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Gros comme un Turc

Missionnés pour peser la population dans la rue, les agents de santé turcs obéissent à la dernière lubie hygiéniste d’Erdogan, pour qui la minceur est une vertu patriotique. Mais entre austérité alimentaire et culpabilisation publique, le président ne confond-il pas lutte légitime contre l’obésité et contrôle des corps façon autocratie néo-ottomane ?


La Turquie a récemment lancé une campagne nationale spectaculaire : arrêter les passants dans l’espace public pour les peser et mesurer leur tour de taille. Munis de balances et de rubans à mesurer, des agents de santé sillonnent les 81 provinces du pays dans l’objectif affiché d’évaluer 10 millions de personnes avant le 10 juillet. Si la démarche repose sur le volontariat, la mise en scène, elle, est éminemment politique.

Car pour le président turc Recep Tayyip Erdogan, l’obésité est une grande cause nationale. Il appelle ses concitoyens à manger moins de pain, à éviter sucre et produits transformés, et à privilégier une alimentation locale, nationale et saine. Le président n’hésite pas à commenter publiquement la silhouette d’enfants ou de ministres qu’il croise, érigeant la minceur, l’autodiscipline et la sobriété alimentaire en vertus civiques. Le citoyen idéal selon Erdogan est, pour utiliser un terme du XIXe siècle, « sec », pieux et résolument opposé aux excès venus d’Occident.

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Il est vrai que les chiffres interrogent. Depuis son arrivée au pouvoir en 2002, l’obésité qui concernait 22,3 % des adultes en 2000 atteindrait cette année 37,2 % !

D’abord, durant les années de forte croissance économique (2004-2013), une alimentation plus riche en calories est devenue plus accessible, notamment aux classes moyennes émergentes, base électorale d’Erdogan. Puis, la crise économique venue, l’alimentation s’est appauvrie sous une autre forme. Des produits de qualité, trop chers, ont été remplacés par des aliments industriels bon marché. Dans ce contexte, les injonctions présidentielles à « manger moins » et à « marcher plus » font penser à une certaine reine de France qui s’était risquée à des recommandations nutritionnelles. Cela ne lui a pas réussi.

Tournez manège!

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Cet été, bravons tous les interdits en allant voir F1 le film avec Brad Pitt en pilote sexagénaire. Le blockbuster met à mal toutes les théories sur l’âge, le sexe, la transmission, le risque et le plaisir de rouler très vite à l’air libre…


F1 le film est un cas d’école. Chimiquement pur d’une aliénation masculiniste. Le retour des heures les plus sombres. Tout un travail de réarmement écologique et civilisationnel mis à mal durant deux heures et trente minutes. Toute la prise de conscience de ces quinze dernières années faite de colloques, de tribunes, de pétitions, de marches, de procès, toutes ces actions militantes et salutaires n’auront donc servi à rien. Que la lutte est vaine face à l’état-profond des mentalités. Ils sont inguérissables. Les Hommes ne sont que des enfants capricieux, incontrôlables et vaniteux, leur rééducation est tout bonnement impossible. Tous ces efforts pour réinitialiser les garçons et en arriver à un tel résultat : voir des bagnoles s’affronter sur une piste, se délecter d’une bataille entre mâles alpha courant vers la victoire dans une société hyper-marchande à haute teneur technologique, cet archaïsme sans nom est un aveu d’échec.

Joujou pour attardés

Pendant que la planète brûle, des réfractaires à la décroissance heureuse tentent d’améliorer leur record du tour en jouant sur les appuis aérodynamiques ou la stratégie des arrêts aux stands. C’est pitoyable ! Ce long-métrage a-t-il été commandité par des forces réactionnaires à la manœuvre dans une Amérique viriliste revancharde ? Est-il à la solde d’une coalition ultra-carbonée réunissant constructeurs automobiles, pétroliers et manufacturiers ? N’y a-t-il pas dans son populisme décomplexé les germes d’une révolution égotiste où les plus bas instincts (courage, puissance et dévouement) seraient célébrés dans l’arène des circuits ? Les jeux du cirque n’ont plus cours depuis l’édit de Constantin en 326. Certains demanderont des comptes ou, à minima, une enquête pour révéler le nom des responsables de cette grande opération décadente à base d’accélérations poudreuses, d’accidents spectaculaires et de beaux mecs qui courent le torse nu, dans une érotisation qui va à l’encontre d’une parité mormone. Comment a-t-on pu laisser tourner une telle ode sauvage au plaisir de conduite et à l’absence de conscience sociétale ? Quel échec pour tous les redresseurs et les propagandistes d’une société liquide qui voudraient annihiler les différences.

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Ce film sur les écrans depuis mercredi coche toutes les cases d’un objet cinématographique passéiste à fort relent jouissif où l’adrénaline et la testostérone disputent un bras de fer dans un bar suburbain abandonné d’un vieux pays industriel. Un joujou pour attardés qui font vroum vroum dans leur chambre au lieu de s’inquiéter de l’inclusivité dans les sports mécaniques. Une teuf-teuf pour fous du volant qui ne se sont pas encore convertis au vélo-cargo électrique aussi encombrant dans les rues de Paris qu’un pick-up dans l’Utah. Il fallait oser réaliser un film dans l’une des rares disciplines, la Formule 1, où les femmes n’ont pas encore leur baquet réservé. Il fallait oser mettre en vedette un homme de plus de 60 ans, désinvolte et individualiste, séduisant et vénéneux dans son approche hédoniste de ce sport extrême ; sans calcul et sans reproche, ne courant ni après l’argent, ni après la foule, ce cow-boy solitaire de l’asphalte marche vers un horizon toujours inconnu. Il roule dans un van surélevé et porte des chaussettes dépareillées. Mais Brad possède la classe de ses aînés, il creuse le sillon de Steve McQueen et de Paul Newman. C’est parce qu’il est seul, qu’il a décidé d’être seul, que sa démarche nous émeut. Il fallait oser placer ce film sous le signe de la transmission, le vieux pilote pas toujours très sage tentant d’inculquer son savoir à un rookie turbulent, ce principe d’éducation étant banni de nos jours. Il fallait oser mettre de la verticalité dans l’horizontalité béate. Il fallait oser filmer des monoplaces dans un environnement technique complexe sans abuser d’images virtuelles. Il fallait oser sacraliser l’autorité d’une mère qui, on le sait depuis Camus, est toujours supérieure aux enjeux des sponsors et des réseaux.

Top Gun de la terre ferme

Ce film peut dérouter les tenants du manichéisme ambiant. Il vient d’Hollywood, il est scénarisé et n’en reste pas moins proche de la réalité des Grand Prix qui se disputent chaque dimanche durant la saison, les freinages en bout de ligne droite tapent dans le cœur, la force centrifuge est apnéique, les chicanes brouillent la vue ; ce top-gun de la terre ferme est un manège en forme d’exutoire. Profitez-en avant que ce genre de production ne soit interdit. Dans la salle, toutes les générations, tous les sexes, toutes les classes, sont réunis. En F1, existe l’effet de sol, au cinéma on appelle ça l’effet Brad.

En ce début d’été, un peuple sous canicule en perte de repères a seulement besoin d’un bon film d’action, pas trop moralisant, à l’esthétique soyeuse, qui ne crache pas trop sur le passé et ne mette pas le spectateur dans la peau d’un procureur.

2h 36m. Réalisation : Joseph Kosinski

Tendre est la province

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Le maire de Nanterre nous donne le coup de grâce!

Raphaël Adam choque en proposant d’installer dans sa commune une plaque commémorative pour Nahel Merzouk, mort lors d’un refus d’obtempérer. « Merci d’être là, merci d’être mobilisés. On restera ensemble jusqu’à ce qu’on obtienne justice pour Nahel » a-t-il ajouté devant des manifestants, dont sa mère qui déclare de son côté: «Je suis obligée de tenir, pour mon bébé, pour Allah et pour vous. On continue ! Justice pour Nahel»… Commentaire.


Ce n’est pas né d’aujourd’hui mais le maire de Nanterre pousse au paroxysme une dérive qui n’a cessé de gangrener notre société. En substance, la médiatisation de la malfaisance, l’hommage pervers et complaisant rendu aux transgresseurs de toutes sortes.

Au prétexte de l’information, que de déviations subtiles et malignes vers ce qui peut être considéré par l’auditeur et le téléspectateur moyen comme un éclat indécent projeté sur le délinquant voire le criminel ! Je songe par exemple à ces enquêtes rapides où la famille et les voisins d’un tueur sont questionnés et où on a droit à des réponses ridiculement naïves. Comme si le crime avait existé avant son heure et qu’il allait naturellement s’arrêter après !

Stupéfiant

Il y a une fascination médiatique pour cet univers qui représente en effet le comble du contre-pouvoir, contre la normalité, l’honnêteté et le respect d’autrui…

Le monde au quotidien n’est pas si irréprochable qu’on puisse, avec un sadisme compulsif, focaliser en plus sur ses horreurs et ses turpitudes ! Je ne parviendrai jamais à m’habituer à cette curiosité de mauvais aloi, portant aux nues ce qu’on devrait laisser dans l’ombre par hygiène morale, salubrité sociale.

Qu’on songe par exemple à la délirante focalisation de quelques semaines sur Mohamed Amra après son arrestation, mêlant des données utiles à une profusion de nouvelles à la fois préjudiciables aux enquêtes et indécentes par leur tour au mieux ambigu, au pire positif.

A lire aussi: Nahel: la dinguerie judiciaire actuelle a une histoire

Mais qui pouvait prévoir ce coup de grâce porté par le maire PCF de Nanterre, Raphaël Adam ? Je ne l’ai pas cru tout de suite tellement c’était stupéfiant ! Dans quelle tête municipale sensée a pu germer l’absurdité d’une plaque commémorative en hommage à Nahel ?

Ce jeune homme a trouvé la mort à la suite de ses transgressions répétées au cours de quelques heures : véhicule volé, avec de fausses plaques, conduite sans permis, deux refus d’obtempérer.

Le maire de Nanterre aurait dû d’abord, à défaut d’être sensible à l’indécence absolue de cette plaque, s’abstenir par délicatesse judiciaire. En effet, un procès criminel rendra bientôt son verdict sur l’accusation de meurtre imputée au fonctionnaire de police Florian M. Pour ma part j’espère qu’il en résultera que cette qualification n’a aucun sens et que les magistrats et citoyens concernés sauront ne pas apposer confortablement sur les difficiles réalités de l’activité policière l’abstraction d’un droit en chambre, la facilité irresponsable du « il n’y avait qu’à »…

Une mère qui finit par nous choquer

En tout cas il est symptomatique que ce maire ait préjugé et rendu d’une certaine manière encore plus choquant l’activisme de la mère de Nahel, au-delà de la douleur personnelle compréhensible de cette dernière.

Quand j’affirme que ce maire « nous » a donné le coup de grâce, je veux signifier par là qu’il plonge notre société tout entière dans un hommage public qu’il souhaite rendre à quelqu’un qui nous a fait honte à tous. Il aurait dû considérer ce que cet honneur évoqué pouvait avoir d’offensant pour cette « société des honnêtes gens » qu’a mise si justement en avant Bruno Retailleau. Ou faut-il admettre qu’être maire, et maire à Nanterre, justifie les pires affronts au bon sens, à la décence sociale ? Une société si gangrenée qu’elle célèbre ses délinquants ou ses criminels, même tués au cours de leurs méfaits, est profondément malade. Proche de se tuer elle-même. Le maire de Nanterre va-t-il recouvrer la raison ?

Finale du Top 14: les trois coups de pied qui ont fait le match

Toulouse s’est imposé face à Bordeaux samedi soir et repart du Stade de France avec le bouclier de Brennus ! Statistiques d’un match mémorable.


A la 80ème minute, juste avant que l’arbitre ne s’apprête à siffler samedi au stade de France le glas de la finale de rugby du Top 14, le Stade toulousain avait match gagné. Quand, soudain, il commet une fatidique faute, mais une aubaine inespérée offerte à l’Union Bordeaux-Bègles (UBB) qui lui avait bravement tenu la dragée haute. Impavide, Maxime Lucu (dont le patronyme en basque veut dire bois), demi-mêlée et buteur de l’équipe, la passe et met les deux équipes à égalité à 33-33.

Finale d’anthologie

Du jamais vu depuis 20 ans[1], les deux finalistes se départageront au terme de deux prolongations de 10 mn chacune.

A la 95ème minute de celles-ci, Thomas Ramos, l’impérial arrière toulousain, donne l’avantage à son équipe alors que les deux parties faisaient jeu égal, et assez échevelé, transforme une pénalité, puis donne le coup de grâce à Bordeaux-Bègles, en en passant une autre à la 100ème, portant le score à 39 à 33, et mettant fin, le temps étant expiré, à un match « époustouflant », selon Sud-Ouest, le quotidien bordelais où les deux protagonistes « se sont rendu coup pour coup. ».

Ainsi, le sort de cette finale d’anthologie s’est décidé sur trois coups de pied dans un sport qui se joue essentiellement à la main, sans pour autant se résumer à ces derniers. Chacune des équipes a marqué trois essais. Leurs deux buteurs respectifs, Ramos et Lucu, ont eu 100% de réussite (9/9 tentatives pour le premier marquant 24 points sur les 39, et 7/7 pour le second inscrivant lui 18 points sur les 33). Ramos a été élu « homme du match ».

