Ils n’osent plus écrire « islamophobe », mais c’est bien la petite musique qui monte : selon les journaux progressistes, la chaine info conservatrice aurait le tort de trop parler des musulmans.
Mon titre reprend le propos d’un fidèle de la mosquée Al-Hashimi à Saint-Ouen, rapporté dans un article du Monde consacré au « désarroi des musulmans lors de l’Aïd » : « Le climat est malsain, mais surtout à la télé… ». Au regard du contexte, on comprend bien que CNews est particulièrement visé. D’ailleurs un autre fidèle, Rachid, l’explicite : « Sur certaines chaînes, comme CNews, il n’y a aucune limite : nous sommes responsables de tout ».
Injustices
Je n’aurais pas eu envie d’écrire un billet sur ce thème, qui dépasse largement CNews, si dans le texte de ce quotidien n’avaient pas été enregistrées des opinions à la fois nuancées et critiques, en tout cas de nature à faire réfléchir tout citoyen de bonne foi.
Le sentiment diffus qu’éprouvent certains musulmans d’être en permanence ciblés ne peut pas être traité avec indifférence ou, pire, mépris même si on l’estime injuste tant à l’égard de CNews que de Bruno Retailleau, leur autre bête noire. On ne saurait tenir pour rien cette impression qui perçoit la chaine et le ministre, parfois, comme des ennemis de la religion musulmane quand ils ne s’attachent, par des analyses ou en action, qu’à ses dérives.
Pour la chaîne, il est permis certes de considérer que les sujets concernant l’islam occupent au quotidien une place importante. Mais la télévision ne les invente pas. Elle ne s’en préoccupe que dans la mesure où ils mettent en lumière des problématiques concernant la France, le risque de communautarisme et la sécurité publique. Pour ma part, à chaque fois qu’on les abordait, j’ai toujours veillé – sans jamais être contredit – à les appréhender sur un mode qui ne prenait pas le particulier pour le général et les transgressions graves de quelques-uns pour une dangerosité globale.
Cette volonté de ne pas universaliser ces hostilités est capitale. C’est la seule attitude qui évite que des compatriotes musulmans se sentent injustement stigmatisés alors qu’ils échappent, dans leur quotidien et dans leur rapport au pays, aux dénonciations qui parfois oublient toute nuance et ne mesurent la portée de leur verbe maladroit, imprudent, qui peut enflammer.
Les attaques politiques ou médiatiques contre CNews sont non seulement erronées – il suffit d’écouter les débats pour le constater – mais liberticides car elles ne cessent d’incriminer, en les caricaturant, des échanges où l’outrance trouve sa contradiction et l’islam modéré, ses défenseurs.
Islam et islamisme, les musulmans et des musulmans…
J’entends bien l’argumentation développée par Éric Zemmour qui estime – il est constant sur ce point – que l’islam et l’islamisme sont identiques et que le premier n’est structurellement, politiquement, pas compatible avec la République.
J’espère ne pas me tromper et ne pas tomber dans la facilité de l’extrémisme intellectuel mais il me semble qu’en laissant la religion là où elle doit être – dans la sphère privée et familiale – et en étant impitoyable avec les grignotages subtils ou ostentatoires d’un islam dévoyé et conquérant, on pourra peut-être s’accorder avec mon point de vue. D’ailleurs a-t-on un autre choix que cette synthèse d’acceptation lucide et de répression sans faiblesse ?
Est-il inconcevable de s’en tenir à des règles claires ? Par exemple l’obligation d’un comportement exemplaire, comme pour les fidèles des autres religions, l’interdiction de ce qui est au sens propre inhumain – se voiler, se cacher le visage – et le refus absolu de pratiques venant corroder notre démocratie pour la constituer en pré-charia.
Je sais qu’une vision pessimiste de l’islam en France peut soutenir que chaque acte musulman public ou dans des univers ouverts au public est inspiré par une idéologie d’emprise sur notre société à redresser à cause des « mécréants » qui la composent mais, à partir du moment où on met en œuvre une intransigeance pénale pour l’intolérable, ne peut-on consentir au moins à une incertitude pour le reste ?
Dans cet article du Monde, frappé par la qualité et la mesure des déclarations, notamment celle de Mme Bamba, mère de quatre enfants, je n’ai pas m’empêcher de ressentir comme un dégoût à l’égard de tous ceux, pas seulement à LFI, qui exploitent « cette chair à élections » que sont les musulmans, notamment dans les banlieues, en feignant de se pencher sur leur sort. Il est clair qu’ayant à choisir, je préfère le camp de ceux qui dénoncent ce que l’islamisme a de périlleux à la fois pour l’image de l’islam et pour notre pays, à celui des démagogues d’extrême gauche s’abandonnant à des hyperboles hypocrites au risque de valider et de favoriser le pire. C’est cet unique climat qui est malsain.
Spécialiste mondialement reconnu de la Syrie, Fabrice Balanche sait parfaitement de quoi les Frères musulmans sont capables et n’hésite pas à le dire. Enragés par sa lucidité et son expertise, les islamo-gauchistes qui règnent à Lyon 2 depuis des années tentent de le faire taire. Pas sûr qu’ils y parviennent.
Causeur. Le 1er avril, alors que vous donniez un cours à l’université Lumière Lyon 2, votre amphithéâtre a été envahi par des militants masqués, islamistes, gauchistes ou les deux, et vous n’avez eu d’autre choix que de quitter les lieux. Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous depuis cette tentative d’intimidation ?
Fabrice Balanche. J’en ai vu d’autres. Ce n’est pas la première fois que j’ai des problèmes à l’université ! Il y a une dizaine d’années, j’ai fait un procès à l’Institut d’études politiques (IEP) de Lyon, qui avait recalé ma candidature à un poste de maître de conférences. Le tribunal a reconnu le manque d’impartialité de la commission d’admission, qui penchait exclusivement à gauche. Le jugement, qui fait d’ailleurs aujourd’hui jurisprudence, m’a donné entièrement raison. Depuis, je passe pour un emmerdeur.
Qu’est-ce qui déplaisait tant au jury de l’IEP de Lyon pour qu’il ne veuille pas de vous comme collègue ?
Mes travaux portent sur les alaouites et sur les communautarismes en Syrie. Autrement dit, mon prisme n’est ni marxiste ni décolonial. Cela ne cadre pas avec le dogme académique dominant. Raison pour laquelle il m’a fallu un certain temps, au début de ma carrière, pour accéder à un emploi stable à la faculté. Mon sujet faisait tiquer. Mais il ne s’agit pas d’un cas isolé. Beaucoup de chercheurs anticonformistes ont du mal à trouver une place digne de ce nom à l’université. À Lyon 2, c’est devenu patent. Depuis quelques années, l’équipe dirigeante ne recrute que des personnels qui lui ressemblent idéologiquement, ce qui lui permet de s’assurer d’autant plus facilement sa reconduction à chaque élection interne. Sociologiquement, l’établissement ressemble à une citadelle d’extrême gauche, où vous avez intérêt à exprimer les mêmes positions politiques radicales que le conseil d’administration si vous voulez maximiser vos chances de décrocher des crédits de recherche.
On dit quand même que la présidente de l’université, Isabelle von Bueltzingsloewen, n’a témoigné aucune complaisance vis-à-vis des étudiants musulmans qui voulaient organiser un iftar (rupture du jeûne) dans un local de l’université…
Dans un premier temps, elle s’est montrée en réalité très accommodante avec ces étudiants, puisqu’elle a commencé par accéder à leur requête en leur demandant juste de rebaptiser l’opération « repas partagé » et de supprimer un visuel Instagram où figuraient une femme voilée ainsi qu’un homme coiffé d’une calotte islamique. Seulement, ils ont refusé ce compromis en l’accusant d’islamophobie. Elle était dès lors dans l’obligation de leur interdire la salle. Le lendemain, des étudiants ont bloqué le campus en signe de protestation. Or, au lieu de leur envoyer la police pour faire un rappel à la loi, la présidente a préféré répondre mollement en proposant la rédaction d’une charte de laïcité !Comme si la loi de 1905 n’était pas déjà une charte de laïcité…
C’est donc en vous prononçant publiquement pour la fermeté républicaine que vous vous êtes retrouvé pris pour cible par ce groupe d’étudiants le 1er avril. Après ces violences, avez-vous reçu des soutiens en interne ?
De la part de mes collègues les plus proches au sein du département de géographie, oui. Mais chez la grande majorité de mes pairs, c’est plutôt l’indifférence et la méfiance qui ont prévalu, jusqu’aux accusations de la présidente, qui a carrément déclaré que ce qui m’arrivait ne l’étonnait pas, étant donné mes propos sur Gaza. Cela reflète malheureusement l’opinion majoritaire à Lyon 2.
Aujourd’hui quelle est la place de l’islamisme sur le campus ?
C’est très difficile à évaluer. Le bâtiment dans lequel j’enseigne est assez excentré, il n’est pas dans le cœur du réacteur. J’ai certes assisté à des prières dans les couloirs, mais toujours de façon individuelle. Ensuite, il y a l’association des Étudiants musulmans de France (EMF), qui est très puissante. La preuve, elle est hébergée à la maison des étudiants de la métropole de Lyon, elle-même sous administration de la coalition de gauche écolo au pouvoir dans le Grand Lyon.
À cet égard, avez-vous constaté un avant et un après 7-Octobre ?
Oui, bien sûr. Depuis un an et demi, la cause palestinienne est abondamment utilisée par les islamistes pour mobiliser et élargir leur base militante. Cela leur permet de sortir du cadre purement musulman pour attirer à eux des gauchistes et même des LGBT. Du 7 octobre 2023 à la mi-décembre 2024, rien qu’à Lyon 2, on a ainsi eu droit à huit conférences propalestiniennes, soit une par mois ouvrable, en collaboration étroite avec le syndicat Solidaires étudiant-e-s. Je me suis rendu compte que certains intervenants, invités en personne par le vice-président Willy Beauvallet[1] étaient conviés aux frais de l’université, notamment la fameuse Maya Wind, une post-doctorante américaine qui concentre ses critiques sur les universités israéliennes.
Vous décrivez un phénomène de grande ampleur à Lyon 2. N’est-ce pas décourageant ? Comment tenez-vous le coup ?
Je fais le minimum syndical. Je donne mes cours, le plus consciencieusement du monde, car pour beaucoup d’étudiants, c’est leur seule chance de promotion sociale, donc je tiens à être correct envers eux. Mais tout ce qui a trait à mon travail de recherche se déroule en dehors de Lyon 2. Je collabore notamment avec la Hoover Institution, un think tank affilié à l’université de Stanford.
Venons-en justement à votre champ de recherche : le Proche-Orient. Dans quelle mesure le 7-Octobre a-t-il modifié le rapport de forces dans la région ?
C’est un processus toujours en cours. Et le gros morceau reste l’Iran, dont l’avenir demeure incertain. Donald Trump, pour l’instant, est en phase de négociation avec Téhéran tandis que Benjamin Nétanyahou est surtout occupé par Gaza – sans doute en partie d’ailleurs pour masquer son incapacité à se faire entendre à Washington sur le dossier iranien. Donc une intervention militaire en Iran n’est pas à l’ordre du jour. Mais Israël n’acceptera jamais que les mollahs aient la bombe atomique, si bien que Nétanyahou voudra à un moment ou à un autre frapper leur pays, non seulement ses sites nucléaires, mais aussi ses installations pétrolières et gazières, afin de susciter un changement de régime. En attendant, tout cela reste en suspens, de sorte que la séquence ouverte le 7-octobre n’est pas encore close.
Au Proche-Orient, Trump tend non seulement la main aux Iraniens, mais affiche aussi de façon éclatante son inclination pour l’Arabie saoudite. Comment interprétez-vous cela ?
Si Trump a fait ce voyage, c’est d’abord pour signer des contrats, qui se chiffrent en centaines de milliards de dollars, au bénéfice de l’économie américaine, et pour montrer que sa politique étrangère ne mise pas uniquement sur une réconciliation avec la Russie. Sur un plan plus local, son objectif était de rétablir un lien privilégié avec les Saoudiens, dont les relations avec Joe Biden étaient mauvaises. Pour ce faire, il leur a offert un cadeau spectaculaire, en leur permettant de remporter une victoire diplomatique au nez et à la barbe des Qataris.
Comment cela ?
En choisissant de rencontrer le nouveau leader syrien Ahmed Al-Charaa à Riyad au lieu de Doha où, pourtant, celui-ci a beaucoup plus d’amis et de soutiens, Trump a voulu signifier que la Syrie se reconstruira certes avec l’argent qatari, mais sous le parrainage diplomatique des Saoudiens. En d’autres termes, dans la plus pure tradition féodale, on a enjoint au Qatar, mais aussi au Koweït et aux Émirats arabes unis, de passer désormais par l’intermédiaire de l’homme fort de Riyad, Mohammed ben Salmane, pour discuter avec Washington.
Ce faisant, Trump a contribué à respectabiliser Al-Charaa, ancien djihadiste dont rien ne garantit qu’il se soit assagi…
Al-Charaa est un type très intelligent, très pragmatique. Il dit à ses interlocuteurs ce qu’ils ont envie d’entendre. Il a même indiqué qu’il voulait rejoindre les accords d’Abraham – ce qui n’est pas crédible évidemment. Il montre patte blanche, car il a besoin d’une levée des sanctions internationales afin de pouvoir récolter les fonds qui lui permettront de consolider son pouvoir, d’unifier les différentes factions islamiques du pays et de restaurer les services publics de manière à reconstruire une base sociale.
Riyad, 14 mai 2025 : Donald Trump reçoit Ahmed Al-Charaa, président intérimaire de la Syrie, aux côtés du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane. La rencontre consacre l’Arabie saoudite comme nouveau parrain régional de la reconstruction. Bandar Aljaloud/Saudi Royal Palace via AP/SIPA
Quid des minorités, très nombreuses dans ce pays ?
Al-Charaa vise clairement la création d’une République islamique sunnite en Syrie. Toutefois la plupart des minorités devraient être protégées, comme autant de communautés fossiles faisant partie du patrimoine local, à l’image des ruines de Palmyre. Je pense qu’Al-Charaa prendra soin en particulier de la sécurité des chrétiens, auxquels les Américains sont très attentifs. Je suis en revanche moins rassuré pour les laïcs du pays, de toutes origines confessionnelles, qui vont se retrouver sous un régime incapable d’accepter l’impiété. Mais tout le monde me dit qu’on n’a pas le choix et qu’Al-Charaa est seul capable de cadrer le pays.
