politiques ? » Ces questions trouveront rapidement leurs réponses. Dès les premières minutes de l’émission, le chemin est tout tracé et le téléspectateur comprend immédiatement ce que Tristan Waleckx va tenter de lui faire gober.

Thomas Jolly, l’audacieux

Cela commence avec… la cérémonie des JO de Paris, cet « événement qui a rendu fier tout un pays »grâce au « parti pris audacieux de son directeur artistique », Thomas Jolly. Celui-ci ne comprend pas les reproches qui lui ont été adressés. Il s’interroge : « Inclure l’ensemble des Français et Françaises, dans leur diversité, dans une cérémonie qui s’adresse à chacun et chacune d’entre eux et d’entre elles, qui a créé de l’unité, de la fierté nationale, c’est woke ? » M. Jolly ne se rend visiblement pas compte que cette phrase est un pur produit de l’idéologie qui a conçu, entre autres difformités, le verbiage « inclusif ». Sa cérémonie était imprégnée jusqu’au trognon de la même idéologie. Sans le savoir, Tristan Waleckx vend d’ailleurs la mèche lorsqu’il évoque l’abondante présence de « représentants queer », entre autres Nicky Doll, « la plus célèbre drag-queen française, animatrice d’une émission sur France Télévisions, une figure du mouvement LGBT qui défend les droits des minorités sexuelles ». Cette cérémonie n’était effectivement pas destinée à « l’ensemble des Français et Françaises » mais aux différentes « communautés » supposément discriminées qui furent majoritairement représentées dans ce lamentable spectacle.

Au député Julien Odoul qui confie n’avoir pas particulièrement apprécié la prestation d’Aya Nakamura avec la Garde républicaine, le journaliste rétorque : « Elle est quand même la chanteuse francophone la plus écoutée au monde. » Rectificatif : si Aya Nakamura est très écoutée dans le monde entier ce n’est sûrement pas parce qu’elle est une « chanteuse francophone » mais plutôt parce qu’elle est une chanteuse charabiaphone qui baragouine, sur des musiques électro-pop standardisées, des textes incompréhensibles, un salmigondis farci d’argot malien, de verlan français, anglais ou espagnol, d’expressions arabo-africaines à la mode dans les « quartiers », etc. Il y a quelques années, le député socialo-macroniste Rémy Rebeyrotte s’était extasié devant ce galimatias et voyait en Aya Nakamura une ambassadrice de la langue française parce que, disait-il, « elle est en train de porter au niveau international de nouvelles expressions et évolutions de la langue française ». On ne parlait pas encore d’interdire l’alcool à la buvette de l’Assemblée nationale ; pourtant…

Militants identitaires et wokisme pur

Bien entendu, les personnes qui ont critiqué cette cérémonie ne peuvent être que des « militants identitaires » de la pire espèce, des personnalités douteuses, intolérantes, homophobes et racistes. D’ailleurs, insiste le journaliste, un rapport récent[1] a mis en évidence les liens entre ces individus et différentes associations, dont une, « considérée comme très conservatrice », est financée par « le milliardaire catholique Pierre-Édouard Stérin ». L’initiateur de ce rapport, Neil Datta, est le directeur exécutif du Forum parlementaire européen pour les droits sexuels et reproductifs, souligne le reportage qui omet toutefois de préciser, comme c’est bizarre, que ce Forum basé à Bruxelles est financé entre autres par la Commission européenne, la Gates Foundation et… l’Open Society Foundation de George Soros. Interviewé par France TV, Neil Datta livre une réflexion étonnante : « Auparavant, ils [les vilains détracteurs du wokisme] utilisaient “l’idéologie du genre”, ils s’en sont servis et ils ont bien utilisé cette notion d’idéologie du genre. Ça ne sert plus à grand-chose maintenant, les gens s’en lassent, donc tout l’ensemble de cette extrême droite a inventé cette notion de woke qui ne veut rien dire mais, en même temps, on comprend ce que cela veut dire. » Soit Neil Datta est un imbécile qui n’a strictement rien compris au wokisme, soit il fait semblant d’être un imbécile n’ayant strictement rien compris au wokisme pour noyer le poisson – dans ce cas, il fait ça très bien. Quoi qu’il en soit, nous lui recommandons de lire l’essai du philosophe Jean-François Braunstein La Religion woke, qui explique justement que « la théorie du genre est le cœur de la religion woke, la partie la plus originale mais aussi, en quelque sorte, le “produit d’appel”, par son absurdité décomplexée, et aussi par son mystère quasi théologique ». Pour plus d’informations, il pourra également compulser l’ouvrage intitulé Face à l’obscurantisme woke puisque celui-ci a pu paraître malgré la demande acharnée de censure du Grand Inquisiteur du Collège de France Patrick Boucheron qui fut aussi, il n’y a pas de hasard, l’un des co-scénaristes de la cérémonie des JO.

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Le sujet de l’islamo-wokisme est ensuite abordé. « Que s’est-il passé à Lyon 2 ? Cette faculté est-elle tombée aux mains des wokes ? », demande Tristan Waleckx en relatant l’affaire Balanche, du nom de cet universitaire qui, parce qu’il avait approuvé l’interdiction d’une soirée consacrée à la rupture du jeûne du ramadan au sein de l’université, a été agressé pendant son cours par des individus masqués le traitant de sioniste et de raciste. Sur France TV, on se demande quand même, l’air de rien, si l’enseignant ne l’aurait pas un peu cherché : deux jours avant cette agression, Fabrice Balanche était effet interviewé sur… CNews, où il dénonçait l’islamo-gauchisme qui gangrène l’université française en général et Lyon 2 en particulier. Les islamo-gauchistes qui l’ont agressé ont posté leur méfait sur les réseaux sociaux. La vidéo, devenue « virale », a surtout été « reprise par des comptes comme celui du syndicat étudiant de droite, l’UNI, et ceux des sites d’extrême droite, Frontières et Boulevard Voltaire », tient à souligner, avec des frissons dans la voix, le journaliste. L’enquête progresse : il semblerait bien que cette affaire ait été montée en épingle par la droite nationale la plus rigide.

L’universitaire Xavier-Laurent Salvador, signataire d’une tribune dénonçant la mouvance islamo-wokiste dans les milieux universitaires et co-directeur de Face à l’obscurantisme woke, est interviewé. Il cite différents intitulés baroques ou nébuleux glanés dans les dizaines et dizaines de publications, de colloques, d’articles universitaires sur le genre, le queer, le racialisme, le décolonialisme, etc., qu’il a recensés en France pour le seul mois de février 2023. Pour contrecarrer ce témoignage, Complément d’enquête a mené « sa propre enquête » et, pour ce faire, s’est tourné vers Étienne Ollion, sociologue au CNRS. D’après celui-ci, Xavier-Laurent Salvador a utilisé une « logique de l’anecdote » au détriment de la « logique scientifique ». Heureusement, Étienne Ollion et son équipe ont lancé une « vaste étude » portant sur l’évolution des sciences sociales depuis 2001 et sont parvenus au résultat suivant : il n’y a guère plus de travaux sur le « genre » ou le « concept de race » en 2022 qu’en 2001. Curieux ! Pour comprendre ce tour de passe-passe, il suffit de lire Ce que le militantisme fait à la recherche (Tract Gallimard n° 29), ouvrage dans lequel la sociologue Nathalie Heinich rappelle un article du Monde citant l’étude d’un chercheur se faisant fort de démontrer, lui aussi, « statistiques et graphiques à l’appui », le très faible pourcentage depuis 2011 de certains termes – « décolonial », « intersectionnel », « racisé », « islamo-gauchisme » – dans les quatre moteurs de recherche universitaire les plus utilisés. Résultat stupéfiant : 0,01 % ! Mais… « il suffit d’ajouter à la liste quelques termes très fréquents dans ce type de travaux (tels que “genre”, “féminin”, “islamophobie”, etc.) et de prendre en compte d’autres sources (annonces de colloques, de journées d’étude, titres de séminaires, ateliers, etc.) pour arriver à un tout autre résultat: ces termes constituent plus de la moitié du corpus ainsi élargi », écrit Nathalie Heinich. Par ailleurs, ironise-t-elle, comment prendre au sérieux certains « experts » du CNRS, en particulier ceux qui défendirent la « géographe du genre » Rachele Borghi, victime, selon eux, « “d’attaques indignes”, malgré “une rigueur et une éthique scientifiques” ne faisant aucun doute pour “celles et ceux qui, depuis le début de sa carrière, ont réalisé des évaluations véritablement scientifiques de ses travaux” ». Et Nathalie Heinich de se demander qui a bien pu expertiser, sans éclater de rire, l’article « scientifique » de Mme Borghi intitulé « De l’espace genré à l’espace queerisé », dans lequel la géographe affirme d’abord que « l’espace public est conçu, géré et modelé sur la base d’une conception dualiste rigide: homme-femme, licite-illicite, homosexuel-hétérosexuel », et conclut ensuite que « la géographie de la sexualité, définie comme branche de la géographie, peut contribuer de manière importante au dévoilement des normes et des structures de pouvoir qui oppriment et excluent de l’espace public les dissident.e.s sexue.le.s ». Présupposé délirant, remise en cause pseudo-foucaldienne des « normes et des structures de pouvoir », militantisme néo-féministe et pro-LGBT, écriture inclusive – bref, du wokisme à l’état pur…

Jean-Michel Blanquer, le sage

À la fin de l’émission, Tristan Waleckx reçoit Jean-Michel Blanquer. Celui-ci est présenté comme « l’un des tout premiers à avoir utilisé en France le mot et le concept de wokisme ». Nous devons rectifier cette assertion : s’il est vrai que, depuis qu’il a quitté le ministère de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer n’a pas manqué de dénoncer les dérives wokes, de nombreux universitaires, journalistes et représentants politiques l’ont devancé dans le combat contre le wokisme. Par ailleurs, la circulaire Blanquer de septembre 2021 – « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » – contredit l’idée que le ministre ait été parmi les premiers à s’opposer à l’idéologie woke, en particulier à la théorie du genre. Cette circulaire entérinait en effet les revendications d’associations transgenres: possibilité pour l’élève de se déclarer du sexe de son choix, de changer de prénom, de bénéficier d’aménagements particuliers pour l’utilisation des toilettes et des vestiaires, de jouir d’un traitement individualisé et, bien sûr, d’une bienveillance sans limite de la part du « personnel éducatif » et des élèves auxquels devaient être proposées des sessions de sensibilisation (c’est-à-dire de rééducation) sur le sujet[2]. Il n’est pas impossible que cette circulaire ait été concoctée dans le dos du ministre, sous la férule de hauts fonctionnaires indéboulonnables suivant à la lettre l’agenda européiste de rééducation de la population, tant en ce qui concerne les questions de sexualité et de genre qu’en ce qui concerne les questions d’écologie ou d’éducation aux médias. Il n’empêche: la signature de M. Blanquer au bas de ce document consternant restera comme l’illustration de sa soumission à l’idéologie transgenre au moment où il aurait dû, au contraire, faire montre de conviction et d’autorité et renvoyer dans leurs cordes les idéologues de la rue de Grenelle.

A lire aussi, du même auteur: Quand Jean-Noël Barrot loue l’immigration africaine

Tristan Waleckx a, depuis le début de son émission, une idée en tête. Il pose par conséquent à Jean-Michel Blanquer une question qui n’est pas une question mais un sous-entendu courant chez les journalistes de l’audiovisuel public : « Le fait d’avoir popularisé le mot woke, ça a permis à l’extrême droite d’imposer un concept dans le débat public ? » Quelques minutes plus tard, après avoir montré un graphique où il apparaît que l’expression « islamo-gauchisme » a été entendue dix à vingt fois plus « sur CNews, la chaîne de Vincent Bolloré » que sur les autres chaînes d’info, le journaliste, toujours aussi lourdingue, interroge faussement l’ex-ministre : « Ça veut dire quelque chose ? » Et lorsque ce dernier affirme que, CNews ou pas, « l’islamo-gauchisme existe », le journaliste sort ce qu’il croit être sa carte maîtresse :« C’est un concept qui est quand même contesté par le CNRS qui est un institut sérieux (sic – voir ci-dessus) expliquant que “l’islamo-gauchisme est un slogan politique ne correspondant à aucune réalité scientifique” » et par des présidents d’universités déclarant que « l’islamo-gauchisme est une pseudo-notion qu’il conviendrait de laisser, sinon aux animateurs de CNews, plus largement à l’extrême droite ». L’argumentation tourne court. Au passage, on remarquera qu’en ce moment, qu’il s’agisse du wokisme, de l’islamo-gauchisme ou de l’écologisme, les gourous de ces nouvelles religions n’ont qu’un mot à la bouche, le mot « science », mot-amulette, mot-talisman, mot magique ayant pour but d’empêcher justement toute démarche scientifique, laquelle ne peut se passer de réflexion critique et de controverses.

Nul besoin, je crois, de préciser l’objectif de cette émission. Le procédé pour y parvenir, grossier, est celui qu’utilisent régulièrement les journalistes bien-pensants du service public. Ce « Complément d’enquête » corrobore les déclarations de Delphine Ernotte, la présidente de France TV ayant avoué que l’audiovisuel public n’était pas là pour montrer la France telle qu’elle est mais telle que la caste médiatico-progressiste aimerait qu’elle soit. De ce côté-là, on peut dire que Tristan Waleckx a parfaitement rempli sa mission…

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[1] La prochaine vague : comment l’extrémisme religieux regagne le pouvoir. L’extrémisme religieux en question est bien entendu l’extrémisme… catholique qui, comme chacun sait, ravage l’Europe en ce moment.

[2] Pour plus d’informations sur cette position catastrophique du ministre Jean-Michel Blanquer vis-à-vis des revendications émanant de différents organes politiques et associatifs promouvant l’idéologie sur le genre, je renvoie à mon article du 16 octobre 2021 : https://www.causeur.fr/vallaud-belkacem-blanquer-meme-combat-215169

Macron debout devant Poutine et couché devant Tebboune

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La grâce de Boualem Sansal ne solde pas notre lourd contentieux avec l’Algérie


C’est hier soir que l’avion officiel affrété par l’Allemagne a atterri à Berlin. À son bord, Boualem Sansal, enfin libéré de sa geôle d’Alger où il était emprisonné depuis le 16 novembre 2024 pour de simples faits d’opinion. Suite à l’intervention du président de la République fédérale Frank-Walter Steinmeier, l’écrivain dissident, âgé de 81 ans, a été gracié par le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour motifs « humanitaires ».

Sansal, qui souffre d’un cancer, a été dès son arrivée admis dans un hôpital berlinois, où il pourra bénéficier de soins dignes de ce nom. Qu’il soit permis à l’auteur des lignes d’en pleurer de joie. L’écrivain est un ami de Causeur. Et le système de santé algérien, auquel il avait accès depuis son arrestation, est calamiteux. La preuve : les présidents de ce pays autoritaire et corrompu – et pourtant si riche de son pétrole et de son gaz – préfèrent systématiquement consulter des médecins en Europe quand ils souffrent de maladies graves.

