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Trump sort sa pioche et démolit tout… sauf les fake news

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Aile Est de la Maison Blanche: et Trump conduit le bal…


Si vous ne suivez l’information que d’un œil et d’une oreille, vous avez peut-être vu et entendu ces derniers jours une nouvelle proprement effrayante concernant les Etats-Unis: « Donald Trump est en train de détruire la Maison Blanche » !

Ah, quel boulet !

Jay Scarborough le présentateur matinal de MSNBC a dénoncé une « destruction grotesque »! Les présentatrices de l’émission « The View » sur ABC (une table ronde quotidienne exclusivement féminine) ont hurlé de colère : « Il n’a pas le droit de la détruire ce n’est pas sa maison, c’est la maison du peuple ». Hillary Clinton, une autre femme féministe, a dit exactement la même chose sur X « ce n’est pas sa maison, c’est la vôtre et il est en train de la détruire. » Et le très sérieux New York Times s’est lamenté que Trump ait utilisé un « boulet de démolition contre la Maison Blanche».

Qu’on se rassure, la Maison Blanche est toujours debout ! Ces informations étaient erronées. C’étaient encore des fausses nouvelles (« fake news ») vendues par la clique de journalistes américains qui détestent Trump et détournent les faits – ou racontent carrément n’importe quoi – depuis dix ans, avec l’espoir de monter l’opinion publique contre lui. Espoir totalement vain, cela dit au passage. Tout au plus, ces journalistes ont-ils réussi à tuer leur propre crédibilité et à provoquer une crise de confiance sans précédent envers les médias « officiels »…

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Trump n’est pas en train de détruire la Maison Blanche et n’a aucune intention de le faire. Au contraire il vient d’y engager un projet de rénovation majeur : la construction d’une grande salle de bal (8 000 m²) en place et lieu de l’actuelle « aile est ». Les travaux d’excavation ont commencé avec inévitablement la démolition d’une partie de la structure actuelle… D’où les élucubrations de la gauche américaine. Imaginez qu’en 1985,  Le Monde ait accusé François Mitterrand de « détruire le Louvre » lorsque les travaux de la future pyramide ont commencé dans la Cour Carrée !

Au-delà de la fausse polémique, le projet mérite quelques éclaircissements, ne serait-ce que pour rappeler que de nombreux présidents avant Trump ont laissé leur marque sur cette demeure, et ont en général été vivement critiqués par leurs contemporains pour cela.

Trop étroit pour Théodore Roosevelt

La Maison Blanche est le lieu de vie et de travail du président des Etats-Unis. Elle sert aux réceptions protocolaires. Elle est aussi ouverte au public et reçoit un demi-million de visiteurs chaque année. Elle fut construite à partir de 1792 sur un site choisi par le président Washington. C’est une demeure néo-classique de style géorgien, avec un fronton palladien et une rotonde à l’arrière, due à l’architecte James Hoban, également maître d’œuvre du Capitole, le bâtiment qui abrite le Congrès.

Le fronton et la rotonde sont toujours là, ornant respectivement les façades nord et sud, mais le bâtiment n’est plus l’original. Car cette première Maison Blanche fut brulée par les Anglais lors de la prise de Washington durant la guerre de 1812-1814 et le bâtiment reconstruit ensuite à l’identique.

Aujourd’hui ce que les médias appellent « la Maison Blanche » est en fait un complexe de plusieurs bâtiments qui abritent les principaux services de l’appareil exécutif américain. Le bâtiment central est appelé en anglais la « executive mansion » ou « executive residence ». C’est cette bâtisse qui abrite les appartements présidentiels – au premier étage – et les principaux bureaux de l’exécutif – au rez-de-chaussée et dans les sous-sols.

La bâtisse avec ses deux étages extérieurs et ses onze fenêtres a conservé un même aspect extérieur depuis sa reconstruction en 1817. Chaque président a effectué des aménagements mineurs et changé le mobilier, sans toucher à l’édifice.

En 1802, Thomas Jefferson fit ajouter des colonnades de chaque côté, longues allées couvertes permettant de se rendre dans des bureaux à l’extérieur, prémices des futures « aile est » et « aile ouest ».  Andrew Jackson agrémenta le fronton d’un portique majestueux et fit installer la plomberie et le chauffage en 1830. James Polk ajouta l’éclairage au gaz en 1848.  Abraham Lincoln fit construire une verrière sur le toit, malgré la guerre de Sécession en 1862. Il fit aussi installer un poste de télégraphe. En 1878 Rutherford B. Hayes fit installer le téléphone, et en 1891 Benjamin Harrison, l’électricité.

En 1882 le président Chester Arthur effectua une grande rénovation intérieure en faisant appel à l’artiste Louis Tiffany, qui fit entrer l’art nouveau et des vitraux colorés dans la demeure présidentielle.

Mais la première modification majeure du bâtiment fut l’œuvre de Théodore Roosevelt à partir de 1902. A l’aube du 20e siècle le bâtiment que Thomas Jefferson avait appelé une « agréable résidence de campagne » était devenu trop étroit pour une administration qui n’avait cessé d’étendre ses compétences et le nombre de ses employés.

Roosevelt fit donc aménager « l’aile ouest » pour y loger une partie de son administration. La presse de l’époque fut unanime pour condamner ces travaux. Roosevelt avait privé le bâtiment de « sa valeur historique », dit-elle. Sans parler de la serre qu’il fallut détruire et des plantes qu’il fallut déplacer…

L’aile ouest devint néanmoins le nouveau centre névralgique de la présidence américaine. Le président Taft y fit même aménager son bureau, de forme ovale, en 1909. Franklin Roosevelt, élu en 1932, fit déplacer le bureau ovale à l’emplacement qu’il occupe toujours aujourd’hui, le coin sud-est de l’aile, ouvrant sur la pelouse sud.

Fantasmes

En 1942,  le même  Franklin Roosevelt fit construire « l’aile est ». Toujours pour accommoder une administration de plus en plus pléthorique. Temps de guerre oblige, un bunker fut aménagé dans le sous-sol. Et sécurité nationale oblige, sa construction fut gardée secrète. Ce qui alimenta tous les fantasmes, ainsi que la colère du Congrès, vexé de ne pas être informé.

Certains des nouveaux bureaux de l’aile est furent aussi destinés à la Première Dame et son entourage. Une première dans l’histoire américaine.

Ces aménagements, ainsi qu’un aménagement des combles dans les années 1920 finirent pas imposer un stress excessif à la structure originale alors âgée de 130 ans. Les planchers du 1er étage étaient particulièrement fragiles. Le pied du piano de Madame Truman finit par passer à travers et une baignoire du premier faillit se retrouver au rez-de-chaussée. La Maison Blanche tout entière menaçait de s’écrouler. « Elle ne tient debout que par la force de l’habitude » dit un ingénieur venu inspecter son état.

Une rénovation totale fut alors ordonnée et le président Harry Truman et son épouse durent emménager dans la Blair House, habituellement réservées aux hôtes étrangers, le temps des travaux. Seule la carcasse extérieure fut conservée. Comme un décor de cinéma. Pour ne pas effrayer les Américains. La Maison Blanche fut ramenée à l’état de coquille vide. L’intérieur de la demeure fut entièrement rasé puis reconstruit à l’identique. Les travaux durèrent trois ans, jusqu’en 1951.

A l’occasion, la vieille ossature de bois fut renforcée par une structure en acier et la climatisation installée, ce qui, vue la chaleur humide et étouffante de Washington l’été, a changé la vie des employés de la Maison Blanche.

En 1960 Jacqueline Kennedy, supervisa une nouvelle rénovation intérieure, avec l’aide d’un designer français, Stéphane Boudin. Elle fut la première à piocher dans l’immense stock de mobiliers et œuvres d’art accumulés par les différents occupants au cours des décennies passées et remisés dans des entrepôts de stockage. Une fois les travaux terminés, elle invita les caméras de télévision et fit éditer un guide de la Maison Blanche dont la vente permit de rembourser une partie du coût des travaux.

Jackie Kennedy fit également planter une roseraie dans la pelouse du sud, le « rose garden ». Elle existe toujours et tient lieu de décor à certaines cérémonies et conférences de presse pendant les beaux jours. Jackie Kennedy fut la seule personne à être jamais félicitée par les médias pour ses transformations apportées à la Maison Blanche. Peut-être parce qu’elle n’était que la première dame, et non pas le président, et parce qu’elle personnifiait l’élégance et le bon goût. Son mari, le président John Kennedy, aimait nager dans la piscine aménagée dans le sous-sol. Elle datait de 1933 et avait été construite pour le président Roosevelt qui souffrait de la polio et l’utilisait à des fins thérapeutiques. Kennedy en faisait, pour sa part, un usage strictement récréatif, invitant dit-on les jeunes secrétaires de la Maison Blanche à le rejoindre dans le plus simple appareil…

Nixon fit couvrir la piscine et installa à la place la salle de presse. Toujours utilisée aujourd’hui. L’essor de la télévision et de l’information en images et en direct avaient généré une demande pour un espace dédié aux « briefings » où l’on puisse installer des caméras et une salle de presse.

Toutefois, la Maison Blanche dispose toujours d’une piscine, mais en extérieur. Elle fut construite sous Gerald Ford, à partir de donations privées et est réservée à l’usage de la famille et de leurs invités. Ford était un avide nageur. Nixon préférait jouer au bowling et en fit bâtir un au sous-sol. Barack Obama préférait le basket-ball et fit recouvrir le court de tennis pour y installer des paniers de basket…

Bill et Hillary Clinton firent à nouveau changer la décoration intérieure. Avec l’aide d’une décoratrice de l’Arkansas, l’Etat de Bill Clinton. Bill prit quelques libertés avec les lieux, faisant de l’alcôve menant au bureau ovale le lieu de ses ébats sexuels avec une jeune stagiaire, Monica Lewinski. En quittant les lieux, le couple Clinton emporta la vaisselle et l’argenterie. Ils furent rattrapés par la patrouille et durent tout restituer, ces biens étant ceux du peuple américain, et non des occupants de la Maison Blanche…

En 2003 George W. Bush, bien qu’originaire de l’Etat pétrolier du Texas, fit installer des panneaux solaires pour chauffer l’eau de la piscine extérieure et alimenter certains ateliers techniques. Dix ans plus tard Barack Obama installera des panneaux solaires directement sur le toit de la résidence principale, pour alimenter les appartements présidentiels. Quant à Michelle Obama, elle plantera un potager « bio » et installera des ruches pour produire un miel de la Maison Blanche.

Jusqu’à récemment, le seul apport de Donald Trump était des mâts de trente mètres de haut de part et d’autre du bâtiment principal pour hisser les couleurs américaines plus haut que jamais.

Scandale !

Et puis il y eut la salle de bal ! Le lieu de tous les enjeux. La pièce à l’origine du scandale. Contrairement à ce que beaucoup de médias ont affirmé ce projet n’est ni soudain, ni  nouveau. Il trotte dans la tête de Donald Trump depuis des années. Régulièrement invité à des diners à la Maison Blanche, Trump avait constaté que la Maison Blanche ne dispose pas d’un salon digne de la puissance et de la richesse des Etats-Unis. La « East Room » ne peut accueillir que deux cents personnes. Pour toute capacité supérieure, il faut dresser des tentes sur la pelouse, monter un faux parquet et installer des toilettes portatives ! Indigne de la première puissance mondiale.

En  2010, le citoyen Trump avait proposé à David Axelrod, principal conseiller de Barack Obama, de leur construire une salle de bal pour cent millions de dollars. Proposition non retenue. Lors de son premier mandat, le temps avait manqué pour lancer le projet. Cette fois et parce qu’il sait qu’il ne fera pas de « troisième mandat » (même s’il aime provoquer les démocrates sur cette question), Trump a décidé d’agir et d’agir vite.

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L’annonce officielle du projet remonte au 31 juillet dernier ! Il s’agissait d’une salle de bal venant se greffer sur l’aile-est, sans nécessiter sa démolition totale. La dimension annoncée était de 8 000 m². De quoi accommoder jusqu’à mille invités. Clark Construction, firme immobilière très reconnue de Washington, fut retenue pour le projet, contre un budget de 200 millions de dollars. En septembre ce budget fut révisé à 250 millions de dollars. Il apparut aussi que l’aile est devrait être entièrement détruite. Avec son propre argent et le soutien de donateurs privés et pour financer le projet, Donald Trump donna l’ordre de préparer le terrain, c’est-à-dire de démolir l’aile est.

En dépit de cris d’orfraies de la gauche américaine, Trump n’a rien fait d’illégal. La preuve, aucune action judiciaire n’a été engagée contre lui. Il existe bien une loi aux Etats-Unis sur la gestion des monuments historiques, mais la Maison Blanche et le Capitole ne sont pas concernés. Il existe aussi la National Historical Planning Commission (NCPC), chargée de superviser les projets fédéraux, mais ses compétences se limitent à la « construction » du nouveau bâtiment, pas à la destruction de l’ancien ! Les fonds finançant le projet étant privés, Trump n’avait besoin d’aucune autorisation du Congrès et n’a donc pas consulté les législateurs… D’autant que le gouvernement est actuellement « fermé » pour cause d’impasse budgétaire.

DR

Moralité, ayant les mains libres Trump en a profité pour agir vite. Comme à son habitude. L’aile est n’est plus et le retour en arrière n’est pas possible, sauf à la reconstruire à l’identique ce qui serait une perte totale d’argent et de temps. Trump aurait pu présenter les plans de la future salle de bal à la NCPC, mais il n’en avait pas l’obligation. Ces plans peuvent donc encore évoluer et avec eux le budget du projet. Pour l’heure, Trump a levé pas moins de 350 millions de dollars. Plus que nécessaire. Et les plus grandes entreprises américaines sont derrière lui, de Google à Microsoft en passant par Apple et Amazon ou Lockheed Martin et d’autres.

Moralité, la salle de bal verra le jour. La question est de savoir si les travaux seront finis pour fin 2028 comme le projet le prévoit. Sinon, Trump pourrait bien être tenté de rester au-delà de son mandat pour être toujours président au moment de l’inauguration de « sa » salle de bal… Que les anti-Trump se rassurent, la salle ne sera pas nommée la « salle de bal Donald J. Trump». Donald Trump a lui-même modestement suggéré « la salle de bal présidentielle ».


Ce texte a été publié sur le blog de Gerald Olivier.