Nos amis kurdes ont-ils raison de penser, comme on le dit, que la France les protège ?
Oui, nous avons quelques forces spéciales sur le terrain chargées de veiller sur leur sort. Même si ce sont surtout les Américains, disposant de 1 000 hommes sur place, qui ont les clés de leur avenir.
Mais rien n’assure que les Américains ne les lâcheront pas…
Assurément. Le fait que Trump ait adoubé Al-Charaa les inquiète énormément. À quoi s’ajoute la dissolution du PKK, annoncée le 12 mai et qui mène Erdogan à demander à présent le désarmement de toutes les milices kurdes. Enfin et surtout, les Américains doivent quitter l’Irak à partir de la fin de l’année. Le jour venu, il leur sera très compliqué de continuer à assurer la logistique de leur base en Syrie.
Les alaouites, dont sont issus les Assad, sont-ils menacés ?
Le nouveau régime cherchera à en éliminer autant que possible. Au moyen d’une « épuration ethnique blanche ». C’est-à-dire en faisant en sorte que beaucoup s’exilent. C’est comme cela qu’il faut comprendre les exactions en cours contre eux. On en massacre quelques milliers pour que les autres aient envie de partir.
Dans ces conditions, Emmanuel Macron a-t-il eu raison d’accueillir Al-Charaa en grande pompe le 7 mai ?
Je ne pense pas qu’il ait eu tort. La diplomatie sert aussi à parler à ses ennemis. Toutefois, on n’était pas obligé de carrément dérouler le tapis rouge ni de permettre au leader syrien de visiter la tour Eiffel ! On aurait pu lui suggérer de reprendre l’avion tout de suite. Cela dit, Macron a quelques raisons valables de lever les sanctions contre la Syrie, qui avaient été prises contre un pouvoir désormais déchu, et de chercher à s’entendre avec le nouveau régime. Il y a notamment en jeu le renouvellement de la concession du groupe marseillais CMA-CGM pour le port de Lattaquié. Et puis des contrats avec des entreprises françaises, pressenties pour la restauration du réseau énergétique syrien. C’est une bonne chose pour notre économie, à condition bien sûr que la facture soit payée par les pays arabes et pas par l’Union européenne…
En 2011, lors du printemps arabe, beaucoup d’observateurs ont découvert, stupéfaits, que quand les dictatures tombent, elles n’accouchent pas forcément de merveilleuses démocraties libérales. Quinze ans après, sommes-nous revenus de nos illusions ?
Oui, nous sommes beaucoup plus réalistes. Notre ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, se borne ainsi à exiger un « gouvernement inclusif » à Damas. Comprenez qu’il s’estimera satisfait s’il y a un ministre alaouite, un ministre druze et un ministre chrétien. On se contente d’un autoritarisme plus ou moins éclairé, et voilà.
Mais derrière cette façade rassurante, le pays peut-il devenir un QG islamiste ?
Ce risque existe évidemment. La Syrie pourrait devenir pour l’islam sunnite, et singulièrement pour les Frères musulmans, ce que l’Iran est depuis 1979 pour l’islam chiite : une base arrière de prosélytisme, voire de terrorisme. Les Jordaniens l’ont très bien compris : ils viennent d’interdire le mouvement des Frères musulmans. Ils ont vu le niveau de menace monter nettement avec ce qui se passe à Damas, mais aussi à Gaza. Comme la plupart des leaders arabes, le roi de Jordanie s’inquiète beaucoup du sort des Palestiniens dans ses discours, mais il ne fait pas grand-chose. Pour les islamistes, cette inaction est une raison de plus de le renverser.
Que conseilleriez-vous à Macron, si vous étiez, comme votre quasi-jumeau Emmanuel Bonne, lui aussi fin connaisseur de la Syrie, le conseiller diplomatique de l’Élysée ?
Je plaiderais pour une Syrie fédérale, afin que les minorités disposent de territoires sanctuaires et de contre-pouvoirs les protégeant de la dérive autoritaire qui ne manquera pas de se produire. Mais je crains que nous soyons complètement inaudibles dans une région où les seuls pays respectés sont ceux qui justifient d’une présence armée. Or nous avons surtout choisi la présence humanitaire. Comme quoi nous ne sommes pas complètement revenus de nos illusions.
[1] Visé par une enquête du parquet de Lyon après avoir rendu hommage au terroriste Hassan Nasrallah, Willy Beauvallet a démissionné le 5 mai de son poste de vice-président de l’université Lumière Lyon 2.
L’ensauvagement ? Quel ensauvagement ? Cinq ans après avoir raillé un prétendu « Kamasutra de l’ensauvagement », Emmanuel Macron persiste. Dans le sud, il a de nouveau balayé d’un revers de main la problématique, la reléguant au rang de formules creuses bonnes pour la presse à scandales. Au sommet de l’État, une âme sèche préside au déclin de la France, selon notre chroniqueur.
Dans le monde parallèle d’Emmanuel Macron, les violences et les meurtres que sèment les loups dans les villes restent des péripéties méprisables. Se joignant aux alarmistes climatiques, il a déclaré samedi à Monaco : « Certains préfèrent, pendant ce temps-là, brainwasher (laver le cerveau) sur l’invasion du pays et les derniers faits divers ». Cette incapacité du chef de l’Etat à ressentir la moindre empathie, y compris pour les proies des barbares qui tuent comme ils respirent, confirme son désintérêt pour les viles questions sécuritaires et pour le désespoir des endeuillés.
Une âme sèche et futile préside au déclin de la France. Narcisse se contre-fiche de l’enfer que fait subir aux plaintifs sa société ouverte aux quatre vents de l’immigration. Les intifadas qui ont ponctué la victoire du PSG, les agressions antisémites qui se succèdent, les crimes racistes qui apparaissent ici et là ne sont il est vrai pas démontrables par la science, appelée par le président pour justifier ses priorités sur le réchauffement et son dédain pour la plèbe. Derrière les propos révoltants du chef de l’État, c’est un univers glacial, élitiste et aride, qui se révèle agresseur des faibles laissés sans protection. Samedi, le premier président de la Cour de cassation, Christophe Soulard, a, dans la même veine, dénoncé sur Mediapart un « populisme anti-judiciaire », au prétexte que l’opinion s’indigne de ces juges qui n’osent sanctionner sévèrement les voyous des cités mais n’hésitent pas à accabler les policiers qui leur résistent ou les politiques qui dénoncent les prétentions de certains magistrats à imposer leur loi. Ces violences institutionnelles attisent l’exaspération contre un système injuste, inhumain.
Dès à présent, les parents meurtris par des rapaces venus de la « diversité » ne se taisent plus. Ils se révoltent contre l’abandon de l’Etat. Vendredi, le père de Benoit, 17 ans, mortellement poignardé à plusieurs reprises à Dax, dans la fanzone de la Ligue des champions, a laissé éclater sa colère : « On accueille des réfugiés et après ils tuent nos enfants (…) Il a fallu qu’une racaille de merde vienne lui enlever la vie (…) J’ai la haine (…) On n’est plus en sécurité nulle part ». L’autre jour, c’était la mère d’Elias, 14 ans, tué à Paris par deux jeunes récidivistes, qui interpellait dans une lettre ouverte ceux « qui se sont moqués de nous » : les juges des enfants qui ont laissé les deux adolescents se rencontrer en dépit d’une interdiction judiciaire, leurs parents démissionnaires, le maire du 14ème « qui n’a pas jugé bon de sécuriser les abords du stade », les médias « qui n’ont pas eu l’honnêteté d’écrire les mots machette et hachette, préférant minimiser l’acte en parlant de couteau », « les différents ministres de la Santé, de l’Éducation nationale, de la Justice, de l’Intérieur qui n’ont pas pris la mesure depuis des années de la dérive d’une partie de la jeunesse, de son ensauvagement, de l’impact des réseaux sociaux et de la banalisation de la violence ». « La France a tué mon mari ! », avait accusé Harmonie Comyn, veuve d’un gendarme tué par un voyou en aout 2024. Les familles de Lola, Philippine, Thomas et bien d’autres encore sont les autres victimes d’une caste prétentieuse qui, chef de l’État en tête, ne tient plus que par le déni, l’insulte, la morgue, la méchanceté. Les jours de ce petit monde imbuvable sont comptés.
Vendredi soir 18h30, BFM TV. Au menu, le clash Trump – Musk. Présentateur : l’excellent François Gapihan. Sur le plateau : le très international Ulysse Gosset, Patricia Allémonière… et moi. À ma grande surprise, au bout de quelques minutes, la chaîne fait intervenir Thierry Breton à distance. L’ancien commissaire européen part dans une diatribe pour expliquer qu’Elon Musk a eu tort de faire de la politique après avoir été un homme d’affaires. Faites ce que je dis, pas ce que je fais : c’est exactement ce qu’a fait Thierry Breton… mais avec des succès contestés ; les actionnaires des entreprises qu’il a gérées ayant perdu beaucoup d’argent, voire tout leur argent. Voici un extrait de cet échange qui a été vu plusieurs millions de fois sur les différents réseaux sociaux, cliquez là. Après l’avoir sagement écouté, j’ai donc pris la parole : « Je ne voudrais pas être méchant avec Thierry Breton mais, quand même, vouloir donner des leçons d’économie à Elon Musk qui est aujourd’hui l’homme le plus puissant du monde en termes économiques. Quand on regarde – je suis désolé de vous le dire M. Breton – mais Atos qui est quasiment en faillite, Orange que vous avez mis aussi au tapis… Votre gestion des entreprises ne vous permet pas de donner de leçons à l’homme qui a réussi Tesla et SpaceX… »
Ce à quoi Thierry Breton a répondu : « Non mais pardon, je ne sais pas qui est ce Monsieur, je ne le connais pas mais euh… » Je l’ai alors interrompu : « Non mais moi je vous connais Monsieur, je suis un ancien financier, je vous ai bien connu sur les marchés… ».
Je faisais référence au surnom qui lui était donné sur les marchés financiers : « Monsieur Ripolin » car il était connu pour repeindre les façades des entreprises qu’il dirigeait sans jamais régler aucun des problèmes auxquelles elles étaient confrontées.
S’en est suivi une autojustification de Thierry Breton dans laquelle il a chargé chacun de ses successeurs pour justifier ses échecs.
J’aurais pu être plus sévère avec Thierry Breton et rappeler toutes les entreprises qu’il a dirigées… et plantées : sur BFM TV, j’ai cité Atos et France Telecom (devenue Orange), mais j’aurais pu ajouter Bull, Thomson mais aussi sa piètre performance en tant que ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie sous Chirac entre 2005 et 2007 ou son mandat catastrophique de commissaire européen sous la présidence d’Ursula von der Leyen.
Je me suis amusé à aller voir sa fiche Wikipédia. Voici ce qu’on y trouve :
« Gestion des entreprises : Breton a dirigé plusieurs grandes entreprises, notamment Thomson, France Télécom et Atos. Ses détracteurs affirment qu’il a laissé ces entreprises en difficulté après son départ, bien qu’il ait continué à progresser dans sa carrière. »
Enfin, j’aurais pu lui demander pour quelle raison a-t-il pris la nationalité sénégalaise en 2015 ?
Dernière minute : on me souffle dans l’oreillette que Thierry Breton enchaîne les séances de média-training dans le but de… se présenter à la présidentielle en 2027.
Peut-être que Thierry Breton devrait lire les commentaires le concernant sur les différents réseaux sociaux ?
Cela lui évitera certainement de nouvelles déconvenues.
Si tu veux la paix… Comment soumettre son adversaire à sa volonté ? Les bonnes leçons d’Edward N. Luttwak.
D’abord, les mots. Le titre original de ce livre dont la première mouture remonte à 1987 est : Stratégie. La logique de la guerre et de la paix. L’étymologie nous apprend trois choses :
que le stratège, grec, n’est autre que le chef d’armée,
la stratégie, une notion spéciale de l’art militaire,
et l’auteur de ce livre, un « stratégiste », celui qui, depuis une acception entérinée en 1831, connaît la stratégie.
Laquelle est ainsi un art qui use et s’exerce au moyen d’instruments meurtriers, à valeur parfois principiellement dissuasive (cas de l’arme atomique), mais aussi de bonnes paroles, de ce que nous nommons la géo-psychologique et de géopolitique, – la diplomatie, tant sur le cours que le long terme, devant s’insérer dans la panoplie des instruments dont use le stratège digne de ce nom. Si, en France, le chef de l’Etat est le chef des armées, l’on en déduira qu’outre grands et moyens officiers, le président de la République et autres membres composants les organes, consultatifs ou décisionnels en la matière, doivent, à la lettre, se percevoir comme des artistes pratiquant un art dont seul notre orgueil pourrait nous croire qu’il peut devenir science. C’est ce qui, pour l’essentiel, ressort de ces 400 pages, et ce qu’avait bien compris Churchill, ainsi que nous le relate Luttwak.
Le Premier ministre britannique Churchill photographié en 1941.L’économiste et historien américain Edward Nicolae Luttwak, spécialiste en géostratégie.Photos DR.
En septembre 1941, le général en chef du British Bomber Command, Charles Portal, présenta au Premier ministre un plan prévoyant la mobilisation de 250 escadrons durant six mois de campagne, soit 4000 bombardiers et dont l’issue « devait être rien de moins que la victoire totale » sur l’Allemagne. Malgré la logique imparable de ce plan qui déployait ses étapes avec, en bout de course, la garantie d’une victoire d’autant plus évidente que ce plan paraissait avoir pensé à tout, malgré, donc, des apparences qui ne paraissaient nullement trompeuses (et le contexte proprement militaire de l’époque qui rendait cette préconisation comme étant la seule rationnellement envisageable), Churchill « choisit pourtant de se fier à son instinct [c’est nous qui soulignons] stratégique et, malgré le pouvoir de conviction de l’argumentation technique exposée par le plan, il présenta [ses] objections au général Portal. » On les résumera ainsi :
on ne peut en la matière se fier à la logique arithmétique ;
il est impossible d’intégrer dans le raisonnement toutes les variables (dont l’une, considérable, est ce que sera la riposte effective de l’ennemi, laquelle, elle-même, ne dépend pas uniquement de sa seule capacité technique et de sa volonté) ;
il n’y a pas de méthode sûre [c’est nous qui soulignons encore] ;
pas plus que l’économie, la stratégie n’est une science.
