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Conneries en chansons

Avant que l’année 2023 ne prenne fin, revisitons une des histoires qui ont marqué l’actualité: l’antisémitisme de Médine, invité aux journées d’été d’EELV. C’est un fait, les rappeurs ont souvent tendance à déraper. Même si ce n’est pas forcément bon pour le business, cela ne dérange pas leur auditoire ni certains partis politiques…


EELV aurait dû savoir que, pour un parti ou une entreprise, s’associer à un rappeur à des fins politiques ou commerciales est risqué. Certes, tout le rap n’est pas antisémite, loin de là, mais la persistance de cette forme de racisme dans le milieu hip-hop, quel que soit le pays, est inquiétante. Qu’il s’agisse de paroles de chansons ou de messages postés sur des comptes Twitter ou Instagram suivis chacun par des centaines de milliers d’internautes, certaines vedettes osent tout : insultes antisémites, théories du complot, admiration d’Hitler, négationnisme, théorie selon laquelle les Noirs sont les « vrais » juifs…

L’année dernière, une série de tweets de l’Américain Kanye West, connu désormais sous le nom de Ye, lui ont coûté des partenariats lucratifs avec Adidas, Balenciaga et Gap, ainsi que son statut de milliardaire. En 2020, un autre Américain, Nick Cannon, a été viré par le géant des médias ViacomCBS après un podcast, et l’Anglais Wiley a connu un sort similaire après une rafale de posts délirants sur les réseaux sociaux. Toujours outre-Atlantique, un tollé indigné a accueilli des rafales comparables par Ice Cube et Jay Electronica. Ce dernier a sorti un album comportant des paroles antisémites et la voix de Louis Farrakhan, le fondateur de la Nation de l’islam.

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En France, Freeze Corleone a été lâché par Universal Music à cause de ses paroles, et une autre entreprise, BMG, a dû annuler un accord de 2021 avec lui pour une raison similaire. La même firme a dû faire face à une tempête médiatique en Allemagne en 2018, quand le duo Kollegah et Farid Bang a gagné le prix du meilleur album hip-hop malgré des références insupportables à la Shoah. Des cas similaires ont été repérés en Belgique, aux Pays-Bas et en Norvège. L’histoire de l’antisémitisme dans le rap remonte à la fin des années 1980 et au groupe Public Enemy. Médine peut au moins se consoler en pensant qu’il fait partie d’une longue tradition et que leurs dérapages n’ont jamais entamé la popularité de ces artistes.

Vive le Berry libre et indépendant !

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Raynal Pellicer et Frèd Langout signent une bande-dessinée humoristique sur une province abandonnée et cependant hautement estimable aux éditions Librairix. Les Berrichons relèvent enfin la tête sans se prendre au sérieux !


Entendez-vous ce cri qui s’élève du fond des campagnes françaises ? Le cri des terres de l’intérieur poussé par une vague d’ennui, la désertification et l’amour de la vigne ; celui aussi du chanteur abandonné ou du pilier de bar désœuvré. Du Centre de la France, au pied des coteaux de Sancerre, au sommet de la Cathédrale Saint-Etienne, des rues pavées de Bourges aux étangs de la Brenne, dans les pas de Jacques Cœur ou dans la voix de Jean-Louis Boncoeur, le Berry appelle au secours dans l’indifférence générale. Il invoque son quart d’heure de célébrité en dehors des périodes du Printemps, son Festival de musique qui faisait fuir naguère les Berruyers indisposés par cette jeunesse désordonnée et chevelue. Avouez-le, vous ne connaissiez même pas son existence géographique ; je sais que vous confondez le Berry avec l’Auvergne, vous mélangez la Sologne et le Bourbonnais, le Nivernais et la Beauce, vous ignorez tout de cette diagonale du vide qui coupe Issoudun en sa Basilique. Les caméras de télévision ne se déplacent chez nous qu’en cas de visite papale ou de tuerie de masse, c’est dire que nous encombrons peu les écrans, mêmes nos faits divers ont de la boue collée à leurs bottes.

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Pourtant, à la seule évocation du mot « Cognette », j’ai connu des fines gueules défaillir, et la mort au combat du lieutenant d’infanterie Alain Fournier en septembre 1914 au sud de Verdun dans les Hauts de Meuse, loin de son école de la Chapelle d’Angillon, nous émeut encore. Ma grand-mère se souvenait de la visite du Général et de Malraux, le 14 mai 1965, dans cette Maison de la Culture construite en briques rouges ; ce jour-là, De Gaulle et Calder engagèrent une conversation autour du « Stabile », le sextant de ma jeunesse, cette sculpture que j’ai longtemps prise pour un taureau égaré dans le Boischaut mais qui faisait référence à l’œuvre de Shakespeare. Vous n’avez certainement jamais vu la gare de Vierzon, un soir d’hiver ! Il y a des tristesses qu’un honnête homme ne doit pas ignorer dans une vie de pénitence. Il faut dire que cette ligne ferroviaire est la hantise des voyageurs tant sa régularité est surréaliste. Elle n’a rien à envier à celle de Perpignan si Dalí avait seulement daigné remonter le cours de la Loire.

Quand d’autres provinces ont droit à leur signalétique propre, leur langue régionale calligraphiée, leurs traditions vantées à coups de reportages aux 13 Heures, leur singularité poétisée par les grands artistes encartés du moment, leur gastronomie copiée dans les palaces du Nouveau Monde, le Berry semble cet éternel recalé. Absent de la photo. Aussi fade qu’un plat de lentilles du Puy, celles du Berry, incomparables, sont notre or vert. Le Berrichon porte le bonnet d’âne (noir) du mauvais élève de la classe européenne. Il ne peut s’enorgueillir d’aucune richesse particulière, ni minerais de fer ou de phosphate dans son sous-sol, quelques girolles et rosés des près à la rigueur, esseulé, il ne se prévaut d’aucune qualité particulière lors des réunions de famille. Sa Miss a ainsi mystérieusement disparu du concours national.

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Le Berrichon n’est pas aussi économe que son voisin auvergnat, pas aussi sympathique que le Chti, pas aussi fier que le Basque, pas aussi têtu que le Breton, que lui reste-t-il donc ? Il aimerait lui aussi briller en société. Dans cette folle concurrence des identités bafouées, face à un État centralisateur et volontiers méprisant, les deux auteurs de BD ont eu l’idée croquignolesque de suivre les mésaventures de Guillaume Ledoux, le chanteur des Blankass dans sa quête d’un Berry libre et indépendant. Une auto-détermination emmenée par une bande de bras cassés et de doux rêveurs, où la soulographie et les crises existentialistes sont des prétextes à la déconnade. La foirade est leur univers impitoyable. Adieu Paris ! sous-titré « Make Berry Great Again » a été tiré à 3 000 exemplaires dans sa première édition. Tous les Berrichons qui se respectent ont déjà été l’acheter car c’est un futur collector. Il a sa place dans une bibliothèque entre Paris-Berry de Frédéric Berthet et Berry Story d’A.D.G. Je l’ai trouvé chez Librairix, rue Coursarlon à Bourges, après avoir fait mes emplettes de Noël chez les bouquinistes de la rue Bourbonnoux, notamment l’achat à la Bouquinerie Pass’âge de la Petite flore argotique de Robert Giraud illustrée par Gilles Sacksick, ouvrage paru chez Dominique Halévy en 1968. Pour les locaux, cette BD sera pleine de trouvailles et de « private jokes », elle est noyée sous des litres de Quincy et de Menetou-Salon, on y croise évidemment Depardieu et Denisot, des tours de sorcellerie, une poule noire réfractaire et un anarchisme rural canal historique. Une histoire qui commence à la table de C’heu l’Zib, troquet de légende validé par le Prince d’Arenberg, entre le brochet à la crème et la charlotte au chocolat, est une belle entrée en la matière. Un midi, je suis sorti de cette table à 17 h 30, les forces de l’esprit sont redoutables dans cet endroit-là. Parmi les 25 propositions pour un Berry libre et indépendant, je retiens la mesure numéro 1 : « La prolongation du canal de Berry jusqu’à la mer » et la numéro 21 : « L’interdiction de la bourrée pour des raisons sanitaires ».

Raynal Pellicer et Fred Langout, Adieu Paris !  (Librairix éditions, 2023)

La France des clochers va-t-elle tonner ?

De nombreux témoignages de participants à la fête de Crépol confirment les motivations racistes de leurs agresseurs. Avec l’assassinat de Thomas, la France rurale découvre l’ensauvagement ethnico-religieux qui prend les Blancs pour cible. Malheureusement, elle ne peut compter sur le gouvernement pour désigner les coupables.


« La vie de Thomas, elle valait la vie des autres aussi. On n’est pas rien. On n’a pas le droit de prendre la vie de quelqu’un d’autre comme ça. » Les mots d’Annick recueillis par CNews en marge des obsèques de Thomas disent à la fois la sidération et la violence du séisme qui a frappé la petite communauté de Crépol. Ce « on n’est pas rien » dit justement le contraire : Thomas a été tué parce que justement, pour ses meurtriers, il n’était « rien ».

Les témoignages des jeunes habitants de Crépol[1] qui participaient à cette soirée, recueillis dans le podcast du Dauphiné libéré, sont éclairants. Plusieurs déclarent avoir entendu le petit commando d’agresseurs annoncer qu’« ils étaient là pour tuer du Blanc ». Ils parlent tous d’une soirée qui se termine dans le plus grand chaos, du sang partout, qui coulait, qui giclait, ils parlent de leur terreur : « C’est pas juste une bagarre de bal comme on a l’habitude. Là, ça a direct sorti les couteaux », souligne un jeune homme. Une jeune fille raconte : « Ils sont arrivés à 15, 20 personnes. Ils ont encerclé la salle des fêtes, ils ont essayé de forcer l’entrée […]. Quelqu’un a dit : “Il y a des couteaux, rentrez tous. Je saigne, je saigne.” On est tous rentrés dans la salle, on s’est enfermés. Et pour nous à l’intérieur, c’était l’enfer. On a vécu cela comme un attentat. » La journaliste demande aux jeunes pourquoi, selon eux, cela s’est arrêté. La réponse est directe :« Ils avaient fini ce qu’ils avaient à faire, ils avaient fini leur boucherie. »

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Ce que la France des clochers a compris, c’est qu’un de ses enfants a été tué et nombre d’autres blessés à coups de couteau, simplement parce qu’ils étaient blancs et qu’il n’en faut pas plus aujourd’hui à certains pour passer à l’acte. Ses habitants ont découvert une vérité insupportable : ils sont des proies à cause de ce qu’ils sont. Cette prise de conscience entre en résonance avec une actualité dramatique qui voit des Juifs se faire tuer parce qu’ils sont juifs, ainsi qu’avec les attentats islamistes qui se succèdent en France depuis 2012.

Un effacement de la réalité

Venir planter du Blanc était une des motivations de la bande qui a fondu sur le petit village de Crépol. Lui ôtant au passage la seule richesse qui lui restait : sa tranquillité. Les gens qui ont participé aux obsèques de Thomas sont dignes, silencieux, recueillis, mais si leur colère est rentrée, elle n’en est pas moins profonde. « Ça nous rend fous, on veut faire entendre que c’est un attentat. C’est pas une bagarre, c’est pas un règlement de compte », déclare l’un des témoins. Dans ce climat, le traitement médiatique et politique de l’affaire ne peut qu’exacerber les rancœurs.

Alors que très vite témoignages, photos, informations sur l’identité des agresseurs filtraient sur les réseaux sociaux, la presse insistait sur le fait qu’ils étaient Français, utilisant en boucle le terme de « Romanais » (habitant de Romans-sur-Isère), comme il était question de Dijonnais quand des affrontements entre Tchétchènes et Maghrébins (français) avaient explosé à Dijon. L’objectif était d’effacer ce que tout le monde avait vu : le fait que cette violence gratuite, provenant de jeunes issus de l’immigration, était construite sur une haine raciale revendiquée. Tout s’est passé comme si la violence ethnique devait être niée. Faute d’avoir des réponses à apporter, le gouvernement noie le poisson. Il reconnaît l’ensauvagement, mais fait comme s’il était général. Or, Crépol montre, si besoin est encore, que cet ensauvagement est alimenté par une idéologie ethnico-religieuse qui fait de plus en plus des Blancs la cible d’une « diversité » sous influence. Ce déni finira par conduire à ce qu’il croit éviter : le rejet mutuel et la montée aux extrêmes.