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La charia fait sa loi


Depuis septembre, le Congrès américain débat d’un projet de loi ayant pour objectif d’interdire toute application éventuelle de la charia, qualifiée d’« antiaméricaine ».

Le No Sharia Act a été déposé à la Chambre des représentants par deux élus républicains. Au Sénat, un projet de loi parallèle a suivi en octobre. Outre-Atlantique, certains États ont déjà promulgué des lois similaires, mais en réalité cette législation est superflue: la Constitution interdit tout recours à des principes de loi étrangers. Il s’agit surtout d’envoyer un message à toute communauté issue de l’immigration qui soit tentée par une forme de séparatisme: n’y pensez même pas ! Ce besoin se ressent depuis la controverse entourant un projet de développement immobilier au Texas initié par une mosquée qui a été accusée de vouloir créer une zone régie par la charia. Les défenseurs du projet de loi citent l’exemple de l’Europe qu’ils considèrent comme déjà perdue. A Londres en septembre, Donald Trump avait dit des Anglais : « Ils veulent aller vers la charia ».

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Les Américains ont-ils tort ? Au mois d’août, un tribunal civil à Vienne a statué que certains principes de la charia n’étaient pas incompatibles avec la loi autrichienne. Deux hommes ayant un différend au sujet d’une propriété immobilière s’étaient engagés à respecter la décision d’un conseil arbitral mis en place par une communauté sunnite. Quand la décision a donné tort à l’un des deux en lui ordonnant de payer 320 000 euros à l’autre, le perdant a porté l’affaire devant un tribunal, maintenant que la charia était susceptible d’interprétations différentes et incompatible avec la loi autrichienne… Le tribunal lui a donné tort aussi : le principe motivant la décision du conseil ne contrevenait pas à la loi, mais le refus de l’homme de respecter le contrat qu’il avait signé l’était. Des élus de droite ont dénoncé cette conclusion comme ouvrant la porte à la création d’une société parallèle islamique.

Nous n’en sommes pas encore là, mais il se peut que la reconnaissance d’instances d’arbitrage et de médiation islamiques soit une pente glissante. 

L’amitié entre les lignes


« Je dis juste que je ne comprends pas qu’on lise de la romance. Il y a des genres bien plus intéressants à découvrir », déclare un personnage du présent ouvrage. « Chacun lit ce qui lui fait plaisir et on n’a pas à juger les autres. Chacun ses goûts, non ? », lui répond un autre. « La romance est un genre à part entière et beaucoup des classiques que tu adores en font partie, en vérité. » La seconde réponse est pleine de bon sens. La romance est un genre à part entière ; c’est vrai. Et dans ce genre, il y a du bon et du moins bon. Du pertinent, de l’intelligent, et du mièvre parfois.

Le roman de Julien Rampin, C’est pas marqué dans les livres, s’inscrit dans ce courant, sans aucun doute. Et son opus est à la fois intelligent et pertinent. Bien écrit, bien construit, il parvient à tenir le lecteur en haleine. C’est déjà beaucoup.

 « (…) aimer à s’en faire péter le cœur. » 

L’auteur nous invite à suivre pas à pas les membres d’un club de lecture d’une médiathèque de Toulouse, ville où il a grandi. Il y a là Colette, quittée par son époux après 40 ans de mariage. Elle cherche à briser la solitude qui l’étouffe et finit par rejoindre le fameux club. Il y a aussi Lucie, étudiante repliée sur elle-même que l’on sent mal dans sa peau. A leurs côtés : Sacha, un trentenaire haut de deux mètres, élégant et beau garçon, en couple avec Romuald ; Caroline et Pétronille, collègues de Pauline, bibliothécaire et animatrice du groupe, qui ne cessent de se disputer ; Mme Germaine, vieille dame sous narcoleptique qui s’endort souvent avant la fin des séances.

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Une sacrée équipe hétéroclite. Parviendront-ils à s’entendre, à communiquer, à s’apprécier ? Julien Rampin, non sans talent, entretient le suspens. Au fil des pages, au fil des échanges littéraires, les uns et les autres se confient et se comprennent mieux. Ils fraternisent. Sacha confie que tout n’est pas rose avec Romuald ; Lucie fait savoir, en larmes, que sa sœur s’est suicidée après avoir été harcelée sur les réseaux sociaux ; Mme Germaine avoue qu’elle a fait de la prison…

Vers la fin du roman, Colette s’adresse à l’assemblée en ces termes : « Ecoutez bien ce que je vous dis, les enfants. Les mots d’amour, les gestes tendres, les sourires délicats, ces effusions que l’on croit superflues, il ne faut pas les économiser. Il s’agit de les offrir par poignées, par brassées, que dis-je, par camions. L’amour, ça se dépense sans compter. A une seule personne ou à la multitude. On ne sait jamais quand il sera trop tard. Il faut aimer à s’en faire péter le coeur. »

Ça peut paraître banal, mais c’est si vrai. Vrai comme se roman qui sonne si… vrai.

C’est pas marqué dans les livres, Julien Rampin ; Charleston ; 252 pages

La dhimmitude pour les nuls

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Se demander dans quelle mesure la notion discutée de “dhimmitude” (statut social du dhimmi, en terre d’islam) deviendrait aujourd’hui en Occident un comportement pré-adapté avant même d’être un statut est une question très provocatrice, mais qui ne peut plus totalement être balayée. Analyse.


Le terme de dhimmitude a été popularisé il y a trente ans par Gisèle Littman dans un livre intitulé La chrétienté d’Orient entre djihad et dhimmitude. C’est peu dire qu’il a été critiqué, provenant d’une historienne non académique publiant parmi des spécialistes de l’islam qui, à cette époque où la Shoah s’imposait dans la mémoire de l’Occident, soulignaient en général que l’islam par contraste avait laissé une place à ses minorités et pour qui l’Andalousie du Moyen Âge était l’exemple continuellement cité d’un glorieux «vivre ensemble», une image que les historiens d’aujourd’hui ont beaucoup nuancée.

Gisèle Littman, qui avait pris le surnom de Bat Ye’or, la fille du Nil, était née en Égypte, en avait été chassée comme la totalité de la communauté juive de ce pays et suspectait que l’argument de lutte contre le sionisme, appliqué à une communauté entière, cachait en réalité une hostilité plus diffuse à l’égard du judaïsme.

Si dhimmitude sent le soufre, le terme de dhimmi est bien connu

Si Bat Ye’or forgea le mot et le concept de dhimmitude, le terme dhimmi était déjà largement employé. Il est celui dont le statut relève de la dhimma, un pacte d’alliance. Ce mot apparaît dans la neuvième sourate, dite Tawba, une des toutes dernières, à une époque où Mahomet avait assuré son pouvoir. Il est écrit dans le Coran lui-même que les dernières révélations peuvent corriger des révélations plus anciennes. C’est dire l’importance de la sourate Tawba, le repentir, techouva en hébreu. Mais, contrairement à ce qu’on en dit, le mot de dhimma n’y vise ni les juifs, ni les chrétiens, mais les «hypocrites» ces soi-disant alliés de Mahomet qui ne l’ayant pas soutenu lors d’une expédition contre les byzantins, avaient brisé le pacte qui les liait à lui.

C’est plus loin dans la même sourate, mais sans le mot dhimma, qu’apparait l’obligation pour les «gens du Livre» de verser un impôt spécifique, la jaziya, attestant le caractère dominant de l’islam sur les autres monothéismes, une mesure plus douce que l’alternative réservée aux polythéistes, la conversion ou la mort. Un siècle plus tard un calife peu connu mais s’appelant Omar et hostile aux chrétiens et aux juifs, donna le nom de dhimma à cette obligation spécifique aux non-musulmans vivant en terre d’islam, accompagnée de diverses interdictions. Il fut prétendu que c’était là un pacte de protection.

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La dhimma a été appliquée avec une rigueur variable suivant les lieux et les époques dans l’immense espace islamique. Beaucoup d’historiens soulignent que la jaziya a été souvent légère, que la protection des minorités a été réelle, notamment dans l’empire ottoman où ces communautés s’administraient elles-mêmes sur le plan civil, et que, au fond, l’impôt de la dhimma remplaçait une obligation de combattre qui n’incombait qu’aux musulmans. ll y a en fait beaucoup à dire sur cette vision irénique de la domination de l’islam, comme en témoignent les conversions forcées, les restrictions religieuses, les persécutions des Almohades ou celles des Safavides d’Iran. Bat Ye’or, qui a utilisé des sources peu exploitées avant elle, a montré une situation des minorités en terre d’islam loin d’être idyllique.

Au cours du XIXe siècle, dans une série de réformes juridiques et administratives qu’on appelle les Tanzimats, les sultans ont aboli la pratique de la dhimma dans l’empire turc, une mesure qui a théoriquement transformé les non-musulmans en citoyens comme les autres. Théoriquement….

Comme on le sait, il n’y a aujourd’hui presque plus de juifs en terres musulmanes et les représailles exercées contre les juifs iraniens à la suite de la guerre des Douze jours montrent comme leur situation est fragile. Des minorités chrétiennes ont fait et font  aujourd’hui encore l’objet de persécutions dans plusieurs pays  musulmans, dans un silence général. La revendication de la supériorité intrinsèque de l’islam sur les autres religions, est indiscutablement un des moteurs les plus faciles à activer dans l’extension de ces violences.

Dans la neuvième sourate, il est précisé que lorsque les monothéistes paieront leur impôt, ils devront le faire en état d’humiliation. Le terme utilisé est ṣāghirūn. Beaucoup de ce que représente la dhimma provient de l’interprétation de ce mot. L’adjectif saghir, très courant, renvoie au champ sémantique de la petitesse. La plupart des exégètes musulmans d’aujourd’hui, y compris Qaradawi ou la mosquée el-Azhar écrivent que la dhimma, originellement liée à la rupture du pacte d’alliance par les hypocrites, fait référence à une situation de guerre qui était celle de l’islam des origines et n’a plus lieu d’être aujourd’hui. 

Ambiguïté

Mais il y a une ambiguïté à ce sujet: ce qui fut la dhimma dans l’histoire provient d’une situation différente, celle de domination qui fut pendant de nombreux siècles celle de l’islam par rapport à ses minorités, qui l’est encore dans certains endroits du monde et que certains islamistes rêvent de rétablir. Une telle situation laisse des traces dans les mentalités. Après la disparition officielle de la dhimma dans l’empire turc, il y eut beaucoup de réactions de mécontentement qui furent reprises et amplifiées par les réformateurs religieux du XXe siècle tels Rashid Rida puis son disciple Hassan el-Banna, créateur des Frères Musulmans.

La mise en cause d’un sentiment de supériorité considéré comme naturel et légitime est très difficile à accepter et est souvent vécue elle-même comme une humiliation, alors que dans le livre sacré, c’est le privilège du musulman que d’infliger une humiliation à autrui. Quand s’y ajoutent le succès de celui qui devrait être un inférieur et plus encore la défaite au combat face à lui, le ressentiment devient très fort. 

Ces réactions émotionnelles, qui ne se limitent d’ailleurs nullement à l’islam, laissent peu de traces dans les archives. Elles jouent un grand rôle dans l’histoire des hommes.

Quant à la dhimmitude, état de résignation devant une situation qu’on ne pouvait pas modifier, ce fut longtemps le lot des populations juives en terre chrétienne comme en terre d’islam. Cette résignation était une stratégie de survie efficace mais elle se payait par l’humiliation intériorisée. Le sionisme fut en quelque sorte une révolte contre la dhimmitude en milieu chrétien. Cette révolte fut réussie et rares sont les juifs qui voudraient revenir à l’état antérieur. Quant à l’attitude de soumission résignée que l’on peut voir ici et là dans un monde d’origine chrétienne essayant de ne pas voir la guerre qui lui est menée, je ne suis pas surpris que le terme de dhimmitude lui soit souvent attribué, même si les explications en sont évidemment bien plus complexes…

Au temps de l’abondance agricole

L’exécutif français a une fâcheuse tendance à mettre sur le dos de la crise environnementale les difficultés de nos agriculteurs… Opportuniste! Démonstration.


En juin, à la Conférence sur l’océan, à Nice, Emmanuel Macron déclarait : « On est au pire moment ! On a une crise qui est cinq crises en même temps : biodiversité, eau, alimentation, santé, changement climatique ». Le président reprenait ainsi le refrain de la crise environnementale.

Pourtant, si crise il y avait vraiment, nos conditions d’existence et, en particulier, nos ressources alimentaires devraient déjà se détériorer. Or, selon les données les plus récentes du Département de l’Agriculture des États-Unis (USDA), l’année 2025 devrait être une année de records pour les récoltes mondiales. Le maïs et le blé connaissent une hausse spectaculaire, le soja atteint également un niveau inédit, tandis que le riz se maintient à son maximum historique. Même les rendements, c’est-à-dire les quantités produites par hectare cultivé, grimpent eux aussi à des sommets pour ces grandes cultures. Autrement dit : nous produisons toujours plus, avec relativement moins de terres. D’autres productions suivent la même tendance : colza, huile de palme ou café sont aussi promis à des récoltes record. Bien sûr, certains produits connaissent des fluctuations annuelles, comme le coton ou le sucre. Et certaines cultures négligées, telles que le sorgho et le millet, stagnent.

Mais l’image d’ensemble est claire : malgré le réchauffement climatique, malgré la baisse de la biodiversité, malgré la prétendue détérioration de la qualité des sols, la production agricole mondiale continue de croître. Cette bonne nouvelle ne signifie pas qu’il n’y ait aucune raison de s’inquiéter. En particulier, le changement climatique représente une menace sérieuse pour l’agriculture. Mais comme cette production agricole en témoigne, il est faux d’affirmer que la crise est déjà là. Certes, les agriculteurs français peuvent être confrontés à des difficultés. Mais, au regard des bons résultats de la production mondiale, les responsables politiques ont beau jeu d’en attribuer la responsabilité à la situation environnementale plutôt qu’aux contraintes qu’eux-mêmes leur imposent.