Ici ajouterons-nous que Luttwak est certes un « stratégiste » mais, surtout un polémologue, lequel pratique une science très, trop humaine comme dirait Nietzsche puisqu’elle est humainement incapable de maîtriser toute la chaîne de commandement – c’est-à-dire, au sens technique du terme, l’engrenage implacable des causes de toutes natures qui permettent de s’assurer de l’efficacité d’une action militaire donnée.
Luttwak explique dans la foulée que « l’impact insignifiant » des opérations aériennes effectuées en 1943 par la 8ème Air Force américaine sur la machine de guerre allemande, conçues avec le même genre de pure logique comptable, arithmétique et matérielle que celle proposée par le BC britannique en 1941, a permis de vérifier in concreto le bien-fondé de la position de Churchill.
La stratégie est en effet l’art de la maîtrise du paradoxe. Mais, le problème c’est que nous ne sommes pas en présence de deux seuls discours parallèles qu’il suffirait de comparer, confronter pour ensuite les associer en une saine et victorieuse synergie. Des doxa, des discours, des logiques et des faits, il y en a des masses, et non seulement il y en a des masses, mais elles-mêmes évoluent en permanence en interagissant les unes sur les autres en un incessant jeux de miroirs. Dans sa réponse à Portal, à l’automne 1941, Winston Churchill expliquait qu’il « paraît probable que la défense au sol allemande et les chasseurs équipés pour le vol de nuit viendront à bout de nos attaques aériennes » et que « toutes les choses étant toujours simultanément en mouvement [principe même du paradoxe dynamique], il est tout à fait possible que la dispersion des ressources militaires atteigne, en 1943, une telle ampleur que leur survie sera dans une large mesure indépendante des installations situées sur le sol allemand. » C’est une grande banalité d’écrire qu’à l’exemple d’un joueur d’échecs ou de go, le stratège, par la définition même de son art, prétend pouvoir prévoir ; mais il ne le prétend que parce que, d’abord et avant toute autre considération, il sait raisonnablement pouvoir repérer d’un seul coup d’œil l’emplacement de ses propres pièces sur l’échiquier et celles de son adversaire ; il voit et, à partir de là, il espère à bon escient entrevoir, présager des multiples possibilités de mouvements, pour, ensuite (ou, plutôt, d’un point de vue neurocognitif : simultanément) voir et sélectionner le déplacement victorieux. Mais, le champ de bataille(s) de deux (ou n)belligérants – et notons au passage que deux pays en paix, ou même seulement indifférents l’un à l’autre, ne sont que deux (futurs) belligérants qui s’[l’] ignorent – est bien plus vaste que la surface de l’échiquier, et le nombre de coups possiblement infini. Si bien que, dans l’absolu, l’ambition et la fonction de l’art de la stratégie, en dernière analyse et en bon (vocabulaire) marxiste, se résumeraient à la compréhension de l’aléatoire quantique.
Aussi notre auteur-stratégiste excelle-t-il à commenter le… passé (tenir Verdun en 1916 pour les Français, s’acharner à ravitailler en vain Paulus à Stalingrad pour les Allemands, maintenir indéfiniment dans le temps l’action de l’UNWRA – jusqu’à créer des abcès de fixation [topique et psychique, c’est nous qui ajoutons] – et des organisations humanitaires en général, ont-ce été là des actions de bonne stratégie, c’est-à-dire en définitive, de bonne politique ?), quitte à pousser le paradoxe un peu loin en nous expliquant que, si les camps à statut de réfugiés à vie avaient existé dès l’aube de l’ère judéo-chrétienne, le continent européen serait aujourd’hui « couvert de camps abritant les dizaines de millions de Gallo-Romains déracinés, de Vandales abandonnés, de Burgonde vaincus et de Wisigoths déplacés (…) ». Cette image est en vérité un sophisme, car l’utilité de ces « camps » (avec la notion juridico-politique de ‘‘réfugiés’’ qui l’accompagne) ne pouvait en ces temps se ressentir, d’une part, parce que la politique de l’empire romain était plutôt assimilationniste, d’autre part, parce que ces peuples barbares, d’origine indoeuropéenne, étaient d’abord nomades (et, que ce n’était qu’à l’issue de leurs périples, poussés par le vent d’est, et parvenus à l’extrémité de la péninsule euroasiatique qu’ils pouvaient se fixer). Ils n’avaient ainsi pas le temps de développer ni le ‘‘loisir’’ d’entretenir le sentiment de la nostalgie de leurs terres d’antan, et, de la sorte, n’étaient guère enclins à revendiquer un quelconque « droit au retour »… Alors, le processus de fusion-absorption de peuple à peuple semblait fonctionner. Ce qui laisserait à envisager qu’il s’agit de la plus efficace des stratégies de… paix.
Il est vrai que nous n’avons pas précisé dans quel sens, en chaque occurrence, devait s’établir ledit processus. Il est vrai aussi que, de ce très remarquable ouvrage, il est possible de (re)tirer non seulement quelques cartouches, mais aussi quelques enseignements… dirons-nous plus prosaïques, tangibles, d’utilité immédiate… que des stratèges civils et militaires de tous camps, humbles d’esprit et de compétences inter (ou multi-) disciplinaires, se feront autant un plaisir qu’un devoir de découvrir.
Edward N. Luttwak, Le Grand livre de la stratégie, Odile Jacob, 400 pages.
Quand, à Montagnac, on vous répond “Salam aleykoum” au lieu de “Bonjour, monsieur”, ce n’est pas une maladresse — c’est le symptôme criant d’un séparatisme islamique qui, désormais, joue à visage découvert. Analyse.
« Ici, on dit Salam aleykoum, pas Bonjour, monsieur ! » — c’est la réponse qu’a reçue un inspecteur du service départemental à la jeunesse, à l’engagement et aux sports, lors d’un contrôle à Montagnac (Hérault). À cet épisode navrant et révélateur se sont ajoutés des faits de violence et des insultes anti-Français répétées. Résultat : l’Union sportive de cette commune de 5 000 habitants, située entre Sète et Béziers, a été privée de toute subvention publique.
« On est des bénévoles, des éducateurs, pas des criminels », se défend l’un des membres du club dans Midi Libre1. Mais du côté de la préfecture, le constat est tout autre. « Il y a des clubs de sport où l’on ne pratique pas que le sport, et les familles qui confient leurs enfants à ces associations doivent le savoir », déclare le préfet de l’Hérault dans une enquête du Figaro2.
Le même article relaie aussi l’inquiétude d’un éducateur : « Quand on explique à nos gamines qu’elles ne peuvent pas jouer avec un voile et que, le week-end suivant, dans le département voisin, on affronte une équipe où ça ne pose aucun problème, notre argumentaire devient difficile à tenir. » Un témoignage qui souligne, au-delà du cas de Montagnac, l’urgence de clarifier la législation sur les pratiques religieuses ou le port du voile dans le sport amateur.
Parfois, il suffit d’un terrain de football, d’un match banal dans un village du sud de la France, pour que tout ce que l’on croyait enfoui remonte à la surface. En mai 2025, le club amateur de Montagnac, dans l’Hérault, a été suspendu par la Fédération française de football. Cette décision, suivie de la suppression des subventions publiques, fait suite à une série d’incidents survenus au fil des mois : invectives violentes, insultes communautaires, refus de parler français sur le terrain.
Des faits graves
Les faits ont d’abord été rapportés par les médias locaux — Midi Libre, France Bleu Hérault, Métropolitain Montpellier. Le ton était mesuré, presque embarrassé. Les articles mentionnaient des « tensions croissantes », des « propos déplacés », des « incidents répétés » sans toujours nommer ce qui, en creux, apparaissait clairement : le rejet de la règle commune, et avec elle, celui du pays lui-même. Le souci d’apaisement était palpable, mais la gêne aussi. Les journalistes semblaient marcher sur des œufs, comme s’ils redoutaient d’ouvrir un débat trop chargé pour la tranquillité locale. Pourtant, la gravité transparaissait, ligne après ligne.
Puis les médias nationaux ont repris l’affaire. CNews, dans sa ligne habituelle, y a vu une illustration de la fragmentation communautaire, et a donné la parole à des élus et à des éducateurs sportifs désemparés. Sur les réseaux sociaux, l’affaire a été reprise et commentée largement, souvent avec excès. Certains y ont vu une simple anecdote gonflée par les médias conservateurs. D’autres, un fait révélateur de tensions profondes. Des sites comme Jeanmarcmorandini .com ou Valeurs Actuelles ont relayé les propos tenus sur le terrain — « sales Français », « sales Blancs » — tandis que d’autres, à gauche, ont appelé à « contextualiser », à « comprendre les causes sociales » plutôt que de pointer les faits bruts.
Puisqu’on vous répète que le climat se réchauffe !
Cette dissonance médiatique n’est pas nouvelle, mais elle dit quelque chose : on ne sait plus très bien comment parler de ce genre d’événements. Faut-il les taire, de peur d’alimenter un climat ? Faut-il les nommer, au risque d’être taxé d’arrière-pensées idéologiques ? Une chose est certaine : ce silence embarrassé, ou ce bruit de surface, ne change rien à la réalité perçue sur le terrain. Les éducateurs locaux, les arbitres, les bénévoles, eux, n’ont pas lu ces polémiques dans la presse. Ils ont vu le mépris dans les regards, entendu les insultes, et constaté le refus explicite de s’inscrire dans un cadre commun. Ils ne parlent pas en termes idéologiques. Ils parlent d’une fatigue. D’un abandon.
Mais au-delà de cette agitation, quelque chose d’essentiel s’est joué. Ce n’est pas une simple incivilité. Ce n’est pas seulement un débordement. C’est un signe. Le signe d’un refus, non pas ponctuel, mais structuré : celui de partager un espace commun. Ce qui est mis en cause ici, ce n’est pas la diversité. C’est la capacité à faire société dans un cadre reconnu, avec des règles partagées.
Car un terrain de football, dans un village, devrait être un lieu de lien. Un lieu où l’on apprend à obéir à une règle, à parler la même langue, à reconnaître l’arbitre, même lorsqu’il se trompe. Un lieu modeste, mais significatif, où l’on accepte de cohabiter dans un même cadre, sans l’imposer aux autres, sans le contourner. À Montagnac, c’est cela qui a été brisé.
Je vis dans ce pays depuis longtemps. J’en connais la complexité. Je ne suis pas naïf. Je sais ce qu’il en coûte de quitter son monde d’origine pour en épouser un autre. Mais je sais aussi que cela reste possible. Je connais des hommes, des femmes, venus d’ailleurs, qui ont fait ce choix. Non pas en reniant ce qu’ils étaient, mais en acceptant de devenir autre chose : des Français. Par les mots, les usages, l’histoire, le respect d’un cadre commun.
Ceux-là n’élèvent pas la voix. Ils ne réclament pas de place : ils la prennent, par leur discrétion, leur travail, leur fidélité. Ils savent que la France n’est pas un service, mais une promesse. Et que cette promesse demande un effort, un engagement, parfois un renoncement. Ils n’ont rien d’héroïque, mais ils tiennent. Et par eux, quelque chose tient encore.
À l’inverse, il y a ceux qui refusent. Non pas parce qu’ils ne peuvent pas. Mais parce qu’ils ne veulent pas. Ceux-là transforment la France en décor. Ils la traversent sans l’habiter. Ils s’en plaignent sans la connaître. Ils la rejettent tout en profitant d’elle. Et ce rejet, aujourd’hui, ne se cache plus. Il s’affirme, parfois brutalement, jusque sur un terrain de foot.
Le sport ciblé par les islamistes
Montagnac n’est pas un cas isolé. Mais il a le mérite de montrer, simplement, sans théorie ni slogan, ce qui est en jeu. Il ne s’agit pas de peur, ni d’hostilité. Il s’agit de transmission. De la langue, des règles, de ce qui permet encore à des personnes différentes de coexister sans s’affronter. Rien de glorieux, rien de grandiose. Mais sans cela, tout se délite.
Je ne crois pas que tout soit perdu. Mais je crois que le lien est fragile. Et que ce lien ne tiendra pas sans une exigence retrouvée. Pas une exigence brutale. Une exigence simple : celle de reconnaître ce pays pour ce qu’il est. Non pas parfait. Mais accueillant, à condition d’être reconnu en retour. Cela ne demande pas de tout aimer. Mais de vouloir y habiter. Réellement. Avec d’autres, dans une langue, une patience, une mémoire.
La France n’est pas un guichet. Ce n’est pas non plus une abstraction. C’est un lieu concret, une langue, des habitudes, une mémoire. Cela n’impose pas d’oublier d’où l’on vient, ni d’aimer tout ce qu’on y trouve. Mais cela suppose de vouloir y vivre avec les autres, de faire un pas vers eux, de reconnaître les règles du jeu commun. Tant que ce désir existe, tant que ce geste simple se transmet — celui de rester, d’écouter, de parler — alors il reste quelque chose à tenir.
Et il faut bien le dire : sans politesse — au sens le plus ancien, le plus exigeant — il n’est pas de société. S’asseoir à la table commune, ce n’est pas seulement y prendre place, c’est aussi y observer un silence, apprendre les gestes, respecter les usages. Ce n’est pas exiger que l’on change la vaisselle, qu’on bouleverse les plats, qu’on réécrive le menu : c’est, d’abord, remercier. C’est dans cette mesure discrète, dans cette retenue, que réside ce qui fait encore tenir un pays debout.
