Accueil Site Page 107

Le promeneur de Saint-Germain

Monsieur Nostalgie continue sa série sur les auteurs talentueux qui se font trop discrets. Ce dimanche, il nous parle d’Arnaud Guillon, le romancier du triangle amoureux…


Le jour, où je ne croiserai plus sa silhouette gracile flâner dans Saint-Germain-des-Prés et sa mèche blanche voler au vent mauvais d’une littérature jetable, que ce soit aux abords de la place St-Sulpice ou dans les rues du quartier latin, je perdrai foi dans le Livre. J’abandonnerai le métier sur le champ pour me consacrer aux automobiles anciennes. Sa présence dans les allées du Monoprix me rassure. Son port de tête, un brin altier, parfois goguenard, surplombant un buffet dans ces mondanités que Paris s’évertue à faire exister artificiellement me comble de joie. Je ris d’avance de ses bons mots et de cette distance d’ancien régime qui caractérisaient autrefois les honnêtes hommes. Il est le signe que notre pays n’a pas encore totalement sombré dans le reniement de son style et de son esprit.

Indéfinissable charme

Il est, sans le savoir, le baromètre d’une époque où l’écrivain possédait des lettres et des pudeurs, des tâtonnements et des soupirs, où sa matérialité passait par une œuvre délicate et une façon de la porter tout aussi élégante. Il m’a souvent parlé de la grâce d’un livre, cet indéfinissable charme qui s’élève, par miracle, d’un amas de mots. L’immortalité est à ce prix-là. J’ai vraiment peur du jour où Arnaud Guillon ne posera plus son regard distant et nostalgique, lucide et amusé, sur le tourbillon de la vie. Il est vraiment d’ailleurs bien qu’il soit né à Caen. Il pourrait être un cousin éloigné de Pascal Jardin ou de Jean Freustié dans le toucher de plume, la rondeur et le sarcasme jouant chez lui un tango infernal. Il serait un descendant du baron Empain, qui revenu de l’enfer, aurait le chic de ne pas se plaindre de son sort. Il pourrait être un imper qui traverse la nuit parisienne sur un saxo désenchanté de Miles Davis. Une note bleue sur un soleil couchant à la Pissarro. Ou bien ce conducteur de SM à moteur Maserati qui s’arrête au Drugstore pour acheter le journal du soir et un paquet de blondes. Une femme aux yeux clairs l’attend sur le siège passager, elle porte une montre-bracelet Cartier et des lunettes en écaille. Un brouillard à la Sautet, incertain comme les élans du cœur, nous empêche de distinguer son rouge à lèvres.

A lire aussi: Du ballast à l’amour courtois

Arnaud Guillon ressemble à un acteur de comédie dramatique des années 1970 ou à ces étudiants d’Oxford encapuchonnés dans un duffle-coat pour mieux masquer leurs fêlures. Il y a du Normand en lui, donc de l’Anglais mais un Anglais tamisé par les bouquinistes des quais de Seine, par l’odeur des reliures pleine fleur et la tristesse des petits matins quand l’être aimé doit partir. Après lui, c’en sera fini de l’édition et du contrat moral passé entre l’écrivain et son lecteur. Car le lecteur avait jadis des droits et des attentes. La littérature n’est pas le déversoir à sentiments qu’elle est devenue, elle n’est pas une psychanalyse pages ouvertes ; elle est un sacerdoce et un artisanat ensorcelés dans une solitude mystérieuse, source de béatitude et de sueurs froides. Parfois, pour les plus talentueux, Arnaud Guillon en fait partie, elle se transforme en art. L’auteur est un chevalier errant, il ne court pas les plateaux et les prébendes, il construit seul, patiemment, dans l’indifférence quelque fois, son théâtre vivant.

Une espèce en voie d’extinction

Dans ce quartier m’as-tu vu où le roman s’épanouissait, voir Arnaud Guillon remonter la rue Jacob d’un pas fouettant (il a bonne allure), c’est toucher l’un des derniers représentants d’une espèce en voie d’extinction. Je parle ici de l’écrivain de langue française, classique et intimiste à la fois, le conteur des alcôves bourgeoises et des chagrins qui ne se guérissent pas.

Le visage éternel d’un jeune provincial monté à la capitale, piqué de lectures et d’illusions, voulant lui aussi se jeter dans la bataille du texte aussi carnassière que celle du rail. Arnaud Guillon est ce travailleur du soir accaparé par son manuscrit et la concordance de ses phrases. Ses courts romans sont extraits de vendanges tardives, il les murît jusqu’à la dernière seconde, soigne leur attaque et leur longueur en bouche. Il chasse les adjectifs superflus, il débroussaille sa prose pour qu’elle sonne clair. Au siècle dernier, il s’était fait connaître par des entretiens, notamment avec l’impossible François Nourissier, puis dès la parution d’Écume Palace (Prix Roger Nimier 2000), il dessina sa carte du tendre ce qui assura son succès chez Plon et Héloïse d’Ormesson (15 août, Hit-parade, Tableau de chasse, En amoureux). Il a choisi comme terre d’expression, le roman d’amour, peu d’écrivains ont le cran d’écrire sur ce sujet sans se brûler les ailes. Sans mièvrerie, avec un art du retranchement remarquable, il a su créer des personnages et des histoires qui durent. Il s’est épanoui dans l’inconfort amoureux. Arnaud Guillon résiste à cette lame de fond du vulgaire, à cet esprit boutiquier, et surtout il ne se presse pas. Il ne publie pas voracement à chaque rentrée. Mais décidément, que c’est long, nous avons hâte de tenir entre les mains le prochain Guillon.

Écume palace (1er Mille)

Price: 6,49 €

1 used & new available from 6,49 €

15 août

Price: 10,00 €

23 used & new available from 2,63 €

Hit-Parade

Price: 21,50 €

14 used & new available from 3,00 €

Tableau de chasse

Price: 14,99 €

1 used & new available from 14,99 €

En amoureux

Price: 2,46 €

20 used & new available from

Fumer à Longpré

Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…


 « Non, nous n’irons pas en centre-ville ; tu connais trop de monde ! Tu ne vas pas cesser de parler ; on ne pourra pas profiter… » m’avait dit ma Sauvageonne plus ébouriffée que jamais. Il faisait chaud ; elle portait une robe légère agrémentée d’un motif panthère. Elle était si mignonne ; je n’avais pas envie de la contrarier. (« Imaginons qu’elle fasse une colère de fille ; la soirée serait gâchée », avais-je songé.) J’acquiesçai mollement, bien ennuyé par le souhait péremptoire de l’ébouriffée. Et soudain : euréka ! Il me revint à l’esprit que mon copain, le guitariste-chanteur Philippe Van Haelst, dit Vanfi (avec qui j’avais joué – de la basse Epiphone, forme violin – en des temps immémoriaux au sein du mythique gang Les Scopytones, combo phare du Yé-Yé français) m’avait invité à venir écouter Hold On ! un groupe de soul music qu’il avait intégré depuis peu ; ce dernier se produisait à Longpré-lès-Amiens. 

Ni une, ni deux ! J’attachais la Sauvageonne sur le siège bébé à l’arrière afin qu’elle ne change pas d’avis, et nous fonçâmes vers Longpré. A peine étions-nous garés que les effluves corsés de « Hold On ! I’m coming », de Sam & Dave me montèrent aux oreilles comme un vin bio d’Auvergne. « Le morceau éponyme de la formation ! Un bon présage », songeai-je. J’avais tort. J’arrivai clope au bec vers la buvette pour commander deux bières. Un homme me fit savoir qu’il fallait que j’éteigne ma cigarette car je me trouvais dans une enceinte scolaire. Je grognai comme un vieux yak, respirai profondément façon application cohérence cardiaque sur YouTube, me calmai quand il ajouta : « Et il n’y a plus de bière. » Je constatai qu’à ses pieds gisaient cinq fûts d’une binouze que je soupçonnais d’être allemande. Je lui fis remarquer, pas commode. « Ils sont vides », fit-il, un peu radouci. Nouvelle séance de respiration cohérente. 

A lire aussi, Yannis Ezziadi: Caroline Loeb: mes années Palace

J’allais raconter mes aventures à ma belle. Alors que je parlais, Hold On ! égrenait son répertoire. C’était carrément délicieux. De la soul comme on l’aime. Mes pensées s’égaraient très loin, dans un passé que je croyais évanoui. Je me revoyais, adolescent, dans la salle des fêtes de Tergnier, à un concert des Candles, le groupe ternois de rhythm’n’blues et de soul. Gilles Camus avec sa belle voix de crooner populaire, Momo, au chant également, Goumi, précis et talentueux, sur sa Fender Telecaster aux riffs hachés menus, le Grand Zézette, efficace à la batterie, Marrane, calme comme un Wyman, à la basse, la section de cuivre. C’était les seventies ; je me retrouvais projeté dix ans en arrière. (J’ai toujours détesté le présent.) C’était merveilleux. Hold On ! me faisait le même effet. 

Je cru reconnaître « A change is gonna come », de Sam Cooke« In the midnight hours », de Wilson Picket, « Papa’s got a brand new bag », de James Brown… Rien que du bonheur, d’autant que l’homme de la buvette était venu m’annoncer qu’il avait retrouvé deux fûts de binouze. « Vous savez, moi aussi je suis fumeur », fit-il en me tapant sur l’épaule. On était réconciliés. Le concert terminé, je filais saluer Vanfi qui me raconta l’histoire de sa formation. 

Affiche maximum soul music « Hold On » © D.R.

Hold On ! est composé de neuf musiciens : Guillaume Ghehoun, chanteur, Michel Duflos, claviers, Franck Claussmann, piano et chœurs, Philippe Van Haels, guitare et chœurs, Jean Pierre Dabonneville, basse et chœurs, Marc Cordonnier, sax ténor, Laurent Dupuis, trombone, Jerôme Martel, trompette et Daniel Sueur, batterie. Il a été fondé en 2021, à la sortie du Covid mais il a subi bien des changements depuis pour se stabiliser autour de la présente formule « qui repose sur une solide section rythmique, une section de cuivres complète et la voix incomparable de Guillaume, notre chanteur charismatique », expliquait Vanfi, enjoué.

Photo du groupe, 2025 © Anne Sophie Grossemy

« Hold On ! c’est un groupe de reprises de chansons soul, dans le plus pur style original du label Stax Record des années 60. Notre répertoire comprend quelque deux heures de musique soul non-stop, d’Otis Redding à Nina Simone, en passant par James Brown, Percy Sledge, Eddie Floyd, Sam and Dave et bien d’autres encore ! Nous nous retrouvons dans l’envie de transmettre l’énergie et les vibrations de cette musique afro américaine du milieu des années 60 incarnée en particulier par les productions du label Stax. Hold On ! ça veut dire « Tiens bon ! »« N’abandonne pas ! » C’est une chanson de Sam & Dave, c’est le premier succès du label Stax. Ce n’est pas pour rien car c’est un message universel et intemporel qui dépasse de loin la musique et dans lequel chacun peut se retrouver. Le rhythm & blues est la bande son des luttes pour les droits civiques afro américains. Cette musique symbolise l’esprit de révolte, de résistance et de combat mais aussi la ferveur et les vibrations positives que la communauté noire américaine de cette époque a su transmettre en transcendant souvent son désespoir. Dans le contexte national et international actuel, très incertain et anxiogène, ces valeurs positives de fraternité, d’ouverture et d’engagements résonnent et apportent une  bouffée d’oxygène à beaucoup de gens. Nous le ressentons dans nos concerts il y a un vrai engouement pour cette musique. Nous souhaitons entretenir la flamme allumée il y a maintenant plus de 60 ans à Memphis dans le sud des Etats-Unis par une bande de jeunes musiciens de cultures et de milieu sociaux différents qui ont su dépasser leurs différences. Une grande voix, une rythmique solide et une section de cuivres complète, pour retrouver la couleur originelle de cette musique qui a su traverser les époques. » Tu l’as dit, Vanfi !