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Internet, nouveau bouc émissaire d’Emmanuel Macron

Dans l’affaire du cyberharcèlement de Brigitte Macron, de trois à douze mois de prison avec sursis ont été requis contre les accusés. Pendant ce temps, son président de mari réunissait 200 experts des réseaux sociaux pour mener la contre-offensive. Lors d’une conférence consacrée à « la démocratie à l’épreuve des réseaux », il leur a adressé: « J’ai besoin de vous », estimant que « ce qui se joue avec les algorithmes, c’est l’émergence d’un nouveau pouvoir, à côté de l’exécutif, du législatif et du judiciaire, qui lui n’a pas encore de contrepouvoirs… »


La rumeur sur Brigitte Macron incite son mari à s’en prendre aux réseaux sociaux. Or le président commet une erreur d’analyse : il est lui-même, par sa parole démonétisée, la cause première de la cabale. Hier, le procureur de la République a requis, devant le tribunal correctionnel de Paris, des peines de prison avec sursis contre dix cyberharceleurs poursuivis pour avoir mis en doute le sexe de l’épouse du chef de l’État. Le même jour, Emmanuel Macron a lancé un débat sur l’impact des réseaux sociaux et d’internet sur la démocratie. Au prétexte de « créer les conditions d’un débat éclairé et apaisé », l’Élysée poursuit son idée fixe visant à mettre sous surveillance ce lieu indomptable et impertinent qu’est devenu le numérique et ses forums. La simultanéité des deux événements fait comprendre que le président cherche à instrumentaliser la fake news, relayée sur Twitter, qui assure que la « première dame » serait un homme ayant effectué une transition de genre. Ce faisant, Macron aggrave la défiance publique vis-à vis du discours officiel. Le pouvoir, en se retranchant derrière son récit émaillé de propagandes et de dénis, alimente les suspicions sur les vérités officielles. La crise sanitaire, qui a conduit l’État à imposer des slogans inexacts sur les vaccins (« Tous vaccinés, tous protégés ») a accentué la défiance entre le pouvoir et la société civile. Les aveuglements sur l’immigration de masse et l’insécurité produisent les mêmes doutes sur la bonne foi du pouvoir. L’obsession de Macron à réguler l’internet s’intensifie à mesure que son règne est contesté. La dérive liberticide du régime explique les outrages vengeurs que subit Brigitte Macron, à qui est reproché également une relation ambiguë avec l’élève de 15 ans, son futur époux, alors qu’elle en avait 39.

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La fable urbaine d’une substitution d’identité entre Jean-Michel Trogneux et Brigitte Macron aurait dû rester dans le répertoire des libelles ou des blagues bêtes et méchantes. Hier, Tiphaine Auzière est venue dire devant le tribunal combien sa mère souffrait de cette malveillance. Ce poison a trouvé de surcroit un accélérateur aux États-Unis à cause de l’influenceuse Candace Owens, irrationnellement déchaînée dans son obsession à nuire à l’épouse du président français. Cependant, s’il est une question que devrait se poser Macron, c’est de savoir pourquoi il projette sur son entourage intime autant de malveillances, qui trouvent un écho auprès d’une partie de l’opinion.

« L’ affaire Trogneux » doit être comprise comme le symptôme d’une opinion qui, à force de s’être laissée abusée par trop de mensonges d’État, ne croit plus ce qu’on lui dit. Au point de prendre les démentis officiels pour des aveux. Dans Génie du christianisme, Chateaubriand a écrit : «  Un gouvernement pervers introduit le vice chez les peuples, comme un gouvernement sage fait fructifier la vertu ». C’est cette corruption des esprits qui s’observe, au détriment d’une femme profondément meurtrie par ses harceleurs. Mais le vrai coupable est à l’Élysée.

Gérald Darmanin à l’École des sorciers…

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Gérald Darmanin était face à des élèves de l’École nationale de la magistrature ce vendredi. Les magistrats doivent davantage ressembler au peuple français et surtout faire leur aggiornamento, sinon cela finira mal pour « l’État de droit », a prévenu le garde des Sceaux.


Le garde des Sceaux s’est rendu à Bordeaux pour rencontrer les élèves magistrats de l’École nationale de la magistrature et leur annoncer les changements qu’il envisageait. Il a également dialogué avec une soixantaine d’enseignants et confirmé dans ses fonctions de directrice Nathalie Roret.

Il faut que jeunesse se passe…

La promotion « État de droit » était mobilisée. Mais, sur les 468 auditeurs de justice, seuls 250 étaient présents dans l’amphithéâtre.

Est-il permis de s’étonner du choix d’« État de droit » comme dénomination, alors que sa contestation, dans le climat actuel, n’est pas illégitime et qu’il aurait été plus fort, symboliquement, d’arbitrer en faveur d’une incarnation exemplaire, ou même d’une victime à laquelle on aurait rendu hommage ?

Avant d’en venir à la teneur des propos du ministre, j’avoue ma surprise devant la manière infantilisante dont ont été prévues et programmées les questions adressées à Gérald Darmanin. Comme si l’on n’avait pas pu, tout simplement, laisser les auditeurs formuler librement leurs interrogations – en espérant, pour toutes, une forme maîtrisée.

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Le comble du ridicule a été atteint avec « un petit happening » au cours duquel deux auditrices et un auditeur ont proféré trois banalités vaguement contestataires, évidemment applaudies à tout rompre.

Le garde des Sceaux envisage pour l’ENM – il a rappelé que tous les futurs candidats à l’élection présidentielle souhaitaient sa disparition – « une réforme en profondeur du concours et du recrutement, l’introduction de modules d’enseignement consacrés au monde économique et financier, à la connaissance des rouages administratifs et étatiques, des cours de management, mais aussi l’obligation de mobilité des magistrats ».

Ce n’est pas sur ce plan que je discuterai le propos, au demeurant revigorant, de Gérald Darmanin : on garde l’ENM, mais on la réforme. Je suggérerais volontiers que la culture générale – classique et contemporaine – ne fût pas oubliée !

En revanche, si j’admets que « si l’on ne change pas quelque chose, cela va mal se passer avec une population qui ne se sent pas représentée », je suis beaucoup plus réservé, non sur « l’ouverture méritocratique », mais sur l’idée « d’une magistrature qui doit changer et ressembler à ceux qu’elle juge, pour retrouver la confiance des justiciables ».

La justice et les démagogues

Je crains que cette aspiration, destinée à plaire immédiatement à une majorité de citoyens, ne soit un zeste démagogique. Car la difficulté réside dans le fait que rêver d’une magistrature plus conforme à la composition sociologique de notre pays est une chose, mais vouloir « qu’elle ressemble à ceux qu’elle juge » en est une autre.

En effet, je crois que la magistrature a trop souvent cultivé, dans ses apparences, dans ses pratiques, dans ses rapports avec autrui et dans sa volonté de mimétisme social, politique et syndical, l’obsession de se rapprocher des comportements ordinaires, pour qu’on puisse, sans danger, pousser encore plus loin la dilution de la Justice dans le commun.

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Que la diversification du corps s’amplifie et s’enrichisse, soit ; mais rien ne serait pire que l’abolition de la distance, de la tenue, de cette légitimité et de cette autorité qui, dans les temps de crise que nous vivons, constituent le moyen le plus radical de perdre l’estime des citoyens et le respect des politiques. Profondément, la magistrature peut avoir des origines multiples, mais pour rien au monde le magistrat ne doit être comme tout le monde : sinon, il perd tout crédit pour juger. Cet écart nécessaire, c’est sa force et son honneur. Le faire « ressembler à ceux qu’il juge », ce serait aggraver gravement son déclin. Et ce serait la banalisation d’une institution qui ne se remet pas d’avoir été, et de ne plus être, ou médiocrement.

Alors que rien n’est irréversible et que tout est ouvert pour 2027.

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Le général de Gaulle à Damas

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Pendant la Seconde Guerre mondiale, le général de Gaulle proclamait l’indépendance de la Syrie. Même si l’influence française est encore perceptible dans la Syrie d’aujourd’hui, Emmanuel Macron ne doit pas brûler les étapes avec Ahmed al-Charaa, le nouvel homme fort de Damas.


Alors que la Syrie vit aujourd’hui sous le régime d’Abou Mohammed Al-Julani, après la chute des Assad en 2024, la question de sa souveraineté reste posée. Le régime Assad, soumis depuis 1979 à l’influence iranienne, était devenu un relais de Téhéran, dépendance accentuée après 2011. Celui d’Al-Julani s’appuie désormais sur les puissances sunnites, dont l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar et la Turquie, déplaçant la tutelle étrangère de l’axe chiite vers l’axe sunnite.

Voyage oublié

Dans ce jeu de dépendances régionales, la France ne peut rester spectatrice. Un siècle plus tôt, elle façonna la Syrie moderne et négocia son indépendance sous Léon Blum, restée sans effet faute de ratification. En 1941, le général de Gaulle proclama cette indépendance à Damas après la victoire des Forces françaises libres sur les troupes vichystes et nazies. Le départ du dernier soldat français en 1946 scella cette transition, consacrant la Syrie comme un État souverain et démocratique, paradoxe face à la réalité actuelle. Ce voyage de De Gaulle, souvent oublié, fut une tentative de conjuguer puissance et liberté sur le Levant.

À la suite de la libération de la Syrie et du Liban, intervenue en juin-juillet 1941 à l’issue de l’offensive des forces franco-britanniques contre les autorités vichystes, soutenues par l’Allemagne nazie, le général de Gaulle se rendit à Damas afin d’y affirmer la légitimité de la France libre. Cette opération fut conduite avec l’appui de contingents issus de l’Empire britannique — notamment indiens, canadiens et australiens — ainsi que de combattants judéo-arabes engagés aux côtés des Alliés.

Winston Churchill déclara : « We must not lose Syria. »

À cette époque, la Syrie et le Liban étaient tombés sous le contrôle des autorités vichystes, alliées objectives de l’Allemagne nazie. La France était occupée, et l’Empire britannique faisait face à de vives difficultés au Proche-Orient. En Iran, le chah Reza Pahlavi manifestait des sympathies à l’égard du régime hitlérien ; en Irak, le coup d’État de Rachid Ali al-Gillani avait renversé la monarchie hachémite pour établir un gouvernement favorable à l’Axe ; et en Égypte, le roi Farouk était soupçonné de maintenir des communications discrètes avec l’Italie fasciste de Mussolini.

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La Palestine mandataire demeura fidèle aux Alliés durant la Seconde Guerre mondiale, devenant ainsi un point d’appui stratégique pour le lancement des opérations de libération de la Syrie et du Liban. Toutefois, l’élite arabe du Proche-Orient était profondément divisée. Certaines figures influentes, telles que Moustafa el-Nahhas, Badia Masabni ou Taj al-Din al-Hassani, apportèrent un soutien clair aux puissances alliées. D’autres, en revanche, s’alignèrent ouvertement ou de manière plus discrète sur les forces de l’Axe, à l’image de Reza Pahlavi en Iran, du mufti de Jérusalem Amine al-Husseini, ou encore de Rachid Ali al-Gillani en Irak.

Enfin, la Syrie est libérée. Le général de Gaulle y fait son entrée et proclame l’indépendance du pays, mettant ainsi fin à ce que l’on appelait autrefois « la Syrie française » — territoire du mandat, également désigné sous les appellations de Syrie mandataire ou République syrienne sous mandat.

La France entra en Syrie en 1920, à la suite de la bataille de Mayssaloun, qui opposa les troupes du ministre de la Guerre Youssef al-Azma aux forces françaises métropolitaines, sénégalaises et marocaines, placées sous le commandement du général Henri Gouraud. En Syrie, depuis l’entrée de Lawrence d’Arabie à Damas en 1918, le prince Fayçal s’était proclamé roi du royaume arabe de Syrie. Toutefois, le gouvernement français, dirigé par Raymond Poincaré, refusa de reconnaître cette monarchie naissante lors de la Conférence de la paix à Paris.

Le président Raymond Poincaré avait donné des assurances au chef de l’Église maronite, Élias Pierre Hoyek, en faveur de la création d’un Grand Liban. Par la suite, le général Henri Gouraud, nommé premier haut-commissaire de la République française au Levant, procéda à la fondation de l’État du Grand Liban en 1920. Dans une logique de division administrative du territoire syrien sous mandat, il établit également d’autres entités politiques : l’État d’Alep, l’État de Damas, l’État des Druzes et l’État des Alaouites.

La France établit ensuite l’Union syrienne, en regroupant l’État d’Alep, l’État de Damas, l’État des Alaouites et l’État des Druzes sous une entité administrative unifiée. Sobhi Barakat en fut nommé président, et la ville d’Alep fut choisie comme capitale de cette union. Les territoires de la Syrie actuelle correspondent, dans leur grande majorité, à ceux qui composaient l’Union syrienne établie sous mandat français.

Le passage chaotique du général Sarrail

Des tensions ont existé entre les autorités françaises et les populations syriennes et libanaises ; cependant, plusieurs hauts responsables militaires s’efforcèrent d’établir de bonnes relations avec la société civile ainsi qu’avec les autorités religieuses, tant chrétiennes que musulmanes, ce qui permit d’atténuer en partie les conflits. Cette relative accalmie fut toutefois remise en question avec la nomination du général Maurice Sarrail au poste de haut-commissaire de la République française. Ce dernier, connu pour ses positions ultra-laïques et son attachement au jacobinisme républicain, heurta les sensibilités locales et raviva les tensions.

Le général Maurice Sarrail laissa derrière lui un passage chaotique, marqué par de graves tensions et des conséquences tragiques. Abordant les réalités religieuses locales avec le prisme d’un laïcisme rigide hérité du contexte français, il heurta profondément les sensibilités des autorités spirituelles, tant musulmanes que chrétiennes. La révolte éclata d’abord dans le Jebel druze, avant de s’étendre au-delà du sud et d’embraser une partie du territoire syrien. Damas fut durement touchée, subissant des bombardements qui provoquèrent l’émoi au Levant comme en métropole. Les tensions et polémiques parvinrent jusqu’à Paris, où certains responsables politiques allèrent jusqu’à réclamer le retrait immédiat de l’armée française. Le gouvernement du président Gaston Doumergue refusa cependant d’abandonner la Syrie et le Liban au chaos. Il prit néanmoins la décision de limoger le général Sarrail, afin de calmer les esprits et de restaurer une forme de stabilité dans la région.

