Donald Trump a réussi l’impensable en imposant un accord de paix entre Israël et le Hamas, signé à Charm el-Cheikh le 13 octobre 2025, après deux ans de guerre meurtrière. Misant sur sa doctrine de la « paix par la force », il a isolé le Hamas, affaibli l’Iran et rallié les monarchies arabes à un plan en vingt points censé tourner la page de sept décennies de conflit au Proche-Orient. Gerald Olivier raconte et analyse la genèse de cet important accord. Long récit.
« Bienheureux les faiseurs de Paix !» Le président Trump aime dire que s’il s’efforce d’imposer la paix là où la guerre fait loi depuis des années, voire des décennies, c’est pour garantir sa future place au paradis… Au vu de l’accord de paix en vingt points de Charm el-Cheikh, l’affaire est bien engagée ! Prix Nobel ou pas, paix durable ou pas, Donald Trump a fait taire les armes à Gaza et imposé une pacification de l’ensemble du Proche-Orient. Son plan en vingt points a été accepté par les deux principaux belligérants – Israël et le Hamas – puis officiellement signé à Charm el-Cheikh, en Egypte, le 13 octobre, en présence de dirigeants de la région et du monde.
2017–2021, retour sur la genèse d’un accord de paix qui va, peut-être, changer le monde. Les fondations
Le Proche-Orient n’a pas connu une telle perspective de paix, depuis les accords d’Oslo de 1993 et peut-être beaucoup plus longtemps. Trump dit trois mille ans ! C’est sans doute excessif, mais le président américain a toujours vu grand, très grand. Son accomplissement reste monumental. Même s’il est encore inachevé. Le Hamas n’est pas encore désarmé. Ses combattants n’ont pas abandonné l’uniforme pour rentrer chez eux. Ses dirigeants n’ont pas renoncé à leur objectif d’éliminer l’Etat d’Israël dont ils ne reconnaissent toujours pas la légitimité. Gaza n’est pas « déradicalisé » (point numéro un du plan), le « conseil de la paix » (Board of peace) devant gérer sa reconstruction n’est pas installé (point numéro neuf), et la force internationale devant garantir la sécurité n’est même pas constituée (point numéro quinze). Il reste donc de nombreuses étapes à accomplir pour consolider la paix. Rien n’est garanti.
Par le passé, de nombreux cessez-le-feu ont été signés pour être violés après quelques jours ou quelques semaines, et les hostilités reprenaient de plus belle. Pourtant, un air de paix et de liesse inhabituel flottait sur le Proche-Orient, le lundi 13 octobre 2025. Les gens dansaient et chantaient en Israël et à Gaza. Jusqu’à présent on était habitués à ce que lorsque l’un danse, l’autre pleure. Pas cette fois. La réjouissance était dans toutes les têtes et dans les deux camps et l’espoir d’une ère nouvelle semblait dans tous les cœurs. Comment cela a-t-il été possible ? Comment Donald Trump a-t-il donc réussi à imposer la paix, là où tout le monde disait que c’était impossible ? Pourquoi a-t-il réussi alors que tous ses prédécesseurs depuis 1948, avaient échoué ? Principalement par sa force de persuasion. Après tout, conclure des accords c’est sa spécialité. Il en avait fait un livre à succès avant d’entrer en politique, The art of the Deal. Ensuite en bousculant les conventions et le consensus. Trump a inversé les termes de l’équation au Proche-Orient en repoussant délibérément la question d’un Etat palestinien à plus tard. L’expression « solution à deux Etats » n’apparait même pas dans le texte du plan de paix. Enfin parce qu’il a mis la force des Etats-Unis derrière ses mots. Le plan en vingt points appelé « Trump Declaration for Enduring Peace and Prosperity » (Déclaration Trump pour une paix et une prospérité durables) est l’illustration la plus accomplie de la doctrine Trump de « peace through strength », de la paix par la force.
Concrètement, Donald Trump a obtenu un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas qui met fin à deux ans d’un affrontement sans merci. Il a obtenu la libération de tous les otages encore vivants détenus depuis le 7 octobre et la restitution du corps de tous ceux qui sont morts en captivité (seuls sept corps ont pour l’instant été restitués, les autres étant introuvables, selon le Hamas…).