Pompes funèbres à La Souterraine

0

Pour tout un chacun, les jours sont comptés, mais en règle générale la vie reprend le dessus. Il n’en va pas de même pour Jacques Ferré : « Par instants, il me semble atteindre un point où la vie et la mort sont si proches, se touchent, qu’elles ne font plus qu’une, comme deux aimants qui s’unissent ». Pas très sociable, le Robinson Creusois : « pas de femme, pas d’enfants, pas d’amis, aucune ambition, très peu de possessions », et confessant à qui veut l’entendre que « ce qui domine, c’est la mire ». Depuis des lustres, l’homme est persuadé que « la guerre est déclarée » à nos portes, « à la frontière » ; que Rodrigo, le déserteur qu’il héberge depuis trois mois, est peut-être le sniper qui va le viser, lui, et taper dans le mille. Aurelia, sa visiteuse aux apparitions imprévisibles, ne le salue jamais autrement que par ces mots : « belle journée pour mourir ».

A lire aussi: «Trolls» de Pierre Cormary: de la haine et du style

Les fous étant aveugles à leur propre démence, la logorrhée du schizophrène paranoïaque revêt toutes les apparences de la normalité : le sel de la première partie du livre tient à ceci que ce monologue égare soigneusement le lecteur quant au degré de réalité de ce qu’il décrit, le délire de Jacques Ferré parasitant le réel, sans frontière bien stable entre les deux. Dans une deuxième partie, le lieutenant Christian Philippot enquête sur la mort du reclus, retrouvé avec le front transpercé d’une balle. Fouillant la généalogie du défunt (Florence, sa fille fleuriste), interrogeant le voisinage (Gilbert Laplace, le retraité d’en face)… Homicide ? Suicide ? Pour en avoir le cœur net, lisez Belle journée pour mourir : à peine cent petites pages apéritives, à boire cul sec.

Auteur maison des éditions du Dilettante – déjà une bonne dizaine de livres au compteur – , Laurent Graff, né en 1968, aime à tâter de tous les registres. Légère, musicale, insolite, parfois mordante, sa prose arpente les paysages, les mœurs et les usages de la France contemporaine avec une alacrité teintée d’humour noir.


A lire : Belle journée pour mourir, de Laurent Graff, Le Dilettante, 2025. 107 pages

Belle journée pour mourir

Price: 6,99 €

1 used & new available from 6,99 €

Rome sur canapé

Jean Le Gall plonge dans les méandres de la crise existentielle d’un homme politique qui abandonne ses responsabilités. Un changement de vie absurde et profond dans la Rome des années 1960


Il y a des familles en littérature. Celle des Hussards donna beaucoup d’enfants, tous différents et plus ou moins heureux – surtout les derniers qui, à toute force, imitent, c’est-à-dire « posturent » sans autre objet, leurs illustres aînés. Quoi qu’on dise, elle eut un mérite : désengager la littérature, la sortir du bourbier politique d’une époque, celle des années 1960, prôner le singulier sur le pluriel, ou plutôt « contre » ce dernier, pour reprendre un mot de Cocteau cité par Jacques Laurent. Le héros du roman de Jean Le Gall a lui aussi choisi de se désengager de la politique. Et son créateur ne laisse pas de nous faire penser par son style, son rythme, son espièglerie, son insolence et son goût pour le plaisir aux turbulents cités plus haut qui, jamais, ne formèrent une école.

Rome, janvier 1969. Le jour même de son élection à la tête du Parti communiste italien, Nicola Palumbo démissionne. Partant, il suicide sa carrière. Faut-il ajouter qu’il « théorisait une révolution qui fût débarrassée de l’envie, de la jalousie, de la revanche et donc de la violence ». C’était déjà une dérobade ! La belle affaire ! Ce fantaisiste a tôt fait de se reconvertir, le jour de son triomphe volontairement avorté, en vendeur de canapés. Se reconvertir dans le convertible ! D’où tient-il ce détachement, cette indifférence ou cette ironie ? C’est selon. Peut-être du troisième mari de sa grand-mère, un certain Fabrizi, dont il avait fait la connaissance en 1939, dans la très belle propriété de la nonna, à trente minutes de la Ville éternelle. Le Fabrizi en question lui dispensa une formation morale dont on peut arguer que le poids (donc l’influence) fut inversement proportionnel à celui du « legs cellulaire de l’hérédité ». Lisez plutôt : « La générosité est une façon respectable de déshonorer son esclave. » Et aussi : « Deux ou trois fois par siècle, l’Italie s’endort au volant. » Et encore : « La droite, la gauche… La vérité n’a jamais été de ces couleurs-là. » Et enfin : « Nous existons à peine. » Cette dernière sentence fera visiblement son chemin puisque, peu de temps après son embauche comme commercial en canapés, Nicola confie à son seul ami Luigi Montale : « Je veux pour ma vie qu’elle soit désormais une expérience existentielle. » Sans doute vient-il simplement d’appréhender le fait que « l’existence humaine est plus épaisse que la politique ne veut le croire ».

À lire aussi, Hervé Weil : Maximilien Friche ou la folle espérance d’un salut par le Verbe

Bientôt, dans son magasin, Nicola voit entrer une femme d’une beauté brutale, de « celles qui agissent avec l’efficacité d’un interrupteur » : Silvana Mangano. Il discute avec elle et s’aperçoit que, d’une certaine façon, il est lui aussi un acteur capable, sans remords, « de changer de rôle entre deux portes ». Ainsi notre héros va-t-il enchaîner les rencontres dans un décor de boom économique ajouré par les bombes anarchistes. C’est maintenant avec lui-même qu’il commerce, avec son impuissance. Cette comédie italienne ne manque pas de profondeur.

Jean Le Gall, Dernières nouvelles de Rome et de l’existence, Gallimard, 2025, 192 pages.

Dernières nouvelles de Rome et de l'existence

Price: 20,00 €

8 used & new available from 14,00 €

M. Mélenchon milite pour le mariage…


Tout arrive.

Oui, M. Mélenchon se pose désormais en farouche défenseur de l’institution du mariage. Il l’a déclaré sans ambages lors d’un récent entretien (voir vidéo en fin d’article) où il évoquait à plaisir son concept chéri de « Nouvelle France. » « Je plaide Nouvelle France », se gargarise-t-il. La vieille France, selon lui, est celle qui salope ses arbres, ou quelque chose comme ça. Et de se vanter d’être à même, circulant en voiture, de reconnaître à la seule forme des arbres si l’on a affaire à la Nouvelle agriculture ou la vieille. Personnellement j’envie une telle science. J’en suis modestement resté au stade où, traversant certains quartiers que je ne prendrai pas la peine de situer ou de nommer ici, je suis parfaitement capable de discerner si je me trouve dans la Nouvelle France à la mode Mélenchon ou pas. Je suppose qu’il n’est nul besoin que je vous fasse un dessin…

« Nous n’allons pas dire aux gens mourez dans la Méditerranée, poursuit le guide suprême des Insoumis. On préfère qu’ils soient vivants, qu’ils viennent ici avec nous, épouser nos filles et nos gars et que nos familles prospèrent… »

Vision idyllique. Ne manquent que les violons et la larme à l’œil. Embrassons-nous Folleville, gai, gai marions-nous !

Soit, mais de quel mariage s’agit-il ?

De l’union conforme aux prescriptions à la fois de notre civilisation, de notre histoire, de nos mœurs, de nos us et coutumes, de nos lois ancestrales ? Ou du mariage où la femme n’est guère plus qu’un élément de cheptel polygame burqable à merci, inférieure et soumise à l’homme dans le quotidien de son existence comme dans son statut juridique et social ? Il conviendrait tout de même que M. Mélenchon précise ces choses qui ne sont pas que détails, on en conviendra.

Je m’attendais – naïf comme je suis – à ce que cette exigence d’éclaircissements tombe de la branche féminine de son mouvement où l’on se drape volontiers dans les fanfreluches d’un féminisme des plus avancés. Je pensais que les trois grâces associées de près à la vision du gourou se feraient un devoir de réclamer ces précisions. Trois grâces, dois-je les nommer ? Ce sont Mesdames Panot, Hassan et Aubry. Il est vrai qu’en matière de défense de la femme, elles sont d’une sensibilité plutôt sélective. Le solfège inversé, si je puis dire, où, par exemple, une blanche (violée, tabassée, assassinée) est loin, très, très loin de valoir une « racisée ». Inutile donc d’espérer quoi que ce soit de ce côté-là.

Toujours au cours de ce même entretien, M. Mélenchon se fait une gloire d’être un « agent de subversion migratoire ». Et de reprendre le couplet qu’il avait entonné précédemment, le 13 février 2025, à Angers me semble-t-il, lors d’un meeting. Il y exposait qu’il était de ceux – un Français sur quatre, selon lui – dont au moins un grand père était étranger. Deux dans son cas, revendiquait-il. L’un Italien, l’autre Espagnol.

Et c’est bien là que se niche l’imposture intellectuelle mélenchonienne. En quoi les apports de populations espagnoles, italiennes auraient-ils généré chez nous une modification civilisationnelle substantielle, radicale ? Un exemple. Lorsque Mazarin, le finaud ministre italien de Louis XIII gouverne le pays, en profite-t-il pour instaurer un califat ? Le mariage entre gens de ce versant-ci des Alpes ou des Pyrénées avec des personnes de l’autre versant est-il si différent de l’union entre individus de deux de nos villages ou de nos terroirs ? Les uns et les autres ont été biberonnés à la même conception des choses et des êtres, à la même source métaphysique et spirituelle. Aux mêmes principes de droit. Il y a des différences, c’est certain. L’assimilation des arrivants n’aura certes pas été un long fleuve tranquille. Mais il était patent, il était manifeste, il était évidemment dès avant leur venue que ce qui unissait les uns et les autres était autrement plus important, autrement fort, que ce qui les séparait. Autrement dit, très exactement l’opposé de ce que M. Mélenchon porte avec son projet illusoire et mortifère de Nouvelle France.

Pire encore, à l’entendre il n’y aurait, pour le migrant que deux options : mourir en Méditerranée ou convoler avec une heureuse élue de chez nous. Personnellement, j’en vois une troisième. S’accrocher à son pays, à l’endroit d’où l’on est, et mettre toute son énergie, non pas à ramer et ramer encore dans la grande bleue ou la Manche, mais à œuvrer pour la prospérité de sa terre natale, y promouvoir un progrès social si possible harmonieusement et équitablement réparti. Et, in fine, juste histoire de faire plaisir à M. Mélenchon, y épouser une fille, un gars du cru.

LES TÊTES MOLLES - HONTE ET RUINE DE LA FRANCE

Price: 14,77 €

5 used & new available from 10,78 €

Je suis solognot mais je me soigne

Price: 12,00 €

3 used & new available from 12,00 €


Cessole à Lisbonne

Le nouveau roman de Bruno de Cessole raconte la vie d’un écrivain en exil, tourmenté par la trahison de ses idéaux. Véritable critique du monde littéraire actuel, l’auteur se désole du naufrage de la littérature d’exigence.


Naguère, j’ai eu à plusieurs reprises, l’occasion d’évoquer Bruno de Cessole, écrivain raffiné qui incarne depuis des décennies ce que le grand érudit Mario Praz appelait « un agent secret de la civilisation », dressé, telle une digue, contre la marée de l’indifférencié.

Comme tous ses amis, je savais qu’il s’était retiré à Lisbonne, ville littéraire par définition. Son dernier roman, Tout est bien puisque tout finit, se lira aussi comme une flânerie dans cette ville fascinante, sans doute l’une des capitales de l’exil intérieur, avec Naples et Venise. Le héros du roman est un écrivain couvert d’honneurs, Baltasar dos Santos, fils de maçon portugais émigré en France, passé par l’école de la République et devenu plus français que les Français, « par conquête et non par héritage », à l’instar de certains Russes blancs. Après cinq romans élitistes et « surécrits » salués par la critique mais boudés par le public, dos Santos jette l’éponge et gagne New York pour y suivre un séminaire de creative writing. Le voilà métamorphosé en écrivain à succès, pondant chaque année un roman à la syntaxe simplifiée, au vocabulaire étique et aux sujets soigneusement choisis parmi les scies politiquement correctes. Le voilà devenu une figure de cette littérature industrielle autant que prostitutionnelle qui fait vibrer les attachées de presse et tout un public sous-cultivé. Couronné par le Nobel, dos Santos, dans un renversement théâtral, vend la mèche le soir même de la remise du Prix, devant le tout Stockholm : « je suis un charlatan, un imposteur, qui a trahi ses idéaux, etc. ». Non content de s’accabler pour ses « cochonneries littéraires » (Balzac), il ridiculise aussi les jurés pour leur aveuglement et leur conformisme. Scandale international, à la plus grande jubilation de l’écrivain, immédiatement lâché de partout. Après un voyage à New York, occasion d’un joli portrait critique de la Grande Pomme, dos Santos décide, un peu comme son confrère Salinger, de fuir la presse et de plonger dans une sorte de clandestinité. Un courrier de Lisbonne joue le rôle imparti par le rapide destin et ce sera sur les bords du Tage que se planquera Baltasar dos Santos, notre faux cynique.