Emmanuel Macron peut à bon droit se féliciter de la « mission de bons offices » effectuée par son homologue allemand, qui lui a permis d’obtenir l’élargissement de Sansal sans avoir à principalement remercier Tebboune, dont la politique reste de toute évidence résolument hostile à la France.

A lire aussi: Compromissions cairotes

Curieusement pourtant, l’Élysée a fait savoir hier que les conditions étaient à présent réunies pour « renouer le dialogue »avec le régime algérien. Alors que celui-ci continue de refuser ses citoyens expulsés de France, maintient toujours en détention le journaliste Christophe Gleizes et est soupçonné par la justice d’être impliqué dans l’enlèvement d’Amir DZ, un opposant algérien réfugié dans notre pays…

« Le bras de fer ne fonctionne pas, c’est clair », a même osé glisser un proche du président français, pour suggérer que le calvaire de Sansal aurait été abrégé plus tôt si Bruno Retailleau n’avait pas fait preuve de détermination vis-à-vis d’Alger dans le dossier des OQTF quand il était Place Beauvau et si le RN n’avait pas fait voter à l’Assemblée nationale le 30 octobre une résolution visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968. Syllogisme typiquement macronien ! La stratégie de lèche-babouches de l’Élysée et du quai d’Orsay n’a pas mieux fonctionné que la fermeté affichée du patron des LR.

Il n’est pas question ici de discuter de la sincérité et de la résolution du chef de l’État dans l’affaire Sansal, ni davantage dans le contentieux du Sahara occidental (dans lequel il a pris le parti du Maroc l’année dernière). Mais simplement de souligner son hypocrisie, aussi humiliante que contre-productive. Macron feint de ne pas voir que, de toute manière, les Algériens ont décidé de punir la France. Sa comédie ne fait que renforcer leur mépris. « On n’obtient rien en se fâchant avec ceux qu’on sollicite », a indiqué hier un conseiller de l’Élysée. On n’obtient rien non plus en leur lâchant tout.

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Ils n’auront pas notre haine?

13-Novembre. Les commémorations et les nombreuses émissions proposées dans les médias entendaient à tout prix mettre de côté les «mauvais» sentiments, observe notre contributrice. Mais, on ne vainc pas l’islamisme conquérant, pas plus qu’on ne rend justice, autour d’un «groupe de parole».


Cette semaine, C ce soir a logiquement consacré l’une de ses émissions quotidiennes aux attentats du 13 novembre 2015. Sur le plateau : l’ancien président devenu député socialiste François Hollande, Gaëlle, victime du Bataclan défigurée à vie, Aurélie Silvestre, dont le compagnon et père de ses deux enfants a été assassiné, l’historien Denis Peschanski, codirecteur du Programme 13-Novembre, et Jean-Xavier Delestrade, réalisateur de la série Les Vivants, diffusée cette semaine sur France 2.

Islamiste, ce mot si difficile à prononcer

Les victimes sont mises en avant, à juste titre : on parle de leur souffrance, de celle de leurs proches, des blessures visibles et de celles qui ne le sont pas, de la reconstruction, de la transmission du souvenir aux jeunes générations.

Mais les auteurs, eux, disparaissent du récit. François Hollande prononce bien le mot « islamiste », prudemment, deux ou trois fois, mais personne ne s’y arrête. Et lorsqu’il cite les attaques qui ont précédé le 13-Novembre (Merah, Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher), il ne précise même plus la nature de ce terrorisme. Comme si tout cela relevait désormais d’une malédiction sans visage, d’un mal abstrait, dépolitisé.

L’émission préfère explorer le thème de la guérison, du dialogue, et la fameuse « justice restaurative » : cette approche de la réparation plutôt que de la punition, introduite par la loi Taubira du 15 août 2014 pour les délits de droit commun. Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos djihadistes du 13 novembre, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, a fait savoir par la voix de son avocate qu’il était partant. Oui, partant ! Dans une « démarche restaurative », il souhaite rencontrer certaines victimes.

On cauchemarde. Celui qui, durant son procès, revendiquait son statut de « combattant de l’État islamique », invoquait Allah et le prophète, continue aujourd’hui à consulter en prison des contenus de propagande islamiste sur une clé USB. Et le voilà qui veut participer à un programme de justice restaurative. Restaurer quoi, au juste ? Le lien social ? La confiance ? La paix civile ? Il n’en a probablement rien à faire. Peut-être cherche-t-il simplement à profiter des failles du droit pour continuer à hanter ses victimes sous un vernis humaniste.

Bonjour le groupe de parole !

Comme l’a justement rappelé Riss, directeur de Charlie Hebdo, en réaction à la demande d’Abdeslam : on ne « restaure » pas le lien social avec ceux qui ont voulu le détruire. La justice n’est pas un groupe de parole. Pendant l’émission, la question de la compatibilité entre justice restaurative et terrorisme n’a pas été posée. Trop dérangeante, sans doute.

On préfère s’émouvoir du témoignage de Gaëlle, rescapée du Bataclan défigurée à vie, qui a choisi de rencontrer un terroriste en prison. Cette même victime avait déjà été mise en avant dans Envoyé Spécial par Élise Lucet, une journaliste toujours prompte à transformer l’émotion en leçons de morale. Gaëlle raconte qu’elle est « dénuée de haine », que la colère la paralyse. C’est bien son droit. Et nos médias adorent ce mantra devenu injonction : « Vous n’aurez pas ma haine » – comme l’écrivait Antoine Leiris, qui avait perdu son épouse au Bataclan, auteur du livre éponyme.

C’est que la haine, aujourd’hui, est devenue un mot tabou, presque indécent, un mot des plus sales, un mot quasiment inaudible, presque barbare. Comme si haïr ceux qui veulent notre mort faisait de nous des barbares, ou pire : des électeurs du Rassemblement national. Seule compte l’empathie bien légitime avec les victimes et leurs proches, mais la colère elle est exclue, perçue comme une anomalie. 

Pourtant, peut-il vraiment y avoir une joue tendue, une rédemption possible, avec ceux qui ont voulu exterminer des innocents au nom d’Allah, avec ceux qui ont répondu à l’appel de Daesh de cibler « les méchants et sales Français » ? Ce choix médiatique de se focaliser sur la souffrance et la mémoire n’est pas anodin. Il évite soigneusement de poser la question politique : quel bilan dix ans après ? Que n’avons-nous pas voulu voir ?

Le laxisme migratoire continue

Lors du procès des attentats, François Hollande lui-même a reconnu qu’en 2015, le pouvoir savait que la filière d’immigration syrienne servait de porte d’entrée à des terroristes. Il savait, et il n’a rien fait ? Dix ans plus tard, les frontières sont restées poreuses, et la menace islamiste, elle, n’a pas reculé.

En octobre 2025, trois jeunes femmes radicalisées ont été écrouées à Paris pour préparation d’attentat. Le sixième projet islamiste déjoué depuis le début de l’année. Le discours djihadiste se diffuse toujours sur les réseaux sociaux, aux abords de certaines mosquées, et dans de nombreuses associations sportives à visée séparatiste. Et dans les écoles, on n’ose même plus parler de la hausse des atteintes à la laïcité.

Alors oui, on a le droit de haïr les terroristes islamistes. Les haïr, c’est affirmer qu’il existe des choses qui ne se réparent pas, ne se comprennent pas, ne se pardonnent pas. Les haïr, c’est rappeler que la justice n’est pas une thérapie collective, mais une frontière morale. Et qu’à force de confondre empathie et faiblesse, nous finirons peut-être par ne plus savoir ce que nous devons protéger.

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Djihadisme: les femmes, une nouvelle donne?

Quelques jours avant le dixième anniversaire des attentats du 13 novembre, les Français apprenaient, médusés, que le dernier terroriste survivant Salah Abdeslam disposait d’un ordinateur en prison, qu’il s’était marié par téléphone avec une certaine Maëva B., elle-même radicalisée, que celle-ci avait pu lui faire parvenir de la propagande djihadiste sur une clé USB et que, désormais séparée de lui, elle nourrissait son propre projet d’attentat islamiste. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, s’est dit sidéré.


La première affaire remonte au 17 janvier 2025. Salah Abdeslam, détenu dans la prison de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, est accusé de « recel d’objet illicite » via une « potentielle clé USB » ayant permis, à partir de son ordinateur, des connexions à des fichiers ayant trait à des organisations comme l’État islamique ou Al-Qaïda. L’homme le plus dangereux de France est transféré dans un des quartiers de Haute Sécurité que vient de créer Gérald Darmanin. Près de dix mois plus tard, le 4 novembre 2025, le PNAT (Parquet national antiterroriste) entend à deux reprises le détenu, dans le cadre d’une garde à vue, à propos de « quatre » clés, connectées, entre décembre 2024 et janvier 2025, qui n’ont pas été retrouvées. L’amie (et ancienne « épouse ») de Salah Abdeslam qui le visitait au parloir, interrogée et mise en garde à vue, reconnaît avoir chargé de propagande islamiste une clé USB qu’elle a « fait remettre » à Salah Abdeslam au cours d’un parloir. C’est alors qu’on a aussi découvert une affaire dans l’affaire: celle de la menace imminente d’un attentat.

Pas de menace particulière

Au domicile de Maëva B., les enquêteurs de la Direction nationale de la police judiciaire, et la DGSI, enquêtant sur ses outils numériques, décèlent un projet d’action violente terroriste. Projet qui implique également un homme de 20 ans radicalisé, habitant en Isère, époux religieux de Maëva, avec velléités de rejoindre une organisation terroriste, ainsi qu’une adolescente de 17 ans résidant dans l’Hérault. Ce risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger est-il concomitant avec les commémorations des dix ans des attentats du Stade de France, des terrasses et du Bataclan ? « Pas de menace particulière, a estimé la chef de la DGSI, pour le 13 novembre ».

Et Salah Abdeslam, dans tout ça ? Son avocate et le PNAT notent qu’il n’y a pas d’éléments le reliant à ce projet d’attentat. Mais la chef de la DGSI précise bien que le terroriste « demeure radicalisé et convaincu de l’idéologie mortifère qu’il a suivi pendant des années ». Le PNAT a requis sa mise en examen et celle de son ex-compagne « pour recel d’objet illicite remis à détenu (la clé USB), pour complicité et association de malfaiteurs délictuelle de droit commun ». Maeva B. est mise également en garde à vue, d’une durée exceptionnelle de 96 heures, ainsi que deux autres individus. Si Salam Abdeslam ne semble pas impliqué dans le projet d’attentat, reste à savoir comment et pourquoi cette propagande islamiste est arrivée dans son ordinateur.

Sidération

Ces annonces ont plongé les Français dans la sidération. Comment tout cela est-il possible ? On posera ici des questions sans développer les réponses. Comment Salah Abdelsam pouvait-il être en possession d’un ordinateur depuis 2024 ? Réponse: l’obtention d’un ordinateur (avec accès à internet interdit) est rendue légale, depuis 2009, pour un détenu quand il en fait la demande. Les droits ? La CEDH qui nous gouverne contraint les États à bien traiter les détenus. Étant stricto sensu la privation de la liberté, la prison, est, à elle seule, pense la Cour, une sanction suffisante. C’est ainsi que les détenus doivent jouir de tous les droits dont celui de « se marier »  fût-ce par téléphone. Un criminel de grande envergure a même le droit d’entamer une « démarche de justice restaurative » comme vient de l’annoncer l’avocate d’Abdeslam exprimant le désir de son client « d’entrer en contact » avec les parties civiles.

Apparemment, les deux affaires – la clé USB et le projet d’attentat– sont distinctes. Salah Abdelsam n’est pas concerné ? Pas encore ? C’est là que je me suis souvenue du livre de Hugo Micheron Le jihadisme français et sa partie sur les prisons. On le sait, le jihad se poursuit en prison qui est, par excellence, un lieu de vie idéal, convivial et incubateur de la radicalisation. Salah Abdeslam allait-il avoir un rôle à jouer par l’influence qu’il pourrait avoir ? On sait comme les détenus islamistes acquièrent l’auréole du martyre en prison.

Drôle d’atmosphère

À la question que l’on se posait, il y a peu encore : le jihad est-il toujours dans une séquence « à marée basse de reconfiguration à bas bruit » ? on connaît la réponse. On dit « jihadisme d’atmosphère » pour signifier que c’est la société tout entière qui est concernée par la violence des actes et un « entrisme » au quotidien, en tout et partout, d’une rare intensité. Si le fameux colloque « sur la Palestine » du Collège de France a été annulé, et si la dame du perchoir proteste de sa fermeté à venir, les questions demeurent: comment le Collège de France en est-il arrivé là ? Comment des fillettes voilées sont-elles « entrées » récemment – quelle ironie !- » à l’Assemblée nationale pour assister à une séance ? Les élections à venir nous préparent de belles surprises. L’affaire présente montre exemplairement la montée en puissance de Daesh ou Al-Qaïda.

Faut-il voir, enfin, une nouveauté, comme certains le pensent, dans ce nouveau jihad, avec la présence des femmes ? À la différence d’Al-Qaïda, Daesh, « califat genré », accueillait, en son sein, les femmes, « génitrices des lionceaux à venir ». D’où la déstabilisation créée par un commando de femmes, à Paris, le 4 septembre 2016, près de Notre-Dame. Il y a peu, trois Françaises, âgées de 18, 19 et 21 ans, ont été écrouées par le PNAT, pour préparation d’un attentat terroriste dans des bars parisiens ou salles de concerts. Les femmes, disent les experts, sont plus tenaces et plus fiables que les hommes dans la lutte jihadiste. En attendant nous sommes prévenus par les patrons des Renseignements de la gravité de la menace jihadiste sur notre sol. La clé de Salah Abdeslam n’a pas été retrouvée.

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Dix ans après le 13-Novembre, la menace endogène

Dix ans après les attentats sanglants du Bataclan, du Stade de France et des terrasses de cafés parisiens, des experts avancent que la menace extérieure s’est atténuée: les commandements centraux de l’État islamique et d’Al-Qaida ont été considérablement affaiblis. En revanche, l’ennemi intérieur apparaît toujours aussi redoutable et imprévisible. Surtout, depuis 10 ans, une autre insécurité a explosé, observe notre chroniqueur – l’insécurité culturelle.


L’ennemi est là. Parmi nous. Dix ans après les attentats islamistes du 13 novembre 2015, qui ciblèrent notamment des consommateurs sur des terrasses de bistrots parisiens et le public d’un concert au Bataclan, l’islam djihadiste s’est fondu dans la société française qu’il déteste.