Les deux équipes méritaient la victoire, mais c’est la plus sereine, la plus maître de soi car la plus expérimentée qui s’est imposée. Jeune équipe qui va fêter ses 20 ans la saison prochaine, Bordeaux ne disputait que la seconde finale de son histoire et n’a décroché son premier titre il y a à peine un peu plus d’un mois en remportant la coupe d’Europe après avoir justement sorti Toulouse en demie.

Alors que Toulouse, sur les quinze dernières éditions, a empoché sept titres de champion de France. Cette victoire de samedi à l’arrachée est sa troisième consécutive en finale, sa cinquième sur les six dernières disputées depuis 2019. Le titre n’a pas été décerné en 2020 pour cause de covid. Elle a en tout emmagasiné vingt-quatre boucliers de Brennus dans son histoire. Elle a connu une saison exceptionnelle : en 27 matches de championnat, elle a inscrit 930 points, soit une moyenne de 36 par rencontre, un record, trois de moins que samedi, c’est dire le niveau de sa prestation ce soir-là.

Deux cartons jaunes pour les Bordelais

Les Toulousains ont imposé la suprématie de leurs avants qui ont neutralisé les trois-quarts bordelais, dits « la Patrouille de France », bien que la plus belle phase du match revienne à l’un d’eux. Sur une petite diagonale au pied rasante de Lucu, Damian Penaud, à la vitesse d’une flèche, a été déposé l’ovale entre les poteaux. « Un bijou de clairvoyance », l’a qualifiée le chroniqueur de Sud-Ouest Denys Kappès-Grangé. Mais réaliser des bijoux ne font pas la fortune d’une équipe en rugby.

Si l’UBB a perdu, c’est sa faute pour les avoir cumulées. Contre trois au Stade toulousain, elle en a commis treize ce qui lui valu deux cartons jaunes, autrement dit sur les 80 minutes du temps réglementaire, elle a joué pendant 60 minutes à 14 contre 15, ce qui est un substantiel avantage offert à la partie adverse.

 « Dur de battre Toulouse quand on concède deux cartons jaunes », a convenu l’entraîneur bordelo-blégois, Yannick Bru, surtout que les deux sanctionnés ont été des avants, Guido Petti et Pierre Bochaton, le point faible des Girondins, face une partie adverse dont les trois premières lignes sont justement sa carte majeure, avec bien sûr son arrière Ramos au pied d’or.

« La frustration est énorme, a concédé Lucu, le capitaine de l’UBB. On commet une petite faute sur un ballon haut. Le match se joue sur ça. On a un petit peu craqué à la fin ».

Justement, on laissera le mot de la fin Denys Kappès-Grangé qui écrit avec pertinence dans l’entame de son article de dimanche : « Il n’est pas interdit de se demander si la détresse ressentie par les Bordelais n’est pas plus grande aujourd’hui que celle qu’ils ont éprouvée il y a un an lors de leur humiliation à Marseille ». Pour sa première finale face déjà à Toulouse, ils avaient encaissé un magistrale dérouillée (59-3).

Oui, que vaut-il mieux ? Perdre par 6 points d’écart ou 56 ? Question presque métaphysique. En tout cas, avec Bordeaux-Toulouse se profile désormais un « clasico » de l’ovalie hexagonale…


[1] Le 11 juin 2005 le Biarritz olympique (BO) l’avait emporté sur le Stade français par 37 à 34, au terme des 100 minutes de jeu.

Le spectre des tocards

86% des Français sont très pessimistes sur l’avenir du « vivre-ensemble » et du civisme.


Le sondage IFOP du 25 juin ne surprend personne, le fond de l’air effraie : individualisme, crétinisation numérique, effondrement éducatif et culturel, croissance en berne, chaos migratoire, violences, narcotrafic, explosion de la dette (3345,8 milliards d’euros, plus 40 milliards en trois mois, 114%, du PIB)… François Bayrou tient son cap, ne fait rien : c’est plus prudent. Emmanuel Macron gesticule comme un hanneton sur le dos. Au fond du bocal, il cherche de l’oxygène. La fin de règne est morose. Encore deux ans. Les Diadoques ont faim. Darmanin, Attal, Philippe : le sprint est lancé !

Un grand concert d’idées brisées

Colbertiste, libérale, patriote, européenne, identitaire, prolo, aristo, orléaniste, bonapartiste, Mariniste, Jordanienne, Jacobine, Girondine, éclatée, fusionnée… Dans le purgatoire depuis quinze ans, les droites hésitent, varient au gré des calculs électoraux et enquêtes du Parquet National Financier. Bruno Retailleau a le vent en poupe. Combien de temps restera-t-il éligible ? La BRI, Tracfin, le Syndicat de la Magistrature et Mediapart sont sur la piste de détournements et financements illicites de Carambars, dans un collège vendéen en 1970.

Les gauches ne vont pas mieux. Olivier Croquignol, Nicolas Filochard et Boris Ribouldingue, se disputent le cadavre du PS. LFI joue cartes sur table, veut faire exploser la nation, sa langue, son histoire, créolise, libanise, vend le pays à l’étranger, à la découpe. Sur le segment porteur mais encombré du lacrymal-victimaire-boulgour-bio, Raphaël Glucksmann a un programme attrape toutous, fusionne les saveurs, enfile les naïvetés et slogans bienveillants comme des colliers de nouilles. À son crédit, la dénonciation de l’ours russe qui menace l’Europe.

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Excédé par les casseurs, les crises de nerfs des succubes, harenguières insoumises, lazzaroni, la chienlit, un quarteron de généreux à la retraite, vieux de la veille, en appellent au consensus et à la modération. Trop, c’est trop ! 

Les forçats de la déroute

Poulidor tranquille de la Social-démocratie, Bernard Cazeneuve plaide –affettuoso allargando- « le retour de la raison en politique, le dépassement des clivages stériles, au service de l’intérêt général ». Son truc c’est « une gauche républicaine, européenne et réformiste, qui refuse tant les outrances que les renoncements ». Un chien parmi les loups, c’est le titre intriguant de son essai. Milou en mai ? Rintintin ? Cubitus ? En 2024, sous le même titre, Marie-Jeanne Rioux racontait les amours d’un pilote d’hélico et d’un biologiste dans le Nunavut canadien. C’est blizzard.

Michel Barnier (Ce que j’ai appris de vous) est porté par une noble conviction : « Chacun est nécessaire ». Il ne donne pas de leçons, mais transmet celles que les Français lui ont inculqué. Voter pour lui, c’est voter pour nous. Bien joué, Michel.

Edouard Philippe frôle le collapsus. Qui paiera Le prix de nos mensonges ? « Nous nous racontons des histoires jolies, rassurantes, glorieuses parfois, qui nous empêchent de proposer au pays des solutions utiles. Pendant que nous nous mentons, les autres avancent, transforment, adaptent, innovent. Et nous nous glosons… Où va-t-il chercher tout cela, Edouard ? Dans Causeur ? Qu’a-t-il fait pendant trois ans ?

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Dominique d’Arabie a trouvé son Chemin de Damas, lance un parti (« La France humaniste »), nous alerte dans Le Pouvoir de dire non. « Il est temps de se réveiller. De déchirer les voiles d’illusions, de renoncer aux reflexes politiciens … Dire non, à ce qui porte atteinte à l’avenir de l’humanité et à la dignité de la république ». Fini les grands moulinets à la Cyrano. De Guiche de la Mirandole Galouzeau de Villepin a muri son projet, affiné depuis 18 ans (son départ de Matignon) : « Une politique d’équilibre et de mesure… Créer les conditions de la recherche du consensus… L’immobilisme, il faut tout faire pour essayer de l’amender ». C’est l’allure finale, les visages du cirque.

Des éléphants, apparatchiks, Esterhazy à l’abri des lambris, s’inquiètent, accusent ! Les pieds-nickelés de la remontada dînent du mensonge et soupent du scandale, s’ébattent dans les Pactes, Grenelle, dénis d’initiés, le « toutlemondisme », des rapports bidons de chercheurs islamo-trotskistes, à l’Hamas et au CNRS. Nos élites lotophages se gargarisent de schibboleth de pacotille : « modèle français », « exception culturelle », repoussoirs qui font éclater de rire à l’étranger. Hors-sol, incompétents, confits dans l’idéologie, aux commandes depuis des générations, ils ont cramé la caisse, plombé le pays, mais restent intarissables sur les leçons de bonne conduite, recettes de potions magiques pour combattre le populisme et défendre l’Etat de droit. Marianne est dans la fosse.

Pas de panique. Il y a le ressenti et la réalité. Les sociologues de France Inter et Télérama sont formels. Dans le passé, le pays a traversé des pics de violence et d’angoisse : Paris en juin 40, en juillet 1793, en août 1572… Haut les cœurs ! Le taux d’exécution des OQTF pourrait atteindre les 10% en 2055. Elisabeth Borne concocte un plan « Zéro machette, Zéro Coke » dans les salles de cours. Sorbonne Université lance un Master 2 d’influenceurs, spécialité « Rap.t-Tag-Crypto ». L’avenir du pays c’est l’éducation, la culture, la jeunesse. 6/20, c’est la barre d’admissibilité pour le concours de professeurs des écoles dans l’académie de Créteil.

« Les hommes sentent dans leur cœur qu’ils sont un même peuple lorsqu’ils ont une communauté d’idées, d’intérêts, d’affections, de souvenirs et d’espérances ». Voilà ce qui fait la patrie. Voilà pourquoi les hommes veulent marcher ensemble, ensemble travailler, ensemble combattre, vivre et mourir les uns pour les autres » (Fustel de Coulanges). Tout s’explique.

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Mélenchon ou l’abandon programmé de la France

Destruction de la France : Mélenchon et ses limites


Dans sa destruction de la France française, Jean-Luc Mélenchon est clair, méthodique, cohérent. Depuis sa conversion à l’islamophilie, le leader LFI illustre la réflexion de Chesterton : « Le fou n’est pas celui qui a perdu la raison. Le fou est celui qui a tout perdu excepté la raison ». Lui qui, en 2010, qualifiait le voile islamique de « pratique répugnante et obscène », s’est fait, depuis, le théoricien rigoureux de la conquête musulmane. Tout à son projet électoraliste d’une « nouvelle France » métissée, également rêvée par Dominique de Villepin, Mélenchon banalise le voilement des petites filles, dénonce l’islamophobie derrière la critique de la charia, nazifie le sionisme qui résiste à ses ennemis, invite les clandestins qui traversent la Méditerranée à « épouser nos filles et nos gars ». Il propose même de brader la langue française : « Je préférerai que l’on dise que nous parlons tous le créole », a-t-il dit l’autre jour à l’Assemblée nationale, lors d’un colloque sur la francophonie. Le candidat de l’extrême gauche à la présidentielle a choisi de promouvoir le basculement identitaire de la nation – son grand remplacement en somme – en l’ouvrant sans cesse à une immigration maghrébine et africaine dont il sait, par l’effet du nombre, qu’elle ne modifiera pas ses mœurs en foulant le sol français. Qu’est-ce que coloniser un pays sinon s’y installer en refusant de changer sa propre histoire ? Non content d’être le parti de l’étranger, LFI est celui de l’islamisation et de l’africanisation de la nation. Si rien ne vient faire obstacle à cette disparition espérée d’un peuple enraciné, coupable de vouloir se protéger de ses envahisseurs et de leurs complices à prénoms français, l’histoire donnera raison, au mitan de ce siècle, à Mélenchon. Mais tout est encore réversible.

A lire aussi: «La Chute de la maison Sciences-Po», de Caroline Beyer: la fabrique des élites auto-proclamées

Car il reste une lacune, dans la logique glaciale de l’idéologue : son raisonnement ne tient que si le peuple indigène demeure tenu à l’écart de son destin. Or il ne suffit pas de décréter, comme Sandrine Rousseau jeudi, que « les Français de souche, ça n’existe pas » pour les faire disparaître tels des mouches agaçantes. Ces Français-là sont encore, aux trois-quarts, largement majoritaires. C’est pourquoi il est devenu urgent que l’immigration de peuplement, qui accélère le naufrage du pays, apparaisse enfin comme le sujet prioritaire d’un référendum. Au-delà du militant pro-islam qu’est Mélenchon, c’est tout un monde politique qui, depuis cinquante ans, a avalisé le projet d’une société ouverte, multiculturelle, indifférenciée. Jamais aucun peuple d’Europe n’a été invité, hormis le référendum français de 2005 passé à la trappe et le Brexit britannique, à se prononcer sur son avenir.

Pourtant tous les sondages montrent l’attachement des gens ordinaires à leur patrie, leur mode de vie, leurs traditions. Le mérite du chef de LFI est de confirmer, dans son objectif de la table rase, que la première des menaces pour le pays vient de l’intérieur, c’est-à-dire de ces traîtres qui veulent enterrer la France et que j’avais dénoncés en 20201.

Dans son discours de Munich du 14 février, le vice-président américain, J. D. Vance, a rappelé qu’il était encore loisible de « changer de cap, de donner une nouvelle direction à notre civilisation commune », en écoutant simplement la voix des citoyens oubliés. Les bâillonner encore serait criminel.

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  1. Les Traîtres, Edition Pierre-Guillaume de Roux ↩︎

Comment écrire un roman historique — et pourquoi

Lassé d’écrire des essais sur l’Ecole que bien des gens approuvent mais que personne n’applique, notre rédacteur, depuis l’année dernière, est revenu à ses premières amours — le roman. Et plus précisément le roman historique. « Mais pourquoi diable ne pas parler de la France d’aujourd’hui, avec une jolie fiction pleine de LGBT++ et de « racisés » de toutes les couleurs ? Le présent vous dégoûte à ce point que vous alliez vous réfugier au XVIIe siècle ? » Réponse circonstanciée.