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La France décida de fonder la République syrienne en collaborant avec plusieurs intellectuels et notables syriens. Des figures politiques et culturelles issues de diverses confessions, telles que Saïd Ghazzi (musulman sunnite), Fares Khoury (chrétien orthodoxe) et Ibrahim Hanano (d’origine kurde), furent chargées de rédiger la première Constitution de la République syrienne. Ce texte remarquable, d’une qualité juridique et démocratique largement supérieure à celles imposées plus tard sous les régimes des Assad et de Jolani, affirmait avec force les principes de souveraineté, de pluralisme et d’indépendance nationale.

Le haut-commissaire français, Henri de Jouvenel, tenta toutefois d’y insérer une clause conférant au poste de haut-commissaire une autorité supra-constitutionnelle. Cette exigence fut catégoriquement rejetée par les représentants syriens. En réaction, et afin de contourner ce refus, Henri de Jouvenel fit adopter la Constitution par décret.

Une influence française encore perceptible aujourd’hui

Léon Blum accède au pouvoir en 1936 et engage les négociations en vue de l’indépendance de la Syrie. Une délégation syrienne se rend à Paris pour entamer un long processus diplomatique qui durera six mois. Un accord est finalement trouvé, mais le gouvernement du Front populaire ne parvient pas à le faire ratifier par le Parlement français. Le texte demeure ainsi lettre morte, relégué aux archives. Ce sera finalement la légitimité révolutionnaire de la France libre et de la Résistance qui permettra au général de Gaulle de proclamer l’indépendance de la Syrie.

De 1941 à 1946, la France demeura présente en Syrie, bien que dans une position affaiblie, ne conservant son influence que grâce au soutien britannique, notamment celui de Winston Churchill. Finalement, elle se résolut à retirer ses troupes et quitta définitivement la Syrie et le Liban en 1946.

Pourtant, l’influence française demeure perceptible jusqu’à aujourd’hui. De nombreux mots français ont été intégrés au dialecte syro-libanais, tels que bougie, toutou, marmiton, avance, en arrière, vase, etc. Par ailleurs, la France a longtemps constitué un refuge pour les intellectuels syriens fuyant les dictatures baasistes et nasséristes. Les diplômés des universités françaises ont figuré parmi les cadres les plus éminents de l’enseignement supérieur syrien. Leur formation, reconnue pour sa rigueur et sa qualité académique, tranchait nettement avec celle de certaines vagues de professeurs formés dans les pays du bloc soviétique, où l’encadrement pédagogique se révélait souvent insuffisant.

Plus de quatre-vingts ans après que le général de Gaulle proclama l’indépendance de la Syrie, la France semble avoir perdu le fil de son rôle au Levant. Héritière d’une influence ancienne, elle pourrait pourtant redevenir une puissance d’équilibre, fidèle à l’esprit des Lumières et à l’idéal d’émancipation qui guida jadis son action. Encore faut-il qu’elle dépasse les ambiguïtés d’une diplomatie hésitante, illustrées par l’accueil précipité d’Emmanuel Macron à Abou Mohammed Al-Julani en mai 2025, suivi d’une rencontre à New York en septembre, peu après son arrivée au pouvoir et les massacres perpétrés sur la côte syrienne.

Une telle hâte tranche avec la prudence de Pompidou, Giscard d’Estaing et Mitterrand, qui avaient attendu avant de tendre la main à Hafez Al-Assad, notamment après les massacres de Hama. Pour la France, meurtrie par le terrorisme islamiste mais toujours porteuse d’un idéal universel, renouer avec la Syrie ne peut se limiter à un symbole : il s’agit de retrouver le sens d’une politique orientale fidèle à son histoire et à sa vocation.

Vérité en deçà du Rhin, erreur au-delà

En affirmant que les migrants demeurent « un problème dans le paysage urbain », le chancelier allemand Friedrich Merz provoque un tollé.


Je ne croyais pas prononcer cette phrase un jour mais oui quelle chance d’être Allemand ! Je ne dis pas ça par goût immodéré des saucisses, des BMW ou des marécages philosophiques, mais parce que le chancelier Merz manifeste une liberté de pensée et de parole inconnue chez nos dirigeants.

Le 14 octobre, interrogé sur les migrants, il parle d’un problème non résolu dans le paysage urbain. Derrière cette traduction littérale donnée par la presse française, il vise à l’évidence la délinquance et l’insécurité de rue. Une semaine plus tard, alors qu’on lui demande de s’expliquer, il met les pieds dans le plat: « Demandez à vos filles, elles vous diront qui leur cause des problèmes le soir ». Tollé, les belles âmes manifestent devant le siège de la CDU, hurlent à l’afdisation des esprits, la gauche du parti se bouche le nez. Merz précise qu’il parlait seulement des migrants délinquants en situation irrégulière. De toute façon les Allemands l’ont compris. 64% l’approuvent.

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Pourquoi suis-je jalouse ? Si Sébastien Lecornu prononçait cette phrase, il serait immédiatement traîné devant les tribunaux. Nos dirigeants et nos élus rivalisent dans la soumission au politiquement correct et dans le déni. Pas seulement par peur du bad buzz ou par envie d’être félicité par Le Monde, mais parce qu’une grande partie de nos élites pense vraiment que s’inquiéter de l’immigration ou la refuser est un signe d’étroitesse d’esprit voire de racisme.

Donc, contrairement à Merz, nos gouvernants ne voient toujours pas ce qu’ils voient :

  • Que l’islamisme qui a tué en janvier et en novembre 2015 se déploie encore sur tout le territoire depuis 10 ans ;
  • Que les émeutes de 2005, dont on célèbre les 20 ans, n’ont pas été engendrées par la relégation sociale mais par le séparatisme ethnico-religieux. Ils expliquent d’ailleurs encore que le problème ce sont les subventions trop modestes dans les banlieues ;
  • Que l’antisémitisme et la délinquance sont très largement nourris par l’immigration et par une partie de sa descendance ;
  • Que la majorité des agressions sexuelles de voie publique sont commises par des jeunes hommes venus de cultures qui enferment, bâchent ou voilent les femmes et qui considèrent donc qu’une femme libre est à prendre. Non, nos belles âmes préfèrent parler du « patriarcat ».

Alors oui, que toutes ces grandes consciences demandent à leurs filles de quoi et de qui elles ont peur le soir. Mais, beaucoup sont tellement aveuglées par leurs bons sentiments et leurs ambitions politiques qu’elles n’entendent déjà pas leurs électeurs. Je ne suis pas sûre qu’elles écoutent leurs enfants.

Cette chronique a été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez notre directrice de la rédaction dans la matinale.

«Cent tribalistes auront toujours raison de mille individualistes»

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Avec les 20 ans des émeutes urbaines déclenchées par la mort de Zyed et Bouna, on reparle des fameux « territoires perdus ». La France n’est plus minée seulement par l’islamisme, mais par le tribalisme solidaire – cette loyauté clanique, héritée des sociétés sans État, qui structure désormais nombre de quartiers, estime cette tribune. Sous couvert de paix sociale et de discours antiracistes, le pouvoir s’y soumet comme un dhimmi payant la djiziah à ses émirs locaux… Le résultat ? Un «Républi-clanisme», où la loi du groupe remplace celle de la République. Une analyse de David Duquesne, auteur de Ne fais pas ton Français (Grasset).


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Le tribalisme solidaire : la force obscure des sociétés sans État

Dans Ne fais pas ton Français, j’évoque ce que j’ai appelé l’ivresse du tribalisme solidaire. Cette fraternité communautaire viscérale lie les membres d’un même clan au détriment du droit, de la vérité et de la justice. Un vieux proverbe arabe en résume la logique :
« Moi contre mon frère, mon frère et moi contre mon cousin, mon cousin, mon frère et moi contre l’étranger. »

Ce réflexe n’est pas un vestige anthropologique : il structure encore la sociologie de certains territoires français.

Je l’ai vu de mes yeux à Sallaumines, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, à la fin des années 1980.

Un homme ivre, sans défense, fut lynché par une dizaine de jeunes, tous d’origine maghrébine, sous le regard passif de la foule.

L’un d’eux me lança fièrement : « C’est ça, la solidarité musulmane. » Cette phrase m’a vacciné contre la naïveté. J’avais sous les yeux le cœur du problème : une solidarité de clan, capable du meilleur – l’entraide, la chaleur, la loyauté – mais aussi du pire : la justification de la violence collective, la négation du juste.

Des tribus du Maghreb aux quartiers perdus de la République

Ce que j’ai observé à Sallaumines n’était pas un hasard, mais la réactivation d’un vieux schéma culturel importé des sociétés maghrébines.

Là-bas, la structure clanique – la hamula – repose sur un principe de solidarité absolue : l’agression d’un membre est vécue comme une attaque contre tout le groupe.

Ce système fit la force des conquérants arabes et berbères d’Al-Andalus, mais aussi la cause de leurs divisions internes.

Or, dans une société d’État centralisé comme la France, ce modèle devient explosif : il fragmente l’espace civique et substitue à la loi républicaine la loi du groupe.

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Partout où l’État recule, le clan avance.

Là où la police ne va plus, les caïds deviennent les chefs de guerre, s’appuyant sur le même mécanisme de loyauté tribale : ne jamais livrer un membre de la communauté à une autorité extérieure.

C’est ce ciment invisible qui explique la puissance des caïds, des islamistes et des indigénistes : ils exploitent la solidarité primaire d’un groupe refermé sur lui-même.

De la solidarité à la domination : le caïd comme figure centrale

Dans la culture arabo-musulmane, le caïd n’est pas un voyou au sens français, mais un meneur d’hommes, un chef respecté, capable d’assurer la sécurité et la prospérité du clan par la force. Son autorité repose sur la domination, non sur le droit. Battre un policier, humilier un professeur ou insulter un représentant de l’État n’est pas vu comme un crime, mais comme une victoire symbolique sur la puissance étrangère. Ainsi se maintient une hiérarchie parallèle : celle du pouvoir clanique, fondé sur la peur et la fierté, qui se substitue au pouvoir légitime de l’État.

Cette logique s’étend désormais aux territoires perdus de la République, où règnent des équilibres tacites, des « pactes de non-agression » entre élus locaux et chefs de quartiers. On achète la paix sociale avec des subventions, comme les dhimmis d’autrefois payaient la djiziah, l’impôt de capitation, aux émirs andalous pour ne pas être massacrés.

La soumission a simplement changé de forme : elle est devenue budgétaire, clientéliste et idéologique.

L’aveuglement des élites : l’éléphant dans la pièce

Le tribalisme solidaire est l’angle mort des sciences sociales françaises. On parle de pauvreté, de chômage, de racisme systémique, mais jamais du facteur culturel, car il heurte la doxa universaliste et met en péril la narration victimaire.

Résultat : la gauche postcoloniale, les universitaires indigénistes et une partie de la droite technocratique s’accordent sur un même mensonge confortable : celui d’un État oppresseur face à des victimes structurelles. Ce déni n’est pas seulement moral, il est mortel pour la nation. Car tant que la République refusera de nommer le tribalisme, elle nourrira le monstre – un monstre qui ne se bat pas pour des idées, mais pour le butin, le territoire et l’honneur du clan.

Al Françalus, ou la République en trompe-l’œil

La France a désormais son Al Françalus : un territoire de coexistence illusoire, un califat Potemkine bâti sur le déni et la culpabilité. Les façades restent républicaines, les institutions fonctionnent encore, les discours sont truffés de références à la fraternité, à la laïcité, à l’égalité. Mais derrière ce décor, la réalité se délite. Les mêmes mots recouvrent d’autres sens : la fraternité devient communautarisme, la tolérance devient capitulation, et la laïcité devient neutralisation de la France elle-même.

Le Républi-clanisme, c’est cela : une République vidée de sa substance, infiltrée par les logiques tribales qu’elle ne comprend plus et qu’elle n’ose plus combattre.

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Les élus locaux pactisent avec les seigneurs du quartier, les associations communautaires se substituent aux institutions, et la peur s’installe dans le quotidien des citoyens ordinaires, devenus étrangers chez eux.

On assiste à un phénomène paradoxal : la France n’est plus coloniale, elle est recolonisée. Non par la force d’une armée, mais par l’idéologie, la démographie et la lâcheté. Les anciens colonisés ont importé leurs structures claniques, leurs réflexes d’allégeance, leur vision hiérarchisée du monde. Et l’État, rongé par la culpabilité postcoloniale, s’interdit d’y opposer sa propre verticalité. Il abdique son rôle de souverain, se réduit à une ONG qui distribue la paix sociale à crédit. Cette démission ouvre un espace où prospèrent les caïds, les islamistes et les militants indigénistes, qui jouent chacun leur partition dans la même symphonie : celle du tribalisme triomphant. Les uns dominent par la violence, les autres par la foi, les derniers par le discours victimaire. Le résultat est identique : la République s’efface, le clan règne.

La France, en somme, n’est plus un État-nation : elle devient une mosaïque de tribus, où la force du groupe l’emporte sur la loi commune. Une Al Françalus à visage démocratique, où les dhimmis d’aujourd’hui s’appellent contribuables, fonctionnaires, professeurs, policiers. Ils paient la djiziah moderne : impôts, subventions, silences et excuses. Tout cela pour ne pas être massacrés symboliquement, pour éviter d’être traités de racistes, d’islamophobes ou d’extrémistes.

Revenir au réel, ou Seinesaintdeniser tout le pays

Le choc viendra si la France ose regarder le réel en face, si elle se rappelle qu’elle n’est pas une idée mais une civilisation.

La chute, en revanche, se produira si elle continue de se raconter qu’il suffit de “vivre-ensemble” pour que la guerre des clans s’éteigne d’elle-même.

Mais si l’on fait enfin le bon diagnostic, alors il faut en tirer des conséquences concrètes.

Il faut revoir la politique migratoire, non par haine mais par lucidité, pour ne pas reproduire sur le sol français les structures claniques des pays d’origine. Et il faut repenser la politique du logement, afin de rompre avec les logiques de concentration ethnico-culturelle qui servent d’incubateurs à ces normes socioculturelles. En continuant à regrouper, par “solidarité”, ceux qu’il faudrait mêler à la cité commune, on organise la sécession du pays réel. La France ne peut pas rester une mosaïque de “douars urbains” subventionnés, où le vivre-ensemble se transforme en vivre-à-part. Si nous persistons dans cette voie, nous Seinesaintdeniserons tout le pays — et ce mot-là dit bien ce qu’il veut dire : transformer la nation entière en un territoire morcelé, où la loi du clan se substitue à la loi commune.

