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Sébastien Delogu – notre décadence!

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Sébastien Delogu, député de la nation depuis le 22 juin 2022, élu triomphalement avec près de 65% des voix, réélu en 2024 avec 60% des votes de sa circonscription, mérite la plus grande de nos attentions: parce qu’il est à la fois l’incarnation du recul contemporain de la gauche sur le front intellectuel, de la chute abyssale du niveau scolaire, et de la régression de nos élites — en somme, la vivante allégorie de notre décadence.


Vas-y LFI, c’est bon !

On a bien les députés que l’on mérite : le porte-parole des 60% de Français du sud qui ont voté pour lui, en déplacement en Algérie, encense le peuple algérien, critique notre ministre de l’Intérieur, oublie Boualem Sansal et Christophe Gleizes. Trahison ou bêtise ? on hésite. Il faut dire que l’élu éprouve des difficultés de lecture et ne connaît pas le maréchal Pétain ; on apprend la lecture au cours préparatoire, Pétain au CM2 : un grand bravo à l’Éducation nationale. À ce propos, ce n’est pas du « mépris de classe » de relever l’inculture choquante du député ; je ne crois pas qu’un seul journaliste, polémiste ou critique ait jamais fait état de la situation personnelle de Monsieur Delogu en matière pécuniaire, et d’ailleurs l’électorat mélenchoniste appartient plus volontiers à la bourgeoisie endoctrinée d’école publique de centre-ville (« Pétain, je sais juste que c’est un raciste »), qu’au peuple au sens de Marx, celui qui justement reproche à la gauche de l’avoir abandonné au profit des wokistes et des islamistes…mais passons. Eh bien, cet homme qui ne connaît pas Pétain (!), et ânonne, parle au nom de plus de vingt et un mille Français, et détient 1/577ème du pouvoir législatif. En cette République où le président s’exprime dans les colonnes de Pif Gadget, où Francky Vincent reçoit la médaille de l’ordre des Arts et des Lettres, sa carrière est prometteuse.

Élève Ducobu de la chambre basse

Donc, ce député de la nation, qui ne cache plus son mépris pour la nation, juge plus urgent d’attaquer Retailleau sur le sol algérien, que de réclamer la libération d’un intellectuel condamné à cinq ans de prison ferme pour avoir écrit des livres et s’être exprimé librement : la gauche terroriste a de beaux jours devant elle — mais celle-ci ne sera pas patriote. Après les propos que notre député a tenu à la télévision publique, heureusement pour lui que la France n’est pas l’Algérie.

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Je disais que le député Delogu, élève Ducobu de la chambre basse, est comme la quinte-essence de notre époque ; avec l’ignorance, il en a la violence. La violence des idées, d’abord : on ne se pavane pas dans un pays autoritaire, quand on veut dénoncer l’autoritarisme de son propre pays. À moins de préférer à la défense de la liberté le parti de l’étranger ?… Mais non, décidément, la thèse du manque de discernement reste la plus convaincante. Faut-il le rappeler ? dans une interview donnée sur la chaîne YouTube de Sam Zirah le 6 septembre 2024, l’élu, que la cause palestinienne tient à cœur autant que celle de l’Algérie, rappelait à ses ouailles quelques vérités utiles que ne renieront pas les géopoliticiens de quartiers : Netanyahou, vous l’ignoriez ? a financé le Hamas pour récupérer des terres en Palestine, et retrouver « la vache en or » perdue… ce qui a malheureusement « déstabilisé » les fameux « accords de 1948 » (sic). Vous n’avez rien compris ? c’est normal. Et dire que pour se moquer des Insoumis, on les accusait de ne pas savoir placer l’État d’Israël sur une carte du monde : on était encore loin du compte.

Devoirs de vacances

La violence des propos, ensuite ; de ce parlementaire tout mielleux sous le soleil algérien, on dresserait une litanie sans fin des invectives, des haines, des vulgarités. En septembre 2024, il traitait de « pourritures » les représentants du syndicat majoritaire de la Police nationale.

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La violence des gestes, enfin. Heureusement c’est la moins redoutable : car les Insoumis, qui se prennent pour des Communards de la grande Révolution, s’en tiennent généralement aux provocations de gamins, quand ils ne pleurnichent pas à la barre des tribunaux. Ainsi, la suprême rébellion de Delogu aura été de brandir dans l’hémicycle le drapeau d’un pays étranger dont il ne connaît rien, avant de prendre quinze jours de vacances : Robespierre en aurait pleuré de honte.

Monsieur Delogu l’avoue lui-même, il manque de culture. C’est une carence dont le remède est connu : il suffit de lire des livres. Je suggère Victor Hugo, Lamartine et Césaire, tous les trois députés de la nation. Et puis Sartre, Bourdieu, Foucault, Barthes et Camus — le député apprendra qu’il fut un temps où la gauche avait de la culture. Et pourquoi pas Sansal ?…

Écrits sur la littérature: 14 février 2021 - 29 juin 2023

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La gauche, le beauf et la baston

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La gauche culturelle – qui en avait fait le porte-parole officiel de la France multiculturelle apaisée – est embarrassée par la condamnation judiciaire de l’influenceur Ragnar le Breton.


Récemment, sont morts nombre de héros personnels. Brian Wilson, Sly, Nicole Croisille… Et même Frankie Jordan.

Et je n’ai rien écrit.

Non. Pleurer encore sur le monde qui s’en va ? Pas envie.

Et voilà que se fait remarquer un insupportable et que mon sang bout. De trop de bêtise, de démagogie, d’air du temps délétère.

Qui?

Un viriliste fan de MMA, de SUV polluantes, de bœuf à peine cuit et de baffes XXL dans ta tronche.

Papacito ? Baptiste Marchais ? Même si des « gens de droite » qui se baladent en baffant tout le monde, j’en connais fort peu.

Non. Raté. 

Ragnar le Breton.

De gauche, et pas qu’un peu, invité récurrent chez Quotidien, France Inter, Skyrock, C à vous, comme chez Léa Salamé, Konbini  ou Brut et, donc, plus que bien en cour. Aimé, chouchouté, soutenu et coaché par Hélène Zidi et son laboratoire de l’Acteur, par Josiane Balasko, et la ligue d’improvisation. Vite ami avec Benoît Magimel qui le fait tourner, comme avec les affreux GMK et Alban Ivanov, influenceurs, acteurs, et « comiques » quasi-analphabètes, mais omniprésents, eux aussi.

L’homme, un géant blond et de souche (tout est là, vous allez comprendre – il se hait pour cela), quitte l’école à 14 ans, se vante-t-il, et à 17 ans, selon ses propres dires (on n’est pas sérieux quand… etc etc.) se lance parallèlement dans le basket, la délinquance, la revente de montres de luxe (du bling bling, Richard Mille et Rolex, vraies ou fausses), épouse dans la foulée l’aide-soignante musulmane et noire (c’est lui qui le radote) qui le « remet dans le droit chemin » et puis se lance enfin sur TikTok. Tout ça en même temps, ou quasiment.

Mazette.

TikTok, donc. 

De courts sketchs où, invariablement, Matthias Quiviger (son vrai nom), après une courte altercation, envoie valdinguer le fâcheux d’une gifle magistrale. Toujours le même scénario. Copié, de plus, sur une déplorable mode ricaine. Là-bas, le face slapping ou power slap, ça fait florès sur les réseaux sociaux depuis lurette. Des concours de baffes, oui ! Jusqu’au coma. Ragnar n’est pas allé chercher bien loin son inspiration.

Bientôt, il lance les personnages de Rémi le converti à l’islam, et de Michel Venum le gardien du bloc et patron de salle de muscu à Évreux. C’est nul, mal joué, mal écrit et sonne abominablement faux.  Mais c’est le carton. Ou presque. Le cinéma le flatte et le recrute, il est partout, tenant toujours un même discours.

La France plurielle, je l’aime et si je moque des musulmans (enfin, les blancs convertis, les autres, il n’ose pas trop…), c’est par fraternité, parce que moi… cette France des banlieues et des cités, je la connais. Ce pays où tout le monde se mélange, il est formidable…

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Voilà le baratin inlassablement resservi. Ragnar joue sur les deux tableaux. Caricature de beauf, il est à la fois racialiste dans ses sketchs, que vivre-ensembliste et bien-pensant dans ses interviews. Du vrai en même temps ! D’une gifle, il vous renverrait un gilet jaune dans le droit chemin…

Chez Mélenchon, donc. Ragnar joue les prolos avec un père RH dans l’industrie de luxe et un grand-père célèbre journaliste sportif. Platini interviewé par Marguerite Duras pour Libération… c’était lui. Jean-Pierre Delacroix. Pas très France Profonde.

Un faux pauvre, un faux crevard, oui. Comme Louis Boyard, tiens.

On s’étonne que certains médias de droite, rares il est vrai, s’y soient trompés. Valeurs Actuelles, par exemple, qui appelle cela de l’humour noir.

C’est ça… Du Edgar Poe mâtiné de Desproges pendant qu’on y est!

Violence, virilisme, tous ces péchés que la gauche aimerait prêter à la droite ont emmené le Ragnar au palais de Justice. Un an ferme, sans oublier les frais de justice et dédommagements à la victime. Il ne s’est pas présenté et compte faire appel.

Les faits ? Il se serait adossé à une voiture, en marge d’un stade de football où ses enfants s’entraînaient. Le propriétaire du véhicule tapait un somme le temps que l’entraînement finisse.

Il aurait demandé au Ragnar de ne plus s’appuyer. Le ton monte…

Bientôt, comme en ses shorts YouTube, Ragnar sort le type, et selon ses termes, lui « vrille une golden » (sic). 40 jours d’ITT à la clef pour l’endormi.

Ragnar se défend: « C’était une bagarre d’hommes ! Des choses qui arrivent! »

Euh, non.

L’affaire fait grand bruit. La gauche est ennuyée. Les baffes, c’est quand même une récurrence chez eux, depuis Bertrand Cantat le chantre tiers-mondiste auto-prétendu et Adrien Quatennens…

En face ? Baptiste Marchais qui gifle Alice Cordier ? Bon d’accord. On ne le félicite pas non plus. Mais sinon ?

Et de quoi Ragnar est-il le signe ? À l’heure où se fait remarquer un autre cogneur notoire, Mustapha El Atrassi, star de l’humour communautaire, à l’heure du stand up anti-gwer, va-t-on lyncher le camarade Ragnar aux millions de followers, ou le défendre ? Caillou dans la chaussure ou idiot utile, finalement, le viking ? On brûle d’impatience de le savoir. Ou pas.

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IA dégénératives «en éducation»

Alors que les résultats du baccalauréat sont dévoilés ce matin, de plus en plus de candidats préfèrent les consulter en ligne, depuis chez eux, plutôt que de se rendre dans leur lycée pour découvrir les listes affichées. Dans le même temps, tandis que les alertes se multiplient sur le risque de délégation des capacités cognitives à des outils comme ChatGPT, l’Éducation nationale vient d’adopter une position résolument enthousiaste en définissant le « cadre d’usage » des intelligences artificielles génératives.


Dans une newsletter destinée à son personnel, le 13 juin 2025[1], le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse propose « un cadre d’usage éthique et juridique de l’IA, garantissant la protection des données personnelles et une utilisation responsable de ces outils par les agents comme par les élèves ».

La menace ChatGPT

Ce dispositif [2] « a pour objectif d’apporter des réponses claires aux interrogations légitimes de l’ensemble de la communauté éducative et des agents sur l’usage de l’IA en éducation ». À la question « Pourquoi un cadre d’usage de l’IA en éducation ? », il répond par un constat : « le développement rapide et continu des IA, et notamment des IA génératives», souligne qu’elles peuvent être des « outils au service de l’enseignement et des apprentissages », parle d’ « enjeu », d’ « apport ». Propos modalisé, mots-clés en gras, on se soumet l’air de rien aux lois de la tech, on élude les questions qui fâchent, quelque peu déviantes, peut-être illégitimes. Comment former l’intelligence de ses élèves à l’heure des IA génératives ? Comment leur apprendre à réfléchir, raisonner, tirer parti de leurs erreurs, leur donner sens et goût de l’effort, quand les agents conversationnels « travaillent » à leur place? Quelles mesures énergiques et contraignantes faut-il prendre pour protéger la jeunesse de l’IA?

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Sylvain Bourmeau dissipe tous les doutes

Afin « d’accompagner élèves et professeurs dans cette transition », selon les mots d’Anne Bisagni-Faure, rectrice de l’académie de Lyon, et de « développer une culture commune de l’IA », le Réseau Canopé[3] a organisé le 25 juin une « journée de formation et d’échanges sur le thème des IA génératives en éducation ». Il s’agissait d’enrôler les profs, de diffuser ce « cadre d’usage » et d’en dissiper les quelques ambiguïtés. Audran Le Baron, directeur du numérique pour l’éducation, a guidé la lecture et la compréhension du document élaboré par ses services : rappelant qu’il parlait au nom de l’Institution, il a précisé qu’il ne s’adressait pas aux « sceptiques » mais aux « enthousiastes » et aux   « indécis ». Tant pis pour les pyrrhoniens[4] qui avaient fait le déplacement. Trop polluants. On échangerait  sans eux. Les « enthousiastes », nous dit M. Audran, sont ceux qui « expérimentent », les esprits  audacieux, éclairés. Évidemment, les participants aux tables rondes de la journée en sont : chargés de projets à la DRANE[5], chercheur  postdoctorant en neuroinformatique, enseignant chercheur en sciences de l’éducation… Avec eux, les « indécis » peuvent « réinterroger leurs gestes professionnels », « pratiquer le reset » (ou « quitter leurs  présupposés »), « repenser collectivement l’IA » dans le « respect du bien-être numérique ». C’est commode les tables rondes, ça permet d’échanger entre soi ; c’est bien, aussi, parce qu’on parle valeurs, principes, éthique, déontologie : aux données personnelles de tes élèves tu veilleras, ton coût énergétique tu mesureras, à la transparence tu éduqueras… Enfin, il y a le « grand témoin », Sylvain Bourmeau, directeur du journal AOC et professeur associé à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il intervient le matin : « l’IA est une chance épistémologique », « l’Éducation nationale doit comprendre qu’elle n’est plus là pour donner du contenu mais pour mettre à distance le savoir, pour s’interroger sur celui-ci » et l’après-midi : « l’IA est une chance historique pour l’Éducation nationale de se débarrasser des notes », « il faut arrêter de penser triche, réfléchir plus largement sur la productivité dans l’Éducation nationale ».