Il n’y a que deux façons d’écrire un roman historique.
– Soit vous choisissez une période indéterminée, sur laquelle personne ne sait trop rien — par exemple les « dark ages » qui sévirent en Grèce entre le XIe et le VIIIème siècle av. JC, ou les temps de désordre qui suivirent, en Angleterre, la chute de l’empire romain – toute la légende arthurienne est sortie d’un tel choix. « Entre le temps où les océans engloutirent l’Atlantide, et l’avènement des fils d’Arius, il y eut une époque inouïe, où s’avança Conan, destiné à poser la couronne d’Aquilonia sur un front troublé… » Ainsi commence la légende de Conan le Barbare, de Robert E. Howard (1906-1936), l’inventeur de l’heroic fantasy. Ou La Guerre du feu, de Rosny Aîné : en 1911, année de sa publication, on ne savait rien de bien certain sur les « âges farouches »…
– Soit vous prenez au contraire une période que vous connaissez à fond, et pour laquelle vous avez une attirance irrésistible. Pour moi, les XVIIe et XVIIIe siècles. Et là, historique et le décor.
(Il y a bien sûr le cas de Dumas, qui connaissait toute l’Histoire de France et a écrit des romans qui couvrent un champ considérable, du XVIe au XIXe siècle. Mais qui oserait se comparer à un tel géant ?)

Évidemment, le problème est d’informer assez le lecteur inculte d’aujourd’hui sans trop avoir l’air de lui faire un cours. Et d’entremêler à l’Histoire une fiction crédible — sans pour autant s’astreindre à n’user que du vocabulaire du temps, mais en évitant les anachronismes.

L’Histoire — la grande, celle que l’on étudiait jadis à l’école — est le tissu de votre livre. La fiction, c’est la coupe, et le style, ce sont les coutures. En pratique, 90% de votre livre est écrit par l’Histoire, mais ne fonctionne qu’après adjonction d’un fil fictionnel. Tout comme les personnages historiques ne reprennent vie que lorsqu’on les confronte à des êtres de fiction. Dans Soleil noir, paru l’année dernière, Louis XIV ou le Grand Condé étaient les interlocuteurs de Balthazar Herrero, descendant (imaginaire) de Maures espagnols réfugiés en France (ça, c’est un fait vrai, une partie de ma famille en est issue), médecin rompu à tout ce que l’art médical faisait de mieux vers 1685, non seulement à Montpellier, son alma mater originelle, mais à Pise ou en Orient. Pézenas, Versailles ou le château d’Enghien forment le décor « historique », les contrées demi-sauvages qui séparent les Cévennes de l’Île-de-France également.

A relire, du même auteur: Mousquetaires et misérables : Dumas ou Hugo ?

Dans Les Nuits de Topkapi, qui vient de sortir, j’ai déplacé ce héros-médecin dans le décor tourmenté de la Constantinople turque, puis dans les déserts de Syrie et de Judée — ou de Palestine, comme disaient les Romains. Ça tombe bien, j’y suis allé.
Et le troisième tome sur lequel je travaille se passera, pour l’essentiel dans les collines des Cévennes pendant la guerre des Camisards.

Quant au reproche selon lequel je serais la première victime (ou le premier bénéficiaire) de cette littérature d’évasion, il tombe à plat lorsqu’on se souvient que Georg Lukács a analysé la « double historicité » des romans -historiques. Ils ne se contentent pas, explique le grand critique hongrois des années 1950-1960, de raconter les siècles passés, ils parlent, de biais, du siècle de leur rédacteur. Dumas, déçu par le côté « bourgeois » de Louis-Philippe, est allé chercher au XVIIe siècle les figures héroïques qui lui manquaient pour se satisfaire de la réalité — et au passage il a ressuscité son père, réincarné en quatre mousquetaires incarnant l’habileté aux armes, la séduction, la force pure et la noblesse d’âme, qualités reconnues du général Dumas. Quand mes héros traversent la Palestine, ils rencontrent fort peu d’Arabes et force Juifs et Chrétiens — les voyageurs d’époque, comme Hadrian Reland, en attestent. De quoi disqualifier les imprudents d’aujourd’hui qui prétendent que c’était une terre arabe depuis le début des temps.
Et si les intrigues de sérail de Topkapi, le château des pachas turcs, les trahisons et règlements de comptes, les révolutions de palais, les alliances étrangères inattendues mais mûrement pesées, ont un écho dans l’actualité, c’est que nos hommes politiques — de bien petit niveau, convenons-en — devraient de temps en temps se retourner vers l’histoire pour éviter de faire et de dire de grosses bêtises.
Quant à l’amour, c’est le piment intemporel et universel — ou parfois une nostalgie assez forte pour faire revivre vos fantômes personnels, qu’il s’agisse de créatures rencontrées jadis ou d’héroïnes de papier qui alimentèrent vos songes humides.

L’intention pédagogique n’est pas tout à fait absente. Dans Soleil noir j’expliquais comment on rouait vif. Et dans Topkapi, vous apprendrez le processus exact d’un empalement — qui contrairement à ce que croit la multitude, ne passait pas par voie anale…

Reste le plaisir que l’on a à l’écrire, qui doit procurer un plaisir analogue au lecteur. Si vous suez sang et haut à rédiger, le lecteur aura fort à faire pour vous lire. En toutes choses, soyez légers — et enthousiastes.

Soleil noir

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Gay Pride: cherchez l’intrus

Comme ils déclenchent déjà des tempêtes à chaque pas, les militants du collectif Eros n’ont vraiment pas besoin de confettis à la gay pride… De droite, ils préfèrent le drapeau tricolore aux slogans woke ou pour Gaza. Tenu à distance du cortège principal, où les autres manifestants menaçaient de tout boycotter si on le laissait participer samedi, le collectif nationaliste a finalement pu défiler à l’abri des CRS. Notre contributrice a suivi ces militants identitaires.


Le 28 juin à Paris, comme chaque année, les trottoirs ont tremblé sous les chars bariolés de la Marche des fiertés. DJ, slogans bien-pensants (« ACAB : All Cops Are Barbecue »), drapeaux multicolores et nuée de collectifs militants : un rituel bien huilé, devenu passage obligé pour élus en mal de hashtags et étudiants en sciences molles. Le thème de cette année ? « Contre l’internationale réactionnaire ». Une formule digne d’un congrès trotskiste, censée englober pêle-mêle Trump, Orban, Le Pen et tout ce qui ne pense pas comme les rédactions militantes.

Les collectifs présents – demandeurs d’asile, pro-légalisation du cannabis, soutien à Gaza, transactivisme radical – donnaient l’impression que la cause homosexuelle n’était plus qu’un prétexte parmi d’autres pour dérouler l’agenda woke.

On est très loin des combats des années 80, quand les militants gays se battaient pour la survie face au Sida, pour le droit d’aimer sans honte, pour ne pas être licenciés, tabassés ou ignorés par la médecine. Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’obtenir des droits, mais de les conditionner à l’appartenance à une tribu idéologique. Être homosexuel ne suffit plus : il faut être du bon bord.

Mais cette édition 2025 a connu un accroc. Un intrus a troublé la fête. Non, pas un groupuscule homophobe ou un évêque perdu. Pire que ça: un groupe d’homosexuels patriotes. Le Collectif Éros.  

Ces homos qui ne votent pas Mélenchon

Né en juin 2024, dans la foulée d’une Gay Pride parisienne plus hystérique que festive, le collectif Éros est apparu comme une gifle dans la mare tiède du militantisme LGBT mainstream. Il faut dire que le climat était déjà électrique : Yohan Pawer, ex-militant homosexuel de Reconquête!, et Mila, figure honnie des islamo-gauchistes pour avoir osé critiquer l’islam, venaient de se faire violemment agresser en marge du cortège. Trop blancs? Trop libres? Trop peu intersectionnels? Peu importe. Cet événement a été l’étincelle.

Quelques semaines plus tard, une poignée de jeunes homosexuels et bisexuels sortaient du placard politique : ras-le-bol d’avoir à choisir entre leur sexualité et leur lucidité idéologique. Assez d’être sommés de communier dans les litanies gauchistes. Leur crime ? Être homos, mais pas dupes. Et surtout : ne pas défiler sous des banderoles pro-Hamas. À Paris d’abord, puis à Lyon, Metz, Marseille ou Nice, Éros prend forme. Le mouvement revendique aujourd’hui 200 membres – et autant de gifles symboliques à ceux qui confondent orientation sexuelle et endoctrinement idéologique.

Leur objectif ? Face à une gauche LGBTQ+ qui confond depuis trop longtemps fierté et conformisme idéologique, Éros revendique le droit d’être homosexuel et de droite, patriote, critique de l’immigration incontrôlée et hostile au wokisme. Leur drapeau ? Le tricolore. Leurs slogans ? Des uppercuts : « LGBT pro-Palestine : espérance de vie à Gaza, 5 minutes » ou encore « Drag-queen : hors de nos écoles ». De quoi hérisser le cuir chevelu peroxydé des militants queer. Mais c’est bien là le message : les Éros ne cherchent pas à plaire. Ils rappellent que la liberté, y compris sexuelle, commence là où finit la pensée unique.

Pride Éros 2025 : une révolte patriotique qui ne passe pas inaperçue

Ils étaient quatorze, venus des quatre coins de la France, à répondre à l’appel de la première Pride Éros. Hétéros, bis, homos : ici, pas de chapelles, mais une même révolte contre l’idéologie woke qui gangrène la société. Parmi eux, des figures qui ne passent pas inaperçues. Yohan Pawer, bien connu pour son bras de fer judiciaire avec M. Estrosi après un scandale impliquant une distribution de préservatifs à des enfants lors d’un pique-nique drag à Nice. Bruno Moneroe, ex-candidat de téléréalité et chanteur de la Nouvelle Star, bisexuel assumé, qui n’a pas hésité à clamer son soutien au RN et à Israël, au prix de 300 000 abonnés perdus sur les réseaux après le 7-Octobre. « Les juifs m’ont donné ma chance il y a vingt ans, à la radio, à la télé, quand j’ai débuté ma carrière. Où serait mon honneur si je ne soutenais pas ceux qui m’ont tendu la main ? » lance-t-il, bravache, avant d’ajouter: « Je suis gay, je vote RN, j’aime les juifs et Israël, point. » À leurs côtés, Alexandra Brazzainville, infirmière à la retraite, atteinte du rare syndrome de Klinefelter (hermaphrodisme), pionnière d’un combat acharné contre l’idéologie transgenre et qui s’oppose farouchement à la transition de genre des mineurs.

Dans cette foule, on croise aussi des parents, pères et mères de famille, révoltés face à l’intrusion de drag-queens jouant les éducateurs sexuels auprès de leurs enfants dans les écoles. Des étudiants homosexuels qui, eux, préfèrent rester masqués : « La gauche n’est pas toujours si tolérante qu’elle le prétend : ma famille est de gauche, mais je ne peux pas parler de mon homosexualité, ça tournerait au drame s’ils découvraient que je suis ici », confie l’un. Un autre renchérit : « À la fac, un étudiant RN a été harcelé jusqu’à devoir partir. Je ne veux pas finir comme lui. » Tous, ou presque, ont un point commun : ils ont côtoyé de près l’immigration de masse et décrivent, sans filtre, l’enfer d’être homo dans des quartiers islamisés. Un jeune du 93 lâche, la voix lourde : « Dans ma rue, je croise des islamistes armés de machettes. Comment envisager l’avenir en tant qu’homo dans un quartier comme le mien ? »

Marre de l’instrumentalisation

Dans un affrontement épique évoquant David face à Goliath, ces quatorze patriotes ont bravé des milliers de contre-manifestants dans une atmosphère explosive. Menaces de mort, gestes obscènes et sifflets assourdissants ont rythmé cette confrontation tendue. Malgré la présence de cinquante CRS, dont cinq affectés à la protection exclusive de Yohan Pawer, la sécurité restait précaire. Moment mémorable : Virginie Despentes, figure punk des lettres subventionnées, a enjambé les barrières dans un élan de fureur militante, hurlant des insultes, brandissant des doigts d’honneur et tentant de frapper des militants avant d’être évacuée de force. Comme le dit l’adage : quand les mots manquent, les poings prennent la parole. Des antifas cagoulés ont également forcé le cordon de sécurité, s’attaquant aux plus vulnérables, notamment aux femmes, pour voler leurs sacs. Georgette Malkay, porte-parole du collectif, s’est fait arracher le sien sous ses yeux. « En quoi voler mes clés et mon passeport est une réponse ? » s’indigne-t-elle, consternée par cette violence gratuite.

En marge, les badauds observent en silence. Un homme gay aux cheveux blancs s’approche de nous. « Je viens du côté opposé. Là-bas, ça me met mal à l’aise, c’est trop politisé. Dans les années 90, c’était une fête familiale. Aujourd’hui, ils distribuent des préservatifs aux enfants. Et que vient faire le drapeau palestinien ici ? » Il se confie : « Je vote RN, mais je ne peux pas le dire, on me traite de raciste. Pourtant, mon mari est sénégalais, noir. Où est ma place ? » En lisant les pancartes, son regard s’illumine devant : « RN au pouvoir, homos protégés. » « Ça, c’est bien ! » s’exclame-t-il. Il discute avec des membres d’Éros, échange ses coordonnées.