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Que des jeunes radicalisés et hyperviolents n’existent que dans l’exacerbation de la haine et l’affrontement est une chose, que cela leur donne un pouvoir sur le gouvernement de la France en est une autre. En donnant le sentiment qu’il tremble devant les quartiers, l’exécutif confirme que le rapport de force a remplacé la justice sociale. Le symbole de cet abandon : la minute de silence organisée à l’Assemblée nationale pour un jeune délinquant tué après un refus d’obtempérer quand, pour Thomas, l’idée n’a effleuré personne. Un peuple qui ne se sent ni protégé ni reconnu par ses représentants, et qui les voit donner des gages symboliques à des voyous, sera porté à écouter les entrepreneurs identitaires. « On n’est pas rien », disait Annick. Le pouvoir leur répond en substance : si, vous n’êtes rien puisque vous ne faites pas d’émeutes et que vous ne tuez pas.

Rendre des comptes

Ce sentiment alimente une révolte sourde, diffuse, comparable à celle qui a suscité les gilets jaunes. Elle est peut-être à terme plus dangereuse que l’expédition des militants néonazis contre les habitants du quartier de la Monnaie, d’où sont issus les assassins de Thomas. Pourquoi ? Parce que face à ces milices-là, la République ne tremble pas. Quand il s’agit de combattre des groupuscules marginalisés qui, faute d’être adossés à des groupes sociaux ou ethniques constitués, n’exercent pas d’emprise sur la société, c’est relativement simple. Ainsi la police n’a guère de mal à les maîtriser. Intervenir dans les quartiers comme la Monnaie pour aller chercher de jeunes délinquants qui y vivent est une autre affaire. Un habitant de Crépol, interviewé dans le reportage du Média pour tous, média lié aux gilets jaunes et à l’ultradroite, évoque directement la question de la vengeance : « Pour le pardon, il faut que justice soit faite. » Le problème est qu’une grande partie de cette France-là n’y croit plus, à la justice. Pour l’instant, elle ne se tourne pas vers les néonazis qui voudraient traduire le choc des civilisations en guerre civile, mais vote de plus en plus pour le Rassemblement national. Peut-être qu’après Crépol, il ne faut plus se demander si Marine Le Pen deviendra présidente de la République, mais quand.


[1]. « Drame de Crépol : “J’ai vu mon pote Thomas se faire poignarder” », Le Dauphiné libéré, 22 novembre 2023.

La persécution islamiste des chrétiens nigérians

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À l’approche des célébrations de Noël, un groupe d’hommes armés a mené des attaques coordonnées sur plusieurs villages situés dans l’État du Plateau, au Nigeria. Plus de 200 personnes ont été impitoyablement massacrées. Ces actes se sont déroulés dans un contexte de tensions religieuses exacerbées, liées à une lutte acharnée pour le contrôle de l’eau et des terres. Au Nigéria, comme dans d’autres pays en développement, les chrétiens sont les victimes du fanatisme islamiste.


C’est une véritable tragédie qui a frappé la République fédérale du Nigeria à la veille des fêtes de Noël. Dans l’État du Plateau, une quinzaine de villages ont été simultanément attaqués par des « bandits », laissant derrière eux des monceaux de cadavres et des dizaines de maisons pillées et réduites en cendres. Plus de 200 personnes auraient été assassinées selon le bureau d’Amnesty International qui a annoncé que ce chiffre pourrait être plus élevé. Plusieurs personnes demeurent encore disparues laissant planer l’incertitude quant à leur sort : fuite ou enlèvement. Interrogés, certains habitants ont déclaré qu’il avait fallu plus de 12 heures avant que les services de sécurité ne répondent à leur appel à l’aide et rejoignent les rescapés de ce massacre qui a fait les titres des médias locaux. 

Aucun groupe n’a revendiqué la responsabilité de ces attaques, mais tous les indices pointent vers les nomades-éleveurs de l’ethnie Haoussa-Fulani (ou Peuls). Ces derniers ont déjà été accusés par le passé d’orchestrer des massacres dans les régions du nord-ouest et du centre, dans le but de s’approprier les terres et l’eau. Un conflit exacerbé par une démographie élevée, le réchauffement climatique et l’antagonisme croissant entre chrétiens et musulmans, alimenté en partie par l’activisme meurtrier du groupe islamiste Boko Haram, affilié à l’État islamique depuis 2015, dans le nord du pays. Parmi les victimes, on compte une majorité de villageois, dont de nombreux chrétiens, y compris des pasteurs protestants. Solomon Gushe, révérend de l’église baptiste de Dares, un des villages ciblés, a été froidement assassiné avec neuf membres de sa famille comme le rapporte le Christian Daily International-Morning Star News. Le quotidien évoque même un autre pasteur tué avec ses cinq enfants. 

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Face à cette atrocité, l’Association chrétienne du Nigéria (CAN), sous la direction de l’archevêque Daniel Okoh, a vivement condamné cette récente attaque contre les chrétiens de ce pays. Dans un communiqué officiel, l’association déclare : « Nous réprouvons fermement ces actes de violence. L’incendie délibéré de maisons et de lieux de culte, ainsi que la destruction de biens d’une valeur de millions de nairas, ne constituent pas seulement des crimes, mais également une attaque directe contre nos valeurs fondamentales de paix, d’unité et de respect mutuel. De tels agissements n’ont pas leur place dans notre société et ne doivent en aucun cas être tolérés ».

Au-delà de l’émotion suscitée, la politique mise en place par le président Bola Tinubu est également critiquée. Élu cette année avec la promesse de mettre fin à ce type d’exactions qui secouent régulièrement ce géant pétrolier, le dirigeant nigérian a ordonné que toutes les mesures nécessaires soient prises pour retrouver les coupables. L’armée nigériane a lancé une opération visant à localiser et à arrêter les criminels, en collaboration avec d’autres agences de sécurité, bien que les arrestations soient rares lors de telles attaques. Abdullsalam Abubakar, à la tête de l’opération spéciale d’intervention de l’armée dans le Plateau et les États voisins, a affirmé que ses forces ne se reposeraient pas tant qu’elles n’auraient pas identifié les responsables de ces massacres. Isa Sanusi, le directeur d’Amnesty Nigeria, a exprimé son agacement face au manque de « mesures concrètes » prises par le gouvernement actuel pour « protéger les vies des Nigérians ». Il rappelle que, parfois, des arrestations sont prétendument annoncées, mais aucune preuve tangible n’est fournie, déplorant l’incapacité manifeste des autorités à assurer la protection de la population nigériane, avec des assassinats devenus progressivement la norme.

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Selon un rapport récent sur les « chrétiens martyrs au Nigeria », publié par une ONG nigériane, la Société internationale pour les libertés civiles et l’État de droit (Intersociety), plus de 50 000 chrétiens ont perdu la vie au Nigeria depuis le début de l’insurrection de Boko Haram en 2009. Le rapport indique que 18 000 églises et 2 200 écoles chrétiennes ont été incendiées, que 5 millions de chrétiens ont été déplacés ou ont trouvé refuge dans des camps. Par ailleurs, les musulmans modérés ne sont pas plus épargnés. Avec 34 000 d’entre eux tués, ils ont été aussi les malheureuses victimes de ces attaques djihadistes au cours de ces deux dernières décennies. 

Depardieu : les bourreaux avant les juges

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Ceux qui sont derrière la vindicte médiatique dirigée contre Gérard Depardieu ont doublement tort: non seulement ils violent le principe de la présomption d’innocence, mais ils ont aussi échoué à apprendre les leçons du passé. Un cas récent comme celui d’Ary Abittan aurait dû les inciter à plus de prudence. Tribune du journaliste, Bernard Bernard.


Soutien sans aucun équivoque à Gérard Depardieu, dans la tourmente du grand lynchage médiatique, orchestré par une poignée de « journalistes-scribouillards » à la recherche du Grand Soir, en mal de notoriété mais surtout à la morale disons… élastique. Poursuivie hardiment par la cohorte bêlante d’un mouvement très en vogue, cette odieuse lapidation ne grandit pas vraiment leurs vertueux initiateurs à la recherche du sacro-saint scoop, d’essence orgasmique, qui fait frissonner ceux que désormais je n’appelle plus confrères. Et qui veulent gonfler leur renom autant que leur bourse…

Ainsi dévoyée, la cause qu’ils prétendent défendre ne sort guère grandie de cette odieuse chasse à l’homme. Ont-ils oublié, ces petits commis de scandales que pour l’heure – encore – c’est la Justice qui tranche et non pas eux, bourreaux-marionnettes avant les juges souverains ? Et que la présomption d’innocence reste l’apanage d’un système judiciaire façonné au fil du temps par l’esprit de la démocratie qui, même s’il n’est pas parfait, demeure l’un de ses pivots essentiels.

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Le comédien Ary Abittan, voué un temps aux gémonies, en sait quelque chose, après avoir traversé les flammes d’un enfer du même tonneau. En octobre 2021, la même meute, mais avec d’autres chiens, s’acharnaient sur ce fantaisiste en pleine ascension, plébiscité par le public. Mis en cause par une jeune femme de 23 ans qui l’accusait de viol, il était rapidement mis en examen pour ces faits. Les médias de tout poil reprenaient l’info… et sonnaient l’hallali. Contrats rompus, représentations annulées, tournées supprimées, revers d’image : ces fatwa d’un nouveau genre laissaient l’homme stupéfait, prostré, interdit… Lui qui surfait si allègrement d’habitude sur les réseaux sociaux, s’auto-condamnait au silence en mutilant son art de l’espièglerie, sous ce linceul si hardiment jeté. Les rares médias qui tentaient de calmer le jeu, en soufflant sur les braises déclinantes de la présomption d’innocence, voyaient leur écho se perdre dans le vent. Vaille que vaille, la chaîne d’infos CNews, rappelait régulièrement la presse à plus de mesure.

En juillet dernier, deux magistrats en charge de « l’affaire » estimaient que de nouveaux éléments affaiblissaient notablement la charge. Ils plaçaient l’acteur sous le statut de témoin assisté, en suivant les réquisitions du parquet. Mais là, point de tonitruante publicité de la part des Fouquier-Tinville de l’imprimerie ou des ondes.

Petit à petit l’humoriste renoue désormais avec son public mais, même si la justice le dédouane un jour, lui reviendront régulièrement des relents nauséabonds de fumée et de feu, issus de dictons populaires dévoyés.

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La comparaison entre Gérard Depardieu et Ary Abittan vaut ce qu’elle vaut et la justice tranchera, même si la tête de notre Christophe Colomb national vacille déjà sous le tranchant de cette épée manipulée.

Un dernier élément au débat peut-être ? Il n’y a pas si longtemps, combien était-elles ces jeunes filles énamourées, ces jolies femmes en pamoison devant leur idole ou une quelconque célébrité, dans l’attente d’un regard complice, synonyme d’émotions plus intimes ?… On les appelait alors « groupies ».

La roche du mauvais bonhomme

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© Bernard Bernard. Photo prise le 2 mai 1996 lors de la remise de la rosette par le président Chirac, avec notamment Jean Marais, Simone Valère, Gilles Jacob et Gérard Depardieu.

Exportations : pourquoi le modèle italien devrait inspirer la France

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Au moment où le champion européen des exportations, l’Allemagne, connaît des difficultés, un autre État-membre vient à la rescousse de l’UE. Ce n’est pas la France – qui a toutes les raisons d’être jalouse de ce concurrent – mais l’Italie. En 2022 le montant des exportations a atteint 624,6 milliards d’euros, soit 20% de plus qu’en 2021. Et 2023 s’annonce être l’année de tous les records. La France, trop obsédée par le modèle allemand, ferait mieux de regarder du côté de son voisin transalpin.