Ce qui nous vaut un splendide portrait de ville, une magnifique évocation d’un art de vivre entre douceur maritime et mélancolie impériale – un bijou de culture et de sensibilité. Omniprésentes, les ombres de Pessoa, de ses homonymes comme de la poétesse Sophia de Mello, l’amie de l’éditeur Joaquim Vital ; fugitive, celle d’un autre éditeur disparu, Dimitri. Cet exil, ma foi bien confortable (dos Santos a tout de même reçu le chèque suédois), connaîtra une fin quand, du Brésil, parvient la nouvelle qu’un homonyme (!) a publié un roman. Le tragique s’invite aussi, à sa manière, ici cruelle et feutrée. En fin de compte, tout est bien, puisque tout finit, avec panache et de manière magistrale.

Bruno de Cessole, Tout est bien puisque tout finit, Le Cherche-Midi, 350 pages.

Tout est bien puisque tout finit

Price: 22,00 €

17 used & new available from 8,80 €

Voie de garage

Au cinéma, découvrez le récit peu intéressant des vacances bobos d’une famille recomposée… Ou pas !


Il faut d’abord être un peu gonflé pour reprendre le titre d’un magnifique film d’Antonioni même si le temps a passé. Et surtout pour proposer une vraie-fausse introspection familiale.

Sophie Letourneur, la réalisatrice, s’est spécialisée dans des films dont elle est le personnage central, revendiquant un procédé narratif qu’elle pense original : retranscrire à l’écran des tranches de vie en les faisant rejouer par des personnages qui font semblant de répéter le film lui-même. Cette mise en abyme un peu dérisoire finit par lasser le spectateur. Surtout que « l’aventura » en question ne fait que retranscrire les vacances mortellement ennuyeuses d’une famille recomposée dont le père est incarné par le chanteur Philippe Katerine qui, à force de n’avoir rien à jouer, semble se demander ce qu’il fait là. Avec notamment une ridicule complaisance pour le stade anal qui nécessiterait l’intervention bénéfique de la psychothérapeute Caroline Goldman.

C’est en fait ce que le cinéma français bobo peut produire de pire quand il s’oublie comme un bébé incontinent.


Pierre Berville met sa plume dans le cambouis

L’écrivain sort L’Emeraude de Levallois, un roman noir captivant et très réussi, sur l’univers du trafic des voitures anciennes. L’auteur nous révèle tout, notamment sur sa façon de travailler. Entretien. 


Causeur. Le garage L’Emeraude, de Levallois-Perret, existe-t-il ? Votre roman est-il pure fiction ou comporte-t-il quelques parties de pure réalité ?

Pierre Berville. Mon livre est une fiction, et le garage de l’Emeraude est un lieu imaginaire. Mais, selon la formule de Jean-Patrick Manchette : « Ces faits sont imaginaires. Ils ne sont pas inimaginables »… Comme souvent dans le genre noir, L’Émeraude de Levallois est basé sur une réalité. Par décision de Napoléon III, la ville de Levallois-Perret avait été créée pour accueillir les nouvelles industries mécaniques et protéger ainsi Paris de la pollution. Et, avec quelques autres cités de la banlieue Ouest de Paris, Levallois est devenue une capitale de l’automobile et des taxis, et de leur entretien. Pour perpétuer cette tradition, il reste encore plusieurs établissements assez semblables à l’Emeraude. 

Plus fort encore, peu après la sortie du livre, j’ai eu l’émerveillement de découvrir un établissement extraordinaire : le garage de Staël. Il est situé à Clichy, ville immédiatement voisine de Levallois, avec un nom prédestiné pour les littérateurs, même si l’endroit ressemble peu à un salon littéraire… C’est le sosie bien réel de mon garage de l’Emeraude, avec une Ferrari Daytona en attente d’être repeinte qui traine sous la poussière, plusieurs Porsche de collection en cours de restauration, une sublime Aston Martin et une calandre d’AC Cobra dans un coin. Et aux commandes, Stéphane, son patron d’une classe folle, et la fascinante Cécile Malardier, qui lui succède dans les lieux ; deux évocations de Max et Bonnie, les deux principaux protagonistes de mon livre. Une fois de plus, selon l’expression d’Oscar Wilde, la nature a (presque) imité l’art.

Comment vous est venue cette histoire ? Auriez-vous une passion cachée pour la mécanique ?

Ma règle d’or, c’est ne pas ennuyer mes lecteurs. Et de ne pas raconter de calembredaines sur les éléments documentaires. J’adore donc étudier les lieux, les détails géographiques, les métiers des personnages que je mets en scène. Dans La Ville des ânes, mon précédent roman, j’avais étudié en profondeur deux univers : le monde notarial et la promotion immobilière, ce qui m’avait passionné. 

En abordant la conception de L’Emeraude de Levallois, j’ignorais quasiment tout de la mécanique, mais je trouvais que cet univers cadrait très bien avec la vérité des lieux. Je me suis abonné à des revues spécialisées (comme Gazoline, très bien !), n’ai pas raté une seule émission de télé sur le sujet. Surtout, je me suis renseigné à fond auprès de plusieurs professionnels de l’auto, en général aussi passionnants que passionnés. Tout comme – avec l’aide de la grand maître internationale Almira Skripchenko – j’ai bien creusé la psychologie échiquéenne, en particulier autour d’une partie mythique, celle de Tal et Botvinnik, Il y a aussi une ou deux pages inattendues à propos du bitcoin. Mais tout ceci, pour poussé qu’ait été ce travail, ne fait que former le décor. Le roman noir, quand il est réussi, c’est d’abord un bon roman de mœurs et une intrigue bien construite. Le parcours des personnages y est fondamental.

A lire aussi : Pascal Louvrier Itinéraire d’un érotomane

« Innombrables magouilles »

Vous semblez très bien connaître la ville de Levallois ; y résidez-vous ? 

J’ai grandi à Clichy. J’ai vécu à Rueil, Suresnes, Nanterre et Neuilly. J’ai vu toutes les transformations de cette banlieue si fascinante sur tous les plans, historiques (même préhistoriques !), artistiques, urbanistes, architecturaux et sociaux, loin des clichées habituels sur les « quartiers ». Un univers tout près de Paris, au pied de La Défense et de ses innombrables magouilles, mais pourtant singulier et attachant, un creuset formidable d’origines et de statuts sociaux. Petit, mon père m’emmenait en promenade au Cimetière des chiens à la sortie du pont d’Asnières. J’adore Caillebotte, ce peintre génial et généreux, protecteur des impressionnistes, qui avait sa maison de bord de Seine, elle aussi à Asnières, en bordure de Gennevilliers. Sans trop réfléchir, j’ai eu envie de situer mon premier roman noir dans cette banlieue-là. J’y ai pris un tel plaisir (et le public l’a partagé) que pour le suivant, je n’ai pas voulu quitter le coin. 

Votre roman contient des personnages plus vrais que nature…

Max et Bonnie, les amants aux portes de l’âge mûr qui forment le cœur de cette histoire, sont évidemment mes préférés. Max est un descendant des premiers taxis, des aristocrates russes établis ici. Ces exilés faisaient partie des rares qui savaient conduire des automobiles et devaient gagner leur vie. Et Bonnie, eh bien c’est Bonnie, une perle dans bien des domaines, sensuelle, drôle et imprévisible… 

Mais j’ai aussi adoré voir émerger des figures secondaires – pas si secondaires que ça – tels que Mumu le flic mari de Bonnie, Moza, l’apprenti truand expert du jeu d’échecs, et la joyeuse Sylvie, meilleure complice de Bonnie. Avec une pensée aussi pour le Sarde, le salaud du livre, un être vraiment affreux, fondamentalement cruel. On dit en général que quand le méchant est réussi, l’œuvre est réussie. Là, j’ai mis toutes les chances de mon côté, ne trouvez-vous pas ?

« Amoureuse de l’amour »

La jolie Bonnie attire l’attention. Comment la définiriez-vous ?

Bonnie est une femme magnifique. Elle est attachante, intelligente, totalement libre, rayonnante et amoureuse de l’amour. Le livre se partage entre deux époques de sa vie à l’Émeraude. Celle de l’épanouissement totale de sa quarantaine, puis douze ans plus tard, celle de ses déprimes et de ses errances dues à des événements dramatiques…Avec le destin qui ne cesse de rôder. 

Et Moza ? Qui est-il au fond ?

Je ne sais pas vraiment ; je n’en suis que le créateur ! Un bon personnage vous réserve toujours des surprises. Mais cette question m’a intéressé tout au long de l’écriture du roman. Je pense que par les temps qui courent, j’avais envie de rendre hommage à ses origines perses, à l’âme glorieuse et rebelle. Moza, diminutif de Mozaffareddine et non de Mozzarella, aurait pu vivre il y a des siècles à Chiraz ou à Ispahan… Comme les autres personnages, il est d’abord victime de la fatalité. Qui se montrera particulièrement ingénieuse et retorse à ses dépens. 

A lire aussi : Raphaël de Gubernatis Peter de Caluwe: vingt ans d’aventure à la Monnaie de Bruxelles

Vous semblez très bien connaître l’univers et les ruses des truands. Comment faites-vous ? Lectures ? Documentation ? Connaissances ? Lectures de faits divers ?

En réalité, je ne connais pas particulièrement l’univers des truands patentés. J’ai beaucoup lu sur le sujet, mais je me suis surtout amusé à extrapoler à partir de quelques observations que j’ai pu faire dans le monde des affaires et de la politique, fréquenté autrefois depuis mon ancien strapontin de publicitaire. D’ailleurs, dans mes livres, les truands le plus féroces ont tendance à s’exprimer comme certains chefs d’entreprise. Evidemment, toute ressemblance…

« J’ai grandi dans une HLM modeste »

Comment passe-t-on de la publicité (N.D.L.R. : Pierre Berville est le créateur de la célèbre publicité « J’enlève le haut… ») à la littérature noire ? 

Dans mon enfance, j’ai grandi dans une HLM modeste ou, faute de place, je devais dormir sur un sofa dans une bibliothèque encombrée, celle de mon beau-père, collectionneur modeste mais acharné de toutes les littératures. J’en ai gardé le goût des mots bien écrits et de faire peu de hiérarchies entre les genres. Puis je suis devenu journaliste dans une revue rock et concepteur rédacteur dans la publicité, où j’ai créé des slogans dont certains sont restés célèbres, en particulier « J’enlève le haut…« . Ensuite, j’ai fondé, puis cédé, mon agence de pub et j’ai écrit des chansons, rédigé des articles, commencé à publier des livres. L’amour des mots ne m’avait pas quitté, ni le souci de faire plaisir à ceux qui me lisent. Cela m’a porté chance. L’Emeraude de Levallois est mon quatrième ouvrage. 

Et quels sont vos goûts littéraires et vos prochains projets ?

Comme dit précédemment, je ne fais pas de hiérarchie entre les genres. Ainsi, en littérature américaine, je préfère de loin Chandler, Thompson ou Westlake à Hemingway car j’ai une passion pour les grands de la Série Noire. Malgré tout, comment ne pas être influencé par les géants de la littérature du XIXe siècle ? Ils ont inventé tout ce que j’aime, humour compris, de Balzac à Zola. Avec en tête le boss absolu : Flaubert. J’adore aussi Marcel Aymé, PG Woodhouse, Constance Debré, Emma Becker, ou Le Petit Nicolas ! Eclectique, comme je le disais. Il n’y a qu’un genre qui me rebute, c’est le genre à tendance gnangnan assorti d’une philosophie de pacotille. Exemple : je sais qu’il existe une quasi-unanimité autour du Petit Prince de Saint Exupéry. Moi, je ne supporte pas. Je me paie d’ailleurs vaguement sa tête dans l’Émeraude. Je pourrais en citer d’autres, plus contemporains, mais chacun lit ce qu’il veut, vive la liberté !