Montagnac perd son agrément, Yanick Philipponnat, Midi Libre, 23 mai 2025 ↩︎
«Ici, on dit “Salam aleykoum”, pas “Bonjour, monsieur”»: dans l’Hérault, le football amateur en proie au communautarisme islamiste, Guillaume Mollaret, Le Figaro, 6 juin 2025 ↩︎
Le conformisme médiatique nazifie la démocratie israélienne, abandonne Boualem Sansal et nie l’entrisme islamiste. Des marches de Cannes aux plateaux du service public, c’est un festival d’«engagements» lâches et bien-pensants
Thierry Ardisson a cru bien dire : « Gaza, c’est Auschwitz, voilà, c’est tout ce qu’il y a à dire. » (10 mai, France 2) L’homme de télévision, baromètre de l’air du temps, réagissait au témoignage d’un médecin humanitaire comparant le sort des enfants gazaouis à ceux des camps de la mort. Sur le plateau de Léa Salamé, l’outrance n’a pas été relevée. La séquence, préenregistrée, n’a pas été coupée. Pour la pensée mondaine, qui tient salon sur la chaîne publique, rien n’est plus banal que de nazifier la démocratie israélienne : la gauche antisioniste le martèle, l’Élysée l’euphémise. Il n’est venu à l’idée de personne de rappeler les liens entre le Hamas et le nazislamisme du grand mufti de Jérusalem, Hadj Amin al-Husseini, qui rejoignit Hitler pour créer en 1943 la division SS Handschar, composée de musulmans bosniaques. Conscient par la suite de la bêtise de son cliché, Ardisson a présenté ses excuses à ses « amis juifs ». Il a été le seul.
L’anecdote dit les effets débilitants du conformisme médiatique, ce prêt-à-penser à l’usage des arrivistes et des paresseux. Il a porté la réflexion sous son étiage. Marcel Aymé moqua, dans Le Confort intellectuel (1949), l’attrait du bourgeois progressiste pour les idéologies les plus démentes, les arts abstraits les plus fumeux, les postures hermétiques les plus verbeuses. Ce que le chercheur Bob Henderson nomme aujourd’hui les « croyances de luxe[1] » désigne ce même désir, de la part d’« élites » déculturées, d’exhiber leur supériorité en récitant des dogmes manichéens, signes clinquants d’une reconnaissance sociale. Le wokisme est le dernier avatar totalitaire promu par ce beau monde aux pensées floues qui a perdu le sens des mots et des faits.
La caste snobinarde n’a d’obsession que de marquer sa distance avec ces ploucs qui pestent contre l’insécurité, l’immigration, l’islam radical. Le choix de Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur et nouveau président des LR, d’éventer le 21 mai un rapport sur l’emprise des Frères musulmans, a brisé le silence d’État sur l’invasion islamiste vue comme un fantasme complotiste. Dans les dîners germanopratins, abrités de sas et de digicodes, il est séant de critiquer CNews plutôt que Jean-Luc Mélenchon, de hausser les yeux à l’évocation de Marine Le Pen ou Donald Trump. Plutôt que de défendre un écrivain ciblé par les islamistes, Libération a dénoncé chez Kamel Daoud sa « proximité idéologique avec le bloc réactionnaire ». Boualem Sansal, qui avait parlé à des journalistes conservateurs avant son arrestation en Algérie, n’a pas été cité par Emmanuel Macron, le 13 mai, dans ses plus de trois heures de paroles sur TF1. Le président a parlé de « honte », mais il visait Israël.
En mai, le Festival de Cannes a mis en scène la platitude satisfaite des privilégiés. La présidente du jury, Juliette Binoche, a inauguré le raout la tête à moitié couverte d’un voile Dior, en déplorant le réchauffement climatique. Mathieu Kassovitz a dit : « Il n’y a plus de Français de souche et j’espère qu’on pourra continuer à se mélanger. » Ainsi parle l’intelligence artificielle du show-biz, de la presse vertueuse, des philosophes de coquetels. Cette gauche prétentieuse est vide. Alain Finkielkraut en a fait l’aveu (15 mai, Figaro TV) : « C’était glorieux d’être de gauche ; cela devient presque insultant. […] Je veux bien me dire de droite, cela ne me dérange pas. » Le vent tourne, vous dis-je.
[1] Cité par Samuel Fitoussi dans Pourquoi les intellectuels se trompent, L’Observatoire, 2025.
L’écrivain publie Vu de Russie. Chroniques de guerre dans le camp ennemi (Manufacture des livres, 2025)
Thierry Marignac est traducteur et écrivain, mais aussi journaliste de terrain dans le Moscou périlleux des années 90, le Kiev survolté de la révolution orange (2004) et celui d’après le Maïdan de 2014, bref, l’exact contraire du pseudo-expert de plateau ânonnant les éléments de langage d’officines gouvernementales.
Pas russophobe
Il l’a prouvé naguère dans La Guerre avant la guerre. Chronique ukrainienne, un essai truffé d’informations exclusives, en décrivant, le premier, l’importance des clans mafieux qui se moquent des frontières, ukrainiennes ou russes, et mettent l’Ukraine, ce scandale géologique, au pillage. Il montrait bien que cette guerre a commencé dès 2004, et sans doute bien plus tôt, dans le cadre non seulement de luttes entre mafias mais aussi d’une volonté stratégique des thalassocraties anglo-saxonnes d’affaiblir à tout prix la Russie (thèse de Zbigniew Brzeziński sur l’indispensable rupture entre Moscou et Kiev, déjà pensée à Vienne avant 1914, puis à Berlin jusqu’en 1945).
Exaspéré par les propagandes, il a décidé de passer quelques mois dans la Russie en guerre, et d’utiliser son vaste réseau, notamment littéraire (il est connu en Russie pour sa longue amitié avec Limonov) pour voir de près comment ce pays vit depuis les débuts de « l’Opération spéciale ». Ce russophone, qui n’est pas russophobe, a ainsi rencontré, dans le désordre, des opposants, des vétérans, des cinéastes, des reporters de guerre (liés ou non aux Organes), des toubibs et même des politiciens locaux, et ce à Moscou, à Saint-Pétersbourg, mais aussi à Kronstadt ou dans des villes reculées de l’Oural. L’image kaléidoscopique qu’il donne, par le biais de courts chapitres tous axés sur une rencontre (et donc bien vivants), ne correspond en rien à celle véhiculée dans la presse mainstream.
Les langues se délient
Parmi ses observations, toujours originales et sans rien de convenu, d’une société « déconcertante », il faut pointer le caractère lointain de cette guerre, la mondialisation progressive de l’espace slave, qui connaît des fléaux tels que la drogue, omniprésente comme à l’Ouest : «Le diable russe souffre des mêmes maux que la vertueuse Euro-Amérique ». Supermarchés bourrés de denrées occidentales acheminées par des trafiquants de Turquie ou d’Asie centrale, boutiques de sport, centres commerciaux, le même « système de cupidité » s’impose pas à pas. Concernant la guerre elle-même, les langues se délient : nulle terreur de type stalinien, mais une séculaire prudence (une loi récente punit la critique de l’armée de lourdes amendes), et pas mal de franc-parler : «La guerre est soutenue en dehors du régime, voire contre lui, par un véritable sentiment populaire ». L’union ancienne de l’Ukraine et de la Russie, les innombrables familles mixtes, font que certains vétérans disent « se battre contre leur miroir », même si la solidarité avec les russophones d’Ukraine prend encore le dessus. Le tableau : une guerre fratricide attisée par des apprentis sorciers au nom d’intérêts sordides et qu’absout notre jacassante bonne conscience – ce que Marignac surnomme l’esprit ONG.
Thierry Marignac, Vu de Russie. Chroniques de guerre dans le camp ennemi, La Manufacture des livres, 250 pages
Dans son tour de France photographique des « Restos routiers » paru aux éditions Hoëbeke, Guillaume Blot capte les lumières de la route et l’humanité de ces forçats du transport. Un voyage au pays de Johnny et des desserts en farandole…
Sont-ils une espèce en voie de disparition ? Les chiffres annoncés par l’auteur sont alarmants. La France comptait 4 500 restaurants routiers en 1970, ils sont 700 aujourd’hui.
Lieux de réconfort
Guillaume Blot qui a initié ce projet photographique en 2018 a parcouru les routes secondaires de notre pays à la recherche de ces lieux de repos et de réconfort où les chauffeurs s’arrêtent pour se restaurer, pour se laver, pour se raser, pour échanger entre collègues ou pour s’extraire, une heure ou une nuit, de l’enfer de la circulation. Ces endroits-là sont des phares et des refuges. Ils clignotent tels des relais de poste criards et alléchants de l’ancien régime.
Ils sont des appels à lever le pied, à se garer sur un parking poussiéreux et à se confronter à d’autres Hommes autour d’une table ou le coude au zinc. Après des heures à conduire, le regard dans le vague ou l’envie de parler à un copain, ces restaurants accueillent la face cachée de notre société. Dans un monde où les échanges deviennent essentiellement virtuels, où la solitude gangrène les esprits, cette confraternité-là, bruyante parfois, hâbleuse par défoulement, le plus souvent silencieuse par fatigue, fait partie de notre art de vivre. Il y a soixante-dix ans, le cinéma les mettait à l’affiche et louait leur solidarité. Gabin dans « Gas-oil » de Gilles Grangier sorti en 1955 avait tout du camionneur fidèle, sensible et courageux.
Ces Hommes-là, vous ne les verrez pas en ouverture des journaux télévisés, seulement lorsqu’ils bloquent ; alors là, on se souvient enfin d’eux pour les critiquer. Ces travailleurs essentiels, de l’ombre, n’ont pas droit au micro-trottoir et aux éditos emperlousés. Sans eux, l’économie tournerait pourtant au ralenti. Ils savent qu’ils ne sont pas les étendards de la « Start-up Nation ». On ne les montre pas en exemple de réussite dans les écoles. Leurs enfants n’ont pas honte d’eux, ils savent leurs efforts pour ramener un salaire décent à la maison et apporter la dignité à un foyer. On préfère taire leur mission parce qu’on ne connaît rien d’eux. La logistique n’intéresse pas beaucoup nos dirigeants. Et parce qu’ils ne sont pas assez chics et présentables, on les ignore. On les imagine au volant de bahuts antédiluviens, alors que les poids lourds sont à la pointe de la technologie, en avance sur les voitures particulières. Ils représentent tout ce que la société déteste : le travail manuel, la cuisine copieuse, trop de masculin bien que la profession se féminise, un fumet graisseux et les voies abandonnées, en dehors des autoroutes. Ces conducteurs qui traversent l’hexagone, voire l’Europe, ces gros pigeons voyageurs de nos provinces sont souvent éloignés de leur famille durant plusieurs jours. De livraisons en livraisons, d’aventures en aventures, ils quadrillent une France secondaire. Guillaume Blot a visité 120 établissements et flashé cette population si particulière, avec ses codes et ses rites. Et le résultat est joyeusement coloré. Éminemment populaire et sensible. Sans une pointe de misérabilisme.
Poétique
Son travail dessine une carte du tendre, de l’étrange, du kitsch, de l’humanité arrachée au labeur, d’une forme de poésie de l’anodin. Du quotidien qui vire au sympa. De la bonne humeur et des verres de l’amitié. Sans le verre de l’amitié, une nation court à sa perte. Qu’est-ce qu’on voit exactement sur ces clichés brillants, lustrés comme une cagole, un samedi soir ? Des accents, des nationalités différentes qui ne se haïssent pas, une attirance certaine pour les sauces et les desserts « hautement » sucrés. Des gaillards en bermuda et claquettes ; ici, on porte le marcel avec assurance. Des demis de bière et des assiettes de frites à ras bord. Des buffets à volonté. Les portions sont généreuses comme leurs paluches. On y voit un Johnny plus vrai que nature, lunettes d’aviateur et coupe de cheveux à la Patrick Sébastien. Il est fan de western et de John Wayne. On fait la rencontre d’Odile, la cheffe du relais Les Ombrelles dans la Loire qui prépare « sa fameuse tête de veau ». On apprend que Catherine, la cheffe de La Cabane Bambou dans la Somme flambe ses plats au cognac. On se met tout simplement à les regarder vraiment.
Restos routiers de Guillaume Blot – Préfaces de Nora Bouazzouni et Mohamed El Khatib – Hoëbeke – Gallimard 184 pages
La touristification du monde ne connaît pas la crise : le groupe hôtelier de luxe Four Seasons, en partenariat avec la chaîne de télévision HBO, a annoncé l’organisation d’un tour du monde en jet privé à destination des lieux phares de la série TheWhite Lotus1.
The White Lotus Saison 3, disponible en France sur la plateforme Max (c) HBO
Vingt jours d’escapade premium, durant lesquels 48 globe-trotters fortunés (180 000 euros par tête de pipe) pourront rejouer les vacances des ultra-riches dépeints dans la fiction à succès de Mike White. Le World of Wellness Journey, « une expérience immersive centrée sur le bien-être physique et mental », s’inscrit dans une tendance qui fait florès, celle du set-jetting : choisir sa destination de voyage sous l’influence d’un film ou d’une série. « Chaque étape est pensée pour offrir une expérience unique et sur mesure », précise avec gourmandise Marc Speichert, directeur commercial de Four Seasons.
Les happy few pourront ainsi barboter dans les eaux turquoise de Maui (Hawaï, saison 1), s’enivrer de capiteux cépages siciliens à Taormina (Italie, saison 2) avant de s’adonner au yoga sur un ponton de Ko Samui (Thaïlande, saison 3). Le hic ? Ce prospectus de papier glacé est l’exact opposé de la critique sociale – quasi marxiste – exposée par le créateur de The White Lotus à Télérama : « Ces gens aisés sont sur la défensive. Cette classe sociale se sent menacée dans sa culture, dans son existence même. La série examine tous les arguments qu’ils utilisent pour justifier leur façon de vivre, et leur volonté de ne surtout pas en changer. »
De fait, la satire mordante des nantismondialisés (leurs petites névroses et leurs grandes hypocrisies, leur vacuité existentielle et leur culpabilité postcoloniale) contraste pour le moins avec le projet réel de fastueuse robinsonnade en Airbus A321 privatisé. Si on ne s’étonne pas que la morale fictionnelle capitule face au principe de réalité économique, on est néanmoins en droit de s’en amuser. « L’Occident meurt en bermuda », écrivait en son temps Philippe Muray. Son revers devra être cousu d’or pour se payer le luxe de trépasser de l’autre côté du petit écran.