Menace endogène

Loin d’avoir été traqué, comme il a pu l’être par Israël et certains pays musulmans, il s’est installé dans les recoins de la nouvelle société « diversitaire ». Céline Berthon, directrice de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), le rappelait lundi sur RTL : la menace islamiste est désormais « endogène » et mobilise auprès d’une jeunesse âgée de 17 à 22 ans. Si l’État islamique semble avoir perdu de sa capacité à projeter des offensives extérieures, ses petits bras armés sont prêts localement à ubériser la guerre sainte, dans des initiatives individuelles difficilement décelables. Or, abordant cette menace, Catherine Vautrin, ministre des Armées, a curieusement estimé, mardi sur Europe 1, comme si elle découvrait le sujet : « Nous devons travailler sur ce sujet ». Cette somnolence de l’Etat mollasson face à l’islam radical fait du pouvoir l’allié benêt d’une idéologie totalitaire qui ne respecte que la force. En 2015, Jean-Yves Le Drian, à ce même ministère des Armées, avait déclaré après les tueries parisiennes : « Je ne parlerai jamais d’ennemi intérieur ». Il craignait d’alimenter une possible guerre civile. Mais ces postures morales sont des lâchetés. Dix ans après, il y a bel et bien un ennemi intérieur. Une 5e colonne a même trouvé de fanatiques collaborateurs auprès d’une extrême gauche qui a vendu son âme pour accompagner électoralement ce qu’elle croit être un islam révolutionnaire.

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Contre l’ennemi intérieur, l’exemple de Ceux de 14

Rien n’est plus contre-productif, pour éviter la guerre intestine, que de fermer les yeux sur les fractures nées d’une société ouverte à l’immigration de peuplement. Un sondage Ifop de 2020 montrait déjà que 74% des jeunes musulmans français (moins de 25 ans) se réclamaient de l’islam plutôt que des valeurs de la République. Les dirigeants, à commencer par le chef de l’État, savent ces échecs.

Leur choix de perpétuer une invasion extra-européenne les rend complices d’une colonisation agressive. Cette situation place de plus en plus de Français en insécurité culturelle, voire en légitime défense. D’autant que la résistance à l’envahisseur, qui dicta le comportement de nos aïeux durant la Grande Guerre, est inenvisageable pour les actuelles élites. Or le courage des Poilus reste un exemple. Il ne doit pas se contenter, comme avant-hier, du rituel républicain du 11-Novembre. Mes deux grands-pères étaient au front. L’un, Jean Rioufol, mobilisé à ses 18 ans, est mort peu après la guerre, à 28 ans, les poumons brûlés par les gaz allemands, laissant une veuve et deux jeunes orphelins. J’ai eu la chance en revanche de connaître mon grand-père maternel, le colonel Mario Ayme, à l’époque capitaine de la 2e Compagnie du 28e Bataillon de chasseurs alpins (28e BCA). Il m’a souvent raconté, notamment, son assaut de la tranchée de Bouchavesnes, le 12 septembre 1916, lors de l’offensive de la Somme, qui allait le blesser grièvement à une jambe et le rendre partiellement sourd. Ces souvenirs sont ceux de nombreuses familles françaises. La mémoire de ces héros nous oblige à chasser l’ennemi infiltré.

Jean-Jacques Goldman et ce que la France est devenue

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Nous vivons dans un étrange pays où un simple message de soutien d’un ancien chanteur populaire à nos forces armées déclenche une vague de commentaires étonnés, observe notre chroniqueur.


Assez régulièrement, je résiste à la tentation d’écrire un nouveau billet sur Jean-Jacques Goldman, ses rares propos publics, ses actions caritatives discrètes, l’aura inaltérable qui le maintient au premier rang de l’affection populaire. Je me rends compte que mes billets ne doivent pas être seulement un moyen d’exprimer son enthousiasme personnel, mais aussi une occasion de le dépasser pour susciter une réflexion plus générale.

Une forme de disruption

Cette belle opportunité m’a été offerte par le message manuscrit que Goldman a adressé, au soir du 11 novembre, en sa qualité d’ambassadeur du Bleuet de France.

Photo : le Bleuet de France

« Pas de paix sans gardien, ni de liberté sans soldat. Nous avons peut-être eu tendance à l’oublier, mais l’actualité nous le rappelle dramatiquement chaque jour. Il me semblait important de montrer notre reconnaissance envers nos armées, leurs blessés, et plus généralement envers toutes les forces de sécurité qui nous protègent au quotidien1. »

Il se dit « heureux et fier » d’être l’ambassadeur de cette association, qui apporte son soutien aux anciens combattants, aux veuves de guerre, aux pupilles de la nation, aux militaires blessés lors des missions de maintien de la paix, ainsi qu’aux victimes du terrorisme.

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Dans un monde où la normalité et la décence prévaudraient, il ne serait même pas nécessaire de s’attarder sur ces évidences adressées à tous les Français. Jean-Jacques Goldman serait sans doute le premier à juger excessive l’attention portée à son message de cœur, de solidarité et de reconnaissance envers tous ceux – et toutes les institutions – qui défendent notre société et veillent, autant que possible, à la tranquillité et à l’intégrité de nos existences.

Mais nous savons bien, pour le subir au quotidien, que le principe, dans le monde intellectuel, artistique et même sportif, est inverse, qui ne manque jamais une occasion de pourfendre ce que Jean-Jacques Goldman honore.

Organes de sauvegarde

Que ce soit à l’égard de nos armées ou de nos forces de l’ordre, on ne compte plus les dénonciations ineptes, injustes ou mensongères. J’ai encore en mémoire la sottise de Kylian Mbappé à la suite de la mort de Nahel, ainsi que les tribunes, pétitions et mises en demeure qui, presque toutes, poursuivent le même dessein : s’en prendre à nos organes de sauvegarde, qu’ils œuvrent à l’intérieur ou à l’extérieur. Et, malheureusement, je ne peux pas exclure de cette responsabilité collective le président de la République lui-même, qui, à plusieurs reprises, s’est cru autorisé à préjuger, toujours dans le même sens.

Dans ce climat où, dans tant de secteurs, le registre est devenu celui de la haine – au détriment de la courtoisie, qui devrait au moins, dans la forme, civiliser les contestations et les contradictions, même les plus vives – la sérénité et la rectitude que distille le message de Jean-Jacques Goldman font du bien. Elles constituent, en effet, un véritable havre de paix et ne font qu’amplifier mon admiration pour une personnalité qui, tout au long de sa carrière comme dans sa vie d’après, n’a jamais proféré la moindre stupidité ni cédé à la moindre facilité démagogique. Nous n’aurons plus jamais, de sa part, d’autres retours que ceux que l’éthique démocratique lui prescrit, que la vérité et la justice lui dictent. Nous nous en contenterons.

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  1. https://www.franceinfo.fr/societe/guerre-de-14-18/11-novembre/document-pas-de-paix-sans-gardien-ni-liberte-sans-soldat-a-l-occasion-des-commemorations-du-11-novembre-jean-jacques-goldman-adresse-un-message-aux-francais_7609268.html ↩︎

Le plus long «shutdown» américain s’achève: mais à quoi tout cela a-t-il servi?

Dans la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 novembre, Donald Trump a promulgué la loi mettant un terme à la paralysie budgétaire qui durait depuis 43 jours. Après cet interminable bras de fer politique, comment les marchés financiers vont-ils se redresser ? Analyses et perspectives.


Après que le Sénat a voté le maintien du financement du gouvernement fédéral jusqu’au 30 janvier, le plus long “shutdown” de l’histoire des États-Unis semble devoir s’achever dans un murmure. La Chambre des représentants doit se prononcer sur le projet de loi dès mercredi, tandis que le président Donald Trump a déjà proclamé « une très grande victoire ». Il reste toutefois difficile de savoir si quelqu’un a réellement gagné quoi que ce soit.

Rattrapage des salaires

Du côté positif pour la consommation américaine, le texte du Sénat garantit le versement rétroactif des salaires aux employés fédéraux mis en congé forcé et annule les licenciements décidés au début du shutdown, en gelant toute nouvelle suppression de postes au moins jusqu’au 30 janvier. Cependant, l’économie américaine montrait déjà des signes d’affaiblissement dans certains secteurs clés avant la fermeture, et l’absence de données actualisées a brouillé le tableau. Le rapport sur l’inflation (CPI) du mois d’octobre a bien été publié à temps, mais l’incertitude demeure concernant la mise à jour prévue pour le 13 novembre, tandis que les retards sur les statistiques d’emplois non agricoles de septembre et octobre continuent d’obscurcir la dynamique de croissance.

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Anatole Kaletsky, mon collègue, estime que le shutdown a peut-être masqué une faiblesse sous-jacente du marché du travail américain. Les indicateurs du secteur privé, tels que l’augmentation des licenciements annoncés par Challenger ou la forte baisse de l’indice des services de ressources humaines et d’emploi du S&P 1500, pointent clairement vers un mauvais chiffre de l’emploi, voire une contraction, ce qui pourrait provoquer un bref accès d’aversion au risque sur les marchés. À l’inverse, si les données concordent avec les signaux plus robustes des ventes de détail Redbook et de l’indice ISM des services, confirmant la poursuite de la création d’emplois, les investisseurs devraient accueillir leur publication avec sérénité.

Autres dossiers en attente

La liquidité devrait s’améliorer à mesure que le gouvernement rouvre. Après que la loi One Big Beautiful Bill Act a relevé le plafond de la dette en juillet, le Trésor a reconstitué sa réserve de liquidités à environ 950 milliards de dollars, mais a continué de conserver un excès de trésorerie. Le shutdown a pu retarder certains paiements, de sorte que la reprise des décaissements pourrait réduire le solde du Trésor et réinjecter de la liquidité dans le secteur privé. Cette dynamique contribue à expliquer la récente hausse des actions américaines et de l’or, ainsi que l’affaiblissement du dollar à l’approche de la réouverture. Le recul du taux de financement garanti au jour le jour (SOFR) indique lui aussi une diminution des tensions sur la liquidité des marchés monétaires.

La question clé est de savoir jusqu’où cette réserve de trésorerie va diminuer. Le Trésor a récemment reconnu détenir un excès de liquidités et s’est engagé à réduire ses emprunts pour faire baisser le solde. S’il atteint son objectif de 850 milliards de dollars, environ 100 milliards afflueraient vers le secteur privé. Un retour à son repère d’un “débit d’une semaine”, conforme à son objectif post-2016, impliquerait une injection plus importante, de l’ordre de 200 milliards.Toutefois, ce surcroît ponctuel de liquidité ne devrait pas modifier de manière significative les perspectives concernant le bilan de la Réserve fédérale.

Avec la résolution du shutdown, le Congrès peut maintenant se concentrer sur d’autres dossiers en attente. Les élus doivent encore négocier une prolongation des subventions de l’Affordable Care Act, un vote étant prévu pour décembre. Un autre point essentiel est la réautorisation de l’International Development Finance Corporation (DFC), qui a des implications macroéconomiques importantes. La DFC a été suspendue lorsque la loi BUILD a expiré le 1er octobre, sa reconduction ayant été retardée par le shutdown. Durant cette suspension, le Sénat a confirmé Benjamin Black, fils du dirigeant de private equity Leon Black, au poste de directeur général.

La reconduction de la DFC est importante étant donné le projet de l’administration de l’utiliser pour financer des initiatives liées aux priorités de sécurité nationale. Par exemple, la DFC s’est engagée à travailler avec la société d’investissement Orion Resource Partners et avec ADQ, le fonds contrôlé par le gouvernement d’Abou Dhabi, pour investir dans des projets de chaîne logistique concernant des minerais critiques pour les États-Unis et leurs alliés. En résumé, l’impact économique principal du shutdown devrait se limiter à des distorsions temporaires des données, qui devraient rapidement disparaître. L’injection ponctuelle de liquidité liée à la baisse des réserves du Trésor, combinée au retour à un fonctionnement normal du financement public, devrait fournir un soutien à court terme aux marchés — du moins jusqu’au prochain épisode d’affrontement politique.

«Cachez cette photo que je ne saurais voir»


La présence d’enfants voilées à l’Assemblée nationale, le 5 novembre, a provoqué une polémique. Malgré cela, la gauche anti-laïcité est parvenue à imposer son récit, présentant cette apparition comme autorisée dans les tribunes du palais Bourbon.


découvert, erte
(dé-kou-vêr, vèr-t’) part. passé de découvrir
1 Qui n’est pas couvert. Ils ont toujours la tête découverte. Une maison encore découverte. La cuisinière trouva le pot-au-feu découvert.Ils ne savent pas que c’est une femme découverte et non une femme nue qui est indécente, DiderotSalon de 1765, Œuvres, t. XIII, p. 18, dans POUGENS.
Qui a la tête découverte.Vous ne vous contentiez pas que je me tinsse découvert devant vous, PascalConv. 2.En même temps Foucault s’est couvert et a lu l’arrêt ; M. Fouquet l’a entendu découvert, SévignéLett. 22 déc. 1664.
Définition dans le dictionnaire Littré.


Donne lieu à une polémique la sortie scolaire à l’Assemblée nationale de mercredi dernier, le 5 novembre, qui avait été organisée par le député Modem Marc Fesneau. En effet, une photographie fut prise par Julien Odoul, député du rassemblement national, dans laquelle on peut voir, dans la tribune réservée au public, des fillettes affublées du hijhab. M. Fesnau explique :

« Des élèves de deux établissements scolaires privés ont visité hier l’Assemblée nationale, à leur demande, et dans le cadre d’un projet de l’un des établissements [ça ne s’invente pas] ‘Démocratie et citoyenneté’ ». (Il est interdit de rire, mais il est permis de sourire).

Les réactions ne se sont pas fait attendre.

D’une part, on dénonce une atteinte à la laïcité citoyenne; la présidente de l’Assemblée nationale elle-même, Mme Yaël Braun-Pivet, exprime sa réprobation au nom de la « cohérence républicaine ».

De l’autre, on déchire sa djellaba en hurlant à l’islamophobie et on parle même audacieusement d’« instrumentalisation du principe de laïcité » dont seraient victimes de jeunes enfants. D’ailleurs, Mme Yaël Braun-Pivet se ferait la complice de l’extrême-droite vu que la photo en question a été diffusée par Frontières; cependant, on se demande où est le problème vu que ce média jouit pleinement de la liberté de la presse et que la photo n’était pas truquée. Sans oublier que l’on peut tenir pour acquis que tel était le but précis de la manœuvre effectuée par les écoles concernées : jouer les crucifiés.

Mais que dit le droit?

Marine Tondelier, qui évoque également l’islamophobie, donne le cadre jurique général : « il y a ce qui est autorisé et ce qui n’est pas autorisé, ce n’est pas interdit ». En dépit de sa formulation très maladroite, on devine qu’elle pense sans doute à l’universelle « norme générale de liberté » : est permis tout ce qui n’est pas interdit.

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Les bonnes âmes inféodées aux lobbies religieux signalent, correctement, que la loi de 2004 qui prohibe, dans les établissements scolaires – et évidemment en sortie scolaire – le port de signes religieux ostensibles, ne vise pas les institutions privées. C’est là enfoncer une porte ouverte.