Fidèle au plaisir des explorations documentaires, je m’éloigne en ce moment des univers urbains pour élaborer une histoire qui se déroule entre la Drôme et le Vaucluse. Pour les besoins de ce prochain livre, j’approfondis mes connaissances botaniques. Déjeuner avec M. Vigouroux, le pape de la littérature sur le platane, flâner dans la bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle de Paris, aller admirer un spécimen unique à Kew Gardens, ça m’habite et ça m’instruit. C’est ce que j’adore transmettre à mes lecteurs. Avec humour et un zeste de noirceur quand même.

L’Emeraude de Levallois, Pierre Berville ; éd. Télémaque ; 275 pages

L'Émeraude de Levallois

Price: 19,00 €

7 used & new available from 14,73 €

Charia de transition

La République Potemkine comme volute idéologique.


Il y a des changements qui ne font pas de bruit. Des conquêtes sans armées. Des effondrements sans fracas. La France d’aujourd’hui ne s’effondre pas en surface : elle tourne, elle parle, elle distribue ses aides, elle croit encore faire société. Mais dans le réel — celui qui ne passe pas au 20 h — quelque chose a basculé.

Il ne s’agit pas d’un califat officiel. Il ne s’agit pas non plus d’un projet théocratique assumé. Ce qui se met en place est plus subtil, plus retors. Une forme de “charia douce”, sans Coran mais avec circulaires ; sans tribunaux islamiques mais avec des procureurs prudents ; sans conquête militaire mais avec une reddition culturelle. Une transition islamo-progressiste, jamais nommée, toujours niée, mais partout perceptible. Une France Potemkine, qui conserve ses mots pour mieux les vider.

La République ? Toujours proclamée. Rarement appliquée

Officiellement, tout va bien. La République est “laïque”, “indivisible”, “égalitaire”. Elle est même “fière de sa diversité”. Mais regardons d’un peu plus près.

– On tolère les insultes à la France, mais on criminalise toute critique de l’islam.

– On absout ceux qui tirent des mortiers sur les policiers, mais on condamne un commerçant pour avoir ouvert le 1er mai.

– On ferme les yeux sur les prières de rue, mais on interdit les crèches dans les mairies.

À lire aussi, du même auteur : Le tribalisme solidaire, angle mort du discours sur l’islamisme

C’est une application sélective du droit, où le “vivre-ensemble” devient une excuse à géométrie variable, toujours à sens unique. Le citoyen solvable et silencieux paie pour les autres. Le “petit Blanc” paie pour tout le monde.

Une justice influencée, désarmée, biaisée

Le Syndicat de la Magistrature, minoritaire mais surmédiatisé, façonne une génération de juges plus soucieux de rééduquer que de juger. Dans l’affaire Sarah Halimi, le meurtrier hurle “Allah Akbar”, cite le Coran, et torture sa victime. Verdict? Pas de procès. Une bouffée délirante. Un refus de voir, pour ne pas avoir à nommer.

Dans les cités, les violences explosent. Mais on préfère “contextualiser”. Et surtout, ne pas jeter de l’huile sur le feu communautaire. Résultat : les policiers sont détestés, les juges méprisés, la loi ignorée.

L’école, laboratoire de la désintégration

Dans les manuels d’histoire, la France coloniale est omniprésente. Mais le génocide vendéen, la guerre d’Algérie vue des pieds-noirs, ou le califat ottoman ? Absents. Le “vivre ensemble” devient un catéchisme obligatoire, et les enfants n’apprennent plus à aimer leur pays, mais à s’en méfier.

On apprend à s’excuser avant même d’avoir vécu. À se taire pour ne pas heurter. À tolérer l’intolérable, pour ne pas être accusé d’islamophobie.

Médias, pub, séries : la pédagogie par inversion

Les fictions du service public sont devenues un miroir truqué. L’homme blanc y est beauf, raciste ou pathétique. Le héros, lui, est « racisé », éclairé, pacifique. La victime est toujours du même côté. La faute, toujours de l’autre.

À lire aussi : Absents pour cause d’Aïd?

La publicité reprend ce schéma : couple mixte systématique, religion visible promue, “diversité” omniprésente jusqu’à l’irréalité. Il ne s’agit plus de refléter la société, mais de la redessiner — par contrainte symbolique.

Le réel inversé, la dissidence criminalisée

Les journalistes du service public ne se contentent plus de rapporter : ils trient, encadrent, recadrent. Le “débat” n’est plus confrontation, mais traque. La moindre parole non conforme devient suspecte, chaque nuance étiquetée. L’insolent est automatiquement rangé dans “l’ultra-droite”, “l’extrême”, “le nauséabond”. Et souvent, on lui place une cible dans le dos.

Il ne s’agit pas de désaccord, mais de disqualification. On ne conteste pas une idée, on psychiatrise son auteur. On n’ouvre pas le débat, on l’enterre sous des adjectifs.

Pendant ce temps, de plus en plus de voix vivent sous protection policière. Pour avoir dessiné, parlé, alerté. Pas pour avoir appelé à la haine, non. Pour avoir dit ce que tout le monde voit.

Dans cette France inversée, la parole lucide est plus dangereuse que la violence réelle. Les journalistes progressistes ne chassent plus les faits, ils traquent les hérésies.

Logement, hôpitaux, sport : une préférence sans nom

Dans le logement social, les grandes familles issues de l’immigration sont prioritaires, sur critères “sociaux”. En réalité, l’origine devient un critère masqué. Et une fois concentrées, ces familles s’organisent autour de logiques communautaires : mosquées, commerces, écoles. La République, là, n’est plus une évidence. Elle est une étrangère.

À lire aussi : Absents pour cause d’Aïd?

À l’hôpital, des femmes refusent d’être soignées par des hommes. Dans les gymnases, les filles voilées ne participent pas aux cours mixtes. Le droit recule. Le confort de chacun devient le prétexte à la soumission de tous.

L’université n’est plus un rempart, mais une forge

Autrefois lieu de controverse et de savoir, l’université française est devenue pour partie le laboratoire de la déconstruction nationale.

– Les séminaires déconstruisent “l’homme blanc”.

– Les tribunes accusent la laïcité d’être “raciste”.

– Les figures de l’islam politique sont invitées à “s’exprimer”, quand Zemmour ou Finkielkraut y sont hués.

Le monde académique a basculé. Il ne produit plus de rationalité commune. Il fournit les mots du renoncement.

Une charia qui ne dit pas son nom

Pas de voile obligatoire, mais une peur intérieure croissante. Pas d’interdits religieux formels, mais des interdits sociaux : ne pas critiquer, ne pas douter, ne pas blesser. Le sacré revient, porté par ceux qu’on disait les plus tolérants.

À lire aussi : Ce que le réel révèle: la fracture, la peur, le déni — ou l’insoutenable légèreté de l’élite française

Cette “charia de transition” ne coupe pas les mains. Elle coupe la parole. Elle ne lapide pas, elle ostracise. Elle ne tue pas, mais elle empêche de vivre debout.

Résister, c’est nommer

Ce système ne repose pas sur la force, mais sur la culpabilité des élites, l’abandon des classes populaires, et l’inversion du réel. Ce n’est pas un choc des civilisations : c’est une désintégration par consentement. Une soumission sans combat.

Créolisation volontaire et effacement assumé

Jean-Luc Mélenchon, figure centrale de la gauche radicale, ne fait plus mystère de son adhésion à un projet de transformation culturelle radicale. Ses appels répétés à la « créolisation » de la France, ses hommages à la vitalité linguistique des banlieues, son souhait même de changer l’appellation de la langue française, ne relèvent pas de la simple provocation. Ils expriment une vision précise et assumée : celle d’une substitution civilisationnelle.

Face à cela, résister commence par nommer. Refuser le lexique imposé. Reprendre le droit commun. Réhabiliter la fierté, l’exigence, l’appartenance. Car une République qui n’ose plus se défendre, finira par ne plus exister. Il faut bien l’admettre, nous sommes passés de la préférence nationale à la préférence diversitaire, de la méritocratie républicaine à la discrimination positive, et du roman national à Al Françalus, nirvâna Potemkine des progressistes !

Ne fais pas ton Français !: Itinéraire d'un bâtard de la République

Price: 20,00 €

13 used & new available from 14,57 €

Malgré l’affiche, nous marcherons!

Pas de « Gay Pride » sans sa polémique annuelle… En 2025, l’affiche officielle de la Marche des Fiertés (voir plus bas), est jugée violente et clivante: elle met en scène un homme lynché arborant une croix celtique, une femme voilée brandissant une pancarte « contre l’internationale réactionnaire », ainsi que des accessoires interprétés comme des « couleurs palestiniennes » – ce que l’InterLGBT réfute, évoquant un message antifasciste et la convergence de luttes… Cette tribune invite les homosexuels à ne pas laisser l’extrême gauche accaparer la manifestation.


L’affiche de la Marche des Fiertés de Paris dévoilée et imposée par les organisateurs a beaucoup divisé et choqué des acteurs engagés pour les droits LGBT. De nombreux partenaires publics et privés ont été mis devant le fait accompli et un certain nombre a fait un pas de côté pour dénoncer des méthodes caricaturales et contreproductives.

Disons-le clairement, cette affiche est contraire à la nécessaire unité du combat pour les droits des personnes LGBT. Un mort y est représenté. Elle est remplie de symboles et références politiques associés à l’extrême gauche, notamment La France insoumise et ses habituelles outrances et radicalités. Cette affiche qui annonce l’événement le plus important de l’année pour les droits LGBT+, la Marche des Fiertés, est purement et simplement à côté du message qu’il faut porter avec le souci de rassembler.

Nous, élues et élus de Paris, nous nous désolidarisons de cette affiche et dénonçons l’utilisation de méthodes clivantes.

Le samedi 28 juin, nous marcherons dans les rues de la Capitale !

Nous marcherons, parce que la Marche des Fiertés de Paris n’appartient pas seulement à quelques collectifs qui ne peuvent prétendre se l’approprier à des fins idéologiques ou partisanes, mais elle appartient aux Parisiennes et aux Parisiens, à toutes les personnes LGBT+ et leurs soutiens.

A lire aussi: Yohan Pawer: l’influenceur gay droitard qui casse –vraiment– les codes

Nous marcherons, par conviction et idéal. Nous défendons l’universalisme des engagements, et les valeurs de la République dont la laïcité.

Nous marcherons, parce que nous soutenons les personnes LGBT+, la diversité des familles, leur visibilité, leurs droits et libertés.

Nous marcherons, parce que le taux de suicide chez les jeunes homosexuels est encore cinq fois plus élevé que chez les jeunes hétérosexuels.

Nous marcherons, parce que dans le monde et même à travers l’Europe les droits des personnes LGBT+ sont attaqués.

A relire: En France, l’homosexualité reste une «maladie» ou une «perversion» pour 63% des musulmans

Nous marcherons pour les personnes LGBT+ hongroises, russes, italiennes, américaines, iraniennes et tant d’autres.

Nous marcherons, pour toutes celles et tous ceux qui ne le peuvent pas parce que cela leur est interdit dans leurs pays.

Nous marcherons, parce que des dizaines de pays pénalisent encore l’homosexualité, onze prononcent même la peine de mort.

Nous marcherons donc parce que l’homophobie et la transphobie tuent encore.

Nous marcherons, parce que nous devons rester unis.

Nous marcherons, parce que Paris est la ville des Libertés, de tous les amours, de toutes les familles et nous y œuvrons !


Voici la liste des cosignataires :

  • Catherine Michaud, Conseillère régionale déléguée d’Île-de-France, Présidente de GayLib
  • Pierre-Yves Bournazel, Conseiller de Paris (18e)
  • Julie Boillot, Conseillère d’arrondissement (16e)
  • Florence Berthout, Maire du Ve arrondissement
  • Daniel-Georges Courtois, Conseiller de Paris (15e) et Conseiller régional délégué d’Île-de-France
  • Martine Figueroa, Conseillère d’arrondissement (Paris Centre)
  • Christian Honoré, Conseiller d’arrondissement (18e)
  • Gyspsie Bloch, Conseillère régionale d’Île-de-France
  • Benjamin Isare, Conseiller d’arrondissement (5e)
  • Fadila Mehal, Conseillère d’arrondissement (18e)

Le promeneur de Saint-Germain

0
L'écrivain français Arnaud Guillon © ANDERSEN ULF/SIPA

Monsieur Nostalgie continue sa série sur les auteurs talentueux qui se font trop discrets. Ce dimanche, il nous parle d’Arnaud Guillon, le romancier du triangle amoureux…


Le jour, où je ne croiserai plus sa silhouette gracile flâner dans Saint-Germain-des-Prés et sa mèche blanche voler au vent mauvais d’une littérature jetable, que ce soit aux abords de la place St-Sulpice ou dans les rues du quartier latin, je perdrai foi dans le Livre. J’abandonnerai le métier sur le champ pour me consacrer aux automobiles anciennes. Sa présence dans les allées du Monoprix me rassure. Son port de tête, un brin altier, parfois goguenard, surplombant un buffet dans ces mondanités que Paris s’évertue à faire exister artificiellement me comble de joie. Je ris d’avance de ses bons mots et de cette distance d’ancien régime qui caractérisaient autrefois les honnêtes hommes. Il est le signe que notre pays n’a pas encore totalement sombré dans le reniement de son style et de son esprit.