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Transition d’un nouveau genre

Accélérons le mouvement vers cet univers radieux : l’élève, ayant appris à « prompter » en 4e avec Pix[6], mettra à distance le savoir et arguera, en toute transparence, de sa collaboration avec OpenAI auprès du logiciel de correction, lequel distribuera les pictogrammes de différenciation pédagogique. Plus de notes, ni triche, erreurs, profs, savoir. Plus d’éducation. Plus d’hommes ?

D’après une étude du mois dernier[7], 95% des jeunes utilisent désormais les LLM, modèles d’apprentissage automatique capables de comprendre et générer les textes, dans « leur quotidien académique ». Ils vont au plus pressé, au résultat, déléguant à la machine leurs capacités cognitives. Leur intelligence se désagrège et la fraude est massive : les IA génératives ayant progressé de manière fulgurante ces derniers mois, les élèves grugent dans toutes les disciplines et exercices, jusqu’en dissertation, portables ou montres connectées sur les genoux, dans les interstices du pantalon, au lycée, aux toilettes, pendant les examens…

Dans le monde extra-Canopé, au pays des « sceptiques » et des ringards, on a des solutions : ouvrir les collèges et lycées le mercredi après-midi et le samedi matin afin de multiplier (souvent même de rétablir) les devoirs surveillés ; surveiller (effectivement) les devoirs ; sanctionner les tricheurs ; contrôler les connaissances ; exiger du français et non du codage ou du créole dans les copies. Plutôt qu’« accompagner les élèves dans la transition IA », les tenir à l’abri de celle-ci le temps de l’école, et mettre en place un « cadre d’usage » qui préserve l’intelligence humaine de la dégénérescence.


[1] https://www.education.gouv.fr/en-perspective-415048

[2] L’IA en éducation, cadre d’usage.

[3] Sous la tutelle du ministère de l’Éducation nationale, le Réseau Canopé participe à la mise en œuvre du plan national et des plans académiques et départementaux de formation et du numérique éducatif.

[4] « Car non moins que savoir,  douter m’est agréable » Dante, cité par Montaigne,« De l’Éducation », Essais.

[5] Délégation régionale académique au numérique éducatif.

[6] « L’utilisation pédagogique des IA génératives par les élèves, encadrée, expliquée et accompagnée par l’enseignant, est autorisée en classe à partir de la 4e  en lien avec les objectifs des programmes scolaires et du CRCN. », L’IA en éducation, cadre d’usage.

[7] Rapportée par Tayeb Hamidi, enseignant en informatique et fondateur de Skillbeam, intervenant dans une des tables rondes de la « journée de formation et d’échanges sur le thème des IA génératives en éducation ».

Vivre en sang

Les faits divers sanglants impliquant l’immigration qui se sont multipliés ces dernières années mettent à mal notre fameux « vivre ensemble », et rendent peu désirable la fameuse « créolisation » vantée par l’extrême gauche.


Il est des mots qui résonnent comme des programmes, des prophéties ou des menaces. « Créolisation », voilà le dernier totem agité par ceux qui rêvent de dissoudre la France dans un grand bain de diversité heureuse. Un mot doux pour une réalité brutale. Une idéologie de substitution, où l’identité doit se fondre, s’abolir, s’oublier — dans le brassage des cultures, dans l’abandon des frontières, dans la repentance sans fin.

On vous dit : « Créolisation, c’est l’avenir ! »
Mais l’avenir qu’on nous promet ressemble de plus en plus à Crépol. Ce petit village paisible de la Drôme, où un adolescent de seize ans, Thomas, a été poignardé à mort, un soir de fête. Une rixe, dit-on. Une bagarre qui tourne mal. Mais la vérité suinte à travers les silences officiels : des jeunes venus de la ville, extérieurs à la commune, reviennent armés pour “reprendre la fierté”. Une vengeance importée. Une brutalité gratuite. Un coup de couteau dans le flanc d’une France qu’on croyait encore un peu protégée.

Et Thomas n’est pas un cas isolé.

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Souvenez-vous de Lola, cette fillette de douze ans, retrouvée dans une malle, violée, torturée, massacrée par une clandestine déjà sous obligation de quitter le territoire. Un crime d’une sauvagerie indicible, qui n’a suscité qu’un malaise gêné chez les défenseurs de l’“ouverture”.
Souvenez-vous d’Axelle Dorier, traînée sur 800 mètres à Lyon après avoir tenté de rappeler à l’ordre deux hommes au volant d’une voiture. Tuée pour un regard, pour un mot, pour une réprimande de trop.
Souvenez-vous de Mathis, poignardé à Châteauroux. Ou de Samuel, qui a fini décapité pour avoir voulu enseigner la liberté d’expression.
Souvenez-vous enfin d’Adrien, à Grenoble, 19 ans, poignardé a mort, pour rien. Pour le malheur d’avoir croisé la mauvaise personne, au mauvais moment.

Dans tous ces cas, toujours le même cérémonial : le silence médiatique, la minimisation, la sociologisation, l’oubli organisé. Et surtout : pas de récupération ! Surtout ne pas voir ce qui crève les yeux. Surtout ne pas tirer de leçons. Ne pas faire de lien entre l’effondrement des frontières, la perte du contrôle migratoire, l’ensauvagement du quotidien et ces drames répétés.

La créolisation, nous dit-on, c’est la richesse du mélange. Mais le peuple ne goûte guère aux promesses de cette gastronomie idéologique. Ce qu’il vit, ce qu’il endure, ce qu’il enterre chaque semaine, c’est la crépolisation.
Un nouveau mot pour un nouveau fléau : l’irruption de la violence gratuite, la haine du “Français”, le racisme inversé qu’on n’a pas le droit de nommer. Crépolisation, c’est la mort de Thomas, mais aussi la mise en accusation de son village, de ses amis, de sa communauté, coupables d’être trop blancs, trop enracinés, trop français.

La créolisation sans consentement, sans réciprocité, sans amour véritable de la France, devient une arme. Une arme douce en apparence — culturelle, médiatique, administrative. Une arme dure dans ses effets — exclusion, inversion des normes, humiliation des hôtes. Et parfois, l’arme devient arme tout court. Couteau, barre de fer, véhicule bélier.

On efface les noms, on floute les visages, on étouffe les mots. On transforme les victimes en agresseurs, les alertes en fantasmes, les faits en amalgames. Tout est inversé, tout est nié. Jusqu’à ce que mort s’ensuive.

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Mais le peuple commence à comprendre. Il devine que derrière les mots doux se cache une entreprise d’effacement. Effacement des frontières, des appartenances, des héritages. Effacement des prénoms, des visages, des mémoires. Effacement jusqu’au meurtre.

Et ceux qui voient clair — ces maires menacés, ces familles brisées, ces professeurs insultés, ces adolescents poignardés — n’en peuvent plus d’attendre qu’on les écoute. Ils refusent de mourir en silence, de disparaître dans l’indifférence. Ils refusent que leur pays soit livré au chaos sous couvert de modernité.

La créolisation heureuse est un slogan de tribune. La Crépolisation réelle est un cimetière. L’histoire jugera ceux qui ont préféré les mots aux vies.

Mais avant cela, le peuple pourrait bien les juger lui-même. Le vivre ensemble promis ressemble de plus en plus à un vivre en sang.

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Podcast: Diplomatie, finances publiques, politique énergétique: E. Macron cumule les échecs

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Avec Ivan Rioufol et Jeremy Stubbs.


Emmanuel Macron a eu une conversation téléphonique de deux heures avec Vladimir Poutine. La première depuis 2022. Avec quel objectif? On ne sait pas, mais on dirait qu’il cherche un rôle à jouer sur la scène internationale à un moment où tout le monde parle de Trump et de Netanyahou, mais pas de lui. Jusqu’à présent, la diplomatie française n’a pas réussi à faire grand-chose pour Boualem Sansal, qui vient d’être condamné en appel à cinq ans de prison. En même temps, un élu de la République, Sébastien Delogu, est allé à Alger faire des salamalecs aux autorités, sans dire un mot de cette condamnation, ni de celle du journaliste Christophe Gleizes, accusé d' »apologie de terrorisme ». À moins que Boualem Sansal ne soit gracié dans les jours qui viennent, la seule conclusion, c’est que, sous M. Macron, l’influence géopolitique de la France est au plus bas.

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La dette publique française explose. Le Premier ministre lui-même a parlé de « Himalaya » à escalader pour maîtriser les finances de l’État. Pourtant, en 2017 Emmanuel Macron avait promis que, lui président, le budget serait maîtrisé. Au cours de ses deux mandats, la France a perdu totalement le contrôle de ses finances.

Enfin, là où le gouvernement veut bien investir, c’est dans les éoliennes. Non seulement ces dernières défigurent les paysages et les côtes pittoresques de la France, mais elles restent aussi le symbole du rejet de la France périphérique pour qui le prix de l’électricité, toujours en hausse, représente un facteur d’appauvrissement constant.

Dans les coulisses de la guerre – Israël de l’intérieur

Un entracte à la mode israélienne…


Vivre en Israël, c’est vivre sans le savoir, chaque jour, chaque heure, le livre ouvert de la grande Histoire. Dans l’histoire récente, c’est la guerre déclenchée par la journée du 7-Octobre qui incarne le mieux ce phénomène. Cette journée-là, chaque habitant peut en dérouler le fil heure par heure. Du moment où la première alerte aura retenti, sur les coups de six heures du matin, jusqu’au coucher et bien au-delà, dans les jours suivants. Depuis le 7-Octobre, la perception du temps s’est brouillée. Une année ne ressemble plus vraiment à une année. Elle semble compter double, triple ou alors, à l’inverse, ne plus compter du tout. Nos vies ont perdu l’insouciance qu’elles faisaient semblant d’avoir. Nos projets ont été balayés par une crise de sens. Nos croyances ont vacillé, certains ont changé de bord politique, d’autres sont revenus au pays après une longue expatriation, tandis que certains ont quitté le pays pour trouver un peu de répit.

D’une guerre à une autre

Tels des ouvriers de l’ombre, les Israéliens sont les acteurs inconscients d’une pièce qui s’écrit au-dessus de leurs têtes. Des exploits les plus éclatants aux gestes les plus discrets, tout concourt à soutenir ce collectif, que l’on disait si fragmenté avant le 7-Octobre, et qui pourtant tient encore.

À la guerre du 7-Octobre qui n’est pas encore finie, à la douleur des otages qui sont encore retenus, au deuil des victimes civiles et militaires qui n’a pas de durée, s’est ajoutée « la guerre des douze jours » avec l’Iran.

À peine une semaine après le cessez le feu officiel, nos villes affichent encore des dégâts importants. Nos quotidiens sont encore perturbés, pris dans une sorte de confusion entre un semblant de normalité et une impossibilité d’y parvenir réellement. Un grand nombre de personnes a été déplacé, leurs appartements sont dévastés, leurs commerces ont fermé, leurs vies séparées entre le jour d’avant le bombardement et le jour d’après. Et pourtant, il faut donner à la vie le moyen de l’emporter sur le chaos.

La date avait été posée bien avant cette guerre.

Il s’agissait pour moi et la troupe de comédiens à laquelle j’appartiens de se rendre dans une petite ville située entre Tel Aviv et Ashdod.

Ce soir-là marquerait la fin d’année pour une communauté de bénévoles, réunis pour l’occasion de notre venue. Le buffet était dressé, la scène ornée d’un grand rideau noir, installé pour le spectacle.

Ils nous avaient choisis pour animer cette soirée car notre spécificité est de pratiquer un théâtre d’improvisation dit théâtre playback, qui met en scène les histoires vécues et racontées.

Nous arrivons sur place, nous aiguisons nos voix, nos gestes, nos esprits, nous nous échauffons pour affuter nos outils émotionnels, pour qu’ils s’accrochent à chaque histoire, à chaque détail, et pour que l’histoire partagée, racontée, porte en elle la résonnance la plus universelle possible.

Vera monte sur scène, elle nous remercie d’être venus. Cela fait un mois que nous n’avons pas joué. Un mois que nous sommes privés d’entrainement tandis qu’eux, ces retraités transformés en bénévoles, n’ont pas chômé. Les besoins de la population civile ont explosé, il faut redoubler d’efforts auprès des populations vulnérables, visiter les personnes âgées à domicile, veiller aux troubles émotionnels des enfants, surveiller les signes de post-trauma…

La lumière se tamise, nous nous asseyons sur les chaises disposées sur la scène et nous nous rendons présents aux histoires.

Rina brode chaque jour avec son groupe des poupées anti-stress pour enfants et adultes. De petites poupées qu’on peut glisser dans un sac ou dans sa poche, et qu’on peut toucher pour trouver du réconfort quand on se trouve dans les abris.

Sultana lit des contes aux enfants, un moment privilégié pour préserver leur imaginaire.

Rose-Hélène anime un groupe de bénévoles qui vont visiter les personnes âgées à domicile. Les alertes à répétition ont aggravé leur isolement. Elles se coupent du monde et n’ont même plus la force de descendre et de monter les escaliers menant aux abris publics.