Le jésuitique Éric Coquerel, pour sa part, pose la question suivante à Mme Braun-Pivet : « Pouvez-vous me dire à quel règlement de l’Assemblée vous faites référence pour interdire des signes religieux au public qui visite l’Assemblée ? ». Antoine Léaument, lui, est catégorique : « aucune loi n’interdit le port du voile à l’Assemblée ». Et la patronne des Ecologistes est d’avis que « les huissiers de l’Assemblée sont très scrupuleux, donc si ça avait été interdit, elles ne seraient pas arrivées jusque-là ». Ces représentants du peuple français lancent ainsi aux intéressés une judicieuse invitation à commencer par le commencement et à nous pencher sur le texte applicable.

L’article 8 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale dispose : « pour être admis dans les tribunes, le public doit porter une tenue correcte » et se tenir « assis, découvert et en silence ».

Il est donc exact qu’il y a libre accès au Palais-Bourbon peu importe l’accoutrement du visiteur, à l’exception, cependant, de la tribune où l’on peut assister aux travaux de l’Assemblée. Pour sa part, le service communication (ou plus exactement com’) de l’Assemblée nationale nous informe que

« Le port de tenues manifestant une appartenance religieuse n’est pas en soi interdit. Ce n’est que dans le cas où le président de séance estimerait que le port de telles tenues est de nature à troubler l’ordre ou le bon déroulement des débats qu’il pourrait être amené à prendre des mesures…  cette tolérance permet d’accueillir en tribune des députées ou d’autres invitées étrangères voilées ».

En effet, on précise que « l’article 8… n’est pas interprété à la lettre »! Chacun appréciera l’euphémisme.

C’est là feindre d’ignorer qu’un texte clair, par définition, ne peux faire l’objet d’« interprétation » : l’on n’« interprète » pas une formule mathématique. C’est d’ailleurs une des failles de l’herméneutique juridique française où l’on invoque trop souvent spécieusement le soi-disant « esprit » d’un texte pourtant univoque afin de le contourner et même de le modifier. Or, cette disposition ne comporte aucune exception, aucune possibilité de « tolérance ». L’expression correcte eût donc été : « L’article 8 n’est pas appliqué dans tous les cas » : l’on accorde occasionnellement des passe-droits, notamment aux gamines.

(Incidemment, l’on peut supposer que ces étrangères seraient heureuses de se soumettre à la lettre de cette disposition, qui leur fournirait une libération, quoique éphémère. Sans oublier que les femmes occidentales se trouvant, par exemple en Iran, ou en Afghanistan, à quelque titre que ce soit, n’ont jamais droit à une quelconque « tolérance » les dispensant de la lettre chariesque).

D’aucuns invoquent un flou juridique, pourtant imaginaire. En ce qui concerne l’aspirante présidente Tondelier, on lui répondra que cette norme générale de liberté se heurte ici à une interdiction précise, consacrée par le participe passé « découvert » dont la portée sémantique est indiscutable. Et la possible négligence des huissiers n’a aucune incidence linguistique.

À noter l’outrecuidance de plusieurs députés, dont l’onctueuse Sandrine Rousseau, qui activent la glande lacrymale et posent bien soudainement comme protecteurs de l’enfance malheureuse : ils voudraient voir dans cette polémique la stigmatisation d’« enfants »; Marc Fesneau abonde, finalement, dans le même sens et rejette « des polémiques inutiles qui viennent surtout jeter des enfants à la vindicte populaire ». Du Hervé Bazin et du Jules Renard pur jus.

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(Note : en l’occurrence, « enfants » est un terme piquant vu que, selon les informations disponibles, il s’agit d’élèves de CM2, donc nubiles, ou sur le point de l’être aux termes de la charia; pour mémoire, selon l’éminente doctrine du regretté Ayatollah Khomeny, est proclamée apte à la reproduction la femme dès son 9e anniversaire, ou, en cas de maturité sexuelle incomplète, au moins habilitée à canaliser, d’une manière ou d’une autre, les bouillonnements maritaux).

Que nenni. Les défenseurs de la laïcité ne songent nullement à s’en prendre à ces fillettes qui sont bel et bien des victimes, mais à la mouvance religieuse rétrograde dont elles sont captives et qui lui servent de chair à canon; en revanche, ils exposent l’instrumentalisation, et même la provocation auxquelles se livrent les donneurs d’ordre. Il ne faut pas se tromper de chefs d’orchestre.

En résumé, on ne peut, en effet, que constater et déplorer, sinon un flou, une certaine incohérence dans l’article 8 dans la mesure où il est muet sur les oripeaux religieux en tant que tels. Il en résulte que, en l’état, peut prendre son siège à la tribune le prêtre catholique enseignant à Bétharram en visite à Paris et étranglé par son col romain; en revanche, en sont exclus les popes grecs orthodoxes, les juifs orthodoxes portant la yarmulke ou le schtreimel, les sikhs (dont le turban dissimule un kirpan) et les bonnes sœurs à cornettes.

Et donc les musulmanes cloitrées dans leur voile.

Cependant, quid du moine bouddhiste Matthieu Ricard? Impossible de nier qu’il est « découvert », mais sa tenue est-elle « correcte » ?

BNP: Omar m’a tuer?

Trois réfugiés soudanais aux Etats-Unis vont être dédommagés par la célèbre banque française, a décidé un tribunal à New York.


Entre la fin des années 1990 et 2009, BNP Paribas a exercé des activités bancaires (notamment via sa filiale suisse) permettant au régime soudanais dirigé par Omar Al-Bashir d’accéder aux marchés financiers internationaux. Selon trois réfugiés soudanais aux États-Unis, ce soutien financier indirect a facilité les exactions du tyran, dont le point d’orgue fut le génocide mené au Darfour. Un tribunal civil de New York, accédant à leur demande, vient de condamner la BNP à verser aux trois plaignants la coquette somme de 20 millions de dollars – l’établissement bancaire va faire appel. Il conteste en effet les fondements de la décision : il affirme n’avoir pas financé directement des armes ou milices. À 7 millions de dollars par tête, cela pourrait pourtant bien aiguiser l’appétit des 23 000 réfugiés soudanais, jadis affamés. Une addition théorique à 160 milliards de dollars, soit trois années de chiffre d’affaires de la BNP – autant dire la faillite immédiate. De quoi également ébranler le système bancaire mondial, car – rien qu’aux États-Unis – on dénombre près de 200 000 réfugiés bosniaques, rohingyas, yézidis ou ouïghours. À la clé, une potentielle débâcle financière généralisée pour l’humanité. Après avoir ruiné Birmingham ou miné la démocratie française, la justice occidentale, assoiffée de Bien, poursuivrait-elle la méthodique destruction d’une civilisation qu’elle abhorre ?

Max Chaleil, de l’édition à la… prostitution

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À l’occasion de la parution-évènement du Monde de la prostitution – De la violence à l’illusion, l’œuvre d’une vie : hommage à Max Chaleil et aux Éditions de Paris.


Précaution d’usage : ce n’est pas – du tout – parce que Max Chaleil a publié mes quatre derniers livres que j’interviens ici. J’interviens pour saluer une somme, celle d’une vie – et qui la justifie (outre l’édition, son épouse, son fils, ses petits-enfants, etc. – bien sûr).

Son sujet ne me concerne pas particulièrement : l’histoire, le monde de la prostitution, ses mots (tout un dictionnaire thématique !), ses illustrations (arts, livres, films, opéras, chansons, économie, etc.) – mais je l’ai ouvert, presque par devoir d’abord (mon éditeur !).

Je l’ai refermé – épaté -, stupéfait par la quantité de lectures (et de fiches : Max est un homme « à fiches ») que suppose une telle entreprise, et depuis si longtemps (Max m’a dit avoir été piqué par le sujet depuis l’adolescence – il a… 88 ans).

Le troisième tome vient de paraître. Son titre : La prostituée comme imaginaire et création – 600 pages (les quatre tomes prévus comptent 1500-1700 pages ; tome 4 : janvier 2026).

En dépit de mon peu d’appétence pour le thème, je répète – j’ai tant à lire et écrire, tant de sujets me retiennent ou requièrent que je me réjouis presque lorsque l’un d’eux m’indiffère un peu – j’ai donc lu. Et là, stupéfaction – c’est pour cela que je prends la plume – parce qu’il est très rare d’avoir ce sentiment de « l’œuvre d’une vie ».

Un seul exemple (sur les 1700 pages en quatre tomes !), celui de la prostitution et de la prostituée dans la littérature. Max rend compte de (presque) toutes les littératures. Il couvre aussi bien les domaines « occidentaux » (allemand, anglais, américain, italien, espagnol, hispano-américain, russe, nordique, etc.) qu’ « orientaux » (indien, chinois, japonais, arabe, etc.). Quant à la « Littérature antique et littérature française » – d’Aristophane à Lucien de Samostate, de Plaute à Pétrone, de Villon à Houellebecq -, elle occupe plus de 230 pages : un manuel, presque. Je connais un peu « la littérature », j’ai « un peu » lu – mais là encore, j’ai été édifié, par la profusion, la précision et la diversité des références (livres, auteurs).

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Et n’imaginez pas que ce soit du « digest », un résumé qui sente la seconde main. Au contraire, cette œuvre-vie (je répète : de l’adolescence à 88 ans, ce sont 70 ans qui en ont été « obsédés ») a été édifiée, érigée, gré à gré – avec le temps, auxiliaire indispensable, unique, du travail accompli. Son érudition m’a fait songer à celle de ces autodidactes (versus les universitaires souvent, pas toujours) qui ont inventé seuls leur voie, leur chemin, leur sujet (et prisme) – et que leur singularité irréductible, insigne, rend absolument nécessaires. Et indémodables : qui a démodé François Caradec, Hubert Juin, Francis Lacassin ? Personne. Dans leurs domaines respectifs, ils sont non négociables. Pareil pour la somme de Max à l’avenir : non négociable. On prend les paris.

Je connais presque « bien », Max : je le vois aujourd’hui encore lire Le Figaro tous les jours, découper les articles, acheter telle ou telle revue (selon les sujets) et surligner au jaune telle ou telle page, etc.

Je crois savoir comment cette somme d’un obsessionnel a été nourrie : par la lecture, donc. Personne sans doute n’aura autant lu sur le sujet. Je laisse les spécialistes en débattre – mais je ne vois pas comment, quand, ils pourraient faire l’économie de sa lecture. En discuter : autant qu’ils veulent. La négliger : je ne crois pas.

Et puisque j’en suis à évoquer Max et son œuvre, je voudrais ajouter deux mots sur l’édition – Les Éditions de Paris.

Max et Rosie, son épouse, ont à peu près le même âge, ils ont créé Les Éditions de Paris en 1984 : il y a plus de 40 ans. Leur fils, Frédéric, qui dirige la collection « Littérature », les a rejoints quelques années plus tard.

Pour avoir travaillé avec eux, publié les quatre livres que j’ai dits chez eux, je voudrais préciser combien ils représentent pour moi « les derniers des Mohicans », éditeurs à l’ancienne qui veillent à chaque étape du livre avec une exigence qui réjouit (a fortiori lorsque l’auteur – mettons, moi – l’est beaucoup lui-même, exigeant, obsessionnel). Max (passé par Bourgois, Stock, Belfond, Galilée, etc. comme créateur ou directeur de collection) pour le choix des manuscrits ; Rosie-Roselyne, son épouse, pour tout le reste (c’est-à-dire beaucoup, puisque Max ne sait pas même envoyer un mail), avec l’aide de Frédéric – pour sa collection (de Frédéric), où la littérature côtoie les écrits sur l’art (Frédéric est un esthète, au goût très sûr, érudit et sensible – donc devenu un ami cher).

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Je précise une chose, parce que je connais la malice – parfois malveillance – des gens. Je ne flagorne pas. Je décris très précisément tels que je les ai connus et observés les Chaleil au travail. Et si l’on veut se faire une idée de l’origine de tout cela, peut-être faut-il rappeler que le père de Max, Léonce, était un paysan cévenol, protestant, dur à la tâche, qui a travaillé toute sa vie d’arrache-pied : « Les chiens ne font pas des chats » – dicton que Léonce eût peut-être employé.

Celui-ci avait publié ses « Mémoires » : La Mémoire du village (Stock, 1977 ; réédité aux Éditions de Paris), salué et régulièrement cité par Emmanuel Le Roy Ladurie (spécialiste d’histoire rurale entre autres)… et par Bernard Pivot, puisque Léonce fut l’un des invités d’« Apostrophes ». Bilan : plus de 100 000 exemplaires vendus.

A plus de 85 ans, les Chaleil, certes, lèvent le pied. Mais – mon dernier livre est paru en octobre, donc je l’atteste – la passion qui les anime, ce feu sacré, est intact(e). La fatigue, parfois, les pousse à « faire une pause » – et Frédéric la pallie si nécessaire. Mais à 40 ans, leur maison a les allures d’une œuvre (1200 livres parus) – que couronne aujourd’hui le grand œuvre de Max, sur la prostitution. Je prie ceux qui en douteraient, d’avoir l’honnêteté de faire comme moi : ouvrir le livre, le lire, l’examiner – et constater son éminence.

Coda : connaissant la nullité asymptotique de Max avec l’informatique, j’ai été d’autant plus stupéfait par sa somme. Internet ici n’a joué aucun rôle. De l’érudition à l’ancienne, avec des journées en bibliothèque(s), de la chine des décennies (!) durant pour déceler tel ou tel livre (ou rareté), des notes prises à la main, des expositions courues un peu partout quand c’était possible, etc. : cela aussi est très intéressant – et impressionnant. On ne fabrique pas les mêmes livres érudits avec OU sans Internet : il y a vraiment « quelqu’un » derrière cette somme – et on l’entend. Je ne prolonge pas – mais ceux qui lisent « de l’érudition » aujourd’hui savent de quoi je parle : cette différence, si humaine ; ce temps passé, tangible ; cette main, que l’on devine… ou discerne.

La prostituée comme imaginaire et création (Littérature, chanson, opéra, art, cinéma) – Tome 3 de « Le Monde de la prostitution – De la violence à l’illusion ». Éditions de Paris-Max Chaleil, 618 pages.

Wokisme: la télévision publique mène son enquête…

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Le journaliste Tristan Waleckx © Nathalie Guyon / France TV

Promis: avec son émission consacrée à la prétendue «dictature des bien-pensants», elle n’avait aucune idée en tête!


Le 5 novembre, le journaliste Tristan Waleckx se promettait de tout nous dire sur le wokisme dans l’émission hebdomadaire Complément d’enquête qu’il anime sur France 2. Plusieurs questions le tarabustent : « le “wokisme” est-il réellement un danger pour notre pays ? » ; les adversaires du wokisme ont-ils raison de parler de « dictature des bien-pensants ? » ; le wokisme « serait-il un “nouvel obscurantisme”, comme le qualifient certains hommes politiques ? » Ces questions trouveront rapidement leurs réponses. Dès les premières minutes de l’émission, le chemin est tout tracé et le téléspectateur comprend immédiatement ce que Tristan Waleckx va tenter de lui faire gober.