Ils n’osent plus écrire « islamophobe », mais c’est bien la petite musique qui monte : selon les journaux progressistes, la chaine info conservatrice aurait le tort de trop parler des musulmans.
Mon titre reprend le propos d’un fidèle de la mosquée Al-Hashimi à Saint-Ouen, rapporté dans un article du Monde consacré au « désarroi des musulmans lors de l’Aïd » : « Le climat est malsain, mais surtout à la télé… ». Au regard du contexte, on comprend bien que CNews est particulièrement visé. D’ailleurs un autre fidèle, Rachid, l’explicite : « Sur certaines chaînes, comme CNews, il n’y a aucune limite : nous sommes responsables de tout ».
Injustices
Je n’aurais pas eu envie d’écrire un billet sur ce thème, qui dépasse largement CNews, si dans le texte de ce quotidien n’avaient pas été enregistrées des opinions à la fois nuancées et critiques, en tout cas de nature à faire réfléchir tout citoyen de bonne foi.
Le sentiment diffus qu’éprouvent certains musulmans d’être en permanence ciblés ne peut pas être traité avec indifférence ou, pire, mépris même si on l’estime injuste tant à l’égard de CNews que de Bruno Retailleau, leur autre bête noire. On ne saurait tenir pour rien cette impression qui perçoit la chaine et le ministre, parfois, comme des ennemis de la religion musulmane quand ils ne s’attachent, par des analyses ou en action, qu’à ses dérives.
Pour la chaîne, il est permis certes de considérer que les sujets concernant l’islam occupent au quotidien une place importante. Mais la télévision ne les invente pas. Elle ne s’en préoccupe que dans la mesure où ils mettent en lumière des problématiques concernant la France, le risque de communautarisme et la sécurité publique. Pour ma part, à chaque fois qu’on les abordait, j’ai toujours veillé – sans jamais être contredit – à les appréhender sur un mode qui ne prenait pas le particulier pour le général et les transgressions graves de quelques-uns pour une dangerosité globale.
Cette volonté de ne pas universaliser ces hostilités est capitale. C’est la seule attitude qui évite que des compatriotes musulmans se sentent injustement stigmatisés alors qu’ils échappent, dans leur quotidien et dans leur rapport au pays, aux dénonciations qui parfois oublient toute nuance et ne mesurent la portée de leur verbe maladroit, imprudent, qui peut enflammer.
Les attaques politiques ou médiatiques contre CNews sont non seulement erronées – il suffit d’écouter les débats pour le constater – mais liberticides car elles ne cessent d’incriminer, en les caricaturant, des échanges où l’outrance trouve sa contradiction et l’islam modéré, ses défenseurs.
Islam et islamisme, les musulmans et des musulmans…
J’entends bien l’argumentation développée par Éric Zemmour qui estime – il est constant sur ce point – que l’islam et l’islamisme sont identiques et que le premier n’est structurellement, politiquement, pas compatible avec la République.
J’espère ne pas me tromper et ne pas tomber dans la facilité de l’extrémisme intellectuel mais il me semble qu’en laissant la religion là où elle doit être – dans la sphère privée et familiale – et en étant impitoyable avec les grignotages subtils ou ostentatoires d’un islam dévoyé et conquérant, on pourra peut-être s’accorder avec mon point de vue. D’ailleurs a-t-on un autre choix que cette synthèse d’acceptation lucide et de répression sans faiblesse ?
Est-il inconcevable de s’en tenir à des règles claires ? Par exemple l’obligation d’un comportement exemplaire, comme pour les fidèles des autres religions, l’interdiction de ce qui est au sens propre inhumain – se voiler, se cacher le visage – et le refus absolu de pratiques venant corroder notre démocratie pour la constituer en pré-charia.
Je sais qu’une vision pessimiste de l’islam en France peut soutenir que chaque acte musulman public ou dans des univers ouverts au public est inspiré par une idéologie d’emprise sur notre société à redresser à cause des « mécréants » qui la composent mais, à partir du moment où on met en œuvre une intransigeance pénale pour l’intolérable, ne peut-on consentir au moins à une incertitude pour le reste ?
Dans cet article du Monde, frappé par la qualité et la mesure des déclarations, notamment celle de Mme Bamba, mère de quatre enfants, je n’ai pas m’empêcher de ressentir comme un dégoût à l’égard de tous ceux, pas seulement à LFI, qui exploitent « cette chair à élections » que sont les musulmans, notamment dans les banlieues, en feignant de se pencher sur leur sort. Il est clair qu’ayant à choisir, je préfère le camp de ceux qui dénoncent ce que l’islamisme a de périlleux à la fois pour l’image de l’islam et pour notre pays, à celui des démagogues d’extrême gauche s’abandonnant à des hyperboles hypocrites au risque de valider et de favoriser le pire. C’est cet unique climat qui est malsain.
Spécialiste mondialement reconnu de la Syrie, Fabrice Balanche sait parfaitement de quoi les Frères musulmans sont capables et n’hésite pas à le dire. Enragés par sa lucidité et son expertise, les islamo-gauchistes qui règnent à Lyon 2 depuis des années tentent de le faire taire. Pas sûr qu’ils y parviennent.
Causeur. Le 1er avril, alors que vous donniez un cours à l’université Lumière Lyon 2, votre amphithéâtre a été envahi par des militants masqués, islamistes, gauchistes ou les deux, et vous n’avez eu d’autre choix que de quitter les lieux. Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous depuis cette tentative d’intimidation ?
Fabrice Balanche. J’en ai vu d’autres. Ce n’est pas la première fois que j’ai des problèmes à l’université ! Il y a une dizaine d’années, j’ai fait un procès à l’Institut d’études politiques (IEP) de Lyon, qui avait recalé ma candidature à un poste de maître de conférences. Le tribunal a reconnu le manque d’impartialité de la commission d’admission, qui penchait exclusivement à gauche. Le jugement, qui fait d’ailleurs aujourd’hui jurisprudence, m’a donné entièrement raison. Depuis, je passe pour un emmerdeur.
Qu’est-ce qui déplaisait tant au jury de l’IEP de Lyon pour qu’il ne veuille pas de vous comme collègue ?
Mes travaux portent sur les alaouites et sur les communautarismes en Syrie. Autrement dit, mon prisme n’est ni marxiste ni décolonial. Cela ne cadre pas avec le dogme académique dominant. Raison pour laquelle il m’a fallu un certain temps, au début de ma carrière, pour accéder à un emploi stable à la faculté. Mon sujet faisait tiquer. Mais il ne s’agit pas d’un cas isolé. Beaucoup de chercheurs anticonformistes ont du mal à trouver une place digne de ce nom à l’université. À Lyon 2, c’est devenu patent. Depuis quelques années, l’équipe dirigeante ne recrute que des personnels qui lui ressemblent idéologiquement, ce qui lui permet de s’assurer d’autant plus facilement sa reconduction à chaque élection interne. Sociologiquement, l’établissement ressemble à une citadelle d’extrême gauche, où vous avez intérêt à exprimer les mêmes positions politiques radicales que le conseil d’administration si vous voulez maximiser vos chances de décrocher des crédits de recherche.
On dit quand même que la présidente de l’université, Isabelle von Bueltzingsloewen, n’a témoigné aucune complaisance vis-à-vis des étudiants musulmans qui voulaient organiser un iftar (rupture du jeûne) dans un local de l’université…
Dans un premier temps, elle s’est montrée en réalité très accommodante avec ces étudiants, puisqu’elle a commencé par accéder à leur requête en leur demandant juste de rebaptiser l’opération « repas partagé » et de supprimer un visuel Instagram où figuraient une femme voilée ainsi qu’un homme coiffé d’une calotte islamique. Seulement, ils ont refusé ce compromis en l’accusant d’islamophobie. Elle était dès lors dans l’obligation de leur interdire la salle. Le lendemain, des étudiants ont bloqué le campus en signe de protestation. Or, au lieu de leur envoyer la police pour faire un rappel à la loi, la présidente a préféré répondre mollement en proposant la rédaction d’une charte de laïcité !Comme si la loi de 1905 n’était pas déjà une charte de laïcité…
C’est donc en vous prononçant publiquement pour la fermeté républicaine que vous vous êtes retrouvé pris pour cible par ce groupe d’étudiants le 1er avril. Après ces violences, avez-vous reçu des soutiens en interne ?
De la part de mes collègues les plus proches au sein du département de géographie, oui. Mais chez la grande majorité de mes pairs, c’est plutôt l’indifférence et la méfiance qui ont prévalu, jusqu’aux accusations de la présidente, qui a carrément déclaré que ce qui m’arrivait ne l’étonnait pas, étant donné mes propos sur Gaza. Cela reflète malheureusement l’opinion majoritaire à Lyon 2.
Aujourd’hui quelle est la place de l’islamisme sur le campus ?
C’est très difficile à évaluer. Le bâtiment dans lequel j’enseigne est assez excentré, il n’est pas dans le cœur du réacteur. J’ai certes assisté à des prières dans les couloirs, mais toujours de façon individuelle. Ensuite, il y a l’association des Étudiants musulmans de France (EMF), qui est très puissante. La preuve, elle est hébergée à la maison des étudiants de la métropole de Lyon, elle-même sous administration de la coalition de gauche écolo au pouvoir dans le Grand Lyon.
À cet égard, avez-vous constaté un avant et un après 7-Octobre ?
Oui, bien sûr. Depuis un an et demi, la cause palestinienne est abondamment utilisée par les islamistes pour mobiliser et élargir leur base militante. Cela leur permet de sortir du cadre purement musulman pour attirer à eux des gauchistes et même des LGBT. Du 7 octobre 2023 à la mi-décembre 2024, rien qu’à Lyon 2, on a ainsi eu droit à huit conférences propalestiniennes, soit une par mois ouvrable, en collaboration étroite avec le syndicat Solidaires étudiant-e-s. Je me suis rendu compte que certains intervenants, invités en personne par le vice-président Willy Beauvallet[1] étaient conviés aux frais de l’université, notamment la fameuse Maya Wind, une post-doctorante américaine qui concentre ses critiques sur les universités israéliennes.
Vous décrivez un phénomène de grande ampleur à Lyon 2. N’est-ce pas décourageant ? Comment tenez-vous le coup ?
Je fais le minimum syndical. Je donne mes cours, le plus consciencieusement du monde, car pour beaucoup d’étudiants, c’est leur seule chance de promotion sociale, donc je tiens à être correct envers eux. Mais tout ce qui a trait à mon travail de recherche se déroule en dehors de Lyon 2. Je collabore notamment avec la Hoover Institution, un think tank affilié à l’université de Stanford.
Venons-en justement à votre champ de recherche : le Proche-Orient. Dans quelle mesure le 7-Octobre a-t-il modifié le rapport de forces dans la région ?
C’est un processus toujours en cours. Et le gros morceau reste l’Iran, dont l’avenir demeure incertain. Donald Trump, pour l’instant, est en phase de négociation avec Téhéran tandis que Benjamin Nétanyahou est surtout occupé par Gaza – sans doute en partie d’ailleurs pour masquer son incapacité à se faire entendre à Washington sur le dossier iranien. Donc une intervention militaire en Iran n’est pas à l’ordre du jour. Mais Israël n’acceptera jamais que les mollahs aient la bombe atomique, si bien que Nétanyahou voudra à un moment ou à un autre frapper leur pays, non seulement ses sites nucléaires, mais aussi ses installations pétrolières et gazières, afin de susciter un changement de régime. En attendant, tout cela reste en suspens, de sorte que la séquence ouverte le 7-octobre n’est pas encore close.
Au Proche-Orient, Trump tend non seulement la main aux Iraniens, mais affiche aussi de façon éclatante son inclination pour l’Arabie saoudite. Comment interprétez-vous cela ?
Si Trump a fait ce voyage, c’est d’abord pour signer des contrats, qui se chiffrent en centaines de milliards de dollars, au bénéfice de l’économie américaine, et pour montrer que sa politique étrangère ne mise pas uniquement sur une réconciliation avec la Russie. Sur un plan plus local, son objectif était de rétablir un lien privilégié avec les Saoudiens, dont les relations avec Joe Biden étaient mauvaises. Pour ce faire, il leur a offert un cadeau spectaculaire, en leur permettant de remporter une victoire diplomatique au nez et à la barbe des Qataris.
Comment cela ?
En choisissant de rencontrer le nouveau leader syrien Ahmed Al-Charaa à Riyad au lieu de Doha où, pourtant, celui-ci a beaucoup plus d’amis et de soutiens, Trump a voulu signifier que la Syrie se reconstruira certes avec l’argent qatari, mais sous le parrainage diplomatique des Saoudiens. En d’autres termes, dans la plus pure tradition féodale, on a enjoint au Qatar, mais aussi au Koweït et aux Émirats arabes unis, de passer désormais par l’intermédiaire de l’homme fort de Riyad, Mohammed ben Salmane, pour discuter avec Washington.
Ce faisant, Trump a contribué à respectabiliser Al-Charaa, ancien djihadiste dont rien ne garantit qu’il se soit assagi…
Al-Charaa est un type très intelligent, très pragmatique. Il dit à ses interlocuteurs ce qu’ils ont envie d’entendre. Il a même indiqué qu’il voulait rejoindre les accords d’Abraham – ce qui n’est pas crédible évidemment. Il montre patte blanche, car il a besoin d’une levée des sanctions internationales afin de pouvoir récolter les fonds qui lui permettront de consolider son pouvoir, d’unifier les différentes factions islamiques du pays et de restaurer les services publics de manière à reconstruire une base sociale.
Riyad, 14 mai 2025 : Donald Trump reçoit Ahmed Al-Charaa, président intérimaire de la Syrie, aux côtés du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane. La rencontre consacre l’Arabie saoudite comme nouveau parrain régional de la reconstruction. Bandar Aljaloud/Saudi Royal Palace via AP/SIPA
Quid des minorités, très nombreuses dans ce pays ?
Al-Charaa vise clairement la création d’une République islamique sunnite en Syrie. Toutefois la plupart des minorités devraient être protégées, comme autant de communautés fossiles faisant partie du patrimoine local, à l’image des ruines de Palmyre. Je pense qu’Al-Charaa prendra soin en particulier de la sécurité des chrétiens, auxquels les Américains sont très attentifs. Je suis en revanche moins rassuré pour les laïcs du pays, de toutes origines confessionnelles, qui vont se retrouver sous un régime incapable d’accepter l’impiété. Mais tout le monde me dit qu’on n’a pas le choix et qu’Al-Charaa est seul capable de cadrer le pays.