En 2022 les entreprises italiennes ont fait preuve de résilience et de vitalité dans le commerce international, même après les chocs de la pandémie et de l’invasion russe de l’Ukraine qui a fait flamber les prix de l’énergie et perdre une importante partie des exportations italiennes vers la Russie. En particulier, les exportations ont atteint 624,6 milliards d’euros, soit 100 milliards de plus qu’en 2021, retrouvant les niveaux d’avant le Covid. La performance italienne est nettement meilleure que celle de l’Espagne (+7,6%) et surtout de l’Allemagne (-2,0%) et de la France (-4,7%), qui en 2022 sont encore inférieures aux niveaux d’avant Covid. Toujours en 2022, la Botte gagne une position en devenant le sixième exportateur mondial.

Les marchés et les secteurs

L’Europe demeure la première destination des exportations italiennes avec un volume d’exportations égale à 418.536 milliards d’euros, suivi par les États-Unis avec 90.579 milliards et l’Asie avec 80 milliards. Quant à l’Afrique, les exportations, même si elles sont inférieures, progressent à 21.5 milliards et enfin l’Océanie avec 14.2 milliards.

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Les secteurs qui exportent le plus ont été les machines, avec une valeur égale à 92,9 milliards d’euros (+10,3%). Ensuite le secteur de la mode qui avec ses 86 milliards d’exportations (+18%) dont 28 d’excèdent commercial, est destiné à devenir dans les prochaines années le numéro un des exportations. Quant au secteur agroalimentaire, il continue sa progression avec 52,3 milliards d’euros d’exportations (+16,7%). Le secteur pharmaceutique a généré un volume qui s’élève à 47,6 milliards d’euros (+42,8%). Le bois et l’ameublement ont atteint 21 milliards (+13,3%).

Décryptage

L’Italie fait partie des six premiers pays au monde avec un excédent commercial extérieur, hors coûts et minéraux énergétiques de plus de 100 milliards d’euros.

La question récurrente qui vient à l’esprit est : comment fait l’Italie, un pays basé sur des PME souvent familiales, totalement dépendant sur le plan énergétique, dépourvu des grands groupes industriels, pour enregistrer des meilleures performances à l’export que certaines nations économiquement plus grandes ?

Il y a quatre aspects fondamentaux qui expliquent cette performance.

Tout d’abord l’industrie manufacturière représente le pilier sur lequel repose l’économie du pays avec une chiffre d’affaires d’environ 1200 milliards d’euros dont plus de 50% est exporté à l’international. La mondialisation avec sa compétition basée sur les bas coûts de production n’a pas limité la capacité industrielle du pays. L’essence du « Made in Italy »  est son industrie.

La compétitivité italienne dérive de la structure particulière de son système de production qui ne repose que de manière minimale sur de grands secteurs industriels mais plutôt sur environ 3000 niches dans lesquelles elle est leader mondial. L’Italie présente le plus haut degré de différenciation des exportations par rapport à tous les autres pays du monde. Pour cette raison le chiffre d’affaires des exportations italiennes est potentiellement plus résistant que celui d’autres pays qui se concentrent uniquement sur certains types de produits et qui sont donc plus exposés à d’éventuelles conditions économiques négatives.

La taille des entreprises ne constitue pas un frein aux exportations. Près de 80% des exportations manufacturières sont réalisées par 9000 entreprises moyennes et grandes entreprises (de 50 à 4 999 salariés). A cela s’ajoutent 27 000 petites entreprises employant entre 10 et 49 salariés, qui couvrent les 13 % restants. Il n’existe cependant que 13 entreprises employant plus de 5 000 salariés qui représentent moins de 7% des exportations. L’Italie n’est donc pas forcement pénalisée par le manque de grands groupes industriels.

Parmi d’autres facteurs déterminants, l’Italie est traditionnellement dotée de chaînes d’approvisionnement courtes, que ce soit de moyenne ou de grande dimensions. Il y a aussi l’ancrage local de nombreuses et diverses activités de production, ainsi que leur capacité à innover et à réinterpréter des produits.

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La deuxième manufacture d’Europe bénéficie d’un des plus hauts degrés d’automatisation au monde avec environ 23 000 robots installés. Grâce à l’utilisation de robots, les entreprises rendent la production plus flexible tant en termes de volumes que de qualité, acquérant ainsi une capacité de réponse beaucoup plus rapide aux changements de la demande globale. Cela améliore considérablement la compétitivité des entreprises sur un marché de plus en plus mondialisé, où la variété des produits augmente de façon exponentielle et leurs cycles de vie se raccourcissent progressivement. La spécialisation de l’Italie dans le commerce international est suivie de près par différents analystes qui étudient son modèle économique. À l’instar d’autres grandes nations, son réseaux de PME régionales a su s’adapter à une compétition internationale de plus en plus agressive en se positionnant sur des niches des marchés. Dans un pays comme la France où le sujet de la réindustrialisation est plus que jamais d’actualité, le modèle italien pourrait bien être plus proche culturellement et économiquement du modèle français et donc plus facile à mettre en œuvre que le modèle allemand, par exemple, qui est totalement différent.

Les horreurs que nous ne saurions voir

Les images des massacres commis par le Hamas ont ravivé chez certains le souvenir des atrocités nazies. Pour d’autres, elles n’ont pas empêché de crier à la manipulation israélienne. Il est cependant nécessaire de les diffuser, car il y a pire que le déni : c’est l’oubli.


Lorsque j’étais enfant, ma mère m’a emmené voir deux films. Un sur le massacre d’Oradour-sur-Glane, un autre sur la libération des camps d’extermination nazis. Les images étaient d’autant plus fortes qu’à l’époque l’image était rare. La télévision balbutiait. Nous n’avions pas, d’ailleurs, de poste de télé à la maison. Au retour, pour tout commentaire, ma mère m’a dit : « Il fallait que tu voies ces horreurs parce que toi et les générations à venir n’aurez plus jamais à connaître de telles choses, et j’espère que de les avoir vues t’aidera à ne pas oublier qu’elles ont existé pour de bon, pour de vrai. »

Je ne doutais pas qu’elle dît vrai. Comment serait-il possible en effet, et seulement imaginable, qu’on ait un jour à lever de nouveau les yeux sur tant de barbarie, d’inhumanité. Les images de ces décharnés d’outre-tombe, au regard immense, démesuré, qui semblait avoir vu ce qui ne se voit pas, ne nous ont sans doute jamais quittés. En tout cas, moi elles ne m’ont jamais quitté. Alors nous avons vécu, le temps passant, avec la conviction que nous avions probablement gagné en humanité. Avec la certitude que ma mère ne pouvait qu’avoir eu raison. L’horreur, cette horreur-là, appartenait en quelque sorte à un autre âge de l’humanité. Tout était donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, ou peu s’en faut.

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Et puis il y a eu le 7 octobre. Le passé, les images grises et tremblantes diffusées dans une salle improbable, dans un silence sépulcral que le ronronnement du projecteur rendait encore plus oppressant, tout cela nous sautait subitement de nouveau au visage.

Aujourd’hui, tout est image. À commencer par le pire, le laid, le sordide. La violence sans frein ainsi qu’une pornographie qu’on ne pourrait qualifier de bestiale qu’en insultant très gravement le règne animal. Cette violence, pour ma part, je crois l’avoir croisée pour la première fois dans le film Orange mécanique. Mais on opposait alors l’alibi de la fiction et la caution d’une fascination, présentée à l’époque comme légitime, pour ce que d’aucuns qualifient encore d’esthétique de la décadence. Ce baratin bien-pensant aidait à ne pas vomir. Pire, on se fendait de quelques louanges, forcées, sans doute, et de pure convention, mais il fallait bien coller à son temps, enfourcher ses modes et ses codes, n’est-ce pas… Il y eut bien sûr débat. Fallait-il autoriser la diffusion du film ? Fallait-il montrer de telles scènes de violence gratuite ? Deux camps s’opposaient : celui des progressistes à tout crin et celui de ceux que les précédents qualifiaient de vieux cons.

À quelques décennies de distance, je me retrouverais plutôt, et avec ferveur, dans le camp de ces derniers. Et pas seulement pour la volupté qu’on peut puiser à se faire traiter de vieux con après une vie déjà raisonnablement longue mais parce que, me semble-t-il, la violence fictionnelle, parée d’esthétisme, présente l’inconvénient majeur de brouiller le réel et d’embrouiller les esprits. Ce qui fait beaucoup.

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Depuis ce 7 octobre d’apocalypse, une nouvelle version de ce même débat a émergé. Faut-il ou non montrer la réalité barbare, ces scènes de carnages, cette sauvagerie ?

Eh bien, j’ai choisi mon camp. Je suis pour. À tout le moins, je suis pour qu’on fasse savoir urbi et orbi que ces images, insoutenables, sont disponibles et le resteront à jamais. Oui, porter à la connaissance de tout un chacun qu’il peut, s’il le souhaite, les découvrir, les voir et les revoir. Je sais, les révisionnistes révisionnisteront, les négationnistes négationnisteront, ils crieront au truquage, à la mise en scène de propagande, les grands pervers s’en délecteront, etc. Sans aucun doute. Et alors ? Qu’on montre ces images ou qu’on les occulte, les uns et les autres camperont sur ces lignes, obsessionnellement, jusqu’à la fin des temps.

La censure est l’oubli

Ne pas les montrer, ne pas les rendre aisément accessibles, c’est prendre un risque énorme. Un risque politique et, pire encore, historique. Les censurer reviendrait ni plus ni moins à entrouvrir la porte de l’oubli, autrement dit à faciliter grandement la mise en œuvre de la faculté de déni. Faculté d’oubli et de déni tellement forte, tellement opérante chez les gens de pouvoir ! Et c’est bien à leur intention particulière, pour leur couper sous le pied la mauvaise herbe de l’amnésie accommodante qu’il faut maintenir vivantes ces horreurs. Ils sont tellement friands de ces accommodements qu’ils disent raisonnables qu’il serait irresponsable, sous couvert de protéger les masses mal préparées, de leur donner l’occasion d’échapper à ces monstruosités, à la toute violence du réel. Déjà, on entrevoit combien ces pudeurs si mal venues et surtout cet oubli terrifiant s’inscrivent en filigrane dans la petite chanson qui se fait entendre ces jours-ci et dont chaque refrain se plaît à évoquer le spectre de la «  confrontation globale ». On n’ose dire « Troisième Guerre mondiale », mais c’est bien de cela qu’il s’agit. Dès lors, l’enjeu, dans l’esprit de ceux-là, ne serait-il pas de se préparer – de nous préparer – à tout « accommodement raisonnable » qui nous épargnerait cette extrémité ?

Petite chanson, disais-je ? J’ajouterai « air connu ». En 1938, Daladier, le Français, et Chamberlain, l’Anglais, s’étaient abandonnés à un de ces « accommodements raisonnables ». En échange d’une « paix de mille ans » promise par l’ogre Hitler, ils se sont abaissés à fermer les yeux pendant que le monstre dévorait les territoires des Sudètes. Or d’un accommodement l’autre, l’Israël d’aujourd’hui pourrait bien être les Sudètes d’hier. Et qu’on n’aille pas me dire que personne, ici ou ailleurs, n’oserait concevoir une telle énormité ! Pour un peu, on se ferait un malin plaisir de donner des noms…

La loi de la discorde

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La nouvelle loi sur l’immigration a été bricolée en rassemblant des demi-mesures hétéroclites qui risquent de ne pas résoudre les problèmes de la France en matière de sécurité ou de besoins en main-d’oeuvre. Tribune de Sophie de Menthon, présidente d’ETHIC.