Nous aurons alors cru la sauver par la tolérance pendant que nous l’étranglions par le mensonge. La chroniqueuse Sabrina Medjebeur l’a bien vu : il ne s’agit plus d’un problème de coexistence, mais de survie politique et morale. Il faudra une génération de Français décidés à reconstruire la cité, non sur la peur ou la repentance, mais sur la vérité nue du réel. Car comme le disait Lacordaire : « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit. »

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Trump sort sa pioche et démolit tout… sauf les fake news

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Washington, 23 octobre 2025 © Andrew Leyden/ZUMA/SIPA

Aile Est de la Maison Blanche: et Trump conduit le bal…


Si vous ne suivez l’information que d’un œil et d’une oreille, vous avez peut-être vu et entendu ces derniers jours une nouvelle proprement effrayante concernant les Etats-Unis: « Donald Trump est en train de détruire la Maison Blanche » !

Ah, quel boulet !

Jay Scarborough le présentateur matinal de MSNBC a dénoncé une « destruction grotesque »! Les présentatrices de l’émission « The View » sur ABC (une table ronde quotidienne exclusivement féminine) ont hurlé de colère : « Il n’a pas le droit de la détruire ce n’est pas sa maison, c’est la maison du peuple ». Hillary Clinton, une autre femme féministe, a dit exactement la même chose sur X « ce n’est pas sa maison, c’est la vôtre et il est en train de la détruire. » Et le très sérieux New York Times s’est lamenté que Trump ait utilisé un « boulet de démolition contre la Maison Blanche».

Qu’on se rassure, la Maison Blanche est toujours debout ! Ces informations étaient erronées. C’étaient encore des fausses nouvelles (« fake news ») vendues par la clique de journalistes américains qui détestent Trump et détournent les faits – ou racontent carrément n’importe quoi – depuis dix ans, avec l’espoir de monter l’opinion publique contre lui. Espoir totalement vain, cela dit au passage. Tout au plus, ces journalistes ont-ils réussi à tuer leur propre crédibilité et à provoquer une crise de confiance sans précédent envers les médias « officiels »…

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Trump n’est pas en train de détruire la Maison Blanche et n’a aucune intention de le faire. Au contraire il vient d’y engager un projet de rénovation majeur : la construction d’une grande salle de bal (8 000 m²) en place et lieu de l’actuelle « aile est ». Les travaux d’excavation ont commencé avec inévitablement la démolition d’une partie de la structure actuelle… D’où les élucubrations de la gauche américaine. Imaginez qu’en 1985,  Le Monde ait accusé François Mitterrand de « détruire le Louvre » lorsque les travaux de la future pyramide ont commencé dans la Cour Carrée !

Au-delà de la fausse polémique, le projet mérite quelques éclaircissements, ne serait-ce que pour rappeler que de nombreux présidents avant Trump ont laissé leur marque sur cette demeure, et ont en général été vivement critiqués par leurs contemporains pour cela.

Trop étroit pour Théodore Roosevelt

La Maison Blanche est le lieu de vie et de travail du président des Etats-Unis. Elle sert aux réceptions protocolaires. Elle est aussi ouverte au public et reçoit un demi-million de visiteurs chaque année. Elle fut construite à partir de 1792 sur un site choisi par le président Washington. C’est une demeure néo-classique de style géorgien, avec un fronton palladien et une rotonde à l’arrière, due à l’architecte James Hoban, également maître d’œuvre du Capitole, le bâtiment qui abrite le Congrès.

Le fronton et la rotonde sont toujours là, ornant respectivement les façades nord et sud, mais le bâtiment n’est plus l’original. Car cette première Maison Blanche fut brulée par les Anglais lors de la prise de Washington durant la guerre de 1812-1814 et le bâtiment reconstruit ensuite à l’identique.

Aujourd’hui ce que les médias appellent « la Maison Blanche » est en fait un complexe de plusieurs bâtiments qui abritent les principaux services de l’appareil exécutif américain. Le bâtiment central est appelé en anglais la « executive mansion » ou « executive residence ». C’est cette bâtisse qui abrite les appartements présidentiels – au premier étage – et les principaux bureaux de l’exécutif – au rez-de-chaussée et dans les sous-sols.

La bâtisse avec ses deux étages extérieurs et ses onze fenêtres a conservé un même aspect extérieur depuis sa reconstruction en 1817. Chaque président a effectué des aménagements mineurs et changé le mobilier, sans toucher à l’édifice.

En 1802, Thomas Jefferson fit ajouter des colonnades de chaque côté, longues allées couvertes permettant de se rendre dans des bureaux à l’extérieur, prémices des futures « aile est » et « aile ouest ».  Andrew Jackson agrémenta le fronton d’un portique majestueux et fit installer la plomberie et le chauffage en 1830. James Polk ajouta l’éclairage au gaz en 1848.  Abraham Lincoln fit construire une verrière sur le toit, malgré la guerre de Sécession en 1862. Il fit aussi installer un poste de télégraphe. En 1878 Rutherford B. Hayes fit installer le téléphone, et en 1891 Benjamin Harrison, l’électricité.

En 1882 le président Chester Arthur effectua une grande rénovation intérieure en faisant appel à l’artiste Louis Tiffany, qui fit entrer l’art nouveau et des vitraux colorés dans la demeure présidentielle.

Mais la première modification majeure du bâtiment fut l’œuvre de Théodore Roosevelt à partir de 1902. A l’aube du 20e siècle le bâtiment que Thomas Jefferson avait appelé une « agréable résidence de campagne » était devenu trop étroit pour une administration qui n’avait cessé d’étendre ses compétences et le nombre de ses employés.

Roosevelt fit donc aménager « l’aile ouest » pour y loger une partie de son administration. La presse de l’époque fut unanime pour condamner ces travaux. Roosevelt avait privé le bâtiment de « sa valeur historique », dit-elle. Sans parler de la serre qu’il fallut détruire et des plantes qu’il fallut déplacer…

L’aile ouest devint néanmoins le nouveau centre névralgique de la présidence américaine. Le président Taft y fit même aménager son bureau, de forme ovale, en 1909. Franklin Roosevelt, élu en 1932, fit déplacer le bureau ovale à l’emplacement qu’il occupe toujours aujourd’hui, le coin sud-est de l’aile, ouvrant sur la pelouse sud.

Fantasmes

En 1942,  le même  Franklin Roosevelt fit construire « l’aile est ». Toujours pour accommoder une administration de plus en plus pléthorique. Temps de guerre oblige, un bunker fut aménagé dans le sous-sol. Et sécurité nationale oblige, sa construction fut gardée secrète. Ce qui alimenta tous les fantasmes, ainsi que la colère du Congrès, vexé de ne pas être informé.

Certains des nouveaux bureaux de l’aile est furent aussi destinés à la Première Dame et son entourage. Une première dans l’histoire américaine.

Ces aménagements, ainsi qu’un aménagement des combles dans les années 1920 finirent pas imposer un stress excessif à la structure originale alors âgée de 130 ans. Les planchers du 1er étage étaient particulièrement fragiles. Le pied du piano de Madame Truman finit par passer à travers et une baignoire du premier faillit se retrouver au rez-de-chaussée. La Maison Blanche tout entière menaçait de s’écrouler. « Elle ne tient debout que par la force de l’habitude » dit un ingénieur venu inspecter son état.

Une rénovation totale fut alors ordonnée et le président Harry Truman et son épouse durent emménager dans la Blair House, habituellement réservées aux hôtes étrangers, le temps des travaux. Seule la carcasse extérieure fut conservée. Comme un décor de cinéma. Pour ne pas effrayer les Américains. La Maison Blanche fut ramenée à l’état de coquille vide. L’intérieur de la demeure fut entièrement rasé puis reconstruit à l’identique. Les travaux durèrent trois ans, jusqu’en 1951.

A l’occasion, la vieille ossature de bois fut renforcée par une structure en acier et la climatisation installée, ce qui, vue la chaleur humide et étouffante de Washington l’été, a changé la vie des employés de la Maison Blanche.

En 1960 Jacqueline Kennedy, supervisa une nouvelle rénovation intérieure, avec l’aide d’un designer français, Stéphane Boudin. Elle fut la première à piocher dans l’immense stock de mobiliers et œuvres d’art accumulés par les différents occupants au cours des décennies passées et remisés dans des entrepôts de stockage. Une fois les travaux terminés, elle invita les caméras de télévision et fit éditer un guide de la Maison Blanche dont la vente permit de rembourser une partie du coût des travaux.

Jackie Kennedy fit également planter une roseraie dans la pelouse du sud, le « rose garden ». Elle existe toujours et tient lieu de décor à certaines cérémonies et conférences de presse pendant les beaux jours. Jackie Kennedy fut la seule personne à être jamais félicitée par les médias pour ses transformations apportées à la Maison Blanche. Peut-être parce qu’elle n’était que la première dame, et non pas le président, et parce qu’elle personnifiait l’élégance et le bon goût. Son mari, le président John Kennedy, aimait nager dans la piscine aménagée dans le sous-sol. Elle datait de 1933 et avait été construite pour le président Roosevelt qui souffrait de la polio et l’utilisait à des fins thérapeutiques. Kennedy en faisait, pour sa part, un usage strictement récréatif, invitant dit-on les jeunes secrétaires de la Maison Blanche à le rejoindre dans le plus simple appareil…

Nixon fit couvrir la piscine et installa à la place la salle de presse. Toujours utilisée aujourd’hui. L’essor de la télévision et de l’information en images et en direct avaient généré une demande pour un espace dédié aux « briefings » où l’on puisse installer des caméras et une salle de presse.

Toutefois, la Maison Blanche dispose toujours d’une piscine, mais en extérieur. Elle fut construite sous Gerald Ford, à partir de donations privées et est réservée à l’usage de la famille et de leurs invités. Ford était un avide nageur. Nixon préférait jouer au bowling et en fit bâtir un au sous-sol. Barack Obama préférait le basket-ball et fit recouvrir le court de tennis pour y installer des paniers de basket…

Bill et Hillary Clinton firent à nouveau changer la décoration intérieure. Avec l’aide d’une décoratrice de l’Arkansas, l’Etat de Bill Clinton. Bill prit quelques libertés avec les lieux, faisant de l’alcôve menant au bureau ovale le lieu de ses ébats sexuels avec une jeune stagiaire, Monica Lewinski. En quittant les lieux, le couple Clinton emporta la vaisselle et l’argenterie. Ils furent rattrapés par la patrouille et durent tout restituer, ces biens étant ceux du peuple américain, et non des occupants de la Maison Blanche…

En 2003 George W. Bush, bien qu’originaire de l’Etat pétrolier du Texas, fit installer des panneaux solaires pour chauffer l’eau de la piscine extérieure et alimenter certains ateliers techniques. Dix ans plus tard Barack Obama installera des panneaux solaires directement sur le toit de la résidence principale, pour alimenter les appartements présidentiels. Quant à Michelle Obama, elle plantera un potager « bio » et installera des ruches pour produire un miel de la Maison Blanche.

Jusqu’à récemment, le seul apport de Donald Trump était des mâts de trente mètres de haut de part et d’autre du bâtiment principal pour hisser les couleurs américaines plus haut que jamais.

Scandale !

Et puis il y eut la salle de bal ! Le lieu de tous les enjeux. La pièce à l’origine du scandale. Contrairement à ce que beaucoup de médias ont affirmé ce projet n’est ni soudain, ni  nouveau. Il trotte dans la tête de Donald Trump depuis des années. Régulièrement invité à des diners à la Maison Blanche, Trump avait constaté que la Maison Blanche ne dispose pas d’un salon digne de la puissance et de la richesse des Etats-Unis. La « East Room » ne peut accueillir que deux cents personnes. Pour toute capacité supérieure, il faut dresser des tentes sur la pelouse, monter un faux parquet et installer des toilettes portatives ! Indigne de la première puissance mondiale.

En  2010, le citoyen Trump avait proposé à David Axelrod, principal conseiller de Barack Obama, de leur construire une salle de bal pour cent millions de dollars. Proposition non retenue. Lors de son premier mandat, le temps avait manqué pour lancer le projet. Cette fois et parce qu’il sait qu’il ne fera pas de « troisième mandat » (même s’il aime provoquer les démocrates sur cette question), Trump a décidé d’agir et d’agir vite.

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L’annonce officielle du projet remonte au 31 juillet dernier ! Il s’agissait d’une salle de bal venant se greffer sur l’aile-est, sans nécessiter sa démolition totale. La dimension annoncée était de 8 000 m². De quoi accommoder jusqu’à mille invités. Clark Construction, firme immobilière très reconnue de Washington, fut retenue pour le projet, contre un budget de 200 millions de dollars. En septembre ce budget fut révisé à 250 millions de dollars. Il apparut aussi que l’aile est devrait être entièrement détruite. Avec son propre argent et le soutien de donateurs privés et pour financer le projet, Donald Trump donna l’ordre de préparer le terrain, c’est-à-dire de démolir l’aile est.

En dépit de cris d’orfraies de la gauche américaine, Trump n’a rien fait d’illégal. La preuve, aucune action judiciaire n’a été engagée contre lui. Il existe bien une loi aux Etats-Unis sur la gestion des monuments historiques, mais la Maison Blanche et le Capitole ne sont pas concernés. Il existe aussi la National Historical Planning Commission (NCPC), chargée de superviser les projets fédéraux, mais ses compétences se limitent à la « construction » du nouveau bâtiment, pas à la destruction de l’ancien ! Les fonds finançant le projet étant privés, Trump n’avait besoin d’aucune autorisation du Congrès et n’a donc pas consulté les législateurs… D’autant que le gouvernement est actuellement « fermé » pour cause d’impasse budgétaire.

DR

Moralité, ayant les mains libres Trump en a profité pour agir vite. Comme à son habitude. L’aile est n’est plus et le retour en arrière n’est pas possible, sauf à la reconstruire à l’identique ce qui serait une perte totale d’argent et de temps. Trump aurait pu présenter les plans de la future salle de bal à la NCPC, mais il n’en avait pas l’obligation. Ces plans peuvent donc encore évoluer et avec eux le budget du projet. Pour l’heure, Trump a levé pas moins de 350 millions de dollars. Plus que nécessaire. Et les plus grandes entreprises américaines sont derrière lui, de Google à Microsoft en passant par Apple et Amazon ou Lockheed Martin et d’autres.