Indéfinissable charme

Il est, sans le savoir, le baromètre d’une époque où l’écrivain possédait des lettres et des pudeurs, des tâtonnements et des soupirs, où sa matérialité passait par une œuvre délicate et une façon de la porter tout aussi élégante. Il m’a souvent parlé de la grâce d’un livre, cet indéfinissable charme qui s’élève, par miracle, d’un amas de mots. L’immortalité est à ce prix-là. J’ai vraiment peur du jour où Arnaud Guillon ne posera plus son regard distant et nostalgique, lucide et amusé, sur le tourbillon de la vie. Il est vraiment d’ailleurs bien qu’il soit né à Caen. Il pourrait être un cousin éloigné de Pascal Jardin ou de Jean Freustié dans le toucher de plume, la rondeur et le sarcasme jouant chez lui un tango infernal. Il serait un descendant du baron Empain, qui revenu de l’enfer, aurait le chic de ne pas se plaindre de son sort. Il pourrait être un imper qui traverse la nuit parisienne sur un saxo désenchanté de Miles Davis. Une note bleue sur un soleil couchant à la Pissarro. Ou bien ce conducteur de SM à moteur Maserati qui s’arrête au Drugstore pour acheter le journal du soir et un paquet de blondes. Une femme aux yeux clairs l’attend sur le siège passager, elle porte une montre-bracelet Cartier et des lunettes en écaille. Un brouillard à la Sautet, incertain comme les élans du cœur, nous empêche de distinguer son rouge à lèvres.

A lire aussi: Du ballast à l’amour courtois

Arnaud Guillon ressemble à un acteur de comédie dramatique des années 1970 ou à ces étudiants d’Oxford encapuchonnés dans un duffle-coat pour mieux masquer leurs fêlures. Il y a du Normand en lui, donc de l’Anglais mais un Anglais tamisé par les bouquinistes des quais de Seine, par l’odeur des reliures pleine fleur et la tristesse des petits matins quand l’être aimé doit partir. Après lui, c’en sera fini de l’édition et du contrat moral passé entre l’écrivain et son lecteur. Car le lecteur avait jadis des droits et des attentes. La littérature n’est pas le déversoir à sentiments qu’elle est devenue, elle n’est pas une psychanalyse pages ouvertes ; elle est un sacerdoce et un artisanat ensorcelés dans une solitude mystérieuse, source de béatitude et de sueurs froides. Parfois, pour les plus talentueux, Arnaud Guillon en fait partie, elle se transforme en art. L’auteur est un chevalier errant, il ne court pas les plateaux et les prébendes, il construit seul, patiemment, dans l’indifférence quelque fois, son théâtre vivant.

Une espèce en voie d’extinction

Dans ce quartier m’as-tu vu où le roman s’épanouissait, voir Arnaud Guillon remonter la rue Jacob d’un pas fouettant (il a bonne allure), c’est toucher l’un des derniers représentants d’une espèce en voie d’extinction. Je parle ici de l’écrivain de langue française, classique et intimiste à la fois, le conteur des alcôves bourgeoises et des chagrins qui ne se guérissent pas.

Le visage éternel d’un jeune provincial monté à la capitale, piqué de lectures et d’illusions, voulant lui aussi se jeter dans la bataille du texte aussi carnassière que celle du rail. Arnaud Guillon est ce travailleur du soir accaparé par son manuscrit et la concordance de ses phrases. Ses courts romans sont extraits de vendanges tardives, il les murît jusqu’à la dernière seconde, soigne leur attaque et leur longueur en bouche. Il chasse les adjectifs superflus, il débroussaille sa prose pour qu’elle sonne clair. Au siècle dernier, il s’était fait connaître par des entretiens, notamment avec l’impossible François Nourissier, puis dès la parution d’Écume Palace (Prix Roger Nimier 2000), il dessina sa carte du tendre ce qui assura son succès chez Plon et Héloïse d’Ormesson (15 août, Hit-parade, Tableau de chasse, En amoureux). Il a choisi comme terre d’expression, le roman d’amour, peu d’écrivains ont le cran d’écrire sur ce sujet sans se brûler les ailes. Sans mièvrerie, avec un art du retranchement remarquable, il a su créer des personnages et des histoires qui durent. Il s’est épanoui dans l’inconfort amoureux. Arnaud Guillon résiste à cette lame de fond du vulgaire, à cet esprit boutiquier, et surtout il ne se presse pas. Il ne publie pas voracement à chaque rentrée. Mais décidément, que c’est long, nous avons hâte de tenir entre les mains le prochain Guillon.

Écume palace (1er Mille)

Price: 6,49 €

1 used & new available from 6,49 €

15 août

Price: 10,00 €

23 used & new available from 2,63 €

Hit-Parade

Price: 21,50 €

14 used & new available from 3,00 €

Tableau de chasse

Price: 14,99 €

1 used & new available from 14,99 €

En amoureux

Price: 2,46 €

20 used & new available from

Fumer à Longpré

0
Concert "Hold On!" juin 2025 © Philippe Lacoche

Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…


 « Non, nous n’irons pas en centre-ville ; tu connais trop de monde ! Tu ne vas pas cesser de parler ; on ne pourra pas profiter… » m’avait dit ma Sauvageonne plus ébouriffée que jamais. Il faisait chaud ; elle portait une robe légère agrémentée d’un motif panthère. Elle était si mignonne ; je n’avais pas envie de la contrarier. (« Imaginons qu’elle fasse une colère de fille ; la soirée serait gâchée », avais-je songé.) J’acquiesçai mollement, bien ennuyé par le souhait péremptoire de l’ébouriffée. Et soudain : euréka ! Il me revint à l’esprit que mon copain, le guitariste-chanteur Philippe Van Haelst, dit Vanfi (avec qui j’avais joué – de la basse Epiphone, forme violin – en des temps immémoriaux au sein du mythique gang Les Scopytones, combo phare du Yé-Yé français) m’avait invité à venir écouter Hold On ! un groupe de soul music qu’il avait intégré depuis peu ; ce dernier se produisait à Longpré-lès-Amiens. 

Ni une, ni deux ! J’attachais la Sauvageonne sur le siège bébé à l’arrière afin qu’elle ne change pas d’avis, et nous fonçâmes vers Longpré. A peine étions-nous garés que les effluves corsés de « Hold On ! I’m coming », de Sam & Dave me montèrent aux oreilles comme un vin bio d’Auvergne. « Le morceau éponyme de la formation ! Un bon présage », songeai-je. J’avais tort. J’arrivai clope au bec vers la buvette pour commander deux bières. Un homme me fit savoir qu’il fallait que j’éteigne ma cigarette car je me trouvais dans une enceinte scolaire. Je grognai comme un vieux yak, respirai profondément façon application cohérence cardiaque sur YouTube, me calmai quand il ajouta : « Et il n’y a plus de bière. » Je constatai qu’à ses pieds gisaient cinq fûts d’une binouze que je soupçonnais d’être allemande. Je lui fis remarquer, pas commode. « Ils sont vides », fit-il, un peu radouci. Nouvelle séance de respiration cohérente. 

A lire aussi, Yannis Ezziadi: Caroline Loeb: mes années Palace

J’allais raconter mes aventures à ma belle. Alors que je parlais, Hold On ! égrenait son répertoire. C’était carrément délicieux. De la soul comme on l’aime. Mes pensées s’égaraient très loin, dans un passé que je croyais évanoui. Je me revoyais, adolescent, dans la salle des fêtes de Tergnier, à un concert des Candles, le groupe ternois de rhythm’n’blues et de soul. Gilles Camus avec sa belle voix de crooner populaire, Momo, au chant également, Goumi, précis et talentueux, sur sa Fender Telecaster aux riffs hachés menus, le Grand Zézette, efficace à la batterie, Marrane, calme comme un Wyman, à la basse, la section de cuivre. C’était les seventies ; je me retrouvais projeté dix ans en arrière. (J’ai toujours détesté le présent.) C’était merveilleux. Hold On ! me faisait le même effet. 

Je cru reconnaître « A change is gonna come », de Sam Cooke« In the midnight hours », de Wilson Picket, « Papa’s got a brand new bag », de James Brown… Rien que du bonheur, d’autant que l’homme de la buvette était venu m’annoncer qu’il avait retrouvé deux fûts de binouze. « Vous savez, moi aussi je suis fumeur », fit-il en me tapant sur l’épaule. On était réconciliés. Le concert terminé, je filais saluer Vanfi qui me raconta l’histoire de sa formation. 

Affiche maximum soul music « Hold On » © D.R.

Hold On ! est composé de neuf musiciens : Guillaume Ghehoun, chanteur, Michel Duflos, claviers, Franck Claussmann, piano et chœurs, Philippe Van Haels, guitare et chœurs, Jean Pierre Dabonneville, basse et chœurs, Marc Cordonnier, sax ténor, Laurent Dupuis, trombone, Jerôme Martel, trompette et Daniel Sueur, batterie. Il a été fondé en 2021, à la sortie du Covid mais il a subi bien des changements depuis pour se stabiliser autour de la présente formule « qui repose sur une solide section rythmique, une section de cuivres complète et la voix incomparable de Guillaume, notre chanteur charismatique », expliquait Vanfi, enjoué.

Photo du groupe, 2025 © Anne Sophie Grossemy

« Hold On ! c’est un groupe de reprises de chansons soul, dans le plus pur style original du label Stax Record des années 60. Notre répertoire comprend quelque deux heures de musique soul non-stop, d’Otis Redding à Nina Simone, en passant par James Brown, Percy Sledge, Eddie Floyd, Sam and Dave et bien d’autres encore ! Nous nous retrouvons dans l’envie de transmettre l’énergie et les vibrations de cette musique afro américaine du milieu des années 60 incarnée en particulier par les productions du label Stax. Hold On ! ça veut dire « Tiens bon ! »« N’abandonne pas ! » C’est une chanson de Sam & Dave, c’est le premier succès du label Stax. Ce n’est pas pour rien car c’est un message universel et intemporel qui dépasse de loin la musique et dans lequel chacun peut se retrouver. Le rhythm & blues est la bande son des luttes pour les droits civiques afro américains. Cette musique symbolise l’esprit de révolte, de résistance et de combat mais aussi la ferveur et les vibrations positives que la communauté noire américaine de cette époque a su transmettre en transcendant souvent son désespoir. Dans le contexte national et international actuel, très incertain et anxiogène, ces valeurs positives de fraternité, d’ouverture et d’engagements résonnent et apportent une  bouffée d’oxygène à beaucoup de gens. Nous le ressentons dans nos concerts il y a un vrai engouement pour cette musique. Nous souhaitons entretenir la flamme allumée il y a maintenant plus de 60 ans à Memphis dans le sud des Etats-Unis par une bande de jeunes musiciens de cultures et de milieu sociaux différents qui ont su dépasser leurs différences. Une grande voix, une rythmique solide et une section de cuivres complète, pour retrouver la couleur originelle de cette musique qui a su traverser les époques. » Tu l’as dit, Vanfi !

Pompes funèbres à La Souterraine

0
L'écrivain Laurent Graff. DR.

Pour tout un chacun, les jours sont comptés, mais en règle générale la vie reprend le dessus. Il n’en va pas de même pour Jacques Ferré : « Par instants, il me semble atteindre un point où la vie et la mort sont si proches, se touchent, qu’elles ne font plus qu’une, comme deux aimants qui s’unissent ». Pas très sociable, le Robinson Creusois : « pas de femme, pas d’enfants, pas d’amis, aucune ambition, très peu de possessions », et confessant à qui veut l’entendre que « ce qui domine, c’est la mire ». Depuis des lustres, l’homme est persuadé que « la guerre est déclarée » à nos portes, « à la frontière » ; que Rodrigo, le déserteur qu’il héberge depuis trois mois, est peut-être le sniper qui va le viser, lui, et taper dans le mille. Aurelia, sa visiteuse aux apparitions imprévisibles, ne le salue jamais autrement que par ces mots : « belle journée pour mourir ».

