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Gaza: une milice peut en cacher une autre

La place du futur ennemi numéro un d’Israël serait-elle à prendre ? Le Jihad islamique palestinien apparait comme l’organisation la mieux placée pour prendre la tête du terrorisme palestinien à la place du Hamas en cas de neutralisation de ce dernier. Analyse.


La libération des 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza le 13 octobre dernier a constitué un immense soulagement que l’on doit en grande partie à Donald Trump. Dans la poursuite de sa quête avouée d’obtenir le prix Nobel de la paix, le Républicain a actionné tous les leviers à sa disposition pour aboutir à un résultat qui paraissait difficilement envisageable ; permettant ainsi de paver la voie à une possible cohabitation pacifique entre Palestiniens et Israéliens. Néanmoins, le plan Trump comprend plusieurs incertitudes.

Angles morts

Si l’on part du postulat que le Hamas acceptera de déposer les armes, ce qui semble par ailleurs hautement improbable, le danger que constituent les nombreux autres groupes terroristes disséminés dans l’enclave se situe dans un des angles morts du plan.

La plupart des factions armées palestiniennes, ayant jusqu’ici bénéficié de l’ombre projetée par le Hamas, sont toujours actives et présentent des modus operandi qui nécessiteront des approches différentes pour les neutraliser. Si le scénario d’un désarmement du Hamas venait à se concrétiser, il est évident que ces nombreuses organisations continueront de faire planer une menace sécuritaire d’envergure sur Tel Aviv ; le Jihad islamique palestinien reprenant alors le rôle du Hamas comme élément le plus en vue du terrorisme palestinien.

Le Hamas, partie émergée de l’iceberg ?

Dès que les premières images des attaques terroristes du 7 octobre 2023 furent diffusées, le narratif quasi-unanimement proposé par les médias occidentaux laissait à penser que seuls les hommes de la branche armée du Hamas, les brigades Izz al-Din al-Qassam, avaient participé aux atrocités commises ce jour-là. Bien qu’orchestré par Yahya Sinwar, chef de la branche armée du Hamas, le « déluge d’al-Aqsa » a en réalité impliqué au moins cinq autres groupes palestiniens selon Moussa Abu Marzouk, l’un des responsables du Hamas[1].

L’un des ouvrages de Mohamed Sifaoui, spécialiste du terrorisme islamiste, a révélé que le pogrom du 7 octobre faisait l’objet d’une préparation minutieuse remontant à 2020 sous la direction d’un organe appelé « chambre des opérations »[2]. A l’exception notable du Fatah, cette chambre servait d’outil de communication et de coordination entre toutes les factions impliquées, ces dernières ayant mis de côté leurs divergences politiques ou religieuses pour se rassembler en son sein. Les brigades Abou Ali Mustapha, branche militaire du Front populaire de libération de la Palestine d’orientation marxiste-léniniste, ont ainsi participé aux attaques du 7 octobre.

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Il en va de même pour les brigades An-Nasser Salah al-Din, faction de la bande de Gaza qui contribue également aux forces de police officiant dans l’enclave. Sa collaboration avec le Hamas n’est pas nouvelle puisque c’est à cette brigade que l’on attribue l’enlèvement du soldat israélien Gilad Shalit en 2006. Ce dernier sera libéré en 2011 en échange de plus de mille prisonniers palestiniens dont Yahya Sinwar[3]. Les Brigades des Martyrs d’al-Aqsa, qui comptaient 5 000 hommes avant les attentats du 7 octobre, autrefois associées au Fatah mais partageant l’idéologie islamiste du Hamas, ont aussi contribué aux attaques. Tout comme les Forces du martyr Omar al-Qassem, branche armée du Front démocratique de la libération de la Palestine qui ont revendiqué leur participation aux attaques et continuent d’émettre des communiqués établissant leur responsabilité dans d’autres opérations terroristes via des canaux tels que l’agence de presse yéménite Saba.

Dès lors, on voit bien qu’attribuer les attaques terroristes du 7 octobre aux seuls militants du Hamas est une lecture très incomplète des évènements qui permet indirectement aux autres factions terroristes impliquées de rester dans l’ombre. Il résulte de ces éléments que le simple fait de neutraliser le Hamas ne suffira pas à assurer la sécurité d’Israël, la menace terroriste s’en accommodera et changera tout simplement de visage.

Le Jihad islamique palestinien, futur ennemi numéro un d’Israël ?

Considérée comme la deuxième organisation terroriste la plus influente de la bande de Gaza, le Jihad islamique palestinien pouvait s’appuyer sur 10 000 combattants avant le 7 octobre 2023. Bien qu’émanant également des Frères musulmans, il se distingue du Hamas en ce qu’il lui reproche une approche insuffisamment islamique de la gouvernance de l’enclave. Il refuse par ailleurs catégoriquement tout rôle politique, une absence d’ambition politique qui permet aux deux groupes de collaborer. Cette organisation terroriste apparaît aujourd’hui comme la mieux placée pour prendre la tête du terrorisme palestinien à la place du Hamas en cas de neutralisation de ce dernier.

Fondé en 1981 par Fathi al-Shiqaqi, le Jihad islamique palestinien s’est signalé aux yeux du grand public par une série d’attentats suicides perpétrés afin d’enrayer la mécanique de paix enclenchée par les accords d’Oslo signés en 1993. A l’inverse du Hamas, ils refusent d’envisager toute négociation, y compris dans le but de mener à un cessez-le-feu. Ses militants se distinguent par des attaques au couteau et bien entendu par des attentats-suicides à la bombe, signature du groupe.

Contrairement au Hamas, la distinction entre branches politique et militaire n’a aucun sens pour le Jihad islamique palestinien. L’organisation en tant que telle se confond avec sa branche armée, les Brigades al-Qods, qui perpétue et revendique les attentats commis en son nom. La communication de ces Brigades, effectuée via leur site internet se confond avec celle du Jihad islamique palestinien qui met à profit ses propres médias[4].

Les ambitions pour l’enclave du groupe désormais dirigé par Ziad al-Nakhalah sont également plus radicales d’un point de vue religieux que celles du Hamas, de quoi laisser craindre un système d’endoctrinement encore plus prononcé que celui mis en place par le Hamas depuis sa création puis son élection. Si tous deux souhaitent une Palestine indépendante, le Jihad islamique palestinien entend en faire un État religieux plus proche de ce que fut le califat de l’État islamique en Irak et en Syrie. Sa propension à embrasser sans réserve les intérêts de Téhéran en fait par ailleurs un allié plus fiable aux yeux du régime des mollahs que le Hamas[5].

Enfin, contrairement au Hamas, le Jihad islamique palestinien dispose d’hommes en Cisjordanie. Le groupe accuse fréquemment Israël de vouloir annexer le territoire[6] et oblige Tsahal à devoir garder un œil sur les agissement du groupe terroriste depuis la Cisjordanie. Une récente opération menée par l’armée israélienne dans le nord de la Cisjordanie ayant permis la neutralisation de deux membres du Jihad islamique palestinien illustre que ce dernier peut frapper depuis l’ensemble du territoire palestinien[7].

La disparition du Hamas serait certes une première victoire d’importance, mais la guerre contre le terrorisme palestinien n’en serait donc pas achevée pour autant.


[1] https://www.bbc.com/afrique/articles/c99ezy1r55lo

[2] Mohamed Sifaoui, Hamas : plongée au cœur du groupe terroriste, 2024, p. 255.

[3] https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/yahya-sinwar-attentats-7-octobre-liberation

[4] https://www.nationalsecurity.gov.au/what-australia-is-doing/terrorist-organisations/listed-terrorist-organisations/palestinian-islamic-jihad

[5] https://fr.timesofisrael.com/liran-au-jihad-islamique-vous-avez-prouve-que-vous-pouvez-ecraser-lennemi

[6] https://www.lefigaro.fr/international/cisjordanie-le-djihad-islamique-accuse-israel-de-vouloir-annexer-le-territoire-occupe-20250224

[7] https://www.longwarjournal.org/archives/2025/09/israeli-operation-kills-2-palestinian-islamic-jihad-terrorists-in-west-bank.php

L’imam qui croyait au Père Noël

Au Royaume-Uni, Umayr Mulla, l’imam d’une mosquée de Nottingham regrettera longtemps d’avoir répondu aux questions du militant identitaire Tommy Robinson et d’avoir dit du bien d’une éventuelle solution à deux États au Proche-Orient. Récit.


Au Royaume-Uni comme en France, prétendre qu’il n’y a aucun apartheid en Israël vous expose à l’exclusion sociale. Quand ce sont les principaux intéressés, les Israéliens, qui l’affirment, il suffit de les accuser, en plus, de mensonge. Mais quand c’est un imam britannique qui le prouve en se promenant à Jérusalem avec la même insouciance que n’importe quel pékin croyant ou incroyant, cela devient plus difficile.

– Bah ! Suffit de pas en parler, Coco ! Tu veux quand même pas faire le jeu des sionistes ?

Umayr Mulla, imam de la mosquée Masjid Khazra de Nottingham, s’est mordu les doigts de n’avoir pas suivi le sage conseil donné à certains journalistes débutants (syn. : « enclins à vérifier leurs sources ») par certains rédacteurs en chef de médias mainstream dans le monde (sans majuscule, Votre Honneur !)

Inclusion, diversité et équité dans une mosquée de Nottingham

L’imam a visité la vieille ville de Jérusalem en compagnie d’un suppôt de l’extrême droite, le journaliste militant Tommy Robinson. Pire qu’un délit d’opinion, c’est un péché mortel.

Tommy Robinson, qualifié de « visage de l’extrême-droite britannique qui attise la haine anti-musulmans » par France 24, a été accusé par icelle d’avoir organisé une marche pour la « liberté d’expression ». Les guillemets sont une circonstance aggravante ajoutée par le média étatique.

Ladite marche ayant rassemblé près de 150 000 personnes rien qu’à Londres, le 13 septembre 2025, il devenait impossible de la passer sous silence. Certains médias bienpensants ont simplement remplacé « liberté d’expression » par « islamophobie » et hop ! le tour était joué. D’autres y ont ajouté que la manifestation était violente, car 28 policiers ont été blessés et 25 personnes ont été arrêtées pour « troubles violents, agressions et dommages criminels », preuve irréfutable que les manifestants n’étaient pas des citoyens pacifiques mais des meurtriers de musulmans en puissance.

A relire, Jeremy Stubbs: La terre promise du frérisme en Europe

Le Monde a vu ce qu’il voulait y voir : « La police a déclaré que 26 agents avaient été blessés, dont quatre gravement, après avoir été confrontés à une « violence inacceptable » alors qu’ils tentaient de contrôler la foule, dont beaucoup étaient drapés de drapeaux anglais et britanniques, pendant plusieurs heures tendues en marge du rassemblement. » Associated Press y a regardé d’un peu plus près, ce qui lui a permis de séparer les bons manifestants de l’ivraie black-blockiste : « la manifestation a dégénéré samedi lorsqu’un petit groupe de ses partisans s’est affronté avec des policiers qui les séparaient des contre-manifestants. » Regarder des deux côtés de la lorgnette, ce n’est pas du journalisme, c’est de la provocation !

Quand on est un imam respectueux de ses ouailles, on évite soigneusement le risque de contagion avec des personnes infectées par le Covid, le sionisme ou l’extrême droitisme. Si Umayr Mulla n’a pas pris cette précaution, ce n’est pas par étourderie, c’est par idéalisme (syn. : « collusion avec l’ennemi »).

Londres, 13 septembre 2025 © Vuk Valcic/ZUMA/SIPA

Interview offensante

La mosquée Masjid Khazra a publié un communiqué dans lequel elle présentait ses excuses pour les « opinions personnelles profondément offensantes et totalement incompatibles avec les valeurs de notre institution » de son imam. Quel crime de lèse-Allah Umayr Mulla avait-il commis pour que son employeur soit obligé de faire pénitence ? Il a accordé une interview au susnommé Tommy Robinson. Ce crime est inexcusable car, au lieu de critiquer l’intervieweur, il lui a donné des réponses iconoclastes, qui lui eussent peut-être valu la mort par lapidation, si sa paroisse avait été située à Gaza ou en Judée Samarie sous occupation palestinienne: « Je n’ai aucun problème avec Israël, tant que les gens vivent en paix, je pense que les deux parties devraient avoir leur propre pays. Les Palestiniens devraient avoir leur propre espace sûr, où ils peuvent vivre librement sans oppression ni injustice. Je pense que c’est la solution pour la paix au Moyen-Orient. »

Cette déclaration offensante a été mollifiée par la récitation de quelques versets anti-sataniques, expurgeant l’islam des principes et applications de la dhimmitude subie par les non musulmans en terre d’islam : tout était paradisiaque, « tant que [les non-musulmans] payaient la jizya, qui est une sorte de taxe de protection. Cela n’est pas différent des impôts que nous payons en Grande-Bretagne ». Certes, les dhimmis n’avaient pas le droit de construire des églises ou des synagogues, de prier à haute voix, de rire en public ou de marcher sur les trottoirs à l’égal des musulmans et ils subissaient d’innombrables persécutions quotidiennes actant de leur infériorité statutaire, mais « Si vous lisez l’histoire, il n’y avait ni oppression ni occupation. Ils payaient des impôts comme nous. Les musulmans, cependant, devaient payer la zakat, qui est une aumône. »

Ces figures imposées n’ont pas innocenté le coupable de la mécréance d’avoir reconnu le droit à l’existence d’Israël et, pire, d’avoir critiqué l’Autorité palestinienne, que l’opinion britanico-musulmane tient en sainteté : bien qu’il se réjouisse de la reconnaissance d’un État palestinien par son gouvernement, l’imam a déclaré s’opposer à la politique Pay-to-Slay, en vertu de laquelle l’Autorité palestinienne rémunère les meurtres de juifs. Il a également critiqué certaines actions commises au nom de l’islam par Daech et le Hamas. « Je peux affirmer sans crainte qu’ils ne sont pas du tout musulmans… Certains de leurs enseignements et de leurs actions vont à l’encontre des enseignements islamiques. » Ces blasphèmes contre les valeurs de la mosquée ont justifié les excuses faites aux croyants.

Le Newspeak (novlangue) comme vertu cardinale

« Notre institut est fondé sur un engagement en faveur de la diversité, de l’égalité et de l’inclusion. Nous apprécions et respectons toutes les composantes de la communauté musulmane et de la communauté au sens large que nous servons, et nous nous engageons à maintenir un environnement respectueux et solidaire pour les élèves, le personnel et les familles. »

A lire aussi, du même auteur: Fenêtre de tir pour mettre un terme au Hamas

Ce n’est pas à proprement parler un mensonge : l’employeur de Umayr Mulla respecte toutes les diversités de la communauté MUSULMANE (sauf celles que Mahomet réprouve, notamment l’homosexualité, mais celles-ci sont haram, donc irrespectables). Quant à la communauté au sens large QUE NOUS SERVONS… Le sens large n’a pas le même sens en anglais et en taquiya[1] dans le texte : les anglophones entendent « en général » alors que l’islam veut dire « la oumma », la communauté des croyants sur toute la planète.

Heureusement pour l’imam Mulla, en Angleterre, les représailles contre la pensée se limitent à la mort sociale et professionnelle. Il a été suspendu, pas pendu, et il s’est platement excusé, écrivant regretter « profondément le tort que mes propos ont causé aux communautés cachemirie et pakistanaise, aux Palestiniens, à mes employeurs, à ma famille, à mes amis et à toute personne qui avait été offensée directement ou indirectement. Mes références à certaines communautés étaient totalement inacceptables. Je les retire sans équivoque et demande sincèrement pardon à ceux que j’ai offensés. Je m’engage à tirer les leçons de cette expérience. » Conclusion : Allah est le plus grand et le client est roi.


[1] Le mot Taquiya, littéralement « prudence » et « crainte », désigne, au sein de l’islam, une pratique de précaution consistant, sous la contrainte, à dissimuler ou à nier sa foi afin d’éviter la persécution. Par extension, il est utilisé pour tous les mensonges qui permettent à l’islamisme de gagner du terrain au sein des nations.

Jacques Bainville lecteur

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Notre contributeur loue Jacques Bainville pour la finesse et la vivacité de ses critiques littéraires, lesquelles révèlent ses idées politiques, son goût classique, et un esprit mordant mais courtois. L’historien royaliste (1879-1936) rappelait utilement que ce sont les grandes œuvres qui forment les esprits, chose qu’on a peut-être tendance à oublier.