Thomas Jolly, l’audacieux

Cela commence avec… la cérémonie des JO de Paris, cet « événement qui a rendu fier tout un pays »grâce au « parti pris audacieux de son directeur artistique », Thomas Jolly. Celui-ci ne comprend pas les reproches qui lui ont été adressés. Il s’interroge : « Inclure l’ensemble des Français et Françaises, dans leur diversité, dans une cérémonie qui s’adresse à chacun et chacune d’entre eux et d’entre elles, qui a créé de l’unité, de la fierté nationale, c’est woke ? » M. Jolly ne se rend visiblement pas compte que cette phrase est un pur produit de l’idéologie qui a conçu, entre autres difformités, le verbiage « inclusif ». Sa cérémonie était imprégnée jusqu’au trognon de la même idéologie. Sans le savoir, Tristan Waleckx vend d’ailleurs la mèche lorsqu’il évoque l’abondante présence de « représentants queer », entre autres Nicky Doll, « la plus célèbre drag-queen française, animatrice d’une émission sur France Télévisions, une figure du mouvement LGBT qui défend les droits des minorités sexuelles ». Cette cérémonie n’était effectivement pas destinée à « l’ensemble des Français et Françaises » mais aux différentes « communautés » supposément discriminées qui furent majoritairement représentées dans ce lamentable spectacle.

Au député Julien Odoul qui confie n’avoir pas particulièrement apprécié la prestation d’Aya Nakamura avec la Garde républicaine, le journaliste rétorque : « Elle est quand même la chanteuse francophone la plus écoutée au monde. » Rectificatif : si Aya Nakamura est très écoutée dans le monde entier ce n’est sûrement pas parce qu’elle est une « chanteuse francophone » mais plutôt parce qu’elle est une chanteuse charabiaphone qui baragouine, sur des musiques électro-pop standardisées, des textes incompréhensibles, un salmigondis farci d’argot malien, de verlan français, anglais ou espagnol, d’expressions arabo-africaines à la mode dans les « quartiers », etc. Il y a quelques années, le député socialo-macroniste Rémy Rebeyrotte s’était extasié devant ce galimatias et voyait en Aya Nakamura une ambassadrice de la langue française parce que, disait-il, « elle est en train de porter au niveau international de nouvelles expressions et évolutions de la langue française ». On ne parlait pas encore d’interdire l’alcool à la buvette de l’Assemblée nationale ; pourtant…

Militants identitaires et wokisme pur

Bien entendu, les personnes qui ont critiqué cette cérémonie ne peuvent être que des « militants identitaires » de la pire espèce, des personnalités douteuses, intolérantes, homophobes et racistes. D’ailleurs, insiste le journaliste, un rapport récent[1] a mis en évidence les liens entre ces individus et différentes associations, dont une, « considérée comme très conservatrice », est financée par « le milliardaire catholique Pierre-Édouard Stérin ». L’initiateur de ce rapport, Neil Datta, est le directeur exécutif du Forum parlementaire européen pour les droits sexuels et reproductifs, souligne le reportage qui omet toutefois de préciser, comme c’est bizarre, que ce Forum basé à Bruxelles est financé entre autres par la Commission européenne, la Gates Foundation et… l’Open Society Foundation de George Soros. Interviewé par France TV, Neil Datta livre une réflexion étonnante : « Auparavant, ils [les vilains détracteurs du wokisme] utilisaient “l’idéologie du genre”, ils s’en sont servis et ils ont bien utilisé cette notion d’idéologie du genre. Ça ne sert plus à grand-chose maintenant, les gens s’en lassent, donc tout l’ensemble de cette extrême droite a inventé cette notion de woke qui ne veut rien dire mais, en même temps, on comprend ce que cela veut dire. » Soit Neil Datta est un imbécile qui n’a strictement rien compris au wokisme, soit il fait semblant d’être un imbécile n’ayant strictement rien compris au wokisme pour noyer le poisson – dans ce cas, il fait ça très bien. Quoi qu’il en soit, nous lui recommandons de lire l’essai du philosophe Jean-François Braunstein La Religion woke, qui explique justement que « la théorie du genre est le cœur de la religion woke, la partie la plus originale mais aussi, en quelque sorte, le “produit d’appel”, par son absurdité décomplexée, et aussi par son mystère quasi théologique ». Pour plus d’informations, il pourra également compulser l’ouvrage intitulé Face à l’obscurantisme woke puisque celui-ci a pu paraître malgré la demande acharnée de censure du Grand Inquisiteur du Collège de France Patrick Boucheron qui fut aussi, il n’y a pas de hasard, l’un des co-scénaristes de la cérémonie des JO.

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Le sujet de l’islamo-wokisme est ensuite abordé. « Que s’est-il passé à Lyon 2 ? Cette faculté est-elle tombée aux mains des wokes ? », demande Tristan Waleckx en relatant l’affaire Balanche, du nom de cet universitaire qui, parce qu’il avait approuvé l’interdiction d’une soirée consacrée à la rupture du jeûne du ramadan au sein de l’université, a été agressé pendant son cours par des individus masqués le traitant de sioniste et de raciste. Sur France TV, on se demande quand même, l’air de rien, si l’enseignant ne l’aurait pas un peu cherché : deux jours avant cette agression, Fabrice Balanche était effet interviewé sur… CNews, où il dénonçait l’islamo-gauchisme qui gangrène l’université française en général et Lyon 2 en particulier. Les islamo-gauchistes qui l’ont agressé ont posté leur méfait sur les réseaux sociaux. La vidéo, devenue « virale », a surtout été « reprise par des comptes comme celui du syndicat étudiant de droite, l’UNI, et ceux des sites d’extrême droite, Frontières et Boulevard Voltaire », tient à souligner, avec des frissons dans la voix, le journaliste. L’enquête progresse : il semblerait bien que cette affaire ait été montée en épingle par la droite nationale la plus rigide.

L’universitaire Xavier-Laurent Salvador, signataire d’une tribune dénonçant la mouvance islamo-wokiste dans les milieux universitaires et co-directeur de Face à l’obscurantisme woke, est interviewé. Il cite différents intitulés baroques ou nébuleux glanés dans les dizaines et dizaines de publications, de colloques, d’articles universitaires sur le genre, le queer, le racialisme, le décolonialisme, etc., qu’il a recensés en France pour le seul mois de février 2023. Pour contrecarrer ce témoignage, Complément d’enquête a mené « sa propre enquête » et, pour ce faire, s’est tourné vers Étienne Ollion, sociologue au CNRS. D’après celui-ci, Xavier-Laurent Salvador a utilisé une « logique de l’anecdote » au détriment de la « logique scientifique ». Heureusement, Étienne Ollion et son équipe ont lancé une « vaste étude » portant sur l’évolution des sciences sociales depuis 2001 et sont parvenus au résultat suivant : il n’y a guère plus de travaux sur le « genre » ou le « concept de race » en 2022 qu’en 2001. Curieux ! Pour comprendre ce tour de passe-passe, il suffit de lire Ce que le militantisme fait à la recherche (Tract Gallimard n° 29), ouvrage dans lequel la sociologue Nathalie Heinich rappelle un article du Monde citant l’étude d’un chercheur se faisant fort de démontrer, lui aussi, « statistiques et graphiques à l’appui », le très faible pourcentage depuis 2011 de certains termes – « décolonial », « intersectionnel », « racisé », « islamo-gauchisme » – dans les quatre moteurs de recherche universitaire les plus utilisés. Résultat stupéfiant : 0,01 % ! Mais… « il suffit d’ajouter à la liste quelques termes très fréquents dans ce type de travaux (tels que “genre”, “féminin”, “islamophobie”, etc.) et de prendre en compte d’autres sources (annonces de colloques, de journées d’étude, titres de séminaires, ateliers, etc.) pour arriver à un tout autre résultat: ces termes constituent plus de la moitié du corpus ainsi élargi », écrit Nathalie Heinich. Par ailleurs, ironise-t-elle, comment prendre au sérieux certains « experts » du CNRS, en particulier ceux qui défendirent la « géographe du genre » Rachele Borghi, victime, selon eux, « “d’attaques indignes”, malgré “une rigueur et une éthique scientifiques” ne faisant aucun doute pour “celles et ceux qui, depuis le début de sa carrière, ont réalisé des évaluations véritablement scientifiques de ses travaux” ». Et Nathalie Heinich de se demander qui a bien pu expertiser, sans éclater de rire, l’article « scientifique » de Mme Borghi intitulé « De l’espace genré à l’espace queerisé », dans lequel la géographe affirme d’abord que « l’espace public est conçu, géré et modelé sur la base d’une conception dualiste rigide: homme-femme, licite-illicite, homosexuel-hétérosexuel », et conclut ensuite que « la géographie de la sexualité, définie comme branche de la géographie, peut contribuer de manière importante au dévoilement des normes et des structures de pouvoir qui oppriment et excluent de l’espace public les dissident.e.s sexue.le.s ». Présupposé délirant, remise en cause pseudo-foucaldienne des « normes et des structures de pouvoir », militantisme néo-féministe et pro-LGBT, écriture inclusive – bref, du wokisme à l’état pur…

Jean-Michel Blanquer, le sage

À la fin de l’émission, Tristan Waleckx reçoit Jean-Michel Blanquer. Celui-ci est présenté comme « l’un des tout premiers à avoir utilisé en France le mot et le concept de wokisme ». Nous devons rectifier cette assertion : s’il est vrai que, depuis qu’il a quitté le ministère de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer n’a pas manqué de dénoncer les dérives wokes, de nombreux universitaires, journalistes et représentants politiques l’ont devancé dans le combat contre le wokisme. Par ailleurs, la circulaire Blanquer de septembre 2021 – « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » – contredit l’idée que le ministre ait été parmi les premiers à s’opposer à l’idéologie woke, en particulier à la théorie du genre. Cette circulaire entérinait en effet les revendications d’associations transgenres: possibilité pour l’élève de se déclarer du sexe de son choix, de changer de prénom, de bénéficier d’aménagements particuliers pour l’utilisation des toilettes et des vestiaires, de jouir d’un traitement individualisé et, bien sûr, d’une bienveillance sans limite de la part du « personnel éducatif » et des élèves auxquels devaient être proposées des sessions de sensibilisation (c’est-à-dire de rééducation) sur le sujet[2]. Il n’est pas impossible que cette circulaire ait été concoctée dans le dos du ministre, sous la férule de hauts fonctionnaires indéboulonnables suivant à la lettre l’agenda européiste de rééducation de la population, tant en ce qui concerne les questions de sexualité et de genre qu’en ce qui concerne les questions d’écologie ou d’éducation aux médias. Il n’empêche: la signature de M. Blanquer au bas de ce document consternant restera comme l’illustration de sa soumission à l’idéologie transgenre au moment où il aurait dû, au contraire, faire montre de conviction et d’autorité et renvoyer dans leurs cordes les idéologues de la rue de Grenelle.

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Tristan Waleckx a, depuis le début de son émission, une idée en tête. Il pose par conséquent à Jean-Michel Blanquer une question qui n’est pas une question mais un sous-entendu courant chez les journalistes de l’audiovisuel public : « Le fait d’avoir popularisé le mot woke, ça a permis à l’extrême droite d’imposer un concept dans le débat public ? » Quelques minutes plus tard, après avoir montré un graphique où il apparaît que l’expression « islamo-gauchisme » a été entendue dix à vingt fois plus « sur CNews, la chaîne de Vincent Bolloré » que sur les autres chaînes d’info, le journaliste, toujours aussi lourdingue, interroge faussement l’ex-ministre : « Ça veut dire quelque chose ? » Et lorsque ce dernier affirme que, CNews ou pas, « l’islamo-gauchisme existe », le journaliste sort ce qu’il croit être sa carte maîtresse :« C’est un concept qui est quand même contesté par le CNRS qui est un institut sérieux (sic – voir ci-dessus) expliquant que “l’islamo-gauchisme est un slogan politique ne correspondant à aucune réalité scientifique” » et par des présidents d’universités déclarant que « l’islamo-gauchisme est une pseudo-notion qu’il conviendrait de laisser, sinon aux animateurs de CNews, plus largement à l’extrême droite ». L’argumentation tourne court. Au passage, on remarquera qu’en ce moment, qu’il s’agisse du wokisme, de l’islamo-gauchisme ou de l’écologisme, les gourous de ces nouvelles religions n’ont qu’un mot à la bouche, le mot « science », mot-amulette, mot-talisman, mot magique ayant pour but d’empêcher justement toute démarche scientifique, laquelle ne peut se passer de réflexion critique et de controverses.

Nul besoin, je crois, de préciser l’objectif de cette émission. Le procédé pour y parvenir, grossier, est celui qu’utilisent régulièrement les journalistes bien-pensants du service public. Ce « Complément d’enquête » corrobore les déclarations de Delphine Ernotte, la présidente de France TV ayant avoué que l’audiovisuel public n’était pas là pour montrer la France telle qu’elle est mais telle que la caste médiatico-progressiste aimerait qu’elle soit. De ce côté-là, on peut dire que Tristan Waleckx a parfaitement rempli sa mission…

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[1] La prochaine vague : comment l’extrémisme religieux regagne le pouvoir. L’extrémisme religieux en question est bien entendu l’extrémisme… catholique qui, comme chacun sait, ravage l’Europe en ce moment.

[2] Pour plus d’informations sur cette position catastrophique du ministre Jean-Michel Blanquer vis-à-vis des revendications émanant de différents organes politiques et associatifs promouvant l’idéologie sur le genre, je renvoie à mon article du 16 octobre 2021 : https://www.causeur.fr/vallaud-belkacem-blanquer-meme-combat-215169

Macron debout devant Poutine et couché devant Tebboune

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© SYSPEO/SIPA

La grâce de Boualem Sansal ne solde pas notre lourd contentieux avec l’Algérie


C’est hier soir que l’avion officiel affrété par l’Allemagne a atterri à Berlin. À son bord, Boualem Sansal, enfin libéré de sa geôle d’Alger où il était emprisonné depuis le 16 novembre 2024 pour de simples faits d’opinion. Suite à l’intervention du président de la République fédérale Frank-Walter Steinmeier, l’écrivain dissident, âgé de 81 ans, a été gracié par le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour motifs « humanitaires ».

Sansal, qui souffre d’un cancer, a été dès son arrivée admis dans un hôpital berlinois, où il pourra bénéficier de soins dignes de ce nom. Qu’il soit permis à l’auteur des lignes d’en pleurer de joie. L’écrivain est un ami de Causeur. Et le système de santé algérien, auquel il avait accès depuis son arrestation, est calamiteux. La preuve : les présidents de ce pays autoritaire et corrompu – et pourtant si riche de son pétrole et de son gaz – préfèrent systématiquement consulter des médecins en Europe quand ils souffrent de maladies graves.