En échange les Israéliens ont libéré 1700 prisonniers palestiniens et 250 terroristes condamnées à perpétuité en Israël. C’est ce qu’on a appelé la phase 1 du plan de paix. La phase 2, officiellement en cours, doit voir le désarmement du Hamas puis sa dissolution, et l’interdiction de sa participation à la gestion future de Gaza ou toute autre entité palestinienne. L’administration de la bande de Gaza sera confiée à une autorité internationale technocratique et sa reconstruction sera financée par les pays arabes et les monarchies du Golfe. La sécurité sera assurée par une « Force d’intervention internationale », sans la participation de soldats américains. Par cet accord, Israël voit accomplis tous les objectifs de guerre que le pays s’était fixé après le massacre du 7 octobre 2023, à savoir : – la récupération des otages ; -l’élimination du Hamas : – et la démilitarisation de Gaza. Le plan en vingt points du président Trump est une victoire incontestable pour Israël et son Premier ministre Benyamin Netanyahu. Le Hamas, en revanche, est perdant. Cet accord signe sa défaite et sa disparition programmée. Volontaire ou forcée. Ce groupe terroriste, affilié aux Frères Musulmans, et fondé en 1987, qui n’a cessé de semer la terreur et répandre le sang, surtout le sang des Palestiniens, a vécu. Il est vaincu, disqualifié à jamais et n’aura aucun rôle dans l’avenir du peuple palestinien. Pourquoi, dès lors, ces dirigeants ont-ils accepté ce plan ? Réponse : parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix. Parce que l’alternative proposée par Trump aurait conduit au même résultat, mais par un chemin beaucoup plus douloureux. Un chemin pas encore totalement écarté. Le Hamas a été décimé par deux ans de guerre et ses combattants sont épuisés. Le Hamas a perdu son principal protecteur et soutien financier, l’Iran. Il se retrouve isolé au Proche Orient, entouré de monarchies arabes fatiguées de soutenir une cause palestinienne de plus en plus radicale et désespérée. Donald Trump avait indiqué qu’en cas de rejet de l’accord, Israël aurait un feu vert pour mener toutes les opérations militaires nécessaires afin d’annihiler le Hamas. En clair le sort de ses combattants et dirigeants était scellé. Il y avait la méthode douce, la libération des otages et leur reddition. Ou la méthode dure, des combats sanglants à l’issue implacable. Le Hamas a choisi (pour l’instant) la méthode douce. Sans doute en se disant que vivre un autre jour lui offre encore la possibilité de négocier une survie. A ce jour, le Hamas respire encore… Cet accord de paix est néanmoins une victoire pour les Palestiniens, au moins ceux d’entre eux désireux de connaître une vie « normale », et ne plus être la chair à canon de la meurtrière obsession de vengeance de leurs chefs fanatiques.
Cet accord a été obtenu en quelques semaines. Entre le 27 août, date d’une réunion clé à la Maison Blanche, et le 29 septembre, date de la venue de Benyamin Netanyahu à la Maison Blanche. Mais ses racines plongent plus profondément dans le temps. Il avait été préparé depuis la réélection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis, le 5 novembre 2024, et même encore plus tôt avec la signature des Accords d’Abraham en septembre 2020, au crépuscule de son premier mandat. De tous les accomplissements de sa première administration (2017 – 2021) en matière de relations internationales, Donald Trump jugeait les Accords d’Abraham les plus prometteurs et les plus ambitieux. La réforme de l’Otan, le dialogue direct avec la Corée du Nord, la sortie de l’accord nucléaire avec l’Iran, la défaite de l’Etat islamique en Syrie et en Irak, rien ne rivalisait à ses yeux avec la perspective d’une paix durable au Proche-Orient et la stabilisation de cette région meurtrie par le conflit israélo-palestinien depuis 1948. Ces accords établissaient une normalisation des relations entre Israël et deux Etats arabes du Golfe, les Emirats Arabes unis et Bahreïn. Ils furent signés le 15 septembre 2020 à la Maison Blanche par Donald Trump, président des Etats-Unis, Benyamin Netanyahu, Premier ministre israélien, et les ministres des Affaires étrangères des EAU, Abdullah bin Zayed Al Nahyan, et de Bahreïn, Abdullatif bin Rashid Al Zayani. Le Maroc et le Soudan devinrent également signataires dans les mois qui suivirent. L’artisan de ces accords n’était pas un diplomate chevronné, mais un entrepreneur immobilier américain de confession juive de 39 ans, Jared Kushner, également époux d’Ivanka Trump, et donc gendre du président américain. C’est lui qui avait mené les négociations, au nom de Trump, en application d’un plan de paix présenté pour l’ensemble de la région en janvier 2020. Le principe soutenant ces accords allait à l’inverse de l’action diplomatique régionale menée jusqu’alors. Depuis des décennies, la