A lire aussi: «Trolls» de Pierre Cormary: de la haine et du style

Les fous étant aveugles à leur propre démence, la logorrhée du schizophrène paranoïaque revêt toutes les apparences de la normalité : le sel de la première partie du livre tient à ceci que ce monologue égare soigneusement le lecteur quant au degré de réalité de ce qu’il décrit, le délire de Jacques Ferré parasitant le réel, sans frontière bien stable entre les deux. Dans une deuxième partie, le lieutenant Christian Philippot enquête sur la mort du reclus, retrouvé avec le front transpercé d’une balle. Fouillant la généalogie du défunt (Florence, sa fille fleuriste), interrogeant le voisinage (Gilbert Laplace, le retraité d’en face)… Homicide ? Suicide ? Pour en avoir le cœur net, lisez Belle journée pour mourir : à peine cent petites pages apéritives, à boire cul sec.

Auteur maison des éditions du Dilettante – déjà une bonne dizaine de livres au compteur – , Laurent Graff, né en 1968, aime à tâter de tous les registres. Légère, musicale, insolite, parfois mordante, sa prose arpente les paysages, les mœurs et les usages de la France contemporaine avec une alacrité teintée d’humour noir.


A lire : Belle journée pour mourir, de Laurent Graff, Le Dilettante, 2025. 107 pages

Belle journée pour mourir

Price: 6,99 €

1 used & new available from 6,99 €

Rome sur canapé

0
Jean Le Gall © Nicolas Guilbert

Jean Le Gall plonge dans les méandres de la crise existentielle d’un homme politique qui abandonne ses responsabilités. Un changement de vie absurde et profond dans la Rome des années 1960


Il y a des familles en littérature. Celle des Hussards donna beaucoup d’enfants, tous différents et plus ou moins heureux – surtout les derniers qui, à toute force, imitent, c’est-à-dire « posturent » sans autre objet, leurs illustres aînés. Quoi qu’on dise, elle eut un mérite : désengager la littérature, la sortir du bourbier politique d’une époque, celle des années 1960, prôner le singulier sur le pluriel, ou plutôt « contre » ce dernier, pour reprendre un mot de Cocteau cité par Jacques Laurent. Le héros du roman de Jean Le Gall a lui aussi choisi de se désengager de la politique. Et son créateur ne laisse pas de nous faire penser par son style, son rythme, son espièglerie, son insolence et son goût pour le plaisir aux turbulents cités plus haut qui, jamais, ne formèrent une école.

Rome, janvier 1969. Le jour même de son élection à la tête du Parti communiste italien, Nicola Palumbo démissionne. Partant, il suicide sa carrière. Faut-il ajouter qu’il « théorisait une révolution qui fût débarrassée de l’envie, de la jalousie, de la revanche et donc de la violence ». C’était déjà une dérobade ! La belle affaire ! Ce fantaisiste a tôt fait de se reconvertir, le jour de son triomphe volontairement avorté, en vendeur de canapés. Se reconvertir dans le convertible ! D’où tient-il ce détachement, cette indifférence ou cette ironie ? C’est selon. Peut-être du troisième mari de sa grand-mère, un certain Fabrizi, dont il avait fait la connaissance en 1939, dans la très belle propriété de la nonna, à trente minutes de la Ville éternelle. Le Fabrizi en question lui dispensa une formation morale dont on peut arguer que le poids (donc l’influence) fut inversement proportionnel à celui du « legs cellulaire de l’hérédité ». Lisez plutôt : « La générosité est une façon respectable de déshonorer son esclave. » Et aussi : « Deux ou trois fois par siècle, l’Italie s’endort au volant. » Et encore : « La droite, la gauche… La vérité n’a jamais été de ces couleurs-là. » Et enfin : « Nous existons à peine. » Cette dernière sentence fera visiblement son chemin puisque, peu de temps après son embauche comme commercial en canapés, Nicola confie à son seul ami Luigi Montale : « Je veux pour ma vie qu’elle soit désormais une expérience existentielle. » Sans doute vient-il simplement d’appréhender le fait que « l’existence humaine est plus épaisse que la politique ne veut le croire ».

À lire aussi, Hervé Weil : Maximilien Friche ou la folle espérance d’un salut par le Verbe

Bientôt, dans son magasin, Nicola voit entrer une femme d’une beauté brutale, de « celles qui agissent avec l’efficacité d’un interrupteur » : Silvana Mangano. Il discute avec elle et s’aperçoit que, d’une certaine façon, il est lui aussi un acteur capable, sans remords, « de changer de rôle entre deux portes ». Ainsi notre héros va-t-il enchaîner les rencontres dans un décor de boom économique ajouré par les bombes anarchistes. C’est maintenant avec lui-même qu’il commerce, avec son impuissance. Cette comédie italienne ne manque pas de profondeur.

Jean Le Gall, Dernières nouvelles de Rome et de l’existence, Gallimard, 2025, 192 pages.

Dernières nouvelles de Rome et de l'existence

Price: 20,00 €

8 used & new available from 14,00 €

M. Mélenchon milite pour le mariage…

0
Jean-Luc Mélenchon. Capture Youtube.

Tout arrive.

Oui, M. Mélenchon se pose désormais en farouche défenseur de l’institution du mariage. Il l’a déclaré sans ambages lors d’un récent entretien (voir vidéo en fin d’article) où il évoquait à plaisir son concept chéri de « Nouvelle France. » « Je plaide Nouvelle France », se gargarise-t-il. La vieille France, selon lui, est celle qui salope ses arbres, ou quelque chose comme ça. Et de se vanter d’être à même, circulant en voiture, de reconnaître à la seule forme des arbres si l’on a affaire à la Nouvelle agriculture ou la vieille. Personnellement j’envie une telle science. J’en suis modestement resté au stade où, traversant certains quartiers que je ne prendrai pas la peine de situer ou de nommer ici, je suis parfaitement capable de discerner si je me trouve dans la Nouvelle France à la mode Mélenchon ou pas. Je suppose qu’il n’est nul besoin que je vous fasse un dessin…

« Nous n’allons pas dire aux gens mourez dans la Méditerranée, poursuit le guide suprême des Insoumis. On préfère qu’ils soient vivants, qu’ils viennent ici avec nous, épouser nos filles et nos gars et que nos familles prospèrent… »

Vision idyllique. Ne manquent que les violons et la larme à l’œil. Embrassons-nous Folleville, gai, gai marions-nous !

Soit, mais de quel mariage s’agit-il ?

De l’union conforme aux prescriptions à la fois de notre civilisation, de notre histoire, de nos mœurs, de nos us et coutumes, de nos lois ancestrales ? Ou du mariage où la femme n’est guère plus qu’un élément de cheptel polygame burqable à merci, inférieure et soumise à l’homme dans le quotidien de son existence comme dans son statut juridique et social ? Il conviendrait tout de même que M. Mélenchon précise ces choses qui ne sont pas que détails, on en conviendra.

Je m’attendais – naïf comme je suis – à ce que cette exigence d’éclaircissements tombe de la branche féminine de son mouvement où l’on se drape volontiers dans les fanfreluches d’un féminisme des plus avancés. Je pensais que les trois grâces associées de près à la vision du gourou se feraient un devoir de réclamer ces précisions. Trois grâces, dois-je les nommer ? Ce sont Mesdames Panot, Hassan et Aubry. Il est vrai qu’en matière de défense de la femme, elles sont d’une sensibilité plutôt sélective. Le solfège inversé, si je puis dire, où, par exemple, une blanche (violée, tabassée, assassinée) est loin, très, très loin de valoir une « racisée ». Inutile donc d’espérer quoi que ce soit de ce côté-là.

Toujours au cours de ce même entretien, M. Mélenchon se fait une gloire d’être un « agent de subversion migratoire ». Et de reprendre le couplet qu’il avait entonné précédemment, le 13 février 2025, à Angers me semble-t-il, lors d’un meeting. Il y exposait qu’il était de ceux – un Français sur quatre, selon lui – dont au moins un grand père était étranger. Deux dans son cas, revendiquait-il. L’un Italien, l’autre Espagnol.

Et c’est bien là que se niche l’imposture intellectuelle mélenchonienne. En quoi les apports de populations espagnoles, italiennes auraient-ils généré chez nous une modification civilisationnelle substantielle, radicale ? Un exemple. Lorsque Mazarin, le finaud ministre italien de Louis XIII gouverne le pays, en profite-t-il pour instaurer un califat ? Le mariage entre gens de ce versant-ci des Alpes ou des Pyrénées avec des personnes de l’autre versant est-il si différent de l’union entre individus de deux de nos villages ou de nos terroirs ? Les uns et les autres ont été biberonnés à la même conception des choses et des êtres, à la même source métaphysique et spirituelle. Aux mêmes principes de droit. Il y a des différences, c’est certain. L’assimilation des arrivants n’aura certes pas été un long fleuve tranquille. Mais il était patent, il était manifeste, il était évidemment dès avant leur venue que ce qui unissait les uns et les autres était autrement plus important, autrement fort, que ce qui les séparait. Autrement dit, très exactement l’opposé de ce que M. Mélenchon porte avec son projet illusoire et mortifère de Nouvelle France.

Pire encore, à l’entendre il n’y aurait, pour le migrant que deux options : mourir en Méditerranée ou convoler avec une heureuse élue de chez nous. Personnellement, j’en vois une troisième. S’accrocher à son pays, à l’endroit d’où l’on est, et mettre toute son énergie, non pas à ramer et ramer encore dans la grande bleue ou la Manche, mais à œuvrer pour la prospérité de sa terre natale, y promouvoir un progrès social si possible harmonieusement et équitablement réparti. Et, in fine, juste histoire de faire plaisir à M. Mélenchon, y épouser une fille, un gars du cru.

LES TÊTES MOLLES - HONTE ET RUINE DE LA FRANCE

Price: 14,77 €

5 used & new available from 10,78 €

Je suis solognot mais je me soigne

Price: 12,00 €

3 used & new available from 12,00 €


Cessole à Lisbonne

0
Bruno de Cessole © D.R.

Le nouveau roman de Bruno de Cessole raconte la vie d’un écrivain en exil, tourmenté par la trahison de ses idéaux. Véritable critique du monde littéraire actuel, l’auteur se désole du naufrage de la littérature d’exigence.


Naguère, j’ai eu à plusieurs reprises, l’occasion d’évoquer Bruno de Cessole, écrivain raffiné qui incarne depuis des décennies ce que le grand érudit Mario Praz appelait « un agent secret de la civilisation », dressé, telle une digue, contre la marée de l’indifférencié.

Comme tous ses amis, je savais qu’il s’était retiré à Lisbonne, ville littéraire par définition. Son dernier roman, Tout est bien puisque tout finit, se lira aussi comme une flânerie dans cette ville fascinante, sans doute l’une des capitales de l’exil intérieur, avec Naples et Venise. Le héros du roman est un écrivain couvert d’honneurs, Baltasar dos Santos, fils de maçon portugais émigré en France, passé par l’école de la République et devenu plus français que les Français, « par conquête et non par héritage », à l’instar de certains Russes blancs. Après cinq romans élitistes et « surécrits » salués par la critique mais boudés par le public, dos Santos jette l’éponge et gagne New York pour y suivre un séminaire de creative writing. Le voilà métamorphosé en écrivain à succès, pondant chaque année un roman à la syntaxe simplifiée, au vocabulaire étique et aux sujets soigneusement choisis parmi les scies politiquement correctes. Le voilà devenu une figure de cette littérature industrielle autant que prostitutionnelle qui fait vibrer les attachées de presse et tout un public sous-cultivé. Couronné par le Nobel, dos Santos, dans un renversement théâtral, vend la mèche le soir même de la remise du Prix, devant le tout Stockholm : « je suis un charlatan, un imposteur, qui a trahi ses idéaux, etc. ». Non content de s’accabler pour ses « cochonneries littéraires » (Balzac), il ridiculise aussi les jurés pour leur aveuglement et leur conformisme. Scandale international, à la plus grande jubilation de l’écrivain, immédiatement lâché de partout. Après un voyage à New York, occasion d’un joli portrait critique de la Grande Pomme, dos Santos décide, un peu comme son confrère Salinger, de fuir la presse et de plonger dans une sorte de clandestinité. Un courrier de Lisbonne joue le rôle imparti par le rapide destin et ce sera sur les bords du Tage que se planquera Baltasar dos Santos, notre faux cynique.