Rempart invisible

À travers ces visages, leurs prénoms, et leurs histoires, c’est la colonne vertébrale du pays qui se dresse devant nous. Ce rempart invisible, tissé au sein de la société civile, reste pourtant largement ignoré.

Au cœur de leurs histoires mêlées, on parvient à entendre ce qui ne se dit pas, ou alors si bas, une fatigue profonde, une tension diffuse, fruit de cette guerre, que dis-je, de ces guerres simultanées qui s’additionnent et mettent à mal notre santé mentale individuelle et collective.

Investis d’une responsabilité immense, nous nous levons. Nous allons jouer sans préparation, sans concertation, à travers un simple échange de regard, leurs histoires, mais en allant au-delà de leurs mots.

Noa, Amir, Oren et moi, plongeons dans le jeu. La mission est folle, mais elle nous venge de ces semaines sans art, sans joie. L’hébreu me vient, accolé à mon accent français indélébile, il est l’enfant que j’appelle dans le noir, à la rescousse, pour me traduire de l’intérieur.

Les histoires s’incarnent devant leurs yeux de vieux enfants.

Ils rient, ils pleurent.

Nous entrons dans leurs vies, dans la force de ce qu’ils ont su énoncer. Dans la confusion de leurs sentiments, l’épuisement, l’espoir, les traumatismes.

Je me sens soudain légère, j’oublie mon hébreu bancal, j’oublie mes approximations de jeu et de langage, je me détache de ce qui me manque pour faire honneur à ce qui existe, ici et maintenant, sur cette scène communale.

Nous sommes leurs vies. Nous donnons des couleurs, des voix à ces soldats de l’ombre.

L’improvisation s’envole.

Elle prend une tournure amusante, nos inconscients forment au-dessus de nos têtes des scénarios inattendus qui nous dépassent.

Nous retrouvons la puissance qui nous avait quittée.

La joie du jeu. La légèreté de la voix créative qui nous ressource et nous porte vers l’avant.

Et puis, soudain, une fuite, l’énergie de la salle qui s’en va.

Une agitation, quelque chose qui se dissipe, qui nous retire brutalement l’attention de la salle.

Je me risque à tourner la tête, je veux comprendre.

Ils ouvrent en hâte leurs sacs, leurs téléphones vibrent de partout, leurs doigts glissent sur les écrans.

Leurs regards sont désolés.

C’est l’appel auquel nous n’avons pas le droit de manquer.

C’est l’alerte.

Nous l’avions déjà oubliée.

Car ici, il suffit d’une semaine de répit pour que nos esprits résilients parviennent déjà à ensevelir des souvenirs douloureux.

Nous n’avons plus de public.

La salle s’est brutalement vidée. Ils se sont levés dans le calme comme un seul homme, celui que les épreuves de l’Histoire leur ont appris à devenir.

Les vieux s’agrippent aux plus jeunes. Les déambulateurs s’arrêtent en haut des marches. Nous descendons tous, spectateurs et acteurs unis dans un même sort, un même silence. Certains nous sourient, nous remercient déjà. « C’était beau », « vous êtes Française ? », « tout ça, sans préparation ».

L’intensité de ce qui vient de se dérouler me parcourt et m’extraie encore de cette scène, somme toutes banale.

Et puis, nous remontons vers la salle. Le spectacle reprend. Il avait seulement été mis sur pause. Je m’en amuse. Un entracte à la mode israélienne. Et sans mot, nos yeux disent ce que nos bouches taisent : la guerre n’est toujours pas finie.

Le chanteur antisioniste, la canicule et l’ex-petite copine juive

À Amsterdam, une rencontre sportive et familiale juive a dégénéré en âpres discussions sur la signification du mot « sionisme » et avec la fuite de l’artiste qui devait s’y produire et qui le tient en horreur.


Le chanteur en question s’appelle Douwe Bob, Amstellodamois trentenaire fort en gueule qui n’a pas hésité à se qualifier de « garçon juif, en quelque sorte ». Contre toute évidence généalogique, d’ailleurs.

Coup de chaud

Dimanche 29 juin, Douwe Bob était l’invité de la fête annuelle Jom Ha Voetbal1 sur les terrains du club de football AFC dans le sud d’Amsterdam. Autour d’un tournoi de foot pour de très jeunes garçons et filles y convergent traditionnellement de nombreux membres de la communauté juive de la capitale néerlandaise et d’ailleurs, toutes tendances politiques et religieuses confondues.

Sous un soleil de plomb, des fans de Douwe Bob, souvent en tenue sportive, attendaient avec impatience l’arrivée, en retard, comme sied à une vedette, du chanteur qui cependant les saluait avec les propos suivants: « Bonjour, j’ai vu ici tant de manifestations de sentiments que j’abhorre, que j’ai décidé d’annuler mon concert. Votre fête a été séquestrée par des organisations politiques, avec leurs slogans et leurs pamphlets. Je suis un garçon juif d’Amsterdam, en quelque sorte, mais je m’oppose au sionisme. »

Après leur avoir souhaité une bonne continuation, il a tendu son micro à un technicien et s’est hâté, avec son guitariste, vers la sortie où l’attendait sa moto.

Les jeunes fans n’y ont pas compris grand-chose, à en croire des parents présents et forcés d’expliquer les propos sibyllins. L’hebdomadaire Nieuw Israëlitiesch Weekblad cite une mère qui, jugeant sa fille de 10 ans trop jeune pour une dissertation sur le sionisme, lui a menti et a affirmé que Douwe Bob avait eu un coup de chaleur et, de ce fait, était incapable de chanter… Un père de famille, journaliste et intellectuel connu, s’est creusé les méninges sur l’explication qu’il se devait de donner à son gamin, à savoir que pendant une fête juive un chanteur avait boudé de jeunes Juifs sur un thème qui les dépasse totalement.

Le poster de la discorde

Il paraît qu’un poster près de la scène d’une organisation de jeunes Juifs, Netzer, où figure le mot néerlandais « zionistisch » ait éveillé le courroux du chanteur. Netzer se tient cependant éloigné des controverses sur la politique de Benyamin Nétanyahou. Un autre stand, plus éloigné de la scène, chantait cependant les louanges de Tsahal, a en revanche constaté un journaliste du journal AD.

Le fait divers n’a pas manqué de se répandre comme une trainée de poudre dans le petit monde politico-journalistique pendant ce dimanche caniculaire. Des politiciens israélophiles de haut niveau s’en sont mêlés, comme la dirigeante liberale Dilan Yesilgöz, qui a accusé Douwe Bob de « haine contre les Juifs ».

J’ai un très bon ami juif…

Le soir même, dans un programme d’actualités à la télévision, le chanteur a affirmé que ses propos lui avaient valu des menaces de mort. Il s’est défendu maladroitement en disant qu’une de ses (nombreuses) ex-copines était juive, Israélienne même. Laquelle ex ne manqua pas de manifester sa désapprobation d’être ainsi utilisée comme alibi… Douwe Bob a rappelé aussi que, l’année dernière, il avait chanté une chanson lors de l’ouverture du musée de l’Holocauste à Amsterdam, tandis que, dehors, des manifestants hurlaient leur haine contre la présence du président israélien Isaac Herzog.

L’affaire passionne les médias néerlandais, où de doctes digressions sur la signification du mot sionisme alternent avec des rappels des nombreux cas d’infidélité conjugale de Douwe Bob, qui représenta les Pays-Bas à l’Eurovision de 2016, ou il termina onzième.

Mercredi matin, le 2 juin, Douwe Bob a annoncé sa fuite sur Instagram, en voiture avec femme et enfant, hors des Pays-Bas suite à des menaces de mort. A l’en croire, sous escorte policière, ce que nient les autorités. Sera-t-il de retour le week-end prochain, alors qu’il est attendu à d’autres festivals d’été, sans sionistes cette fois-ci ?

  1. https://www.jomhavoetbal.nl/ ↩︎

Manuel Ostermann: le cri d’un flic dans une Allemagne à la dérive

Dans un pays où 12 attentats islamistes ont causé 20 morts et 118 blessés entre 2016 et 2024, le livre Deutschland ist nicht mehr sicher du policier est en tête des ventes en librairie. Nous l’avons lu.


Manuel Ostermann n’a jamais été du genre à plier devant les tabous. Policier dans la Ruhr, il a vu son pays se fracturer de l’intérieur, miné par une insécurité galopante. Dans son livre « Deutschland ist nicht mehr sicher » (« L’Allemagne n’est plus sûre »), publié en juin 2025 et déjà propulsé best-seller (n°1 sur Amazon), il vide son sac avec une franchise brutale : criminalité hors de contrôle, immigration débordante, police transformée en punching-ball…

Simbach am Inn : l’illusion migratoire de 2015

En 2015, Manuel Ostermann, jeune policier fédéral, est envoyé à Simbach am Inn, petite ville bavaroise à la frontière autrichienne, en plein cœur de la crise migratoire. Lui qui n’avait vu la guerre qu’à la télévision s’attendait à encadrer des familles syriennes brisées mais reconnaissantes. Quelle désillusion ! Il découvre une vague humaine, massive, indomptable, accueillie par des Bavarois en liesse brandissant des ours en peluche. Mais les bons sentiments s’effritent vite face à la réalité. Les Syriens aux regards hagards ? Quasi introuvables. À leur place, des hommes arabes qui jettent leurs passeports avant la frontière pour brouiller leur identité et éviter l’expulsion. Leur première exigence, assénée avec une assurance sidérante : « Où est le Wi-Fi ? ». Les policiers réalisent alors qu’ils n’ont pas affaire à des réfugiés fuyant la guerre, mais à des opportunistes venus chercher fortune en Allemagne, sans intention de s’intégrer.

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Ostermann, sonné, se retrouve à placarder des affiches expliquant comment utiliser des toilettes – sinon, c’est la nature qui fait office de latrines. À l’heure des repas, le spectacle est plus cruel encore : les hommes s’accaparent la nourriture, engloutissant les rations sous les yeux de femmes et d’enfants affamés. Le policier saisit alors une réalité brutale : cette vague humaine, ces dizaines de milliers de nouveaux arrivants, seront incapables d’adopter les us et coutumes européens. Une bombe à retardement vient de franchir la frontière.

De retour dans la Ruhr, Ostermann gravit les échelons, devient officier, s’engage dans le syndicalisme policier et rejoint la CDU. Il écoute ses collègues, recueille leurs récits. Tous convergent vers une même conclusion : l’Allemagne fonce tête baissée vers le chaos. La crise migratoire a planté les graines d’une fracture durable, dont les effets se font sentir dix ans plus tard.

Une Allemagne qui renie ses couleurs

L’Euro 2024 fait vibrer l’Allemagne, et dans les rangs des flics, on ose rêver d’un sursaut patriotique. Un écusson noir-rouge-or sur l’uniforme, une voiture de patrouille aux couleurs nationales : juste un signe pour dire « nous sommes là, pour l’Allemagne ». Mais l’État, sous Olaf Scholz, oppose un « verboten » cinglant. Neutralité, qu’ils disent. La fierté nationale ? Suspecte, dangereuse, trop chargée du poids de l’histoire. Dans une Allemagne qui se flagelle depuis 1945, brandir le drapeau noir-rouge-or reste un crime de lèse-mémoire.

Mais que vienne la Gay Pride, et tout change. Exit la neutralité. Les commissariats ont pour consigne de se parer d’arcs-en-ciel, les voitures de police deviennent des chars de parade. L’État, si pudibond face à sa propre identité, devient prêt à placarder son engagement progressiste jusqu’au Reichstag. Le summum ? Qatar 2022, match Allemagne-Japon. Nancy Faeser, ministre de l’Intérieur, trône en tribune, sans l’ombre d’un drapeau allemand. Mais sur son bras, bien visible, le brassard « One Love », étendard des minorités sexuelles.

Dans les commissariats, il est désormais interdit de demander le « dead name », le nom de naissance des suspects transgenres, de peur d’offenser les sensibilités. Les procédures s’évanouissent, la priorité absolue étant de ne heurter personne. La justice s’efface, et le drapeau arc-en-ciel impose sa loi.

Wokisme et islamisme : une alliance contre-nature

Ostermann dresse un constat alarmant : l’Allemagne est rongée par un mélange explosif de wokisme et d’islamisme. Prenons les « Omas gegen Rechts »[1], ces « Mamies contre la droite », un groupe de militantes âgées de 50 à 90 ans, drapées dans leur vertu progressiste. Subventionnées à hauteur de 5 000 euros pour « promouvoir la démocratie », ces féministes autoproclamées s’acharnent contre l’extrême droite. Pourtant, on les retrouve dans des manifestations pro-palestiniennes, keffieh au cou, défilant main dans la main avec des islamistes, parfois proches du Hamas. Une alliance paradoxale, comme le souligne Ostermann : comment des championnes de l’égalité des genres peuvent-elles fraterniser avec les tenants d’une idéologie qui opprime les femmes ?

Au cœur de ce mouvement, une figure : Cansın Köktürk, sorte de Rima Hassan allemande. Cette élue de gauche, expulsée du Bundestag en juin 2025[2] pour avoir arboré un tee-shirt « Palestine », incarne cette contradiction. Keffieh en bandoulière, elle scande des slogans anti-Israël. Mais où est son indignation face aux Iraniennes privées d’éducation, voilées de force, ou aux fillettes mariées sous la contrainte ? Silence radio. Pour Ostermann, le wokisme a ses obsessions : vouer l’Occident aux gémonies, brandir le keffieh comme un étendard, vilipender les forces de l’ordre. Ces « mamies » ne réalisent-elles pas qu’une société sans police serait leur propre arrêt de mort, livrée au chaos ?