Emmanuel Macron peut à bon droit se féliciter de la « mission de bons offices » effectuée par son homologue allemand, qui lui a permis d’obtenir l’élargissement de Sansal sans avoir à principalement remercier Tebboune, dont la politique reste de toute évidence résolument hostile à la France.

A lire aussi: Compromissions cairotes

Curieusement pourtant, l’Élysée a fait savoir hier que les conditions étaient à présent réunies pour « renouer le dialogue »avec le régime algérien. Alors que celui-ci continue de refuser ses citoyens expulsés de France, maintient toujours en détention le journaliste Christophe Gleizes et est soupçonné par la justice d’être impliqué dans l’enlèvement d’Amir DZ, un opposant algérien réfugié dans notre pays…

« Le bras de fer ne fonctionne pas, c’est clair », a même osé glisser un proche du président français, pour suggérer que le calvaire de Sansal aurait été abrégé plus tôt si Bruno Retailleau n’avait pas fait preuve de détermination vis-à-vis d’Alger dans le dossier des OQTF quand il était Place Beauvau et si le RN n’avait pas fait voter à l’Assemblée nationale le 30 octobre une résolution visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968. Syllogisme typiquement macronien ! La stratégie de lèche-babouches de l’Élysée et du quai d’Orsay n’a pas mieux fonctionné que la fermeté affichée du patron des LR.

Il n’est pas question ici de discuter de la sincérité et de la résolution du chef de l’État dans l’affaire Sansal, ni davantage dans le contentieux du Sahara occidental (dans lequel il a pris le parti du Maroc l’année dernière). Mais simplement de souligner son hypocrisie, aussi humiliante que contre-productive. Macron feint de ne pas voir que, de toute manière, les Algériens ont décidé de punir la France. Sa comédie ne fait que renforcer leur mépris. « On n’obtient rien en se fâchant avec ceux qu’on sollicite », a indiqué hier un conseiller de l’Élysée. On n’obtient rien non plus en leur lâchant tout.

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Ils n’auront pas notre haine?

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Les responsables politiques réunis autour du président Macron devant le Stade de France le 13 novembre 2025. 10 ans plus tôt, trois islamistes se sont fait exploser autour du stade, faisant une victime © Stephane Lemouton/SIPA

13-Novembre. Les commémorations et les nombreuses émissions proposées dans les médias entendaient à tout prix mettre de côté les «mauvais» sentiments, observe notre contributrice. Mais, on ne vainc pas l’islamisme conquérant, pas plus qu’on ne rend justice, autour d’un «groupe de parole».


Cette semaine, C ce soir a logiquement consacré l’une de ses émissions quotidiennes aux attentats du 13 novembre 2015. Sur le plateau : l’ancien président devenu député socialiste François Hollande, Gaëlle, victime du Bataclan défigurée à vie, Aurélie Silvestre, dont le compagnon et père de ses deux enfants a été assassiné, l’historien Denis Peschanski, codirecteur du Programme 13-Novembre, et Jean-Xavier Delestrade, réalisateur de la série Les Vivants, diffusée cette semaine sur France 2.

Islamiste, ce mot si difficile à prononcer

Les victimes sont mises en avant, à juste titre : on parle de leur souffrance, de celle de leurs proches, des blessures visibles et de celles qui ne le sont pas, de la reconstruction, de la transmission du souvenir aux jeunes générations.

Mais les auteurs, eux, disparaissent du récit. François Hollande prononce bien le mot « islamiste », prudemment, deux ou trois fois, mais personne ne s’y arrête. Et lorsqu’il cite les attaques qui ont précédé le 13-Novembre (Merah, Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher), il ne précise même plus la nature de ce terrorisme. Comme si tout cela relevait désormais d’une malédiction sans visage, d’un mal abstrait, dépolitisé.

L’émission préfère explorer le thème de la guérison, du dialogue, et la fameuse « justice restaurative » : cette approche de la réparation plutôt que de la punition, introduite par la loi Taubira du 15 août 2014 pour les délits de droit commun. Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos djihadistes du 13 novembre, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, a fait savoir par la voix de son avocate qu’il était partant. Oui, partant ! Dans une « démarche restaurative », il souhaite rencontrer certaines victimes.

On cauchemarde. Celui qui, durant son procès, revendiquait son statut de « combattant de l’État islamique », invoquait Allah et le prophète, continue aujourd’hui à consulter en prison des contenus de propagande islamiste sur une clé USB. Et le voilà qui veut participer à un programme de justice restaurative. Restaurer quoi, au juste ? Le lien social ? La confiance ? La paix civile ? Il n’en a probablement rien à faire. Peut-être cherche-t-il simplement à profiter des failles du droit pour continuer à hanter ses victimes sous un vernis humaniste.

Bonjour le groupe de parole !

Comme l’a justement rappelé Riss, directeur de Charlie Hebdo, en réaction à la demande d’Abdeslam : on ne « restaure » pas le lien social avec ceux qui ont voulu le détruire. La justice n’est pas un groupe de parole. Pendant l’émission, la question de la compatibilité entre justice restaurative et terrorisme n’a pas été posée. Trop dérangeante, sans doute.

On préfère s’émouvoir du témoignage de Gaëlle, rescapée du Bataclan défigurée à vie, qui a choisi de rencontrer un terroriste en prison. Cette même victime avait déjà été mise en avant dans Envoyé Spécial par Élise Lucet, une journaliste toujours prompte à transformer l’émotion en leçons de morale. Gaëlle raconte qu’elle est « dénuée de haine », que la colère la paralyse. C’est bien son droit. Et nos médias adorent ce mantra devenu injonction : « Vous n’aurez pas ma haine » – comme l’écrivait Antoine Leiris, qui avait perdu son épouse au Bataclan, auteur du livre éponyme.

C’est que la haine, aujourd’hui, est devenue un mot tabou, presque indécent, un mot des plus sales, un mot quasiment inaudible, presque barbare. Comme si haïr ceux qui veulent notre mort faisait de nous des barbares, ou pire : des électeurs du Rassemblement national. Seule compte l’empathie bien légitime avec les victimes et leurs proches, mais la colère elle est exclue, perçue comme une anomalie. 

Pourtant, peut-il vraiment y avoir une joue tendue, une rédemption possible, avec ceux qui ont voulu exterminer des innocents au nom d’Allah, avec ceux qui ont répondu à l’appel de Daesh de cibler « les méchants et sales Français » ? Ce choix médiatique de se focaliser sur la souffrance et la mémoire n’est pas anodin. Il évite soigneusement de poser la question politique : quel bilan dix ans après ? Que n’avons-nous pas voulu voir ?

Le laxisme migratoire continue

Lors du procès des attentats, François Hollande lui-même a reconnu qu’en 2015, le pouvoir savait que la filière d’immigration syrienne servait de porte d’entrée à des terroristes. Il savait, et il n’a rien fait ? Dix ans plus tard, les frontières sont restées poreuses, et la menace islamiste, elle, n’a pas reculé.

En octobre 2025, trois jeunes femmes radicalisées ont été écrouées à Paris pour préparation d’attentat. Le sixième projet islamiste déjoué depuis le début de l’année. Le discours djihadiste se diffuse toujours sur les réseaux sociaux, aux abords de certaines mosquées, et dans de nombreuses associations sportives à visée séparatiste. Et dans les écoles, on n’ose même plus parler de la hausse des atteintes à la laïcité.

Alors oui, on a le droit de haïr les terroristes islamistes. Les haïr, c’est affirmer qu’il existe des choses qui ne se réparent pas, ne se comprennent pas, ne se pardonnent pas. Les haïr, c’est rappeler que la justice n’est pas une thérapie collective, mais une frontière morale. Et qu’à force de confondre empathie et faiblesse, nous finirons peut-être par ne plus savoir ce que nous devons protéger.

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Djihadisme: les femmes, une nouvelle donne?

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Salah Abdeslam au tribunal à Bruxelles, 5 avril 2023 © Shutterstock/SIPA

Quelques jours avant le dixième anniversaire des attentats du 13 novembre, les Français apprenaient, médusés, que le dernier terroriste survivant Salah Abdeslam disposait d’un ordinateur en prison, qu’il s’était marié par téléphone avec une certaine Maëva B., elle-même radicalisée, que celle-ci avait pu lui faire parvenir de la propagande djihadiste sur une clé USB et que, désormais séparée de lui, elle nourrissait son propre projet d’attentat islamiste. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, s’est dit sidéré.


La première affaire remonte au 17 janvier 2025. Salah Abdeslam, détenu dans la prison de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, est accusé de « recel d’objet illicite » via une « potentielle clé USB » ayant permis, à partir de son ordinateur, des connexions à des fichiers ayant trait à des organisations comme l’État islamique ou Al-Qaïda. L’homme le plus dangereux de France est transféré dans un des quartiers de Haute Sécurité que vient de créer Gérald Darmanin. Près de dix mois plus tard, le 4 novembre 2025, le PNAT (Parquet national antiterroriste) entend à deux reprises le détenu, dans le cadre d’une garde à vue, à propos de « quatre » clés, connectées, entre décembre 2024 et janvier 2025, qui n’ont pas été retrouvées. L’amie (et ancienne « épouse ») de Salah Abdeslam qui le visitait au parloir, interrogée et mise en garde à vue, reconnaît avoir chargé de propagande islamiste une clé USB qu’elle a « fait remettre » à Salah Abdeslam au cours d’un parloir. C’est alors qu’on a aussi découvert une affaire dans l’affaire: celle de la menace imminente d’un attentat.

Pas de menace particulière

Au domicile de Maëva B., les enquêteurs de la Direction nationale de la police judiciaire, et la DGSI, enquêtant sur ses outils numériques, décèlent un projet d’action violente terroriste. Projet qui implique également un homme de 20 ans radicalisé, habitant en Isère, époux religieux de Maëva, avec velléités de rejoindre une organisation terroriste, ainsi qu’une adolescente de 17 ans résidant dans l’Hérault. Ce risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger est-il concomitant avec les commémorations des dix ans des attentats du Stade de France, des terrasses et du Bataclan ? « Pas de menace particulière, a estimé la chef de la DGSI, pour le 13 novembre ».

Et Salah Abdeslam, dans tout ça ? Son avocate et le PNAT notent qu’il n’y a pas d’éléments le reliant à ce projet d’attentat. Mais la chef de la DGSI précise bien que le terroriste « demeure radicalisé et convaincu de l’idéologie mortifère qu’il a suivi pendant des années ». Le PNAT a requis sa mise en examen et celle de son ex-compagne « pour recel d’objet illicite remis à détenu (la clé USB), pour complicité et association de malfaiteurs délictuelle de droit commun ». Maeva B. est mise également en garde à vue, d’une durée exceptionnelle de 96 heures, ainsi que deux autres individus. Si Salam Abdeslam ne semble pas impliqué dans le projet d’attentat, reste à savoir comment et pourquoi cette propagande islamiste est arrivée dans son ordinateur.

Sidération

Ces annonces ont plongé les Français dans la sidération. Comment tout cela est-il possible ? On posera ici des questions sans développer les réponses. Comment Salah Abdelsam pouvait-il être en possession d’un ordinateur depuis 2024 ? Réponse: l’obtention d’un ordinateur (avec accès à internet interdit) est rendue légale, depuis 2009, pour un détenu quand il en fait la demande. Les droits ? La CEDH qui nous gouverne contraint les États à bien traiter les détenus. Étant stricto sensu la privation de la liberté, la prison, est, à elle seule, pense la Cour, une sanction suffisante. C’est ainsi que les détenus doivent jouir de tous les droits dont celui de « se marier »  fût-ce par téléphone. Un criminel de grande envergure a même le droit d’entamer une « démarche de justice restaurative » comme vient de l’annoncer l’avocate d’Abdeslam exprimant le désir de son client « d’entrer en contact » avec les parties civiles.

Apparemment, les deux affaires – la clé USB et le projet d’attentat– sont distinctes. Salah Abdelsam n’est pas concerné ? Pas encore ? C’est là que je me suis souvenue du livre de Hugo Micheron Le jihadisme français et sa partie sur les prisons. On le sait, le jihad se poursuit en prison qui est, par excellence, un lieu de vie idéal, convivial et incubateur de la radicalisation. Salah Abdeslam allait-il avoir un rôle à jouer par l’influence qu’il pourrait avoir ? On sait comme les détenus islamistes acquièrent l’auréole du martyre en prison.

Drôle d’atmosphère

À la question que l’on se posait, il y a peu encore : le jihad est-il toujours dans une séquence « à marée basse de reconfiguration à bas bruit » ? on connaît la réponse. On dit « jihadisme d’atmosphère » pour signifier que c’est la société tout entière qui est concernée par la violence des actes et un « entrisme » au quotidien, en tout et partout, d’une rare intensité. Si le fameux colloque « sur la Palestine » du Collège de France a été annulé, et si la dame du perchoir proteste de sa fermeté à venir, les questions demeurent: comment le Collège de France en est-il arrivé là ? Comment des fillettes voilées sont-elles « entrées » récemment – quelle ironie !- » à l’Assemblée nationale pour assister à une séance ? Les élections à venir nous préparent de belles surprises. L’affaire présente montre exemplairement la montée en puissance de Daesh ou Al-Qaïda.

Faut-il voir, enfin, une nouveauté, comme certains le pensent, dans ce nouveau jihad, avec la présence des femmes ? À la différence d’Al-Qaïda, Daesh, « califat genré », accueillait, en son sein, les femmes, « génitrices des lionceaux à venir ». D’où la déstabilisation créée par un commando de femmes, à Paris, le 4 septembre 2016, près de Notre-Dame. Il y a peu, trois Françaises, âgées de 18, 19 et 21 ans, ont été écrouées par le PNAT, pour préparation d’un attentat terroriste dans des bars parisiens ou salles de concerts. Les femmes, disent les experts, sont plus tenaces et plus fiables que les hommes dans la lutte jihadiste. En attendant nous sommes prévenus par les patrons des Renseignements de la gravité de la menace jihadiste sur notre sol. La clé de Salah Abdeslam n’a pas été retrouvée.

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Dix ans après le 13-Novembre, la menace endogène

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Le Bataclan à Paris photographié le 12 novembre 2025 © HENRI WELSCHINGER/OLA NEW/SIPA

Dix ans après les attentats sanglants du Bataclan, du Stade de France et des terrasses de cafés parisiens, des experts avancent que la menace extérieure s’est atténuée: les commandements centraux de l’État islamique et d’Al-Qaida ont été considérablement affaiblis. En revanche, l’ennemi intérieur apparaît toujours aussi redoutable et imprévisible. Surtout, depuis 10 ans, une autre insécurité a explosé, observe notre chroniqueur – l’insécurité culturelle.


L’ennemi est là. Parmi nous. Dix ans après les attentats islamistes du 13 novembre 2015, qui ciblèrent notamment des consommateurs sur des terrasses de bistrots parisiens et le public d’un concert au Bataclan, l’islam djihadiste s’est fondu dans la société française qu’il déteste.