résolution du conflit israélo-palestinien était présentée comme la clé d’une normalisation des rapports entre Israël et ses voisins arabes. La paix et un Etat palestinien conduiraient à une paix régionale. Trump avait choisi une démarche exactement inverse. Il avait choisi de faire de la normalisation des rapports entre Israël et ses voisins la clé d’une résolution du conflit palestinien. La paix régionale viendrait à bout du problème palestinien. Pour lui c’était la démarche la plus logique. D’abord parce que cette normalisation avait déjà commencé. C’était le principe des accords de Camp David signés entre Israël et l’Egypte en 1977, sous l’égide du président Jimmy Carter. Ensuite parce que cette normalisation était souhaitée – au moins en privé – par certains pays, dont l’Arabie Saoudite, fatigués d’être les otages d’une cause palestinienne devenue aussi intransigeante que désespérée. Enfin parce que cette normalisation était le moyen d’affaiblir l’Iran, premier sponsor du terrorisme dans la région et principal financier du Hamas, le groupe terroriste palestinien ayant pris le contrôle de la Bande de Gaza, et qui harcelait Israël à sa frontière sud. L’Arabie Saoudite et les monarchies du Golfe étaient les acteurs clés de la stratégie de Donald Trump. Celle-ci datait de 2017, la première année de son mandat. Au mois de juin de cette année-là, Mohammed Ben Salman, fils du roi Salman, avait été désigné « prince-héritier » du royaume. Il avait 32 ans alors. Son père, le roi, en avait 82 ans et sa santé était déclinante. Au Qatar voisin, l’Emir Tamin ben Hamad Al Thani avait pris la succession de son père Hamad en 2013. Il avait 37 ans. Le Qatar abritait la base militaire américaine d’Al Udeid et était, avec l’Arabie saoudite, le principal allié arabe des Etats-Unis dans la région. Ces deux jeunes dirigeants personnifiaient la génération arabe montante. Une génération qui ne veut plus vivre dans l’ombre de 1948 et de la « Nakba » (catastrophe) du peuple palestinien, mais être tournée vers l’avenir et les défis et opportunités présentées par les nouvelles technologies. Donald Trump, après en avoir discuté avec son conseil de sécurité, avait décidé de « parier » sur cette nouvelle génération de leaders pour changer la donne au Proche-Orient et trouver un chemin vers la paix. C’était l’objectif des accords d’Abraham dont l’étape majeure à venir aurait dû être une normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et Israël. Malheureusement Donald Trump perdit l’élection présidentielle de 2020 et son ambition de paix au Proche-Orient fut retardée. Mais pas totalement abandonnée.
2021 – 2024, la faute tragique de Joe Biden
Sans trop s’en vanter, car l’initiative n’était pas la leur, le président Biden et son secrétaire d’Etat Antony Blinken continuèrent de poursuivre l’extension des accords d’Abraham. Mais, sans rencontrer le succès de leur prédécesseur. Israël et les pays arabes ne manifestaient plus le même empressement. Pour plusieurs raisons. La première raison est que Benyamin Netanyahu doutait de Biden. Le président démocrate ne cessait de rappeler le soutien indéfectible des Etats-Unis à Israël et le droit d’Israël de se défendre après le massacre du 7 octobre, mais il ajoutait toujours un « mais », au sujet des victimes civiles de représailles israéliennes, du droit des Palestiniens, ou autre. Pire il prêchait la retenue alors que Tsahal voulait en finir au plus vite avec le Hamas. Au contraire, Netanyahu avait une confiance absolue en Donald Trump. Trump n’avait-il pas ordonné le déménagement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem ainsi que tous les présidents américains s’étaient engagés à le faire depuis Bill Clinton en 1995 sans jamais avoir osé ? Trump n’avait-il pas reconnu l’annexion du plateau du Golan par Israël pour des raisons de sécurité nationale, s’attirant à l’occasion l’opprobre des Nations Unies et d’autres membres du Conseil de Sécurité, dont la France d’Emmanuel Macron ? Trump n’avait-il pas toujours fourni à Israël toutes les armes pour se défendre ? La deuxième raison est que Mohammed Ben Salman, prince héritier et de facto dirigeant de l’Arabie Saoudite arborait les mêmes doutes quant au président américain. Ce dernier l’avait qualifié publiquement de « tueur », pour l’assassinat du journaliste Jamal Kashoggi en Turquie par les services saoudiens en 2018. La relation entre les deux hommes était devenue glaciale. Lors d’une visite officielle de Biden en Arabie Saoudite, ils ne s’étaient même pas serré la main, échangeant simplement un « fist bump ». La troisième raison est qu’au lieu de continuer à isoler et affaiblir l’Iran, Joe Biden avait entrepris de réengager le dialogue avec le régime islamique de Téhéran, comme son prédécesseur démocrate Barack Obama l’avait fait. Une erreur stratégique