Les chiffres sont éloquents. Entre 2024 et 2025, les infractions sexuelles bondissent de 9,3 %. La part des agresseurs non-Allemands grimpe de 15,7 %, celle des migrants de 10,3 %. Un sondage de 2025 sur Gayromeo révèle que 30 % des homosexuels interrogés envisagent de voter pour l’AfD[3], en réaction aux agressions attribuées à des populations arabo-musulmanes. La radicalisation de la gauche alimente celle de la droite, chaque extrême nourrissant son opposé.

Une police à l’agonie

Manuel Ostermann, sollicité pour un poste à la CDU, a choisi de rester sur le terrain, auprès de ses collègues. Les policiers, épuisés, font face à une délinquance juvénile en explosion, des agressions physiques, un sentiment d’abandon et un discrédit généralisé. Équipements vétustes, salaires indignes, lois obsolètes, manque de perspectives : les démissions s’enchaînent. S’ajoutent à cela des campagnes orchestrées sur les réseaux sociaux visant à museler les voix divergentes, entravant le travail des forces de l’ordre. Lors d’un rassemblement de la CDU, 11 policiers sont blessés par des activistes d’Attac et des antifas. Ostermann alerte : « Nous vivons dans un monde où les policiers auront bientôt besoin d’une protection policière. »

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L’extrême gauche, forte de 37 000 membres en 2023 (+1,4 %), dont 11 200 prêts à la violence, rejette structurellement la police, prônant son désarmement, voire son abolition. Une police affaiblie, c’est un pouvoir consolidé pour ces extrémistes. Mais la gauche modérée mesure-t-elle le danger d’un tel projet, qui précipiterait l’Allemagne dans l’anarchie ? Pour Ostermann, la police reste le dernier rempart de la démocratie.

Le drame de Rouven Laur : un symbole tragique

Le drame de Rouven Laur[4] hante Manuel Ostermann. Ce policier de 29 ans, tué en 2024 par un Afghan de 25 ans proche de l’État islamique, incarnait l’engagement des flics allemands. Laur, animé par une volonté d’intégration, avait appris l’arabe pour dialoguer avec les migrants, espérant construire des ponts. Mais son geste d’ouverture n’a pas suffi à le protéger. Poignardé lors d’une intervention, il est devenu un symbole des risques encourus par les forces de l’ordre face à une menace islamiste croissante. Ce meurtre a choqué l’Allemagne, révélant la vulnérabilité des policiers dans un climat de tensions exacerbées.

Les fêtes traditionnelles, telles que le Carnaval ou les marchés de Noël, sont désormais placées sous haute surveillance ou supprimées en raison de la menace terroriste. Entre 2021 et 2025, 365 891 entrées illégales à la frontière sont comptabilisées, un nombre supérieur à la population de Münster. En 2024, 79 crimes sont recensés chaque jour, ainsi que 761 viols collectifs dont 48 % des auteurs sont d’origine étrangère. Depuis 2011, 1 150 Allemands ont rejoint des groupes terroristes en Syrie et en Irak, dont seule la moitié est revenue. De 2016 à 2024, 12 attentats islamistes ont causé 20 morts et 118 blessés.

L’islamisme, menace numéro un

Pour Ostermann, l’islamisme, dopé par les flux migratoires, représente le danger numéro un pour l’Allemagne. Il asphyxie les cultures, fait annuler festivals et événements sportifs, entrave les libertés, et propage des discours anti-chrétiens et anti-israéliens, souvent teintés de soutien au Hamas. Des « territoires perdus », à l’image de ceux observés en France, voient le jour, où règnent la loi des clans et l’anarchie. Ostermann insiste, balayant un préjugé tenace : la police n’abandonne pas ces zones, elle se contente d’obéir aux ordres politiques. Son slogan claque comme une évidence : sans sécurité, ni liberté ni démocratie. Pour Ostermann, l’heure n’est plus aux diagnostics mais à l’ultimatum. L’Allemagne a franchi le seuil, et ce qui vient ne sera pas une crise, mais un basculement. Son livre ? Le dernier avertissement avant l’effondrement.

Manuel Ostermann, Deutschland ist nicht mehr sicher (en allemand), Éditions Deutscher Wirtschaftsbuch, juin 2025. 256 pages


[1] https://www.nouvelobs.com/monde/20250217.OBS100419/elections-en-allemagne-qui-sont-les-omas-gegen-rechts-ces-mamies-qui-se-battent-contre-l-extreme-droite.html

[2] https://www.lefigaro.fr/flash-actu/allemagne-une-militante-pro-palestienne-expulsee-du-bundestag-20250604

[3] https://www.causeur.fr/uberraschung-l-arc-en-ciel-vire-a-droite-afd-homosexuels-301862

[4] https://fr.aleteia.org/2024/06/17/sans-lui-cest-moi-qui-serais-mort-le-poignant-hommage-au-policier-poignarde-a-mannheim/

Dans la caravane

Monsieur Nostalgie nous envoie une carte postale du Tour de France et en profite pour louer les vertus des « petites » routes. Il dit oui aux départementales !


Quand les températures grimpent, les villes surchauffent et les esprits s’échauffent ; dans les rues de la capitale, les altercations se multiplient, les incivilités polluent aujourd’hui le quotidien de tous les usagers (automobilistes, cyclistes, piétons, chauffeurs, etc.) comme si la courtoisie avait laissé place à l’insulte et à la menace. La cohabitation est ce rêve devenu impossible face à l’égoïsme de chacun. Un mot de trop, un coup de klaxon éruptif, une main levée en signe de désespoir et la situation peut dégénérer, virer au cauchemar urbain. La peur s’installe au volant ou au guidon. À chaque carrefour, le drame sourd. Nous sommes perpétuellement sur nos gardes. Les éclats de voix sont annonciateurs d’une violence sans filtre, ils n’ont plus le charme et le folklore à la Pagnol.

Bas instincts

Plus personne ne semble être maître de ses nerfs. Les citadins finissent par croire que la route n’est que désolation et embrouilles infinies. Qu’elle serait le théâtre seulement des plus bas instincts, l’expression décomplexée de notre face la plus sombre. Alors qu’à l’approche des vacances, une départementale ombragée est la promesse d’un avenir meilleur. Un doux présage. On s’y engouffre, on s’y prélasse et on s’y sent bien. Que les entrailles de notre pays ont fière allure avec leurs champs et leurs haies, leurs vaches et leurs rivières, leurs calvaires et leurs bornes Michelin. Regardez bien ces paysages du Berry, de la Creuse ou du Béarn, ces volutes à travers la campagne, ces îlots de calme et de fraîcheur, loin du fracas, ils dessinent les coutures de notre vieux pays, son armature des temps immémoriaux. Avec eux, on retrouve un peu d’évasion et d’apaisement. L’estime de soi. Ils sont propices à la rêverie et au temps enfin retrouvé. Cette province des bourgs et des villages a tant à nous apprendre, à nous souvenir, à nous rééduquer sur notre façon de conduire et de profiter de quelques jours arrachés à la virtualité assassine. Donnez-moi, durant une semaine, une Peugeot 404 aux ailes tendues ou une Lambretta fatiguée, un scooter à bout de souffle comme dans la chanson de Voulzy, et une route gendarmée par une rangée de platanes, je serai un homme heureux. Car la route et l’automobile n’ont pas toujours été des frères ennemis. Ces deux-là, ensemble, ont façonné un imaginaire collectif, celui des grands départs, des bouchons et de la famille réunie, tout ce qui manque cruellement aux peuples sans repères.

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Glorieuse Nationale 7

Partout en France, dès l’arrivée des beaux jours, la nostalgie des carrosseries anciennes réenchante l’asphalte. Aucun cœur, même le plus sec, ne peut résister à ces cortèges de voitures, de mobylettes et d’estafettes, à la queuleleu, c’est un peu notre tapisserie de Bayeux des heures mécaniques. Ils étaient encore plus de 800 au 43ème Tour de Bretagne début juin dans les Côtes-d’Armor. Les Français ont soif de cette farandole-là. Elle est pleine de vie et d’une communion d’esprit qui sédimente. Le succès de la Nationale 7 en est la preuve. Désormais, on la vénère, on la panthéonise, on lui restitue ses titres de gloire. Elle fait même de la concurrence à la Route 66, cette starlette américaine. Elle fut comme l’a montré un récent reportage à la télévision, l’épine dorsale gastronomique des Trente Glorieuses, le passage de témoin des mères nourricières aux chefs étoilés. On y mangeait bien et elle faisait partie de la magie du voyage. Elle était Le voyage. La route et les autos, cette longue histoire se perpétuera en juillet dans la caravane publicitaire du Tour de France. Elle passera peut-être par chez vous, avant le peloton et les hélicos de l’organisation. Vous ne la verrez pas dans le poste mais elle attire des milliers de personnes venus assister au dernier spectacle gratuit à retentissement mondial. Avec ses engins déguisés en forme de tasse à café ou de baril de lessive, elle est joyeuse, amusante, désuète, donc essentielle.

Quand elle traverse nos provinces et qu’elle est acclamée par des enfants, l’émotion nous étreint. Ce n’est rien, presque rien, et pourtant l’espoir renaît.

Tendre est la province

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Cinéma: l’envers du décor

Les films nous racontent des histoires. Mais qui nous raconte celles des films ? Journaliste collaborant à Première et Télérama, l’historien du cinéma Olivier Rajchman revient sur des tournages mythiques du 7e art dans son dernier livre. Un ouvrage qui a changé le regard que notre chroniqueur porte sur le cinéma


On se rend dans une salle de cinéma, on regarde un film, on en sort ébloui ou déçu ou, pire, indifférent et on s’imagine peut-être qu’il n’y avait là rien d’extraordinaire. Un spectacle comme un autre. Quand on lit le remarquable livre L’Aventure des films, d’Olivier Rajchman, on comprend tout. Les très grands films sont des tours de force, des miracles.

Une sélection de vingt films

Pour apprécier cet ouvrage critique de haute volée, je l’admets volontiers, il convient d’être un amateur épris de cinéma, attentif à tout ce qu’il a apporté et sensible à son histoire, de l’éclat des stars aux modestes mais irremplaçables contributions des seconds rôles. Mais il est vrai que la connaissance du cinéma devrait faire partie de la culture générale, tant elle permet une vision du monde, de la société et de l’être humain, qui s’ajoute aux formations plus classiques.

Dissipons d’emblée un malentendu qui a failli m’égarer. Olivier Rajchman, dans son choix des vingt films qu’il considère comme emblématiques, ne se prononce pas sur leur excellence, leur supériorité qualitative mais explique parfaitement que chacun d’eux a été décisif dans la création d’un genre et qu’à ce titre il a sa place dans ce panthéon. Aussi bien « Autant en emporte le vent » que « À bout de souffle », « Chinatown » que « Barbie », « Le Dernier métro » que « Chantons sous la pluie » par exemple.

En lisant Olivier Rajchman, j’ai abandonné l’approche superficielle que j’avais du cinéma. J’ai maintenant conscience qu’il s’agit, dans tous les cas, d’un travail colossal et très éprouvant pour les nerfs. Tous ceux qui participent à l’élaboration du film passent par des phases de désespoir, avant d’en être très rarement satisfaits !

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Je n’imaginais pas les épreuves, la minutie, le perfectionnisme, l’ampleur et la fatigue des tâches qui conduisent, dans le meilleur des cas, au sublime, ou au moins imparfait possible. La collaboration constante et infiniment créatrice entre le producteur, le ou les scénaristes et le réalisateur est impressionnante parfois de solidarité, souvent d’antagonismes surmontés, d’écoute, de tolérance, d’échanges puissants et sans concession, d’abandons puis de reprises, de pessimisme amendé par un optimisme que le travail fourni fait surgir.

Éprouvantes entreprises

Je n’aurais garde d’oublier les acteurs qui, choisis pour ce qu’ils vont apporter au film – sans le moindre doute pour certains, pour d’autres après moult hésitations et revirements -, peuvent faire preuve d’un caractère, d’une implication ou non, qui compliquent ou facilitent le processus de création.

Le réalisateur est le personnage central de cette magnifique et éprouvante entreprise, de sa conception à peine esquissée jusqu’à sa diffusion en majesté. On est effaré par le nombre d’incidents techniques, personnels, humains et psychologiques, que doit régler un metteur en scène appelé à se muer en médecin des âmes et des sensibilités avant d’être un maître dans son activité artistique. Et tous les réalisateurs n’ont pas la politesse, la patience et la tranquillité constante d’un François Truffaut !

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On ne peut pas non plus passer sous silence le rôle capital de l’auteur de la musique, qui a son idée se confrontant parfois à celle du réalisateur. Dans les moments de grâce, la musique de film n’est pas un ornement mais une puissance à part entière comme Ennio Morricone l’a toujours voulu.

Il faut rendre justice à l’infinie richesse de ce livre, de ses chapitres qui pour chaque film, mélangeant genèse, construction intellectuelle, détails techniques, approfondissement des personnages, anecdotes de tournage, focalisation sur les acteurs, histoire des rapports entre producteurs, scénaristes, réalisateurs et compositeurs, offre un panorama complet et passionnant de la tâche himalayesque d’une œuvre menée à terme ! Je ne traiterai plus jamais le cinéma à la légère.

448 pages.

Sébastien Delogu – notre décadence!

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Le député Sébastien Delogu à Marseille, 19 juin 2025 © Alain ROBERT/SIPA

Sébastien Delogu, député de la nation depuis le 22 juin 2022, élu triomphalement avec près de 65% des voix, réélu en 2024 avec 60% des votes de sa circonscription, mérite la plus grande de nos attentions: parce qu’il est à la fois l’incarnation du recul contemporain de la gauche sur le front intellectuel, de la chute abyssale du niveau scolaire, et de la régression de nos élites — en somme, la vivante allégorie de notre décadence.


Vas-y LFI, c’est bon !