Il paraît que rien n’est plus personnel à un homme que ses lectures ; en découvrant celles de Bainville — dans un recueil d’articles publiés chaque mois pour la Revue universelle de 1929 à 1936, et préfacé par Charles Maurras —, il m’a semblé en apprendre infiniment plus sur ses idées, ses penchants, sa manière de voir le monde, que ne l’eût fait n’importe quelle biographie ; rarement n’ai-je ressenti à ce point l’impression de me trouver comme physiquement avec l’auteur d’un livre, de discuter avec lui, dans mon salon. Le royaliste, d’un style gracieux teinté çà et là d’esprit dix-septième, entremêle, à propos de ses lectures nombreuses et intelligentes, des réflexions subtiles et des parallèles historiques, des théories personnelles et des jugements qui en remontreraient à nos élites.

Critique, mais délicieusement courtois

Allègre, vif, jamais ennuyeux, Jacques Bainville nous entretient pêle-mêle du Lys dans la vallée et de Volupté, des vers d’Horace, de Don Quichotte et des Mémoires de Caulaincourt, des réflexions sur l’histoire de Paul Valéry, de Taine et de Paul Bourget, mais aussi de choses plus méconnues, comme par exemple les Études sur les poètes latins de la décadence de Désiré Nisard ; à propos de choses méconnues, qui se souvient que dans le concert unanime de louanges adressées à Goethe, un seul écrivain osa l’accabler, et avec quelle violence ! — Barbey d’Aurevilly ?… Bainville, lui, s’en souvient et le rappelle à ses lecteurs.

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Bien sûr, dans cet ouvrage non dénué de paradoxes (Bainville, que la psychologie des peuples agace décidément, se montre fort intéressé par l’ouvrage de Burckhardt sur Wallenstein et Richelieu, lequel oppose l’idéalisme allemand au rationalisme français), on trouvera l’auteur injuste avec certains poètes et personnages historiques (mais c’est tout le charme d’une lecture, qu’elle provoque l’indignation : cela aiguise l’esprit de contradiction) : ainsi de La Fayette, « le premier » des « personnages historiques et ennuyeux ». Talleyrand ne fut qu’un « diplomate surfait » (!). « Un style plat, une vulgarité essentielle découragent la lecture » de Bel-Ami ; Bainville, à propos de Flaubert, se demande « s’il n’avait donc pas d’oreille » ? Et, par une belle formule en croix, il exécute Benjamin Constant : « Ces deux choses avaient manqué à Benjamin Constant, la considération et le caractère. Celui-ci faisant défaut, il n’a pas eu celle-là ». Avec Leconte de Lisle, à qui il reproche d’avoir cru reconnaître l’art dans l’originalité (mais Villon ne l’était pas, original, ce qui ne l’empêcha pas d’exceller dans le don de poésie), il n’est pas tendre non plus : « Encore est-ce trop riche. On pense à Gustave Moreau qui, selon le cruel Degas, mettait des chaînes de montre aux dieux ». Même Victor Hugo n’est pas épargné ! « Quand on a cru que le passé valait mieux que le présent, on est prêt à transposer la même illusion dans l’avenir ». Et, poursuivant sur L’Année terrible, le critique lui reproche ses inepties, et en profite pour disserter magnifiquement sur Iéna et Sedan. Qu’il s’en prenne de manière récurrente à Julien Benda, c’est de bonne guerre en revanche, puis il ne le fait jamais qu’en des termes d’une courtoisie délicieuse. Un peu plus nuancé sur Jules Michelet, il remarque qu’on ne peut « ouvrir un [de ses] livre[s] sans y rencontrer, avec le style (même haché, névrosé, épileptique) d’un grand artiste de la prose, des perles dans le fumier des idées, des éclairs de génie au milieu des extravagances ».

Persiflages

Tout de même, quelques lignes directrices se dégagent du fatras des lectures de Bainville au cours de ces années trente, années de sa pleine maturité, et donnent à l’ensemble une espèce de colonne vertébrale : Renan, dont il parle et reparle sans cesse, la Révolution et l’Empire, période historique entre toutes et qui semble l’avoir intéressée au plus haut point (n’oublions pas qu’il fut l’auteur d’un Napoléon remarquable), la politique, l’ensemble servi sur fond d’anti-républicanisme et d’une pointe de germanophobie, époque oblige (« l’Allemand est plus près de la nature, ce qui ne constitue ni une garantie ni une recommandation »). Toujours est-il que l’on admirera la qualité des lectures de Bainville, et celle des enseignements qu’il en retient : sur Louis ⅩⅥ qui s’est trompé de politique en n’ayant pas voulu suivre l’exemple de Charles Ier (« raisonnement par analogie, mauvaise méthode ») ; sur les « mobiles des hommes » qui en disent plus long à l’historien que l’étude fastidieuse des sources, et permettent d’expliquer, par exemple, que c’est par un intérêt évident que les régicides, comme les acquéreurs de biens nationaux, ont vigoureusement soutenu Bonaparte qui les protégeait du retour des Bourbons tout en maintenant les acquis de la Révolution (« Sainte-Beuve dit quelque part, et fort bien, qu’aucun changement ne s’accomplit dans un État sans qu’on ait trouvé le point de rencontre des sentiments et des intérêts »), ce que Louis Madelin démontre à merveille dans ses ouvrages sur l’Empire et le Consulat. De Napoléon, il retient, fort judicieusement, qu’il a été un homme « si intelligent qu’il se rendait compte lui-même, et mieux que personne, de la part des circonstances dans le chef-d’œuvre de sa vie, au point que nul, peut-être, ne s’est abandonné comme lui aux événements ». Et je ne puis m’empêcher de citer ce persiflage contre les odieux révolutionnaires : « La seule chose qui rende supportable les récits de la Révolution, c’est qu’on peut dire à la plupart des imbéciles et des scélérats qui ont coopéré aux actes révolutionnaires : « Toi non plus tu n’en as pas pour longtemps. » L’Ecclésiaste se plaignait de l’immense impunité qui règne sur la terre. La Révolution est le seul exemple du châtiment qui suit la faute sans délai ». Sur la Révolution, d’ailleurs, Bainville ne recule pas devant les parallèles avec la politique actuelle, pour en mieux souligner les paradoxes. Ainsi, reprenant une page d’Alphonse Aulard sur Marat qui réclamait la dictature : « Cette remarque apprendra peut-être à quelques étourdis de tous les temps que la dictature n’est pas fatalement de droite, qu’elle est souvent de gauche […]. Fustel de Coulanges a montré que, dans la cité antique, le « tyran » était l’homme des pauvres contre les riches, un Lénine qui exerçait la dictature du prolétariat ». Page qui n’a pas pris une ride ! Autre commentaire dont on soulignera la justesse et l’actualité : « Mais la Révolution française, au bout de cent quarante ans, n’est-elle pas déjà méconnaissable ? Deux de ses éléments sont devenus réactionnaires: la liberté et le patriotisme. Le sentiment bourgeois d’une vie indépendante par la propriété ou par les professions « libérales » est entré en lutte avec le socialisme égalitaire. L’internationalisme a cessé d’être aristocratique et le nationalisme est passé à droite ».

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Il ne faudrait pas s’arrêter qu’à cela ; le lecteur apprendra des lectures de Bainville quelques sages maximes dont on ferait bien de garder la mémoire. Par exemple, que « l’idée de saucer un poème en roman est une erreur prodigieuse ». Ou qu’il n’est jamais inutile pour un prosateur de versifier de temps en temps, comme un musicien fait ses gammes, pour « donner du rythme à la phrase ». Ou encore qu’en histoire, il ne reste de préférence que la calomnie : voir Tacite et Suétone. Il est une idée qui revient souvent sous la plume de Bainville, parce qu’il la relève systématiquement lorsque les auteurs l’évoquent, c’est qu’il existe une limite aux événements politiques, et qu’en la matière, on ne peut plus guère prétendre à l’invention : « C’est le sens profond de la définition de l’utopie par le poète espagnol que j’ai déjà cité : « L’utopie, — tout ce qui n’est pas arrivé dans l’histoire romaine. » »

Un avertissement

Enfin, je ne peux terminer cet article sans citer ces quelques commentaires à la La Bruyère, sur le charme de la conversation : « les vieux se répètent et les jeunes n’ont rien à dire. L’ennui est réciproque ». Ou sur la nécessité pour l’écrivain de travailler son art comme un artisan : « L’homme de lettres n’acquiert pas l’audience et le respect du public par le talent seul, par l’élévation ou l’originalité de ses vues, par son dire ni par son « faire », mais aussi par sa probité et par son travail, comme un artisan. […] Acquérir pour élaborer, c’est la devise de l’écrivain. Goethe n’avait-il pas toujours appris ? Et qu’est-ce que le plus beau génie tire de lui-même ? S’il a le malheur de se satisfaire de sa société, on en voit trop tôt le fond ». Il est un fléau que j’ai bien connu, moi qui fus professeur de français : on n’ose plus faire lire aux jeunes gens les plus beaux chefs-d’œuvre de nos lettres, de peur de les ennuyer ; à La Fontaine, à L’Illusion comique, à Molière ou Jules Verne, on préfère des livres pour enfants, quand ce ne sont pas des bandes dessinées. Mais « c’est avec des lectures « au-dessus de leur âge » que se forment les bons esprits », rappelle utilement Bainville, exemples à l’appui, — et à cet avertissement j’applaudis des deux mains.

Notez le nombre de références que contient cet article : ce n’est qu’une minuscule recension des lectures de Bainville ; j’en oublie je ne sais combien qu’il évoque de sa plume toujours parfaite, des traités du style (Georges Duhamel), des livres négligés, des romans fantastiques ; pensez donc ! — il s’essaye même à l’uchronie. « De ressemblances approfondies en contrastes inattendues, écrit Charles Maurras dans sa préface, ce Bainville inespéré se développe et se complète d’une page à l’autre. La matière est multiforme. Comme il est né Protée, elle l’aide à varier la métamorphose. » Et de conclure : « Le beau livre ! Et le grand esprit ! »

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Sahara occidental: Rabat obtient son oui

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Le Conseil de sécurité de l’ONU vient d’approuver, à une large majorité (11 voix pour, 3 abstentions, Alger ne prenant pas part au vote), la résolution reconnaissant le plan marocain d’autonomie comme base privilégiée pour résoudre la question du Sahara occidental. Ce vote marque un succès diplomatique majeur pour Rabat et reconfigure l’équilibre politique autour de ce dossier qui empoisonne la région depuis un demi-siècle.


Ce vendredi à 15 h, heure de New York, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution en faveur du plan d’autonomie proposé par le Maroc pour le Sahara. Une décision historique, obtenue sans le veto russe ni chinois, et qui marque une avancée diplomatique majeure après plusieurs décennies de négociations intermittentes.

Un long différend territorial prend fin

En vert la ragion concernée. Wikipedia.

Le Sahara marocain, territoire colonisé sous administration espagnole jusqu’au début des années 1970, est au centre d’un différend territorial prolongé que la politique régionale de l’Algérie a accentué et prolongé. Cette terre souverainement marocaine incluse dans l’Empire chérifien a été le théâtre de luttes d’influence internationales qui ont causé du préjudice au royaume. Enfin, une sortie de crise semble se profiler. Depuis le retrait progressif de l’Espagne, le Maroc a proposé un cadre d’autonomie destiné à offrir aux populations locales une gestion interne de leurs affaires, à travers des institutions législatives, exécutives et judiciaires propres, tout en maintenant pour l’État marocain les compétences régaliennes, notamment la défense, la diplomatie et les affaires religieuses. Parallèlement, le Front Polisario, soutenu politiquement et logistiquement par l’Algérie, revendique le droit à l’autodétermination des Sahraouis.

L’ONU a multiplié les initiatives pour tenter de résoudre ce conflit. Dès 1991, la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) visait à préparer un référendum d’autodétermination, mais les divergences persistantes entre Rabat et le Polisario ont empêché la tenue de ce vote. Au fil des décennies, plusieurs résolutions du Conseil de sécurité ont réaffirmé la nécessité de négociations « sérieuses, réalistes et crédibles », sans qu’aucune solution définitive ne soit trouvée.

La résolution adoptée ce vendredi consacre une reconnaissance internationale accrue du plan d’autonomie marocain. Une victoire pour la patiente diplomatie marocaine qui a, au fil des années, gagné les soutiens francs et directs de l’Espagne, des États-Unis de Trump ou encore de la France en 2024. Les États-Unis ont joué un rôle central dans l’élaboration du texte, introduisant des aménagements essentiels : participation effective des populations locales, protection de leurs droits et engagement pour la transparence des institutions. 

Ces précautions diplomatiques ont été déterminantes pour obtenir le consensus nécessaire et éviter tout veto, notamment de la Russie et de la Chine, qui avaient parfois exprimé leurs réserves par le passé.

A lire aussi: Trump et le Proche-Orient: qu’est-ce que la «paix par la force»?

La France, l’Arabie Saoudite et plusieurs États africains et européens ont également soutenu le texte, renforçant sa légitimité. Paris a souligné que la résolution représente une opportunité historique de consolider la stabilité régionale et de créer un cadre de négociation durable. 

Pour Rabat, cette décision constitue une reconnaissance diplomatique majeure, marquant un tournant dans la perception internationale du plan d’autonomie. Pour Alger et le Polisario, c’est un signal clair : le statu quo prolongé n’est plus soutenu par la communauté internationale et l’autonomie marocaine est désormais mise en avant comme cadre privilégié pour résoudre le différend.

Approche pragmatique

Le plan prévoit la création d’institutions locales élues par les Sahraouis, avec des compétences législatives, exécutives et judiciaires limitées aux affaires internes, tandis que le Maroc conserve les prérogatives stratégiques et internationales. Cette approche pragmatique, saluée par les observateurs comme un compromis réaliste, offre un cadre de négociation stable, susceptible de dépasser les blocages passés.

La résolution ouvre également la voie à un suivi rigoureux de la mise en œuvre. Les mécanismes de contrôle et d’évaluation prévus par le texte permettront de s’assurer que l’autonomie se déploie effectivement, tout en respectant les droits et la participation des populations locales. Ce suivi est crucial, car il constitue la garantie que la résolution ne restera pas lettre morte, comme cela a pu être le cas pour certaines initiatives précédentes.

Ce vote témoigne d’une diplomatie internationale en pleine maturation, capable d’articuler reconnaissance de la souveraineté marocaine et garanties pour la participation locale, dans un texte minutieusement calibré pour respecter les équilibres régionaux. Il reflète un pragmatisme rare, sur un dossier qui a longtemps été figé par des postures idéologiques et des blocages stratégiques. Cette avancée n’aurait pas été possible sans la diplomatie habile de Mohammed VI, dont l’impulsion personnelle a su accélérer le changement, mobiliser le soutien international et repositionner le Maroc comme acteur incontournable de la résolution du conflit. En définitive, cette adoption constitue un tournant historique : elle inscrit le plan d’autonomie marocain comme une solution crédible et réaliste, tout en ouvrant un cadre diplomatique propice à des négociations constructives. Les défis restent nombreux — assurer la participation effective des populations sahraouies, garantir la transparence des institutions locales, respecter pleinement les droits fondamentaux — mais la résolution offre désormais une perspective tangible de paix et de stabilité dans la région après des décennies d’incertitudes.

Le permis, c’est plus pour la vie!

L’UE impose un permis renouvelable tous les 15 ans: les seniors et les ruraux sont sur le qui-vive…


Alors que Bruxelles harmonise, les campagnes s’inquiètent. Le 25 mars 2025, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen ont trouvé un accord sur la révision de la directive relative aux permis de conduire. À partir de 2026, la validité administrative du précieux sésame sera limitée à quinze ans pour les voitures et motos (ou dix ans lorsqu’il sert aussi de carte d’identité). Les permis poids lourds devront, eux, être renouvelés tous les cinq ans.

Cette réforme s’inscrit dans la stratégie européenne Vision Zero, qui vise à réduire de moitié les morts et blessés graves sur les routes d’ici 2030. Elle prévoit aussi un contrôle médical ou une auto-évaluation au moment du renouvellement, ainsi que l’introduction du permis numérique dans le futur portefeuille d’identité européen à l’horizon 2030.

Présentée comme un progrès administratif et sécuritaire, cette mesure suscite déjà de vives réserves chez les seniors et les habitants des zones rurales — ceux pour qui conduire n’est pas un plaisir, mais une nécessité.