Ce qui nous vaut un splendide portrait de ville, une magnifique évocation d’un art de vivre entre douceur maritime et mélancolie impériale – un bijou de culture et de sensibilité. Omniprésentes, les ombres de Pessoa, de ses homonymes comme de la poétesse Sophia de Mello, l’amie de l’éditeur Joaquim Vital ; fugitive, celle d’un autre éditeur disparu, Dimitri. Cet exil, ma foi bien confortable (dos Santos a tout de même reçu le chèque suédois), connaîtra une fin quand, du Brésil, parvient la nouvelle qu’un homonyme (!) a publié un roman. Le tragique s’invite aussi, à sa manière, ici cruelle et feutrée. En fin de compte, tout est bien, puisque tout finit, avec panache et de manière magistrale.

Bruno de Cessole, Tout est bien puisque tout finit, Le Cherche-Midi, 350 pages.

Tout est bien puisque tout finit

Price: 22,00 €

17 used & new available from 8,80 €

Voie de garage

0
© Arizona Distribution

Au cinéma, découvrez le récit peu intéressant des vacances bobos d’une famille recomposée… Ou pas !


Il faut d’abord être un peu gonflé pour reprendre le titre d’un magnifique film d’Antonioni même si le temps a passé. Et surtout pour proposer une vraie-fausse introspection familiale.

Sophie Letourneur, la réalisatrice, s’est spécialisée dans des films dont elle est le personnage central, revendiquant un procédé narratif qu’elle pense original : retranscrire à l’écran des tranches de vie en les faisant rejouer par des personnages qui font semblant de répéter le film lui-même. Cette mise en abyme un peu dérisoire finit par lasser le spectateur. Surtout que « l’aventura » en question ne fait que retranscrire les vacances mortellement ennuyeuses d’une famille recomposée dont le père est incarné par le chanteur Philippe Katerine qui, à force de n’avoir rien à jouer, semble se demander ce qu’il fait là. Avec notamment une ridicule complaisance pour le stade anal qui nécessiterait l’intervention bénéfique de la psychothérapeute Caroline Goldman.

C’est en fait ce que le cinéma français bobo peut produire de pire quand il s’oublie comme un bébé incontinent.


Pierre Berville met sa plume dans le cambouis

0
Pierre Berville © D.R.

L’écrivain sort L’Emeraude de Levallois, un roman noir captivant et très réussi, sur l’univers du trafic des voitures anciennes. L’auteur nous révèle tout, notamment sur sa façon de travailler. Entretien. 


Causeur. Le garage L’Emeraude, de Levallois-Perret, existe-t-il ? Votre roman est-il pure fiction ou comporte-t-il quelques parties de pure réalité ?

Pierre Berville. Mon livre est une fiction, et le garage de l’Emeraude est un lieu imaginaire. Mais, selon la formule de Jean-Patrick Manchette : « Ces faits sont imaginaires. Ils ne sont pas inimaginables »… Comme souvent dans le genre noir, L’Émeraude de Levallois est basé sur une réalité. Par décision de Napoléon III, la ville de Levallois-Perret avait été créée pour accueillir les nouvelles industries mécaniques et protéger ainsi Paris de la pollution. Et, avec quelques autres cités de la banlieue Ouest de Paris, Levallois est devenue une capitale de l’automobile et des taxis, et de leur entretien. Pour perpétuer cette tradition, il reste encore plusieurs établissements assez semblables à l’Emeraude. 

Plus fort encore, peu après la sortie du livre, j’ai eu l’émerveillement de découvrir un établissement extraordinaire : le garage de Staël. Il est situé à Clichy, ville immédiatement voisine de Levallois, avec un nom prédestiné pour les littérateurs, même si l’endroit ressemble peu à un salon littéraire… C’est le sosie bien réel de mon garage de l’Emeraude, avec une Ferrari Daytona en attente d’être repeinte qui traine sous la poussière, plusieurs Porsche de collection en cours de restauration, une sublime Aston Martin et une calandre d’AC Cobra dans un coin. Et aux commandes, Stéphane, son patron d’une classe folle, et la fascinante Cécile Malardier, qui lui succède dans les lieux ; deux évocations de Max et Bonnie, les deux principaux protagonistes de mon livre. Une fois de plus, selon l’expression d’Oscar Wilde, la nature a (presque) imité l’art.

Comment vous est venue cette histoire ? Auriez-vous une passion cachée pour la mécanique ?

Ma règle d’or, c’est ne pas ennuyer mes lecteurs. Et de ne pas raconter de calembredaines sur les éléments documentaires. J’adore donc étudier les lieux, les détails géographiques, les métiers des personnages que je mets en scène. Dans La Ville des ânes, mon précédent roman, j’avais étudié en profondeur deux univers : le monde notarial et la promotion immobilière, ce qui m’avait passionné. 

En abordant la conception de L’Emeraude de Levallois, j’ignorais quasiment tout de la mécanique, mais je trouvais que cet univers cadrait très bien avec la vérité des lieux. Je me suis abonné à des revues spécialisées (comme Gazoline, très bien !), n’ai pas raté une seule émission de télé sur le sujet. Surtout, je me suis renseigné à fond auprès de plusieurs professionnels de l’auto, en général aussi passionnants que passionnés. Tout comme – avec l’aide de la grand maître internationale Almira Skripchenko – j’ai bien creusé la psychologie échiquéenne, en particulier autour d’une partie mythique, celle de Tal et Botvinnik, Il y a aussi une ou deux pages inattendues à propos du bitcoin. Mais tout ceci, pour poussé qu’ait été ce travail, ne fait que former le décor. Le roman noir, quand il est réussi, c’est d’abord un bon roman de mœurs et une intrigue bien construite. Le parcours des personnages y est fondamental.

A lire aussi : Pascal Louvrier Itinéraire d’un érotomane

« Innombrables magouilles »

Vous semblez très bien connaître la ville de Levallois ; y résidez-vous ? 

J’ai grandi à Clichy. J’ai vécu à Rueil, Suresnes, Nanterre et Neuilly. J’ai vu toutes les transformations de cette banlieue si fascinante sur tous les plans, historiques (même préhistoriques !), artistiques, urbanistes, architecturaux et sociaux, loin des clichées habituels sur les « quartiers ». Un univers tout près de Paris, au pied de La Défense et de ses innombrables magouilles, mais pourtant singulier et attachant, un creuset formidable d’origines et de statuts sociaux. Petit, mon père m’emmenait en promenade au Cimetière des chiens à la sortie du pont d’Asnières. J’adore Caillebotte, ce peintre génial et généreux, protecteur des impressionnistes, qui avait sa maison de bord de Seine, elle aussi à Asnières, en bordure de Gennevilliers. Sans trop réfléchir, j’ai eu envie de situer mon premier roman noir dans cette banlieue-là. J’y ai pris un tel plaisir (et le public l’a partagé) que pour le suivant, je n’ai pas voulu quitter le coin. 

Votre roman contient des personnages plus vrais que nature…

Max et Bonnie, les amants aux portes de l’âge mûr qui forment le cœur de cette histoire, sont évidemment mes préférés. Max est un descendant des premiers taxis, des aristocrates russes établis ici. Ces exilés faisaient partie des rares qui savaient conduire des automobiles et devaient gagner leur vie. Et Bonnie, eh bien c’est Bonnie, une perle dans bien des domaines, sensuelle, drôle et imprévisible… 

Mais j’ai aussi adoré voir émerger des figures secondaires – pas si secondaires que ça – tels que Mumu le flic mari de Bonnie, Moza, l’apprenti truand expert du jeu d’échecs, et la joyeuse Sylvie, meilleure complice de Bonnie. Avec une pensée aussi pour le Sarde, le salaud du livre, un être vraiment affreux, fondamentalement cruel. On dit en général que quand le méchant est réussi, l’œuvre est réussie. Là, j’ai mis toutes les chances de mon côté, ne trouvez-vous pas ?

« Amoureuse de l’amour »

La jolie Bonnie attire l’attention. Comment la définiriez-vous ?

Bonnie est une femme magnifique. Elle est attachante, intelligente, totalement libre, rayonnante et amoureuse de l’amour. Le livre se partage entre deux époques de sa vie à l’Émeraude. Celle de l’épanouissement totale de sa quarantaine, puis douze ans plus tard, celle de ses déprimes et de ses errances dues à des événements dramatiques…Avec le destin qui ne cesse de rôder. 

Et Moza ? Qui est-il au fond ?

Je ne sais pas vraiment ; je n’en suis que le créateur ! Un bon personnage vous réserve toujours des surprises. Mais cette question m’a intéressé tout au long de l’écriture du roman. Je pense que par les temps qui courent, j’avais envie de rendre hommage à ses origines perses, à l’âme glorieuse et rebelle. Moza, diminutif de Mozaffareddine et non de Mozzarella, aurait pu vivre il y a des siècles à Chiraz ou à Ispahan… Comme les autres personnages, il est d’abord victime de la fatalité. Qui se montrera particulièrement ingénieuse et retorse à ses dépens. 

A lire aussi : Raphaël de Gubernatis Peter de Caluwe: vingt ans d’aventure à la Monnaie de Bruxelles

Vous semblez très bien connaître l’univers et les ruses des truands. Comment faites-vous ? Lectures ? Documentation ? Connaissances ? Lectures de faits divers ?

En réalité, je ne connais pas particulièrement l’univers des truands patentés. J’ai beaucoup lu sur le sujet, mais je me suis surtout amusé à extrapoler à partir de quelques observations que j’ai pu faire dans le monde des affaires et de la politique, fréquenté autrefois depuis mon ancien strapontin de publicitaire. D’ailleurs, dans mes livres, les truands le plus féroces ont tendance à s’exprimer comme certains chefs d’entreprise. Evidemment, toute ressemblance…

« J’ai grandi dans une HLM modeste »

Comment passe-t-on de la publicité (N.D.L.R. : Pierre Berville est le créateur de la célèbre publicité « J’enlève le haut… ») à la littérature noire ? 

Dans mon enfance, j’ai grandi dans une HLM modeste ou, faute de place, je devais dormir sur un sofa dans une bibliothèque encombrée, celle de mon beau-père, collectionneur modeste mais acharné de toutes les littératures. J’en ai gardé le goût des mots bien écrits et de faire peu de hiérarchies entre les genres. Puis je suis devenu journaliste dans une revue rock et concepteur rédacteur dans la publicité, où j’ai créé des slogans dont certains sont restés célèbres, en particulier « J’enlève le haut…« . Ensuite, j’ai fondé, puis cédé, mon agence de pub et j’ai écrit des chansons, rédigé des articles, commencé à publier des livres. L’amour des mots ne m’avait pas quitté, ni le souci de faire plaisir à ceux qui me lisent. Cela m’a porté chance. L’Emeraude de Levallois est mon quatrième ouvrage. 

Et quels sont vos goûts littéraires et vos prochains projets ?

Comme dit précédemment, je ne fais pas de hiérarchie entre les genres. Ainsi, en littérature américaine, je préfère de loin Chandler, Thompson ou Westlake à Hemingway car j’ai une passion pour les grands de la Série Noire. Malgré tout, comment ne pas être influencé par les géants de la littérature du XIXe siècle ? Ils ont inventé tout ce que j’aime, humour compris, de Balzac à Zola. Avec en tête le boss absolu : Flaubert. J’adore aussi Marcel Aymé, PG Woodhouse, Constance Debré, Emma Becker, ou Le Petit Nicolas ! Eclectique, comme je le disais. Il n’y a qu’un genre qui me rebute, c’est le genre à tendance gnangnan assorti d’une philosophie de pacotille. Exemple : je sais qu’il existe une quasi-unanimité autour du Petit Prince de Saint Exupéry. Moi, je ne supporte pas. Je me paie d’ailleurs vaguement sa tête dans l’Émeraude. Je pourrais en citer d’autres, plus contemporains, mais chacun lit ce qu’il veut, vive la liberté !