Nos amis kurdes ont-ils raison de penser, comme on le dit, que la France les protège ?
Oui, nous avons quelques forces spéciales sur le terrain chargées de veiller sur leur sort. Même si ce sont surtout les Américains, disposant de 1 000 hommes sur place, qui ont les clés de leur avenir.
Mais rien n’assure que les Américains ne les lâcheront pas…
Assurément. Le fait que Trump ait adoubé Al-Charaa les inquiète énormément. À quoi s’ajoute la dissolution du PKK, annoncée le 12 mai et qui mène Erdogan à demander à présent le désarmement de toutes les milices kurdes. Enfin et surtout, les Américains doivent quitter l’Irak à partir de la fin de l’année. Le jour venu, il leur sera très compliqué de continuer à assurer la logistique de leur base en Syrie.
Les alaouites, dont sont issus les Assad, sont-ils menacés ?
Le nouveau régime cherchera à en éliminer autant que possible. Au moyen d’une « épuration ethnique blanche ». C’est-à-dire en faisant en sorte que beaucoup s’exilent. C’est comme cela qu’il faut comprendre les exactions en cours contre eux. On en massacre quelques milliers pour que les autres aient envie de partir.
Dans ces conditions, Emmanuel Macron a-t-il eu raison d’accueillir Al-Charaa en grande pompe le 7 mai ?
Je ne pense pas qu’il ait eu tort. La diplomatie sert aussi à parler à ses ennemis. Toutefois, on n’était pas obligé de carrément dérouler le tapis rouge ni de permettre au leader syrien de visiter la tour Eiffel ! On aurait pu lui suggérer de reprendre l’avion tout de suite. Cela dit, Macron a quelques raisons valables de lever les sanctions contre la Syrie, qui avaient été prises contre un pouvoir désormais déchu, et de chercher à s’entendre avec le nouveau régime. Il y a notamment en jeu le renouvellement de la concession du groupe marseillais CMA-CGM pour le port de Lattaquié. Et puis des contrats avec des entreprises françaises, pressenties pour la restauration du réseau énergétique syrien. C’est une bonne chose pour notre économie, à condition bien sûr que la facture soit payée par les pays arabes et pas par l’Union européenne…
En 2011, lors du printemps arabe, beaucoup d’observateurs ont découvert, stupéfaits, que quand les dictatures tombent, elles n’accouchent pas forcément de merveilleuses démocraties libérales. Quinze ans après, sommes-nous revenus de nos illusions ?
Oui, nous sommes beaucoup plus réalistes. Notre ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, se borne ainsi à exiger un « gouvernement inclusif » à Damas. Comprenez qu’il s’estimera satisfait s’il y a un ministre alaouite, un ministre druze et un ministre chrétien. On se contente d’un autoritarisme plus ou moins éclairé, et voilà.
Mais derrière cette façade rassurante, le pays peut-il devenir un QG islamiste ?
Ce risque existe évidemment. La Syrie pourrait devenir pour l’islam sunnite, et singulièrement pour les Frères musulmans, ce que l’Iran est depuis 1979 pour l’islam chiite : une base arrière de prosélytisme, voire de terrorisme. Les Jordaniens l’ont très bien compris : ils viennent d’interdire le mouvement des Frères musulmans. Ils ont vu le niveau de menace monter nettement avec ce qui se passe à Damas, mais aussi à Gaza. Comme la plupart des leaders arabes, le roi de Jordanie s’inquiète beaucoup du sort des Palestiniens dans ses discours, mais il ne fait pas grand-chose. Pour les islamistes, cette inaction est une raison de plus de le renverser.
Que conseilleriez-vous à Macron, si vous étiez, comme votre quasi-jumeau Emmanuel Bonne, lui aussi fin connaisseur de la Syrie, le conseiller diplomatique de l’Élysée ?
Je plaiderais pour une Syrie fédérale, afin que les minorités disposent de territoires sanctuaires et de contre-pouvoirs les protégeant de la dérive autoritaire qui ne manquera pas de se produire. Mais je crains que nous soyons complètement inaudibles dans une région où les seuls pays respectés sont ceux qui justifient d’une présence armée. Or nous avons surtout choisi la présence humanitaire. Comme quoi nous ne sommes pas complètement revenus de nos illusions.
[1] Visé par une enquête du parquet de Lyon après avoir rendu hommage au terroriste Hassan Nasrallah, Willy Beauvallet a démissionné le 5 mai de son poste de vice-président de l’université Lumière Lyon 2.
L’ensauvagement ? Quel ensauvagement ? Cinq ans après avoir raillé un prétendu « Kamasutra de l’ensauvagement », Emmanuel Macron persiste. Dans le sud, il a de nouveau balayé d’un revers de main la problématique, la reléguant au rang de formules creuses bonnes pour la presse à scandales. Au sommet de l’État, une âme sèche préside au déclin de la France, selon notre chroniqueur.
Dans le monde parallèle d’Emmanuel Macron, les violences et les meurtres que sèment les loups dans les villes restent des péripéties méprisables. Se joignant aux alarmistes climatiques, il a déclaré samedi à Monaco : « Certains préfèrent, pendant ce temps-là, brainwasher (laver le cerveau) sur l’invasion du pays et les derniers faits divers ». Cette incapacité du chef de l’Etat à ressentir la moindre empathie, y compris pour les proies des barbares qui tuent comme ils respirent, confirme son désintérêt pour les viles questions sécuritaires et pour le désespoir des endeuillés.
Une âme sèche et futile préside au déclin de la France. Narcisse se contre-fiche de l’enfer que fait subir aux plaintifs sa société ouverte aux quatre vents de l’immigration. Les intifadas qui ont ponctué la victoire du PSG, les agressions antisémites qui se succèdent, les crimes racistes qui apparaissent ici et là ne sont il est vrai pas démontrables par la science, appelée par le président pour justifier ses priorités sur le réchauffement et son dédain pour la plèbe. Derrière les propos révoltants du chef de l’État, c’est un univers glacial, élitiste et aride, qui se révèle agresseur des faibles laissés sans protection. Samedi, le premier président de la Cour de cassation, Christophe Soulard, a, dans la même veine, dénoncé sur Mediapart un « populisme anti-judiciaire », au prétexte que l’opinion s’indigne de ces juges qui n’osent sanctionner sévèrement les voyous des cités mais n’hésitent pas à accabler les policiers qui leur résistent ou les politiques qui dénoncent les prétentions de certains magistrats à imposer leur loi. Ces violences institutionnelles attisent l’exaspération contre un système injuste, inhumain.
Dès à présent, les parents meurtris par des rapaces venus de la « diversité » ne se taisent plus. Ils se révoltent contre l’abandon de l’Etat. Vendredi, le père de Benoit, 17 ans, mortellement poignardé à plusieurs reprises à Dax, dans la fanzone de la Ligue des champions, a laissé éclater sa colère : « On accueille des réfugiés et après ils tuent nos enfants (…) Il a fallu qu’une racaille de merde vienne lui enlever la vie (…) J’ai la haine (…) On n’est plus en sécurité nulle part ». L’autre jour, c’était la mère d’Elias, 14 ans, tué à Paris par deux jeunes récidivistes, qui interpellait dans une lettre ouverte ceux « qui se sont moqués de nous » : les juges des enfants qui ont laissé les deux adolescents se rencontrer en dépit d’une interdiction judiciaire, leurs parents démissionnaires, le maire du 14ème « qui n’a pas jugé bon de sécuriser les abords du stade », les médias « qui n’ont pas eu l’honnêteté d’écrire les mots machette et hachette, préférant minimiser l’acte en parlant de couteau », « les différents ministres de la Santé, de l’Éducation nationale, de la Justice, de l’Intérieur qui n’ont pas pris la mesure depuis des années de la dérive d’une partie de la jeunesse, de son ensauvagement, de l’impact des réseaux sociaux et de la banalisation de la violence ». « La France a tué mon mari ! », avait accusé Harmonie Comyn, veuve d’un gendarme tué par un voyou en aout 2024. Les familles de Lola, Philippine, Thomas et bien d’autres encore sont les autres victimes d’une caste prétentieuse qui, chef de l’État en tête, ne tient plus que par le déni, l’insulte, la morgue, la méchanceté. Les jours de ce petit monde imbuvable sont comptés.
Vendredi soir 18h30, BFM TV. Au menu, le clash Trump – Musk. Présentateur : l’excellent François Gapihan. Sur le plateau : le très international Ulysse Gosset, Patricia Allémonière… et moi. À ma grande surprise, au bout de quelques minutes, la chaîne fait intervenir Thierry Breton à distance. L’ancien commissaire européen part dans une diatribe pour expliquer qu’Elon Musk a eu tort de faire de la politique après avoir été un homme d’affaires. Faites ce que je dis, pas ce que je fais : c’est exactement ce qu’a fait Thierry Breton… mais avec des succès contestés ; les actionnaires des entreprises qu’il a gérées ayant perdu beaucoup d’argent, voire tout leur argent. Voici un extrait de cet échange qui a été vu plusieurs millions de fois sur les différents réseaux sociaux, cliquez là. Après l’avoir sagement écouté, j’ai donc pris la parole : « Je ne voudrais pas être méchant avec Thierry Breton mais, quand même, vouloir donner des leçons d’économie à Elon Musk qui est aujourd’hui l’homme le plus puissant du monde en termes économiques. Quand on regarde – je suis désolé de vous le dire M. Breton – mais Atos qui est quasiment en faillite, Orange que vous avez mis aussi au tapis… Votre gestion des entreprises ne vous permet pas de donner de leçons à l’homme qui a réussi Tesla et SpaceX… »
Ce à quoi Thierry Breton a répondu : « Non mais pardon, je ne sais pas qui est ce Monsieur, je ne le connais pas mais euh… » Je l’ai alors interrompu : « Non mais moi je vous connais Monsieur, je suis un ancien financier, je vous ai bien connu sur les marchés… ».
Je faisais référence au surnom qui lui était donné sur les marchés financiers : « Monsieur Ripolin » car il était connu pour repeindre les façades des entreprises qu’il dirigeait sans jamais régler aucun des problèmes auxquelles elles étaient confrontées.
S’en est suivi une autojustification de Thierry Breton dans laquelle il a chargé chacun de ses successeurs pour justifier ses échecs.
J’aurais pu être plus sévère avec Thierry Breton et rappeler toutes les entreprises qu’il a dirigées… et plantées : sur BFM TV, j’ai cité Atos et France Telecom (devenue Orange), mais j’aurais pu ajouter Bull, Thomson mais aussi sa piètre performance en tant que ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie sous Chirac entre 2005 et 2007 ou son mandat catastrophique de commissaire européen sous la présidence d’Ursula von der Leyen.
Je me suis amusé à aller voir sa fiche Wikipédia. Voici ce qu’on y trouve :
« Gestion des entreprises : Breton a dirigé plusieurs grandes entreprises, notamment Thomson, France Télécom et Atos. Ses détracteurs affirment qu’il a laissé ces entreprises en difficulté après son départ, bien qu’il ait continué à progresser dans sa carrière. »
Enfin, j’aurais pu lui demander pour quelle raison a-t-il pris la nationalité sénégalaise en 2015 ?
Dernière minute : on me souffle dans l’oreillette que Thierry Breton enchaîne les séances de média-training dans le but de… se présenter à la présidentielle en 2027.
Peut-être que Thierry Breton devrait lire les commentaires le concernant sur les différents réseaux sociaux ?
Cela lui évitera certainement de nouvelles déconvenues.
Le maréchal de l'Armée de l'Air britannique Charles Portal (1893-1971) se tenant à côté d'une voiture de service à Londres, pendant la Seconde Guerre mondiale. DR.
Si tu veux la paix… Comment soumettre son adversaire à sa volonté ? Les bonnes leçons d’Edward N. Luttwak.
D’abord, les mots. Le titre original de ce livre dont la première mouture remonte à 1987 est : Stratégie. La logique de la guerre et de la paix. L’étymologie nous apprend trois choses :
que le stratège, grec, n’est autre que le chef d’armée,
la stratégie, une notion spéciale de l’art militaire,
et l’auteur de ce livre, un « stratégiste », celui qui, depuis une acception entérinée en 1831, connaît la stratégie.
Laquelle est ainsi un art qui use et s’exerce au moyen d’instruments meurtriers, à valeur parfois principiellement dissuasive (cas de l’arme atomique), mais aussi de bonnes paroles, de ce que nous nommons la géo-psychologique et de géopolitique, – la diplomatie, tant sur le cours que le long terme, devant s’insérer dans la panoplie des instruments dont use le stratège digne de ce nom. Si, en France, le chef de l’Etat est le chef des armées, l’on en déduira qu’outre grands et moyens officiers, le président de la République et autres membres composants les organes, consultatifs ou décisionnels en la matière, doivent, à la lettre, se percevoir comme des artistes pratiquant un art dont seul notre orgueil pourrait nous croire qu’il peut devenir science. C’est ce qui, pour l’essentiel, ressort de ces 400 pages, et ce qu’avait bien compris Churchill, ainsi que nous le relate Luttwak.
Le Premier ministre britannique Churchill photographié en 1941.L’économiste et historien américain Edward Nicolae Luttwak, spécialiste en géostratégie.Photos DR.
En septembre 1941, le général en chef du British Bomber Command, Charles Portal, présenta au Premier ministre un plan prévoyant la mobilisation de 250 escadrons durant six mois de campagne, soit 4000 bombardiers et dont l’issue « devait être rien de moins que la victoire totale » sur l’Allemagne. Malgré la logique imparable de ce plan qui déployait ses étapes avec, en bout de course, la garantie d’une victoire d’autant plus évidente que ce plan paraissait avoir pensé à tout, malgré, donc, des apparences qui ne paraissaient nullement trompeuses (et le contexte proprement militaire de l’époque qui rendait cette préconisation comme étant la seule rationnellement envisageable), Churchill « choisit pourtant de se fier à son instinct [c’est nous qui soulignons] stratégique et, malgré le pouvoir de conviction de l’argumentation technique exposée par le plan, il présenta [ses] objections au général Portal. » On les résumera ainsi :
on ne peut en la matière se fier à la logique arithmétique ;
il est impossible d’intégrer dans le raisonnement toutes les variables (dont l’une, considérable, est ce que sera la riposte effective de l’ennemi, laquelle, elle-même, ne dépend pas uniquement de sa seule capacité technique et de sa volonté) ;
il n’y a pas de méthode sûre [c’est nous qui soulignons encore] ;
pas plus que l’économie, la stratégie n’est une science.