Les seniors redoutent la stigmatisation

La directive laisse aux États membres la liberté de raccourcir la validité du permis pour les conducteurs de plus de 65 ans. Une clause qui, sur le papier, relève du bon sens. Dans les faits, elle alimente la crainte d’une discrimination silencieuse.

Pour beaucoup de seniors, la voiture reste un instrument d’autonomie. Elle permet d’aller chez le médecin, de rendre visite à sa famille, de maintenir une vie sociale. Or, l’idée d’un renouvellement plus fréquent, accompagné de contrôles médicaux, est vécue comme une suspicion institutionnalisée : le conducteur âgé n’est plus présumé capable, mais potentiellement dangereux.

Les visites médicales, même facultatives, sont déjà redoutées : coûts, démarches, peur de perdre le droit de conduire pour une fatigue passagère ou une vue imparfaite. Et dans un contexte de désertification des services publics, chaque nouvelle formalité ressemble à une embûche de plus sur la route de la vieillesse.

En milieu rural, une double peine

Dans les territoires ruraux, la dépendance à la voiture est absolue. On conduit non pour le plaisir, mais pour vivre : pour se rendre au travail, au marché, à l’hôpital. Là où le bus passe deux fois par jour et la gare la plus proche se trouve à trente kilomètres, le volant n’est pas un confort, c’est un droit vital.

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Mais ce droit pourrait bien se compliquer. Le renouvellement administratif tous les quinze ans risque de tourner au casse-tête :
– démarches en ligne difficiles, voire impossibles sans connexion ;
– guichets administratifs éloignés ;
– déplacements coûteux pour un simple papier ;
– sentiment d’un contrôle injustifié.

Pensée à Bruxelles comme une modernisation, la mesure sera perçue dans les campagnes comme une contrainte de plus, imposée d’en haut sans prise en compte du réel. L’Europe « connectée » parle digitalisation et sécurité ; la France rurale, elle, entend distance et paperasse.

La lecture conservatrice : liberté, subsidiarité et bon sens

Pour un lecteur de sensibilité conservatrice, cette réforme soulève des questions fondamentales : liberté individuelle, autonomie, subsidiarité et rapport entre sécurité et responsabilité.

1. La liberté individuelle.

Renouveler un permis n’a rien de choquant. Mais faire de ce renouvellement un rituel administratif obligatoire pour tous, sans motif particulier, revient à instaurer une forme de tutelle permanente. La sécurité ne saurait justifier une méfiance généralisée envers les citoyens.

2. Le principe de subsidiarité.

L’Union européenne fixe le cadre, mais les États devront adapter la mise en œuvre. C’est là que se jouera la différence entre un texte technocratique et une réforme supportable. Une Europe respectueuse de la diversité devrait reconnaître que la vie d’un automobiliste du Cantal n’a rien à voir avec celle d’un cadre bruxellois.

3. La voiture, symbole d’émancipation.

Pour les ruraux, la voiture n’est pas un gadget mais un instrument de liberté. Restreindre ou complexifier l’accès au permis revient, pour beaucoup, à restreindre la possibilité même de vivre dignement.

4. L’argument sécuritaire.

La sécurité routière est un objectif légitime. Mais lorsqu’elle devient le paravent de nouvelles contraintes, elle alimente le sentiment d’une société de la suspicion, où l’État protecteur se transforme en tuteur permanent.

5. Le tout-numérique imposé.

Le futur permis digital illustre cette fracture : progrès pour les urbains connectés, angoisse pour les aînés et les ruraux. Dépendance au smartphone, risques de piratage, disparition du document papier : la modernité devient parfois synonyme d’exclusion…

Adapter pour ne pas fracturer

Pour éviter que cette réforme ne se transforme en double peine, plusieurs garde-fous s’imposent selon moi : Pourquoi ne pas maintenir un permis papier aux côtés du format numérique pour ceux qui le désirent ? Ne pourrait-on pas permettre les démarches en mairie ou par guichet itinérant ? Comment garantir des contrôles médicaux proportionnés et non discriminatoires ?

Il faut impérativement adapter les modalités de cette nouvelle mesure selon les réalités locales. Car l’uniformité n’est pas l’unité. Une Europe équilibrée devrait protéger la liberté des individus autant que leur sécurité.

Une réforme symptomatique

L’affaire du permis de conduire révèle la tension grandissante entre technocratie européenne et réalité du terrain. Quand Bruxelles parle sécurité et modernité, nos campagnes entendent bien souvent contrainte et méfiance. Pour les habitants des « territoires oubliés », pour les aînés attachés à leur indépendance, la voiture demeure le dernier espace de liberté concrète. Et chaque réforme qui la rend plus conditionnelle — même sous couvert de progrès — est vécue comme une atteinte à cette liberté. La question n’est donc pas de savoir si le permis doit être renouvelé tous les quinze ans, mais si nous aurons encore le droit de conduire librement.

Car lorsque la route devient un couloir administratif, c’est la société tout entière qui a le sentiment de perdre le sens de la responsabilité et de la liberté.

🎙️ Podcast: Élection à New York – grand retour du progressisme en Amérique?

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Avec Gerald Olivier et Jeremy Stubbs.


Mardi 4 novembre auront lieu les élections pour la mairie de New York. Le candidat favori est le Démocrate Zohran Mamdani. Gerald Olivier, grand expert de la vie politique outre-Atlantique et des relations internationales, nous explique qui est ce jeune progressiste qui, pour le moment, semble focaliser tous les espoirs d’un Parti démocrate en désarroi depuis la défaite sans appel infligée à Kamala Harris par Donald Trump il y a un an.

Si le courant véritablement socialiste que représente Mamdani arrive à prendre le pouvoir au sein de son Parti, le résultat risque d’être, non une dérive vers l’extrême-gauche, mais une scission qui coupe en deux cette formation politique fondée en 1828.

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Pendant tout ce temps, le grand adversaire du progressisme, Donald Trump, faisait une tournée triomphale en Asie, visitant à tour de rôle la Malaisie, le Japon et la Corée du Sud où il a rencontré brièvement Xi Jinping. Son succès montre combien avaient tort tous ces commentateurs, surtout en France, qui ont répété inlassablement – et qui continuent de le faire – que la politique étrangère du président est résolument isolationniste. Le nombre de pays qui aujourd’hui affichent leur amitié avec les États-Unis ou qui se montrent prêts à conclure un accord commercial avec Trump est la preuve que la vision de ce dernier est America first (l’Amérique d’abord) plutôt que America alone (l’Amérique seule).

Rude bataille au pays du consensus

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Pays-Bas : droite nationale et libéraux de gauche sont au coude à coude aux élections législatives anticipées. Analyse.



Suspense électoral aux Pays-Bas, où la droite radicale de Geert Wilders se retrouve au coude-à-coude avec les libéraux progressistes du D66. Mercredi soir, le premier sondage sortie des urnes donnait l’avantage aux libéraux, menés par Rob Jetten, avec 27 sièges contre 25 pour le Parti de la liberté (PVV) de M. Wilders. Mais, à l’aube jeudi, renversement de situation : après le dépouillement de la quasi-totalité des bulletins, les deux rivaux se retrouvaient soudain à égalité, chacun crédité de 26 sièges.

C’est la lutte finale

Celui qui aura obtenu le plus de voix pourra le premier tenter de former une coalition gouvernementale, comme le veut la tradition. Le duel final se joue donc à quelques milliers de voix. Celles des Néerlandais de l’étranger, jugées cruciales, ne seront peut-être connues que lundi prochain.

Mais, il est peu probable que M. Wilders, dont le parti perd onze sièges, soit invité à former un gouvernement. M. Jetten, qui en gagne 17, semble mieux placé. Après son triomphe électoral de 2023, quand le PVV obtint 37 des 150 sièges au Parlement, Wilders mit sur pied une coalition quadripartite qu’il dynamita l’été dernier. Depuis, aucun parti sérieux ne veut s’allier à lui, comme nous l’expliquions hier.  

La liesse de Rob Jetten aura finalement été un peu prématurée. Mercredi soir, devant des partisans euphoriques, il s’était réjoui : « Des millions de Néerlandais ont tourné la page de tant d’années de négativité et de haine. » Sans le citer, le chef de file du D66, 38 ans, visait clairement Geert Wilders, qu’il accuse de polluer le climat politique du pays depuis près de vingt ans.

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Selon les analystes, Geert Wilders a vu une partie de son électorat se tourner vers un autre parti de la droite dure, JA21, jugé plus disposé à collaborer avec d’éventuels partenaires sans les humilier. À l’inverse, M. Wilders continue d’adopter une ligne inflexible, tout en conservant un noyau dur de partisans farouchement fidèles. « Nous espérions un autre résultat, mais nous sommes restés fidèles à nous-mêmes », a-t-il déclaré, la mine renfrognée, avant que les résultats ne commencent à basculer en sa faveur.

Dans d’autres partis, de telles pertes auraient eu des conséquences pour le dirigeant. Mais, le PVV n’a pas de membres, M. Wilders, âgé de 62 ans, est seul maître à bord et les rarissimes velléités de rébellion sont immédiatement sanctionnées.

Rob Jetten, qui a du sang indonésien dans les veines, comme M. Wilders, a convaincu bien des électeurs par son approche optimiste et volontaire. C’est un pro-européen convaincu, qui fut brièvement ministre du Climat et de l’Energie, vice Premier ministre et fervent défenseur des droits LGBT. Il est fiancé avec un jeune homme argentin, joueur de hockey sur gazon dans l’équipe nationale de son pays et d’une équipe de La Haye. M. Jetten envisage de fonder une famille avec son amoureux et d’avoir des enfants, mais ces projets sont encore au stade d’étude.

Les bobos aux portes du pouvoir ?

Son parti D(émocraten)66, d’après l’année de sa fondation au siècle dernier, ne s’est que très récemment converti à l’idée qu’il était temps de limiter le nombre de demandeurs d’asile et des migrants. Le sujet intéresse peu ses électeurs, préoccupés surtout par le changement climatique, l’environnement, la pénurie de logements et l’état de l’enseignement national où ils sont nombreux à travailler. Sous M. Jetten, D66 tente de se défaire de son image bobo et soixante-huitarde. Il est vrai qu’on voit ses affiches électorales surtout dans les beaux quartiers, alors que celles du PVV prédominent dans les quartiers populaires. Durant sa campagne, Rob Jetten, issu de la classe moyenne, avait cherché à se rapprocher du « peuple » en imposant davantage de drapeaux rouge-blanc-bleu lors de ses meetings. « Notre drapeau ne doit plus être l’apanage de l’extrême droite », proclamait-il. Message reçu : la soirée électorale, hier, en était couverte, et l’atmosphère est restée festive tant que le parti apparaissait en tête.

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Aux Pays-Bas, la droite raille souvent les « juges D66 », un refrain comparable aux critiques françaises contre la supposée « République des juges » : les magistrats seraient, selon elle, trop indulgents envers les criminels et trop alignés sur les idées progressistes.

M. Jetten lorgne vers le centre-gauche, dont le principal parti, GroenLinks/PvdA, perd cinq sièges et en conserve vingt. Grande déception pour son dirigeant Frans Timmermans, qui a démissionné. Les chrétiens-démocrates, qui ont fait de bons scores, et les libéraux conservateurs, qui enregistrent une légère perte, sont également prêts à gouverner. Tous disent fuir M. Wilders, qui termine quand même ex-aequo avec l’homme qu’il estime être un immigrationniste pur sucre. Wilders assure qu’il veut et peut gouverner le pays. Y croit-il vraiment, après sa demi-victoire quelque peu tristounette et solitaire?

Silence dans les rangs!

Le 14 octobre, à Washington, plusieurs médias ont refusé de signer les nouvelles directives proposées par le Pentagone. Celles-ci prévoyaient notamment que les journalistes accrédités ne puissent plus publier certaines informations sans l’autorisation explicite du ministère de la Défense…


Le département de la Défense des États-Unis vient d’édicter de nouvelles règles pour les correspondants de presse qui ont provoqué un mouvement de révolte dans tous les médias, même les plus MAGA. 

Désormais, selon un nouveau document de 21 pages (à la différence de l’ancien règlement qui tenait en une seule page), un journaliste ne pourra divulguer même des informations non-confidentielles sans avoir la permission des autorités, sous peine de perdre son accréditation. Une autre règle stipule qu’« il y a une différence entre le fait de poser des questions licites à un responsable du département, et le fait de pousser un responsable à livrer des informations qui dépassent les limites de la discrétion nécessaire ». Les porte-paroles militaires seraient-ils donc si faciles à désarmer ? De manière générale, c’est tout comme si les journalistes ne devaient désormais diffuser que l’information que le département de la Défense a décidé de diffuser. C’est un véritable système de censure qui fait son apparition. À partir de maintenant, les journalistes auront besoin d’escortes pour circuler entre les différentes zones du Pentagone. Certes, en France, les journalistes accrédités défense ne se promènent pas non plus sans escorte dans les allées de l’Hexagone Balard qui abrite l’État-major des Forces armées. Cependant, l’idée de policer les écrits d’informations non-confidentielles n’existe heureusement pas en France.

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La raison de cette annonce outre-Atlantique n’est pas très claire. Dans le domaine de la défense, les journalistes sont normalement assez dociles. Rares sont ceux accrédités à être en bisbilles avec le bureau du porte-parole du département, par exemple. Le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, a motivé la décision de l’exécutif américain en se référant à des situations impliquant la « divulgation non autorisée d’informations classifiées, susceptible de mettre en danger la vie des militaires américains ». Or une telle logique peut s’appliquer dans un nombre infini de cas. Faut-il que la presse se focalise uniquement sur des déclarations comme celle que le secrétaire à la Défense a faite en septembre, devant des centaines de hauts responsables militaires, en dénonçant publiquement des troupes et des généraux en surpoids ? Fini les gros, bienvenue les guerriers.

La chose étonnante, voire réconfortante, dans cet énième bras-de-fer entre la presse et l’administration Trump vient de la presse républicaine, conservatrice, populiste. Fox News et Newsmax, deux chaînes qui soutiennent fortement Donald Trump et son mouvement, sont autant indignés par cette nouvelle réglementation que les autres médias. C’est ainsi que, mardi 14 octobre, leurs correspondants étaient parmi les centaines de reporters qui ont pris leurs affaires et ont évacué les locaux, en formant un cortège qui ressemblait à une évacuation. Le directeur du très pro-trumpien Newsmax a même expliqué à la BBC que la liberté de la presse était distincte de la ligne éditoriale d’un journal, et qu’il était totalement solidaire des médias représentant une ligne anti-MAGA. 

Le département à la Défense a répliqué à ce mouvement de protestation sur un ton moqueur : « Vous ne nous manquerez pas. Une nouvelle génération de reporters de défense arrivera. Des jours meilleurs sont devant nous ». Des jours meilleurs pour les gouvernants, faudrait-il comprendre… Mais si les vrais correspondants sont remplacés par des influenceurs en ligne, d’où proviendront les informations critiques et fiables qui ont fait la force de la presse américaine ?

Pour Boualem Sansal

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Ni la France, ni l’Europe, ni le CICR, ni l’ONU n’agissent, se désole Elisabeth Lévy dans sa chronique matinale sur Sud Radio. Nous vous proposons de l’écouter.


Cela fait 349 jours qu’un écrivain français dont le seul crime est de penser librement est détenu en Algérie – en réalité retenu en otage. À l’isolement. Se dit-il que la France l’a abandonné ?

Très peu d’informations (et conditionnelles) nous parviennent. Hier, nouvelles alarmantes de son comité de soutien. L’écrivain de 81 ans a un cancer. Il vit dans des conditions très dures. Il aurait demandé à être hospitalisé.

La gauche indifférente

L’indifférence des pétitionnaires professionnels et de la gauche en général est stupéfiante. Les milieux culturels sont aux abonnés absents. L’Académie française a refusé de l’élire (l’Académie royale de Belgique, elle, l’a fait). Les artistes qui dénoncent un génocide en boucle ne se soucient pas plus de Sansal que des supposés collabos palestiniens exécutés publiquement par le Hamas. Si Sansal était dans une prison israélienne, ils seraient déchaînés. Mais comme son crime est de dénoncer l’islam politique là-bas et ici, on vous dit qu’il est d’extrême droite. D’ailleurs, le Rassemblement national le défend.