Fidèle au plaisir des explorations documentaires, je m’éloigne en ce moment des univers urbains pour élaborer une histoire qui se déroule entre la Drôme et le Vaucluse. Pour les besoins de ce prochain livre, j’approfondis mes connaissances botaniques. Déjeuner avec M. Vigouroux, le pape de la littérature sur le platane, flâner dans la bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle de Paris, aller admirer un spécimen unique à Kew Gardens, ça m’habite et ça m’instruit. C’est ce que j’adore transmettre à mes lecteurs. Avec humour et un zeste de noirceur quand même.

L’Emeraude de Levallois, Pierre Berville ; éd. Télémaque ; 275 pages

L'Émeraude de Levallois

Price: 19,00 €

7 used & new available from 14,73 €

Charia de transition

0
Une femme voilée en famille en promenade sur les planches de Deauville, 10 mai 2025 © SICCOLI PATRICK/SIPA

La République Potemkine comme volute idéologique.


Il y a des changements qui ne font pas de bruit. Des conquêtes sans armées. Des effondrements sans fracas. La France d’aujourd’hui ne s’effondre pas en surface : elle tourne, elle parle, elle distribue ses aides, elle croit encore faire société. Mais dans le réel — celui qui ne passe pas au 20 h — quelque chose a basculé.

Il ne s’agit pas d’un califat officiel. Il ne s’agit pas non plus d’un projet théocratique assumé. Ce qui se met en place est plus subtil, plus retors. Une forme de “charia douce”, sans Coran mais avec circulaires ; sans tribunaux islamiques mais avec des procureurs prudents ; sans conquête militaire mais avec une reddition culturelle. Une transition islamo-progressiste, jamais nommée, toujours niée, mais partout perceptible. Une France Potemkine, qui conserve ses mots pour mieux les vider.

La République ? Toujours proclamée. Rarement appliquée

Officiellement, tout va bien. La République est “laïque”, “indivisible”, “égalitaire”. Elle est même “fière de sa diversité”. Mais regardons d’un peu plus près.

– On tolère les insultes à la France, mais on criminalise toute critique de l’islam.

– On absout ceux qui tirent des mortiers sur les policiers, mais on condamne un commerçant pour avoir ouvert le 1er mai.

– On ferme les yeux sur les prières de rue, mais on interdit les crèches dans les mairies.

À lire aussi, du même auteur : Le tribalisme solidaire, angle mort du discours sur l’islamisme

C’est une application sélective du droit, où le “vivre-ensemble” devient une excuse à géométrie variable, toujours à sens unique. Le citoyen solvable et silencieux paie pour les autres. Le “petit Blanc” paie pour tout le monde.

Une justice influencée, désarmée, biaisée

Le Syndicat de la Magistrature, minoritaire mais surmédiatisé, façonne une génération de juges plus soucieux de rééduquer que de juger. Dans l’affaire Sarah Halimi, le meurtrier hurle “Allah Akbar”, cite le Coran, et torture sa victime. Verdict? Pas de procès. Une bouffée délirante. Un refus de voir, pour ne pas avoir à nommer.

Dans les cités, les violences explosent. Mais on préfère “contextualiser”. Et surtout, ne pas jeter de l’huile sur le feu communautaire. Résultat : les policiers sont détestés, les juges méprisés, la loi ignorée.

L’école, laboratoire de la désintégration

Dans les manuels d’histoire, la France coloniale est omniprésente. Mais le génocide vendéen, la guerre d’Algérie vue des pieds-noirs, ou le califat ottoman ? Absents. Le “vivre ensemble” devient un catéchisme obligatoire, et les enfants n’apprennent plus à aimer leur pays, mais à s’en méfier.

On apprend à s’excuser avant même d’avoir vécu. À se taire pour ne pas heurter. À tolérer l’intolérable, pour ne pas être accusé d’islamophobie.

Médias, pub, séries : la pédagogie par inversion

Les fictions du service public sont devenues un miroir truqué. L’homme blanc y est beauf, raciste ou pathétique. Le héros, lui, est « racisé », éclairé, pacifique. La victime est toujours du même côté. La faute, toujours de l’autre.

À lire aussi : Absents pour cause d’Aïd?

La publicité reprend ce schéma : couple mixte systématique, religion visible promue, “diversité” omniprésente jusqu’à l’irréalité. Il ne s’agit plus de refléter la société, mais de la redessiner — par contrainte symbolique.

Le réel inversé, la dissidence criminalisée

Les journalistes du service public ne se contentent plus de rapporter : ils trient, encadrent, recadrent. Le “débat” n’est plus confrontation, mais traque. La moindre parole non conforme devient suspecte, chaque nuance étiquetée. L’insolent est automatiquement rangé dans “l’ultra-droite”, “l’extrême”, “le nauséabond”. Et souvent, on lui place une cible dans le dos.

Il ne s’agit pas de désaccord, mais de disqualification. On ne conteste pas une idée, on psychiatrise son auteur. On n’ouvre pas le débat, on l’enterre sous des adjectifs.

Pendant ce temps, de plus en plus de voix vivent sous protection policière. Pour avoir dessiné, parlé, alerté. Pas pour avoir appelé à la haine, non. Pour avoir dit ce que tout le monde voit.

Dans cette France inversée, la parole lucide est plus dangereuse que la violence réelle. Les journalistes progressistes ne chassent plus les faits, ils traquent les hérésies.

Logement, hôpitaux, sport : une préférence sans nom

Dans le logement social, les grandes familles issues de l’immigration sont prioritaires, sur critères “sociaux”. En réalité, l’origine devient un critère masqué. Et une fois concentrées, ces familles s’organisent autour de logiques communautaires : mosquées, commerces, écoles. La République, là, n’est plus une évidence. Elle est une étrangère.

À lire aussi : Absents pour cause d’Aïd?

À l’hôpital, des femmes refusent d’être soignées par des hommes. Dans les gymnases, les filles voilées ne participent pas aux cours mixtes. Le droit recule. Le confort de chacun devient le prétexte à la soumission de tous.

L’université n’est plus un rempart, mais une forge

Autrefois lieu de controverse et de savoir, l’université française est devenue pour partie le laboratoire de la déconstruction nationale.

– Les séminaires déconstruisent “l’homme blanc”.

– Les tribunes accusent la laïcité d’être “raciste”.

– Les figures de l’islam politique sont invitées à “s’exprimer”, quand Zemmour ou Finkielkraut y sont hués.

Le monde académique a basculé. Il ne produit plus de rationalité commune. Il fournit les mots du renoncement.

Une charia qui ne dit pas son nom

Pas de voile obligatoire, mais une peur intérieure croissante. Pas d’interdits religieux formels, mais des interdits sociaux : ne pas critiquer, ne pas douter, ne pas blesser. Le sacré revient, porté par ceux qu’on disait les plus tolérants.

À lire aussi : Ce que le réel révèle: la fracture, la peur, le déni — ou l’insoutenable légèreté de l’élite française

Cette “charia de transition” ne coupe pas les mains. Elle coupe la parole. Elle ne lapide pas, elle ostracise. Elle ne tue pas, mais elle empêche de vivre debout.

Résister, c’est nommer

Ce système ne repose pas sur la force, mais sur la culpabilité des élites, l’abandon des classes populaires, et l’inversion du réel. Ce n’est pas un choc des civilisations : c’est une désintégration par consentement. Une soumission sans combat.

Créolisation volontaire et effacement assumé

Jean-Luc Mélenchon, figure centrale de la gauche radicale, ne fait plus mystère de son adhésion à un projet de transformation culturelle radicale. Ses appels répétés à la « créolisation » de la France, ses hommages à la vitalité linguistique des banlieues, son souhait même de changer l’appellation de la langue française, ne relèvent pas de la simple provocation. Ils expriment une vision précise et assumée : celle d’une substitution civilisationnelle.

Face à cela, résister commence par nommer. Refuser le lexique imposé. Reprendre le droit commun. Réhabiliter la fierté, l’exigence, l’appartenance. Car une République qui n’ose plus se défendre, finira par ne plus exister. Il faut bien l’admettre, nous sommes passés de la préférence nationale à la préférence diversitaire, de la méritocratie républicaine à la discrimination positive, et du roman national à Al Françalus, nirvâna Potemkine des progressistes !

Ne fais pas ton Français !: Itinéraire d'un bâtard de la République

Price: 20,00 €

13 used & new available from 14,57 €

Malgré l’affiche, nous marcherons!

0
Image d'archive, juin 2018 © Emma PROSDOCIMI/SIPA

Pas de « Gay Pride » sans sa polémique annuelle… En 2025, l’affiche officielle de la Marche des Fiertés (voir plus bas), est jugée violente et clivante: elle met en scène un homme lynché arborant une croix celtique, une femme voilée brandissant une pancarte « contre l’internationale réactionnaire », ainsi que des accessoires interprétés comme des « couleurs palestiniennes » – ce que l’InterLGBT réfute, évoquant un message antifasciste et la convergence de luttes… Cette tribune invite les homosexuels à ne pas laisser l’extrême gauche accaparer la manifestation.


L’affiche de la Marche des Fiertés de Paris dévoilée et imposée par les organisateurs a beaucoup divisé et choqué des acteurs engagés pour les droits LGBT. De nombreux partenaires publics et privés ont été mis devant le fait accompli et un certain nombre a fait un pas de côté pour dénoncer des méthodes caricaturales et contreproductives.

Disons-le clairement, cette affiche est contraire à la nécessaire unité du combat pour les droits des personnes LGBT. Un mort y est représenté. Elle est remplie de symboles et références politiques associés à l’extrême gauche, notamment La France insoumise et ses habituelles outrances et radicalités. Cette affiche qui annonce l’événement le plus important de l’année pour les droits LGBT+, la Marche des Fiertés, est purement et simplement à côté du message qu’il faut porter avec le souci de rassembler.

Nous, élues et élus de Paris, nous nous désolidarisons de cette affiche et dénonçons l’utilisation de méthodes clivantes.

Le samedi 28 juin, nous marcherons dans les rues de la Capitale !

Nous marcherons, parce que la Marche des Fiertés de Paris n’appartient pas seulement à quelques collectifs qui ne peuvent prétendre se l’approprier à des fins idéologiques ou partisanes, mais elle appartient aux Parisiennes et aux Parisiens, à toutes les personnes LGBT+ et leurs soutiens.

A lire aussi: Yohan Pawer: l’influenceur gay droitard qui casse –vraiment– les codes

Nous marcherons, par conviction et idéal. Nous défendons l’universalisme des engagements, et les valeurs de la République dont la laïcité.

Nous marcherons, parce que nous soutenons les personnes LGBT+, la diversité des familles, leur visibilité, leurs droits et libertés.

Nous marcherons, parce que le taux de suicide chez les jeunes homosexuels est encore cinq fois plus élevé que chez les jeunes hétérosexuels.

Nous marcherons, parce que dans le monde et même à travers l’Europe les droits des personnes LGBT+ sont attaqués.

A relire: En France, l’homosexualité reste une «maladie» ou une «perversion» pour 63% des musulmans

Nous marcherons pour les personnes LGBT+ hongroises, russes, italiennes, américaines, iraniennes et tant d’autres.

Nous marcherons, pour toutes celles et tous ceux qui ne le peuvent pas parce que cela leur est interdit dans leurs pays.

Nous marcherons, parce que des dizaines de pays pénalisent encore l’homosexualité, onze prononcent même la peine de mort.

Nous marcherons donc parce que l’homophobie et la transphobie tuent encore.

Nous marcherons, parce que nous devons rester unis.

Nous marcherons, parce que Paris est la ville des Libertés, de tous les amours, de toutes les familles et nous y œuvrons !


Voici la liste des cosignataires :

  • Catherine Michaud, Conseillère régionale déléguée d’Île-de-France, Présidente de GayLib
  • Pierre-Yves Bournazel, Conseiller de Paris (18e)
  • Julie Boillot, Conseillère d’arrondissement (16e)
  • Florence Berthout, Maire du Ve arrondissement
  • Daniel-Georges Courtois, Conseiller de Paris (15e) et Conseiller régional délégué d’Île-de-France
  • Martine Figueroa, Conseillère d’arrondissement (Paris Centre)
  • Christian Honoré, Conseiller d’arrondissement (18e)
  • Gyspsie Bloch, Conseillère régionale d’Île-de-France
  • Benjamin Isare, Conseiller d’arrondissement (5e)
  • Fadila Mehal, Conseillère d’arrondissement (18e)