La gauche croyait avoir verrouillé le vote gay. Elle découvre aujourd’hui avec effroi qu’on peut être homosexuel, noir, marié, et voter RN, Reconquête! ou UDR — sans renier quoi que ce soit de soi. Et si demain la droite ne gagnait pas contre les minorités, mais avec celles qui en ont assez d’être instrumentalisées ?

ZFE: C’est votre dernier mot ?

Alors que la situation politique en France demeure bloquée, et qu’il n’est pas dit que le poste de Premier ministre ne sera pas de nouveau vacant d’ici au vote du Budget, les progressistes hésitent à interdire l’accès aux villes aux plus pauvres, ou à les empêcher de s’habiller comme ils l’entendent…


On parle beaucoup d’une fin de règne d’Emmanuel Macron, mais moins souvent d’une fin de régime à propos des institutions de la Cinquième République, et encore moins à propos de fondamentaux des rapports sociaux. Pourtant, on voit de plus en plus d’indices qui évoquent la fin de l’Ancien régime dans la façon dont les classes dirigeantes françaises cherchent à maintenir le peuple à distance, et plus généralement dans la manière dont les classes sociales tentent de maintenir leurs signes d’appartenance, par peur du déclassement. On a déjà pu parler d’une forme de réaction nobiliaire à propos des comportements observés lors de la prise de fonction de la nouvelle Assemblée nationale en juillet dernier, et la façon dont les centristes ont fait en sorte d’ostraciser les députés du RN en leur refusant tout poste clé, au profit de la gauche, voire en refusant simplement de leur serrer la main.

La sécession des élites urbaines

Force est de constater que les parallèles de ce genre se multiplient, et illustrent le renforcement de cette crispation sociologique, aux effets éminemment politiques – la fracture croissante, de plus en plus connue et dénoncée, entre la France des villes, et en particulier les élites urbaines, et la France des champs, celle qui « fume des clopes et roule au diesel », selon la formule de Benjamin Griveaux à la veille de la crise des gilets jaunes.

À lire aussi : « Sur les ZFE, je ne lâcherai rien ! »

Et précisément, c’est d’abord ce que l’on cherche à lui interdire : on veut qu’elle ne fume plus, ou de moins en moins, qu’il s’agisse de cigarettes ou de vapoteuses, et qu’elle ne roule plus – c’est tout l’enjeu des ZFE. Celles-ci ont été suspendues par l’Assemblée nationale lors du vote du 28 mai, et si le principe a été « définitivement » abrogé par le vote du 17 juin, il est vraisemblable que l’exécutif n’a pas dit son dernier mot, et sera tenté d’utiliser le Conseil constitutionnel, comme il l’a fait l’an passé pour la loi immigration, pour censurer le vote parlementaire et rétablir ce mécanisme, alors même que la suppression est souhaitée par huit Français sur dix et que la perspective de son maintien a donné lieu au mouvement des « gueux » qui rappelle naturellement les origines des gilets jaunes. Son porte-parole, Alexandre Jardin, a constaté avec justesse que « la macronie s’affirme clairement en sécession assumée par rapport à la République. Elle se referme sur elle-même, durcit ses positions ». Madame Pannier-Runacher a provoqué un tollé en suggérant que les pauvres n’avaient pas de voiture, mais il y a sans doute un fond de vrai dans son affirmation et, surtout, un fait politiquement significatif : les « pauvres » de la France périphérique ne se rendent sans doute que très rarement dans les grandes villes visées par cette loi. Ceux qui s’y rendent en utilisant un véhicule déjà ancien appartiennent plutôt à la classe moyenne, dont le parc automobile vieillit en même temps que son pouvoir d’achat stagne, voire se contracte… Les plus probables victimes des ZFE dépassent donc largement les classes pauvres de la population, et constituent un public qui fait tourner l’économie du pays, paie des impôts, et par conséquent est particulièrement attaché à l’égalité républicaine, l’égalité de droits, et supporte très mal ces vexations sociales comme cette liberté de circulation à deux vitesses ; l’affirmation de l’égale dignité de citoyens est ainsi au cœur du « mouvement des gueux », cependant que le soutien à l’instauration des ZFE apparaît comme la recherche d’un privilège bourgeois.

Un peu de tenue !

Mais il est un nouvel exemple où la crispation bourgeoise paraît se manifester, et où le parallèle avec les privilèges d’Ancien régime semble encore plus flagrant : c’est le cas de la loi anti fast-fashion.

Certes, la proposition de loi déposée en mars 2024 par le groupe centriste Horizons a séduit la représentation nationale très au-delà du centre, puisqu’elle y a été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale en première lecture et à une quasi-unanimité au Sénat, et comme pour les ZFE elle est soutenue par des motifs environnementaux qui font consensus dans la population. Mais il est difficile de ne pas songer aux lois somptuaires en vigueur aux XVIIe-XVIIIe siècles qui visaient à préserver le statut social de la noblesse, en dépit de son appauvrissement relatif par rapport à la bourgeoisie montante, en interdisant à celle-ci de se parer des mêmes étoffes que celle-là. Cette mesure apparut de plus en plus vexatoire pour les roturiers, confinant à l’humiliation lorsque les députés du Tiers État, quoique généralement issus de la bourgeoisie aisée, se virent imposer un habit noir uni et un chapeau sans ornement, tandis que les députés de la noblesse portaient des costumes somptueux, souvent ornés de plumes, de soie, d’or et d’accessoires luxueux, comme des chapeaux à plumes et des manteaux richement décorés. En rendant la mode, y compris la plus éphémère, accessible aux plus modestes, le mode de production et de commercialisation appelé « fast-fashion » efface un autre moyen de distinction sociale, sous le même motif qu’il faut discipliner le peuple et limiter la surconsommation qu’on employait déjà au XVIe siècle : Montaigne disait « régler les folles et vaines dépenses des tables et vêtements »… tout en notant que renchérir le prix des biens ne faisait qu’en accroître le prestige et l’attrait, alors que le seul moyen efficace de les diminuer serait au contraire d’en affaiblir la valeur.

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Faut-il aller jusqu’à en conclure que si le moyen est contraire à la fin, c’est que ce n’est pas celle qu’il recherche, mais poursuit plutôt son effet immédiat : maintenir un certain accès à la mode comme outil de distinction sociale ?

Quoi qu’il en soit, ces divers exemples convergent pour donner à voir un malaise général, où les classes sociales se toisent et s’efforcent de maintenir leur statut relatif, alors que l’ensemble du pays fait face à la ruine de l’État et que la méfiance entre les catégories de population s’installe en attendant de voir les efforts demandés dans le cadre de l’élaboration du prochain budget. Cette profonde crise sociale doit être regardée en face, car elle sera lourde de conséquences politiques.

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La vie en rose

Au cœur d’une nature préservée adossée à la colline de Grasse, les jardiniers de Lancôme entretiennent avec passion le domaine de la Rose : un conservatoire horticole dédié aux professionnels de la parfumerie qui ouvre ses portes au grand public. La promesse d’une promenade entêtante


Dans l’univers de la création, le parfum occupe une place à part. Synonyme de luxe depuis toujours – rareté du produit, puis prestige d’une marque –, il est surtout miroir de l’imaginaire. Alors qu’une odeur est ce qu’il y a de plus impalpable, elle est ce qui s’inscrit le plus profondément dans la mémoire. Qui n’a pas connu cette réminiscence immédiate d’un souvenir lointain ou oublié au contact de quelque effluve, cette stimulation incontrôlable d’une mémoire olfactive méconnue de soi-même et incroyablement vive ? « Parfois on trouve un vieux flacon qui se souvient / D’où jaillit toute vive une âme qui revient » (Baudelaire). Cette perception troublante se double d’un mystère : il n’existe pas de vocabulaire olfactif.

L’architecture, la gastronomie, voire l’équitation et la menuiserie disposent d’un vocabulaire qui leur est propre, des mots pour désigner des réalisations, des formes précises. Or, en parfumerie, il n’y en a pas. Les mots qui ont ailleurs un sens en donnent ici aux odeurs. On emprunte à la musique pour parler de « notes » et d’ « accords » ; au toucher, avec le « soyeux » et le « poudré » ; on fait appel au goût pour évoquer le « poivré » et le « vanillé » ; et, surtout, on sollicite des impressions pour comprendre ce que l’on sent – et ressent : le « sous-bois », la « rosée », la « nuit claire », l’« heure matinale »… Telles sont les inspirations d’un créateur de fragrances, d’un « nez », qui sait ajouter à sa partition ce qu’il faut de « liberté », de « féminité » ou de « virilité » selon ses compositions, afin que chacun puisse, en quelques gouttes, se reconnaître ou s’affirmer.

Au nom de la rose

Il y a cinq ans, la maison Lancôme a fait l’acquisition d’un domaine entre les Alpes et la Méditerranée, à Grasse, berceau mondial de la parfumerie – un savoir-faire grassois inscrit au patrimoine immatériel de l’Unesco. Blottis dans un vallon, sept hectares d’une nature incroyablement préservée attendaient les jardiniers et les agronomes du célèbre parfumeur pour renaître. Leur objectif, revitaliser ce précieux terroir afin de cultiver les meilleures plantes nécessaires à la création de nouvelles fragrances et de cosmétiques. Dans ce conservatoire horticole croissent la verveine, le jasmin, l’iris, la tubéreuse et bien sûr la rose. La Centifolia y est reine. Aussi appelée rose aux cent fleurs, ou rose de mai, les 300 molécules que renferment ses pétales offrent une gamme de senteurs particulièrement prisée. Mais ce n’est pas tout. « Pour qu’un domaine resplendisse, les plantes doivent vivre en bonne intelligence avec leurs voisines et s’entendre avec les espèces animales », explique Antoine Leclef, l’ingénieur paysagiste responsable des cultures. Il veille donc à la coexistence heureuse de quelque 287 espèces de faune et de flore. Parmi les 215 espèces de plantes évoluent 29 espèces de papillons, 25 d’oiseaux, 13 de chauves-souris, cinq de reptiles et d’amphibiens, sans compter les abeilles et autres insectes.

Aux beaux jours, une promenade entre massifs, roseraies et allées ombragées par des oliviers associe sciences et lettres. Écouter notre guide parler pollinisation, expliquer qu’il faut deux tonnes de fleurs de jasmin pour obtenir un litre d’essence, que la tonte des pelouses est confiée à des moutons pour préserver l’environnement ou encore qu’envoyer les pétales de fleurs chez un extracteur à seulement quelques kilomètres permet de garantir leurs qualités aromatiques n’empêche pas de penser à Rousseau qui écrit dans Émile que « l’odorat est le sens de l’imagination ».

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Grandes orgues et délices

L’imagination est plus que jamais stimulée au cœur du domaine, au sein de la Maison rose. L’entrée de ce mas futuriste – entièrement peint en rose tendre du sol à la toiture – se fait par une grande porte ronde vitrée, clin d’œil au Ô de Lancôme. Les architectes Lucie Niney et Thibault Marca (agence NeM) ont réhabilité un bâti ancien afin d’accueillir, dans une spectaculaire salle cathédrale ouverte sur la verdure, étudiants d’écoles de parfumerie, parfumeurs professionnels et visiteurs de passage. C’est là que trône un remarquable orgue à parfums, une pièce unique créée par l’ébéniste Thierry Portier et les ateliers de dorure Gohard (qui déploient généralement leur talent sur les boiseries du Louvre et de Versailles). Des dizaines de fioles s’étagent en demi-cercle autour du créateur de senteurs qui y prend place. Ainsi est-il possible d’assister à l’élaboration d’un parfum sous ses yeux, sous son nez, et de prendre conscience de l’incroyable gymnastique sensorielle que cela nécessite : comment recomposer l’odeur de la rose que l’on vient de sentir au jardin après l’avoir décomposée molécule par molécule, comment la reconstituer pour la faire entrer dans un flacon et pour qu’elle tienne ensuite sur la peau. Il faut tester des assemblages et des associations, jouer avec l’intensité ou la fugacité d’une essence, « tricher », en contrebalançant le caractère volatile d’un agrume par l’apport amer et épicé du petit grain du Paraguay, ou user de « trompe-l’œil olfactif » en remplaçant un fruit trop gorgé d’eau pour être distillé par une fleur aux mêmes saveurs…

Rimbaud a donné des couleurs aux voyelles ; Lancôme donne des odeurs aux couleurs. C’est d’ailleurs l’histoire du rose : à la fin du xviiie siècle, les horticulteurs sont parvenus à créer des roses roses. Cela a tellement plu au public que la fleur a donné son nom à une couleur qui, jusque-là, n’en avait pas[1]


À voir

Domaine de la Rose Lancôme : 74, chemin de Saint-Jean, 06130 Grasse. Visite guidée gratuite sur réservation : www.lancome.fr/domaine-de-la-rose


[1] Rose. Histoire d’une couleur, Michel Pastoureau, Seuil, 2024.

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Gros comme un Turc

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© D.R.

Missionnés pour peser la population dans la rue, les agents de santé turcs obéissent à la dernière lubie hygiéniste d’Erdogan, pour qui la minceur est une vertu patriotique. Mais entre austérité alimentaire et culpabilisation publique, le président ne confond-il pas lutte légitime contre l’obésité et contrôle des corps façon autocratie néo-ottomane ?