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Est-ce qu’au moins la France officielle agit véritablement ? Ni la France, ni l’Europe, ni le CICR, ni l’ONU. On rêve d’une opération des forces spéciales à l’israélienne ou d’un coup d’éclat à la Trump. Mais non : nous devons nous contenter de l’Elysée qui prétend depuis des mois que c’est une priorité. Nous ne cessons de nous humilier. Il n’y a eu aucune rétorsion ou presque. Jean-Noël Barrot est allé baiser toutes les babouches qu’il pouvait. Pour en conclure que les relations étaient désormais apaisées, tu parles. Un signe parmi d’autres : le record des visas étudiants délivrés aux Algériens cette années. Macron adjure tout le monde de ne pas faire trop de bruit. Il promet que le dossier avance avec des airs entendus. Mais ni Boualem Sansal, ni Christophe Gleizes, journaliste retenu pour raisons politiques, ne l’ont convaincu de taper du poing sur la table. Notre diplomatie est en réalité dictée par la peur et par la culpabilité coloniale.

La France ne fait pas peur

Hier soir, la présidente du comité de soutien Noëlle Lenoir affichait un optimisme mesuré et diplomatique. Elle espère un déblocage lors du prochain voyage de Laurent Nuñez. Il est plus réaliste de s’en remettre au Pape qui va faire également un voyage en Algérie sur les traces d’Augustin.

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Hier, je voulais être Allemande. Et aujourd’hui, j’aimerais être Américaine. Un pays qu’on respecte aurait déjà obtenu le retour de nos deux compatriotes Sansal et Gleizes. Par la diplomatie ou par la force. Avec des rétorsions disproportionnées. Genre confiscations des biens, expulsions, arrêt de tout visa… Ça aurait duré deux jours. Mais non, vous comprenez on ne peut pas. Nous on a des bonnes manières. Ce n’est pas la diplomatie de la canonnière mais la diplomatie de la courbette.

Retrouvez Elisabeth dans la matinale de Sud Radio.

Trump sort sa pioche et démolit tout… sauf les fake news

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Aile Est de la Maison Blanche: et Trump conduit le bal…


Si vous ne suivez l’information que d’un œil et d’une oreille, vous avez peut-être vu et entendu ces derniers jours une nouvelle proprement effrayante concernant les Etats-Unis: « Donald Trump est en train de détruire la Maison Blanche » !

Ah, quel boulet !

Jay Scarborough le présentateur matinal de MSNBC a dénoncé une « destruction grotesque »! Les présentatrices de l’émission « The View » sur ABC (une table ronde quotidienne exclusivement féminine) ont hurlé de colère : « Il n’a pas le droit de la détruire ce n’est pas sa maison, c’est la maison du peuple ». Hillary Clinton, une autre femme féministe, a dit exactement la même chose sur X « ce n’est pas sa maison, c’est la vôtre et il est en train de la détruire. » Et le très sérieux New York Times s’est lamenté que Trump ait utilisé un « boulet de démolition contre la Maison Blanche».

Qu’on se rassure, la Maison Blanche est toujours debout ! Ces informations étaient erronées. C’étaient encore des fausses nouvelles (« fake news ») vendues par la clique de journalistes américains qui détestent Trump et détournent les faits – ou racontent carrément n’importe quoi – depuis dix ans, avec l’espoir de monter l’opinion publique contre lui. Espoir totalement vain, cela dit au passage. Tout au plus, ces journalistes ont-ils réussi à tuer leur propre crédibilité et à provoquer une crise de confiance sans précédent envers les médias « officiels »…

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Trump n’est pas en train de détruire la Maison Blanche et n’a aucune intention de le faire. Au contraire il vient d’y engager un projet de rénovation majeur : la construction d’une grande salle de bal (8 000 m²) en place et lieu de l’actuelle « aile est ». Les travaux d’excavation ont commencé avec inévitablement la démolition d’une partie de la structure actuelle… D’où les élucubrations de la gauche américaine. Imaginez qu’en 1985,  Le Monde ait accusé François Mitterrand de « détruire le Louvre » lorsque les travaux de la future pyramide ont commencé dans la Cour Carrée !

Au-delà de la fausse polémique, le projet mérite quelques éclaircissements, ne serait-ce que pour rappeler que de nombreux présidents avant Trump ont laissé leur marque sur cette demeure, et ont en général été vivement critiqués par leurs contemporains pour cela.

Trop étroit pour Théodore Roosevelt

La Maison Blanche est le lieu de vie et de travail du président des Etats-Unis. Elle sert aux réceptions protocolaires. Elle est aussi ouverte au public et reçoit un demi-million de visiteurs chaque année. Elle fut construite à partir de 1792 sur un site choisi par le président Washington. C’est une demeure néo-classique de style géorgien, avec un fronton palladien et une rotonde à l’arrière, due à l’architecte James Hoban, également maître d’œuvre du Capitole, le bâtiment qui abrite le Congrès.

Le fronton et la rotonde sont toujours là, ornant respectivement les façades nord et sud, mais le bâtiment n’est plus l’original. Car cette première Maison Blanche fut brulée par les Anglais lors de la prise de Washington durant la guerre de 1812-1814 et le bâtiment reconstruit ensuite à l’identique.

Aujourd’hui ce que les médias appellent « la Maison Blanche » est en fait un complexe de plusieurs bâtiments qui abritent les principaux services de l’appareil exécutif américain. Le bâtiment central est appelé en anglais la « executive mansion » ou « executive residence ». C’est cette bâtisse qui abrite les appartements présidentiels – au premier étage – et les principaux bureaux de l’exécutif – au rez-de-chaussée et dans les sous-sols.

La bâtisse avec ses deux étages extérieurs et ses onze fenêtres a conservé un même aspect extérieur depuis sa reconstruction en 1817. Chaque président a effectué des aménagements mineurs et changé le mobilier, sans toucher à l’édifice.

En 1802, Thomas Jefferson fit ajouter des colonnades de chaque côté, longues allées couvertes permettant de se rendre dans des bureaux à l’extérieur, prémices des futures « aile est » et « aile ouest ».  Andrew Jackson agrémenta le fronton d’un portique majestueux et fit installer la plomberie et le chauffage en 1830. James Polk ajouta l’éclairage au gaz en 1848.  Abraham Lincoln fit construire une verrière sur le toit, malgré la guerre de Sécession en 1862. Il fit aussi installer un poste de télégraphe. En 1878 Rutherford B. Hayes fit installer le téléphone, et en 1891 Benjamin Harrison, l’électricité.

En 1882 le président Chester Arthur effectua une grande rénovation intérieure en faisant appel à l’artiste Louis Tiffany, qui fit entrer l’art nouveau et des vitraux colorés dans la demeure présidentielle.

Mais la première modification majeure du bâtiment fut l’œuvre de Théodore Roosevelt à partir de 1902. A l’aube du 20e siècle le bâtiment que Thomas Jefferson avait appelé une « agréable résidence de campagne » était devenu trop étroit pour une administration qui n’avait cessé d’étendre ses compétences et le nombre de ses employés.

Roosevelt fit donc aménager « l’aile ouest » pour y loger une partie de son administration. La presse de l’époque fut unanime pour condamner ces travaux. Roosevelt avait privé le bâtiment de « sa valeur historique », dit-elle. Sans parler de la serre qu’il fallut détruire et des plantes qu’il fallut déplacer…

L’aile ouest devint néanmoins le nouveau centre névralgique de la présidence américaine. Le président Taft y fit même aménager son bureau, de forme ovale, en 1909. Franklin Roosevelt, élu en 1932, fit déplacer le bureau ovale à l’emplacement qu’il occupe toujours aujourd’hui, le coin sud-est de l’aile, ouvrant sur la pelouse sud.

Fantasmes

En 1942,  le même  Franklin Roosevelt fit construire « l’aile est ». Toujours pour accommoder une administration de plus en plus pléthorique. Temps de guerre oblige, un bunker fut aménagé dans le sous-sol. Et sécurité nationale oblige, sa construction fut gardée secrète. Ce qui alimenta tous les fantasmes, ainsi que la colère du Congrès, vexé de ne pas être informé.

Certains des nouveaux bureaux de l’aile est furent aussi destinés à la Première Dame et son entourage. Une première dans l’histoire américaine.

Ces aménagements, ainsi qu’un aménagement des combles dans les années 1920 finirent pas imposer un stress excessif à la structure originale alors âgée de 130 ans. Les planchers du 1er étage étaient particulièrement fragiles. Le pied du piano de Madame Truman finit par passer à travers et une baignoire du premier faillit se retrouver au rez-de-chaussée. La Maison Blanche tout entière menaçait de s’écrouler. « Elle ne tient debout que par la force de l’habitude » dit un ingénieur venu inspecter son état.

Une rénovation totale fut alors ordonnée et le président Harry Truman et son épouse durent emménager dans la Blair House, habituellement réservées aux hôtes étrangers, le temps des travaux. Seule la carcasse extérieure fut conservée. Comme un décor de cinéma. Pour ne pas effrayer les Américains. La Maison Blanche fut ramenée à l’état de coquille vide. L’intérieur de la demeure fut entièrement rasé puis reconstruit à l’identique. Les travaux durèrent trois ans, jusqu’en 1951.

A l’occasion, la vieille ossature de bois fut renforcée par une structure en acier et la climatisation installée, ce qui, vue la chaleur humide et étouffante de Washington l’été, a changé la vie des employés de la Maison Blanche.

En 1960 Jacqueline Kennedy, supervisa une nouvelle rénovation intérieure, avec l’aide d’un designer français, Stéphane Boudin. Elle fut la première à piocher dans l’immense stock de mobiliers et œuvres d’art accumulés par les différents occupants au cours des décennies passées et remisés dans des entrepôts de stockage. Une fois les travaux terminés, elle invita les caméras de télévision et fit éditer un guide de la Maison Blanche dont la vente permit de rembourser une partie du coût des travaux.

Jackie Kennedy fit également planter une roseraie dans la pelouse du sud, le « rose garden ». Elle existe toujours et tient lieu de décor à certaines cérémonies et conférences de presse pendant les beaux jours. Jackie Kennedy fut la seule personne à être jamais félicitée par les médias pour ses transformations apportées à la Maison Blanche. Peut-être parce qu’elle n’était que la première dame, et non pas le président, et parce qu’elle personnifiait l’élégance et le bon goût. Son mari, le président John Kennedy, aimait nager dans la piscine aménagée dans le sous-sol. Elle datait de 1933 et avait été construite pour le président Roosevelt qui souffrait de la polio et l’utilisait à des fins thérapeutiques. Kennedy en faisait, pour sa part, un usage strictement récréatif, invitant dit-on les jeunes secrétaires de la Maison Blanche à le rejoindre dans le plus simple appareil…

Nixon fit couvrir la piscine et installa à la place la salle de presse. Toujours utilisée aujourd’hui. L’essor de la télévision et de l’information en images et en direct avaient généré une demande pour un espace dédié aux « briefings » où l’on puisse installer des caméras et une salle de presse.

Toutefois, la Maison Blanche dispose toujours d’une piscine, mais en extérieur. Elle fut construite sous Gerald Ford, à partir de donations privées et est réservée à l’usage de la famille et de leurs invités. Ford était un avide nageur. Nixon préférait jouer au bowling et en fit bâtir un au sous-sol. Barack Obama préférait le basket-ball et fit recouvrir le court de tennis pour y installer des paniers de basket…

Bill et Hillary Clinton firent à nouveau changer la décoration intérieure. Avec l’aide d’une décoratrice de l’Arkansas, l’Etat de Bill Clinton. Bill prit quelques libertés avec les lieux, faisant de l’alcôve menant au bureau ovale le lieu de ses ébats sexuels avec une jeune stagiaire, Monica Lewinski. En quittant les lieux, le couple Clinton emporta la vaisselle et l’argenterie. Ils furent rattrapés par la patrouille et durent tout restituer, ces biens étant ceux du peuple américain, et non des occupants de la Maison Blanche…

En 2003 George W. Bush, bien qu’originaire de l’Etat pétrolier du Texas, fit installer des panneaux solaires pour chauffer l’eau de la piscine extérieure et alimenter certains ateliers techniques. Dix ans plus tard Barack Obama installera des panneaux solaires directement sur le toit de la résidence principale, pour alimenter les appartements présidentiels. Quant à Michelle Obama, elle plantera un potager « bio » et installera des ruches pour produire un miel de la Maison Blanche.

Jusqu’à récemment, le seul apport de Donald Trump était des mâts de trente mètres de haut de part et d’autre du bâtiment principal pour hisser les couleurs américaines plus haut que jamais.

Scandale !

Et puis il y eut la salle de bal ! Le lieu de tous les enjeux. La pièce à l’origine du scandale. Contrairement à ce que beaucoup de médias ont affirmé ce projet n’est ni soudain, ni  nouveau. Il trotte dans la tête de Donald Trump depuis des années. Régulièrement invité à des diners à la Maison Blanche, Trump avait constaté que la Maison Blanche ne dispose pas d’un salon digne de la puissance et de la richesse des Etats-Unis. La « East Room » ne peut accueillir que deux cents personnes. Pour toute capacité supérieure, il faut dresser des tentes sur la pelouse, monter un faux parquet et installer des toilettes portatives ! Indigne de la première puissance mondiale.

En  2010, le citoyen Trump avait proposé à David Axelrod, principal conseiller de Barack Obama, de leur construire une salle de bal pour cent millions de dollars. Proposition non retenue. Lors de son premier mandat, le temps avait manqué pour lancer le projet. Cette fois et parce qu’il sait qu’il ne fera pas de « troisième mandat » (même s’il aime provoquer les démocrates sur cette question), Trump a décidé d’agir et d’agir vite.

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L’annonce officielle du projet remonte au 31 juillet dernier ! Il s’agissait d’une salle de bal venant se greffer sur l’aile-est, sans nécessiter sa démolition totale. La dimension annoncée était de 8 000 m². De quoi accommoder jusqu’à mille invités. Clark Construction, firme immobilière très reconnue de Washington, fut retenue pour le projet, contre un budget de 200 millions de dollars. En septembre ce budget fut révisé à 250 millions de dollars. Il apparut aussi que l’aile est devrait être entièrement détruite. Avec son propre argent et le soutien de donateurs privés et pour financer le projet, Donald Trump donna l’ordre de préparer le terrain, c’est-à-dire de démolir l’aile est.

En dépit de cris d’orfraies de la gauche américaine, Trump n’a rien fait d’illégal. La preuve, aucune action judiciaire n’a été engagée contre lui. Il existe bien une loi aux Etats-Unis sur la gestion des monuments historiques, mais la Maison Blanche et le Capitole ne sont pas concernés. Il existe aussi la National Historical Planning Commission (NCPC), chargée de superviser les projets fédéraux, mais ses compétences se limitent à la « construction » du nouveau bâtiment, pas à la destruction de l’ancien ! Les fonds finançant le projet étant privés, Trump n’avait besoin d’aucune autorisation du Congrès et n’a donc pas consulté les législateurs… D’autant que le gouvernement est actuellement « fermé » pour cause d’impasse budgétaire.

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Moralité, ayant les mains libres Trump en a profité pour agir vite. Comme à son habitude. L’aile est n’est plus et le retour en arrière n’est pas possible, sauf à la reconstruire à l’identique ce qui serait une perte totale d’argent et de temps. Trump aurait pu présenter les plans de la future salle de bal à la NCPC, mais il n’en avait pas l’obligation. Ces plans peuvent donc encore évoluer et avec eux le budget du projet. Pour l’heure, Trump a levé pas moins de 350 millions de dollars. Plus que nécessaire. Et les plus grandes entreprises américaines sont derrière lui, de Google à Microsoft en passant par Apple et Amazon ou Lockheed Martin et d’autres.

Moralité, la salle de bal verra le jour. La question est de savoir si les travaux seront finis pour fin 2028 comme le projet le prévoit. Sinon, Trump pourrait bien être tenté de rester au-delà de son mandat pour être toujours président au moment de l’inauguration de « sa » salle de bal… Que les anti-Trump se rassurent, la salle ne sera pas nommée la « salle de bal Donald J. Trump». Donald Trump a lui-même modestement suggéré « la salle de bal présidentielle ».


Ce texte a été publié sur le blog de Gerald Olivier.

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Gaza: une milice peut en cacher une autre

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Des membres des Brigades Al-Qods, la branche militaire du groupe Jihad islamique palestinien dirigé par Ziyad al-Nakhalah, défilent dans les rues de la ville de Gaza, octobre 2018 © Mahmoud Issa / SOPA Image/SIPA

La place du futur ennemi numéro un d’Israël serait-elle à prendre ? Le Jihad islamique palestinien apparait comme l’organisation la mieux placée pour prendre la tête du terrorisme palestinien à la place du Hamas en cas de neutralisation de ce dernier. Analyse.