Moralité, la salle de bal verra le jour. La question est de savoir si les travaux seront finis pour fin 2028 comme le projet le prévoit. Sinon, Trump pourrait bien être tenté de rester au-delà de son mandat pour être toujours président au moment de l’inauguration de « sa » salle de bal… Que les anti-Trump se rassurent, la salle ne sera pas nommée la « salle de bal Donald J. Trump». Donald Trump a lui-même modestement suggéré « la salle de bal présidentielle ».


Ce texte a été publié sur le blog de Gerald Olivier.

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La charia fait sa loi

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Londres, septembre 2013 © PEAA/ZDS/WENN.COM/SIPA

Depuis septembre, le Congrès américain débat d’un projet de loi ayant pour objectif d’interdire toute application éventuelle de la charia, qualifiée d’« antiaméricaine ».

Le No Sharia Act a été déposé à la Chambre des représentants par deux élus républicains. Au Sénat, un projet de loi parallèle a suivi en octobre. Outre-Atlantique, certains États ont déjà promulgué des lois similaires, mais en réalité cette législation est superflue: la Constitution interdit tout recours à des principes de loi étrangers. Il s’agit surtout d’envoyer un message à toute communauté issue de l’immigration qui soit tentée par une forme de séparatisme: n’y pensez même pas ! Ce besoin se ressent depuis la controverse entourant un projet de développement immobilier au Texas initié par une mosquée qui a été accusée de vouloir créer une zone régie par la charia. Les défenseurs du projet de loi citent l’exemple de l’Europe qu’ils considèrent comme déjà perdue. A Londres en septembre, Donald Trump avait dit des Anglais : « Ils veulent aller vers la charia ».

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Les Américains ont-ils tort ? Au mois d’août, un tribunal civil à Vienne a statué que certains principes de la charia n’étaient pas incompatibles avec la loi autrichienne. Deux hommes ayant un différend au sujet d’une propriété immobilière s’étaient engagés à respecter la décision d’un conseil arbitral mis en place par une communauté sunnite. Quand la décision a donné tort à l’un des deux en lui ordonnant de payer 320 000 euros à l’autre, le perdant a porté l’affaire devant un tribunal, maintenant que la charia était susceptible d’interprétations différentes et incompatible avec la loi autrichienne… Le tribunal lui a donné tort aussi : le principe motivant la décision du conseil ne contrevenait pas à la loi, mais le refus de l’homme de respecter le contrat qu’il avait signé l’était. Des élus de droite ont dénoncé cette conclusion comme ouvrant la porte à la création d’une société parallèle islamique.

Nous n’en sommes pas encore là, mais il se peut que la reconnaissance d’instances d’arbitrage et de médiation islamiques soit une pente glissante. 

L’amitié entre les lignes

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Le romancier Julien Rampin photographié en 2025 © Catherine Delahaye

« Je dis juste que je ne comprends pas qu’on lise de la romance. Il y a des genres bien plus intéressants à découvrir », déclare un personnage du présent ouvrage. « Chacun lit ce qui lui fait plaisir et on n’a pas à juger les autres. Chacun ses goûts, non ? », lui répond un autre. « La romance est un genre à part entière et beaucoup des classiques que tu adores en font partie, en vérité. » La seconde réponse est pleine de bon sens. La romance est un genre à part entière ; c’est vrai. Et dans ce genre, il y a du bon et du moins bon. Du pertinent, de l’intelligent, et du mièvre parfois.

Le roman de Julien Rampin, C’est pas marqué dans les livres, s’inscrit dans ce courant, sans aucun doute. Et son opus est à la fois intelligent et pertinent. Bien écrit, bien construit, il parvient à tenir le lecteur en haleine. C’est déjà beaucoup.

 « (…) aimer à s’en faire péter le cœur. » 

L’auteur nous invite à suivre pas à pas les membres d’un club de lecture d’une médiathèque de Toulouse, ville où il a grandi. Il y a là Colette, quittée par son époux après 40 ans de mariage. Elle cherche à briser la solitude qui l’étouffe et finit par rejoindre le fameux club. Il y a aussi Lucie, étudiante repliée sur elle-même que l’on sent mal dans sa peau. A leurs côtés : Sacha, un trentenaire haut de deux mètres, élégant et beau garçon, en couple avec Romuald ; Caroline et Pétronille, collègues de Pauline, bibliothécaire et animatrice du groupe, qui ne cessent de se disputer ; Mme Germaine, vieille dame sous narcoleptique qui s’endort souvent avant la fin des séances.

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Une sacrée équipe hétéroclite. Parviendront-ils à s’entendre, à communiquer, à s’apprécier ? Julien Rampin, non sans talent, entretient le suspens. Au fil des pages, au fil des échanges littéraires, les uns et les autres se confient et se comprennent mieux. Ils fraternisent. Sacha confie que tout n’est pas rose avec Romuald ; Lucie fait savoir, en larmes, que sa sœur s’est suicidée après avoir été harcelée sur les réseaux sociaux ; Mme Germaine avoue qu’elle a fait de la prison…

Vers la fin du roman, Colette s’adresse à l’assemblée en ces termes : « Ecoutez bien ce que je vous dis, les enfants. Les mots d’amour, les gestes tendres, les sourires délicats, ces effusions que l’on croit superflues, il ne faut pas les économiser. Il s’agit de les offrir par poignées, par brassées, que dis-je, par camions. L’amour, ça se dépense sans compter. A une seule personne ou à la multitude. On ne sait jamais quand il sera trop tard. Il faut aimer à s’en faire péter le coeur. »

Ça peut paraître banal, mais c’est si vrai. Vrai comme se roman qui sonne si… vrai.

C’est pas marqué dans les livres, Julien Rampin ; Charleston ; 252 pages

La dhimmitude pour les nuls

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Image d'illustration.

Se demander dans quelle mesure la notion discutée de “dhimmitude” (statut social du dhimmi, en terre d’islam) deviendrait aujourd’hui en Occident un comportement pré-adapté avant même d’être un statut est une question très provocatrice, mais qui ne peut plus totalement être balayée. Analyse.


Le terme de dhimmitude a été popularisé il y a trente ans par Gisèle Littman dans un livre intitulé La chrétienté d’Orient entre djihad et dhimmitude. C’est peu dire qu’il a été critiqué, provenant d’une historienne non académique publiant parmi des spécialistes de l’islam qui, à cette époque où la Shoah s’imposait dans la mémoire de l’Occident, soulignaient en général que l’islam par contraste avait laissé une place à ses minorités et pour qui l’Andalousie du Moyen Âge était l’exemple continuellement cité d’un glorieux «vivre ensemble», une image que les historiens d’aujourd’hui ont beaucoup nuancée.

Gisèle Littman, qui avait pris le surnom de Bat Ye’or, la fille du Nil, était née en Égypte, en avait été chassée comme la totalité de la communauté juive de ce pays et suspectait que l’argument de lutte contre le sionisme, appliqué à une communauté entière, cachait en réalité une hostilité plus diffuse à l’égard du judaïsme.

Si dhimmitude sent le soufre, le terme de dhimmi est bien connu

Si Bat Ye’or forgea le mot et le concept de dhimmitude, le terme dhimmi était déjà largement employé. Il est celui dont le statut relève de la dhimma, un pacte d’alliance. Ce mot apparaît dans la neuvième sourate, dite Tawba, une des toutes dernières, à une époque où Mahomet avait assuré son pouvoir. Il est écrit dans le Coran lui-même que les dernières révélations peuvent corriger des révélations plus anciennes. C’est dire l’importance de la sourate Tawba, le repentir, techouva en hébreu. Mais, contrairement à ce qu’on en dit, le mot de dhimma n’y vise ni les juifs, ni les chrétiens, mais les «hypocrites» ces soi-disant alliés de Mahomet qui ne l’ayant pas soutenu lors d’une expédition contre les byzantins, avaient brisé le pacte qui les liait à lui.

C’est plus loin dans la même sourate, mais sans le mot dhimma, qu’apparait l’obligation pour les «gens du Livre» de verser un impôt spécifique, la jaziya, attestant le caractère dominant de l’islam sur les autres monothéismes, une mesure plus douce que l’alternative réservée aux polythéistes, la conversion ou la mort. Un siècle plus tard un calife peu connu mais s’appelant Omar et hostile aux chrétiens et aux juifs, donna le nom de dhimma à cette obligation spécifique aux non-musulmans vivant en terre d’islam, accompagnée de diverses interdictions. Il fut prétendu que c’était là un pacte de protection.

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La dhimma a été appliquée avec une rigueur variable suivant les lieux et les époques dans l’immense espace islamique. Beaucoup d’historiens soulignent que la jaziya a été souvent légère, que la protection des minorités a été réelle, notamment dans l’empire ottoman où ces communautés s’administraient elles-mêmes sur le plan civil, et que, au fond, l’impôt de la dhimma remplaçait une obligation de combattre qui n’incombait qu’aux musulmans. ll y a en fait beaucoup à dire sur cette vision irénique de la domination de l’islam, comme en témoignent les conversions forcées, les restrictions religieuses, les persécutions des Almohades ou celles des Safavides d’Iran. Bat Ye’or, qui a utilisé des sources peu exploitées avant elle, a montré une situation des minorités en terre d’islam loin d’être idyllique.

Au cours du XIXe siècle, dans une série de réformes juridiques et administratives qu’on appelle les Tanzimats, les sultans ont aboli la pratique de la dhimma dans l’empire turc, une mesure qui a théoriquement transformé les non-musulmans en citoyens comme les autres. Théoriquement….

Comme on le sait, il n’y a aujourd’hui presque plus de juifs en terres musulmanes et les représailles exercées contre les juifs iraniens à la suite de la guerre des Douze jours montrent comme leur situation est fragile. Des minorités chrétiennes ont fait et font  aujourd’hui encore l’objet de persécutions dans plusieurs pays  musulmans, dans un silence général. La revendication de la supériorité intrinsèque de l’islam sur les autres religions, est indiscutablement un des moteurs les plus faciles à activer dans l’extension de ces violences.

Dans la neuvième sourate, il est précisé que lorsque les monothéistes paieront leur impôt, ils devront le faire en état d’humiliation. Le terme utilisé est ṣāghirūn. Beaucoup de ce que représente la dhimma provient de l’interprétation de ce mot. L’adjectif saghir, très courant, renvoie au champ sémantique de la petitesse. La plupart des exégètes musulmans d’aujourd’hui, y compris Qaradawi ou la mosquée el-Azhar écrivent que la dhimma, originellement liée à la rupture du pacte d’alliance par les hypocrites, fait référence à une situation de guerre qui était celle de l’islam des origines et n’a plus lieu d’être aujourd’hui. 

Ambiguïté

Mais il y a une ambiguïté à ce sujet: ce qui fut la dhimma dans l’histoire provient d’une situation différente, celle de domination qui fut pendant de nombreux siècles celle de l’islam par rapport à ses minorités, qui l’est encore dans certains endroits du monde et que certains islamistes rêvent de rétablir. Une telle situation laisse des traces dans les mentalités. Après la disparition officielle de la dhimma dans l’empire turc, il y eut beaucoup de réactions de mécontentement qui furent reprises et amplifiées par les réformateurs religieux du XXe siècle tels Rashid Rida puis son disciple Hassan el-Banna, créateur des Frères Musulmans.

La mise en cause d’un sentiment de supériorité considéré comme naturel et légitime est très difficile à accepter et est souvent vécue elle-même comme une humiliation, alors que dans le livre sacré, c’est le privilège du musulman que d’infliger une humiliation à autrui. Quand s’y ajoutent le succès de celui qui devrait être un inférieur et plus encore la défaite au combat face à lui, le ressentiment devient très fort. 

Ces réactions émotionnelles, qui ne se limitent d’ailleurs nullement à l’islam, laissent peu de traces dans les archives. Elles jouent un grand rôle dans l’histoire des hommes.

Quant à la dhimmitude, état de résignation devant une situation qu’on ne pouvait pas modifier, ce fut longtemps le lot des populations juives en terre chrétienne comme en terre d’islam. Cette résignation était une stratégie de survie efficace mais elle se payait par l’humiliation intériorisée. Le sionisme fut en quelque sorte une révolte contre la dhimmitude en milieu chrétien. Cette révolte fut réussie et rares sont les juifs qui voudraient revenir à l’état antérieur. Quant à l’attitude de soumission résignée que l’on peut voir ici et là dans un monde d’origine chrétienne essayant de ne pas voir la guerre qui lui est menée, je ne suis pas surpris que le terme de dhimmitude lui soit souvent attribué, même si les explications en sont évidemment bien plus complexes…

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Au temps de l’abondance agricole

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Image d'illustration Unsplash.

L’exécutif français a une fâcheuse tendance à mettre sur le dos de la crise environnementale les difficultés de nos agriculteurs… Opportuniste! Démonstration.


En juin, à la Conférence sur l’océan, à Nice, Emmanuel Macron déclarait : « On est au pire moment ! On a une crise qui est cinq crises en même temps : biodiversité, eau, alimentation, santé, changement climatique ». Le président reprenait ainsi le refrain de la crise environnementale.

Pourtant, si crise il y avait vraiment, nos conditions d’existence et, en particulier, nos ressources alimentaires devraient déjà se détériorer. Or, selon les données les plus récentes du Département de l’Agriculture des États-Unis (USDA), l’année 2025 devrait être une année de records pour les récoltes mondiales. Le maïs et le blé connaissent une hausse spectaculaire, le soja atteint également un niveau inédit, tandis que le riz se maintient à son maximum historique. Même les rendements, c’est-à-dire les quantités produites par hectare cultivé, grimpent eux aussi à des sommets pour ces grandes cultures. Autrement dit : nous produisons toujours plus, avec relativement moins de terres. D’autres productions suivent la même tendance : colza, huile de palme ou café sont aussi promis à des récoltes record. Bien sûr, certains produits connaissent des fluctuations annuelles, comme le coton ou le sucre. Et certaines cultures négligées, telles que le sorgho et le millet, stagnent.

Mais l’image d’ensemble est claire : malgré le réchauffement climatique, malgré la baisse de la biodiversité, malgré la prétendue détérioration de la qualité des sols, la production agricole mondiale continue de croître. Cette bonne nouvelle ne signifie pas qu’il n’y ait aucune raison de s’inquiéter. En particulier, le changement climatique représente une menace sérieuse pour l’agriculture. Mais comme cette production agricole en témoigne, il est faux d’affirmer que la crise est déjà là. Certes, les agriculteurs français peuvent être confrontés à des difficultés. Mais, au regard des bons résultats de la production mondiale, les responsables politiques ont beau jeu d’en attribuer la responsabilité à la situation environnementale plutôt qu’aux contraintes qu’eux-mêmes leur imposent.