La Turquie a récemment lancé une campagne nationale spectaculaire : arrêter les passants dans l’espace public pour les peser et mesurer leur tour de taille. Munis de balances et de rubans à mesurer, des agents de santé sillonnent les 81 provinces du pays dans l’objectif affiché d’évaluer 10 millions de personnes avant le 10 juillet. Si la démarche repose sur le volontariat, la mise en scène, elle, est éminemment politique.

Car pour le président turc Recep Tayyip Erdogan, l’obésité est une grande cause nationale. Il appelle ses concitoyens à manger moins de pain, à éviter sucre et produits transformés, et à privilégier une alimentation locale, nationale et saine. Le président n’hésite pas à commenter publiquement la silhouette d’enfants ou de ministres qu’il croise, érigeant la minceur, l’autodiscipline et la sobriété alimentaire en vertus civiques. Le citoyen idéal selon Erdogan est, pour utiliser un terme du XIXe siècle, « sec », pieux et résolument opposé aux excès venus d’Occident.

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Il est vrai que les chiffres interrogent. Depuis son arrivée au pouvoir en 2002, l’obésité qui concernait 22,3 % des adultes en 2000 atteindrait cette année 37,2 % !

D’abord, durant les années de forte croissance économique (2004-2013), une alimentation plus riche en calories est devenue plus accessible, notamment aux classes moyennes émergentes, base électorale d’Erdogan. Puis, la crise économique venue, l’alimentation s’est appauvrie sous une autre forme. Des produits de qualité, trop chers, ont été remplacés par des aliments industriels bon marché. Dans ce contexte, les injonctions présidentielles à « manger moins » et à « marcher plus » font penser à une certaine reine de France qui s’était risquée à des recommandations nutritionnelles. Cela ne lui a pas réussi.

Tournez manège!

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Brad Pitt dans "F1 le film", 2025 © Warner Bros.

Cet été, bravons tous les interdits en allant voir F1 le film avec Brad Pitt en pilote sexagénaire. Le blockbuster met à mal toutes les théories sur l’âge, le sexe, la transmission, le risque et le plaisir de rouler très vite à l’air libre…


F1 le film est un cas d’école. Chimiquement pur d’une aliénation masculiniste. Le retour des heures les plus sombres. Tout un travail de réarmement écologique et civilisationnel mis à mal durant deux heures et trente minutes. Toute la prise de conscience de ces quinze dernières années faite de colloques, de tribunes, de pétitions, de marches, de procès, toutes ces actions militantes et salutaires n’auront donc servi à rien. Que la lutte est vaine face à l’état-profond des mentalités. Ils sont inguérissables. Les Hommes ne sont que des enfants capricieux, incontrôlables et vaniteux, leur rééducation est tout bonnement impossible. Tous ces efforts pour réinitialiser les garçons et en arriver à un tel résultat : voir des bagnoles s’affronter sur une piste, se délecter d’une bataille entre mâles alpha courant vers la victoire dans une société hyper-marchande à haute teneur technologique, cet archaïsme sans nom est un aveu d’échec.

Joujou pour attardés

Pendant que la planète brûle, des réfractaires à la décroissance heureuse tentent d’améliorer leur record du tour en jouant sur les appuis aérodynamiques ou la stratégie des arrêts aux stands. C’est pitoyable ! Ce long-métrage a-t-il été commandité par des forces réactionnaires à la manœuvre dans une Amérique viriliste revancharde ? Est-il à la solde d’une coalition ultra-carbonée réunissant constructeurs automobiles, pétroliers et manufacturiers ? N’y a-t-il pas dans son populisme décomplexé les germes d’une révolution égotiste où les plus bas instincts (courage, puissance et dévouement) seraient célébrés dans l’arène des circuits ? Les jeux du cirque n’ont plus cours depuis l’édit de Constantin en 326. Certains demanderont des comptes ou, à minima, une enquête pour révéler le nom des responsables de cette grande opération décadente à base d’accélérations poudreuses, d’accidents spectaculaires et de beaux mecs qui courent le torse nu, dans une érotisation qui va à l’encontre d’une parité mormone. Comment a-t-on pu laisser tourner une telle ode sauvage au plaisir de conduite et à l’absence de conscience sociétale ? Quel échec pour tous les redresseurs et les propagandistes d’une société liquide qui voudraient annihiler les différences.

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Ce film sur les écrans depuis mercredi coche toutes les cases d’un objet cinématographique passéiste à fort relent jouissif où l’adrénaline et la testostérone disputent un bras de fer dans un bar suburbain abandonné d’un vieux pays industriel. Un joujou pour attardés qui font vroum vroum dans leur chambre au lieu de s’inquiéter de l’inclusivité dans les sports mécaniques. Une teuf-teuf pour fous du volant qui ne se sont pas encore convertis au vélo-cargo électrique aussi encombrant dans les rues de Paris qu’un pick-up dans l’Utah. Il fallait oser réaliser un film dans l’une des rares disciplines, la Formule 1, où les femmes n’ont pas encore leur baquet réservé. Il fallait oser mettre en vedette un homme de plus de 60 ans, désinvolte et individualiste, séduisant et vénéneux dans son approche hédoniste de ce sport extrême ; sans calcul et sans reproche, ne courant ni après l’argent, ni après la foule, ce cow-boy solitaire de l’asphalte marche vers un horizon toujours inconnu. Il roule dans un van surélevé et porte des chaussettes dépareillées. Mais Brad possède la classe de ses aînés, il creuse le sillon de Steve McQueen et de Paul Newman. C’est parce qu’il est seul, qu’il a décidé d’être seul, que sa démarche nous émeut. Il fallait oser placer ce film sous le signe de la transmission, le vieux pilote pas toujours très sage tentant d’inculquer son savoir à un rookie turbulent, ce principe d’éducation étant banni de nos jours. Il fallait oser mettre de la verticalité dans l’horizontalité béate. Il fallait oser filmer des monoplaces dans un environnement technique complexe sans abuser d’images virtuelles. Il fallait oser sacraliser l’autorité d’une mère qui, on le sait depuis Camus, est toujours supérieure aux enjeux des sponsors et des réseaux.

Top Gun de la terre ferme

Ce film peut dérouter les tenants du manichéisme ambiant. Il vient d’Hollywood, il est scénarisé et n’en reste pas moins proche de la réalité des Grand Prix qui se disputent chaque dimanche durant la saison, les freinages en bout de ligne droite tapent dans le cœur, la force centrifuge est apnéique, les chicanes brouillent la vue ; ce top-gun de la terre ferme est un manège en forme d’exutoire. Profitez-en avant que ce genre de production ne soit interdit. Dans la salle, toutes les générations, tous les sexes, toutes les classes, sont réunis. En F1, existe l’effet de sol, au cinéma on appelle ça l’effet Brad.

En ce début d’été, un peuple sous canicule en perte de repères a seulement besoin d’un bon film d’action, pas trop moralisant, à l’esthétique soyeuse, qui ne crache pas trop sur le passé et ne mette pas le spectateur dans la peau d’un procureur.

2h 36m. Réalisation : Joseph Kosinski

Tendre est la province

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Le maire de Nanterre nous donne le coup de grâce!

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Mounia Merzouk, Nanterre, 27 juin 2025 © Idir hakim/SIPA

Raphaël Adam choque en proposant d’installer dans sa commune une plaque commémorative pour Nahel Merzouk, mort lors d’un refus d’obtempérer. « Merci d’être là, merci d’être mobilisés. On restera ensemble jusqu’à ce qu’on obtienne justice pour Nahel » a-t-il ajouté devant des manifestants, dont sa mère qui déclare de son côté: «Je suis obligée de tenir, pour mon bébé, pour Allah et pour vous. On continue ! Justice pour Nahel»… Commentaire.


Ce n’est pas né d’aujourd’hui mais le maire de Nanterre pousse au paroxysme une dérive qui n’a cessé de gangrener notre société. En substance, la médiatisation de la malfaisance, l’hommage pervers et complaisant rendu aux transgresseurs de toutes sortes.

Au prétexte de l’information, que de déviations subtiles et malignes vers ce qui peut être considéré par l’auditeur et le téléspectateur moyen comme un éclat indécent projeté sur le délinquant voire le criminel ! Je songe par exemple à ces enquêtes rapides où la famille et les voisins d’un tueur sont questionnés et où on a droit à des réponses ridiculement naïves. Comme si le crime avait existé avant son heure et qu’il allait naturellement s’arrêter après !

Stupéfiant

Il y a une fascination médiatique pour cet univers qui représente en effet le comble du contre-pouvoir, contre la normalité, l’honnêteté et le respect d’autrui…

Le monde au quotidien n’est pas si irréprochable qu’on puisse, avec un sadisme compulsif, focaliser en plus sur ses horreurs et ses turpitudes ! Je ne parviendrai jamais à m’habituer à cette curiosité de mauvais aloi, portant aux nues ce qu’on devrait laisser dans l’ombre par hygiène morale, salubrité sociale.

Qu’on songe par exemple à la délirante focalisation de quelques semaines sur Mohamed Amra après son arrestation, mêlant des données utiles à une profusion de nouvelles à la fois préjudiciables aux enquêtes et indécentes par leur tour au mieux ambigu, au pire positif.

A lire aussi: Nahel: la dinguerie judiciaire actuelle a une histoire

Mais qui pouvait prévoir ce coup de grâce porté par le maire PCF de Nanterre, Raphaël Adam ? Je ne l’ai pas cru tout de suite tellement c’était stupéfiant ! Dans quelle tête municipale sensée a pu germer l’absurdité d’une plaque commémorative en hommage à Nahel ?

Ce jeune homme a trouvé la mort à la suite de ses transgressions répétées au cours de quelques heures : véhicule volé, avec de fausses plaques, conduite sans permis, deux refus d’obtempérer.

Le maire de Nanterre aurait dû d’abord, à défaut d’être sensible à l’indécence absolue de cette plaque, s’abstenir par délicatesse judiciaire. En effet, un procès criminel rendra bientôt son verdict sur l’accusation de meurtre imputée au fonctionnaire de police Florian M. Pour ma part j’espère qu’il en résultera que cette qualification n’a aucun sens et que les magistrats et citoyens concernés sauront ne pas apposer confortablement sur les difficiles réalités de l’activité policière l’abstraction d’un droit en chambre, la facilité irresponsable du « il n’y avait qu’à »…

Une mère qui finit par nous choquer

En tout cas il est symptomatique que ce maire ait préjugé et rendu d’une certaine manière encore plus choquant l’activisme de la mère de Nahel, au-delà de la douleur personnelle compréhensible de cette dernière.

Quand j’affirme que ce maire « nous » a donné le coup de grâce, je veux signifier par là qu’il plonge notre société tout entière dans un hommage public qu’il souhaite rendre à quelqu’un qui nous a fait honte à tous. Il aurait dû considérer ce que cet honneur évoqué pouvait avoir d’offensant pour cette « société des honnêtes gens » qu’a mise si justement en avant Bruno Retailleau. Ou faut-il admettre qu’être maire, et maire à Nanterre, justifie les pires affronts au bon sens, à la décence sociale ? Une société si gangrenée qu’elle célèbre ses délinquants ou ses criminels, même tués au cours de leurs méfaits, est profondément malade. Proche de se tuer elle-même. Le maire de Nanterre va-t-il recouvrer la raison ?

Finale du Top 14: les trois coups de pied qui ont fait le match

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Thomas Ramos lors de la finale du TOP 14, Saint-Denis, 28 juin 2025 © Gabrielle CEZARD/SIPA

Toulouse s’est imposé face à Bordeaux samedi soir et repart du Stade de France avec le bouclier de Brennus ! Statistiques d’un match mémorable.


A la 80ème minute, juste avant que l’arbitre ne s’apprête à siffler samedi au stade de France le glas de la finale de rugby du Top 14, le Stade toulousain avait match gagné. Quand, soudain, il commet une fatidique faute, mais une aubaine inespérée offerte à l’Union Bordeaux-Bègles (UBB) qui lui avait bravement tenu la dragée haute. Impavide, Maxime Lucu (dont le patronyme en basque veut dire bois), demi-mêlée et buteur de l’équipe, la passe et met les deux équipes à égalité à 33-33.

Finale d’anthologie

Du jamais vu depuis 20 ans[1], les deux finalistes se départageront au terme de deux prolongations de 10 mn chacune.

A la 95ème minute de celles-ci, Thomas Ramos, l’impérial arrière toulousain, donne l’avantage à son équipe alors que les deux parties faisaient jeu égal, et assez échevelé, transforme une pénalité, puis donne le coup de grâce à Bordeaux-Bègles, en en passant une autre à la 100ème, portant le score à 39 à 33, et mettant fin, le temps étant expiré, à un match « époustouflant », selon Sud-Ouest, le quotidien bordelais où les deux protagonistes « se sont rendu coup pour coup. ».

Ainsi, le sort de cette finale d’anthologie s’est décidé sur trois coups de pied dans un sport qui se joue essentiellement à la main, sans pour autant se résumer à ces derniers. Chacune des équipes a marqué trois essais. Leurs deux buteurs respectifs, Ramos et Lucu, ont eu 100% de réussite (9/9 tentatives pour le premier marquant 24 points sur les 39, et 7/7 pour le second inscrivant lui 18 points sur les 33). Ramos a été élu « homme du match ».