La libération des 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza le 13 octobre dernier a constitué un immense soulagement que l’on doit en grande partie à Donald Trump. Dans la poursuite de sa quête avouée d’obtenir le prix Nobel de la paix, le Républicain a actionné tous les leviers à sa disposition pour aboutir à un résultat qui paraissait difficilement envisageable ; permettant ainsi de paver la voie à une possible cohabitation pacifique entre Palestiniens et Israéliens. Néanmoins, le plan Trump comprend plusieurs incertitudes.

Angles morts

Si l’on part du postulat que le Hamas acceptera de déposer les armes, ce qui semble par ailleurs hautement improbable, le danger que constituent les nombreux autres groupes terroristes disséminés dans l’enclave se situe dans un des angles morts du plan.

La plupart des factions armées palestiniennes, ayant jusqu’ici bénéficié de l’ombre projetée par le Hamas, sont toujours actives et présentent des modus operandi qui nécessiteront des approches différentes pour les neutraliser. Si le scénario d’un désarmement du Hamas venait à se concrétiser, il est évident que ces nombreuses organisations continueront de faire planer une menace sécuritaire d’envergure sur Tel Aviv ; le Jihad islamique palestinien reprenant alors le rôle du Hamas comme élément le plus en vue du terrorisme palestinien.

Le Hamas, partie émergée de l’iceberg ?

Dès que les premières images des attaques terroristes du 7 octobre 2023 furent diffusées, le narratif quasi-unanimement proposé par les médias occidentaux laissait à penser que seuls les hommes de la branche armée du Hamas, les brigades Izz al-Din al-Qassam, avaient participé aux atrocités commises ce jour-là. Bien qu’orchestré par Yahya Sinwar, chef de la branche armée du Hamas, le « déluge d’al-Aqsa » a en réalité impliqué au moins cinq autres groupes palestiniens selon Moussa Abu Marzouk, l’un des responsables du Hamas[1].

L’un des ouvrages de Mohamed Sifaoui, spécialiste du terrorisme islamiste, a révélé que le pogrom du 7 octobre faisait l’objet d’une préparation minutieuse remontant à 2020 sous la direction d’un organe appelé « chambre des opérations »[2]. A l’exception notable du Fatah, cette chambre servait d’outil de communication et de coordination entre toutes les factions impliquées, ces dernières ayant mis de côté leurs divergences politiques ou religieuses pour se rassembler en son sein. Les brigades Abou Ali Mustapha, branche militaire du Front populaire de libération de la Palestine d’orientation marxiste-léniniste, ont ainsi participé aux attaques du 7 octobre.

A lire aussi, Gil Mihaely: Israël-Hamas: qui perd gagne?

Il en va de même pour les brigades An-Nasser Salah al-Din, faction de la bande de Gaza qui contribue également aux forces de police officiant dans l’enclave. Sa collaboration avec le Hamas n’est pas nouvelle puisque c’est à cette brigade que l’on attribue l’enlèvement du soldat israélien Gilad Shalit en 2006. Ce dernier sera libéré en 2011 en échange de plus de mille prisonniers palestiniens dont Yahya Sinwar[3]. Les Brigades des Martyrs d’al-Aqsa, qui comptaient 5 000 hommes avant les attentats du 7 octobre, autrefois associées au Fatah mais partageant l’idéologie islamiste du Hamas, ont aussi contribué aux attaques. Tout comme les Forces du martyr Omar al-Qassem, branche armée du Front démocratique de la libération de la Palestine qui ont revendiqué leur participation aux attaques et continuent d’émettre des communiqués établissant leur responsabilité dans d’autres opérations terroristes via des canaux tels que l’agence de presse yéménite Saba.

Dès lors, on voit bien qu’attribuer les attaques terroristes du 7 octobre aux seuls militants du Hamas est une lecture très incomplète des évènements qui permet indirectement aux autres factions terroristes impliquées de rester dans l’ombre. Il résulte de ces éléments que le simple fait de neutraliser le Hamas ne suffira pas à assurer la sécurité d’Israël, la menace terroriste s’en accommodera et changera tout simplement de visage.

Le Jihad islamique palestinien, futur ennemi numéro un d’Israël ?

Considérée comme la deuxième organisation terroriste la plus influente de la bande de Gaza, le Jihad islamique palestinien pouvait s’appuyer sur 10 000 combattants avant le 7 octobre 2023. Bien qu’émanant également des Frères musulmans, il se distingue du Hamas en ce qu’il lui reproche une approche insuffisamment islamique de la gouvernance de l’enclave. Il refuse par ailleurs catégoriquement tout rôle politique, une absence d’ambition politique qui permet aux deux groupes de collaborer. Cette organisation terroriste apparaît aujourd’hui comme la mieux placée pour prendre la tête du terrorisme palestinien à la place du Hamas en cas de neutralisation de ce dernier.

Fondé en 1981 par Fathi al-Shiqaqi, le Jihad islamique palestinien s’est signalé aux yeux du grand public par une série d’attentats suicides perpétrés afin d’enrayer la mécanique de paix enclenchée par les accords d’Oslo signés en 1993. A l’inverse du Hamas, ils refusent d’envisager toute négociation, y compris dans le but de mener à un cessez-le-feu. Ses militants se distinguent par des attaques au couteau et bien entendu par des attentats-suicides à la bombe, signature du groupe.

Contrairement au Hamas, la distinction entre branches politique et militaire n’a aucun sens pour le Jihad islamique palestinien. L’organisation en tant que telle se confond avec sa branche armée, les Brigades al-Qods, qui perpétue et revendique les attentats commis en son nom. La communication de ces Brigades, effectuée via leur site internet se confond avec celle du Jihad islamique palestinien qui met à profit ses propres médias[4].

Les ambitions pour l’enclave du groupe désormais dirigé par Ziad al-Nakhalah sont également plus radicales d’un point de vue religieux que celles du Hamas, de quoi laisser craindre un système d’endoctrinement encore plus prononcé que celui mis en place par le Hamas depuis sa création puis son élection. Si tous deux souhaitent une Palestine indépendante, le Jihad islamique palestinien entend en faire un État religieux plus proche de ce que fut le califat de l’État islamique en Irak et en Syrie. Sa propension à embrasser sans réserve les intérêts de Téhéran en fait par ailleurs un allié plus fiable aux yeux du régime des mollahs que le Hamas[5].

Enfin, contrairement au Hamas, le Jihad islamique palestinien dispose d’hommes en Cisjordanie. Le groupe accuse fréquemment Israël de vouloir annexer le territoire[6] et oblige Tsahal à devoir garder un œil sur les agissement du groupe terroriste depuis la Cisjordanie. Une récente opération menée par l’armée israélienne dans le nord de la Cisjordanie ayant permis la neutralisation de deux membres du Jihad islamique palestinien illustre que ce dernier peut frapper depuis l’ensemble du territoire palestinien[7].

La disparition du Hamas serait certes une première victoire d’importance, mais la guerre contre le terrorisme palestinien n’en serait donc pas achevée pour autant.


[1] https://www.bbc.com/afrique/articles/c99ezy1r55lo

[2] Mohamed Sifaoui, Hamas : plongée au cœur du groupe terroriste, 2024, p. 255.

[3] https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/yahya-sinwar-attentats-7-octobre-liberation

[4] https://www.nationalsecurity.gov.au/what-australia-is-doing/terrorist-organisations/listed-terrorist-organisations/palestinian-islamic-jihad

[5] https://fr.timesofisrael.com/liran-au-jihad-islamique-vous-avez-prouve-que-vous-pouvez-ecraser-lennemi

[6] https://www.lefigaro.fr/international/cisjordanie-le-djihad-islamique-accuse-israel-de-vouloir-annexer-le-territoire-occupe-20250224

[7] https://www.longwarjournal.org/archives/2025/09/israeli-operation-kills-2-palestinian-islamic-jihad-terrorists-in-west-bank.php

L’imam qui croyait au Père Noël

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DR

Au Royaume-Uni, Umayr Mulla, l’imam d’une mosquée de Nottingham regrettera longtemps d’avoir répondu aux questions du militant identitaire Tommy Robinson et d’avoir dit du bien d’une éventuelle solution à deux États au Proche-Orient. Récit.


Au Royaume-Uni comme en France, prétendre qu’il n’y a aucun apartheid en Israël vous expose à l’exclusion sociale. Quand ce sont les principaux intéressés, les Israéliens, qui l’affirment, il suffit de les accuser, en plus, de mensonge. Mais quand c’est un imam britannique qui le prouve en se promenant à Jérusalem avec la même insouciance que n’importe quel pékin croyant ou incroyant, cela devient plus difficile.

– Bah ! Suffit de pas en parler, Coco ! Tu veux quand même pas faire le jeu des sionistes ?

Umayr Mulla, imam de la mosquée Masjid Khazra de Nottingham, s’est mordu les doigts de n’avoir pas suivi le sage conseil donné à certains journalistes débutants (syn. : « enclins à vérifier leurs sources ») par certains rédacteurs en chef de médias mainstream dans le monde (sans majuscule, Votre Honneur !)

Inclusion, diversité et équité dans une mosquée de Nottingham

L’imam a visité la vieille ville de Jérusalem en compagnie d’un suppôt de l’extrême droite, le journaliste militant Tommy Robinson. Pire qu’un délit d’opinion, c’est un péché mortel.

Tommy Robinson, qualifié de « visage de l’extrême-droite britannique qui attise la haine anti-musulmans » par France 24, a été accusé par icelle d’avoir organisé une marche pour la « liberté d’expression ». Les guillemets sont une circonstance aggravante ajoutée par le média étatique.

Ladite marche ayant rassemblé près de 150 000 personnes rien qu’à Londres, le 13 septembre 2025, il devenait impossible de la passer sous silence. Certains médias bienpensants ont simplement remplacé « liberté d’expression » par « islamophobie » et hop ! le tour était joué. D’autres y ont ajouté que la manifestation était violente, car 28 policiers ont été blessés et 25 personnes ont été arrêtées pour « troubles violents, agressions et dommages criminels », preuve irréfutable que les manifestants n’étaient pas des citoyens pacifiques mais des meurtriers de musulmans en puissance.

A relire, Jeremy Stubbs: La terre promise du frérisme en Europe

Le Monde a vu ce qu’il voulait y voir : « La police a déclaré que 26 agents avaient été blessés, dont quatre gravement, après avoir été confrontés à une « violence inacceptable » alors qu’ils tentaient de contrôler la foule, dont beaucoup étaient drapés de drapeaux anglais et britanniques, pendant plusieurs heures tendues en marge du rassemblement. » Associated Press y a regardé d’un peu plus près, ce qui lui a permis de séparer les bons manifestants de l’ivraie black-blockiste : « la manifestation a dégénéré samedi lorsqu’un petit groupe de ses partisans s’est affronté avec des policiers qui les séparaient des contre-manifestants. » Regarder des deux côtés de la lorgnette, ce n’est pas du journalisme, c’est de la provocation !

Quand on est un imam respectueux de ses ouailles, on évite soigneusement le risque de contagion avec des personnes infectées par le Covid, le sionisme ou l’extrême droitisme. Si Umayr Mulla n’a pas pris cette précaution, ce n’est pas par étourderie, c’est par idéalisme (syn. : « collusion avec l’ennemi »).

Londres, 13 septembre 2025 © Vuk Valcic/ZUMA/SIPA

Interview offensante

La mosquée Masjid Khazra a publié un communiqué dans lequel elle présentait ses excuses pour les « opinions personnelles profondément offensantes et totalement incompatibles avec les valeurs de notre institution » de son imam. Quel crime de lèse-Allah Umayr Mulla avait-il commis pour que son employeur soit obligé de faire pénitence ? Il a accordé une interview au susnommé Tommy Robinson. Ce crime est inexcusable car, au lieu de critiquer l’intervieweur, il lui a donné des réponses iconoclastes, qui lui eussent peut-être valu la mort par lapidation, si sa paroisse avait été située à Gaza ou en Judée Samarie sous occupation palestinienne: « Je n’ai aucun problème avec Israël, tant que les gens vivent en paix, je pense que les deux parties devraient avoir leur propre pays. Les Palestiniens devraient avoir leur propre espace sûr, où ils peuvent vivre librement sans oppression ni injustice. Je pense que c’est la solution pour la paix au Moyen-Orient. »

Cette déclaration offensante a été mollifiée par la récitation de quelques versets anti-sataniques, expurgeant l’islam des principes et applications de la dhimmitude subie par les non musulmans en terre d’islam : tout était paradisiaque, « tant que [les non-musulmans] payaient la jizya, qui est une sorte de taxe de protection. Cela n’est pas différent des impôts que nous payons en Grande-Bretagne ». Certes, les dhimmis n’avaient pas le droit de construire des églises ou des synagogues, de prier à haute voix, de rire en public ou de marcher sur les trottoirs à l’égal des musulmans et ils subissaient d’innombrables persécutions quotidiennes actant de leur infériorité statutaire, mais « Si vous lisez l’histoire, il n’y avait ni oppression ni occupation. Ils payaient des impôts comme nous. Les musulmans, cependant, devaient payer la zakat, qui est une aumône. »

Ces figures imposées n’ont pas innocenté le coupable de la mécréance d’avoir reconnu le droit à l’existence d’Israël et, pire, d’avoir critiqué l’Autorité palestinienne, que l’opinion britanico-musulmane tient en sainteté : bien qu’il se réjouisse de la reconnaissance d’un État palestinien par son gouvernement, l’imam a déclaré s’opposer à la politique Pay-to-Slay, en vertu de laquelle l’Autorité palestinienne rémunère les meurtres de juifs. Il a également critiqué certaines actions commises au nom de l’islam par Daech et le Hamas. « Je peux affirmer sans crainte qu’ils ne sont pas du tout musulmans… Certains de leurs enseignements et de leurs actions vont à l’encontre des enseignements islamiques. » Ces blasphèmes contre les valeurs de la mosquée ont justifié les excuses faites aux croyants.

Le Newspeak (novlangue) comme vertu cardinale

« Notre institut est fondé sur un engagement en faveur de la diversité, de l’égalité et de l’inclusion. Nous apprécions et respectons toutes les composantes de la communauté musulmane et de la communauté au sens large que nous servons, et nous nous engageons à maintenir un environnement respectueux et solidaire pour les élèves, le personnel et les familles. »

A lire aussi, du même auteur: Fenêtre de tir pour mettre un terme au Hamas

Ce n’est pas à proprement parler un mensonge : l’employeur de Umayr Mulla respecte toutes les diversités de la communauté MUSULMANE (sauf celles que Mahomet réprouve, notamment l’homosexualité, mais celles-ci sont haram, donc irrespectables). Quant à la communauté au sens large QUE NOUS SERVONS… Le sens large n’a pas le même sens en anglais et en taquiya[1] dans le texte : les anglophones entendent « en général » alors que l’islam veut dire « la oumma », la communauté des croyants sur toute la planète.

Heureusement pour l’imam Mulla, en Angleterre, les représailles contre la pensée se limitent à la mort sociale et professionnelle. Il a été suspendu, pas pendu, et il s’est platement excusé, écrivant regretter « profondément le tort que mes propos ont causé aux communautés cachemirie et pakistanaise, aux Palestiniens, à mes employeurs, à ma famille, à mes amis et à toute personne qui avait été offensée directement ou indirectement. Mes références à certaines communautés étaient totalement inacceptables. Je les retire sans équivoque et demande sincèrement pardon à ceux que j’ai offensés. Je m’engage à tirer les leçons de cette expérience. » Conclusion : Allah est le plus grand et le client est roi.


[1] Le mot Taquiya, littéralement « prudence » et « crainte », désigne, au sein de l’islam, une pratique de précaution consistant, sous la contrainte, à dissimuler ou à nier sa foi afin d’éviter la persécution. Par extension, il est utilisé pour tous les mensonges qui permettent à l’islamisme de gagner du terrain au sein des nations.

Jacques Bainville lecteur

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Le journaliste, historien et académicien Jacques Bainville. DR.

Notre contributeur loue Jacques Bainville pour la finesse et la vivacité de ses critiques littéraires, lesquelles révèlent ses idées politiques, son goût classique, et un esprit mordant mais courtois. L’historien royaliste (1879-1936) rappelait utilement que ce sont les grandes œuvres qui forment les esprits, chose qu’on a peut-être tendance à oublier.