qui allait avoir des conséquences effroyables. Dès mai 2018, Donald Trump avait fait sortir les Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien conclu par Barack Obama en 2015. Appelé « Joint Comprehensive Plan of Action », ou « JCPOA », (ce qui ne veut rien dire), cet accord avait été présenté comme un moyen d’empêcher l’Iran d’obtenir une bombe nucléaire. En fait il ne faisait que repousser l’échéance, tout en réhabilitant le régime des mollahs, pourtant premier sponsor du terrorisme au Proche-Orient. Donald Trump avait lu entre les lignes et dénoncé cet accord comme un attrape-nigauds, une folie. Cela lui avait valu la réprobation de l’ONU et des Européens, signataires de l’accord. Ce dont il ne s’était guère ému cependant ! Donald Trump avait rétabli les sanctions américaines contre l’Iran et forcé l’ONU à imposer à nouveau des sanctions internationales, limitant les revenus du régime de Téhéran. Ces sanctions seraient maintenues, avait-il dit, tant que l’Iran n’aurait pas renoncé à son programme nucléaire militaire, et tant qu’il continuerait à soutenir le terrorisme dans la région. En avril 2019 l’administration Trump avait désigné le corps des gardiens de la révolution, c’est à dire l’armée idéologique du régime, comme une organisation terroriste. Au même titre que le Hamas et le Hezbollah. Une première, autorisant le recours à la force militaire contre cette organisation. Et pour bien faire comprendre qu’il était sérieux, Donald Trump autorisait l’élimination du général Qassem Soleimani, l’un des plus hauts gradés de l’armée iranienne, responsable des opérations terroristes, et donc de la mort de soldats américains, le 3 janvier 2020 !
Revenu au pouvoir un an plus tard, Biden et les Démocrates abandonnaient cette politique de pression maximale sur l’Iran. Dès janvier 2021, l’administration américaine indiquait sa volonté de ressusciter le JCPOA et de lever les sanctions réimposées par Trump. Des négociations reprenaient à Vienne. Deux ans plus tard, en septembre 2023, en échange de la libération de cinq prisonniers américains détenus en Iran, l’administration Biden autorisait le versement de six milliards de dollars de fonds jusqu’alors « gelés » à l’Iran. Le paiement à peine déguisé d’une rançon. Moins d’un mois plus tard, le 7 octobre 2023, des commandos palestiniens du Hamas et d’autres groupuscules terroristes, entrainés et armés par l’Iran, franchissaient la frontière sud d’Israël et menaient une attaque surprise. L’opération, baptisée « Déluge d’al-aqsa » en Arabe, faisait plus de mille deux cents tués chez les Israéliens, principalement des civils, dont des personnes âgées, des femmes, des enfants et des bébés. Le Hamas capturait aussi deux cent cinquante personnes, emmenées à Gaza comme otages. Ce massacre barbare, rappelant les pogroms d’antan, était qualifiée de « 11 septembre israélien » par Benyamin Netanyahu. Appelant Gaza la « cité du mal », il déclarait l’Etat d’Israël « en guerre » contre le Hamas et le groupe Djihad islamique, promettant « la destruction totale de leurs capacités militaires ». Sans tarder les FDI (Forces de Défense israélienne) recommandaient aux populations civiles de Gaza de fuir l’enclave en anticipation d’une invasion terrestre. Le problème est que ces populations n’avaient nulle part où aller. Aucun pays de la région n’acceptait de les accueillir. L’Egypte et la Jordanie, deux pays arabes ayant accueilli des Palestiniens par le passé, signifiaient sans détour leur refus de prendre de nouveaux réfugiés. Quant aux combattants du Hamas à Gaza, ils avaient ordre d’exécuter quiconque tentait de sauver sa vie et celle de ses proches par la fuite ! La population de Gaza servait de bouclier humain au Hamas et elle allait en payer le prix. Il fallait des victimes civiles au Hamas. Il fallait des morts palestiniens à exhiber à la face du monde. Dans la guerre qui s’ouvrait la communication était la meilleure arme du Hamas et comme cela a toujours été le cas depuis 1948 la misère du peuple palestinien allait être mis en scène et instrumentalisée pour servir la cause supposée… du peuple palestinien ! En même temps qu’elle menait son offensive au sol, l’armée israélienne éliminait un à un les hauts dirigeants du Hamas, présents à Gaza ou ailleurs au Proche-Orient. De janvier à juillet 2024, pas moins de cinq chefs politiques et militaires étaient tués par des tirs ciblés, culminant avec l’élimination d’Ismail Haniyeh, le chef du Hamas, à Téhéran le 31 juillet 2024, puis celle de Yahya Sinwar, chef de la branche armée du Hamas et artisan du 7 octobre, quelques semaines plus tard. Pour mettre à bas tout l’appareil terroriste échafaudé par l’Iran au Proche-Orient, Israël s’en prenait aussi au Hezbollah, la milice chiite libanaise, qui se livrait à des tirs de roquettes incessants sur les