Les deux équipes méritaient la victoire, mais c’est la plus sereine, la plus maître de soi car la plus expérimentée qui s’est imposée. Jeune équipe qui va fêter ses 20 ans la saison prochaine, Bordeaux ne disputait que la seconde finale de son histoire et n’a décroché son premier titre il y a à peine un peu plus d’un mois en remportant la coupe d’Europe après avoir justement sorti Toulouse en demie.

Alors que Toulouse, sur les quinze dernières éditions, a empoché sept titres de champion de France. Cette victoire de samedi à l’arrachée est sa troisième consécutive en finale, sa cinquième sur les six dernières disputées depuis 2019. Le titre n’a pas été décerné en 2020 pour cause de covid. Elle a en tout emmagasiné vingt-quatre boucliers de Brennus dans son histoire. Elle a connu une saison exceptionnelle : en 27 matches de championnat, elle a inscrit 930 points, soit une moyenne de 36 par rencontre, un record, trois de moins que samedi, c’est dire le niveau de sa prestation ce soir-là.

Deux cartons jaunes pour les Bordelais

Les Toulousains ont imposé la suprématie de leurs avants qui ont neutralisé les trois-quarts bordelais, dits « la Patrouille de France », bien que la plus belle phase du match revienne à l’un d’eux. Sur une petite diagonale au pied rasante de Lucu, Damian Penaud, à la vitesse d’une flèche, a été déposé l’ovale entre les poteaux. « Un bijou de clairvoyance », l’a qualifiée le chroniqueur de Sud-Ouest Denys Kappès-Grangé. Mais réaliser des bijoux ne font pas la fortune d’une équipe en rugby.

Si l’UBB a perdu, c’est sa faute pour les avoir cumulées. Contre trois au Stade toulousain, elle en a commis treize ce qui lui valu deux cartons jaunes, autrement dit sur les 80 minutes du temps réglementaire, elle a joué pendant 60 minutes à 14 contre 15, ce qui est un substantiel avantage offert à la partie adverse.

 « Dur de battre Toulouse quand on concède deux cartons jaunes », a convenu l’entraîneur bordelo-blégois, Yannick Bru, surtout que les deux sanctionnés ont été des avants, Guido Petti et Pierre Bochaton, le point faible des Girondins, face une partie adverse dont les trois premières lignes sont justement sa carte majeure, avec bien sûr son arrière Ramos au pied d’or.

« La frustration est énorme, a concédé Lucu, le capitaine de l’UBB. On commet une petite faute sur un ballon haut. Le match se joue sur ça. On a un petit peu craqué à la fin ».

Justement, on laissera le mot de la fin Denys Kappès-Grangé qui écrit avec pertinence dans l’entame de son article de dimanche : « Il n’est pas interdit de se demander si la détresse ressentie par les Bordelais n’est pas plus grande aujourd’hui que celle qu’ils ont éprouvée il y a un an lors de leur humiliation à Marseille ». Pour sa première finale face déjà à Toulouse, ils avaient encaissé un magistrale dérouillée (59-3).

Oui, que vaut-il mieux ? Perdre par 6 points d’écart ou 56 ? Question presque métaphysique. En tout cas, avec Bordeaux-Toulouse se profile désormais un « clasico » de l’ovalie hexagonale…


[1] Le 11 juin 2005 le Biarritz olympique (BO) l’avait emporté sur le Stade français par 37 à 34, au terme des 100 minutes de jeu.

Le spectre des tocards

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86% des Français sont très pessimistes sur l’avenir du « vivre-ensemble » et du civisme.


Le sondage IFOP du 25 juin ne surprend personne, le fond de l’air effraie : individualisme, crétinisation numérique, effondrement éducatif et culturel, croissance en berne, chaos migratoire, violences, narcotrafic, explosion de la dette (3345,8 milliards d’euros, plus 40 milliards en trois mois, 114%, du PIB)… François Bayrou tient son cap, ne fait rien : c’est plus prudent. Emmanuel Macron gesticule comme un hanneton sur le dos. Au fond du bocal, il cherche de l’oxygène. La fin de règne est morose. Encore deux ans. Les Diadoques ont faim. Darmanin, Attal, Philippe : le sprint est lancé !

Un grand concert d’idées brisées

Colbertiste, libérale, patriote, européenne, identitaire, prolo, aristo, orléaniste, bonapartiste, Mariniste, Jordanienne, Jacobine, Girondine, éclatée, fusionnée… Dans le purgatoire depuis quinze ans, les droites hésitent, varient au gré des calculs électoraux et enquêtes du Parquet National Financier. Bruno Retailleau a le vent en poupe. Combien de temps restera-t-il éligible ? La BRI, Tracfin, le Syndicat de la Magistrature et Mediapart sont sur la piste de détournements et financements illicites de Carambars, dans un collège vendéen en 1970.

Les gauches ne vont pas mieux. Olivier Croquignol, Nicolas Filochard et Boris Ribouldingue, se disputent le cadavre du PS. LFI joue cartes sur table, veut faire exploser la nation, sa langue, son histoire, créolise, libanise, vend le pays à l’étranger, à la découpe. Sur le segment porteur mais encombré du lacrymal-victimaire-boulgour-bio, Raphaël Glucksmann a un programme attrape toutous, fusionne les saveurs, enfile les naïvetés et slogans bienveillants comme des colliers de nouilles. À son crédit, la dénonciation de l’ours russe qui menace l’Europe.

A lire aussi, David Duquesne: Charia de transition

Excédé par les casseurs, les crises de nerfs des succubes, harenguières insoumises, lazzaroni, la chienlit, un quarteron de généreux à la retraite, vieux de la veille, en appellent au consensus et à la modération. Trop, c’est trop ! 

Les forçats de la déroute

Poulidor tranquille de la Social-démocratie, Bernard Cazeneuve plaide –affettuoso allargando- « le retour de la raison en politique, le dépassement des clivages stériles, au service de l’intérêt général ». Son truc c’est « une gauche républicaine, européenne et réformiste, qui refuse tant les outrances que les renoncements ». Un chien parmi les loups, c’est le titre intriguant de son essai. Milou en mai ? Rintintin ? Cubitus ? En 2024, sous le même titre, Marie-Jeanne Rioux racontait les amours d’un pilote d’hélico et d’un biologiste dans le Nunavut canadien. C’est blizzard.

Michel Barnier (Ce que j’ai appris de vous) est porté par une noble conviction : « Chacun est nécessaire ». Il ne donne pas de leçons, mais transmet celles que les Français lui ont inculqué. Voter pour lui, c’est voter pour nous. Bien joué, Michel.

Edouard Philippe frôle le collapsus. Qui paiera Le prix de nos mensonges ? « Nous nous racontons des histoires jolies, rassurantes, glorieuses parfois, qui nous empêchent de proposer au pays des solutions utiles. Pendant que nous nous mentons, les autres avancent, transforment, adaptent, innovent. Et nous nous glosons… Où va-t-il chercher tout cela, Edouard ? Dans Causeur ? Qu’a-t-il fait pendant trois ans ?

A lire aussi, Ivan Rioufol: Villepin, ou ces «humanistes» qui bradent la France

Dominique d’Arabie a trouvé son Chemin de Damas, lance un parti (« La France humaniste »), nous alerte dans Le Pouvoir de dire non. « Il est temps de se réveiller. De déchirer les voiles d’illusions, de renoncer aux reflexes politiciens … Dire non, à ce qui porte atteinte à l’avenir de l’humanité et à la dignité de la république ». Fini les grands moulinets à la Cyrano. De Guiche de la Mirandole Galouzeau de Villepin a muri son projet, affiné depuis 18 ans (son départ de Matignon) : « Une politique d’équilibre et de mesure… Créer les conditions de la recherche du consensus… L’immobilisme, il faut tout faire pour essayer de l’amender ». C’est l’allure finale, les visages du cirque.

Des éléphants, apparatchiks, Esterhazy à l’abri des lambris, s’inquiètent, accusent ! Les pieds-nickelés de la remontada dînent du mensonge et soupent du scandale, s’ébattent dans les Pactes, Grenelle, dénis d’initiés, le « toutlemondisme », des rapports bidons de chercheurs islamo-trotskistes, à l’Hamas et au CNRS. Nos élites lotophages se gargarisent de schibboleth de pacotille : « modèle français », « exception culturelle », repoussoirs qui font éclater de rire à l’étranger. Hors-sol, incompétents, confits dans l’idéologie, aux commandes depuis des générations, ils ont cramé la caisse, plombé le pays, mais restent intarissables sur les leçons de bonne conduite, recettes de potions magiques pour combattre le populisme et défendre l’Etat de droit. Marianne est dans la fosse.

Pas de panique. Il y a le ressenti et la réalité. Les sociologues de France Inter et Télérama sont formels. Dans le passé, le pays a traversé des pics de violence et d’angoisse : Paris en juin 40, en juillet 1793, en août 1572… Haut les cœurs ! Le taux d’exécution des OQTF pourrait atteindre les 10% en 2055. Elisabeth Borne concocte un plan « Zéro machette, Zéro Coke » dans les salles de cours. Sorbonne Université lance un Master 2 d’influenceurs, spécialité « Rap.t-Tag-Crypto ». L’avenir du pays c’est l’éducation, la culture, la jeunesse. 6/20, c’est la barre d’admissibilité pour le concours de professeurs des écoles dans l’académie de Créteil.

« Les hommes sentent dans leur cœur qu’ils sont un même peuple lorsqu’ils ont une communauté d’idées, d’intérêts, d’affections, de souvenirs et d’espérances ». Voilà ce qui fait la patrie. Voilà pourquoi les hommes veulent marcher ensemble, ensemble travailler, ensemble combattre, vivre et mourir les uns pour les autres » (Fustel de Coulanges). Tout s’explique.

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Mélenchon ou l’abandon programmé de la France

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Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan, Place de la République à Paris, le 14 juin 2025 © Franck Derouda/SIPA

Destruction de la France : Mélenchon et ses limites


Dans sa destruction de la France française, Jean-Luc Mélenchon est clair, méthodique, cohérent. Depuis sa conversion à l’islamophilie, le leader LFI illustre la réflexion de Chesterton : « Le fou n’est pas celui qui a perdu la raison. Le fou est celui qui a tout perdu excepté la raison ». Lui qui, en 2010, qualifiait le voile islamique de « pratique répugnante et obscène », s’est fait, depuis, le théoricien rigoureux de la conquête musulmane. Tout à son projet électoraliste d’une « nouvelle France » métissée, également rêvée par Dominique de Villepin, Mélenchon banalise le voilement des petites filles, dénonce l’islamophobie derrière la critique de la charia, nazifie le sionisme qui résiste à ses ennemis, invite les clandestins qui traversent la Méditerranée à « épouser nos filles et nos gars ». Il propose même de brader la langue française : « Je préférerai que l’on dise que nous parlons tous le créole », a-t-il dit l’autre jour à l’Assemblée nationale, lors d’un colloque sur la francophonie. Le candidat de l’extrême gauche à la présidentielle a choisi de promouvoir le basculement identitaire de la nation – son grand remplacement en somme – en l’ouvrant sans cesse à une immigration maghrébine et africaine dont il sait, par l’effet du nombre, qu’elle ne modifiera pas ses mœurs en foulant le sol français. Qu’est-ce que coloniser un pays sinon s’y installer en refusant de changer sa propre histoire ? Non content d’être le parti de l’étranger, LFI est celui de l’islamisation et de l’africanisation de la nation. Si rien ne vient faire obstacle à cette disparition espérée d’un peuple enraciné, coupable de vouloir se protéger de ses envahisseurs et de leurs complices à prénoms français, l’histoire donnera raison, au mitan de ce siècle, à Mélenchon. Mais tout est encore réversible.

A lire aussi: «La Chute de la maison Sciences-Po», de Caroline Beyer: la fabrique des élites auto-proclamées

Car il reste une lacune, dans la logique glaciale de l’idéologue : son raisonnement ne tient que si le peuple indigène demeure tenu à l’écart de son destin. Or il ne suffit pas de décréter, comme Sandrine Rousseau jeudi, que « les Français de souche, ça n’existe pas » pour les faire disparaître tels des mouches agaçantes. Ces Français-là sont encore, aux trois-quarts, largement majoritaires. C’est pourquoi il est devenu urgent que l’immigration de peuplement, qui accélère le naufrage du pays, apparaisse enfin comme le sujet prioritaire d’un référendum. Au-delà du militant pro-islam qu’est Mélenchon, c’est tout un monde politique qui, depuis cinquante ans, a avalisé le projet d’une société ouverte, multiculturelle, indifférenciée. Jamais aucun peuple d’Europe n’a été invité, hormis le référendum français de 2005 passé à la trappe et le Brexit britannique, à se prononcer sur son avenir.

Pourtant tous les sondages montrent l’attachement des gens ordinaires à leur patrie, leur mode de vie, leurs traditions. Le mérite du chef de LFI est de confirmer, dans son objectif de la table rase, que la première des menaces pour le pays vient de l’intérieur, c’est-à-dire de ces traîtres qui veulent enterrer la France et que j’avais dénoncés en 20201.

Dans son discours de Munich du 14 février, le vice-président américain, J. D. Vance, a rappelé qu’il était encore loisible de « changer de cap, de donner une nouvelle direction à notre civilisation commune », en écoutant simplement la voix des citoyens oubliés. Les bâillonner encore serait criminel.

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  1. Les Traîtres, Edition Pierre-Guillaume de Roux ↩︎

Comment écrire un roman historique — et pourquoi

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Image d'illustration.