On a bien les députés que l’on mérite : le porte-parole des 60% de Français du sud qui ont voté pour lui, en déplacement en Algérie, encense le peuple algérien, critique notre ministre de l’Intérieur, oublie Boualem Sansal et Christophe Gleizes. Trahison ou bêtise ? on hésite. Il faut dire que l’élu éprouve des difficultés de lecture et ne connaît pas le maréchal Pétain ; on apprend la lecture au cours préparatoire, Pétain au CM2 : un grand bravo à l’Éducation nationale. À ce propos, ce n’est pas du « mépris de classe » de relever l’inculture choquante du député ; je ne crois pas qu’un seul journaliste, polémiste ou critique ait jamais fait état de la situation personnelle de Monsieur Delogu en matière pécuniaire, et d’ailleurs l’électorat mélenchoniste appartient plus volontiers à la bourgeoisie endoctrinée d’école publique de centre-ville (« Pétain, je sais juste que c’est un raciste »), qu’au peuple au sens de Marx, celui qui justement reproche à la gauche de l’avoir abandonné au profit des wokistes et des islamistes…mais passons. Eh bien, cet homme qui ne connaît pas Pétain (!), et ânonne, parle au nom de plus de vingt et un mille Français, et détient 1/577ème du pouvoir législatif. En cette République où le président s’exprime dans les colonnes de Pif Gadget, où Francky Vincent reçoit la médaille de l’ordre des Arts et des Lettres, sa carrière est prometteuse.

Élève Ducobu de la chambre basse

Donc, ce député de la nation, qui ne cache plus son mépris pour la nation, juge plus urgent d’attaquer Retailleau sur le sol algérien, que de réclamer la libération d’un intellectuel condamné à cinq ans de prison ferme pour avoir écrit des livres et s’être exprimé librement : la gauche terroriste a de beaux jours devant elle — mais celle-ci ne sera pas patriote. Après les propos que notre député a tenu à la télévision publique, heureusement pour lui que la France n’est pas l’Algérie.

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Je disais que le député Delogu, élève Ducobu de la chambre basse, est comme la quinte-essence de notre époque ; avec l’ignorance, il en a la violence. La violence des idées, d’abord : on ne se pavane pas dans un pays autoritaire, quand on veut dénoncer l’autoritarisme de son propre pays. À moins de préférer à la défense de la liberté le parti de l’étranger ?… Mais non, décidément, la thèse du manque de discernement reste la plus convaincante. Faut-il le rappeler ? dans une interview donnée sur la chaîne YouTube de Sam Zirah le 6 septembre 2024, l’élu, que la cause palestinienne tient à cœur autant que celle de l’Algérie, rappelait à ses ouailles quelques vérités utiles que ne renieront pas les géopoliticiens de quartiers : Netanyahou, vous l’ignoriez ? a financé le Hamas pour récupérer des terres en Palestine, et retrouver « la vache en or » perdue… ce qui a malheureusement « déstabilisé » les fameux « accords de 1948 » (sic). Vous n’avez rien compris ? c’est normal. Et dire que pour se moquer des Insoumis, on les accusait de ne pas savoir placer l’État d’Israël sur une carte du monde : on était encore loin du compte.

Devoirs de vacances

La violence des propos, ensuite ; de ce parlementaire tout mielleux sous le soleil algérien, on dresserait une litanie sans fin des invectives, des haines, des vulgarités. En septembre 2024, il traitait de « pourritures » les représentants du syndicat majoritaire de la Police nationale.

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La violence des gestes, enfin. Heureusement c’est la moins redoutable : car les Insoumis, qui se prennent pour des Communards de la grande Révolution, s’en tiennent généralement aux provocations de gamins, quand ils ne pleurnichent pas à la barre des tribunaux. Ainsi, la suprême rébellion de Delogu aura été de brandir dans l’hémicycle le drapeau d’un pays étranger dont il ne connaît rien, avant de prendre quinze jours de vacances : Robespierre en aurait pleuré de honte.

Monsieur Delogu l’avoue lui-même, il manque de culture. C’est une carence dont le remède est connu : il suffit de lire des livres. Je suggère Victor Hugo, Lamartine et Césaire, tous les trois députés de la nation. Et puis Sartre, Bourdieu, Foucault, Barthes et Camus — le député apprendra qu’il fut un temps où la gauche avait de la culture. Et pourquoi pas Sansal ?…

Écrits sur la littérature: 14 février 2021 - 29 juin 2023

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La gauche, le beauf et la baston

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L'humoriste Ragnar le Breton photographié dans un cinéma à Paris le 24 janvier 2024 © Thierry Le Fouille/SIPA

La gauche culturelle – qui en avait fait le porte-parole officiel de la France multiculturelle apaisée – est embarrassée par la condamnation judiciaire de l’influenceur Ragnar le Breton.


Récemment, sont morts nombre de héros personnels. Brian Wilson, Sly, Nicole Croisille… Et même Frankie Jordan.

Et je n’ai rien écrit.

Non. Pleurer encore sur le monde qui s’en va ? Pas envie.

Et voilà que se fait remarquer un insupportable et que mon sang bout. De trop de bêtise, de démagogie, d’air du temps délétère.

Qui?

Un viriliste fan de MMA, de SUV polluantes, de bœuf à peine cuit et de baffes XXL dans ta tronche.

Papacito ? Baptiste Marchais ? Même si des « gens de droite » qui se baladent en baffant tout le monde, j’en connais fort peu.

Non. Raté. 

Ragnar le Breton.

De gauche, et pas qu’un peu, invité récurrent chez Quotidien, France Inter, Skyrock, C à vous, comme chez Léa Salamé, Konbini  ou Brut et, donc, plus que bien en cour. Aimé, chouchouté, soutenu et coaché par Hélène Zidi et son laboratoire de l’Acteur, par Josiane Balasko, et la ligue d’improvisation. Vite ami avec Benoît Magimel qui le fait tourner, comme avec les affreux GMK et Alban Ivanov, influenceurs, acteurs, et « comiques » quasi-analphabètes, mais omniprésents, eux aussi.

L’homme, un géant blond et de souche (tout est là, vous allez comprendre – il se hait pour cela), quitte l’école à 14 ans, se vante-t-il, et à 17 ans, selon ses propres dires (on n’est pas sérieux quand… etc etc.) se lance parallèlement dans le basket, la délinquance, la revente de montres de luxe (du bling bling, Richard Mille et Rolex, vraies ou fausses), épouse dans la foulée l’aide-soignante musulmane et noire (c’est lui qui le radote) qui le « remet dans le droit chemin » et puis se lance enfin sur TikTok. Tout ça en même temps, ou quasiment.

Mazette.

TikTok, donc. 

De courts sketchs où, invariablement, Matthias Quiviger (son vrai nom), après une courte altercation, envoie valdinguer le fâcheux d’une gifle magistrale. Toujours le même scénario. Copié, de plus, sur une déplorable mode ricaine. Là-bas, le face slapping ou power slap, ça fait florès sur les réseaux sociaux depuis lurette. Des concours de baffes, oui ! Jusqu’au coma. Ragnar n’est pas allé chercher bien loin son inspiration.

Bientôt, il lance les personnages de Rémi le converti à l’islam, et de Michel Venum le gardien du bloc et patron de salle de muscu à Évreux. C’est nul, mal joué, mal écrit et sonne abominablement faux.  Mais c’est le carton. Ou presque. Le cinéma le flatte et le recrute, il est partout, tenant toujours un même discours.

La France plurielle, je l’aime et si je moque des musulmans (enfin, les blancs convertis, les autres, il n’ose pas trop…), c’est par fraternité, parce que moi… cette France des banlieues et des cités, je la connais. Ce pays où tout le monde se mélange, il est formidable…

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Voilà le baratin inlassablement resservi. Ragnar joue sur les deux tableaux. Caricature de beauf, il est à la fois racialiste dans ses sketchs, que vivre-ensembliste et bien-pensant dans ses interviews. Du vrai en même temps ! D’une gifle, il vous renverrait un gilet jaune dans le droit chemin…

Chez Mélenchon, donc. Ragnar joue les prolos avec un père RH dans l’industrie de luxe et un grand-père célèbre journaliste sportif. Platini interviewé par Marguerite Duras pour Libération… c’était lui. Jean-Pierre Delacroix. Pas très France Profonde.

Un faux pauvre, un faux crevard, oui. Comme Louis Boyard, tiens.

On s’étonne que certains médias de droite, rares il est vrai, s’y soient trompés. Valeurs Actuelles, par exemple, qui appelle cela de l’humour noir.

C’est ça… Du Edgar Poe mâtiné de Desproges pendant qu’on y est!

Violence, virilisme, tous ces péchés que la gauche aimerait prêter à la droite ont emmené le Ragnar au palais de Justice. Un an ferme, sans oublier les frais de justice et dédommagements à la victime. Il ne s’est pas présenté et compte faire appel.

Les faits ? Il se serait adossé à une voiture, en marge d’un stade de football où ses enfants s’entraînaient. Le propriétaire du véhicule tapait un somme le temps que l’entraînement finisse.

Il aurait demandé au Ragnar de ne plus s’appuyer. Le ton monte…

Bientôt, comme en ses shorts YouTube, Ragnar sort le type, et selon ses termes, lui « vrille une golden » (sic). 40 jours d’ITT à la clef pour l’endormi.

Ragnar se défend: « C’était une bagarre d’hommes ! Des choses qui arrivent! »

Euh, non.

L’affaire fait grand bruit. La gauche est ennuyée. Les baffes, c’est quand même une récurrence chez eux, depuis Bertrand Cantat le chantre tiers-mondiste auto-prétendu et Adrien Quatennens…

En face ? Baptiste Marchais qui gifle Alice Cordier ? Bon d’accord. On ne le félicite pas non plus. Mais sinon ?

Et de quoi Ragnar est-il le signe ? À l’heure où se fait remarquer un autre cogneur notoire, Mustapha El Atrassi, star de l’humour communautaire, à l’heure du stand up anti-gwer, va-t-on lyncher le camarade Ragnar aux millions de followers, ou le défendre ? Caillou dans la chaussure ou idiot utile, finalement, le viking ? On brûle d’impatience de le savoir. Ou pas.

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IA dégénératives «en éducation»

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Lycée Camille Jullian, Bordeaux, épreuve de philosophie du bac, 16 juin 2025 © UGO AMEZ/SIPA

Alors que les résultats du baccalauréat sont dévoilés ce matin, de plus en plus de candidats préfèrent les consulter en ligne, depuis chez eux, plutôt que de se rendre dans leur lycée pour découvrir les listes affichées. Dans le même temps, tandis que les alertes se multiplient sur le risque de délégation des capacités cognitives à des outils comme ChatGPT, l’Éducation nationale vient d’adopter une position résolument enthousiaste en définissant le « cadre d’usage » des intelligences artificielles génératives.


Dans une newsletter destinée à son personnel, le 13 juin 2025[1], le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse propose « un cadre d’usage éthique et juridique de l’IA, garantissant la protection des données personnelles et une utilisation responsable de ces outils par les agents comme par les élèves ».

La menace ChatGPT

Ce dispositif [2] « a pour objectif d’apporter des réponses claires aux interrogations légitimes de l’ensemble de la communauté éducative et des agents sur l’usage de l’IA en éducation ». À la question « Pourquoi un cadre d’usage de l’IA en éducation ? », il répond par un constat : « le développement rapide et continu des IA, et notamment des IA génératives», souligne qu’elles peuvent être des « outils au service de l’enseignement et des apprentissages », parle d’ « enjeu », d’ « apport ». Propos modalisé, mots-clés en gras, on se soumet l’air de rien aux lois de la tech, on élude les questions qui fâchent, quelque peu déviantes, peut-être illégitimes. Comment former l’intelligence de ses élèves à l’heure des IA génératives ? Comment leur apprendre à réfléchir, raisonner, tirer parti de leurs erreurs, leur donner sens et goût de l’effort, quand les agents conversationnels « travaillent » à leur place? Quelles mesures énergiques et contraignantes faut-il prendre pour protéger la jeunesse de l’IA?

A lire aussi: «La Chute de la maison Sciences-Po», de Caroline Beyer: la fabrique des élites auto-proclamées

Sylvain Bourmeau dissipe tous les doutes

Afin « d’accompagner élèves et professeurs dans cette transition », selon les mots d’Anne Bisagni-Faure, rectrice de l’académie de Lyon, et de « développer une culture commune de l’IA », le Réseau Canopé[3] a organisé le 25 juin une « journée de formation et d’échanges sur le thème des IA génératives en éducation ». Il s’agissait d’enrôler les profs, de diffuser ce « cadre d’usage » et d’en dissiper les quelques ambiguïtés. Audran Le Baron, directeur du numérique pour l’éducation, a guidé la lecture et la compréhension du document élaboré par ses services : rappelant qu’il parlait au nom de l’Institution, il a précisé qu’il ne s’adressait pas aux « sceptiques » mais aux « enthousiastes » et aux   « indécis ». Tant pis pour les pyrrhoniens[4] qui avaient fait le déplacement. Trop polluants. On échangerait  sans eux. Les « enthousiastes », nous dit M. Audran, sont ceux qui « expérimentent », les esprits  audacieux, éclairés. Évidemment, les participants aux tables rondes de la journée en sont : chargés de projets à la DRANE[5], chercheur  postdoctorant en neuroinformatique, enseignant chercheur en sciences de l’éducation… Avec eux, les « indécis » peuvent « réinterroger leurs gestes professionnels », « pratiquer le reset » (ou « quitter leurs  présupposés »), « repenser collectivement l’IA » dans le « respect du bien-être numérique ». C’est commode les tables rondes, ça permet d’échanger entre soi ; c’est bien, aussi, parce qu’on parle valeurs, principes, éthique, déontologie : aux données personnelles de tes élèves tu veilleras, ton coût énergétique tu mesureras, à la transparence tu éduqueras… Enfin, il y a le « grand témoin », Sylvain Bourmeau, directeur du journal AOC et professeur associé à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il intervient le matin : « l’IA est une chance épistémologique », « l’Éducation nationale doit comprendre qu’elle n’est plus là pour donner du contenu mais pour mettre à distance le savoir, pour s’interroger sur celui-ci » et l’après-midi : « l’IA est une chance historique pour l’Éducation nationale de se débarrasser des notes », « il faut arrêter de penser triche, réfléchir plus largement sur la productivité dans l’Éducation nationale ».