villes du nord d’Israël. Tsahal attaquait des cibles terroristes en Syrie, ainsi qu’au Yémen. Les 17 et 18 septembre 2024 plus d’un millier des plus hauts dirigeants du Hezbollah étaient tués ou blessés par l’explosion de leur bipeur. L’opération baptisée « Grim Beeper » (le bipeur sinistre) avait été montée par le Mossad, les services secrets israéliens, qui, en plus d’éliminer leurs adversaires, envoyaient un message clair : aucun ennemi d’Israël n’est à l’abri. La mort pourra le cueillir n’importe où, n’importe quand, n’importe comment ! Une semaine plus tard, Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, était tué à Beyrouth dans un bombardement massif. Début octobre, Israël envahissait le sud Liban pour détruire les sites de lancements de roquettes. L’administration américaine, vivement critiquée par les Républicains et les médias de droite, pour sa responsabilité dans l’attaque du 7 octobre – car ce sont les milliards de dollars dégelés par l’administration Biden qui servirent à former et armer les combattants du Hamas – tentait en vain de fomenter un cessez-le-feu. Le président Biden dépêchait son secrétaire d’Etat Anthony Blinken au Proche-Orient. Sans résultat. En pleine campagne présidentielle aux Etats-Unis, l’administration Biden se retrouvait paralysée, prise entre un soutien affirmé à Israël fruit de l’alliance traditionnelle entre les Etats-Unis et l’Etat hébreu, et les exigences de l’aile gauche du parti démocrate, qui orchestrait l’agitation dans les rues et sur les campus universitaires aux cris de « free Palestine, from the river to the sea » « (Libérez la Palestine de la rivière à la mer », ce qui reviendrait à supprimer l’Etat d’Israël). Résultat, Joe Biden s’efforçait de restreindre les activités militaires israéliennes. En mai 2024 il s’opposait à une offensive israélienne contre Rafah, municipalité du sud de Gaza et suspendait une livraison d’armes à Israël pour empêcher cette attaque. Loin de faciliter un dénouement, il prolongeait le conflit. En même temps, le secrétaire d’Etat Antony Blinken multipliait les déclarations conciliatrices vis à vis du Hamas, s’alarmant des victimes civiles côté palestinien, sans condamner le Hamas pour le recours systématique à des boucliers humains. En octobre 2024, au crépuscule du mandat de Joe Biden, le conflit semblait plus insoluble que jamais.
2024 – 2025 De la réélection de Trump à l’opération « Midnight Hammer » jusqu’aux accords historiques de Charm el-Cheikh
Le premier grand tournant de la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza survint le 5 novembre 2024 avec l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis. Après quatre ans d’absence Trump allait faire son retour à la Maison-Blanche et à la tête du monde libre. Au contraire du président Biden qui n’avait cessé de retenir Israël pour éviter une « escalade » du conflit, Donald Trump assurait le Premier ministre Netanyahu de son indéfectible soutien pour la réalisation de ses objectifs de guerre. Son premier message était pour les kidnappeurs du Hamas : « Libérez les otages sinon l’enfer va pleuvoir sur vous. » Dans un langage très peu diplomatique mais parfaitement clair le futur président – Trump ne prendrait ses fonctions qu’au 20 janvier 2025 – intimait l’ordre au Hamas de libérer les otages du 7 octobre avant son entrée en fonction, sauf à en souffrir de graves conséquences. Vues les éliminations d’Abou Bakr El Bagdadi et du général Soleimani, lors de son premier mandat, il était clair que Trump n’est pas homme à proférer des menaces en l’air. De plus, le 8 décembre 2024, le régime de Bachar el Assad tombait en Syrie. L’Iran perdait un nouvel allié de poids dans la région et le Hamas aussi. Le groupe terroriste palestinien se retrouvait plus isolé que jamais. Du coup un accord était trouvé à la veille de l’investiture de Donald Trump, pour un cesser le feu à Gaza et la libération d’otages israéliens détenus par le Hamas, en échange de la libération de prisonniers palestiniens détenus par Israël. Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu était contre cet accord. Parce qu’il n’accomplissait pas tous les objectifs de guerre d’Israël. Mais, il céda à la pression du nouveau président américain. Trump voulait une victoire d’entrée de jeu, même symbolique, pour démontrer sa capacité à faire bouger les lignes. Cet accord, déjà célébré par des chants et des danses à Gaza, prévoyait la libération progressive de tous les otages israéliens, puis le retrait des troupes israéliennes de Gaza. Rien sur la reconstruction de Gaza. Interrogé sur ce point, le président Trump indiquait sans sourciller que Gaza était devenu invivable et dangereux pour sa propre population. Dans son propre intérêt, sa population devait être évacuée et relogée ailleurs (en Jordanie ou en Egypte, par exemple) le