Lassé d’écrire des essais sur l’Ecole que bien des gens approuvent mais que personne n’applique, notre rédacteur, depuis l’année dernière, est revenu à ses premières amours — le roman. Et plus précisément le roman historique. « Mais pourquoi diable ne pas parler de la France d’aujourd’hui, avec une jolie fiction pleine de LGBT++ et de « racisés » de toutes les couleurs ? Le présent vous dégoûte à ce point que vous alliez vous réfugier au XVIIe siècle ? » Réponse circonstanciée.


Il n’y a que deux façons d’écrire un roman historique.
– Soit vous choisissez une période indéterminée, sur laquelle personne ne sait trop rien — par exemple les « dark ages » qui sévirent en Grèce entre le XIe et le VIIIème siècle av. JC, ou les temps de désordre qui suivirent, en Angleterre, la chute de l’empire romain – toute la légende arthurienne est sortie d’un tel choix. « Entre le temps où les océans engloutirent l’Atlantide, et l’avènement des fils d’Arius, il y eut une époque inouïe, où s’avança Conan, destiné à poser la couronne d’Aquilonia sur un front troublé… » Ainsi commence la légende de Conan le Barbare, de Robert E. Howard (1906-1936), l’inventeur de l’heroic fantasy. Ou La Guerre du feu, de Rosny Aîné : en 1911, année de sa publication, on ne savait rien de bien certain sur les « âges farouches »…
– Soit vous prenez au contraire une période que vous connaissez à fond, et pour laquelle vous avez une attirance irrésistible. Pour moi, les XVIIe et XVIIIe siècles. Et là, historique et le décor.
(Il y a bien sûr le cas de Dumas, qui connaissait toute l’Histoire de France et a écrit des romans qui couvrent un champ considérable, du XVIe au XIXe siècle. Mais qui oserait se comparer à un tel géant ?)

Évidemment, le problème est d’informer assez le lecteur inculte d’aujourd’hui sans trop avoir l’air de lui faire un cours. Et d’entremêler à l’Histoire une fiction crédible — sans pour autant s’astreindre à n’user que du vocabulaire du temps, mais en évitant les anachronismes.

L’Histoire — la grande, celle que l’on étudiait jadis à l’école — est le tissu de votre livre. La fiction, c’est la coupe, et le style, ce sont les coutures. En pratique, 90% de votre livre est écrit par l’Histoire, mais ne fonctionne qu’après adjonction d’un fil fictionnel. Tout comme les personnages historiques ne reprennent vie que lorsqu’on les confronte à des êtres de fiction. Dans Soleil noir, paru l’année dernière, Louis XIV ou le Grand Condé étaient les interlocuteurs de Balthazar Herrero, descendant (imaginaire) de Maures espagnols réfugiés en France (ça, c’est un fait vrai, une partie de ma famille en est issue), médecin rompu à tout ce que l’art médical faisait de mieux vers 1685, non seulement à Montpellier, son alma mater originelle, mais à Pise ou en Orient. Pézenas, Versailles ou le château d’Enghien forment le décor « historique », les contrées demi-sauvages qui séparent les Cévennes de l’Île-de-France également.

A relire, du même auteur: Mousquetaires et misérables : Dumas ou Hugo ?

Dans Les Nuits de Topkapi, qui vient de sortir, j’ai déplacé ce héros-médecin dans le décor tourmenté de la Constantinople turque, puis dans les déserts de Syrie et de Judée — ou de Palestine, comme disaient les Romains. Ça tombe bien, j’y suis allé.
Et le troisième tome sur lequel je travaille se passera, pour l’essentiel dans les collines des Cévennes pendant la guerre des Camisards.

Quant au reproche selon lequel je serais la première victime (ou le premier bénéficiaire) de cette littérature d’évasion, il tombe à plat lorsqu’on se souvient que Georg Lukács a analysé la « double historicité » des romans -historiques. Ils ne se contentent pas, explique le grand critique hongrois des années 1950-1960, de raconter les siècles passés, ils parlent, de biais, du siècle de leur rédacteur. Dumas, déçu par le côté « bourgeois » de Louis-Philippe, est allé chercher au XVIIe siècle les figures héroïques qui lui manquaient pour se satisfaire de la réalité — et au passage il a ressuscité son père, réincarné en quatre mousquetaires incarnant l’habileté aux armes, la séduction, la force pure et la noblesse d’âme, qualités reconnues du général Dumas. Quand mes héros traversent la Palestine, ils rencontrent fort peu d’Arabes et force Juifs et Chrétiens — les voyageurs d’époque, comme Hadrian Reland, en attestent. De quoi disqualifier les imprudents d’aujourd’hui qui prétendent que c’était une terre arabe depuis le début des temps.
Et si les intrigues de sérail de Topkapi, le château des pachas turcs, les trahisons et règlements de comptes, les révolutions de palais, les alliances étrangères inattendues mais mûrement pesées, ont un écho dans l’actualité, c’est que nos hommes politiques — de bien petit niveau, convenons-en — devraient de temps en temps se retourner vers l’histoire pour éviter de faire et de dire de grosses bêtises.
Quant à l’amour, c’est le piment intemporel et universel — ou parfois une nostalgie assez forte pour faire revivre vos fantômes personnels, qu’il s’agisse de créatures rencontrées jadis ou d’héroïnes de papier qui alimentèrent vos songes humides.

L’intention pédagogique n’est pas tout à fait absente. Dans Soleil noir j’expliquais comment on rouait vif. Et dans Topkapi, vous apprendrez le processus exact d’un empalement — qui contrairement à ce que croit la multitude, ne passait pas par voie anale…

Reste le plaisir que l’on a à l’écrire, qui doit procurer un plaisir analogue au lecteur. Si vous suez sang et haut à rédiger, le lecteur aura fort à faire pour vous lire. En toutes choses, soyez légers — et enthousiastes.

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Gay Pride: cherchez l’intrus

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Paris, 28 juin 2025 © LIONEL URMAN/SIPA

Comme ils déclenchent déjà des tempêtes à chaque pas, les militants du collectif Eros n’ont vraiment pas besoin de confettis à la gay pride… De droite, ils préfèrent le drapeau tricolore aux slogans woke ou pour Gaza. Tenu à distance du cortège principal, où les autres manifestants menaçaient de tout boycotter si on le laissait participer samedi, le collectif nationaliste a finalement pu défiler à l’abri des CRS. Notre contributrice a suivi ces militants identitaires.


Le 28 juin à Paris, comme chaque année, les trottoirs ont tremblé sous les chars bariolés de la Marche des fiertés. DJ, slogans bien-pensants (« ACAB : All Cops Are Barbecue »), drapeaux multicolores et nuée de collectifs militants : un rituel bien huilé, devenu passage obligé pour élus en mal de hashtags et étudiants en sciences molles. Le thème de cette année ? « Contre l’internationale réactionnaire ». Une formule digne d’un congrès trotskiste, censée englober pêle-mêle Trump, Orban, Le Pen et tout ce qui ne pense pas comme les rédactions militantes.

Les collectifs présents – demandeurs d’asile, pro-légalisation du cannabis, soutien à Gaza, transactivisme radical – donnaient l’impression que la cause homosexuelle n’était plus qu’un prétexte parmi d’autres pour dérouler l’agenda woke.

On est très loin des combats des années 80, quand les militants gays se battaient pour la survie face au Sida, pour le droit d’aimer sans honte, pour ne pas être licenciés, tabassés ou ignorés par la médecine. Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’obtenir des droits, mais de les conditionner à l’appartenance à une tribu idéologique. Être homosexuel ne suffit plus : il faut être du bon bord.

Mais cette édition 2025 a connu un accroc. Un intrus a troublé la fête. Non, pas un groupuscule homophobe ou un évêque perdu. Pire que ça: un groupe d’homosexuels patriotes. Le Collectif Éros.  

Ces homos qui ne votent pas Mélenchon

Né en juin 2024, dans la foulée d’une Gay Pride parisienne plus hystérique que festive, le collectif Éros est apparu comme une gifle dans la mare tiède du militantisme LGBT mainstream. Il faut dire que le climat était déjà électrique : Yohan Pawer, ex-militant homosexuel de Reconquête!, et Mila, figure honnie des islamo-gauchistes pour avoir osé critiquer l’islam, venaient de se faire violemment agresser en marge du cortège. Trop blancs? Trop libres? Trop peu intersectionnels? Peu importe. Cet événement a été l’étincelle.

Quelques semaines plus tard, une poignée de jeunes homosexuels et bisexuels sortaient du placard politique : ras-le-bol d’avoir à choisir entre leur sexualité et leur lucidité idéologique. Assez d’être sommés de communier dans les litanies gauchistes. Leur crime ? Être homos, mais pas dupes. Et surtout : ne pas défiler sous des banderoles pro-Hamas. À Paris d’abord, puis à Lyon, Metz, Marseille ou Nice, Éros prend forme. Le mouvement revendique aujourd’hui 200 membres – et autant de gifles symboliques à ceux qui confondent orientation sexuelle et endoctrinement idéologique.

Leur objectif ? Face à une gauche LGBTQ+ qui confond depuis trop longtemps fierté et conformisme idéologique, Éros revendique le droit d’être homosexuel et de droite, patriote, critique de l’immigration incontrôlée et hostile au wokisme. Leur drapeau ? Le tricolore. Leurs slogans ? Des uppercuts : « LGBT pro-Palestine : espérance de vie à Gaza, 5 minutes » ou encore « Drag-queen : hors de nos écoles ». De quoi hérisser le cuir chevelu peroxydé des militants queer. Mais c’est bien là le message : les Éros ne cherchent pas à plaire. Ils rappellent que la liberté, y compris sexuelle, commence là où finit la pensée unique.

Pride Éros 2025 : une révolte patriotique qui ne passe pas inaperçue

Ils étaient quatorze, venus des quatre coins de la France, à répondre à l’appel de la première Pride Éros. Hétéros, bis, homos : ici, pas de chapelles, mais une même révolte contre l’idéologie woke qui gangrène la société. Parmi eux, des figures qui ne passent pas inaperçues. Yohan Pawer, bien connu pour son bras de fer judiciaire avec M. Estrosi après un scandale impliquant une distribution de préservatifs à des enfants lors d’un pique-nique drag à Nice. Bruno Moneroe, ex-candidat de téléréalité et chanteur de la Nouvelle Star, bisexuel assumé, qui n’a pas hésité à clamer son soutien au RN et à Israël, au prix de 300 000 abonnés perdus sur les réseaux après le 7-Octobre. « Les juifs m’ont donné ma chance il y a vingt ans, à la radio, à la télé, quand j’ai débuté ma carrière. Où serait mon honneur si je ne soutenais pas ceux qui m’ont tendu la main ? » lance-t-il, bravache, avant d’ajouter: « Je suis gay, je vote RN, j’aime les juifs et Israël, point. » À leurs côtés, Alexandra Brazzainville, infirmière à la retraite, atteinte du rare syndrome de Klinefelter (hermaphrodisme), pionnière d’un combat acharné contre l’idéologie transgenre et qui s’oppose farouchement à la transition de genre des mineurs.

Dans cette foule, on croise aussi des parents, pères et mères de famille, révoltés face à l’intrusion de drag-queens jouant les éducateurs sexuels auprès de leurs enfants dans les écoles. Des étudiants homosexuels qui, eux, préfèrent rester masqués : « La gauche n’est pas toujours si tolérante qu’elle le prétend : ma famille est de gauche, mais je ne peux pas parler de mon homosexualité, ça tournerait au drame s’ils découvraient que je suis ici », confie l’un. Un autre renchérit : « À la fac, un étudiant RN a été harcelé jusqu’à devoir partir. Je ne veux pas finir comme lui. » Tous, ou presque, ont un point commun : ils ont côtoyé de près l’immigration de masse et décrivent, sans filtre, l’enfer d’être homo dans des quartiers islamisés. Un jeune du 93 lâche, la voix lourde : « Dans ma rue, je croise des islamistes armés de machettes. Comment envisager l’avenir en tant qu’homo dans un quartier comme le mien ? »

Marre de l’instrumentalisation

Dans un affrontement épique évoquant David face à Goliath, ces quatorze patriotes ont bravé des milliers de contre-manifestants dans une atmosphère explosive. Menaces de mort, gestes obscènes et sifflets assourdissants ont rythmé cette confrontation tendue. Malgré la présence de cinquante CRS, dont cinq affectés à la protection exclusive de Yohan Pawer, la sécurité restait précaire. Moment mémorable : Virginie Despentes, figure punk des lettres subventionnées, a enjambé les barrières dans un élan de fureur militante, hurlant des insultes, brandissant des doigts d’honneur et tentant de frapper des militants avant d’être évacuée de force. Comme le dit l’adage : quand les mots manquent, les poings prennent la parole. Des antifas cagoulés ont également forcé le cordon de sécurité, s’attaquant aux plus vulnérables, notamment aux femmes, pour voler leurs sacs. Georgette Malkay, porte-parole du collectif, s’est fait arracher le sien sous ses yeux. « En quoi voler mes clés et mon passeport est une réponse ? » s’indigne-t-elle, consternée par cette violence gratuite.

En marge, les badauds observent en silence. Un homme gay aux cheveux blancs s’approche de nous. « Je viens du côté opposé. Là-bas, ça me met mal à l’aise, c’est trop politisé. Dans les années 90, c’était une fête familiale. Aujourd’hui, ils distribuent des préservatifs aux enfants. Et que vient faire le drapeau palestinien ici ? » Il se confie : « Je vote RN, mais je ne peux pas le dire, on me traite de raciste. Pourtant, mon mari est sénégalais, noir. Où est ma place ? » En lisant les pancartes, son regard s’illumine devant : « RN au pouvoir, homos protégés. » « Ça, c’est bien ! » s’exclame-t-il. Il discute avec des membres d’Éros, échange ses coordonnées.