En dehors du spectacle hallucinant de l’Assemblée nationale qui vote une loi que personne ne voulait voter, mais qui sera quand même votée à la majorité et finalement soumise au Conseil d’État, qu’est-ce qui intéresse les Français ? Quand on le leur demande, ce qu’ils veulent c’est plus de sécurité et moins d’immigration. En fait, ils veulent moins d’immigration quand elle est dangereuse, mais ils veulent garder les immigrés quand ils bossent bien. Ils ont besoin de gens pendant les vendanges, de nounous pour les petits, d’autres personnes dévouées pour les citoyens âgés, sans parler des femmes de ménage, des livreurs, des manutentionnaires, des garçons de café, etc. Et que l’on ne se raconte pas qu’il faut des formations exceptionnelles pour tous ces métiers que les Français n’assurent pas !

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Cela vaut le coup de se pencher sur ce que contient vraiment le projet de loi :

1/ Chaque année les quotas migratoires seront décidés, hors demandes d’asile et de regroupements familiaux (on comprendra mieux après ?).

2/ Restriction de l’accès aux allocations familiales et aux Aides personnalisées au logement si l’on n’est pas depuis au moins 5 ans sur le territoire ou 3 mois si l’on travaille. C’est l’article qui est l’objet de tous les ressentiments. Le camp du bien est outré.

3/ Les fameux travailleurs sans papiers seront régularisés, à titre exceptionnel, au cas par cas et dans les métiers en tension, mais chacun donnera son avis ! Sans compter bien sûr les fatidiques contrôles de « l’insertion sociale à l’intégration à la société française » et j’en passe… Aux États-Unis, cela s’appelle la « green card » : vous avez un contrat de travail, vous avez un permis de séjour de la même durée. Terminé. Sans compter qu’on continue à pousser les travailleurs sans papiers à surtout travailler dans l’illégalité, pour que ce soit légal au bout de 12 mois d’activité. Ubuesque. Le conseil d’État pourrait peut-être réagir ?

4/ Le droit du sol : tout le monde a l’air d’accord pour le limiter. Sachant qu’un mineur ne pourra pas acquérir la nationalité française s’il a fait l’objet d’une condamnation pour crime. Sic. Et il a fallu une commission mixte paritaire pour trouver ça !

5/ Des expulsions facilitées. Personne n’y croit : déjà mettre dans l’avion quelqu’un qui ne veut pas est une mission quasi impossible (4 gendarmes), en plus dès qu’ils arrivent dans leur pays, on nous les renvoie illico.

6/ Le regroupement familial devient plus difficile ou plus compliqué d’un point de vue administratif, et avec un petit examen de français à l’appui (pour la complexité administrative, on leur fait confiance).

7/ Une perle ! Les binationaux ayant tué un gendarme ou policier seront déchus de leur nationalité. C’est bête que l’on n’y ait pas pensé avant… et en plus ils s’en moquent !

8/ Il faudra être cultivé : les demandeurs devront réussir un examen après leurs cours de Français (niveau ?) : une chance pour les entrepreneurs car les cours de français seront donnés pendant les heures de travail dans l’entreprise ! Elle n’est pas belle la vie ?

9/ Les étudiants, eux, devront justifier du « caractère réel et sérieux de leurs études » et à tout hasard, leurs frais d’inscription seront majorés (de combien ?).

10/ A qui s’adressera le « délit de séjour irrégulier » (soit 3.750 euros d’amende et trois ans d’interdiction du territoire français) ? A ceux qui débarquent sur nos côtes ?

11/ Le meilleur pour la fin : pas de demi-tarif dans les transports pour les clandestins, sic, parce qu’ils payent ?

12/ Et puis, si notre clandestin a « la chance » de tomber sur un « marchand de sommeil », et qu’il porte plainte à propos d’un logement trop insalubre, l’heureux gagnant aura une carte de séjour temporaire d’un an (on ne sait pas ce qui arrive en revanche aux tenanciers coupables ?).

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Toutefois réjouissez-vous braves gens, un Français sur deux est content. 24% ne sont pas satisfaits et 26% ne se prononcent pas (source : sondage Odoxa). En revanche, 52% des Français regrettent infiniment que l’on ne puisse plus mettre les mineurs en centre de rétention administrative. Vive la France et les maisons de correction !

Empathie mon cul, dirait Zazie…

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Gabriel Attal a décidé, pour combattre le harcèlement, de faire donner entre une et deux heures de cours d’empathie aux élèves. Un concept venu tout droit du Danemark et des États-Unis, où on se serre dans ses bras en émettant tout ce que l’on peut d’ondes positives. Une solution qui fait manifestement sourire notre chroniqueur, qui n’a décidément pas la plume compassionnelle…


L’Éducation Nationale, c’est formidable. Faute d’avoir une ligne claire — on instruit les élèves et on compte sur les Lumières ainsi prodiguées pour contrebalancer les horreurs entendues au sein des familles, des « communautés » et des ghettos —, on ajoute et on surajoute des heures de remédiation chaque fois qu’un problème se pose.

Les élèves sont trop gros ? Au lieu d’augmenter le nombre d’heures de sport, en le rendant vraiment obligatoire — y compris la piscine pour les filles que cela dérange sous des motifs à 90% religieux —, on initie les gosses à la gastronomie, sous couleur de combattre la malbouffe. Ils se font écraser à la sortie de l’école ? On invente des formations « permis de conduire ». Ils maltraitent ceux d’entre eux qui sont présumés homos, massacrent les obèses, humilient les plus faibles, et forcent les filles à leur faire des pipes dans les toilettes, prestations qu’ils filment et s’envoient les uns aux autres pendant les cours ? On décide de leur distiller des cours d’empathie. Et l’on publie sur le site d’Eduscol un « kit pédagogique pour les séances d’empathie à l’école ».

L’empathie, c’est, à partir de racines grecques, ce qu’est la compassion à partir de racines latines. Compatir, c’est littéralement souffrir avec. Quelque chose comme les Alcooliques anonymes… Mais « compassion », cela sonnait exagérément chrétien, ce qui la fiche mal dans un pays qui n’ose plus souhaiter un « Joyeux Noël » et se réfugie derrière l’euphémisme « Joyeuses fêtes ». Donc, empathie. C’est le même mot en anglais (empathy) et, justement, en danois (empati). Give me a hug — on s’enlace et on est en empathie. Si tous les gars du monde — on connaît la suite.

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Sauf que les harceleurs sont très forts, sur l’empathie. Ils sentent d’une heure au loin les faiblesses de leur proie potentielle (c’est le principe de tout prédateur, repérer le buffle ou le gnou un plus faible dans le troupeau). Et si jamais ils ne l’ont pas senti, on va le leur signaler.
Imaginons un cours où l’on expliquerait : « Kevin (ou Mohamed, ne stigmatisons personne), sois gentil avec Charles-Edouard, il est plus faible que toi, il court moins vite, il a de petites manières que d’aucuns qualifierait de « féminines », peut-être préfèrera-t-il les garçons plus tard, mais c’est très mal de ne pas être gay-friendly… »

Gabriel Attal a raconté avoir été la cible, à l’École alsacienne, de ce petit harceleur de Juan Branco. Pensez-vous sérieusement qu’un cours d’empathie aurait suffi à extirper de la tête d’un petit caïd l’idée qu’en massacrant l’un de ses camarades, il se glorifie lui-même — et éloigne de lui toute suspicion ? Parce que c’est souvent la clef du gay bashing, comme on dit depuis qu’on ne parle plus français. Passer pour un surmâle au moment même où l’on a des doutes sur sa propre sexualité.

« Cet âge est sans pitié », disait fort bien La Fontaine (dans « Les Deux pigeons »). Les enfants sont naturellement violents. Ce sont des bouquets de pulsions, parce qu’ils nous arrivent dans l’état de nature, comme aurait dit ce crétin maximal de Rousseau — qui s’est fait pas mal harceler par Diderot, D’Alembert, Voltaire et tutti quanti. Le boulot des enseignants est de dénaturer l’enfant, de le redresser (en latin, stare, racine de « instituteur », signifie « se tenir droit » : c’est ce qui a donné « tuteur » et « instituteur ». Vous sentez les mains de votre vieil instit qui appuyait sur vos omoplates : « Jean-Paul, tiens-toi droit ! » Et dans cette injonction, il y avait bien sûr la rectification de la position, mais aussi l’obligation de sortir des pensées tordues qui sont naturellement celles des gamins.

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C’est par la culture tous azimuts que l’on sort de l’état de nature. Ce n’est pas en tentant de culpabiliser le harceleur — qui s’en fiche bien ! Chez lui, il est enfant-roi, il tyrannise sa mère et ses petites sœurs, il est un tyran à l’échelle domestique, prêt à s’élancer sur le théâtre du monde. Tous les anciens harcelés n’ont pas la chance d’être ministre de l’Éducation. Il en est qui se suicide, on l’a vu récemment, on le voit tous les jours.

Et, mesure essentielle, s’il faut effectivement renvoyer les coupables séance tenante (et non le harcelé, comme aujourd’hui), il faut aussi se soucier de l’endroit où on les réinscrira — c’est leur droit, jusqu’à 16 ans. C’est pourquoi je préconise l’inscription forcée dans un autre établissement loin, très loin de leur famille, de leurs « grands frères », de leur quartier. À charge à leurs parents de les y conduire le matin, ou, mieux, de les y laisser. Dans l’un de ces Internats d’excellence créés sous le ministériat de Luc Chatel, où on leur apprendra, avec des mesures intelligemment coercitives, que le harceleur d’hier peut devenir à son tour victime — comme Alex dans Orange mécanique.

Sur ce, Joyeux Noël.

Sino-dépendants et pour longtemps

L’année 2023 aura vu des tentatives par les Etats-Unis et l’UE pour réduire leur dépendance économique par rapport à l’Empire du Milieu. Pourtant, la favorisation d’importation d’autres pays que la Chine n’est qu’un trompe-l’œil.


Lors de son discours sur l’état de l’Union, le 13 septembre, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen a réaffirmé la volonté de l’UE de réduire sa dépendance économique vis-à-vis de la Chine. On verra si l’Europe fait mieux que les États-Unis qui poursuivent cet objectif depuis l’élection de Donald Trump. Pour réduire le volume des importations en provenance de Chine et limiter l’accès des entreprises chinoises aux technologies de pointe américaines, le gouvernement a mis en place un système de tarifs, règles, subventions et désinvestissements. Une politique de « friendshoring » favorise des importations d’autres pays, avec lesquels les relations sont plus amicales, comme l’Inde, le Mexique, Taïwan ou le Vietnam.

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En apparence, le succès est au rendez-vous : pour la première fois depuis vingt ans, les États-Unis ont plus d’échanges commerciaux avec le Mexique et le Canada qu’avec la Chine. Mais ce résultat est trompeur. D’abord, la dépendance envers la Chine pour certaines matières premières reste inévitable. Ensuite, les chaînes d’approvisionnement sont complexes et opaques. Dans certains pays, des produits chinois sont tout simplement mis dans un nouvel emballage et réexpédiés aux États-Unis. Les pays « amis » qui fournissent désormais les États-Unis dépendent eux-mêmes de la Chine pour les intrants utilisés dans la fabrication des produits qu’ils exportent. Et cette dépendance envers la Chine est en progression. Le Mexique, premier exportateur de voitures vers les États-Unis, a doublé en cinq ans ses importations de pièces automobiles depuis l’empire du Milieu. Une étude de l’Institut économique allemand révèle que les importations allemandes de voitures et de pièces automobiles chinoises ont augmenté de 75 % cette année, tandis que les exportations dans l’autre sens ont baissé de 21 %. Il semble que les produits chinois restent trop abondants et bon marché pour que le monde s’en passe. Bonne chance, Ursula !