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Internet, nouveau bouc émissaire d’Emmanuel Macron

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© Stephane Lemouton/SIPA / OPEN AI

Dans l’affaire du cyberharcèlement de Brigitte Macron, de trois à douze mois de prison avec sursis ont été requis contre les accusés. Pendant ce temps, son président de mari réunissait 200 experts des réseaux sociaux pour mener la contre-offensive. Lors d’une conférence consacrée à « la démocratie à l’épreuve des réseaux », il leur a adressé: « J’ai besoin de vous », estimant que « ce qui se joue avec les algorithmes, c’est l’émergence d’un nouveau pouvoir, à côté de l’exécutif, du législatif et du judiciaire, qui lui n’a pas encore de contrepouvoirs… »


La rumeur sur Brigitte Macron incite son mari à s’en prendre aux réseaux sociaux. Or le président commet une erreur d’analyse : il est lui-même, par sa parole démonétisée, la cause première de la cabale. Hier, le procureur de la République a requis, devant le tribunal correctionnel de Paris, des peines de prison avec sursis contre dix cyberharceleurs poursuivis pour avoir mis en doute le sexe de l’épouse du chef de l’État. Le même jour, Emmanuel Macron a lancé un débat sur l’impact des réseaux sociaux et d’internet sur la démocratie. Au prétexte de « créer les conditions d’un débat éclairé et apaisé », l’Élysée poursuit son idée fixe visant à mettre sous surveillance ce lieu indomptable et impertinent qu’est devenu le numérique et ses forums. La simultanéité des deux événements fait comprendre que le président cherche à instrumentaliser la fake news, relayée sur Twitter, qui assure que la « première dame » serait un homme ayant effectué une transition de genre. Ce faisant, Macron aggrave la défiance publique vis-à vis du discours officiel. Le pouvoir, en se retranchant derrière son récit émaillé de propagandes et de dénis, alimente les suspicions sur les vérités officielles. La crise sanitaire, qui a conduit l’État à imposer des slogans inexacts sur les vaccins (« Tous vaccinés, tous protégés ») a accentué la défiance entre le pouvoir et la société civile. Les aveuglements sur l’immigration de masse et l’insécurité produisent les mêmes doutes sur la bonne foi du pouvoir. L’obsession de Macron à réguler l’internet s’intensifie à mesure que son règne est contesté. La dérive liberticide du régime explique les outrages vengeurs que subit Brigitte Macron, à qui est reproché également une relation ambiguë avec l’élève de 15 ans, son futur époux, alors qu’elle en avait 39.

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La fable urbaine d’une substitution d’identité entre Jean-Michel Trogneux et Brigitte Macron aurait dû rester dans le répertoire des libelles ou des blagues bêtes et méchantes. Hier, Tiphaine Auzière est venue dire devant le tribunal combien sa mère souffrait de cette malveillance. Ce poison a trouvé de surcroit un accélérateur aux États-Unis à cause de l’influenceuse Candace Owens, irrationnellement déchaînée dans son obsession à nuire à l’épouse du président français. Cependant, s’il est une question que devrait se poser Macron, c’est de savoir pourquoi il projette sur son entourage intime autant de malveillances, qui trouvent un écho auprès d’une partie de l’opinion.

« L’ affaire Trogneux » doit être comprise comme le symptôme d’une opinion qui, à force de s’être laissée abusée par trop de mensonges d’État, ne croit plus ce qu’on lui dit. Au point de prendre les démentis officiels pour des aveux. Dans Génie du christianisme, Chateaubriand a écrit : «  Un gouvernement pervers introduit le vice chez les peuples, comme un gouvernement sage fait fructifier la vertu ». C’est cette corruption des esprits qui s’observe, au détriment d’une femme profondément meurtrie par ses harceleurs. Mais le vrai coupable est à l’Élysée.

Gérald Darmanin à l’École des sorciers…

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Le ministre de la Justice Gérald Darmanin à Bordeaux, 24 octobre 2025 © UGO AMEZ/SIPA

Gérald Darmanin était face à des élèves de l’École nationale de la magistrature ce vendredi. Les magistrats doivent davantage ressembler au peuple français et surtout faire leur aggiornamento, sinon cela finira mal pour « l’État de droit », a prévenu le garde des Sceaux.


Le garde des Sceaux s’est rendu à Bordeaux pour rencontrer les élèves magistrats de l’École nationale de la magistrature et leur annoncer les changements qu’il envisageait. Il a également dialogué avec une soixantaine d’enseignants et confirmé dans ses fonctions de directrice Nathalie Roret.

Il faut que jeunesse se passe…

La promotion « État de droit » était mobilisée. Mais, sur les 468 auditeurs de justice, seuls 250 étaient présents dans l’amphithéâtre.

Est-il permis de s’étonner du choix d’« État de droit » comme dénomination, alors que sa contestation, dans le climat actuel, n’est pas illégitime et qu’il aurait été plus fort, symboliquement, d’arbitrer en faveur d’une incarnation exemplaire, ou même d’une victime à laquelle on aurait rendu hommage ?

Avant d’en venir à la teneur des propos du ministre, j’avoue ma surprise devant la manière infantilisante dont ont été prévues et programmées les questions adressées à Gérald Darmanin. Comme si l’on n’avait pas pu, tout simplement, laisser les auditeurs formuler librement leurs interrogations – en espérant, pour toutes, une forme maîtrisée.

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Le comble du ridicule a été atteint avec « un petit happening » au cours duquel deux auditrices et un auditeur ont proféré trois banalités vaguement contestataires, évidemment applaudies à tout rompre.

Le garde des Sceaux envisage pour l’ENM – il a rappelé que tous les futurs candidats à l’élection présidentielle souhaitaient sa disparition – « une réforme en profondeur du concours et du recrutement, l’introduction de modules d’enseignement consacrés au monde économique et financier, à la connaissance des rouages administratifs et étatiques, des cours de management, mais aussi l’obligation de mobilité des magistrats ».

Ce n’est pas sur ce plan que je discuterai le propos, au demeurant revigorant, de Gérald Darmanin : on garde l’ENM, mais on la réforme. Je suggérerais volontiers que la culture générale – classique et contemporaine – ne fût pas oubliée !

En revanche, si j’admets que « si l’on ne change pas quelque chose, cela va mal se passer avec une population qui ne se sent pas représentée », je suis beaucoup plus réservé, non sur « l’ouverture méritocratique », mais sur l’idée « d’une magistrature qui doit changer et ressembler à ceux qu’elle juge, pour retrouver la confiance des justiciables ».

La justice et les démagogues

Je crains que cette aspiration, destinée à plaire immédiatement à une majorité de citoyens, ne soit un zeste démagogique. Car la difficulté réside dans le fait que rêver d’une magistrature plus conforme à la composition sociologique de notre pays est une chose, mais vouloir « qu’elle ressemble à ceux qu’elle juge » en est une autre.

En effet, je crois que la magistrature a trop souvent cultivé, dans ses apparences, dans ses pratiques, dans ses rapports avec autrui et dans sa volonté de mimétisme social, politique et syndical, l’obsession de se rapprocher des comportements ordinaires, pour qu’on puisse, sans danger, pousser encore plus loin la dilution de la Justice dans le commun.

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Que la diversification du corps s’amplifie et s’enrichisse, soit ; mais rien ne serait pire que l’abolition de la distance, de la tenue, de cette légitimité et de cette autorité qui, dans les temps de crise que nous vivons, constituent le moyen le plus radical de perdre l’estime des citoyens et le respect des politiques. Profondément, la magistrature peut avoir des origines multiples, mais pour rien au monde le magistrat ne doit être comme tout le monde : sinon, il perd tout crédit pour juger. Cet écart nécessaire, c’est sa force et son honneur. Le faire « ressembler à ceux qu’il juge », ce serait aggraver gravement son déclin. Et ce serait la banalisation d’une institution qui ne se remet pas d’avoir été, et de ne plus être, ou médiocrement.

Alors que rien n’est irréversible et que tout est ouvert pour 2027.

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Le général de Gaulle à Damas

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Sur la place des Omeyyades, une foule en colère a renversé la statue de Hafez al-Assad, symbole de l’ancien régime désormais déchu, Damas, Syrie, le 15 décembre 2024 © Sadak Souici/ZUMA/SIPA

Pendant la Seconde Guerre mondiale, le général de Gaulle proclamait l’indépendance de la Syrie. Même si l’influence française est encore perceptible dans la Syrie d’aujourd’hui, Emmanuel Macron ne doit pas brûler les étapes avec Ahmed al-Charaa, le nouvel homme fort de Damas.


Alors que la Syrie vit aujourd’hui sous le régime d’Abou Mohammed Al-Julani, après la chute des Assad en 2024, la question de sa souveraineté reste posée. Le régime Assad, soumis depuis 1979 à l’influence iranienne, était devenu un relais de Téhéran, dépendance accentuée après 2011. Celui d’Al-Julani s’appuie désormais sur les puissances sunnites, dont l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar et la Turquie, déplaçant la tutelle étrangère de l’axe chiite vers l’axe sunnite.

Voyage oublié

Dans ce jeu de dépendances régionales, la France ne peut rester spectatrice. Un siècle plus tôt, elle façonna la Syrie moderne et négocia son indépendance sous Léon Blum, restée sans effet faute de ratification. En 1941, le général de Gaulle proclama cette indépendance à Damas après la victoire des Forces françaises libres sur les troupes vichystes et nazies. Le départ du dernier soldat français en 1946 scella cette transition, consacrant la Syrie comme un État souverain et démocratique, paradoxe face à la réalité actuelle. Ce voyage de De Gaulle, souvent oublié, fut une tentative de conjuguer puissance et liberté sur le Levant.

À la suite de la libération de la Syrie et du Liban, intervenue en juin-juillet 1941 à l’issue de l’offensive des forces franco-britanniques contre les autorités vichystes, soutenues par l’Allemagne nazie, le général de Gaulle se rendit à Damas afin d’y affirmer la légitimité de la France libre. Cette opération fut conduite avec l’appui de contingents issus de l’Empire britannique — notamment indiens, canadiens et australiens — ainsi que de combattants judéo-arabes engagés aux côtés des Alliés.

Winston Churchill déclara : « We must not lose Syria. »

À cette époque, la Syrie et le Liban étaient tombés sous le contrôle des autorités vichystes, alliées objectives de l’Allemagne nazie. La France était occupée, et l’Empire britannique faisait face à de vives difficultés au Proche-Orient. En Iran, le chah Reza Pahlavi manifestait des sympathies à l’égard du régime hitlérien ; en Irak, le coup d’État de Rachid Ali al-Gillani avait renversé la monarchie hachémite pour établir un gouvernement favorable à l’Axe ; et en Égypte, le roi Farouk était soupçonné de maintenir des communications discrètes avec l’Italie fasciste de Mussolini.

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La Palestine mandataire demeura fidèle aux Alliés durant la Seconde Guerre mondiale, devenant ainsi un point d’appui stratégique pour le lancement des opérations de libération de la Syrie et du Liban. Toutefois, l’élite arabe du Proche-Orient était profondément divisée. Certaines figures influentes, telles que Moustafa el-Nahhas, Badia Masabni ou Taj al-Din al-Hassani, apportèrent un soutien clair aux puissances alliées. D’autres, en revanche, s’alignèrent ouvertement ou de manière plus discrète sur les forces de l’Axe, à l’image de Reza Pahlavi en Iran, du mufti de Jérusalem Amine al-Husseini, ou encore de Rachid Ali al-Gillani en Irak.

Enfin, la Syrie est libérée. Le général de Gaulle y fait son entrée et proclame l’indépendance du pays, mettant ainsi fin à ce que l’on appelait autrefois « la Syrie française » — territoire du mandat, également désigné sous les appellations de Syrie mandataire ou République syrienne sous mandat.

La France entra en Syrie en 1920, à la suite de la bataille de Mayssaloun, qui opposa les troupes du ministre de la Guerre Youssef al-Azma aux forces françaises métropolitaines, sénégalaises et marocaines, placées sous le commandement du général Henri Gouraud. En Syrie, depuis l’entrée de Lawrence d’Arabie à Damas en 1918, le prince Fayçal s’était proclamé roi du royaume arabe de Syrie. Toutefois, le gouvernement français, dirigé par Raymond Poincaré, refusa de reconnaître cette monarchie naissante lors de la Conférence de la paix à Paris.

Le président Raymond Poincaré avait donné des assurances au chef de l’Église maronite, Élias Pierre Hoyek, en faveur de la création d’un Grand Liban. Par la suite, le général Henri Gouraud, nommé premier haut-commissaire de la République française au Levant, procéda à la fondation de l’État du Grand Liban en 1920. Dans une logique de division administrative du territoire syrien sous mandat, il établit également d’autres entités politiques : l’État d’Alep, l’État de Damas, l’État des Druzes et l’État des Alaouites.

La France établit ensuite l’Union syrienne, en regroupant l’État d’Alep, l’État de Damas, l’État des Alaouites et l’État des Druzes sous une entité administrative unifiée. Sobhi Barakat en fut nommé président, et la ville d’Alep fut choisie comme capitale de cette union. Les territoires de la Syrie actuelle correspondent, dans leur grande majorité, à ceux qui composaient l’Union syrienne établie sous mandat français.

Le passage chaotique du général Sarrail

Des tensions ont existé entre les autorités françaises et les populations syriennes et libanaises ; cependant, plusieurs hauts responsables militaires s’efforcèrent d’établir de bonnes relations avec la société civile ainsi qu’avec les autorités religieuses, tant chrétiennes que musulmanes, ce qui permit d’atténuer en partie les conflits. Cette relative accalmie fut toutefois remise en question avec la nomination du général Maurice Sarrail au poste de haut-commissaire de la République française. Ce dernier, connu pour ses positions ultra-laïques et son attachement au jacobinisme républicain, heurta les sensibilités locales et raviva les tensions.