La gauche croyait avoir verrouillé le vote gay. Elle découvre aujourd’hui avec effroi qu’on peut être homosexuel, noir, marié, et voter RN, Reconquête! ou UDR — sans renier quoi que ce soit de soi. Et si demain la droite ne gagnait pas contre les minorités, mais avec celles qui en ont assez d’être instrumentalisées ?

ZFE: C’est votre dernier mot ?

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Agnès Pannier-Runacher à l'Institut Français de la Mode (IFM), à l'invitation de la Circular Fashion Federation, 3 avril 2025 © LEO VIGNAL/SIPA

Alors que la situation politique en France demeure bloquée, et qu’il n’est pas dit que le poste de Premier ministre ne sera pas de nouveau vacant d’ici au vote du Budget, les progressistes hésitent à interdire l’accès aux villes aux plus pauvres, ou à les empêcher de s’habiller comme ils l’entendent…


On parle beaucoup d’une fin de règne d’Emmanuel Macron, mais moins souvent d’une fin de régime à propos des institutions de la Cinquième République, et encore moins à propos de fondamentaux des rapports sociaux. Pourtant, on voit de plus en plus d’indices qui évoquent la fin de l’Ancien régime dans la façon dont les classes dirigeantes françaises cherchent à maintenir le peuple à distance, et plus généralement dans la manière dont les classes sociales tentent de maintenir leurs signes d’appartenance, par peur du déclassement. On a déjà pu parler d’une forme de réaction nobiliaire à propos des comportements observés lors de la prise de fonction de la nouvelle Assemblée nationale en juillet dernier, et la façon dont les centristes ont fait en sorte d’ostraciser les députés du RN en leur refusant tout poste clé, au profit de la gauche, voire en refusant simplement de leur serrer la main.

La sécession des élites urbaines

Force est de constater que les parallèles de ce genre se multiplient, et illustrent le renforcement de cette crispation sociologique, aux effets éminemment politiques – la fracture croissante, de plus en plus connue et dénoncée, entre la France des villes, et en particulier les élites urbaines, et la France des champs, celle qui « fume des clopes et roule au diesel », selon la formule de Benjamin Griveaux à la veille de la crise des gilets jaunes.

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Et précisément, c’est d’abord ce que l’on cherche à lui interdire : on veut qu’elle ne fume plus, ou de moins en moins, qu’il s’agisse de cigarettes ou de vapoteuses, et qu’elle ne roule plus – c’est tout l’enjeu des ZFE. Celles-ci ont été suspendues par l’Assemblée nationale lors du vote du 28 mai, et si le principe a été « définitivement » abrogé par le vote du 17 juin, il est vraisemblable que l’exécutif n’a pas dit son dernier mot, et sera tenté d’utiliser le Conseil constitutionnel, comme il l’a fait l’an passé pour la loi immigration, pour censurer le vote parlementaire et rétablir ce mécanisme, alors même que la suppression est souhaitée par huit Français sur dix et que la perspective de son maintien a donné lieu au mouvement des « gueux » qui rappelle naturellement les origines des gilets jaunes. Son porte-parole, Alexandre Jardin, a constaté avec justesse que « la macronie s’affirme clairement en sécession assumée par rapport à la République. Elle se referme sur elle-même, durcit ses positions ». Madame Pannier-Runacher a provoqué un tollé en suggérant que les pauvres n’avaient pas de voiture, mais il y a sans doute un fond de vrai dans son affirmation et, surtout, un fait politiquement significatif : les « pauvres » de la France périphérique ne se rendent sans doute que très rarement dans les grandes villes visées par cette loi. Ceux qui s’y rendent en utilisant un véhicule déjà ancien appartiennent plutôt à la classe moyenne, dont le parc automobile vieillit en même temps que son pouvoir d’achat stagne, voire se contracte… Les plus probables victimes des ZFE dépassent donc largement les classes pauvres de la population, et constituent un public qui fait tourner l’économie du pays, paie des impôts, et par conséquent est particulièrement attaché à l’égalité républicaine, l’égalité de droits, et supporte très mal ces vexations sociales comme cette liberté de circulation à deux vitesses ; l’affirmation de l’égale dignité de citoyens est ainsi au cœur du « mouvement des gueux », cependant que le soutien à l’instauration des ZFE apparaît comme la recherche d’un privilège bourgeois.

Un peu de tenue !

Mais il est un nouvel exemple où la crispation bourgeoise paraît se manifester, et où le parallèle avec les privilèges d’Ancien régime semble encore plus flagrant : c’est le cas de la loi anti fast-fashion.

Certes, la proposition de loi déposée en mars 2024 par le groupe centriste Horizons a séduit la représentation nationale très au-delà du centre, puisqu’elle y a été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale en première lecture et à une quasi-unanimité au Sénat, et comme pour les ZFE elle est soutenue par des motifs environnementaux qui font consensus dans la population. Mais il est difficile de ne pas songer aux lois somptuaires en vigueur aux XVIIe-XVIIIe siècles qui visaient à préserver le statut social de la noblesse, en dépit de son appauvrissement relatif par rapport à la bourgeoisie montante, en interdisant à celle-ci de se parer des mêmes étoffes que celle-là. Cette mesure apparut de plus en plus vexatoire pour les roturiers, confinant à l’humiliation lorsque les députés du Tiers État, quoique généralement issus de la bourgeoisie aisée, se virent imposer un habit noir uni et un chapeau sans ornement, tandis que les députés de la noblesse portaient des costumes somptueux, souvent ornés de plumes, de soie, d’or et d’accessoires luxueux, comme des chapeaux à plumes et des manteaux richement décorés. En rendant la mode, y compris la plus éphémère, accessible aux plus modestes, le mode de production et de commercialisation appelé « fast-fashion » efface un autre moyen de distinction sociale, sous le même motif qu’il faut discipliner le peuple et limiter la surconsommation qu’on employait déjà au XVIe siècle : Montaigne disait « régler les folles et vaines dépenses des tables et vêtements »… tout en notant que renchérir le prix des biens ne faisait qu’en accroître le prestige et l’attrait, alors que le seul moyen efficace de les diminuer serait au contraire d’en affaiblir la valeur.

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Faut-il aller jusqu’à en conclure que si le moyen est contraire à la fin, c’est que ce n’est pas celle qu’il recherche, mais poursuit plutôt son effet immédiat : maintenir un certain accès à la mode comme outil de distinction sociale ?

Quoi qu’il en soit, ces divers exemples convergent pour donner à voir un malaise général, où les classes sociales se toisent et s’efforcent de maintenir leur statut relatif, alors que l’ensemble du pays fait face à la ruine de l’État et que la méfiance entre les catégories de population s’installe en attendant de voir les efforts demandés dans le cadre de l’élaboration du prochain budget. Cette profonde crise sociale doit être regardée en face, car elle sera lourde de conséquences politiques.

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La vie en rose

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Dans la Maison rose, côté salon © Bruno Vacherand-Denand/Passage Citron

Au cœur d’une nature préservée adossée à la colline de Grasse, les jardiniers de Lancôme entretiennent avec passion le domaine de la Rose : un conservatoire horticole dédié aux professionnels de la parfumerie qui ouvre ses portes au grand public. La promesse d’une promenade entêtante


Dans l’univers de la création, le parfum occupe une place à part. Synonyme de luxe depuis toujours – rareté du produit, puis prestige d’une marque –, il est surtout miroir de l’imaginaire. Alors qu’une odeur est ce qu’il y a de plus impalpable, elle est ce qui s’inscrit le plus profondément dans la mémoire. Qui n’a pas connu cette réminiscence immédiate d’un souvenir lointain ou oublié au contact de quelque effluve, cette stimulation incontrôlable d’une mémoire olfactive méconnue de soi-même et incroyablement vive ? « Parfois on trouve un vieux flacon qui se souvient / D’où jaillit toute vive une âme qui revient » (Baudelaire). Cette perception troublante se double d’un mystère : il n’existe pas de vocabulaire olfactif.

L’architecture, la gastronomie, voire l’équitation et la menuiserie disposent d’un vocabulaire qui leur est propre, des mots pour désigner des réalisations, des formes précises. Or, en parfumerie, il n’y en a pas. Les mots qui ont ailleurs un sens en donnent ici aux odeurs. On emprunte à la musique pour parler de « notes » et d’ « accords » ; au toucher, avec le « soyeux » et le « poudré » ; on fait appel au goût pour évoquer le « poivré » et le « vanillé » ; et, surtout, on sollicite des impressions pour comprendre ce que l’on sent – et ressent : le « sous-bois », la « rosée », la « nuit claire », l’« heure matinale »… Telles sont les inspirations d’un créateur de fragrances, d’un « nez », qui sait ajouter à sa partition ce qu’il faut de « liberté », de « féminité » ou de « virilité » selon ses compositions, afin que chacun puisse, en quelques gouttes, se reconnaître ou s’affirmer.

Au nom de la rose

Il y a cinq ans, la maison Lancôme a fait l’acquisition d’un domaine entre les Alpes et la Méditerranée, à Grasse, berceau mondial de la parfumerie – un savoir-faire grassois inscrit au patrimoine immatériel de l’Unesco. Blottis dans un vallon, sept hectares d’une nature incroyablement préservée attendaient les jardiniers et les agronomes du célèbre parfumeur pour renaître. Leur objectif, revitaliser ce précieux terroir afin de cultiver les meilleures plantes nécessaires à la création de nouvelles fragrances et de cosmétiques. Dans ce conservatoire horticole croissent la verveine, le jasmin, l’iris, la tubéreuse et bien sûr la rose. La Centifolia y est reine. Aussi appelée rose aux cent fleurs, ou rose de mai, les 300 molécules que renferment ses pétales offrent une gamme de senteurs particulièrement prisée. Mais ce n’est pas tout. « Pour qu’un domaine resplendisse, les plantes doivent vivre en bonne intelligence avec leurs voisines et s’entendre avec les espèces animales », explique Antoine Leclef, l’ingénieur paysagiste responsable des cultures. Il veille donc à la coexistence heureuse de quelque 287 espèces de faune et de flore. Parmi les 215 espèces de plantes évoluent 29 espèces de papillons, 25 d’oiseaux, 13 de chauves-souris, cinq de reptiles et d’amphibiens, sans compter les abeilles et autres insectes.

Aux beaux jours, une promenade entre massifs, roseraies et allées ombragées par des oliviers associe sciences et lettres. Écouter notre guide parler pollinisation, expliquer qu’il faut deux tonnes de fleurs de jasmin pour obtenir un litre d’essence, que la tonte des pelouses est confiée à des moutons pour préserver l’environnement ou encore qu’envoyer les pétales de fleurs chez un extracteur à seulement quelques kilomètres permet de garantir leurs qualités aromatiques n’empêche pas de penser à Rousseau qui écrit dans Émile que « l’odorat est le sens de l’imagination ».

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Grandes orgues et délices

L’imagination est plus que jamais stimulée au cœur du domaine, au sein de la Maison rose. L’entrée de ce mas futuriste – entièrement peint en rose tendre du sol à la toiture – se fait par une grande porte ronde vitrée, clin d’œil au Ô de Lancôme. Les architectes Lucie Niney et Thibault Marca (agence NeM) ont réhabilité un bâti ancien afin d’accueillir, dans une spectaculaire salle cathédrale ouverte sur la verdure, étudiants d’écoles de parfumerie, parfumeurs professionnels et visiteurs de passage. C’est là que trône un remarquable orgue à parfums, une pièce unique créée par l’ébéniste Thierry Portier et les ateliers de dorure Gohard (qui déploient généralement leur talent sur les boiseries du Louvre et de Versailles). Des dizaines de fioles s’étagent en demi-cercle autour du créateur de senteurs qui y prend place. Ainsi est-il possible d’assister à l’élaboration d’un parfum sous ses yeux, sous son nez, et de prendre conscience de l’incroyable gymnastique sensorielle que cela nécessite : comment recomposer l’odeur de la rose que l’on vient de sentir au jardin après l’avoir décomposée molécule par molécule, comment la reconstituer pour la faire entrer dans un flacon et pour qu’elle tienne ensuite sur la peau. Il faut tester des assemblages et des associations, jouer avec l’intensité ou la fugacité d’une essence, « tricher », en contrebalançant le caractère volatile d’un agrume par l’apport amer et épicé du petit grain du Paraguay, ou user de « trompe-l’œil olfactif » en remplaçant un fruit trop gorgé d’eau pour être distillé par une fleur aux mêmes saveurs…

Rimbaud a donné des couleurs aux voyelles ; Lancôme donne des odeurs aux couleurs. C’est d’ailleurs l’histoire du rose : à la fin du xviiie siècle, les horticulteurs sont parvenus à créer des roses roses. Cela a tellement plu au public que la fleur a donné son nom à une couleur qui, jusque-là, n’en avait pas[1]


À voir

Domaine de la Rose Lancôme : 74, chemin de Saint-Jean, 06130 Grasse. Visite guidée gratuite sur réservation : www.lancome.fr/domaine-de-la-rose


[1] Rose. Histoire d’une couleur, Michel Pastoureau, Seuil, 2024.

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