Il paraît que rien n’est plus personnel à un homme que ses lectures ; en découvrant celles de Bainville — dans un recueil d’articles publiés chaque mois pour la Revue universelle de 1929 à 1936, et préfacé par Charles Maurras —, il m’a semblé en apprendre infiniment plus sur ses idées, ses penchants, sa manière de voir le monde, que ne l’eût fait n’importe quelle biographie ; rarement n’ai-je ressenti à ce point l’impression de me trouver comme physiquement avec l’auteur d’un livre, de discuter avec lui, dans mon salon. Le royaliste, d’un style gracieux teinté çà et là d’esprit dix-septième, entremêle, à propos de ses lectures nombreuses et intelligentes, des réflexions subtiles et des parallèles historiques, des théories personnelles et des jugements qui en remontreraient à nos élites.

Critique, mais délicieusement courtois

Allègre, vif, jamais ennuyeux, Jacques Bainville nous entretient pêle-mêle du Lys dans la vallée et de Volupté, des vers d’Horace, de Don Quichotte et des Mémoires de Caulaincourt, des réflexions sur l’histoire de Paul Valéry, de Taine et de Paul Bourget, mais aussi de choses plus méconnues, comme par exemple les Études sur les poètes latins de la décadence de Désiré Nisard ; à propos de choses méconnues, qui se souvient que dans le concert unanime de louanges adressées à Goethe, un seul écrivain osa l’accabler, et avec quelle violence ! — Barbey d’Aurevilly ?… Bainville, lui, s’en souvient et le rappelle à ses lecteurs.

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Bien sûr, dans cet ouvrage non dénué de paradoxes (Bainville, que la psychologie des peuples agace décidément, se montre fort intéressé par l’ouvrage de Burckhardt sur Wallenstein et Richelieu, lequel oppose l’idéalisme allemand au rationalisme français), on trouvera l’auteur injuste avec certains poètes et personnages historiques (mais c’est tout le charme d’une lecture, qu’elle provoque l’indignation : cela aiguise l’esprit de contradiction) : ainsi de La Fayette, « le premier » des « personnages historiques et ennuyeux ». Talleyrand ne fut qu’un « diplomate surfait » (!). « Un style plat, une vulgarité essentielle découragent la lecture » de Bel-Ami ; Bainville, à propos de Flaubert, se demande « s’il n’avait donc pas d’oreille » ? Et, par une belle formule en croix, il exécute Benjamin Constant : « Ces deux choses avaient manqué à Benjamin Constant, la considération et le caractère. Celui-ci faisant défaut, il n’a pas eu celle-là ». Avec Leconte de Lisle, à qui il reproche d’avoir cru reconnaître l’art dans l’originalité (mais Villon ne l’était pas, original, ce qui ne l’empêcha pas d’exceller dans le don de poésie), il n’est pas tendre non plus : « Encore est-ce trop riche. On pense à Gustave Moreau qui, selon le cruel Degas, mettait des chaînes de montre aux dieux ». Même Victor Hugo n’est pas épargné ! « Quand on a cru que le passé valait mieux que le présent, on est prêt à transposer la même illusion dans l’avenir ». Et, poursuivant sur L’Année terrible, le critique lui reproche ses inepties, et en profite pour disserter magnifiquement sur Iéna et Sedan. Qu’il s’en prenne de manière récurrente à Julien Benda, c’est de bonne guerre en revanche, puis il ne le fait jamais qu’en des termes d’une courtoisie délicieuse. Un peu plus nuancé sur Jules Michelet, il remarque qu’on ne peut « ouvrir un [de ses] livre[s] sans y rencontrer, avec le style (même haché, névrosé, épileptique) d’un grand artiste de la prose, des perles dans le fumier des idées, des éclairs de génie au milieu des extravagances ».

Persiflages

Tout de même, quelques lignes directrices se dégagent du fatras des lectures de Bainville au cours de ces années trente, années de sa pleine maturité, et donnent à l’ensemble une espèce de colonne vertébrale : Renan, dont il parle et reparle sans cesse, la Révolution et l’Empire, période historique entre toutes et qui semble l’avoir intéressée au plus haut point (n’oublions pas qu’il fut l’auteur d’un Napoléon remarquable), la politique, l’ensemble servi sur fond d’anti-républicanisme et d’une pointe de germanophobie, époque oblige (« l’Allemand est plus près de la nature, ce qui ne constitue ni une garantie ni une recommandation »). Toujours est-il que l’on admirera la qualité des lectures de Bainville, et celle des enseignements qu’il en retient : sur Louis ⅩⅥ qui s’est trompé de politique en n’ayant pas voulu suivre l’exemple de Charles Ier (« raisonnement par analogie, mauvaise méthode ») ; sur les « mobiles des hommes » qui en disent plus long à l’historien que l’étude fastidieuse des sources, et permettent d’expliquer, par exemple, que c’est par un intérêt évident que les régicides, comme les acquéreurs de biens nationaux, ont vigoureusement soutenu Bonaparte qui les protégeait du retour des Bourbons tout en maintenant les acquis de la Révolution (« Sainte-Beuve dit quelque part, et fort bien, qu’aucun changement ne s’accomplit dans un État sans qu’on ait trouvé le point de rencontre des sentiments et des intérêts »), ce que Louis Madelin démontre à merveille dans ses ouvrages sur l’Empire et le Consulat. De Napoléon, il retient, fort judicieusement, qu’il a été un homme « si intelligent qu’il se rendait compte lui-même, et mieux que personne, de la part des circonstances dans le chef-d’œuvre de sa vie, au point que nul, peut-être, ne s’est abandonné comme lui aux événements ». Et je ne puis m’empêcher de citer ce persiflage contre les odieux révolutionnaires : « La seule chose qui rende supportable les récits de la Révolution, c’est qu’on peut dire à la plupart des imbéciles et des scélérats qui ont coopéré aux actes révolutionnaires : « Toi non plus tu n’en as pas pour longtemps. » L’Ecclésiaste se plaignait de l’immense impunité qui règne sur la terre. La Révolution est le seul exemple du châtiment qui suit la faute sans délai ». Sur la Révolution, d’ailleurs, Bainville ne recule pas devant les parallèles avec la politique actuelle, pour en mieux souligner les paradoxes. Ainsi, reprenant une page d’Alphonse Aulard sur Marat qui réclamait la dictature : « Cette remarque apprendra peut-être à quelques étourdis de tous les temps que la dictature n’est pas fatalement de droite, qu’elle est souvent de gauche […]. Fustel de Coulanges a montré que, dans la cité antique, le « tyran » était l’homme des pauvres contre les riches, un Lénine qui exerçait la dictature du prolétariat ». Page qui n’a pas pris une ride ! Autre commentaire dont on soulignera la justesse et l’actualité : « Mais la Révolution française, au bout de cent quarante ans, n’est-elle pas déjà méconnaissable ? Deux de ses éléments sont devenus réactionnaires: la liberté et le patriotisme. Le sentiment bourgeois d’une vie indépendante par la propriété ou par les professions « libérales » est entré en lutte avec le socialisme égalitaire. L’internationalisme a cessé d’être aristocratique et le nationalisme est passé à droite ».

A lire aussi: Sous les traits du général

Il ne faudrait pas s’arrêter qu’à cela ; le lecteur apprendra des lectures de Bainville quelques sages maximes dont on ferait bien de garder la mémoire. Par exemple, que « l’idée de saucer un poème en roman est une erreur prodigieuse ». Ou qu’il n’est jamais inutile pour un prosateur de versifier de temps en temps, comme un musicien fait ses gammes, pour « donner du rythme à la phrase ». Ou encore qu’en histoire, il ne reste de préférence que la calomnie : voir Tacite et Suétone. Il est une idée qui revient souvent sous la plume de Bainville, parce qu’il la relève systématiquement lorsque les auteurs l’évoquent, c’est qu’il existe une limite aux événements politiques, et qu’en la matière, on ne peut plus guère prétendre à l’invention : « C’est le sens profond de la définition de l’utopie par le poète espagnol que j’ai déjà cité : « L’utopie, — tout ce qui n’est pas arrivé dans l’histoire romaine. » »

Un avertissement

Enfin, je ne peux terminer cet article sans citer ces quelques commentaires à la La Bruyère, sur le charme de la conversation : « les vieux se répètent et les jeunes n’ont rien à dire. L’ennui est réciproque ». Ou sur la nécessité pour l’écrivain de travailler son art comme un artisan : « L’homme de lettres n’acquiert pas l’audience et le respect du public par le talent seul, par l’élévation ou l’originalité de ses vues, par son dire ni par son « faire », mais aussi par sa probité et par son travail, comme un artisan. […] Acquérir pour élaborer, c’est la devise de l’écrivain. Goethe n’avait-il pas toujours appris ? Et qu’est-ce que le plus beau génie tire de lui-même ? S’il a le malheur de se satisfaire de sa société, on en voit trop tôt le fond ». Il est un fléau que j’ai bien connu, moi qui fus professeur de français : on n’ose plus faire lire aux jeunes gens les plus beaux chefs-d’œuvre de nos lettres, de peur de les ennuyer ; à La Fontaine, à L’Illusion comique, à Molière ou Jules Verne, on préfère des livres pour enfants, quand ce ne sont pas des bandes dessinées. Mais « c’est avec des lectures « au-dessus de leur âge » que se forment les bons esprits », rappelle utilement Bainville, exemples à l’appui, — et à cet avertissement j’applaudis des deux mains.

Notez le nombre de références que contient cet article : ce n’est qu’une minuscule recension des lectures de Bainville ; j’en oublie je ne sais combien qu’il évoque de sa plume toujours parfaite, des traités du style (Georges Duhamel), des livres négligés, des romans fantastiques ; pensez donc ! — il s’essaye même à l’uchronie. « De ressemblances approfondies en contrastes inattendues, écrit Charles Maurras dans sa préface, ce Bainville inespéré se développe et se complète d’une page à l’autre. La matière est multiforme. Comme il est né Protée, elle l’aide à varier la métamorphose. » Et de conclure : « Le beau livre ! Et le grand esprit ! »

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Le roi du Maroc Mohamed VI. DR.

Le Conseil de sécurité de l’ONU vient d’approuver, à une large majorité (11 voix pour, 3 abstentions, Alger ne prenant pas part au vote), la résolution reconnaissant le plan marocain d’autonomie comme base privilégiée pour résoudre la question du Sahara occidental. Ce vote marque un succès diplomatique majeur pour Rabat et reconfigure l’équilibre politique autour de ce dossier qui empoisonne la région depuis un demi-siècle.


Ce vendredi à 15 h, heure de New York, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution en faveur du plan d’autonomie proposé par le Maroc pour le Sahara. Une décision historique, obtenue sans le veto russe ni chinois, et qui marque une avancée diplomatique majeure après plusieurs décennies de négociations intermittentes.

Un long différend territorial prend fin

En vert la ragion concernée. Wikipedia.

Le Sahara marocain, territoire colonisé sous administration espagnole jusqu’au début des années 1970, est au centre d’un différend territorial prolongé que la politique régionale de l’Algérie a accentué et prolongé. Cette terre souverainement marocaine incluse dans l’Empire chérifien a été le théâtre de luttes d’influence internationales qui ont causé du préjudice au royaume. Enfin, une sortie de crise semble se profiler. Depuis le retrait progressif de l’Espagne, le Maroc a proposé un cadre d’autonomie destiné à offrir aux populations locales une gestion interne de leurs affaires, à travers des institutions législatives, exécutives et judiciaires propres, tout en maintenant pour l’État marocain les compétences régaliennes, notamment la défense, la diplomatie et les affaires religieuses. Parallèlement, le Front Polisario, soutenu politiquement et logistiquement par l’Algérie, revendique le droit à l’autodétermination des Sahraouis.

L’ONU a multiplié les initiatives pour tenter de résoudre ce conflit. Dès 1991, la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) visait à préparer un référendum d’autodétermination, mais les divergences persistantes entre Rabat et le Polisario ont empêché la tenue de ce vote. Au fil des décennies, plusieurs résolutions du Conseil de sécurité ont réaffirmé la nécessité de négociations « sérieuses, réalistes et crédibles », sans qu’aucune solution définitive ne soit trouvée.

La résolution adoptée ce vendredi consacre une reconnaissance internationale accrue du plan d’autonomie marocain. Une victoire pour la patiente diplomatie marocaine qui a, au fil des années, gagné les soutiens francs et directs de l’Espagne, des États-Unis de Trump ou encore de la France en 2024. Les États-Unis ont joué un rôle central dans l’élaboration du texte, introduisant des aménagements essentiels : participation effective des populations locales, protection de leurs droits et engagement pour la transparence des institutions. 

Ces précautions diplomatiques ont été déterminantes pour obtenir le consensus nécessaire et éviter tout veto, notamment de la Russie et de la Chine, qui avaient parfois exprimé leurs réserves par le passé.

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La France, l’Arabie Saoudite et plusieurs États africains et européens ont également soutenu le texte, renforçant sa légitimité. Paris a souligné que la résolution représente une opportunité historique de consolider la stabilité régionale et de créer un cadre de négociation durable. 

Pour Rabat, cette décision constitue une reconnaissance diplomatique majeure, marquant un tournant dans la perception internationale du plan d’autonomie. Pour Alger et le Polisario, c’est un signal clair : le statu quo prolongé n’est plus soutenu par la communauté internationale et l’autonomie marocaine est désormais mise en avant comme cadre privilégié pour résoudre le différend.

Approche pragmatique

Le plan prévoit la création d’institutions locales élues par les Sahraouis, avec des compétences législatives, exécutives et judiciaires limitées aux affaires internes, tandis que le Maroc conserve les prérogatives stratégiques et internationales. Cette approche pragmatique, saluée par les observateurs comme un compromis réaliste, offre un cadre de négociation stable, susceptible de dépasser les blocages passés.

La résolution ouvre également la voie à un suivi rigoureux de la mise en œuvre. Les mécanismes de contrôle et d’évaluation prévus par le texte permettront de s’assurer que l’autonomie se déploie effectivement, tout en respectant les droits et la participation des populations locales. Ce suivi est crucial, car il constitue la garantie que la résolution ne restera pas lettre morte, comme cela a pu être le cas pour certaines initiatives précédentes.

Ce vote témoigne d’une diplomatie internationale en pleine maturation, capable d’articuler reconnaissance de la souveraineté marocaine et garanties pour la participation locale, dans un texte minutieusement calibré pour respecter les équilibres régionaux. Il reflète un pragmatisme rare, sur un dossier qui a longtemps été figé par des postures idéologiques et des blocages stratégiques. Cette avancée n’aurait pas été possible sans la diplomatie habile de Mohammed VI, dont l’impulsion personnelle a su accélérer le changement, mobiliser le soutien international et repositionner le Maroc comme acteur incontournable de la résolution du conflit. En définitive, cette adoption constitue un tournant historique : elle inscrit le plan d’autonomie marocain comme une solution crédible et réaliste, tout en ouvrant un cadre diplomatique propice à des négociations constructives. Les défis restent nombreux — assurer la participation effective des populations sahraouies, garantir la transparence des institutions locales, respecter pleinement les droits fondamentaux — mais la résolution offre désormais une perspective tangible de paix et de stabilité dans la région après des décennies d’incertitudes.

Le permis, c’est plus pour la vie!

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Louis de Funès et Bourvil dans "Le Corniaud" - 1964 © NANA PRODUCTIONS/SIPA

L’UE impose un permis renouvelable tous les 15 ans: les seniors et les ruraux sont sur le qui-vive…


Alors que Bruxelles harmonise, les campagnes s’inquiètent. Le 25 mars 2025, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen ont trouvé un accord sur la révision de la directive relative aux permis de conduire. À partir de 2026, la validité administrative du précieux sésame sera limitée à quinze ans pour les voitures et motos (ou dix ans lorsqu’il sert aussi de carte d’identité). Les permis poids lourds devront, eux, être renouvelés tous les cinq ans.

Cette réforme s’inscrit dans la stratégie européenne Vision Zero, qui vise à réduire de moitié les morts et blessés graves sur les routes d’ici 2030. Elle prévoit aussi un contrôle médical ou une auto-évaluation au moment du renouvellement, ainsi que l’introduction du permis numérique dans le futur portefeuille d’identité européen à l’horizon 2030.

Présentée comme un progrès administratif et sécuritaire, cette mesure suscite déjà de vives réserves chez les seniors et les habitants des zones rurales — ceux pour qui conduire n’est pas un plaisir, mais une nécessité.

Les seniors redoutent la stigmatisation

La directive laisse aux États membres la liberté de raccourcir la validité du permis pour les conducteurs de plus de 65 ans. Une clause qui, sur le papier, relève du bon sens. Dans les faits, elle alimente la crainte d’une discrimination silencieuse.