A lire aussi: Une Pléiade pour entrer dans l’atelier d’Aragon

Transition d’un nouveau genre

Accélérons le mouvement vers cet univers radieux : l’élève, ayant appris à « prompter » en 4e avec Pix[6], mettra à distance le savoir et arguera, en toute transparence, de sa collaboration avec OpenAI auprès du logiciel de correction, lequel distribuera les pictogrammes de différenciation pédagogique. Plus de notes, ni triche, erreurs, profs, savoir. Plus d’éducation. Plus d’hommes ?

D’après une étude du mois dernier[7], 95% des jeunes utilisent désormais les LLM, modèles d’apprentissage automatique capables de comprendre et générer les textes, dans « leur quotidien académique ». Ils vont au plus pressé, au résultat, déléguant à la machine leurs capacités cognitives. Leur intelligence se désagrège et la fraude est massive : les IA génératives ayant progressé de manière fulgurante ces derniers mois, les élèves grugent dans toutes les disciplines et exercices, jusqu’en dissertation, portables ou montres connectées sur les genoux, dans les interstices du pantalon, au lycée, aux toilettes, pendant les examens…

Dans le monde extra-Canopé, au pays des « sceptiques » et des ringards, on a des solutions : ouvrir les collèges et lycées le mercredi après-midi et le samedi matin afin de multiplier (souvent même de rétablir) les devoirs surveillés ; surveiller (effectivement) les devoirs ; sanctionner les tricheurs ; contrôler les connaissances ; exiger du français et non du codage ou du créole dans les copies. Plutôt qu’« accompagner les élèves dans la transition IA », les tenir à l’abri de celle-ci le temps de l’école, et mettre en place un « cadre d’usage » qui préserve l’intelligence humaine de la dégénérescence.


[1] https://www.education.gouv.fr/en-perspective-415048

[2] L’IA en éducation, cadre d’usage.

[3] Sous la tutelle du ministère de l’Éducation nationale, le Réseau Canopé participe à la mise en œuvre du plan national et des plans académiques et départementaux de formation et du numérique éducatif.

[4] « Car non moins que savoir,  douter m’est agréable » Dante, cité par Montaigne,« De l’Éducation », Essais.

[5] Délégation régionale académique au numérique éducatif.

[6] « L’utilisation pédagogique des IA génératives par les élèves, encadrée, expliquée et accompagnée par l’enseignant, est autorisée en classe à partir de la 4e  en lien avec les objectifs des programmes scolaires et du CRCN. », L’IA en éducation, cadre d’usage.

[7] Rapportée par Tayeb Hamidi, enseignant en informatique et fondateur de Skillbeam, intervenant dans une des tables rondes de la « journée de formation et d’échanges sur le thème des IA génératives en éducation ».

Vivre en sang

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Romans-sur-Isère, novembre 2023 © MOURAD ALLILI/SIPA

Les faits divers sanglants impliquant l’immigration qui se sont multipliés ces dernières années mettent à mal notre fameux « vivre ensemble », et rendent peu désirable la fameuse « créolisation » vantée par l’extrême gauche.


Il est des mots qui résonnent comme des programmes, des prophéties ou des menaces. « Créolisation », voilà le dernier totem agité par ceux qui rêvent de dissoudre la France dans un grand bain de diversité heureuse. Un mot doux pour une réalité brutale. Une idéologie de substitution, où l’identité doit se fondre, s’abolir, s’oublier — dans le brassage des cultures, dans l’abandon des frontières, dans la repentance sans fin.

On vous dit : « Créolisation, c’est l’avenir ! »
Mais l’avenir qu’on nous promet ressemble de plus en plus à Crépol. Ce petit village paisible de la Drôme, où un adolescent de seize ans, Thomas, a été poignardé à mort, un soir de fête. Une rixe, dit-on. Une bagarre qui tourne mal. Mais la vérité suinte à travers les silences officiels : des jeunes venus de la ville, extérieurs à la commune, reviennent armés pour “reprendre la fierté”. Une vengeance importée. Une brutalité gratuite. Un coup de couteau dans le flanc d’une France qu’on croyait encore un peu protégée.

Et Thomas n’est pas un cas isolé.

A lire aussi: Crépol: une cécité judiciaire

Souvenez-vous de Lola, cette fillette de douze ans, retrouvée dans une malle, violée, torturée, massacrée par une clandestine déjà sous obligation de quitter le territoire. Un crime d’une sauvagerie indicible, qui n’a suscité qu’un malaise gêné chez les défenseurs de l’“ouverture”.
Souvenez-vous d’Axelle Dorier, traînée sur 800 mètres à Lyon après avoir tenté de rappeler à l’ordre deux hommes au volant d’une voiture. Tuée pour un regard, pour un mot, pour une réprimande de trop.
Souvenez-vous de Mathis, poignardé à Châteauroux. Ou de Samuel, qui a fini décapité pour avoir voulu enseigner la liberté d’expression.
Souvenez-vous enfin d’Adrien, à Grenoble, 19 ans, poignardé a mort, pour rien. Pour le malheur d’avoir croisé la mauvaise personne, au mauvais moment.

Dans tous ces cas, toujours le même cérémonial : le silence médiatique, la minimisation, la sociologisation, l’oubli organisé. Et surtout : pas de récupération ! Surtout ne pas voir ce qui crève les yeux. Surtout ne pas tirer de leçons. Ne pas faire de lien entre l’effondrement des frontières, la perte du contrôle migratoire, l’ensauvagement du quotidien et ces drames répétés.

La créolisation, nous dit-on, c’est la richesse du mélange. Mais le peuple ne goûte guère aux promesses de cette gastronomie idéologique. Ce qu’il vit, ce qu’il endure, ce qu’il enterre chaque semaine, c’est la crépolisation.
Un nouveau mot pour un nouveau fléau : l’irruption de la violence gratuite, la haine du “Français”, le racisme inversé qu’on n’a pas le droit de nommer. Crépolisation, c’est la mort de Thomas, mais aussi la mise en accusation de son village, de ses amis, de sa communauté, coupables d’être trop blancs, trop enracinés, trop français.

La créolisation sans consentement, sans réciprocité, sans amour véritable de la France, devient une arme. Une arme douce en apparence — culturelle, médiatique, administrative. Une arme dure dans ses effets — exclusion, inversion des normes, humiliation des hôtes. Et parfois, l’arme devient arme tout court. Couteau, barre de fer, véhicule bélier.

On efface les noms, on floute les visages, on étouffe les mots. On transforme les victimes en agresseurs, les alertes en fantasmes, les faits en amalgames. Tout est inversé, tout est nié. Jusqu’à ce que mort s’ensuive.

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Mais le peuple commence à comprendre. Il devine que derrière les mots doux se cache une entreprise d’effacement. Effacement des frontières, des appartenances, des héritages. Effacement des prénoms, des visages, des mémoires. Effacement jusqu’au meurtre.

Et ceux qui voient clair — ces maires menacés, ces familles brisées, ces professeurs insultés, ces adolescents poignardés — n’en peuvent plus d’attendre qu’on les écoute. Ils refusent de mourir en silence, de disparaître dans l’indifférence. Ils refusent que leur pays soit livré au chaos sous couvert de modernité.

La créolisation heureuse est un slogan de tribune. La Crépolisation réelle est un cimetière. L’histoire jugera ceux qui ont préféré les mots aux vies.

Mais avant cela, le peuple pourrait bien les juger lui-même. Le vivre ensemble promis ressemble de plus en plus à un vivre en sang.

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Podcast: Diplomatie, finances publiques, politique énergétique: E. Macron cumule les échecs

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Le président Macron à Bruxelles, 15 décembre 2022 © Sipa

Avec Ivan Rioufol et Jeremy Stubbs.


Emmanuel Macron a eu une conversation téléphonique de deux heures avec Vladimir Poutine. La première depuis 2022. Avec quel objectif? On ne sait pas, mais on dirait qu’il cherche un rôle à jouer sur la scène internationale à un moment où tout le monde parle de Trump et de Netanyahou, mais pas de lui. Jusqu’à présent, la diplomatie française n’a pas réussi à faire grand-chose pour Boualem Sansal, qui vient d’être condamné en appel à cinq ans de prison. En même temps, un élu de la République, Sébastien Delogu, est allé à Alger faire des salamalecs aux autorités, sans dire un mot de cette condamnation, ni de celle du journaliste Christophe Gleizes, accusé d' »apologie de terrorisme ». À moins que Boualem Sansal ne soit gracié dans les jours qui viennent, la seule conclusion, c’est que, sous M. Macron, l’influence géopolitique de la France est au plus bas.

A lire aussi: Christophe Gleizes, victime collatérale de la guerre froide franco-algérienne

La dette publique française explose. Le Premier ministre lui-même a parlé de « Himalaya » à escalader pour maîtriser les finances de l’État. Pourtant, en 2017 Emmanuel Macron avait promis que, lui président, le budget serait maîtrisé. Au cours de ses deux mandats, la France a perdu totalement le contrôle de ses finances.

Enfin, là où le gouvernement veut bien investir, c’est dans les éoliennes. Non seulement ces dernières défigurent les paysages et les côtes pittoresques de la France, mais elles restent aussi le symbole du rejet de la France périphérique pour qui le prix de l’électricité, toujours en hausse, représente un facteur d’appauvrissement constant.

Dans les coulisses de la guerre – Israël de l’intérieur

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Immeuble résidentiel détruit à Bat Yam après la guerre avec l'Iran, en Israël, le 30 juin 2025 © Eli Basri / SOPA Images/SIPA

Un entracte à la mode israélienne…


Vivre en Israël, c’est vivre sans le savoir, chaque jour, chaque heure, le livre ouvert de la grande Histoire. Dans l’histoire récente, c’est la guerre déclenchée par la journée du 7-Octobre qui incarne le mieux ce phénomène. Cette journée-là, chaque habitant peut en dérouler le fil heure par heure. Du moment où la première alerte aura retenti, sur les coups de six heures du matin, jusqu’au coucher et bien au-delà, dans les jours suivants. Depuis le 7-Octobre, la perception du temps s’est brouillée. Une année ne ressemble plus vraiment à une année. Elle semble compter double, triple ou alors, à l’inverse, ne plus compter du tout. Nos vies ont perdu l’insouciance qu’elles faisaient semblant d’avoir. Nos projets ont été balayés par une crise de sens. Nos croyances ont vacillé, certains ont changé de bord politique, d’autres sont revenus au pays après une longue expatriation, tandis que certains ont quitté le pays pour trouver un peu de répit.

D’une guerre à une autre

Tels des ouvriers de l’ombre, les Israéliens sont les acteurs inconscients d’une pièce qui s’écrit au-dessus de leurs têtes. Des exploits les plus éclatants aux gestes les plus discrets, tout concourt à soutenir ce collectif, que l’on disait si fragmenté avant le 7-Octobre, et qui pourtant tient encore.

À la guerre du 7-Octobre qui n’est pas encore finie, à la douleur des otages qui sont encore retenus, au deuil des victimes civiles et militaires qui n’a pas de durée, s’est ajoutée « la guerre des douze jours » avec l’Iran.

À peine une semaine après le cessez le feu officiel, nos villes affichent encore des dégâts importants. Nos quotidiens sont encore perturbés, pris dans une sorte de confusion entre un semblant de normalité et une impossibilité d’y parvenir réellement. Un grand nombre de personnes a été déplacé, leurs appartements sont dévastés, leurs commerces ont fermé, leurs vies séparées entre le jour d’avant le bombardement et le jour d’après. Et pourtant, il faut donner à la vie le moyen de l’emporter sur le chaos.

La date avait été posée bien avant cette guerre.

Il s’agissait pour moi et la troupe de comédiens à laquelle j’appartiens de se rendre dans une petite ville située entre Tel Aviv et Ashdod.

Ce soir-là marquerait la fin d’année pour une communauté de bénévoles, réunis pour l’occasion de notre venue. Le buffet était dressé, la scène ornée d’un grand rideau noir, installé pour le spectacle.

Ils nous avaient choisis pour animer cette soirée car notre spécificité est de pratiquer un théâtre d’improvisation dit théâtre playback, qui met en scène les histoires vécues et racontées.

Nous arrivons sur place, nous aiguisons nos voix, nos gestes, nos esprits, nous nous échauffons pour affuter nos outils émotionnels, pour qu’ils s’accrochent à chaque histoire, à chaque détail, et pour que l’histoire partagée, racontée, porte en elle la résonnance la plus universelle possible.

Vera monte sur scène, elle nous remercie d’être venus. Cela fait un mois que nous n’avons pas joué. Un mois que nous sommes privés d’entrainement tandis qu’eux, ces retraités transformés en bénévoles, n’ont pas chômé. Les besoins de la population civile ont explosé, il faut redoubler d’efforts auprès des populations vulnérables, visiter les personnes âgées à domicile, veiller aux troubles émotionnels des enfants, surveiller les signes de post-trauma…

La lumière se tamise, nous nous asseyons sur les chaises disposées sur la scène et nous nous rendons présents aux histoires.

Rina brode chaque jour avec son groupe des poupées anti-stress pour enfants et adultes. De petites poupées qu’on peut glisser dans un sac ou dans sa poche, et qu’on peut toucher pour trouver du réconfort quand on se trouve dans les abris.