Conneries en chansons

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D.R

Avant que l’année 2023 ne prenne fin, revisitons une des histoires qui ont marqué l’actualité: l’antisémitisme de Médine, invité aux journées d’été d’EELV. C’est un fait, les rappeurs ont souvent tendance à déraper. Même si ce n’est pas forcément bon pour le business, cela ne dérange pas leur auditoire ni certains partis politiques…


EELV aurait dû savoir que, pour un parti ou une entreprise, s’associer à un rappeur à des fins politiques ou commerciales est risqué. Certes, tout le rap n’est pas antisémite, loin de là, mais la persistance de cette forme de racisme dans le milieu hip-hop, quel que soit le pays, est inquiétante. Qu’il s’agisse de paroles de chansons ou de messages postés sur des comptes Twitter ou Instagram suivis chacun par des centaines de milliers d’internautes, certaines vedettes osent tout : insultes antisémites, théories du complot, admiration d’Hitler, négationnisme, théorie selon laquelle les Noirs sont les « vrais » juifs…

L’année dernière, une série de tweets de l’Américain Kanye West, connu désormais sous le nom de Ye, lui ont coûté des partenariats lucratifs avec Adidas, Balenciaga et Gap, ainsi que son statut de milliardaire. En 2020, un autre Américain, Nick Cannon, a été viré par le géant des médias ViacomCBS après un podcast, et l’Anglais Wiley a connu un sort similaire après une rafale de posts délirants sur les réseaux sociaux. Toujours outre-Atlantique, un tollé indigné a accueilli des rafales comparables par Ice Cube et Jay Electronica. Ce dernier a sorti un album comportant des paroles antisémites et la voix de Louis Farrakhan, le fondateur de la Nation de l’islam.

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En France, Freeze Corleone a été lâché par Universal Music à cause de ses paroles, et une autre entreprise, BMG, a dû annuler un accord de 2021 avec lui pour une raison similaire. La même firme a dû faire face à une tempête médiatique en Allemagne en 2018, quand le duo Kollegah et Farid Bang a gagné le prix du meilleur album hip-hop malgré des références insupportables à la Shoah. Des cas similaires ont été repérés en Belgique, aux Pays-Bas et en Norvège. L’histoire de l’antisémitisme dans le rap remonte à la fin des années 1980 et au groupe Public Enemy. Médine peut au moins se consoler en pensant qu’il fait partie d’une longue tradition et que leurs dérapages n’ont jamais entamé la popularité de ces artistes.

Vive le Berry libre et indépendant !

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Carte du Berry datant de 1623. D'après une gravure de Gerhard Mercator. imageBROKER.com/SIPA

Raynal Pellicer et Frèd Langout signent une bande-dessinée humoristique sur une province abandonnée et cependant hautement estimable aux éditions Librairix. Les Berrichons relèvent enfin la tête sans se prendre au sérieux !


Entendez-vous ce cri qui s’élève du fond des campagnes françaises ? Le cri des terres de l’intérieur poussé par une vague d’ennui, la désertification et l’amour de la vigne ; celui aussi du chanteur abandonné ou du pilier de bar désœuvré. Du Centre de la France, au pied des coteaux de Sancerre, au sommet de la Cathédrale Saint-Etienne, des rues pavées de Bourges aux étangs de la Brenne, dans les pas de Jacques Cœur ou dans la voix de Jean-Louis Boncoeur, le Berry appelle au secours dans l’indifférence générale. Il invoque son quart d’heure de célébrité en dehors des périodes du Printemps, son Festival de musique qui faisait fuir naguère les Berruyers indisposés par cette jeunesse désordonnée et chevelue. Avouez-le, vous ne connaissiez même pas son existence géographique ; je sais que vous confondez le Berry avec l’Auvergne, vous mélangez la Sologne et le Bourbonnais, le Nivernais et la Beauce, vous ignorez tout de cette diagonale du vide qui coupe Issoudun en sa Basilique. Les caméras de télévision ne se déplacent chez nous qu’en cas de visite papale ou de tuerie de masse, c’est dire que nous encombrons peu les écrans, mêmes nos faits divers ont de la boue collée à leurs bottes.

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Pourtant, à la seule évocation du mot « Cognette », j’ai connu des fines gueules défaillir, et la mort au combat du lieutenant d’infanterie Alain Fournier en septembre 1914 au sud de Verdun dans les Hauts de Meuse, loin de son école de la Chapelle d’Angillon, nous émeut encore. Ma grand-mère se souvenait de la visite du Général et de Malraux, le 14 mai 1965, dans cette Maison de la Culture construite en briques rouges ; ce jour-là, De Gaulle et Calder engagèrent une conversation autour du « Stabile », le sextant de ma jeunesse, cette sculpture que j’ai longtemps prise pour un taureau égaré dans le Boischaut mais qui faisait référence à l’œuvre de Shakespeare. Vous n’avez certainement jamais vu la gare de Vierzon, un soir d’hiver ! Il y a des tristesses qu’un honnête homme ne doit pas ignorer dans une vie de pénitence. Il faut dire que cette ligne ferroviaire est la hantise des voyageurs tant sa régularité est surréaliste. Elle n’a rien à envier à celle de Perpignan si Dalí avait seulement daigné remonter le cours de la Loire.

Quand d’autres provinces ont droit à leur signalétique propre, leur langue régionale calligraphiée, leurs traditions vantées à coups de reportages aux 13 Heures, leur singularité poétisée par les grands artistes encartés du moment, leur gastronomie copiée dans les palaces du Nouveau Monde, le Berry semble cet éternel recalé. Absent de la photo. Aussi fade qu’un plat de lentilles du Puy, celles du Berry, incomparables, sont notre or vert. Le Berrichon porte le bonnet d’âne (noir) du mauvais élève de la classe européenne. Il ne peut s’enorgueillir d’aucune richesse particulière, ni minerais de fer ou de phosphate dans son sous-sol, quelques girolles et rosés des près à la rigueur, esseulé, il ne se prévaut d’aucune qualité particulière lors des réunions de famille. Sa Miss a ainsi mystérieusement disparu du concours national.

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Le Berrichon n’est pas aussi économe que son voisin auvergnat, pas aussi sympathique que le Chti, pas aussi fier que le Basque, pas aussi têtu que le Breton, que lui reste-t-il donc ? Il aimerait lui aussi briller en société. Dans cette folle concurrence des identités bafouées, face à un État centralisateur et volontiers méprisant, les deux auteurs de BD ont eu l’idée croquignolesque de suivre les mésaventures de Guillaume Ledoux, le chanteur des Blankass dans sa quête d’un Berry libre et indépendant. Une auto-détermination emmenée par une bande de bras cassés et de doux rêveurs, où la soulographie et les crises existentialistes sont des prétextes à la déconnade. La foirade est leur univers impitoyable. Adieu Paris ! sous-titré « Make Berry Great Again » a été tiré à 3 000 exemplaires dans sa première édition. Tous les Berrichons qui se respectent ont déjà été l’acheter car c’est un futur collector. Il a sa place dans une bibliothèque entre Paris-Berry de Frédéric Berthet et Berry Story d’A.D.G. Je l’ai trouvé chez Librairix, rue Coursarlon à Bourges, après avoir fait mes emplettes de Noël chez les bouquinistes de la rue Bourbonnoux, notamment l’achat à la Bouquinerie Pass’âge de la Petite flore argotique de Robert Giraud illustrée par Gilles Sacksick, ouvrage paru chez Dominique Halévy en 1968. Pour les locaux, cette BD sera pleine de trouvailles et de « private jokes », elle est noyée sous des litres de Quincy et de Menetou-Salon, on y croise évidemment Depardieu et Denisot, des tours de sorcellerie, une poule noire réfractaire et un anarchisme rural canal historique. Une histoire qui commence à la table de C’heu l’Zib, troquet de légende validé par le Prince d’Arenberg, entre le brochet à la crème et la charlotte au chocolat, est une belle entrée en la matière. Un midi, je suis sorti de cette table à 17 h 30, les forces de l’esprit sont redoutables dans cet endroit-là. Parmi les 25 propositions pour un Berry libre et indépendant, je retiens la mesure numéro 1 : « La prolongation du canal de Berry jusqu’à la mer » et la numéro 21 : « L’interdiction de la bourrée pour des raisons sanitaires ».

Raynal Pellicer et Fred Langout, Adieu Paris !  (Librairix éditions, 2023)

La France des clochers va-t-elle tonner ?

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Marche blanche en hommage à Thomas à Romans-sur-Isère, 22 novembre 2023. ©MOURAD ALLILI/SIPA

De nombreux témoignages de participants à la fête de Crépol confirment les motivations racistes de leurs agresseurs. Avec l’assassinat de Thomas, la France rurale découvre l’ensauvagement ethnico-religieux qui prend les Blancs pour cible. Malheureusement, elle ne peut compter sur le gouvernement pour désigner les coupables.


« La vie de Thomas, elle valait la vie des autres aussi. On n’est pas rien. On n’a pas le droit de prendre la vie de quelqu’un d’autre comme ça. » Les mots d’Annick recueillis par CNews en marge des obsèques de Thomas disent à la fois la sidération et la violence du séisme qui a frappé la petite communauté de Crépol. Ce « on n’est pas rien » dit justement le contraire : Thomas a été tué parce que justement, pour ses meurtriers, il n’était « rien ».

Les témoignages des jeunes habitants de Crépol[1] qui participaient à cette soirée, recueillis dans le podcast du Dauphiné libéré, sont éclairants. Plusieurs déclarent avoir entendu le petit commando d’agresseurs annoncer qu’« ils étaient là pour tuer du Blanc ». Ils parlent tous d’une soirée qui se termine dans le plus grand chaos, du sang partout, qui coulait, qui giclait, ils parlent de leur terreur : « C’est pas juste une bagarre de bal comme on a l’habitude. Là, ça a direct sorti les couteaux », souligne un jeune homme. Une jeune fille raconte : « Ils sont arrivés à 15, 20 personnes. Ils ont encerclé la salle des fêtes, ils ont essayé de forcer l’entrée […]. Quelqu’un a dit : “Il y a des couteaux, rentrez tous. Je saigne, je saigne.” On est tous rentrés dans la salle, on s’est enfermés. Et pour nous à l’intérieur, c’était l’enfer. On a vécu cela comme un attentat. » La journaliste demande aux jeunes pourquoi, selon eux, cela s’est arrêté. La réponse est directe :« Ils avaient fini ce qu’ils avaient à faire, ils avaient fini leur boucherie. »

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Ce que la France des clochers a compris, c’est qu’un de ses enfants a été tué et nombre d’autres blessés à coups de couteau, simplement parce qu’ils étaient blancs et qu’il n’en faut pas plus aujourd’hui à certains pour passer à l’acte. Ses habitants ont découvert une vérité insupportable : ils sont des proies à cause de ce qu’ils sont. Cette prise de conscience entre en résonance avec une actualité dramatique qui voit des Juifs se faire tuer parce qu’ils sont juifs, ainsi qu’avec les attentats islamistes qui se succèdent en France depuis 2012.

Un effacement de la réalité

Venir planter du Blanc était une des motivations de la bande qui a fondu sur le petit village de Crépol. Lui ôtant au passage la seule richesse qui lui restait : sa tranquillité. Les gens qui ont participé aux obsèques de Thomas sont dignes, silencieux, recueillis, mais si leur colère est rentrée, elle n’en est pas moins profonde. « Ça nous rend fous, on veut faire entendre que c’est un attentat. C’est pas une bagarre, c’est pas un règlement de compte », déclare l’un des témoins. Dans ce climat, le traitement médiatique et politique de l’affaire ne peut qu’exacerber les rancœurs.

Alors que très vite témoignages, photos, informations sur l’identité des agresseurs filtraient sur les réseaux sociaux, la presse insistait sur le fait qu’ils étaient Français, utilisant en boucle le terme de « Romanais » (habitant de Romans-sur-Isère), comme il était question de Dijonnais quand des affrontements entre Tchétchènes et Maghrébins (français) avaient explosé à Dijon. L’objectif était d’effacer ce que tout le monde avait vu : le fait que cette violence gratuite, provenant de jeunes issus de l’immigration, était construite sur une haine raciale revendiquée. Tout s’est passé comme si la violence ethnique devait être niée. Faute d’avoir des réponses à apporter, le gouvernement noie le poisson. Il reconnaît l’ensauvagement, mais fait comme s’il était général. Or, Crépol montre, si besoin est encore, que cet ensauvagement est alimenté par une idéologie ethnico-religieuse qui fait de plus en plus des Blancs la cible d’une « diversité » sous influence. Ce déni finira par conduire à ce qu’il croit éviter : le rejet mutuel et la montée aux extrêmes.