Menace endogène

Loin d’avoir été traqué, comme il a pu l’être par Israël et certains pays musulmans, il s’est installé dans les recoins de la nouvelle société « diversitaire ». Céline Berthon, directrice de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), le rappelait lundi sur RTL : la menace islamiste est désormais « endogène » et mobilise auprès d’une jeunesse âgée de 17 à 22 ans. Si l’État islamique semble avoir perdu de sa capacité à projeter des offensives extérieures, ses petits bras armés sont prêts localement à ubériser la guerre sainte, dans des initiatives individuelles difficilement décelables. Or, abordant cette menace, Catherine Vautrin, ministre des Armées, a curieusement estimé, mardi sur Europe 1, comme si elle découvrait le sujet : « Nous devons travailler sur ce sujet ». Cette somnolence de l’Etat mollasson face à l’islam radical fait du pouvoir l’allié benêt d’une idéologie totalitaire qui ne respecte que la force. En 2015, Jean-Yves Le Drian, à ce même ministère des Armées, avait déclaré après les tueries parisiennes : « Je ne parlerai jamais d’ennemi intérieur ». Il craignait d’alimenter une possible guerre civile. Mais ces postures morales sont des lâchetés. Dix ans après, il y a bel et bien un ennemi intérieur. Une 5e colonne a même trouvé de fanatiques collaborateurs auprès d’une extrême gauche qui a vendu son âme pour accompagner électoralement ce qu’elle croit être un islam révolutionnaire.

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Contre l’ennemi intérieur, l’exemple de Ceux de 14

Rien n’est plus contre-productif, pour éviter la guerre intestine, que de fermer les yeux sur les fractures nées d’une société ouverte à l’immigration de peuplement. Un sondage Ifop de 2020 montrait déjà que 74% des jeunes musulmans français (moins de 25 ans) se réclamaient de l’islam plutôt que des valeurs de la République. Les dirigeants, à commencer par le chef de l’État, savent ces échecs.

Leur choix de perpétuer une invasion extra-européenne les rend complices d’une colonisation agressive. Cette situation place de plus en plus de Français en insécurité culturelle, voire en légitime défense. D’autant que la résistance à l’envahisseur, qui dicta le comportement de nos aïeux durant la Grande Guerre, est inenvisageable pour les actuelles élites. Or le courage des Poilus reste un exemple. Il ne doit pas se contenter, comme avant-hier, du rituel républicain du 11-Novembre. Mes deux grands-pères étaient au front. L’un, Jean Rioufol, mobilisé à ses 18 ans, est mort peu après la guerre, à 28 ans, les poumons brûlés par les gaz allemands, laissant une veuve et deux jeunes orphelins. J’ai eu la chance en revanche de connaître mon grand-père maternel, le colonel Mario Ayme, à l’époque capitaine de la 2e Compagnie du 28e Bataillon de chasseurs alpins (28e BCA). Il m’a souvent raconté, notamment, son assaut de la tranchée de Bouchavesnes, le 12 septembre 1916, lors de l’offensive de la Somme, qui allait le blesser grièvement à une jambe et le rendre partiellement sourd. Ces souvenirs sont ceux de nombreuses familles françaises. La mémoire de ces héros nous oblige à chasser l’ennemi infiltré.

Jean-Jacques Goldman et ce que la France est devenue

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Le chanteur Jean-Jacques Goldman photographié en 1988 © GREGOIRE/SIPA

Nous vivons dans un étrange pays où un simple message de soutien d’un ancien chanteur populaire à nos forces armées déclenche une vague de commentaires étonnés, observe notre chroniqueur.


Assez régulièrement, je résiste à la tentation d’écrire un nouveau billet sur Jean-Jacques Goldman, ses rares propos publics, ses actions caritatives discrètes, l’aura inaltérable qui le maintient au premier rang de l’affection populaire. Je me rends compte que mes billets ne doivent pas être seulement un moyen d’exprimer son enthousiasme personnel, mais aussi une occasion de le dépasser pour susciter une réflexion plus générale.

Une forme de disruption

Cette belle opportunité m’a été offerte par le message manuscrit que Goldman a adressé, au soir du 11 novembre, en sa qualité d’ambassadeur du Bleuet de France.

Photo : le Bleuet de France

« Pas de paix sans gardien, ni de liberté sans soldat. Nous avons peut-être eu tendance à l’oublier, mais l’actualité nous le rappelle dramatiquement chaque jour. Il me semblait important de montrer notre reconnaissance envers nos armées, leurs blessés, et plus généralement envers toutes les forces de sécurité qui nous protègent au quotidien1. »

Il se dit « heureux et fier » d’être l’ambassadeur de cette association, qui apporte son soutien aux anciens combattants, aux veuves de guerre, aux pupilles de la nation, aux militaires blessés lors des missions de maintien de la paix, ainsi qu’aux victimes du terrorisme.

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Dans un monde où la normalité et la décence prévaudraient, il ne serait même pas nécessaire de s’attarder sur ces évidences adressées à tous les Français. Jean-Jacques Goldman serait sans doute le premier à juger excessive l’attention portée à son message de cœur, de solidarité et de reconnaissance envers tous ceux – et toutes les institutions – qui défendent notre société et veillent, autant que possible, à la tranquillité et à l’intégrité de nos existences.

Mais nous savons bien, pour le subir au quotidien, que le principe, dans le monde intellectuel, artistique et même sportif, est inverse, qui ne manque jamais une occasion de pourfendre ce que Jean-Jacques Goldman honore.

Organes de sauvegarde

Que ce soit à l’égard de nos armées ou de nos forces de l’ordre, on ne compte plus les dénonciations ineptes, injustes ou mensongères. J’ai encore en mémoire la sottise de Kylian Mbappé à la suite de la mort de Nahel, ainsi que les tribunes, pétitions et mises en demeure qui, presque toutes, poursuivent le même dessein : s’en prendre à nos organes de sauvegarde, qu’ils œuvrent à l’intérieur ou à l’extérieur. Et, malheureusement, je ne peux pas exclure de cette responsabilité collective le président de la République lui-même, qui, à plusieurs reprises, s’est cru autorisé à préjuger, toujours dans le même sens.

Dans ce climat où, dans tant de secteurs, le registre est devenu celui de la haine – au détriment de la courtoisie, qui devrait au moins, dans la forme, civiliser les contestations et les contradictions, même les plus vives – la sérénité et la rectitude que distille le message de Jean-Jacques Goldman font du bien. Elles constituent, en effet, un véritable havre de paix et ne font qu’amplifier mon admiration pour une personnalité qui, tout au long de sa carrière comme dans sa vie d’après, n’a jamais proféré la moindre stupidité ni cédé à la moindre facilité démagogique. Nous n’aurons plus jamais, de sa part, d’autres retours que ceux que l’éthique démocratique lui prescrit, que la vérité et la justice lui dictent. Nous nous en contenterons.

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  1. https://www.franceinfo.fr/societe/guerre-de-14-18/11-novembre/document-pas-de-paix-sans-gardien-ni-liberte-sans-soldat-a-l-occasion-des-commemorations-du-11-novembre-jean-jacques-goldman-adresse-un-message-aux-francais_7609268.html ↩︎

Le plus long «shutdown» américain s’achève: mais à quoi tout cela a-t-il servi?

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Le président Donald Trump s’exprime avant de signer la loi de financement visant à rouvrir le gouvernement, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche, le mercredi 12 novembre 2025, à Washington © Jacquelyn Martin/AP/SIPA

Dans la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 novembre, Donald Trump a promulgué la loi mettant un terme à la paralysie budgétaire qui durait depuis 43 jours. Après cet interminable bras de fer politique, comment les marchés financiers vont-ils se redresser ? Analyses et perspectives.


Après que le Sénat a voté le maintien du financement du gouvernement fédéral jusqu’au 30 janvier, le plus long “shutdown” de l’histoire des États-Unis semble devoir s’achever dans un murmure. La Chambre des représentants doit se prononcer sur le projet de loi dès mercredi, tandis que le président Donald Trump a déjà proclamé « une très grande victoire ». Il reste toutefois difficile de savoir si quelqu’un a réellement gagné quoi que ce soit.

Rattrapage des salaires

Du côté positif pour la consommation américaine, le texte du Sénat garantit le versement rétroactif des salaires aux employés fédéraux mis en congé forcé et annule les licenciements décidés au début du shutdown, en gelant toute nouvelle suppression de postes au moins jusqu’au 30 janvier. Cependant, l’économie américaine montrait déjà des signes d’affaiblissement dans certains secteurs clés avant la fermeture, et l’absence de données actualisées a brouillé le tableau. Le rapport sur l’inflation (CPI) du mois d’octobre a bien été publié à temps, mais l’incertitude demeure concernant la mise à jour prévue pour le 13 novembre, tandis que les retards sur les statistiques d’emplois non agricoles de septembre et octobre continuent d’obscurcir la dynamique de croissance.

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Anatole Kaletsky, mon collègue, estime que le shutdown a peut-être masqué une faiblesse sous-jacente du marché du travail américain. Les indicateurs du secteur privé, tels que l’augmentation des licenciements annoncés par Challenger ou la forte baisse de l’indice des services de ressources humaines et d’emploi du S&P 1500, pointent clairement vers un mauvais chiffre de l’emploi, voire une contraction, ce qui pourrait provoquer un bref accès d’aversion au risque sur les marchés. À l’inverse, si les données concordent avec les signaux plus robustes des ventes de détail Redbook et de l’indice ISM des services, confirmant la poursuite de la création d’emplois, les investisseurs devraient accueillir leur publication avec sérénité.

Autres dossiers en attente

La liquidité devrait s’améliorer à mesure que le gouvernement rouvre. Après que la loi One Big Beautiful Bill Act a relevé le plafond de la dette en juillet, le Trésor a reconstitué sa réserve de liquidités à environ 950 milliards de dollars, mais a continué de conserver un excès de trésorerie. Le shutdown a pu retarder certains paiements, de sorte que la reprise des décaissements pourrait réduire le solde du Trésor et réinjecter de la liquidité dans le secteur privé. Cette dynamique contribue à expliquer la récente hausse des actions américaines et de l’or, ainsi que l’affaiblissement du dollar à l’approche de la réouverture. Le recul du taux de financement garanti au jour le jour (SOFR) indique lui aussi une diminution des tensions sur la liquidité des marchés monétaires.

La question clé est de savoir jusqu’où cette réserve de trésorerie va diminuer. Le Trésor a récemment reconnu détenir un excès de liquidités et s’est engagé à réduire ses emprunts pour faire baisser le solde. S’il atteint son objectif de 850 milliards de dollars, environ 100 milliards afflueraient vers le secteur privé. Un retour à son repère d’un “débit d’une semaine”, conforme à son objectif post-2016, impliquerait une injection plus importante, de l’ordre de 200 milliards.Toutefois, ce surcroît ponctuel de liquidité ne devrait pas modifier de manière significative les perspectives concernant le bilan de la Réserve fédérale.

Avec la résolution du shutdown, le Congrès peut maintenant se concentrer sur d’autres dossiers en attente. Les élus doivent encore négocier une prolongation des subventions de l’Affordable Care Act, un vote étant prévu pour décembre. Un autre point essentiel est la réautorisation de l’International Development Finance Corporation (DFC), qui a des implications macroéconomiques importantes. La DFC a été suspendue lorsque la loi BUILD a expiré le 1er octobre, sa reconduction ayant été retardée par le shutdown. Durant cette suspension, le Sénat a confirmé Benjamin Black, fils du dirigeant de private equity Leon Black, au poste de directeur général.

La reconduction de la DFC est importante étant donné le projet de l’administration de l’utiliser pour financer des initiatives liées aux priorités de sécurité nationale. Par exemple, la DFC s’est engagée à travailler avec la société d’investissement Orion Resource Partners et avec ADQ, le fonds contrôlé par le gouvernement d’Abou Dhabi, pour investir dans des projets de chaîne logistique concernant des minerais critiques pour les États-Unis et leurs alliés. En résumé, l’impact économique principal du shutdown devrait se limiter à des distorsions temporaires des données, qui devraient rapidement disparaître. L’injection ponctuelle de liquidité liée à la baisse des réserves du Trésor, combinée au retour à un fonctionnement normal du financement public, devrait fournir un soutien à court terme aux marchés — du moins jusqu’au prochain épisode d’affrontement politique.

«Cachez cette photo que je ne saurais voir»

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DR.

La présence d’enfants voilées à l’Assemblée nationale, le 5 novembre, a provoqué une polémique. Malgré cela, la gauche anti-laïcité est parvenue à imposer son récit, présentant cette apparition comme autorisée dans les tribunes du palais Bourbon.


découvert, erte
(dé-kou-vêr, vèr-t’) part. passé de découvrir
1 Qui n’est pas couvert. Ils ont toujours la tête découverte. Une maison encore découverte. La cuisinière trouva le pot-au-feu découvert.Ils ne savent pas que c’est une femme découverte et non une femme nue qui est indécente, DiderotSalon de 1765, Œuvres, t. XIII, p. 18, dans POUGENS.
Qui a la tête découverte.Vous ne vous contentiez pas que je me tinsse découvert devant vous, PascalConv. 2.En même temps Foucault s’est couvert et a lu l’arrêt ; M. Fouquet l’a entendu découvert, SévignéLett. 22 déc. 1664.
Définition dans le dictionnaire Littré.


Donne lieu à une polémique la sortie scolaire à l’Assemblée nationale de mercredi dernier, le 5 novembre, qui avait été organisée par le député Modem Marc Fesneau. En effet, une photographie fut prise par Julien Odoul, député du rassemblement national, dans laquelle on peut voir, dans la tribune réservée au public, des fillettes affublées du hijhab. M. Fesnau explique :

« Des élèves de deux établissements scolaires privés ont visité hier l’Assemblée nationale, à leur demande, et dans le cadre d’un projet de l’un des établissements [ça ne s’invente pas] ‘Démocratie et citoyenneté’ ». (Il est interdit de rire, mais il est permis de sourire).

Les réactions ne se sont pas fait attendre.

D’une part, on dénonce une atteinte à la laïcité citoyenne; la présidente de l’Assemblée nationale elle-même, Mme Yaël Braun-Pivet, exprime sa réprobation au nom de la « cohérence républicaine ».

De l’autre, on déchire sa djellaba en hurlant à l’islamophobie et on parle même audacieusement d’« instrumentalisation du principe de laïcité » dont seraient victimes de jeunes enfants. D’ailleurs, Mme Yaël Braun-Pivet se ferait la complice de l’extrême-droite vu que la photo en question a été diffusée par Frontières; cependant, on se demande où est le problème vu que ce média jouit pleinement de la liberté de la presse et que la photo n’était pas truquée. Sans oublier que l’on peut tenir pour acquis que tel était le but précis de la manœuvre effectuée par les écoles concernées : jouer les crucifiés.