Ici ajouterons-nous que Luttwak est certes un « stratégiste » mais, surtout un polémologue, lequel pratique une science très, trop humaine comme dirait Nietzsche puisqu’elle est humainement incapable de maîtriser toute la chaîne de commandement – c’est-à-dire, au sens technique du terme, l’engrenage implacable des causes de toutes natures qui permettent de s’assurer de l’efficacité d’une action militaire donnée.
Luttwak explique dans la foulée que « l’impact insignifiant » des opérations aériennes effectuées en 1943 par la 8ème Air Force américaine sur la machine de guerre allemande, conçues avec le même genre de pure logique comptable, arithmétique et matérielle que celle proposée par le BC britannique en 1941, a permis de vérifier in concreto le bien-fondé de la position de Churchill.
La stratégie est en effet l’art de la maîtrise du paradoxe. Mais, le problème c’est que nous ne sommes pas en présence de deux seuls discours parallèles qu’il suffirait de comparer, confronter pour ensuite les associer en une saine et victorieuse synergie. Des doxa, des discours, des logiques et des faits, il y en a des masses, et non seulement il y en a des masses, mais elles-mêmes évoluent en permanence en interagissant les unes sur les autres en un incessant jeux de miroirs. Dans sa réponse à Portal, à l’automne 1941, Winston Churchill expliquait qu’il « paraît probable que la défense au sol allemande et les chasseurs équipés pour le vol de nuit viendront à bout de nos attaques aériennes » et que « toutes les choses étant toujours simultanément en mouvement [principe même du paradoxe dynamique], il est tout à fait possible que la dispersion des ressources militaires atteigne, en 1943, une telle ampleur que leur survie sera dans une large mesure indépendante des installations situées sur le sol allemand. » C’est une grande banalité d’écrire qu’à l’exemple d’un joueur d’échecs ou de go, le stratège, par la définition même de son art, prétend pouvoir prévoir ; mais il ne le prétend que parce que, d’abord et avant toute autre considération, il sait raisonnablement pouvoir repérer d’un seul coup d’œil l’emplacement de ses propres pièces sur l’échiquier et celles de son adversaire ; il voit et, à partir de là, il espère à bon escient entrevoir, présager des multiples possibilités de mouvements, pour, ensuite (ou, plutôt, d’un point de vue neurocognitif : simultanément) voir et sélectionner le déplacement victorieux. Mais, le champ de bataille(s) de deux (ou n)belligérants – et notons au passage que deux pays en paix, ou même seulement indifférents l’un à l’autre, ne sont que deux (futurs) belligérants qui s’[l’] ignorent – est bien plus vaste que la surface de l’échiquier, et le nombre de coups possiblement infini. Si bien que, dans l’absolu, l’ambition et la fonction de l’art de la stratégie, en dernière analyse et en bon (vocabulaire) marxiste, se résumeraient à la compréhension de l’aléatoire quantique.
Aussi notre auteur-stratégiste excelle-t-il à commenter le… passé (tenir Verdun en 1916 pour les Français, s’acharner à ravitailler en vain Paulus à Stalingrad pour les Allemands, maintenir indéfiniment dans le temps l’action de l’UNWRA – jusqu’à créer des abcès de fixation [topique et psychique, c’est nous qui ajoutons] – et des organisations humanitaires en général, ont-ce été là des actions de bonne stratégie, c’est-à-dire en définitive, de bonne politique ?), quitte à pousser le paradoxe un peu loin en nous expliquant que, si les camps à statut de réfugiés à vie avaient existé dès l’aube de l’ère judéo-chrétienne, le continent européen serait aujourd’hui « couvert de camps abritant les dizaines de millions de Gallo-Romains déracinés, de Vandales abandonnés, de Burgonde vaincus et de Wisigoths déplacés (…) ». Cette image est en vérité un sophisme, car l’utilité de ces « camps » (avec la notion juridico-politique de ‘‘réfugiés’’ qui l’accompagne) ne pouvait en ces temps se ressentir, d’une part, parce que la politique de l’empire romain était plutôt assimilationniste, d’autre part, parce que ces peuples barbares, d’origine indoeuropéenne, étaient d’abord nomades (et, que ce n’était qu’à l’issue de leurs périples, poussés par le vent d’est, et parvenus à l’extrémité de la péninsule euroasiatique qu’ils pouvaient se fixer). Ils n’avaient ainsi pas le temps de développer ni le ‘‘loisir’’ d’entretenir le sentiment de la nostalgie de leurs terres d’antan, et, de la sorte, n’étaient guère enclins à revendiquer un quelconque « droit au retour »… Alors, le processus de fusion-absorption de peuple à peuple semblait fonctionner. Ce qui laisserait à envisager qu’il s’agit de la plus efficace des stratégies de… paix.
Il est vrai que nous n’avons pas précisé dans quel sens, en chaque occurrence, devait s’établir ledit processus. Il est vrai aussi que, de ce très remarquable ouvrage, il est possible de (re)tirer non seulement quelques cartouches, mais aussi quelques enseignements… dirons-nous plus prosaïques, tangibles, d’utilité immédiate… que des stratèges civils et militaires de tous camps, humbles d’esprit et de compétences inter (ou multi-) disciplinaires, se feront autant un plaisir qu’un devoir de découvrir.
Edward N. Luttwak, Le Grand livre de la stratégie, Odile Jacob, 400 pages.
Quand, à Montagnac, on vous répond “Salam aleykoum” au lieu de “Bonjour, monsieur”, ce n’est pas une maladresse — c’est le symptôme criant d’un séparatisme islamique qui, désormais, joue à visage découvert. Analyse.
« Ici, on dit Salam aleykoum, pas Bonjour, monsieur ! » — c’est la réponse qu’a reçue un inspecteur du service départemental à la jeunesse, à l’engagement et aux sports, lors d’un contrôle à Montagnac (Hérault). À cet épisode navrant et révélateur se sont ajoutés des faits de violence et des insultes anti-Français répétées. Résultat : l’Union sportive de cette commune de 5 000 habitants, située entre Sète et Béziers, a été privée de toute subvention publique.
« On est des bénévoles, des éducateurs, pas des criminels », se défend l’un des membres du club dans Midi Libre1. Mais du côté de la préfecture, le constat est tout autre. « Il y a des clubs de sport où l’on ne pratique pas que le sport, et les familles qui confient leurs enfants à ces associations doivent le savoir », déclare le préfet de l’Hérault dans une enquête du Figaro2.
Le même article relaie aussi l’inquiétude d’un éducateur : « Quand on explique à nos gamines qu’elles ne peuvent pas jouer avec un voile et que, le week-end suivant, dans le département voisin, on affronte une équipe où ça ne pose aucun problème, notre argumentaire devient difficile à tenir. » Un témoignage qui souligne, au-delà du cas de Montagnac, l’urgence de clarifier la législation sur les pratiques religieuses ou le port du voile dans le sport amateur.
Parfois, il suffit d’un terrain de football, d’un match banal dans un village du sud de la France, pour que tout ce que l’on croyait enfoui remonte à la surface. En mai 2025, le club amateur de Montagnac, dans l’Hérault, a été suspendu par la Fédération française de football. Cette décision, suivie de la suppression des subventions publiques, fait suite à une série d’incidents survenus au fil des mois : invectives violentes, insultes communautaires, refus de parler français sur le terrain.
Des faits graves
Les faits ont d’abord été rapportés par les médias locaux — Midi Libre, France Bleu Hérault, Métropolitain Montpellier. Le ton était mesuré, presque embarrassé. Les articles mentionnaient des « tensions croissantes », des « propos déplacés », des « incidents répétés » sans toujours nommer ce qui, en creux, apparaissait clairement : le rejet de la règle commune, et avec elle, celui du pays lui-même. Le souci d’apaisement était palpable, mais la gêne aussi. Les journalistes semblaient marcher sur des œufs, comme s’ils redoutaient d’ouvrir un débat trop chargé pour la tranquillité locale. Pourtant, la gravité transparaissait, ligne après ligne.
Puis les médias nationaux ont repris l’affaire. CNews, dans sa ligne habituelle, y a vu une illustration de la fragmentation communautaire, et a donné la parole à des élus et à des éducateurs sportifs désemparés. Sur les réseaux sociaux, l’affaire a été reprise et commentée largement, souvent avec excès. Certains y ont vu une simple anecdote gonflée par les médias conservateurs. D’autres, un fait révélateur de tensions profondes. Des sites comme Jeanmarcmorandini .com ou Valeurs Actuelles ont relayé les propos tenus sur le terrain — « sales Français », « sales Blancs » — tandis que d’autres, à gauche, ont appelé à « contextualiser », à « comprendre les causes sociales » plutôt que de pointer les faits bruts.
Puisqu’on vous répète que le climat se réchauffe !
Cette dissonance médiatique n’est pas nouvelle, mais elle dit quelque chose : on ne sait plus très bien comment parler de ce genre d’événements. Faut-il les taire, de peur d’alimenter un climat ? Faut-il les nommer, au risque d’être taxé d’arrière-pensées idéologiques ? Une chose est certaine : ce silence embarrassé, ou ce bruit de surface, ne change rien à la réalité perçue sur le terrain. Les éducateurs locaux, les arbitres, les bénévoles, eux, n’ont pas lu ces polémiques dans la presse. Ils ont vu le mépris dans les regards, entendu les insultes, et constaté le refus explicite de s’inscrire dans un cadre commun. Ils ne parlent pas en termes idéologiques. Ils parlent d’une fatigue. D’un abandon.
Mais au-delà de cette agitation, quelque chose d’essentiel s’est joué. Ce n’est pas une simple incivilité. Ce n’est pas seulement un débordement. C’est un signe. Le signe d’un refus, non pas ponctuel, mais structuré : celui de partager un espace commun. Ce qui est mis en cause ici, ce n’est pas la diversité. C’est la capacité à faire société dans un cadre reconnu, avec des règles partagées.
Car un terrain de football, dans un village, devrait être un lieu de lien. Un lieu où l’on apprend à obéir à une règle, à parler la même langue, à reconnaître l’arbitre, même lorsqu’il se trompe. Un lieu modeste, mais significatif, où l’on accepte de cohabiter dans un même cadre, sans l’imposer aux autres, sans le contourner. À Montagnac, c’est cela qui a été brisé.
Je vis dans ce pays depuis longtemps. J’en connais la complexité. Je ne suis pas naïf. Je sais ce qu’il en coûte de quitter son monde d’origine pour en épouser un autre. Mais je sais aussi que cela reste possible. Je connais des hommes, des femmes, venus d’ailleurs, qui ont fait ce choix. Non pas en reniant ce qu’ils étaient, mais en acceptant de devenir autre chose : des Français. Par les mots, les usages, l’histoire, le respect d’un cadre commun.
Ceux-là n’élèvent pas la voix. Ils ne réclament pas de place : ils la prennent, par leur discrétion, leur travail, leur fidélité. Ils savent que la France n’est pas un service, mais une promesse. Et que cette promesse demande un effort, un engagement, parfois un renoncement. Ils n’ont rien d’héroïque, mais ils tiennent. Et par eux, quelque chose tient encore.
À l’inverse, il y a ceux qui refusent. Non pas parce qu’ils ne peuvent pas. Mais parce qu’ils ne veulent pas. Ceux-là transforment la France en décor. Ils la traversent sans l’habiter. Ils s’en plaignent sans la connaître. Ils la rejettent tout en profitant d’elle. Et ce rejet, aujourd’hui, ne se cache plus. Il s’affirme, parfois brutalement, jusque sur un terrain de foot.
Le sport ciblé par les islamistes
Montagnac n’est pas un cas isolé. Mais il a le mérite de montrer, simplement, sans théorie ni slogan, ce qui est en jeu. Il ne s’agit pas de peur, ni d’hostilité. Il s’agit de transmission. De la langue, des règles, de ce qui permet encore à des personnes différentes de coexister sans s’affronter. Rien de glorieux, rien de grandiose. Mais sans cela, tout se délite.
Je ne crois pas que tout soit perdu. Mais je crois que le lien est fragile. Et que ce lien ne tiendra pas sans une exigence retrouvée. Pas une exigence brutale. Une exigence simple : celle de reconnaître ce pays pour ce qu’il est. Non pas parfait. Mais accueillant, à condition d’être reconnu en retour. Cela ne demande pas de tout aimer. Mais de vouloir y habiter. Réellement. Avec d’autres, dans une langue, une patience, une mémoire.
La France n’est pas un guichet. Ce n’est pas non plus une abstraction. C’est un lieu concret, une langue, des habitudes, une mémoire. Cela n’impose pas d’oublier d’où l’on vient, ni d’aimer tout ce qu’on y trouve. Mais cela suppose de vouloir y vivre avec les autres, de faire un pas vers eux, de reconnaître les règles du jeu commun. Tant que ce désir existe, tant que ce geste simple se transmet — celui de rester, d’écouter, de parler — alors il reste quelque chose à tenir.
Et il faut bien le dire : sans politesse — au sens le plus ancien, le plus exigeant — il n’est pas de société. S’asseoir à la table commune, ce n’est pas seulement y prendre place, c’est aussi y observer un silence, apprendre les gestes, respecter les usages. Ce n’est pas exiger que l’on change la vaisselle, qu’on bouleverse les plats, qu’on réécrive le menu : c’est, d’abord, remercier. C’est dans cette mesure discrète, dans cette retenue, que réside ce qui fait encore tenir un pays debout.