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Que des jeunes radicalisés et hyperviolents n’existent que dans l’exacerbation de la haine et l’affrontement est une chose, que cela leur donne un pouvoir sur le gouvernement de la France en est une autre. En donnant le sentiment qu’il tremble devant les quartiers, l’exécutif confirme que le rapport de force a remplacé la justice sociale. Le symbole de cet abandon : la minute de silence organisée à l’Assemblée nationale pour un jeune délinquant tué après un refus d’obtempérer quand, pour Thomas, l’idée n’a effleuré personne. Un peuple qui ne se sent ni protégé ni reconnu par ses représentants, et qui les voit donner des gages symboliques à des voyous, sera porté à écouter les entrepreneurs identitaires. « On n’est pas rien », disait Annick. Le pouvoir leur répond en substance : si, vous n’êtes rien puisque vous ne faites pas d’émeutes et que vous ne tuez pas.

Rendre des comptes

Ce sentiment alimente une révolte sourde, diffuse, comparable à celle qui a suscité les gilets jaunes. Elle est peut-être à terme plus dangereuse que l’expédition des militants néonazis contre les habitants du quartier de la Monnaie, d’où sont issus les assassins de Thomas. Pourquoi ? Parce que face à ces milices-là, la République ne tremble pas. Quand il s’agit de combattre des groupuscules marginalisés qui, faute d’être adossés à des groupes sociaux ou ethniques constitués, n’exercent pas d’emprise sur la société, c’est relativement simple. Ainsi la police n’a guère de mal à les maîtriser. Intervenir dans les quartiers comme la Monnaie pour aller chercher de jeunes délinquants qui y vivent est une autre affaire. Un habitant de Crépol, interviewé dans le reportage du Média pour tous, média lié aux gilets jaunes et à l’ultradroite, évoque directement la question de la vengeance : « Pour le pardon, il faut que justice soit faite. » Le problème est qu’une grande partie de cette France-là n’y croit plus, à la justice. Pour l’instant, elle ne se tourne pas vers les néonazis qui voudraient traduire le choc des civilisations en guerre civile, mais vote de plus en plus pour le Rassemblement national. Peut-être qu’après Crépol, il ne faut plus se demander si Marine Le Pen deviendra présidente de la République, mais quand.


[1]. « Drame de Crépol : “J’ai vu mon pote Thomas se faire poignarder” », Le Dauphiné libéré, 22 novembre 2023.

La persécution islamiste des chrétiens nigérians

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Des victimes d'une attaque par des hommes armés prient pour la paix dans un camp de personnes déplacées à Bokkos, au Nigéria, le 27/12/2023 Sunday Alamba/AP/SIPA

À l’approche des célébrations de Noël, un groupe d’hommes armés a mené des attaques coordonnées sur plusieurs villages situés dans l’État du Plateau, au Nigeria. Plus de 200 personnes ont été impitoyablement massacrées. Ces actes se sont déroulés dans un contexte de tensions religieuses exacerbées, liées à une lutte acharnée pour le contrôle de l’eau et des terres. Au Nigéria, comme dans d’autres pays en développement, les chrétiens sont les victimes du fanatisme islamiste.


C’est une véritable tragédie qui a frappé la République fédérale du Nigeria à la veille des fêtes de Noël. Dans l’État du Plateau, une quinzaine de villages ont été simultanément attaqués par des « bandits », laissant derrière eux des monceaux de cadavres et des dizaines de maisons pillées et réduites en cendres. Plus de 200 personnes auraient été assassinées selon le bureau d’Amnesty International qui a annoncé que ce chiffre pourrait être plus élevé. Plusieurs personnes demeurent encore disparues laissant planer l’incertitude quant à leur sort : fuite ou enlèvement. Interrogés, certains habitants ont déclaré qu’il avait fallu plus de 12 heures avant que les services de sécurité ne répondent à leur appel à l’aide et rejoignent les rescapés de ce massacre qui a fait les titres des médias locaux. 

Aucun groupe n’a revendiqué la responsabilité de ces attaques, mais tous les indices pointent vers les nomades-éleveurs de l’ethnie Haoussa-Fulani (ou Peuls). Ces derniers ont déjà été accusés par le passé d’orchestrer des massacres dans les régions du nord-ouest et du centre, dans le but de s’approprier les terres et l’eau. Un conflit exacerbé par une démographie élevée, le réchauffement climatique et l’antagonisme croissant entre chrétiens et musulmans, alimenté en partie par l’activisme meurtrier du groupe islamiste Boko Haram, affilié à l’État islamique depuis 2015, dans le nord du pays. Parmi les victimes, on compte une majorité de villageois, dont de nombreux chrétiens, y compris des pasteurs protestants. Solomon Gushe, révérend de l’église baptiste de Dares, un des villages ciblés, a été froidement assassiné avec neuf membres de sa famille comme le rapporte le Christian Daily International-Morning Star News. Le quotidien évoque même un autre pasteur tué avec ses cinq enfants. 

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Face à cette atrocité, l’Association chrétienne du Nigéria (CAN), sous la direction de l’archevêque Daniel Okoh, a vivement condamné cette récente attaque contre les chrétiens de ce pays. Dans un communiqué officiel, l’association déclare : « Nous réprouvons fermement ces actes de violence. L’incendie délibéré de maisons et de lieux de culte, ainsi que la destruction de biens d’une valeur de millions de nairas, ne constituent pas seulement des crimes, mais également une attaque directe contre nos valeurs fondamentales de paix, d’unité et de respect mutuel. De tels agissements n’ont pas leur place dans notre société et ne doivent en aucun cas être tolérés ».

Au-delà de l’émotion suscitée, la politique mise en place par le président Bola Tinubu est également critiquée. Élu cette année avec la promesse de mettre fin à ce type d’exactions qui secouent régulièrement ce géant pétrolier, le dirigeant nigérian a ordonné que toutes les mesures nécessaires soient prises pour retrouver les coupables. L’armée nigériane a lancé une opération visant à localiser et à arrêter les criminels, en collaboration avec d’autres agences de sécurité, bien que les arrestations soient rares lors de telles attaques. Abdullsalam Abubakar, à la tête de l’opération spéciale d’intervention de l’armée dans le Plateau et les États voisins, a affirmé que ses forces ne se reposeraient pas tant qu’elles n’auraient pas identifié les responsables de ces massacres. Isa Sanusi, le directeur d’Amnesty Nigeria, a exprimé son agacement face au manque de « mesures concrètes » prises par le gouvernement actuel pour « protéger les vies des Nigérians ». Il rappelle que, parfois, des arrestations sont prétendument annoncées, mais aucune preuve tangible n’est fournie, déplorant l’incapacité manifeste des autorités à assurer la protection de la population nigériane, avec des assassinats devenus progressivement la norme.

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Selon un rapport récent sur les « chrétiens martyrs au Nigeria », publié par une ONG nigériane, la Société internationale pour les libertés civiles et l’État de droit (Intersociety), plus de 50 000 chrétiens ont perdu la vie au Nigeria depuis le début de l’insurrection de Boko Haram en 2009. Le rapport indique que 18 000 églises et 2 200 écoles chrétiennes ont été incendiées, que 5 millions de chrétiens ont été déplacés ou ont trouvé refuge dans des camps. Par ailleurs, les musulmans modérés ne sont pas plus épargnés. Avec 34 000 d’entre eux tués, ils ont été aussi les malheureuses victimes de ces attaques djihadistes au cours de ces deux dernières décennies. 

Depardieu : les bourreaux avant les juges

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Gérard Depardieu lors de l'ouverture du 2021 Baltic Debuts International Film Festival, Svetlogorsk, Kaliningrad, Russie, le 24/7/2023 Vitaly Nevar/TASS/Sipa USA/SIPA

Ceux qui sont derrière la vindicte médiatique dirigée contre Gérard Depardieu ont doublement tort: non seulement ils violent le principe de la présomption d’innocence, mais ils ont aussi échoué à apprendre les leçons du passé. Un cas récent comme celui d’Ary Abittan aurait dû les inciter à plus de prudence. Tribune du journaliste, Bernard Bernard.


Soutien sans aucun équivoque à Gérard Depardieu, dans la tourmente du grand lynchage médiatique, orchestré par une poignée de « journalistes-scribouillards » à la recherche du Grand Soir, en mal de notoriété mais surtout à la morale disons… élastique. Poursuivie hardiment par la cohorte bêlante d’un mouvement très en vogue, cette odieuse lapidation ne grandit pas vraiment leurs vertueux initiateurs à la recherche du sacro-saint scoop, d’essence orgasmique, qui fait frissonner ceux que désormais je n’appelle plus confrères. Et qui veulent gonfler leur renom autant que leur bourse…

Ainsi dévoyée, la cause qu’ils prétendent défendre ne sort guère grandie de cette odieuse chasse à l’homme. Ont-ils oublié, ces petits commis de scandales que pour l’heure – encore – c’est la Justice qui tranche et non pas eux, bourreaux-marionnettes avant les juges souverains ? Et que la présomption d’innocence reste l’apanage d’un système judiciaire façonné au fil du temps par l’esprit de la démocratie qui, même s’il n’est pas parfait, demeure l’un de ses pivots essentiels.

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Le comédien Ary Abittan, voué un temps aux gémonies, en sait quelque chose, après avoir traversé les flammes d’un enfer du même tonneau. En octobre 2021, la même meute, mais avec d’autres chiens, s’acharnaient sur ce fantaisiste en pleine ascension, plébiscité par le public. Mis en cause par une jeune femme de 23 ans qui l’accusait de viol, il était rapidement mis en examen pour ces faits. Les médias de tout poil reprenaient l’info… et sonnaient l’hallali. Contrats rompus, représentations annulées, tournées supprimées, revers d’image : ces fatwa d’un nouveau genre laissaient l’homme stupéfait, prostré, interdit… Lui qui surfait si allègrement d’habitude sur les réseaux sociaux, s’auto-condamnait au silence en mutilant son art de l’espièglerie, sous ce linceul si hardiment jeté. Les rares médias qui tentaient de calmer le jeu, en soufflant sur les braises déclinantes de la présomption d’innocence, voyaient leur écho se perdre dans le vent. Vaille que vaille, la chaîne d’infos CNews, rappelait régulièrement la presse à plus de mesure.

En juillet dernier, deux magistrats en charge de « l’affaire » estimaient que de nouveaux éléments affaiblissaient notablement la charge. Ils plaçaient l’acteur sous le statut de témoin assisté, en suivant les réquisitions du parquet. Mais là, point de tonitruante publicité de la part des Fouquier-Tinville de l’imprimerie ou des ondes.

Petit à petit l’humoriste renoue désormais avec son public mais, même si la justice le dédouane un jour, lui reviendront régulièrement des relents nauséabonds de fumée et de feu, issus de dictons populaires dévoyés.

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La comparaison entre Gérard Depardieu et Ary Abittan vaut ce qu’elle vaut et la justice tranchera, même si la tête de notre Christophe Colomb national vacille déjà sous le tranchant de cette épée manipulée.

Un dernier élément au débat peut-être ? Il n’y a pas si longtemps, combien était-elles ces jeunes filles énamourées, ces jolies femmes en pamoison devant leur idole ou une quelconque célébrité, dans l’attente d’un regard complice, synonyme d’émotions plus intimes ?… On les appelait alors « groupies ».

La roche du mauvais bonhomme

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© Bernard Bernard. Photo prise le 2 mai 1996 lors de la remise de la rosette par le président Chirac, avec notamment Jean Marais, Simone Valère, Gilles Jacob et Gérard Depardieu.

Exportations : pourquoi le modèle italien devrait inspirer la France

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La première Lamborghini fontionnant au diésel, au 2023 SEMA Show, Las Vegas, le 31/10/2023 UPI/Newscom/SIPA

Au moment où le champion européen des exportations, l’Allemagne, connaît des difficultés, un autre État-membre vient à la rescousse de l’UE. Ce n’est pas la France – qui a toutes les raisons d’être jalouse de ce concurrent – mais l’Italie. En 2022 le montant des exportations a atteint 624,6 milliards d’euros, soit 20% de plus qu’en 2021. Et 2023 s’annonce être l’année de tous les records. La France, trop obsédée par le modèle allemand, ferait mieux de regarder du côté de son voisin transalpin.