Pour beaucoup de seniors, la voiture reste un instrument d’autonomie. Elle permet d’aller chez le médecin, de rendre visite à sa famille, de maintenir une vie sociale. Or, l’idée d’un renouvellement plus fréquent, accompagné de contrôles médicaux, est vécue comme une suspicion institutionnalisée : le conducteur âgé n’est plus présumé capable, mais potentiellement dangereux.

Les visites médicales, même facultatives, sont déjà redoutées : coûts, démarches, peur de perdre le droit de conduire pour une fatigue passagère ou une vue imparfaite. Et dans un contexte de désertification des services publics, chaque nouvelle formalité ressemble à une embûche de plus sur la route de la vieillesse.

En milieu rural, une double peine

Dans les territoires ruraux, la dépendance à la voiture est absolue. On conduit non pour le plaisir, mais pour vivre : pour se rendre au travail, au marché, à l’hôpital. Là où le bus passe deux fois par jour et la gare la plus proche se trouve à trente kilomètres, le volant n’est pas un confort, c’est un droit vital.

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Mais ce droit pourrait bien se compliquer. Le renouvellement administratif tous les quinze ans risque de tourner au casse-tête :
– démarches en ligne difficiles, voire impossibles sans connexion ;
– guichets administratifs éloignés ;
– déplacements coûteux pour un simple papier ;
– sentiment d’un contrôle injustifié.

Pensée à Bruxelles comme une modernisation, la mesure sera perçue dans les campagnes comme une contrainte de plus, imposée d’en haut sans prise en compte du réel. L’Europe « connectée » parle digitalisation et sécurité ; la France rurale, elle, entend distance et paperasse.

La lecture conservatrice : liberté, subsidiarité et bon sens

Pour un lecteur de sensibilité conservatrice, cette réforme soulève des questions fondamentales : liberté individuelle, autonomie, subsidiarité et rapport entre sécurité et responsabilité.

1. La liberté individuelle.

Renouveler un permis n’a rien de choquant. Mais faire de ce renouvellement un rituel administratif obligatoire pour tous, sans motif particulier, revient à instaurer une forme de tutelle permanente. La sécurité ne saurait justifier une méfiance généralisée envers les citoyens.

2. Le principe de subsidiarité.

L’Union européenne fixe le cadre, mais les États devront adapter la mise en œuvre. C’est là que se jouera la différence entre un texte technocratique et une réforme supportable. Une Europe respectueuse de la diversité devrait reconnaître que la vie d’un automobiliste du Cantal n’a rien à voir avec celle d’un cadre bruxellois.

3. La voiture, symbole d’émancipation.

Pour les ruraux, la voiture n’est pas un gadget mais un instrument de liberté. Restreindre ou complexifier l’accès au permis revient, pour beaucoup, à restreindre la possibilité même de vivre dignement.

4. L’argument sécuritaire.

La sécurité routière est un objectif légitime. Mais lorsqu’elle devient le paravent de nouvelles contraintes, elle alimente le sentiment d’une société de la suspicion, où l’État protecteur se transforme en tuteur permanent.

5. Le tout-numérique imposé.

Le futur permis digital illustre cette fracture : progrès pour les urbains connectés, angoisse pour les aînés et les ruraux. Dépendance au smartphone, risques de piratage, disparition du document papier : la modernité devient parfois synonyme d’exclusion…

Adapter pour ne pas fracturer

Pour éviter que cette réforme ne se transforme en double peine, plusieurs garde-fous s’imposent selon moi : Pourquoi ne pas maintenir un permis papier aux côtés du format numérique pour ceux qui le désirent ? Ne pourrait-on pas permettre les démarches en mairie ou par guichet itinérant ? Comment garantir des contrôles médicaux proportionnés et non discriminatoires ?

Il faut impérativement adapter les modalités de cette nouvelle mesure selon les réalités locales. Car l’uniformité n’est pas l’unité. Une Europe équilibrée devrait protéger la liberté des individus autant que leur sécurité.

Une réforme symptomatique

L’affaire du permis de conduire révèle la tension grandissante entre technocratie européenne et réalité du terrain. Quand Bruxelles parle sécurité et modernité, nos campagnes entendent bien souvent contrainte et méfiance. Pour les habitants des « territoires oubliés », pour les aînés attachés à leur indépendance, la voiture demeure le dernier espace de liberté concrète. Et chaque réforme qui la rend plus conditionnelle — même sous couvert de progrès — est vécue comme une atteinte à cette liberté. La question n’est donc pas de savoir si le permis doit être renouvelé tous les quinze ans, mais si nous aurons encore le droit de conduire librement.

Car lorsque la route devient un couloir administratif, c’est la société tout entière qui a le sentiment de perdre le sens de la responsabilité et de la liberté.

🎙️ Podcast: Élection à New York – grand retour du progressisme en Amérique?

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Le candidat démocrate à la mairie de New York salue les électeurs du Upper East Side, New York City, le 27 octobre 2025. Steve Sanchez/Sipa USA/SIPA

Avec Gerald Olivier et Jeremy Stubbs.


Mardi 4 novembre auront lieu les élections pour la mairie de New York. Le candidat favori est le Démocrate Zohran Mamdani. Gerald Olivier, grand expert de la vie politique outre-Atlantique et des relations internationales, nous explique qui est ce jeune progressiste qui, pour le moment, semble focaliser tous les espoirs d’un Parti démocrate en désarroi depuis la défaite sans appel infligée à Kamala Harris par Donald Trump il y a un an.

Si le courant véritablement socialiste que représente Mamdani arrive à prendre le pouvoir au sein de son Parti, le résultat risque d’être, non une dérive vers l’extrême-gauche, mais une scission qui coupe en deux cette formation politique fondée en 1828.

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Pendant tout ce temps, le grand adversaire du progressisme, Donald Trump, faisait une tournée triomphale en Asie, visitant à tour de rôle la Malaisie, le Japon et la Corée du Sud où il a rencontré brièvement Xi Jinping. Son succès montre combien avaient tort tous ces commentateurs, surtout en France, qui ont répété inlassablement – et qui continuent de le faire – que la politique étrangère du président est résolument isolationniste. Le nombre de pays qui aujourd’hui affichent leur amitié avec les États-Unis ou qui se montrent prêts à conclure un accord commercial avec Trump est la preuve que la vision de ce dernier est America first (l’Amérique d’abord) plutôt que America alone (l’Amérique seule).

Rude bataille au pays du consensus

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Rob Jetten à la Haye, hier, Pays-Bas © Robin Utrecht/SIPA

Pays-Bas : droite nationale et libéraux de gauche sont au coude à coude aux élections législatives anticipées. Analyse.



Suspense électoral aux Pays-Bas, où la droite radicale de Geert Wilders se retrouve au coude-à-coude avec les libéraux progressistes du D66. Mercredi soir, le premier sondage sortie des urnes donnait l’avantage aux libéraux, menés par Rob Jetten, avec 27 sièges contre 25 pour le Parti de la liberté (PVV) de M. Wilders. Mais, à l’aube jeudi, renversement de situation : après le dépouillement de la quasi-totalité des bulletins, les deux rivaux se retrouvaient soudain à égalité, chacun crédité de 26 sièges.

C’est la lutte finale

Celui qui aura obtenu le plus de voix pourra le premier tenter de former une coalition gouvernementale, comme le veut la tradition. Le duel final se joue donc à quelques milliers de voix. Celles des Néerlandais de l’étranger, jugées cruciales, ne seront peut-être connues que lundi prochain.

Mais, il est peu probable que M. Wilders, dont le parti perd onze sièges, soit invité à former un gouvernement. M. Jetten, qui en gagne 17, semble mieux placé. Après son triomphe électoral de 2023, quand le PVV obtint 37 des 150 sièges au Parlement, Wilders mit sur pied une coalition quadripartite qu’il dynamita l’été dernier. Depuis, aucun parti sérieux ne veut s’allier à lui, comme nous l’expliquions hier.  

La liesse de Rob Jetten aura finalement été un peu prématurée. Mercredi soir, devant des partisans euphoriques, il s’était réjoui : « Des millions de Néerlandais ont tourné la page de tant d’années de négativité et de haine. » Sans le citer, le chef de file du D66, 38 ans, visait clairement Geert Wilders, qu’il accuse de polluer le climat politique du pays depuis près de vingt ans.

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Selon les analystes, Geert Wilders a vu une partie de son électorat se tourner vers un autre parti de la droite dure, JA21, jugé plus disposé à collaborer avec d’éventuels partenaires sans les humilier. À l’inverse, M. Wilders continue d’adopter une ligne inflexible, tout en conservant un noyau dur de partisans farouchement fidèles. « Nous espérions un autre résultat, mais nous sommes restés fidèles à nous-mêmes », a-t-il déclaré, la mine renfrognée, avant que les résultats ne commencent à basculer en sa faveur.

Dans d’autres partis, de telles pertes auraient eu des conséquences pour le dirigeant. Mais, le PVV n’a pas de membres, M. Wilders, âgé de 62 ans, est seul maître à bord et les rarissimes velléités de rébellion sont immédiatement sanctionnées.

Rob Jetten, qui a du sang indonésien dans les veines, comme M. Wilders, a convaincu bien des électeurs par son approche optimiste et volontaire. C’est un pro-européen convaincu, qui fut brièvement ministre du Climat et de l’Energie, vice Premier ministre et fervent défenseur des droits LGBT. Il est fiancé avec un jeune homme argentin, joueur de hockey sur gazon dans l’équipe nationale de son pays et d’une équipe de La Haye. M. Jetten envisage de fonder une famille avec son amoureux et d’avoir des enfants, mais ces projets sont encore au stade d’étude.

Les bobos aux portes du pouvoir ?

Son parti D(émocraten)66, d’après l’année de sa fondation au siècle dernier, ne s’est que très récemment converti à l’idée qu’il était temps de limiter le nombre de demandeurs d’asile et des migrants. Le sujet intéresse peu ses électeurs, préoccupés surtout par le changement climatique, l’environnement, la pénurie de logements et l’état de l’enseignement national où ils sont nombreux à travailler. Sous M. Jetten, D66 tente de se défaire de son image bobo et soixante-huitarde. Il est vrai qu’on voit ses affiches électorales surtout dans les beaux quartiers, alors que celles du PVV prédominent dans les quartiers populaires. Durant sa campagne, Rob Jetten, issu de la classe moyenne, avait cherché à se rapprocher du « peuple » en imposant davantage de drapeaux rouge-blanc-bleu lors de ses meetings. « Notre drapeau ne doit plus être l’apanage de l’extrême droite », proclamait-il. Message reçu : la soirée électorale, hier, en était couverte, et l’atmosphère est restée festive tant que le parti apparaissait en tête.

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Aux Pays-Bas, la droite raille souvent les « juges D66 », un refrain comparable aux critiques françaises contre la supposée « République des juges » : les magistrats seraient, selon elle, trop indulgents envers les criminels et trop alignés sur les idées progressistes.

M. Jetten lorgne vers le centre-gauche, dont le principal parti, GroenLinks/PvdA, perd cinq sièges et en conserve vingt. Grande déception pour son dirigeant Frans Timmermans, qui a démissionné. Les chrétiens-démocrates, qui ont fait de bons scores, et les libéraux conservateurs, qui enregistrent une légère perte, sont également prêts à gouverner. Tous disent fuir M. Wilders, qui termine quand même ex-aequo avec l’homme qu’il estime être un immigrationniste pur sucre. Wilders assure qu’il veut et peut gouverner le pays. Y croit-il vraiment, après sa demi-victoire quelque peu tristounette et solitaire?

Silence dans les rangs!

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Le Secrétaire à la Défense des États-Unis Pete Hegseth avec Donald Trump à la Maison-Blanche, Washington, 25 septembre 2025 © Evan Vucci/AP/SIPA

Le 14 octobre, à Washington, plusieurs médias ont refusé de signer les nouvelles directives proposées par le Pentagone. Celles-ci prévoyaient notamment que les journalistes accrédités ne puissent plus publier certaines informations sans l’autorisation explicite du ministère de la Défense…


Le département de la Défense des États-Unis vient d’édicter de nouvelles règles pour les correspondants de presse qui ont provoqué un mouvement de révolte dans tous les médias, même les plus MAGA. 

Désormais, selon un nouveau document de 21 pages (à la différence de l’ancien règlement qui tenait en une seule page), un journaliste ne pourra divulguer même des informations non-confidentielles sans avoir la permission des autorités, sous peine de perdre son accréditation. Une autre règle stipule qu’« il y a une différence entre le fait de poser des questions licites à un responsable du département, et le fait de pousser un responsable à livrer des informations qui dépassent les limites de la discrétion nécessaire ». Les porte-paroles militaires seraient-ils donc si faciles à désarmer ? De manière générale, c’est tout comme si les journalistes ne devaient désormais diffuser que l’information que le département de la Défense a décidé de diffuser. C’est un véritable système de censure qui fait son apparition. À partir de maintenant, les journalistes auront besoin d’escortes pour circuler entre les différentes zones du Pentagone. Certes, en France, les journalistes accrédités défense ne se promènent pas non plus sans escorte dans les allées de l’Hexagone Balard qui abrite l’État-major des Forces armées. Cependant, l’idée de policer les écrits d’informations non-confidentielles n’existe heureusement pas en France.

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La raison de cette annonce outre-Atlantique n’est pas très claire. Dans le domaine de la défense, les journalistes sont normalement assez dociles. Rares sont ceux accrédités à être en bisbilles avec le bureau du porte-parole du département, par exemple. Le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, a motivé la décision de l’exécutif américain en se référant à des situations impliquant la « divulgation non autorisée d’informations classifiées, susceptible de mettre en danger la vie des militaires américains ». Or une telle logique peut s’appliquer dans un nombre infini de cas. Faut-il que la presse se focalise uniquement sur des déclarations comme celle que le secrétaire à la Défense a faite en septembre, devant des centaines de hauts responsables militaires, en dénonçant publiquement des troupes et des généraux en surpoids ? Fini les gros, bienvenue les guerriers.

La chose étonnante, voire réconfortante, dans cet énième bras-de-fer entre la presse et l’administration Trump vient de la presse républicaine, conservatrice, populiste. Fox News et Newsmax, deux chaînes qui soutiennent fortement Donald Trump et son mouvement, sont autant indignés par cette nouvelle réglementation que les autres médias. C’est ainsi que, mardi 14 octobre, leurs correspondants étaient parmi les centaines de reporters qui ont pris leurs affaires et ont évacué les locaux, en formant un cortège qui ressemblait à une évacuation. Le directeur du très pro-trumpien Newsmax a même expliqué à la BBC que la liberté de la presse était distincte de la ligne éditoriale d’un journal, et qu’il était totalement solidaire des médias représentant une ligne anti-MAGA. 

Le département à la Défense a répliqué à ce mouvement de protestation sur un ton moqueur : « Vous ne nous manquerez pas. Une nouvelle génération de reporters de défense arrivera. Des jours meilleurs sont devant nous ». Des jours meilleurs pour les gouvernants, faudrait-il comprendre… Mais si les vrais correspondants sont remplacés par des influenceurs en ligne, d’où proviendront les informations critiques et fiables qui ont fait la force de la presse américaine ?

Pour Boualem Sansal

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Boualem Sansal © Hannah Assouline

Ni la France, ni l’Europe, ni le CICR, ni l’ONU n’agissent, se désole Elisabeth Lévy dans sa chronique matinale sur Sud Radio. Nous vous proposons de l’écouter.


Cela fait 349 jours qu’un écrivain français dont le seul crime est de penser librement est détenu en Algérie – en réalité retenu en otage. À l’isolement. Se dit-il que la France l’a abandonné ?

Très peu d’informations (et conditionnelles) nous parviennent. Hier, nouvelles alarmantes de son comité de soutien. L’écrivain de 81 ans a un cancer. Il vit dans des conditions très dures. Il aurait demandé à être hospitalisé.

La gauche indifférente

L’indifférence des pétitionnaires professionnels et de la gauche en général est stupéfiante. Les milieux culturels sont aux abonnés absents. L’Académie française a refusé de l’élire (l’Académie royale de Belgique, elle, l’a fait). Les artistes qui dénoncent un génocide en boucle ne se soucient pas plus de Sansal que des supposés collabos palestiniens exécutés publiquement par le Hamas. Si Sansal était dans une prison israélienne, ils seraient déchaînés. Mais comme son crime est de dénoncer l’islam politique là-bas et ici, on vous dit qu’il est d’extrême droite. D’ailleurs, le Rassemblement national le défend.