temps de déminer le sous-sol de Gaza et reconstruire la ville. Vue sa situation géographique, Gaza, dit-il, avait tous les atouts pour devenir une magnifique station balnéaire… Dans les think-tanks et les salles de rédaction occidentales, les experts en eurent le souffle coupé, ne sachant s’il fallait en rire ou en pleurer. Comment, dirent-ils tous, un président des Etats-Unis pouvait-il faire une proposition aussi incongrue et en tel décalage avec les « aspirations du peuple palestinien », à savoir, avoir un Etat à eux, fut-il une taupinière explosive ? Au Proche-Orient cependant, la remarque du président américain eut un tout autre impact. Tout le monde comprit que d’un jour à l’autre, les pays de la région pourraient être appelés à accueillir de nouveaux réfugiés palestiniens et que le « problème palestinien » au lieu d’être circonscris dans Gaza pourrait à nouveau venir déstabiliser leurs pays, comme ce fut le cas pour la Jordanie dans les années soixante. Il devenait donc urgent, non seulement de trouver une vraie solution, mais aussi de faire en sorte que Gaza soit reconstruit par des capitaux arabes, pour éviter qu’un milliardaire américain ne transforme l’endroit en sa vision d’un palais des mille et une nuits… Le cessez-le-feu du 19 janvier survécut tant bien que mal jusqu’à la mi-mars. Le temps d’échanger au compte-gouttes quelques otages israéliens contre des criminels palestiniens, d’acheminer de l’aide humanitaire à Gaza, et de permettre aux combattants de se refaire une santé, notamment en détournant l’aide humanitaire… Le printemps venu, les combats reprirent de plus belle. Toutefois Israël, tout comme les Etats-Unis, avaient le regard également tourné vers l’Iran, et accessoirement son dernier proxy encore actif au Proche-Orient, les Houthis du Yémen. La question dépassait le cadre de la guerre à Gaza et concernait l’éternel programme nucléaire iranien et la menace qu’il fait poser sur Israël, le Proche-Orient et même le monde. Les Etats-Unis et Israël avaient indiqué à de multiples reprises qu’ils ne laisseraient pas l’Iran obtenir sa bombe ! Point final. En revanche, si l’Iran acceptait d’abandonner son programme nucléaire, les Etats-Unis seraient prêts à rétablir des relations commerciales et diplomatiques avec la République islamique. C’est ce que Donald Trump a signifié au Guide Suprême iranien, Ali Khamenei, dans un courrier transmis le 13 mars. Accompagnant son courrier d’un ultimatum. L’Iran avait soixante jours pour renoncer à son programme et parvenir à un accord négocié. Ne pas respecter ce délai exposerait l’Iran à des « conséquences militaires terribles ». Téhéran choisit de jouer la montre. De négocier pour gagner du temps. Une tactique transparente qui ne trompa personne. Le délai imposé par Trump passa, sans accord. Au contraire, Khamenei jurait que l’Iran n’abandonnerait jamais son ambition nucléaire. Israël prit finalement les devants. Estimant que le programme iranien était très proche de son aboutissement, Benyamin Netanyahu ordonnait à Tsahal de frapper l’Iran le 13 juin. L’opération était baptisée « Rising Lion ». L’aviation israélienne ciblait simultanément des sites militaires, des postes de commandement, des hauts gradés de l’armée et des scientifiques impliqués dans le programme iranien. En une nuit l’appareil militaire et scientifique iranien était décapité. Et Téhéran s’avérait incapable de riposter sérieusement. Protégé par le parapluie américain – le « dôme de fer » – Israël détruisait l’essentiel des missiles iraniens en vol. Alors que chaque nuit ses propres appareils poursuivaient leurs bombardements. En douze jours, Israël mit l’Iran à genoux. Bien que son ultimatum initial ait été dépassé, voire ignoré, Donald Trump n’a jamais cessé de garder une communication ouverte avec le régime iranien. Il ne cessait de repousser la possibilité des « terribles sanctions militaires » évoquées plus tôt. « Nous verrons d’ici une semaine ou deux », disait-il. A chaque délai, les observateurs remettaient sa détermination en cause. Puis vint la nuit du 21 juin. Sans rien dire bien sûr, Donald Trump lançait l’opération « Midnight Hammer ». Sept bombardiers furtifs B2 décollaient du Missouri pour un vol de trente-cinq heures et vingt-deux mille kilomètres aller-retour. Objectifs : Fordo, Natanz et Ispahan, les trois principaux sites d’enrichissement d’uranium et de recherches nucléaires iraniens, à onze mille kilomètres de distance. A leur bord, treize bombes GBU 57 de quinze tonnes chacune, capables de pénétrer jusqu’à trente mètres sous terre. Pour les escorter, des dizaines de chasseurs. Pour les ravitailler en carburant, des dizaines d’appareils de ravitaillement en vols, postés le long du parcours. Pour les soutenir, une flotte massée en Méditerranée et en Mer Rouge équipée de dizaines de missiles