Sultana lit des contes aux enfants, un moment privilégié pour préserver leur imaginaire.

Rose-Hélène anime un groupe de bénévoles qui vont visiter les personnes âgées à domicile. Les alertes à répétition ont aggravé leur isolement. Elles se coupent du monde et n’ont même plus la force de descendre et de monter les escaliers menant aux abris publics.

Rempart invisible

À travers ces visages, leurs prénoms, et leurs histoires, c’est la colonne vertébrale du pays qui se dresse devant nous. Ce rempart invisible, tissé au sein de la société civile, reste pourtant largement ignoré.

Au cœur de leurs histoires mêlées, on parvient à entendre ce qui ne se dit pas, ou alors si bas, une fatigue profonde, une tension diffuse, fruit de cette guerre, que dis-je, de ces guerres simultanées qui s’additionnent et mettent à mal notre santé mentale individuelle et collective.

Investis d’une responsabilité immense, nous nous levons. Nous allons jouer sans préparation, sans concertation, à travers un simple échange de regard, leurs histoires, mais en allant au-delà de leurs mots.

Noa, Amir, Oren et moi, plongeons dans le jeu. La mission est folle, mais elle nous venge de ces semaines sans art, sans joie. L’hébreu me vient, accolé à mon accent français indélébile, il est l’enfant que j’appelle dans le noir, à la rescousse, pour me traduire de l’intérieur.

Les histoires s’incarnent devant leurs yeux de vieux enfants.

Ils rient, ils pleurent.

Nous entrons dans leurs vies, dans la force de ce qu’ils ont su énoncer. Dans la confusion de leurs sentiments, l’épuisement, l’espoir, les traumatismes.

Je me sens soudain légère, j’oublie mon hébreu bancal, j’oublie mes approximations de jeu et de langage, je me détache de ce qui me manque pour faire honneur à ce qui existe, ici et maintenant, sur cette scène communale.

Nous sommes leurs vies. Nous donnons des couleurs, des voix à ces soldats de l’ombre.

L’improvisation s’envole.

Elle prend une tournure amusante, nos inconscients forment au-dessus de nos têtes des scénarios inattendus qui nous dépassent.

Nous retrouvons la puissance qui nous avait quittée.

La joie du jeu. La légèreté de la voix créative qui nous ressource et nous porte vers l’avant.

Et puis, soudain, une fuite, l’énergie de la salle qui s’en va.

Une agitation, quelque chose qui se dissipe, qui nous retire brutalement l’attention de la salle.

Je me risque à tourner la tête, je veux comprendre.

Ils ouvrent en hâte leurs sacs, leurs téléphones vibrent de partout, leurs doigts glissent sur les écrans.

Leurs regards sont désolés.

C’est l’appel auquel nous n’avons pas le droit de manquer.

C’est l’alerte.

Nous l’avions déjà oubliée.

Car ici, il suffit d’une semaine de répit pour que nos esprits résilients parviennent déjà à ensevelir des souvenirs douloureux.

Nous n’avons plus de public.

La salle s’est brutalement vidée. Ils se sont levés dans le calme comme un seul homme, celui que les épreuves de l’Histoire leur ont appris à devenir.

Les vieux s’agrippent aux plus jeunes. Les déambulateurs s’arrêtent en haut des marches. Nous descendons tous, spectateurs et acteurs unis dans un même sort, un même silence. Certains nous sourient, nous remercient déjà. « C’était beau », « vous êtes Française ? », « tout ça, sans préparation ».

L’intensité de ce qui vient de se dérouler me parcourt et m’extraie encore de cette scène, somme toutes banale.

Et puis, nous remontons vers la salle. Le spectacle reprend. Il avait seulement été mis sur pause. Je m’en amuse. Un entracte à la mode israélienne. Et sans mot, nos yeux disent ce que nos bouches taisent : la guerre n’est toujours pas finie.

Le chanteur antisioniste, la canicule et l’ex-petite copine juive

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Le chanteur hollandais Douwe Bob photographié en 2016 © Martin Meissner/AP/SIPA

À Amsterdam, une rencontre sportive et familiale juive a dégénéré en âpres discussions sur la signification du mot « sionisme » et avec la fuite de l’artiste qui devait s’y produire et qui le tient en horreur.


Le chanteur en question s’appelle Douwe Bob, Amstellodamois trentenaire fort en gueule qui n’a pas hésité à se qualifier de « garçon juif, en quelque sorte ». Contre toute évidence généalogique, d’ailleurs.

Coup de chaud

Dimanche 29 juin, Douwe Bob était l’invité de la fête annuelle Jom Ha Voetbal1 sur les terrains du club de football AFC dans le sud d’Amsterdam. Autour d’un tournoi de foot pour de très jeunes garçons et filles y convergent traditionnellement de nombreux membres de la communauté juive de la capitale néerlandaise et d’ailleurs, toutes tendances politiques et religieuses confondues.

Sous un soleil de plomb, des fans de Douwe Bob, souvent en tenue sportive, attendaient avec impatience l’arrivée, en retard, comme sied à une vedette, du chanteur qui cependant les saluait avec les propos suivants: « Bonjour, j’ai vu ici tant de manifestations de sentiments que j’abhorre, que j’ai décidé d’annuler mon concert. Votre fête a été séquestrée par des organisations politiques, avec leurs slogans et leurs pamphlets. Je suis un garçon juif d’Amsterdam, en quelque sorte, mais je m’oppose au sionisme. »

Après leur avoir souhaité une bonne continuation, il a tendu son micro à un technicien et s’est hâté, avec son guitariste, vers la sortie où l’attendait sa moto.

Les jeunes fans n’y ont pas compris grand-chose, à en croire des parents présents et forcés d’expliquer les propos sibyllins. L’hebdomadaire Nieuw Israëlitiesch Weekblad cite une mère qui, jugeant sa fille de 10 ans trop jeune pour une dissertation sur le sionisme, lui a menti et a affirmé que Douwe Bob avait eu un coup de chaleur et, de ce fait, était incapable de chanter… Un père de famille, journaliste et intellectuel connu, s’est creusé les méninges sur l’explication qu’il se devait de donner à son gamin, à savoir que pendant une fête juive un chanteur avait boudé de jeunes Juifs sur un thème qui les dépasse totalement.

Le poster de la discorde

Il paraît qu’un poster près de la scène d’une organisation de jeunes Juifs, Netzer, où figure le mot néerlandais « zionistisch » ait éveillé le courroux du chanteur. Netzer se tient cependant éloigné des controverses sur la politique de Benyamin Nétanyahou. Un autre stand, plus éloigné de la scène, chantait cependant les louanges de Tsahal, a en revanche constaté un journaliste du journal AD.

Le fait divers n’a pas manqué de se répandre comme une trainée de poudre dans le petit monde politico-journalistique pendant ce dimanche caniculaire. Des politiciens israélophiles de haut niveau s’en sont mêlés, comme la dirigeante liberale Dilan Yesilgöz, qui a accusé Douwe Bob de « haine contre les Juifs ».

J’ai un très bon ami juif…

Le soir même, dans un programme d’actualités à la télévision, le chanteur a affirmé que ses propos lui avaient valu des menaces de mort. Il s’est défendu maladroitement en disant qu’une de ses (nombreuses) ex-copines était juive, Israélienne même. Laquelle ex ne manqua pas de manifester sa désapprobation d’être ainsi utilisée comme alibi… Douwe Bob a rappelé aussi que, l’année dernière, il avait chanté une chanson lors de l’ouverture du musée de l’Holocauste à Amsterdam, tandis que, dehors, des manifestants hurlaient leur haine contre la présence du président israélien Isaac Herzog.

L’affaire passionne les médias néerlandais, où de doctes digressions sur la signification du mot sionisme alternent avec des rappels des nombreux cas d’infidélité conjugale de Douwe Bob, qui représenta les Pays-Bas à l’Eurovision de 2016, ou il termina onzième.

Mercredi matin, le 2 juin, Douwe Bob a annoncé sa fuite sur Instagram, en voiture avec femme et enfant, hors des Pays-Bas suite à des menaces de mort. A l’en croire, sous escorte policière, ce que nient les autorités. Sera-t-il de retour le week-end prochain, alors qu’il est attendu à d’autres festivals d’été, sans sionistes cette fois-ci ?

  1. https://www.jomhavoetbal.nl/ ↩︎

Manuel Ostermann: le cri d’un flic dans une Allemagne à la dérive

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Manuel Ostermann photographié en 2023. DR.

Dans un pays où 12 attentats islamistes ont causé 20 morts et 118 blessés entre 2016 et 2024, le livre Deutschland ist nicht mehr sicher du policier est en tête des ventes en librairie. Nous l’avons lu.


Manuel Ostermann n’a jamais été du genre à plier devant les tabous. Policier dans la Ruhr, il a vu son pays se fracturer de l’intérieur, miné par une insécurité galopante. Dans son livre « Deutschland ist nicht mehr sicher » (« L’Allemagne n’est plus sûre »), publié en juin 2025 et déjà propulsé best-seller (n°1 sur Amazon), il vide son sac avec une franchise brutale : criminalité hors de contrôle, immigration débordante, police transformée en punching-ball…

Simbach am Inn : l’illusion migratoire de 2015

En 2015, Manuel Ostermann, jeune policier fédéral, est envoyé à Simbach am Inn, petite ville bavaroise à la frontière autrichienne, en plein cœur de la crise migratoire. Lui qui n’avait vu la guerre qu’à la télévision s’attendait à encadrer des familles syriennes brisées mais reconnaissantes. Quelle désillusion ! Il découvre une vague humaine, massive, indomptable, accueillie par des Bavarois en liesse brandissant des ours en peluche. Mais les bons sentiments s’effritent vite face à la réalité. Les Syriens aux regards hagards ? Quasi introuvables. À leur place, des hommes arabes qui jettent leurs passeports avant la frontière pour brouiller leur identité et éviter l’expulsion. Leur première exigence, assénée avec une assurance sidérante : « Où est le Wi-Fi ? ». Les policiers réalisent alors qu’ils n’ont pas affaire à des réfugiés fuyant la guerre, mais à des opportunistes venus chercher fortune en Allemagne, sans intention de s’intégrer.

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Ostermann, sonné, se retrouve à placarder des affiches expliquant comment utiliser des toilettes – sinon, c’est la nature qui fait office de latrines. À l’heure des repas, le spectacle est plus cruel encore : les hommes s’accaparent la nourriture, engloutissant les rations sous les yeux de femmes et d’enfants affamés. Le policier saisit alors une réalité brutale : cette vague humaine, ces dizaines de milliers de nouveaux arrivants, seront incapables d’adopter les us et coutumes européens. Une bombe à retardement vient de franchir la frontière.

De retour dans la Ruhr, Ostermann gravit les échelons, devient officier, s’engage dans le syndicalisme policier et rejoint la CDU. Il écoute ses collègues, recueille leurs récits. Tous convergent vers une même conclusion : l’Allemagne fonce tête baissée vers le chaos. La crise migratoire a planté les graines d’une fracture durable, dont les effets se font sentir dix ans plus tard.

Une Allemagne qui renie ses couleurs

L’Euro 2024 fait vibrer l’Allemagne, et dans les rangs des flics, on ose rêver d’un sursaut patriotique. Un écusson noir-rouge-or sur l’uniforme, une voiture de patrouille aux couleurs nationales : juste un signe pour dire « nous sommes là, pour l’Allemagne ». Mais l’État, sous Olaf Scholz, oppose un « verboten » cinglant. Neutralité, qu’ils disent. La fierté nationale ? Suspecte, dangereuse, trop chargée du poids de l’histoire. Dans une Allemagne qui se flagelle depuis 1945, brandir le drapeau noir-rouge-or reste un crime de lèse-mémoire.

Mais que vienne la Gay Pride, et tout change. Exit la neutralité. Les commissariats ont pour consigne de se parer d’arcs-en-ciel, les voitures de police deviennent des chars de parade. L’État, si pudibond face à sa propre identité, devient prêt à placarder son engagement progressiste jusqu’au Reichstag. Le summum ? Qatar 2022, match Allemagne-Japon. Nancy Faeser, ministre de l’Intérieur, trône en tribune, sans l’ombre d’un drapeau allemand. Mais sur son bras, bien visible, le brassard « One Love », étendard des minorités sexuelles.

Dans les commissariats, il est désormais interdit de demander le « dead name », le nom de naissance des suspects transgenres, de peur d’offenser les sensibilités. Les procédures s’évanouissent, la priorité absolue étant de ne heurter personne. La justice s’efface, et le drapeau arc-en-ciel impose sa loi.

Wokisme et islamisme : une alliance contre-nature

Ostermann dresse un constat alarmant : l’Allemagne est rongée par un mélange explosif de wokisme et d’islamisme. Prenons les « Omas gegen Rechts »[1], ces « Mamies contre la droite », un groupe de militantes âgées de 50 à 90 ans, drapées dans leur vertu progressiste. Subventionnées à hauteur de 5 000 euros pour « promouvoir la démocratie », ces féministes autoproclamées s’acharnent contre l’extrême droite. Pourtant, on les retrouve dans des manifestations pro-palestiniennes, keffieh au cou, défilant main dans la main avec des islamistes, parfois proches du Hamas. Une alliance paradoxale, comme le souligne Ostermann : comment des championnes de l’égalité des genres peuvent-elles fraterniser avec les tenants d’une idéologie qui opprime les femmes ?

Au cœur de ce mouvement, une figure : Cansın Köktürk, sorte de Rima Hassan allemande. Cette élue de gauche, expulsée du Bundestag en juin 2025[2] pour avoir arboré un tee-shirt « Palestine », incarne cette contradiction. Keffieh en bandoulière, elle scande des slogans anti-Israël. Mais où est son indignation face aux Iraniennes privées d’éducation, voilées de force, ou aux fillettes mariées sous la contrainte ? Silence radio. Pour Ostermann, le wokisme a ses obsessions : vouer l’Occident aux gémonies, brandir le keffieh comme un étendard, vilipender les forces de l’ordre. Ces « mamies » ne réalisent-elles pas qu’une société sans police serait leur propre arrêt de mort, livrée au chaos ?