Mais que dit le droit?

Marine Tondelier, qui évoque également l’islamophobie, donne le cadre jurique général : « il y a ce qui est autorisé et ce qui n’est pas autorisé, ce n’est pas interdit ». En dépit de sa formulation très maladroite, on devine qu’elle pense sans doute à l’universelle « norme générale de liberté » : est permis tout ce qui n’est pas interdit.

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Les bonnes âmes inféodées aux lobbies religieux signalent, correctement, que la loi de 2004 qui prohibe, dans les établissements scolaires – et évidemment en sortie scolaire – le port de signes religieux ostensibles, ne vise pas les institutions privées. C’est là enfoncer une porte ouverte.

Le jésuitique Éric Coquerel, pour sa part, pose la question suivante à Mme Braun-Pivet : « Pouvez-vous me dire à quel règlement de l’Assemblée vous faites référence pour interdire des signes religieux au public qui visite l’Assemblée ? ». Antoine Léaument, lui, est catégorique : « aucune loi n’interdit le port du voile à l’Assemblée ». Et la patronne des Ecologistes est d’avis que « les huissiers de l’Assemblée sont très scrupuleux, donc si ça avait été interdit, elles ne seraient pas arrivées jusque-là ». Ces représentants du peuple français lancent ainsi aux intéressés une judicieuse invitation à commencer par le commencement et à nous pencher sur le texte applicable.

L’article 8 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale dispose : « pour être admis dans les tribunes, le public doit porter une tenue correcte » et se tenir « assis, découvert et en silence ».

Il est donc exact qu’il y a libre accès au Palais-Bourbon peu importe l’accoutrement du visiteur, à l’exception, cependant, de la tribune où l’on peut assister aux travaux de l’Assemblée. Pour sa part, le service communication (ou plus exactement com’) de l’Assemblée nationale nous informe que

« Le port de tenues manifestant une appartenance religieuse n’est pas en soi interdit. Ce n’est que dans le cas où le président de séance estimerait que le port de telles tenues est de nature à troubler l’ordre ou le bon déroulement des débats qu’il pourrait être amené à prendre des mesures…  cette tolérance permet d’accueillir en tribune des députées ou d’autres invitées étrangères voilées ».

En effet, on précise que « l’article 8… n’est pas interprété à la lettre »! Chacun appréciera l’euphémisme.

C’est là feindre d’ignorer qu’un texte clair, par définition, ne peux faire l’objet d’« interprétation » : l’on n’« interprète » pas une formule mathématique. C’est d’ailleurs une des failles de l’herméneutique juridique française où l’on invoque trop souvent spécieusement le soi-disant « esprit » d’un texte pourtant univoque afin de le contourner et même de le modifier. Or, cette disposition ne comporte aucune exception, aucune possibilité de « tolérance ». L’expression correcte eût donc été : « L’article 8 n’est pas appliqué dans tous les cas » : l’on accorde occasionnellement des passe-droits, notamment aux gamines.

(Incidemment, l’on peut supposer que ces étrangères seraient heureuses de se soumettre à la lettre de cette disposition, qui leur fournirait une libération, quoique éphémère. Sans oublier que les femmes occidentales se trouvant, par exemple en Iran, ou en Afghanistan, à quelque titre que ce soit, n’ont jamais droit à une quelconque « tolérance » les dispensant de la lettre chariesque).

D’aucuns invoquent un flou juridique, pourtant imaginaire. En ce qui concerne l’aspirante présidente Tondelier, on lui répondra que cette norme générale de liberté se heurte ici à une interdiction précise, consacrée par le participe passé « découvert » dont la portée sémantique est indiscutable. Et la possible négligence des huissiers n’a aucune incidence linguistique.

À noter l’outrecuidance de plusieurs députés, dont l’onctueuse Sandrine Rousseau, qui activent la glande lacrymale et posent bien soudainement comme protecteurs de l’enfance malheureuse : ils voudraient voir dans cette polémique la stigmatisation d’« enfants »; Marc Fesneau abonde, finalement, dans le même sens et rejette « des polémiques inutiles qui viennent surtout jeter des enfants à la vindicte populaire ». Du Hervé Bazin et du Jules Renard pur jus.

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(Note : en l’occurrence, « enfants » est un terme piquant vu que, selon les informations disponibles, il s’agit d’élèves de CM2, donc nubiles, ou sur le point de l’être aux termes de la charia; pour mémoire, selon l’éminente doctrine du regretté Ayatollah Khomeny, est proclamée apte à la reproduction la femme dès son 9e anniversaire, ou, en cas de maturité sexuelle incomplète, au moins habilitée à canaliser, d’une manière ou d’une autre, les bouillonnements maritaux).

Que nenni. Les défenseurs de la laïcité ne songent nullement à s’en prendre à ces fillettes qui sont bel et bien des victimes, mais à la mouvance religieuse rétrograde dont elles sont captives et qui lui servent de chair à canon; en revanche, ils exposent l’instrumentalisation, et même la provocation auxquelles se livrent les donneurs d’ordre. Il ne faut pas se tromper de chefs d’orchestre.

En résumé, on ne peut, en effet, que constater et déplorer, sinon un flou, une certaine incohérence dans l’article 8 dans la mesure où il est muet sur les oripeaux religieux en tant que tels. Il en résulte que, en l’état, peut prendre son siège à la tribune le prêtre catholique enseignant à Bétharram en visite à Paris et étranglé par son col romain; en revanche, en sont exclus les popes grecs orthodoxes, les juifs orthodoxes portant la yarmulke ou le schtreimel, les sikhs (dont le turban dissimule un kirpan) et les bonnes sœurs à cornettes.

Et donc les musulmanes cloitrées dans leur voile.

Cependant, quid du moine bouddhiste Matthieu Ricard? Impossible de nier qu’il est « découvert », mais sa tenue est-elle « correcte » ?

BNP: Omar m’a tuer?

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DR.

Trois réfugiés soudanais aux Etats-Unis vont être dédommagés par la célèbre banque française, a décidé un tribunal à New York.


Entre la fin des années 1990 et 2009, BNP Paribas a exercé des activités bancaires (notamment via sa filiale suisse) permettant au régime soudanais dirigé par Omar Al-Bashir d’accéder aux marchés financiers internationaux. Selon trois réfugiés soudanais aux États-Unis, ce soutien financier indirect a facilité les exactions du tyran, dont le point d’orgue fut le génocide mené au Darfour. Un tribunal civil de New York, accédant à leur demande, vient de condamner la BNP à verser aux trois plaignants la coquette somme de 20 millions de dollars – l’établissement bancaire va faire appel. Il conteste en effet les fondements de la décision : il affirme n’avoir pas financé directement des armes ou milices. À 7 millions de dollars par tête, cela pourrait pourtant bien aiguiser l’appétit des 23 000 réfugiés soudanais, jadis affamés. Une addition théorique à 160 milliards de dollars, soit trois années de chiffre d’affaires de la BNP – autant dire la faillite immédiate. De quoi également ébranler le système bancaire mondial, car – rien qu’aux États-Unis – on dénombre près de 200 000 réfugiés bosniaques, rohingyas, yézidis ou ouïghours. À la clé, une potentielle débâcle financière généralisée pour l’humanité. Après avoir ruiné Birmingham ou miné la démocratie française, la justice occidentale, assoiffée de Bien, poursuivrait-elle la méthodique destruction d’une civilisation qu’elle abhorre ?

Max Chaleil, de l’édition à la… prostitution

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L’Entremetteuse (détail), toile de Vermeer (1656). DR.

À l’occasion de la parution-évènement du Monde de la prostitution – De la violence à l’illusion, l’œuvre d’une vie : hommage à Max Chaleil et aux Éditions de Paris.


Précaution d’usage : ce n’est pas – du tout – parce que Max Chaleil a publié mes quatre derniers livres que j’interviens ici. J’interviens pour saluer une somme, celle d’une vie – et qui la justifie (outre l’édition, son épouse, son fils, ses petits-enfants, etc. – bien sûr).

Son sujet ne me concerne pas particulièrement : l’histoire, le monde de la prostitution, ses mots (tout un dictionnaire thématique !), ses illustrations (arts, livres, films, opéras, chansons, économie, etc.) – mais je l’ai ouvert, presque par devoir d’abord (mon éditeur !).

Je l’ai refermé – épaté -, stupéfait par la quantité de lectures (et de fiches : Max est un homme « à fiches ») que suppose une telle entreprise, et depuis si longtemps (Max m’a dit avoir été piqué par le sujet depuis l’adolescence – il a… 88 ans).

Le troisième tome vient de paraître. Son titre : La prostituée comme imaginaire et création – 600 pages (les quatre tomes prévus comptent 1500-1700 pages ; tome 4 : janvier 2026).

En dépit de mon peu d’appétence pour le thème, je répète – j’ai tant à lire et écrire, tant de sujets me retiennent ou requièrent que je me réjouis presque lorsque l’un d’eux m’indiffère un peu – j’ai donc lu. Et là, stupéfaction – c’est pour cela que je prends la plume – parce qu’il est très rare d’avoir ce sentiment de « l’œuvre d’une vie ».

Un seul exemple (sur les 1700 pages en quatre tomes !), celui de la prostitution et de la prostituée dans la littérature. Max rend compte de (presque) toutes les littératures. Il couvre aussi bien les domaines « occidentaux » (allemand, anglais, américain, italien, espagnol, hispano-américain, russe, nordique, etc.) qu’ « orientaux » (indien, chinois, japonais, arabe, etc.). Quant à la « Littérature antique et littérature française » – d’Aristophane à Lucien de Samostate, de Plaute à Pétrone, de Villon à Houellebecq -, elle occupe plus de 230 pages : un manuel, presque. Je connais un peu « la littérature », j’ai « un peu » lu – mais là encore, j’ai été édifié, par la profusion, la précision et la diversité des références (livres, auteurs).

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Et n’imaginez pas que ce soit du « digest », un résumé qui sente la seconde main. Au contraire, cette œuvre-vie (je répète : de l’adolescence à 88 ans, ce sont 70 ans qui en ont été « obsédés ») a été édifiée, érigée, gré à gré – avec le temps, auxiliaire indispensable, unique, du travail accompli. Son érudition m’a fait songer à celle de ces autodidactes (versus les universitaires souvent, pas toujours) qui ont inventé seuls leur voie, leur chemin, leur sujet (et prisme) – et que leur singularité irréductible, insigne, rend absolument nécessaires. Et indémodables : qui a démodé François Caradec, Hubert Juin, Francis Lacassin ? Personne. Dans leurs domaines respectifs, ils sont non négociables. Pareil pour la somme de Max à l’avenir : non négociable. On prend les paris.

Je connais presque « bien », Max : je le vois aujourd’hui encore lire Le Figaro tous les jours, découper les articles, acheter telle ou telle revue (selon les sujets) et surligner au jaune telle ou telle page, etc.

Je crois savoir comment cette somme d’un obsessionnel a été nourrie : par la lecture, donc. Personne sans doute n’aura autant lu sur le sujet. Je laisse les spécialistes en débattre – mais je ne vois pas comment, quand, ils pourraient faire l’économie de sa lecture. En discuter : autant qu’ils veulent. La négliger : je ne crois pas.

Et puisque j’en suis à évoquer Max et son œuvre, je voudrais ajouter deux mots sur l’édition – Les Éditions de Paris.

Max et Rosie, son épouse, ont à peu près le même âge, ils ont créé Les Éditions de Paris en 1984 : il y a plus de 40 ans. Leur fils, Frédéric, qui dirige la collection « Littérature », les a rejoints quelques années plus tard.

Pour avoir travaillé avec eux, publié les quatre livres que j’ai dits chez eux, je voudrais préciser combien ils représentent pour moi « les derniers des Mohicans », éditeurs à l’ancienne qui veillent à chaque étape du livre avec une exigence qui réjouit (a fortiori lorsque l’auteur – mettons, moi – l’est beaucoup lui-même, exigeant, obsessionnel). Max (passé par Bourgois, Stock, Belfond, Galilée, etc. comme créateur ou directeur de collection) pour le choix des manuscrits ; Rosie-Roselyne, son épouse, pour tout le reste (c’est-à-dire beaucoup, puisque Max ne sait pas même envoyer un mail), avec l’aide de Frédéric – pour sa collection (de Frédéric), où la littérature côtoie les écrits sur l’art (Frédéric est un esthète, au goût très sûr, érudit et sensible – donc devenu un ami cher).

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Je précise une chose, parce que je connais la malice – parfois malveillance – des gens. Je ne flagorne pas. Je décris très précisément tels que je les ai connus et observés les Chaleil au travail. Et si l’on veut se faire une idée de l’origine de tout cela, peut-être faut-il rappeler que le père de Max, Léonce, était un paysan cévenol, protestant, dur à la tâche, qui a travaillé toute sa vie d’arrache-pied : « Les chiens ne font pas des chats » – dicton que Léonce eût peut-être employé.

Celui-ci avait publié ses « Mémoires » : La Mémoire du village (Stock, 1977 ; réédité aux Éditions de Paris), salué et régulièrement cité par Emmanuel Le Roy Ladurie (spécialiste d’histoire rurale entre autres)… et par Bernard Pivot, puisque Léonce fut l’un des invités d’« Apostrophes ». Bilan : plus de 100 000 exemplaires vendus.

A plus de 85 ans, les Chaleil, certes, lèvent le pied. Mais – mon dernier livre est paru en octobre, donc je l’atteste – la passion qui les anime, ce feu sacré, est intact(e). La fatigue, parfois, les pousse à « faire une pause » – et Frédéric la pallie si nécessaire. Mais à 40 ans, leur maison a les allures d’une œuvre (1200 livres parus) – que couronne aujourd’hui le grand œuvre de Max, sur la prostitution. Je prie ceux qui en douteraient, d’avoir l’honnêteté de faire comme moi : ouvrir le livre, le lire, l’examiner – et constater son éminence.

Coda : connaissant la nullité asymptotique de Max avec l’informatique, j’ai été d’autant plus stupéfait par sa somme. Internet ici n’a joué aucun rôle. De l’érudition à l’ancienne, avec des journées en bibliothèque(s), de la chine des décennies (!) durant pour déceler tel ou tel livre (ou rareté), des notes prises à la main, des expositions courues un peu partout quand c’était possible, etc. : cela aussi est très intéressant – et impressionnant. On ne fabrique pas les mêmes livres érudits avec OU sans Internet : il y a vraiment « quelqu’un » derrière cette somme – et on l’entend. Je ne prolonge pas – mais ceux qui lisent « de l’érudition » aujourd’hui savent de quoi je parle : cette différence, si humaine ; ce temps passé, tangible ; cette main, que l’on devine… ou discerne.

La prostituée comme imaginaire et création (Littérature, chanson, opéra, art, cinéma) – Tome 3 de « Le Monde de la prostitution – De la violence à l’illusion ». Éditions de Paris-Max Chaleil, 618 pages.