Montagnac perd son agrément, Yanick Philipponnat, Midi Libre, 23 mai 2025 ↩︎
«Ici, on dit “Salam aleykoum”, pas “Bonjour, monsieur”»: dans l’Hérault, le football amateur en proie au communautarisme islamiste, Guillaume Mollaret, Le Figaro, 6 juin 2025 ↩︎
Le conformisme médiatique nazifie la démocratie israélienne, abandonne Boualem Sansal et nie l’entrisme islamiste. Des marches de Cannes aux plateaux du service public, c’est un festival d’«engagements» lâches et bien-pensants
Thierry Ardisson a cru bien dire : « Gaza, c’est Auschwitz, voilà, c’est tout ce qu’il y a à dire. » (10 mai, France 2) L’homme de télévision, baromètre de l’air du temps, réagissait au témoignage d’un médecin humanitaire comparant le sort des enfants gazaouis à ceux des camps de la mort. Sur le plateau de Léa Salamé, l’outrance n’a pas été relevée. La séquence, préenregistrée, n’a pas été coupée. Pour la pensée mondaine, qui tient salon sur la chaîne publique, rien n’est plus banal que de nazifier la démocratie israélienne : la gauche antisioniste le martèle, l’Élysée l’euphémise. Il n’est venu à l’idée de personne de rappeler les liens entre le Hamas et le nazislamisme du grand mufti de Jérusalem, Hadj Amin al-Husseini, qui rejoignit Hitler pour créer en 1943 la division SS Handschar, composée de musulmans bosniaques. Conscient par la suite de la bêtise de son cliché, Ardisson a présenté ses excuses à ses « amis juifs ». Il a été le seul.
L’anecdote dit les effets débilitants du conformisme médiatique, ce prêt-à-penser à l’usage des arrivistes et des paresseux. Il a porté la réflexion sous son étiage. Marcel Aymé moqua, dans Le Confort intellectuel (1949), l’attrait du bourgeois progressiste pour les idéologies les plus démentes, les arts abstraits les plus fumeux, les postures hermétiques les plus verbeuses. Ce que le chercheur Bob Henderson nomme aujourd’hui les « croyances de luxe[1] » désigne ce même désir, de la part d’« élites » déculturées, d’exhiber leur supériorité en récitant des dogmes manichéens, signes clinquants d’une reconnaissance sociale. Le wokisme est le dernier avatar totalitaire promu par ce beau monde aux pensées floues qui a perdu le sens des mots et des faits.
La caste snobinarde n’a d’obsession que de marquer sa distance avec ces ploucs qui pestent contre l’insécurité, l’immigration, l’islam radical. Le choix de Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur et nouveau président des LR, d’éventer le 21 mai un rapport sur l’emprise des Frères musulmans, a brisé le silence d’État sur l’invasion islamiste vue comme un fantasme complotiste. Dans les dîners germanopratins, abrités de sas et de digicodes, il est séant de critiquer CNews plutôt que Jean-Luc Mélenchon, de hausser les yeux à l’évocation de Marine Le Pen ou Donald Trump. Plutôt que de défendre un écrivain ciblé par les islamistes, Libération a dénoncé chez Kamel Daoud sa « proximité idéologique avec le bloc réactionnaire ». Boualem Sansal, qui avait parlé à des journalistes conservateurs avant son arrestation en Algérie, n’a pas été cité par Emmanuel Macron, le 13 mai, dans ses plus de trois heures de paroles sur TF1. Le président a parlé de « honte », mais il visait Israël.
En mai, le Festival de Cannes a mis en scène la platitude satisfaite des privilégiés. La présidente du jury, Juliette Binoche, a inauguré le raout la tête à moitié couverte d’un voile Dior, en déplorant le réchauffement climatique. Mathieu Kassovitz a dit : « Il n’y a plus de Français de souche et j’espère qu’on pourra continuer à se mélanger. » Ainsi parle l’intelligence artificielle du show-biz, de la presse vertueuse, des philosophes de coquetels. Cette gauche prétentieuse est vide. Alain Finkielkraut en a fait l’aveu (15 mai, Figaro TV) : « C’était glorieux d’être de gauche ; cela devient presque insultant. […] Je veux bien me dire de droite, cela ne me dérange pas. » Le vent tourne, vous dis-je.
[1] Cité par Samuel Fitoussi dans Pourquoi les intellectuels se trompent, L’Observatoire, 2025.
L’écrivain publie Vu de Russie. Chroniques de guerre dans le camp ennemi (Manufacture des livres, 2025)
Thierry Marignac est traducteur et écrivain, mais aussi journaliste de terrain dans le Moscou périlleux des années 90, le Kiev survolté de la révolution orange (2004) et celui d’après le Maïdan de 2014, bref, l’exact contraire du pseudo-expert de plateau ânonnant les éléments de langage d’officines gouvernementales.
Pas russophobe
Il l’a prouvé naguère dans La Guerre avant la guerre. Chronique ukrainienne, un essai truffé d’informations exclusives, en décrivant, le premier, l’importance des clans mafieux qui se moquent des frontières, ukrainiennes ou russes, et mettent l’Ukraine, ce scandale géologique, au pillage. Il montrait bien que cette guerre a commencé dès 2004, et sans doute bien plus tôt, dans le cadre non seulement de luttes entre mafias mais aussi d’une volonté stratégique des thalassocraties anglo-saxonnes d’affaiblir à tout prix la Russie (thèse de Zbigniew Brzeziński sur l’indispensable rupture entre Moscou et Kiev, déjà pensée à Vienne avant 1914, puis à Berlin jusqu’en 1945).
Exaspéré par les propagandes, il a décidé de passer quelques mois dans la Russie en guerre, et d’utiliser son vaste réseau, notamment littéraire (il est connu en Russie pour sa longue amitié avec Limonov) pour voir de près comment ce pays vit depuis les débuts de « l’Opération spéciale ». Ce russophone, qui n’est pas russophobe, a ainsi rencontré, dans le désordre, des opposants, des vétérans, des cinéastes, des reporters de guerre (liés ou non aux Organes), des toubibs et même des politiciens locaux, et ce à Moscou, à Saint-Pétersbourg, mais aussi à Kronstadt ou dans des villes reculées de l’Oural. L’image kaléidoscopique qu’il donne, par le biais de courts chapitres tous axés sur une rencontre (et donc bien vivants), ne correspond en rien à celle véhiculée dans la presse mainstream.
Les langues se délient
Parmi ses observations, toujours originales et sans rien de convenu, d’une société « déconcertante », il faut pointer le caractère lointain de cette guerre, la mondialisation progressive de l’espace slave, qui connaît des fléaux tels que la drogue, omniprésente comme à l’Ouest : «Le diable russe souffre des mêmes maux que la vertueuse Euro-Amérique ». Supermarchés bourrés de denrées occidentales acheminées par des trafiquants de Turquie ou d’Asie centrale, boutiques de sport, centres commerciaux, le même « système de cupidité » s’impose pas à pas. Concernant la guerre elle-même, les langues se délient : nulle terreur de type stalinien, mais une séculaire prudence (une loi récente punit la critique de l’armée de lourdes amendes), et pas mal de franc-parler : «La guerre est soutenue en dehors du régime, voire contre lui, par un véritable sentiment populaire ». L’union ancienne de l’Ukraine et de la Russie, les innombrables familles mixtes, font que certains vétérans disent « se battre contre leur miroir », même si la solidarité avec les russophones d’Ukraine prend encore le dessus. Le tableau : une guerre fratricide attisée par des apprentis sorciers au nom d’intérêts sordides et qu’absout notre jacassante bonne conscience – ce que Marignac surnomme l’esprit ONG.
Thierry Marignac, Vu de Russie. Chroniques de guerre dans le camp ennemi, La Manufacture des livres, 250 pages
Dans son tour de France photographique des « Restos routiers » paru aux éditions Hoëbeke, Guillaume Blot capte les lumières de la route et l’humanité de ces forçats du transport. Un voyage au pays de Johnny et des desserts en farandole…
Sont-ils une espèce en voie de disparition ? Les chiffres annoncés par l’auteur sont alarmants. La France comptait 4 500 restaurants routiers en 1970, ils sont 700 aujourd’hui.
Lieux de réconfort
Guillaume Blot qui a initié ce projet photographique en 2018 a parcouru les routes secondaires de notre pays à la recherche de ces lieux de repos et de réconfort où les chauffeurs s’arrêtent pour se restaurer, pour se laver, pour se raser, pour échanger entre collègues ou pour s’extraire, une heure ou une nuit, de l’enfer de la circulation. Ces endroits-là sont des phares et des refuges. Ils clignotent tels des relais de poste criards et alléchants de l’ancien régime.
Ils sont des appels à lever le pied, à se garer sur un parking poussiéreux et à se confronter à d’autres Hommes autour d’une table ou le coude au zinc. Après des heures à conduire, le regard dans le vague ou l’envie de parler à un copain, ces restaurants accueillent la face cachée de notre société. Dans un monde où les échanges deviennent essentiellement virtuels, où la solitude gangrène les esprits, cette confraternité-là, bruyante parfois, hâbleuse par défoulement, le plus souvent silencieuse par fatigue, fait partie de notre art de vivre. Il y a soixante-dix ans, le cinéma les mettait à l’affiche et louait leur solidarité. Gabin dans « Gas-oil » de Gilles Grangier sorti en 1955 avait tout du camionneur fidèle, sensible et courageux.
Ces Hommes-là, vous ne les verrez pas en ouverture des journaux télévisés, seulement lorsqu’ils bloquent ; alors là, on se souvient enfin d’eux pour les critiquer. Ces travailleurs essentiels, de l’ombre, n’ont pas droit au micro-trottoir et aux éditos emperlousés. Sans eux, l’économie tournerait pourtant au ralenti. Ils savent qu’ils ne sont pas les étendards de la « Start-up Nation ». On ne les montre pas en exemple de réussite dans les écoles. Leurs enfants n’ont pas honte d’eux, ils savent leurs efforts pour ramener un salaire décent à la maison et apporter la dignité à un foyer. On préfère taire leur mission parce qu’on ne connaît rien d’eux. La logistique n’intéresse pas beaucoup nos dirigeants. Et parce qu’ils ne sont pas assez chics et présentables, on les ignore. On les imagine au volant de bahuts antédiluviens, alors que les poids lourds sont à la pointe de la technologie, en avance sur les voitures particulières. Ils représentent tout ce que la société déteste : le travail manuel, la cuisine copieuse, trop de masculin bien que la profession se féminise, un fumet graisseux et les voies abandonnées, en dehors des autoroutes. Ces conducteurs qui traversent l’hexagone, voire l’Europe, ces gros pigeons voyageurs de nos provinces sont souvent éloignés de leur famille durant plusieurs jours. De livraisons en livraisons, d’aventures en aventures, ils quadrillent une France secondaire. Guillaume Blot a visité 120 établissements et flashé cette population si particulière, avec ses codes et ses rites. Et le résultat est joyeusement coloré. Éminemment populaire et sensible. Sans une pointe de misérabilisme.
Poétique
Son travail dessine une carte du tendre, de l’étrange, du kitsch, de l’humanité arrachée au labeur, d’une forme de poésie de l’anodin. Du quotidien qui vire au sympa. De la bonne humeur et des verres de l’amitié. Sans le verre de l’amitié, une nation court à sa perte. Qu’est-ce qu’on voit exactement sur ces clichés brillants, lustrés comme une cagole, un samedi soir ? Des accents, des nationalités différentes qui ne se haïssent pas, une attirance certaine pour les sauces et les desserts « hautement » sucrés. Des gaillards en bermuda et claquettes ; ici, on porte le marcel avec assurance. Des demis de bière et des assiettes de frites à ras bord. Des buffets à volonté. Les portions sont généreuses comme leurs paluches. On y voit un Johnny plus vrai que nature, lunettes d’aviateur et coupe de cheveux à la Patrick Sébastien. Il est fan de western et de John Wayne. On fait la rencontre d’Odile, la cheffe du relais Les Ombrelles dans la Loire qui prépare « sa fameuse tête de veau ». On apprend que Catherine, la cheffe de La Cabane Bambou dans la Somme flambe ses plats au cognac. On se met tout simplement à les regarder vraiment.
Restos routiers de Guillaume Blot – Préfaces de Nora Bouazzouni et Mohamed El Khatib – Hoëbeke – Gallimard 184 pages
La touristification du monde ne connaît pas la crise : le groupe hôtelier de luxe Four Seasons, en partenariat avec la chaîne de télévision HBO, a annoncé l’organisation d’un tour du monde en jet privé à destination des lieux phares de la série TheWhite Lotus1.
The White Lotus Saison 3, disponible en France sur la plateforme Max (c) HBO
Vingt jours d’escapade premium, durant lesquels 48 globe-trotters fortunés (180 000 euros par tête de pipe) pourront rejouer les vacances des ultra-riches dépeints dans la fiction à succès de Mike White. Le World of Wellness Journey, « une expérience immersive centrée sur le bien-être physique et mental », s’inscrit dans une tendance qui fait florès, celle du set-jetting : choisir sa destination de voyage sous l’influence d’un film ou d’une série. « Chaque étape est pensée pour offrir une expérience unique et sur mesure », précise avec gourmandise Marc Speichert, directeur commercial de Four Seasons.
Les happy few pourront ainsi barboter dans les eaux turquoise de Maui (Hawaï, saison 1), s’enivrer de capiteux cépages siciliens à Taormina (Italie, saison 2) avant de s’adonner au yoga sur un ponton de Ko Samui (Thaïlande, saison 3). Le hic ? Ce prospectus de papier glacé est l’exact opposé de la critique sociale – quasi marxiste – exposée par le créateur de The White Lotus à Télérama : « Ces gens aisés sont sur la défensive. Cette classe sociale se sent menacée dans sa culture, dans son existence même. La série examine tous les arguments qu’ils utilisent pour justifier leur façon de vivre, et leur volonté de ne surtout pas en changer. »
De fait, la satire mordante des nantismondialisés (leurs petites névroses et leurs grandes hypocrisies, leur vacuité existentielle et leur culpabilité postcoloniale) contraste pour le moins avec le projet réel de fastueuse robinsonnade en Airbus A321 privatisé. Si on ne s’étonne pas que la morale fictionnelle capitule face au principe de réalité économique, on est néanmoins en droit de s’en amuser. « L’Occident meurt en bermuda », écrivait en son temps Philippe Muray. Son revers devra être cousu d’or pour se payer le luxe de trépasser de l’autre côté du petit écran.