En 2022 les entreprises italiennes ont fait preuve de résilience et de vitalité dans le commerce international, même après les chocs de la pandémie et de l’invasion russe de l’Ukraine qui a fait flamber les prix de l’énergie et perdre une importante partie des exportations italiennes vers la Russie. En particulier, les exportations ont atteint 624,6 milliards d’euros, soit 100 milliards de plus qu’en 2021, retrouvant les niveaux d’avant le Covid. La performance italienne est nettement meilleure que celle de l’Espagne (+7,6%) et surtout de l’Allemagne (-2,0%) et de la France (-4,7%), qui en 2022 sont encore inférieures aux niveaux d’avant Covid. Toujours en 2022, la Botte gagne une position en devenant le sixième exportateur mondial.

Les marchés et les secteurs

L’Europe demeure la première destination des exportations italiennes avec un volume d’exportations égale à 418.536 milliards d’euros, suivi par les États-Unis avec 90.579 milliards et l’Asie avec 80 milliards. Quant à l’Afrique, les exportations, même si elles sont inférieures, progressent à 21.5 milliards et enfin l’Océanie avec 14.2 milliards.

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Les secteurs qui exportent le plus ont été les machines, avec une valeur égale à 92,9 milliards d’euros (+10,3%). Ensuite le secteur de la mode qui avec ses 86 milliards d’exportations (+18%) dont 28 d’excèdent commercial, est destiné à devenir dans les prochaines années le numéro un des exportations. Quant au secteur agroalimentaire, il continue sa progression avec 52,3 milliards d’euros d’exportations (+16,7%). Le secteur pharmaceutique a généré un volume qui s’élève à 47,6 milliards d’euros (+42,8%). Le bois et l’ameublement ont atteint 21 milliards (+13,3%).

Décryptage

L’Italie fait partie des six premiers pays au monde avec un excédent commercial extérieur, hors coûts et minéraux énergétiques de plus de 100 milliards d’euros.

La question récurrente qui vient à l’esprit est : comment fait l’Italie, un pays basé sur des PME souvent familiales, totalement dépendant sur le plan énergétique, dépourvu des grands groupes industriels, pour enregistrer des meilleures performances à l’export que certaines nations économiquement plus grandes ?

Il y a quatre aspects fondamentaux qui expliquent cette performance.

Tout d’abord l’industrie manufacturière représente le pilier sur lequel repose l’économie du pays avec une chiffre d’affaires d’environ 1200 milliards d’euros dont plus de 50% est exporté à l’international. La mondialisation avec sa compétition basée sur les bas coûts de production n’a pas limité la capacité industrielle du pays. L’essence du « Made in Italy »  est son industrie.

La compétitivité italienne dérive de la structure particulière de son système de production qui ne repose que de manière minimale sur de grands secteurs industriels mais plutôt sur environ 3000 niches dans lesquelles elle est leader mondial. L’Italie présente le plus haut degré de différenciation des exportations par rapport à tous les autres pays du monde. Pour cette raison le chiffre d’affaires des exportations italiennes est potentiellement plus résistant que celui d’autres pays qui se concentrent uniquement sur certains types de produits et qui sont donc plus exposés à d’éventuelles conditions économiques négatives.

La taille des entreprises ne constitue pas un frein aux exportations. Près de 80% des exportations manufacturières sont réalisées par 9000 entreprises moyennes et grandes entreprises (de 50 à 4 999 salariés). A cela s’ajoutent 27 000 petites entreprises employant entre 10 et 49 salariés, qui couvrent les 13 % restants. Il n’existe cependant que 13 entreprises employant plus de 5 000 salariés qui représentent moins de 7% des exportations. L’Italie n’est donc pas forcement pénalisée par le manque de grands groupes industriels.

Parmi d’autres facteurs déterminants, l’Italie est traditionnellement dotée de chaînes d’approvisionnement courtes, que ce soit de moyenne ou de grande dimensions. Il y a aussi l’ancrage local de nombreuses et diverses activités de production, ainsi que leur capacité à innover et à réinterpréter des produits.

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La deuxième manufacture d’Europe bénéficie d’un des plus hauts degrés d’automatisation au monde avec environ 23 000 robots installés. Grâce à l’utilisation de robots, les entreprises rendent la production plus flexible tant en termes de volumes que de qualité, acquérant ainsi une capacité de réponse beaucoup plus rapide aux changements de la demande globale. Cela améliore considérablement la compétitivité des entreprises sur un marché de plus en plus mondialisé, où la variété des produits augmente de façon exponentielle et leurs cycles de vie se raccourcissent progressivement. La spécialisation de l’Italie dans le commerce international est suivie de près par différents analystes qui étudient son modèle économique. À l’instar d’autres grandes nations, son réseaux de PME régionales a su s’adapter à une compétition internationale de plus en plus agressive en se positionnant sur des niches des marchés. Dans un pays comme la France où le sujet de la réindustrialisation est plus que jamais d’actualité, le modèle italien pourrait bien être plus proche culturellement et économiquement du modèle français et donc plus facile à mettre en œuvre que le modèle allemand, par exemple, qui est totalement différent.

Les horreurs que nous ne saurions voir

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Image de vidéosurveillance montrant un combattant du Hamas à proximité du festival de musique de Réïm, 7 octobre 2023. ©D.R

Les images des massacres commis par le Hamas ont ravivé chez certains le souvenir des atrocités nazies. Pour d’autres, elles n’ont pas empêché de crier à la manipulation israélienne. Il est cependant nécessaire de les diffuser, car il y a pire que le déni : c’est l’oubli.


Lorsque j’étais enfant, ma mère m’a emmené voir deux films. Un sur le massacre d’Oradour-sur-Glane, un autre sur la libération des camps d’extermination nazis. Les images étaient d’autant plus fortes qu’à l’époque l’image était rare. La télévision balbutiait. Nous n’avions pas, d’ailleurs, de poste de télé à la maison. Au retour, pour tout commentaire, ma mère m’a dit : « Il fallait que tu voies ces horreurs parce que toi et les générations à venir n’aurez plus jamais à connaître de telles choses, et j’espère que de les avoir vues t’aidera à ne pas oublier qu’elles ont existé pour de bon, pour de vrai. »

Je ne doutais pas qu’elle dît vrai. Comment serait-il possible en effet, et seulement imaginable, qu’on ait un jour à lever de nouveau les yeux sur tant de barbarie, d’inhumanité. Les images de ces décharnés d’outre-tombe, au regard immense, démesuré, qui semblait avoir vu ce qui ne se voit pas, ne nous ont sans doute jamais quittés. En tout cas, moi elles ne m’ont jamais quitté. Alors nous avons vécu, le temps passant, avec la conviction que nous avions probablement gagné en humanité. Avec la certitude que ma mère ne pouvait qu’avoir eu raison. L’horreur, cette horreur-là, appartenait en quelque sorte à un autre âge de l’humanité. Tout était donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, ou peu s’en faut.

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Et puis il y a eu le 7 octobre. Le passé, les images grises et tremblantes diffusées dans une salle improbable, dans un silence sépulcral que le ronronnement du projecteur rendait encore plus oppressant, tout cela nous sautait subitement de nouveau au visage.

Aujourd’hui, tout est image. À commencer par le pire, le laid, le sordide. La violence sans frein ainsi qu’une pornographie qu’on ne pourrait qualifier de bestiale qu’en insultant très gravement le règne animal. Cette violence, pour ma part, je crois l’avoir croisée pour la première fois dans le film Orange mécanique. Mais on opposait alors l’alibi de la fiction et la caution d’une fascination, présentée à l’époque comme légitime, pour ce que d’aucuns qualifient encore d’esthétique de la décadence. Ce baratin bien-pensant aidait à ne pas vomir. Pire, on se fendait de quelques louanges, forcées, sans doute, et de pure convention, mais il fallait bien coller à son temps, enfourcher ses modes et ses codes, n’est-ce pas… Il y eut bien sûr débat. Fallait-il autoriser la diffusion du film ? Fallait-il montrer de telles scènes de violence gratuite ? Deux camps s’opposaient : celui des progressistes à tout crin et celui de ceux que les précédents qualifiaient de vieux cons.

À quelques décennies de distance, je me retrouverais plutôt, et avec ferveur, dans le camp de ces derniers. Et pas seulement pour la volupté qu’on peut puiser à se faire traiter de vieux con après une vie déjà raisonnablement longue mais parce que, me semble-t-il, la violence fictionnelle, parée d’esthétisme, présente l’inconvénient majeur de brouiller le réel et d’embrouiller les esprits. Ce qui fait beaucoup.

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Depuis ce 7 octobre d’apocalypse, une nouvelle version de ce même débat a émergé. Faut-il ou non montrer la réalité barbare, ces scènes de carnages, cette sauvagerie ?

Eh bien, j’ai choisi mon camp. Je suis pour. À tout le moins, je suis pour qu’on fasse savoir urbi et orbi que ces images, insoutenables, sont disponibles et le resteront à jamais. Oui, porter à la connaissance de tout un chacun qu’il peut, s’il le souhaite, les découvrir, les voir et les revoir. Je sais, les révisionnistes révisionnisteront, les négationnistes négationnisteront, ils crieront au truquage, à la mise en scène de propagande, les grands pervers s’en délecteront, etc. Sans aucun doute. Et alors ? Qu’on montre ces images ou qu’on les occulte, les uns et les autres camperont sur ces lignes, obsessionnellement, jusqu’à la fin des temps.

La censure est l’oubli

Ne pas les montrer, ne pas les rendre aisément accessibles, c’est prendre un risque énorme. Un risque politique et, pire encore, historique. Les censurer reviendrait ni plus ni moins à entrouvrir la porte de l’oubli, autrement dit à faciliter grandement la mise en œuvre de la faculté de déni. Faculté d’oubli et de déni tellement forte, tellement opérante chez les gens de pouvoir ! Et c’est bien à leur intention particulière, pour leur couper sous le pied la mauvaise herbe de l’amnésie accommodante qu’il faut maintenir vivantes ces horreurs. Ils sont tellement friands de ces accommodements qu’ils disent raisonnables qu’il serait irresponsable, sous couvert de protéger les masses mal préparées, de leur donner l’occasion d’échapper à ces monstruosités, à la toute violence du réel. Déjà, on entrevoit combien ces pudeurs si mal venues et surtout cet oubli terrifiant s’inscrivent en filigrane dans la petite chanson qui se fait entendre ces jours-ci et dont chaque refrain se plaît à évoquer le spectre de la «  confrontation globale ». On n’ose dire « Troisième Guerre mondiale », mais c’est bien de cela qu’il s’agit. Dès lors, l’enjeu, dans l’esprit de ceux-là, ne serait-il pas de se préparer – de nous préparer – à tout « accommodement raisonnable » qui nous épargnerait cette extrémité ?

Petite chanson, disais-je ? J’ajouterai « air connu ». En 1938, Daladier, le Français, et Chamberlain, l’Anglais, s’étaient abandonnés à un de ces « accommodements raisonnables ». En échange d’une « paix de mille ans » promise par l’ogre Hitler, ils se sont abaissés à fermer les yeux pendant que le monstre dévorait les territoires des Sudètes. Or d’un accommodement l’autre, l’Israël d’aujourd’hui pourrait bien être les Sudètes d’hier. Et qu’on n’aille pas me dire que personne, ici ou ailleurs, n’oserait concevoir une telle énormité ! Pour un peu, on se ferait un malin plaisir de donner des noms…

La loi de la discorde

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Emmanuel Macron interviewé à la télévision dans l'émission "C est a vous" sur FR5 le 20/12/2023 Jacques Witt/SIPA

La nouvelle loi sur l’immigration a été bricolée en rassemblant des demi-mesures hétéroclites qui risquent de ne pas résoudre les problèmes de la France en matière de sécurité ou de besoins en main-d’oeuvre. Tribune de Sophie de Menthon, présidente d’ETHIC.