Les chiffres sont éloquents. Entre 2024 et 2025, les infractions sexuelles bondissent de 9,3 %. La part des agresseurs non-Allemands grimpe de 15,7 %, celle des migrants de 10,3 %. Un sondage de 2025 sur Gayromeo révèle que 30 % des homosexuels interrogés envisagent de voter pour l’AfD[3], en réaction aux agressions attribuées à des populations arabo-musulmanes. La radicalisation de la gauche alimente celle de la droite, chaque extrême nourrissant son opposé.

Une police à l’agonie

Manuel Ostermann, sollicité pour un poste à la CDU, a choisi de rester sur le terrain, auprès de ses collègues. Les policiers, épuisés, font face à une délinquance juvénile en explosion, des agressions physiques, un sentiment d’abandon et un discrédit généralisé. Équipements vétustes, salaires indignes, lois obsolètes, manque de perspectives : les démissions s’enchaînent. S’ajoutent à cela des campagnes orchestrées sur les réseaux sociaux visant à museler les voix divergentes, entravant le travail des forces de l’ordre. Lors d’un rassemblement de la CDU, 11 policiers sont blessés par des activistes d’Attac et des antifas. Ostermann alerte : « Nous vivons dans un monde où les policiers auront bientôt besoin d’une protection policière. »

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L’extrême gauche, forte de 37 000 membres en 2023 (+1,4 %), dont 11 200 prêts à la violence, rejette structurellement la police, prônant son désarmement, voire son abolition. Une police affaiblie, c’est un pouvoir consolidé pour ces extrémistes. Mais la gauche modérée mesure-t-elle le danger d’un tel projet, qui précipiterait l’Allemagne dans l’anarchie ? Pour Ostermann, la police reste le dernier rempart de la démocratie.

Le drame de Rouven Laur : un symbole tragique

Le drame de Rouven Laur[4] hante Manuel Ostermann. Ce policier de 29 ans, tué en 2024 par un Afghan de 25 ans proche de l’État islamique, incarnait l’engagement des flics allemands. Laur, animé par une volonté d’intégration, avait appris l’arabe pour dialoguer avec les migrants, espérant construire des ponts. Mais son geste d’ouverture n’a pas suffi à le protéger. Poignardé lors d’une intervention, il est devenu un symbole des risques encourus par les forces de l’ordre face à une menace islamiste croissante. Ce meurtre a choqué l’Allemagne, révélant la vulnérabilité des policiers dans un climat de tensions exacerbées.

Les fêtes traditionnelles, telles que le Carnaval ou les marchés de Noël, sont désormais placées sous haute surveillance ou supprimées en raison de la menace terroriste. Entre 2021 et 2025, 365 891 entrées illégales à la frontière sont comptabilisées, un nombre supérieur à la population de Münster. En 2024, 79 crimes sont recensés chaque jour, ainsi que 761 viols collectifs dont 48 % des auteurs sont d’origine étrangère. Depuis 2011, 1 150 Allemands ont rejoint des groupes terroristes en Syrie et en Irak, dont seule la moitié est revenue. De 2016 à 2024, 12 attentats islamistes ont causé 20 morts et 118 blessés.

L’islamisme, menace numéro un

Pour Ostermann, l’islamisme, dopé par les flux migratoires, représente le danger numéro un pour l’Allemagne. Il asphyxie les cultures, fait annuler festivals et événements sportifs, entrave les libertés, et propage des discours anti-chrétiens et anti-israéliens, souvent teintés de soutien au Hamas. Des « territoires perdus », à l’image de ceux observés en France, voient le jour, où règnent la loi des clans et l’anarchie. Ostermann insiste, balayant un préjugé tenace : la police n’abandonne pas ces zones, elle se contente d’obéir aux ordres politiques. Son slogan claque comme une évidence : sans sécurité, ni liberté ni démocratie. Pour Ostermann, l’heure n’est plus aux diagnostics mais à l’ultimatum. L’Allemagne a franchi le seuil, et ce qui vient ne sera pas une crise, mais un basculement. Son livre ? Le dernier avertissement avant l’effondrement.

Manuel Ostermann, Deutschland ist nicht mehr sicher (en allemand), Éditions Deutscher Wirtschaftsbuch, juin 2025. 256 pages


[1] https://www.nouvelobs.com/monde/20250217.OBS100419/elections-en-allemagne-qui-sont-les-omas-gegen-rechts-ces-mamies-qui-se-battent-contre-l-extreme-droite.html

[2] https://www.lefigaro.fr/flash-actu/allemagne-une-militante-pro-palestienne-expulsee-du-bundestag-20250604

[3] https://www.causeur.fr/uberraschung-l-arc-en-ciel-vire-a-droite-afd-homosexuels-301862

[4] https://fr.aleteia.org/2024/06/17/sans-lui-cest-moi-qui-serais-mort-le-poignant-hommage-au-policier-poignarde-a-mannheim/

Dans la caravane

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Le bouchon de Tourves, Nationale 7. Unsplash.

Monsieur Nostalgie nous envoie une carte postale du Tour de France et en profite pour louer les vertus des « petites » routes. Il dit oui aux départementales !


Quand les températures grimpent, les villes surchauffent et les esprits s’échauffent ; dans les rues de la capitale, les altercations se multiplient, les incivilités polluent aujourd’hui le quotidien de tous les usagers (automobilistes, cyclistes, piétons, chauffeurs, etc.) comme si la courtoisie avait laissé place à l’insulte et à la menace. La cohabitation est ce rêve devenu impossible face à l’égoïsme de chacun. Un mot de trop, un coup de klaxon éruptif, une main levée en signe de désespoir et la situation peut dégénérer, virer au cauchemar urbain. La peur s’installe au volant ou au guidon. À chaque carrefour, le drame sourd. Nous sommes perpétuellement sur nos gardes. Les éclats de voix sont annonciateurs d’une violence sans filtre, ils n’ont plus le charme et le folklore à la Pagnol.

Bas instincts

Plus personne ne semble être maître de ses nerfs. Les citadins finissent par croire que la route n’est que désolation et embrouilles infinies. Qu’elle serait le théâtre seulement des plus bas instincts, l’expression décomplexée de notre face la plus sombre. Alors qu’à l’approche des vacances, une départementale ombragée est la promesse d’un avenir meilleur. Un doux présage. On s’y engouffre, on s’y prélasse et on s’y sent bien. Que les entrailles de notre pays ont fière allure avec leurs champs et leurs haies, leurs vaches et leurs rivières, leurs calvaires et leurs bornes Michelin. Regardez bien ces paysages du Berry, de la Creuse ou du Béarn, ces volutes à travers la campagne, ces îlots de calme et de fraîcheur, loin du fracas, ils dessinent les coutures de notre vieux pays, son armature des temps immémoriaux. Avec eux, on retrouve un peu d’évasion et d’apaisement. L’estime de soi. Ils sont propices à la rêverie et au temps enfin retrouvé. Cette province des bourgs et des villages a tant à nous apprendre, à nous souvenir, à nous rééduquer sur notre façon de conduire et de profiter de quelques jours arrachés à la virtualité assassine. Donnez-moi, durant une semaine, une Peugeot 404 aux ailes tendues ou une Lambretta fatiguée, un scooter à bout de souffle comme dans la chanson de Voulzy, et une route gendarmée par une rangée de platanes, je serai un homme heureux. Car la route et l’automobile n’ont pas toujours été des frères ennemis. Ces deux-là, ensemble, ont façonné un imaginaire collectif, celui des grands départs, des bouchons et de la famille réunie, tout ce qui manque cruellement aux peuples sans repères.

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Glorieuse Nationale 7

Partout en France, dès l’arrivée des beaux jours, la nostalgie des carrosseries anciennes réenchante l’asphalte. Aucun cœur, même le plus sec, ne peut résister à ces cortèges de voitures, de mobylettes et d’estafettes, à la queuleleu, c’est un peu notre tapisserie de Bayeux des heures mécaniques. Ils étaient encore plus de 800 au 43ème Tour de Bretagne début juin dans les Côtes-d’Armor. Les Français ont soif de cette farandole-là. Elle est pleine de vie et d’une communion d’esprit qui sédimente. Le succès de la Nationale 7 en est la preuve. Désormais, on la vénère, on la panthéonise, on lui restitue ses titres de gloire. Elle fait même de la concurrence à la Route 66, cette starlette américaine. Elle fut comme l’a montré un récent reportage à la télévision, l’épine dorsale gastronomique des Trente Glorieuses, le passage de témoin des mères nourricières aux chefs étoilés. On y mangeait bien et elle faisait partie de la magie du voyage. Elle était Le voyage. La route et les autos, cette longue histoire se perpétuera en juillet dans la caravane publicitaire du Tour de France. Elle passera peut-être par chez vous, avant le peloton et les hélicos de l’organisation. Vous ne la verrez pas dans le poste mais elle attire des milliers de personnes venus assister au dernier spectacle gratuit à retentissement mondial. Avec ses engins déguisés en forme de tasse à café ou de baril de lessive, elle est joyeuse, amusante, désuète, donc essentielle.

Quand elle traverse nos provinces et qu’elle est acclamée par des enfants, l’émotion nous étreint. Ce n’est rien, presque rien, et pourtant l’espoir renaît.

Tendre est la province

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Cinéma: l’envers du décor

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Le réalisateur Stanley Kubrick, 1er mai 1984 © MARY EVANS/SIPA

Les films nous racontent des histoires. Mais qui nous raconte celles des films ? Journaliste collaborant à Première et Télérama, l’historien du cinéma Olivier Rajchman revient sur des tournages mythiques du 7e art dans son dernier livre. Un ouvrage qui a changé le regard que notre chroniqueur porte sur le cinéma


On se rend dans une salle de cinéma, on regarde un film, on en sort ébloui ou déçu ou, pire, indifférent et on s’imagine peut-être qu’il n’y avait là rien d’extraordinaire. Un spectacle comme un autre. Quand on lit le remarquable livre L’Aventure des films, d’Olivier Rajchman, on comprend tout. Les très grands films sont des tours de force, des miracles.

Une sélection de vingt films

Pour apprécier cet ouvrage critique de haute volée, je l’admets volontiers, il convient d’être un amateur épris de cinéma, attentif à tout ce qu’il a apporté et sensible à son histoire, de l’éclat des stars aux modestes mais irremplaçables contributions des seconds rôles. Mais il est vrai que la connaissance du cinéma devrait faire partie de la culture générale, tant elle permet une vision du monde, de la société et de l’être humain, qui s’ajoute aux formations plus classiques.

Dissipons d’emblée un malentendu qui a failli m’égarer. Olivier Rajchman, dans son choix des vingt films qu’il considère comme emblématiques, ne se prononce pas sur leur excellence, leur supériorité qualitative mais explique parfaitement que chacun d’eux a été décisif dans la création d’un genre et qu’à ce titre il a sa place dans ce panthéon. Aussi bien « Autant en emporte le vent » que « À bout de souffle », « Chinatown » que « Barbie », « Le Dernier métro » que « Chantons sous la pluie » par exemple.

En lisant Olivier Rajchman, j’ai abandonné l’approche superficielle que j’avais du cinéma. J’ai maintenant conscience qu’il s’agit, dans tous les cas, d’un travail colossal et très éprouvant pour les nerfs. Tous ceux qui participent à l’élaboration du film passent par des phases de désespoir, avant d’en être très rarement satisfaits !

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Je n’imaginais pas les épreuves, la minutie, le perfectionnisme, l’ampleur et la fatigue des tâches qui conduisent, dans le meilleur des cas, au sublime, ou au moins imparfait possible. La collaboration constante et infiniment créatrice entre le producteur, le ou les scénaristes et le réalisateur est impressionnante parfois de solidarité, souvent d’antagonismes surmontés, d’écoute, de tolérance, d’échanges puissants et sans concession, d’abandons puis de reprises, de pessimisme amendé par un optimisme que le travail fourni fait surgir.

Éprouvantes entreprises

Je n’aurais garde d’oublier les acteurs qui, choisis pour ce qu’ils vont apporter au film – sans le moindre doute pour certains, pour d’autres après moult hésitations et revirements -, peuvent faire preuve d’un caractère, d’une implication ou non, qui compliquent ou facilitent le processus de création.

Le réalisateur est le personnage central de cette magnifique et éprouvante entreprise, de sa conception à peine esquissée jusqu’à sa diffusion en majesté. On est effaré par le nombre d’incidents techniques, personnels, humains et psychologiques, que doit régler un metteur en scène appelé à se muer en médecin des âmes et des sensibilités avant d’être un maître dans son activité artistique. Et tous les réalisateurs n’ont pas la politesse, la patience et la tranquillité constante d’un François Truffaut !

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On ne peut pas non plus passer sous silence le rôle capital de l’auteur de la musique, qui a son idée se confrontant parfois à celle du réalisateur. Dans les moments de grâce, la musique de film n’est pas un ornement mais une puissance à part entière comme Ennio Morricone l’a toujours voulu.

Il faut rendre justice à l’infinie richesse de ce livre, de ses chapitres qui pour chaque film, mélangeant genèse, construction intellectuelle, détails techniques, approfondissement des personnages, anecdotes de tournage, focalisation sur les acteurs, histoire des rapports entre producteurs, scénaristes, réalisateurs et compositeurs, offre un panorama complet et passionnant de la tâche himalayesque d’une œuvre menée à terme ! Je ne traiterai plus jamais le cinéma à la légère.

448 pages.

L'Aventure des films: Histoire de vingt tournages mythiques

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