Tomahawk. En quelques minutes les trois cibles furent « oblitérées » selon les termes du président Trump. Le programme nucléaire iranien venait d’être sinon détruit au moins repoussé de dix ans, sans que les avions américains aient essuyé un seul coup de feu. Trump venait de faire la preuve de sa volonté personnelle et de la force inégalée des Etats-Unis. Un message adressé à l’ensemble du monde et compris par l’ensemble du monde. L’Amérique se réveilla plus forte le 22 juin. Et Donald Trump plus déterminé que jamais à mettre à profit cette force et ce moment pour imposer la paix. Immédiatement il obtint qu’Israël cesse ses opérations de guerre contre l’Iran. Le conflit prit le nom de « guerre des douze jours ». Il pressa aussi Netanyahu de reprendre les négociations avec le Hamas, en vue d’une libération de tous les otages. Steve Witkoff, son émissaire spécial au Proche-Orient reprit ses navettes entre Doha et Le Caire, sites de discussions avec le Hamas par l’entremise du Qatar et de l’Egypte. L’été se déroula au rythme des rapports d’ONG sur la menace d’une famine à Gaza. La supposée famine était en fait orchestrée par le Hamas qui détournait l’aide humanitaire, mais les médias n’en disaient mot. Comme cela a été le cas depuis 1948 la misère du peuple palestinien était à nouveau mise en scène pour attirer la sympathie du monde, et entretenir la haine d’Israël. Comme par le passé cela a marché. Journaux et activistes ont commencé à accuser Israël de « génocide » ! Un comble sachant que la stratégie du Hamas reposait sur l’utilisation de civils palestiniens comme boucliers humains. Même Donald Trump fut ému par cette propagande. Il jugea les images retransmises par les télévisions du monde entier préjudiciables à Israël, et aux négociations. Du coup il pressa encore plus ses émissaires de trouver une solution. Il voulait un accord de paix avant le deuxième anniversaire du 7 octobre. En même temps il mobilisa les alliés arabes des Etats-Unis. Au mois de mai (du 13 au 16) Trump avait effectué une visite mémorable en Arabie Saoudite, au Qatar et à Abou Dabi, où il avait été reçu avec un faste sans précédent. Des dizaines de contrats d’investissements et de coopération avaient été signés à cette occasion. Pour plusieurs milliers de milliards de dollars. Trump rappela alors à ces dirigeants que sans une région apaisée, cette coopération ne porterait jamais ses fruits. A eux de faire pression sur le Hamas, tandis qu’il ferait pression sur Israël. Le 27 août, Trump reçoit MM. Witkoff et Kushner, ses deux émissaires, ainsi que Tony Blair et Ron Dermer, conseiller de Benyamin Nétanyahu, dans le bureau ovale de la Maison-Blanche pour faire le point. Le message de Kushner et Witkoff est que sur le terrain les acteurs de la guerre sont « fatigués », que le moment est venu de les pousser à cesser le combat. Pour parvenir à cet objectif, disent-ils, il faut un déroulé précis des étapes de cette cessation des combats, avec le retour de tous les otages, et il faut un plan de reconstruction de Gaza. Trump accueille ces deux propositions avec enthousiasme. Il demande à ses négociateurs de mettre tout cela sur du papier. Ce sera le point de départ du « plan en vingt points ». Le 9 septembre, toutefois, Israël tire un missile sur la capitale qatari Doha, ciblant les négociateurs du Hamas. L’attentat échoue. Khalil al-Hayya, principal émissaire du Hamas n’est que blessé. Cependant, un citoyen qatari est tué. C’est la première fois qu’Israël ose attaquer un allié des Etats-Unis dans la région. Les Qataris sont choqués et inquiets. Donald Trump est furieux. Il avait certes été prévenu, mais à la dernière minute. Le Qatar abrite une base militaire américaine. L’émirat est pratiquement sous la protection des Etats-Unis. L’attaque israélienne est un affront à Washington, en même temps qu’une menace sur le processus de négociations en cours. Si Israël avait voulu stopper les négociations il ne s’y serait pas pris autrement. Plutôt que d’abdiquer Trump choisit cet incident pour redoubler de pression sur son allié israélien. Il annonce que les Etats-Unis ne reconnaîtront pas une annexion de la Cisjordanie, une possibilité régulièrement mise en avant par la droite israélienne, pour en finir définitivement avec la « solution à deux Etats ». Un revirement par rapport à ses annoncés passées. Les Etats-Unis signent aussi un accord de défense avec le Qatar, garantissant au petit émirat la protection militaire des Etats-Unis, en cas d’attaque. Quel que soit l’assaillant. A Charm el-Cheikh, en Egypte, Witkoff et Kushner maintiennent un dialogue entre Israël et le Hamas. Sur la base du plan en vingt points. La Turquie s’est jointe aux participants. Graduellement l’idée d’une paix en plusieurs phases fait son chemin. C’était déjà le principe du cessez-le-feu du 19 janvier.