En dehors du spectacle hallucinant de l’Assemblée nationale qui vote une loi que personne ne voulait voter, mais qui sera quand même votée à la majorité et finalement soumise au Conseil d’État, qu’est-ce qui intéresse les Français ? Quand on le leur demande, ce qu’ils veulent c’est plus de sécurité et moins d’immigration. En fait, ils veulent moins d’immigration quand elle est dangereuse, mais ils veulent garder les immigrés quand ils bossent bien. Ils ont besoin de gens pendant les vendanges, de nounous pour les petits, d’autres personnes dévouées pour les citoyens âgés, sans parler des femmes de ménage, des livreurs, des manutentionnaires, des garçons de café, etc. Et que l’on ne se raconte pas qu’il faut des formations exceptionnelles pour tous ces métiers que les Français n’assurent pas !

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Cela vaut le coup de se pencher sur ce que contient vraiment le projet de loi :

1/ Chaque année les quotas migratoires seront décidés, hors demandes d’asile et de regroupements familiaux (on comprendra mieux après ?).

2/ Restriction de l’accès aux allocations familiales et aux Aides personnalisées au logement si l’on n’est pas depuis au moins 5 ans sur le territoire ou 3 mois si l’on travaille. C’est l’article qui est l’objet de tous les ressentiments. Le camp du bien est outré.

3/ Les fameux travailleurs sans papiers seront régularisés, à titre exceptionnel, au cas par cas et dans les métiers en tension, mais chacun donnera son avis ! Sans compter bien sûr les fatidiques contrôles de « l’insertion sociale à l’intégration à la société française » et j’en passe… Aux États-Unis, cela s’appelle la « green card » : vous avez un contrat de travail, vous avez un permis de séjour de la même durée. Terminé. Sans compter qu’on continue à pousser les travailleurs sans papiers à surtout travailler dans l’illégalité, pour que ce soit légal au bout de 12 mois d’activité. Ubuesque. Le conseil d’État pourrait peut-être réagir ?

4/ Le droit du sol : tout le monde a l’air d’accord pour le limiter. Sachant qu’un mineur ne pourra pas acquérir la nationalité française s’il a fait l’objet d’une condamnation pour crime. Sic. Et il a fallu une commission mixte paritaire pour trouver ça !

5/ Des expulsions facilitées. Personne n’y croit : déjà mettre dans l’avion quelqu’un qui ne veut pas est une mission quasi impossible (4 gendarmes), en plus dès qu’ils arrivent dans leur pays, on nous les renvoie illico.

6/ Le regroupement familial devient plus difficile ou plus compliqué d’un point de vue administratif, et avec un petit examen de français à l’appui (pour la complexité administrative, on leur fait confiance).

7/ Une perle ! Les binationaux ayant tué un gendarme ou policier seront déchus de leur nationalité. C’est bête que l’on n’y ait pas pensé avant… et en plus ils s’en moquent !

8/ Il faudra être cultivé : les demandeurs devront réussir un examen après leurs cours de Français (niveau ?) : une chance pour les entrepreneurs car les cours de français seront donnés pendant les heures de travail dans l’entreprise ! Elle n’est pas belle la vie ?

9/ Les étudiants, eux, devront justifier du « caractère réel et sérieux de leurs études » et à tout hasard, leurs frais d’inscription seront majorés (de combien ?).

10/ A qui s’adressera le « délit de séjour irrégulier » (soit 3.750 euros d’amende et trois ans d’interdiction du territoire français) ? A ceux qui débarquent sur nos côtes ?

11/ Le meilleur pour la fin : pas de demi-tarif dans les transports pour les clandestins, sic, parce qu’ils payent ?

12/ Et puis, si notre clandestin a « la chance » de tomber sur un « marchand de sommeil », et qu’il porte plainte à propos d’un logement trop insalubre, l’heureux gagnant aura une carte de séjour temporaire d’un an (on ne sait pas ce qui arrive en revanche aux tenanciers coupables ?).

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Toutefois réjouissez-vous braves gens, un Français sur deux est content. 24% ne sont pas satisfaits et 26% ne se prononcent pas (source : sondage Odoxa). En revanche, 52% des Français regrettent infiniment que l’on ne puisse plus mettre les mineurs en centre de rétention administrative. Vive la France et les maisons de correction !

Empathie mon cul, dirait Zazie…

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Gabriel ATTAL, ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse, s est rendu à l'école Berthelot, à Denain, le 15 decembre 2023 FRANCOIS GREUEZ/SIPA

Gabriel Attal a décidé, pour combattre le harcèlement, de faire donner entre une et deux heures de cours d’empathie aux élèves. Un concept venu tout droit du Danemark et des États-Unis, où on se serre dans ses bras en émettant tout ce que l’on peut d’ondes positives. Une solution qui fait manifestement sourire notre chroniqueur, qui n’a décidément pas la plume compassionnelle…


L’Éducation Nationale, c’est formidable. Faute d’avoir une ligne claire — on instruit les élèves et on compte sur les Lumières ainsi prodiguées pour contrebalancer les horreurs entendues au sein des familles, des « communautés » et des ghettos —, on ajoute et on surajoute des heures de remédiation chaque fois qu’un problème se pose.

Les élèves sont trop gros ? Au lieu d’augmenter le nombre d’heures de sport, en le rendant vraiment obligatoire — y compris la piscine pour les filles que cela dérange sous des motifs à 90% religieux —, on initie les gosses à la gastronomie, sous couleur de combattre la malbouffe. Ils se font écraser à la sortie de l’école ? On invente des formations « permis de conduire ». Ils maltraitent ceux d’entre eux qui sont présumés homos, massacrent les obèses, humilient les plus faibles, et forcent les filles à leur faire des pipes dans les toilettes, prestations qu’ils filment et s’envoient les uns aux autres pendant les cours ? On décide de leur distiller des cours d’empathie. Et l’on publie sur le site d’Eduscol un « kit pédagogique pour les séances d’empathie à l’école ».

L’empathie, c’est, à partir de racines grecques, ce qu’est la compassion à partir de racines latines. Compatir, c’est littéralement souffrir avec. Quelque chose comme les Alcooliques anonymes… Mais « compassion », cela sonnait exagérément chrétien, ce qui la fiche mal dans un pays qui n’ose plus souhaiter un « Joyeux Noël » et se réfugie derrière l’euphémisme « Joyeuses fêtes ». Donc, empathie. C’est le même mot en anglais (empathy) et, justement, en danois (empati). Give me a hug — on s’enlace et on est en empathie. Si tous les gars du monde — on connaît la suite.

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Sauf que les harceleurs sont très forts, sur l’empathie. Ils sentent d’une heure au loin les faiblesses de leur proie potentielle (c’est le principe de tout prédateur, repérer le buffle ou le gnou un plus faible dans le troupeau). Et si jamais ils ne l’ont pas senti, on va le leur signaler.
Imaginons un cours où l’on expliquerait : « Kevin (ou Mohamed, ne stigmatisons personne), sois gentil avec Charles-Edouard, il est plus faible que toi, il court moins vite, il a de petites manières que d’aucuns qualifierait de « féminines », peut-être préfèrera-t-il les garçons plus tard, mais c’est très mal de ne pas être gay-friendly… »

Gabriel Attal a raconté avoir été la cible, à l’École alsacienne, de ce petit harceleur de Juan Branco. Pensez-vous sérieusement qu’un cours d’empathie aurait suffi à extirper de la tête d’un petit caïd l’idée qu’en massacrant l’un de ses camarades, il se glorifie lui-même — et éloigne de lui toute suspicion ? Parce que c’est souvent la clef du gay bashing, comme on dit depuis qu’on ne parle plus français. Passer pour un surmâle au moment même où l’on a des doutes sur sa propre sexualité.

« Cet âge est sans pitié », disait fort bien La Fontaine (dans « Les Deux pigeons »). Les enfants sont naturellement violents. Ce sont des bouquets de pulsions, parce qu’ils nous arrivent dans l’état de nature, comme aurait dit ce crétin maximal de Rousseau — qui s’est fait pas mal harceler par Diderot, D’Alembert, Voltaire et tutti quanti. Le boulot des enseignants est de dénaturer l’enfant, de le redresser (en latin, stare, racine de « instituteur », signifie « se tenir droit » : c’est ce qui a donné « tuteur » et « instituteur ». Vous sentez les mains de votre vieil instit qui appuyait sur vos omoplates : « Jean-Paul, tiens-toi droit ! » Et dans cette injonction, il y avait bien sûr la rectification de la position, mais aussi l’obligation de sortir des pensées tordues qui sont naturellement celles des gamins.

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C’est par la culture tous azimuts que l’on sort de l’état de nature. Ce n’est pas en tentant de culpabiliser le harceleur — qui s’en fiche bien ! Chez lui, il est enfant-roi, il tyrannise sa mère et ses petites sœurs, il est un tyran à l’échelle domestique, prêt à s’élancer sur le théâtre du monde. Tous les anciens harcelés n’ont pas la chance d’être ministre de l’Éducation. Il en est qui se suicide, on l’a vu récemment, on le voit tous les jours.

Et, mesure essentielle, s’il faut effectivement renvoyer les coupables séance tenante (et non le harcelé, comme aujourd’hui), il faut aussi se soucier de l’endroit où on les réinscrira — c’est leur droit, jusqu’à 16 ans. C’est pourquoi je préconise l’inscription forcée dans un autre établissement loin, très loin de leur famille, de leurs « grands frères », de leur quartier. À charge à leurs parents de les y conduire le matin, ou, mieux, de les y laisser. Dans l’un de ces Internats d’excellence créés sous le ministériat de Luc Chatel, où on leur apprendra, avec des mesures intelligemment coercitives, que le harceleur d’hier peut devenir à son tour victime — comme Alex dans Orange mécanique.

Sur ce, Joyeux Noël.

Sino-dépendants et pour longtemps

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D.R

L’année 2023 aura vu des tentatives par les Etats-Unis et l’UE pour réduire leur dépendance économique par rapport à l’Empire du Milieu. Pourtant, la favorisation d’importation d’autres pays que la Chine n’est qu’un trompe-l’œil.


Lors de son discours sur l’état de l’Union, le 13 septembre, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen a réaffirmé la volonté de l’UE de réduire sa dépendance économique vis-à-vis de la Chine. On verra si l’Europe fait mieux que les États-Unis qui poursuivent cet objectif depuis l’élection de Donald Trump. Pour réduire le volume des importations en provenance de Chine et limiter l’accès des entreprises chinoises aux technologies de pointe américaines, le gouvernement a mis en place un système de tarifs, règles, subventions et désinvestissements. Une politique de « friendshoring » favorise des importations d’autres pays, avec lesquels les relations sont plus amicales, comme l’Inde, le Mexique, Taïwan ou le Vietnam.

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En apparence, le succès est au rendez-vous : pour la première fois depuis vingt ans, les États-Unis ont plus d’échanges commerciaux avec le Mexique et le Canada qu’avec la Chine. Mais ce résultat est trompeur. D’abord, la dépendance envers la Chine pour certaines matières premières reste inévitable. Ensuite, les chaînes d’approvisionnement sont complexes et opaques. Dans certains pays, des produits chinois sont tout simplement mis dans un nouvel emballage et réexpédiés aux États-Unis. Les pays « amis » qui fournissent désormais les États-Unis dépendent eux-mêmes de la Chine pour les intrants utilisés dans la fabrication des produits qu’ils exportent. Et cette dépendance envers la Chine est en progression. Le Mexique, premier exportateur de voitures vers les États-Unis, a doublé en cinq ans ses importations de pièces automobiles depuis l’empire du Milieu. Une étude de l’Institut économique allemand révèle que les importations allemandes de voitures et de pièces automobiles chinoises ont augmenté de 75 % cette année, tandis que les exportations dans l’autre sens ont baissé de 21 %. Il semble que les produits chinois restent trop abondants et bon marché pour que le monde s’en passe. Bonne chance, Ursula !