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Est-ce qu’au moins la France officielle agit véritablement ? Ni la France, ni l’Europe, ni le CICR, ni l’ONU. On rêve d’une opération des forces spéciales à l’israélienne ou d’un coup d’éclat à la Trump. Mais non : nous devons nous contenter de l’Elysée qui prétend depuis des mois que c’est une priorité. Nous ne cessons de nous humilier. Il n’y a eu aucune rétorsion ou presque. Jean-Noël Barrot est allé baiser toutes les babouches qu’il pouvait. Pour en conclure que les relations étaient désormais apaisées, tu parles. Un signe parmi d’autres : le record des visas étudiants délivrés aux Algériens cette années. Macron adjure tout le monde de ne pas faire trop de bruit. Il promet que le dossier avance avec des airs entendus. Mais ni Boualem Sansal, ni Christophe Gleizes, journaliste retenu pour raisons politiques, ne l’ont convaincu de taper du poing sur la table. Notre diplomatie est en réalité dictée par la peur et par la culpabilité coloniale.

La France ne fait pas peur

Hier soir, la présidente du comité de soutien Noëlle Lenoir affichait un optimisme mesuré et diplomatique. Elle espère un déblocage lors du prochain voyage de Laurent Nuñez. Il est plus réaliste de s’en remettre au Pape qui va faire également un voyage en Algérie sur les traces d’Augustin.

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Hier, je voulais être Allemande. Et aujourd’hui, j’aimerais être Américaine. Un pays qu’on respecte aurait déjà obtenu le retour de nos deux compatriotes Sansal et Gleizes. Par la diplomatie ou par la force. Avec des rétorsions disproportionnées. Genre confiscations des biens, expulsions, arrêt de tout visa… Ça aurait duré deux jours. Mais non, vous comprenez on ne peut pas. Nous on a des bonnes manières. Ce n’est pas la diplomatie de la canonnière mais la diplomatie de la courbette.

Retrouvez Elisabeth dans la matinale de Sud Radio.

Trump sort sa pioche et démolit tout… sauf les fake news

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Washington, 23 octobre 2025 © Andrew Leyden/ZUMA/SIPA

Aile Est de la Maison Blanche: et Trump conduit le bal…


Si vous ne suivez l’information que d’un œil et d’une oreille, vous avez peut-être vu et entendu ces derniers jours une nouvelle proprement effrayante concernant les Etats-Unis: « Donald Trump est en train de détruire la Maison Blanche » !

Ah, quel boulet !

Jay Scarborough le présentateur matinal de MSNBC a dénoncé une « destruction grotesque »! Les présentatrices de l’émission « The View » sur ABC (une table ronde quotidienne exclusivement féminine) ont hurlé de colère : « Il n’a pas le droit de la détruire ce n’est pas sa maison, c’est la maison du peuple ». Hillary Clinton, une autre femme féministe, a dit exactement la même chose sur X « ce n’est pas sa maison, c’est la vôtre et il est en train de la détruire. » Et le très sérieux New York Times s’est lamenté que Trump ait utilisé un « boulet de démolition contre la Maison Blanche».

Qu’on se rassure, la Maison Blanche est toujours debout ! Ces informations étaient erronées. C’étaient encore des fausses nouvelles (« fake news ») vendues par la clique de journalistes américains qui détestent Trump et détournent les faits – ou racontent carrément n’importe quoi – depuis dix ans, avec l’espoir de monter l’opinion publique contre lui. Espoir totalement vain, cela dit au passage. Tout au plus, ces journalistes ont-ils réussi à tuer leur propre crédibilité et à provoquer une crise de confiance sans précédent envers les médias « officiels »…

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Trump n’est pas en train de détruire la Maison Blanche et n’a aucune intention de le faire. Au contraire il vient d’y engager un projet de rénovation majeur : la construction d’une grande salle de bal (8 000 m²) en place et lieu de l’actuelle « aile est ». Les travaux d’excavation ont commencé avec inévitablement la démolition d’une partie de la structure actuelle… D’où les élucubrations de la gauche américaine. Imaginez qu’en 1985,  Le Monde ait accusé François Mitterrand de « détruire le Louvre » lorsque les travaux de la future pyramide ont commencé dans la Cour Carrée !

Au-delà de la fausse polémique, le projet mérite quelques éclaircissements, ne serait-ce que pour rappeler que de nombreux présidents avant Trump ont laissé leur marque sur cette demeure, et ont en général été vivement critiqués par leurs contemporains pour cela.

Trop étroit pour Théodore Roosevelt

La Maison Blanche est le lieu de vie et de travail du président des Etats-Unis. Elle sert aux réceptions protocolaires. Elle est aussi ouverte au public et reçoit un demi-million de visiteurs chaque année. Elle fut construite à partir de 1792 sur un site choisi par le président Washington. C’est une demeure néo-classique de style géorgien, avec un fronton palladien et une rotonde à l’arrière, due à l’architecte James Hoban, également maître d’œuvre du Capitole, le bâtiment qui abrite le Congrès.

Le fronton et la rotonde sont toujours là, ornant respectivement les façades nord et sud, mais le bâtiment n’est plus l’original. Car cette première Maison Blanche fut brulée par les Anglais lors de la prise de Washington durant la guerre de 1812-1814 et le bâtiment reconstruit ensuite à l’identique.

Aujourd’hui ce que les médias appellent « la Maison Blanche » est en fait un complexe de plusieurs bâtiments qui abritent les principaux services de l’appareil exécutif américain. Le bâtiment central est appelé en anglais la « executive mansion » ou « executive residence ». C’est cette bâtisse qui abrite les appartements présidentiels – au premier étage – et les principaux bureaux de l’exécutif – au rez-de-chaussée et dans les sous-sols.

La bâtisse avec ses deux étages extérieurs et ses onze fenêtres a conservé un même aspect extérieur depuis sa reconstruction en 1817. Chaque président a effectué des aménagements mineurs et changé le mobilier, sans toucher à l’édifice.

En 1802, Thomas Jefferson fit ajouter des colonnades de chaque côté, longues allées couvertes permettant de se rendre dans des bureaux à l’extérieur, prémices des futures « aile est » et « aile ouest ».  Andrew Jackson agrémenta le fronton d’un portique majestueux et fit installer la plomberie et le chauffage en 1830. James Polk ajouta l’éclairage au gaz en 1848.  Abraham Lincoln fit construire une verrière sur le toit, malgré la guerre de Sécession en 1862. Il fit aussi installer un poste de télégraphe. En 1878 Rutherford B. Hayes fit installer le téléphone, et en 1891 Benjamin Harrison, l’électricité.

En 1882 le président Chester Arthur effectua une grande rénovation intérieure en faisant appel à l’artiste Louis Tiffany, qui fit entrer l’art nouveau et des vitraux colorés dans la demeure présidentielle.

Mais la première modification majeure du bâtiment fut l’œuvre de Théodore Roosevelt à partir de 1902. A l’aube du 20e siècle le bâtiment que Thomas Jefferson avait appelé une « agréable résidence de campagne » était devenu trop étroit pour une administration qui n’avait cessé d’étendre ses compétences et le nombre de ses employés.

Roosevelt fit donc aménager « l’aile ouest » pour y loger une partie de son administration. La presse de l’époque fut unanime pour condamner ces travaux. Roosevelt avait privé le bâtiment de « sa valeur historique », dit-elle. Sans parler de la serre qu’il fallut détruire et des plantes qu’il fallut déplacer…

L’aile ouest devint néanmoins le nouveau centre névralgique de la présidence américaine. Le président Taft y fit même aménager son bureau, de forme ovale, en 1909. Franklin Roosevelt, élu en 1932, fit déplacer le bureau ovale à l’emplacement qu’il occupe toujours aujourd’hui, le coin sud-est de l’aile, ouvrant sur la pelouse sud.

Fantasmes

En 1942,  le même  Franklin Roosevelt fit construire « l’aile est ». Toujours pour accommoder une administration de plus en plus pléthorique. Temps de guerre oblige, un bunker fut aménagé dans le sous-sol. Et sécurité nationale oblige, sa construction fut gardée secrète. Ce qui alimenta tous les fantasmes, ainsi que la colère du Congrès, vexé de ne pas être informé.

Certains des nouveaux bureaux de l’aile est furent aussi destinés à la Première Dame et son entourage. Une première dans l’histoire américaine.

Ces aménagements, ainsi qu’un aménagement des combles dans les années 1920 finirent pas imposer un stress excessif à la structure originale alors âgée de 130 ans. Les planchers du 1er étage étaient particulièrement fragiles. Le pied du piano de Madame Truman finit par passer à travers et une baignoire du premier faillit se retrouver au rez-de-chaussée. La Maison Blanche tout entière menaçait de s’écrouler. « Elle ne tient debout que par la force de l’habitude » dit un ingénieur venu inspecter son état.

Une rénovation totale fut alors ordonnée et le président Harry Truman et son épouse durent emménager dans la Blair House, habituellement réservées aux hôtes étrangers, le temps des travaux. Seule la carcasse extérieure fut conservée. Comme un décor de cinéma. Pour ne pas effrayer les Américains. La Maison Blanche fut ramenée à l’état de coquille vide. L’intérieur de la demeure fut entièrement rasé puis reconstruit à l’identique. Les travaux durèrent trois ans, jusqu’en 1951.

A l’occasion, la vieille ossature de bois fut renforcée par une structure en acier et la climatisation installée, ce qui, vue la chaleur humide et étouffante de Washington l’été, a changé la vie des employés de la Maison Blanche.

En 1960 Jacqueline Kennedy, supervisa une nouvelle rénovation intérieure, avec l’aide d’un designer français, Stéphane Boudin. Elle fut la première à piocher dans l’immense stock de mobiliers et œuvres d’art accumulés par les différents occupants au cours des décennies passées et remisés dans des entrepôts de stockage. Une fois les travaux terminés, elle invita les caméras de télévision et fit éditer un guide de la Maison Blanche dont la vente permit de rembourser une partie du coût des travaux.

Jackie Kennedy fit également planter une roseraie dans la pelouse du sud, le « rose garden ». Elle existe toujours et tient lieu de décor à certaines cérémonies et conférences de presse pendant les beaux jours. Jackie Kennedy fut la seule personne à être jamais félicitée par les médias pour ses transformations apportées à la Maison Blanche. Peut-être parce qu’elle n’était que la première dame, et non pas le président, et parce qu’elle personnifiait l’élégance et le bon goût. Son mari, le président John Kennedy, aimait nager dans la piscine aménagée dans le sous-sol. Elle datait de 1933 et avait été construite pour le président Roosevelt qui souffrait de la polio et l’utilisait à des fins thérapeutiques. Kennedy en faisait, pour sa part, un usage strictement récréatif, invitant dit-on les jeunes secrétaires de la Maison Blanche à le rejoindre dans le plus simple appareil…

Nixon fit couvrir la piscine et installa à la place la salle de presse. Toujours utilisée aujourd’hui. L’essor de la télévision et de l’information en images et en direct avaient généré une demande pour un espace dédié aux « briefings » où l’on puisse installer des caméras et une salle de presse.

Toutefois, la Maison Blanche dispose toujours d’une piscine, mais en extérieur. Elle fut construite sous Gerald Ford, à partir de donations privées et est réservée à l’usage de la famille et de leurs invités. Ford était un avide nageur. Nixon préférait jouer au bowling et en fit bâtir un au sous-sol. Barack Obama préférait le basket-ball et fit recouvrir le court de tennis pour y installer des paniers de basket…

Bill et Hillary Clinton firent à nouveau changer la décoration intérieure. Avec l’aide d’une décoratrice de l’Arkansas, l’Etat de Bill Clinton. Bill prit quelques libertés avec les lieux, faisant de l’alcôve menant au bureau ovale le lieu de ses ébats sexuels avec une jeune stagiaire, Monica Lewinski. En quittant les lieux, le couple Clinton emporta la vaisselle et l’argenterie. Ils furent rattrapés par la patrouille et durent tout restituer, ces biens étant ceux du peuple américain, et non des occupants de la Maison Blanche…

En 2003 George W. Bush, bien qu’originaire de l’Etat pétrolier du Texas, fit installer des panneaux solaires pour chauffer l’eau de la piscine extérieure et alimenter certains ateliers techniques. Dix ans plus tard Barack Obama installera des panneaux solaires directement sur le toit de la résidence principale, pour alimenter les appartements présidentiels. Quant à Michelle Obama, elle plantera un potager « bio » et installera des ruches pour produire un miel de la Maison Blanche.

Jusqu’à récemment, le seul apport de Donald Trump était des mâts de trente mètres de haut de part et d’autre du bâtiment principal pour hisser les couleurs américaines plus haut que jamais.

Scandale !

Et puis il y eut la salle de bal ! Le lieu de tous les enjeux. La pièce à l’origine du scandale. Contrairement à ce que beaucoup de médias ont affirmé ce projet n’est ni soudain, ni  nouveau. Il trotte dans la tête de Donald Trump depuis des années. Régulièrement invité à des diners à la Maison Blanche, Trump avait constaté que la Maison Blanche ne dispose pas d’un salon digne de la puissance et de la richesse des Etats-Unis. La « East Room » ne peut accueillir que deux cents personnes. Pour toute capacité supérieure, il faut dresser des tentes sur la pelouse, monter un faux parquet et installer des toilettes portatives ! Indigne de la première puissance mondiale.

En  2010, le citoyen Trump avait proposé à David Axelrod, principal conseiller de Barack Obama, de leur construire une salle de bal pour cent millions de dollars. Proposition non retenue. Lors de son premier mandat, le temps avait manqué pour lancer le projet. Cette fois et parce qu’il sait qu’il ne fera pas de « troisième mandat » (même s’il aime provoquer les démocrates sur cette question), Trump a décidé d’agir et d’agir vite.

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L’annonce officielle du projet remonte au 31 juillet dernier ! Il s’agissait d’une salle de bal venant se greffer sur l’aile-est, sans nécessiter sa démolition totale. La dimension annoncée était de 8 000 m². De quoi accommoder jusqu’à mille invités. Clark Construction, firme immobilière très reconnue de Washington, fut retenue pour le projet, contre un budget de 200 millions de dollars. En septembre ce budget fut révisé à 250 millions de dollars. Il apparut aussi que l’aile est devrait être entièrement détruite. Avec son propre argent et le soutien de donateurs privés et pour financer le projet, Donald Trump donna l’ordre de préparer le terrain, c’est-à-dire de démolir l’aile est.

En dépit de cris d’orfraies de la gauche américaine, Trump n’a rien fait d’illégal. La preuve, aucune action judiciaire n’a été engagée contre lui. Il existe bien une loi aux Etats-Unis sur la gestion des monuments historiques, mais la Maison Blanche et le Capitole ne sont pas concernés. Il existe aussi la National Historical Planning Commission (NCPC), chargée de superviser les projets fédéraux, mais ses compétences se limitent à la « construction » du nouveau bâtiment, pas à la destruction de l’ancien ! Les fonds finançant le projet étant privés, Trump n’avait besoin d’aucune autorisation du Congrès et n’a donc pas consulté les législateurs… D’autant que le gouvernement est actuellement « fermé » pour cause d’impasse budgétaire.

DR

Moralité, ayant les mains libres Trump en a profité pour agir vite. Comme à son habitude. L’aile est n’est plus et le retour en arrière n’est pas possible, sauf à la reconstruire à l’identique ce qui serait une perte totale d’argent et de temps. Trump aurait pu présenter les plans de la future salle de bal à la NCPC, mais il n’en avait pas l’obligation. Ces plans peuvent donc encore évoluer et avec eux le budget du projet. Pour l’heure, Trump a levé pas moins de 350 millions de dollars. Plus que nécessaire. Et les plus grandes entreprises américaines sont derrière lui, de Google à Microsoft en passant par Apple et Amazon ou Lockheed Martin et d’autres.

Moralité, la salle de bal verra le jour. La question est de savoir si les travaux seront finis pour fin 2028 comme le projet le prévoit. Sinon, Trump pourrait bien être tenté de rester au-delà de son mandat pour être toujours président au moment de l’inauguration de « sa » salle de bal… Que les anti-Trump se rassurent, la salle ne sera pas nommée la « salle de bal Donald J. Trump». Donald Trump a lui-même modestement suggéré « la salle de bal présidentielle ».


Ce texte a été publié sur le blog de Gerald Olivier.

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