Première phase : cesser le feu, libération des otages, remises de prisonniers et retrait partiel israélien de Gaza.
Deuxième phase : démilitarisation du Hamas, poursuite du retrait militaire israélien, installation d’une force de stabilisation internationale
Troisième phase : reconstruction de Gaza et reconnaissance de l’aspiration du peuple palestinien à disposer d’un Etat propre.
De passage à l’ONU à New-York, pour l’Assemblée Générale le 23 septembre, et après un discours cinglant sur les échecs, les manquements et les abus de l’organisation internationale, Donald Trump préside une réunion avec les représentants de pays arabes et musulmans. Il leur présente son plan de paix en 20 points et obtient qu’ils y adhèrent. Des pays musulmans très influents comme l’Indonésie et le Pakistan suivent Trump. Ce n’est que fort de ce soutien qu’il présente le même plan à Benyamin Netanyahu le 29 septembre lors d’une visite de ce dernier à la Maison-Blanche. Non seulement il impose au Premier ministre israélien d’accepter le plan, mais il lui demande d’appeler son homologue qatari pour lui présenter ses excuses quant à l’attaque du 9 septembre. Cette demande, exécutée par Netanyahu, et relatée par toutes les télévisions du monde, scelle le soutien des pays arabes à Donald Trump. Il a réussi à leur prouver son respect et son intransigeance envers les deux camps. Après plusieurs nouveaux allers-retours entre New-York, Miami, Washington et Charm el-Cheikh, par les émissaires Witkoff et Kushner, Trump annonce le 8 octobre qu’un accord de paix entre Israël et le Hamas a été obtenu, et la libération prochaine des otages israéliens. C’est Marco Rubio lui-même qui lui a glissé l’information à l’oreille au beau milieu d’une réunion de cabinet… Cet accomplissement est historique. Sa signature officielle au bas de l’accord à Charm el-Cheikh, le 13 octobre, est l’événement diplomatique le plus important du 21e siècle, à ce jour. Toutefois il ne faut pas se bercer d’illusions. La paix n’est pas encore définitive. Le cessez-le-feu reste fragile. La seule certitude est que le Hamas est vaincu. La question de savoir comment cette organisation terroriste va gérer cette défaite constitue l’incertitude majeure d’où découlera l’avenir du cessez-le feu. Le Hamas a déjà échoué à respecter ses engagements de la « phase 1 », à savoir restituer les corps des otages décédés. Seuls 7 sur 28 ont été rendus.
Loin de préparer son désarmement, l’organisation terroriste règle ses comptes avec le peuple palestinien par des dizaines d’exécutions publiques à Gaza. Mais Donald Trump a clairement indiqué que le Hamas désarmera ou sera désarmé : « Ils vont désarmer, ils l’ont promis, sinon nous les désarmerons ». Sans préciser qui était « nous ». Les incertitudes sur l’avenir ne doivent pas masquer la recette de son succès. Trump a imposé la paix non par des concessions aux uns et aux autres, mais par la force. Le Hamas a été progressivement isolé, son parrain, l’Iran, a été mis hors d’état de nuire, après quoi les pays de la région ont été invités à contempler la promesse d’un avenir pacifié et à se rallier au plan préparé par le maître du monde. Cette paix durera le temps qu’elle durera, mais la méthode Trump a clairement démontré son efficacité. Il est peut-être temps que certains reconnaissent qu’ils s’étaient trompés sur les capacités de Trump comme sur ses intentions…
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