Le général Maurice Sarrail laissa derrière lui un passage chaotique, marqué par de graves tensions et des conséquences tragiques. Abordant les réalités religieuses locales avec le prisme d’un laïcisme rigide hérité du contexte français, il heurta profondément les sensibilités des autorités spirituelles, tant musulmanes que chrétiennes. La révolte éclata d’abord dans le Jebel druze, avant de s’étendre au-delà du sud et d’embraser une partie du territoire syrien. Damas fut durement touchée, subissant des bombardements qui provoquèrent l’émoi au Levant comme en métropole. Les tensions et polémiques parvinrent jusqu’à Paris, où certains responsables politiques allèrent jusqu’à réclamer le retrait immédiat de l’armée française. Le gouvernement du président Gaston Doumergue refusa cependant d’abandonner la Syrie et le Liban au chaos. Il prit néanmoins la décision de limoger le général Sarrail, afin de calmer les esprits et de restaurer une forme de stabilité dans la région.

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La France décida de fonder la République syrienne en collaborant avec plusieurs intellectuels et notables syriens. Des figures politiques et culturelles issues de diverses confessions, telles que Saïd Ghazzi (musulman sunnite), Fares Khoury (chrétien orthodoxe) et Ibrahim Hanano (d’origine kurde), furent chargées de rédiger la première Constitution de la République syrienne. Ce texte remarquable, d’une qualité juridique et démocratique largement supérieure à celles imposées plus tard sous les régimes des Assad et de Jolani, affirmait avec force les principes de souveraineté, de pluralisme et d’indépendance nationale.

Le haut-commissaire français, Henri de Jouvenel, tenta toutefois d’y insérer une clause conférant au poste de haut-commissaire une autorité supra-constitutionnelle. Cette exigence fut catégoriquement rejetée par les représentants syriens. En réaction, et afin de contourner ce refus, Henri de Jouvenel fit adopter la Constitution par décret.

Une influence française encore perceptible aujourd’hui

Léon Blum accède au pouvoir en 1936 et engage les négociations en vue de l’indépendance de la Syrie. Une délégation syrienne se rend à Paris pour entamer un long processus diplomatique qui durera six mois. Un accord est finalement trouvé, mais le gouvernement du Front populaire ne parvient pas à le faire ratifier par le Parlement français. Le texte demeure ainsi lettre morte, relégué aux archives. Ce sera finalement la légitimité révolutionnaire de la France libre et de la Résistance qui permettra au général de Gaulle de proclamer l’indépendance de la Syrie.

De 1941 à 1946, la France demeura présente en Syrie, bien que dans une position affaiblie, ne conservant son influence que grâce au soutien britannique, notamment celui de Winston Churchill. Finalement, elle se résolut à retirer ses troupes et quitta définitivement la Syrie et le Liban en 1946.

Pourtant, l’influence française demeure perceptible jusqu’à aujourd’hui. De nombreux mots français ont été intégrés au dialecte syro-libanais, tels que bougie, toutou, marmiton, avance, en arrière, vase, etc. Par ailleurs, la France a longtemps constitué un refuge pour les intellectuels syriens fuyant les dictatures baasistes et nasséristes. Les diplômés des universités françaises ont figuré parmi les cadres les plus éminents de l’enseignement supérieur syrien. Leur formation, reconnue pour sa rigueur et sa qualité académique, tranchait nettement avec celle de certaines vagues de professeurs formés dans les pays du bloc soviétique, où l’encadrement pédagogique se révélait souvent insuffisant.

Plus de quatre-vingts ans après que le général de Gaulle proclama l’indépendance de la Syrie, la France semble avoir perdu le fil de son rôle au Levant. Héritière d’une influence ancienne, elle pourrait pourtant redevenir une puissance d’équilibre, fidèle à l’esprit des Lumières et à l’idéal d’émancipation qui guida jadis son action. Encore faut-il qu’elle dépasse les ambiguïtés d’une diplomatie hésitante, illustrées par l’accueil précipité d’Emmanuel Macron à Abou Mohammed Al-Julani en mai 2025, suivi d’une rencontre à New York en septembre, peu après son arrivée au pouvoir et les massacres perpétrés sur la côte syrienne.

Une telle hâte tranche avec la prudence de Pompidou, Giscard d’Estaing et Mitterrand, qui avaient attendu avant de tendre la main à Hafez Al-Assad, notamment après les massacres de Hama. Pour la France, meurtrie par le terrorisme islamiste mais toujours porteuse d’un idéal universel, renouer avec la Syrie ne peut se limiter à un symbole : il s’agit de retrouver le sens d’une politique orientale fidèle à son histoire et à sa vocation.

Vérité en deçà du Rhin, erreur au-delà

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Le chancelier allemand Merz photographié à Berlin le 29 octobre 2025 © Ebrahim Noroozi/AP/SIPA

En affirmant que les migrants demeurent « un problème dans le paysage urbain », le chancelier allemand Friedrich Merz provoque un tollé.


Je ne croyais pas prononcer cette phrase un jour mais oui quelle chance d’être Allemand ! Je ne dis pas ça par goût immodéré des saucisses, des BMW ou des marécages philosophiques, mais parce que le chancelier Merz manifeste une liberté de pensée et de parole inconnue chez nos dirigeants.

Le 14 octobre, interrogé sur les migrants, il parle d’un problème non résolu dans le paysage urbain. Derrière cette traduction littérale donnée par la presse française, il vise à l’évidence la délinquance et l’insécurité de rue. Une semaine plus tard, alors qu’on lui demande de s’expliquer, il met les pieds dans le plat: « Demandez à vos filles, elles vous diront qui leur cause des problèmes le soir ». Tollé, les belles âmes manifestent devant le siège de la CDU, hurlent à l’afdisation des esprits, la gauche du parti se bouche le nez. Merz précise qu’il parlait seulement des migrants délinquants en situation irrégulière. De toute façon les Allemands l’ont compris. 64% l’approuvent.

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Pourquoi suis-je jalouse ? Si Sébastien Lecornu prononçait cette phrase, il serait immédiatement traîné devant les tribunaux. Nos dirigeants et nos élus rivalisent dans la soumission au politiquement correct et dans le déni. Pas seulement par peur du bad buzz ou par envie d’être félicité par Le Monde, mais parce qu’une grande partie de nos élites pense vraiment que s’inquiéter de l’immigration ou la refuser est un signe d’étroitesse d’esprit voire de racisme.

Donc, contrairement à Merz, nos gouvernants ne voient toujours pas ce qu’ils voient :

  • Que l’islamisme qui a tué en janvier et en novembre 2015 se déploie encore sur tout le territoire depuis 10 ans ;
  • Que les émeutes de 2005, dont on célèbre les 20 ans, n’ont pas été engendrées par la relégation sociale mais par le séparatisme ethnico-religieux. Ils expliquent d’ailleurs encore que le problème ce sont les subventions trop modestes dans les banlieues ;
  • Que l’antisémitisme et la délinquance sont très largement nourris par l’immigration et par une partie de sa descendance ;
  • Que la majorité des agressions sexuelles de voie publique sont commises par des jeunes hommes venus de cultures qui enferment, bâchent ou voilent les femmes et qui considèrent donc qu’une femme libre est à prendre. Non, nos belles âmes préfèrent parler du « patriarcat ».

Alors oui, que toutes ces grandes consciences demandent à leurs filles de quoi et de qui elles ont peur le soir. Mais, beaucoup sont tellement aveuglées par leurs bons sentiments et leurs ambitions politiques qu’elles n’entendent déjà pas leurs électeurs. Je ne suis pas sûre qu’elles écoutent leurs enfants.

Cette chronique a été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez notre directrice de la rédaction dans la matinale.

«Cent tribalistes auront toujours raison de mille individualistes»

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2015 © WITT/SIPA

Avec les 20 ans des émeutes urbaines déclenchées par la mort de Zyed et Bouna, on reparle des fameux « territoires perdus ». La France n’est plus minée seulement par l’islamisme, mais par le tribalisme solidaire – cette loyauté clanique, héritée des sociétés sans État, qui structure désormais nombre de quartiers, estime cette tribune. Sous couvert de paix sociale et de discours antiracistes, le pouvoir s’y soumet comme un dhimmi payant la djiziah à ses émirs locaux… Le résultat ? Un «Républi-clanisme», où la loi du groupe remplace celle de la République. Une analyse de David Duquesne, auteur de Ne fais pas ton Français (Grasset).


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Le tribalisme solidaire : la force obscure des sociétés sans État

Dans Ne fais pas ton Français, j’évoque ce que j’ai appelé l’ivresse du tribalisme solidaire. Cette fraternité communautaire viscérale lie les membres d’un même clan au détriment du droit, de la vérité et de la justice. Un vieux proverbe arabe en résume la logique :
« Moi contre mon frère, mon frère et moi contre mon cousin, mon cousin, mon frère et moi contre l’étranger. »

Ce réflexe n’est pas un vestige anthropologique : il structure encore la sociologie de certains territoires français.

Je l’ai vu de mes yeux à Sallaumines, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, à la fin des années 1980.

Un homme ivre, sans défense, fut lynché par une dizaine de jeunes, tous d’origine maghrébine, sous le regard passif de la foule.

L’un d’eux me lança fièrement : « C’est ça, la solidarité musulmane. » Cette phrase m’a vacciné contre la naïveté. J’avais sous les yeux le cœur du problème : une solidarité de clan, capable du meilleur – l’entraide, la chaleur, la loyauté – mais aussi du pire : la justification de la violence collective, la négation du juste.

Des tribus du Maghreb aux quartiers perdus de la République

Ce que j’ai observé à Sallaumines n’était pas un hasard, mais la réactivation d’un vieux schéma culturel importé des sociétés maghrébines.

Là-bas, la structure clanique – la hamula – repose sur un principe de solidarité absolue : l’agression d’un membre est vécue comme une attaque contre tout le groupe.

Ce système fit la force des conquérants arabes et berbères d’Al-Andalus, mais aussi la cause de leurs divisions internes.

Or, dans une société d’État centralisé comme la France, ce modèle devient explosif : il fragmente l’espace civique et substitue à la loi républicaine la loi du groupe.

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Partout où l’État recule, le clan avance.

Là où la police ne va plus, les caïds deviennent les chefs de guerre, s’appuyant sur le même mécanisme de loyauté tribale : ne jamais livrer un membre de la communauté à une autorité extérieure.

C’est ce ciment invisible qui explique la puissance des caïds, des islamistes et des indigénistes : ils exploitent la solidarité primaire d’un groupe refermé sur lui-même.

De la solidarité à la domination : le caïd comme figure centrale

Dans la culture arabo-musulmane, le caïd n’est pas un voyou au sens français, mais un meneur d’hommes, un chef respecté, capable d’assurer la sécurité et la prospérité du clan par la force. Son autorité repose sur la domination, non sur le droit. Battre un policier, humilier un professeur ou insulter un représentant de l’État n’est pas vu comme un crime, mais comme une victoire symbolique sur la puissance étrangère. Ainsi se maintient une hiérarchie parallèle : celle du pouvoir clanique, fondé sur la peur et la fierté, qui se substitue au pouvoir légitime de l’État.

Cette logique s’étend désormais aux territoires perdus de la République, où règnent des équilibres tacites, des « pactes de non-agression » entre élus locaux et chefs de quartiers. On achète la paix sociale avec des subventions, comme les dhimmis d’autrefois payaient la djiziah, l’impôt de capitation, aux émirs andalous pour ne pas être massacrés.

La soumission a simplement changé de forme : elle est devenue budgétaire, clientéliste et idéologique.

L’aveuglement des élites : l’éléphant dans la pièce

Le tribalisme solidaire est l’angle mort des sciences sociales françaises. On parle de pauvreté, de chômage, de racisme systémique, mais jamais du facteur culturel, car il heurte la doxa universaliste et met en péril la narration victimaire.

Résultat : la gauche postcoloniale, les universitaires indigénistes et une partie de la droite technocratique s’accordent sur un même mensonge confortable : celui d’un État oppresseur face à des victimes structurelles. Ce déni n’est pas seulement moral, il est mortel pour la nation. Car tant que la République refusera de nommer le tribalisme, elle nourrira le monstre – un monstre qui ne se bat pas pour des idées, mais pour le butin, le territoire et l’honneur du clan.

Al Françalus, ou la République en trompe-l’œil

La France a désormais son Al Françalus : un territoire de coexistence illusoire, un califat Potemkine bâti sur le déni et la culpabilité. Les façades restent républicaines, les institutions fonctionnent encore, les discours sont truffés de références à la fraternité, à la laïcité, à l’égalité. Mais derrière ce décor, la réalité se délite. Les mêmes mots recouvrent d’autres sens : la fraternité devient communautarisme, la tolérance devient capitulation, et la laïcité devient neutralisation de la France elle-même.

Le Républi-clanisme, c’est cela : une République vidée de sa substance, infiltrée par les logiques tribales qu’elle ne comprend plus et qu’elle n’ose plus combattre.

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Les élus locaux pactisent avec les seigneurs du quartier, les associations communautaires se substituent aux institutions, et la peur s’installe dans le quotidien des citoyens ordinaires, devenus étrangers chez eux.

On assiste à un phénomène paradoxal : la France n’est plus coloniale, elle est recolonisée. Non par la force d’une armée, mais par l’idéologie, la démographie et la lâcheté. Les anciens colonisés ont importé leurs structures claniques, leurs réflexes d’allégeance, leur vision hiérarchisée du monde. Et l’État, rongé par la culpabilité postcoloniale, s’interdit d’y opposer sa propre verticalité. Il abdique son rôle de souverain, se réduit à une ONG qui distribue la paix sociale à crédit. Cette démission ouvre un espace où prospèrent les caïds, les islamistes et les militants indigénistes, qui jouent chacun leur partition dans la même symphonie : celle du tribalisme triomphant. Les uns dominent par la violence, les autres par la foi, les derniers par le discours victimaire. Le résultat est identique : la République s’efface, le clan règne.

La France, en somme, n’est plus un État-nation : elle devient une mosaïque de tribus, où la force du groupe l’emporte sur la loi commune. Une Al Françalus à visage démocratique, où les dhimmis d’aujourd’hui s’appellent contribuables, fonctionnaires, professeurs, policiers. Ils paient la djiziah moderne : impôts, subventions, silences et excuses. Tout cela pour ne pas être massacrés symboliquement, pour éviter d’être traités de racistes, d’islamophobes ou d’extrémistes.

Revenir au réel, ou Seinesaintdeniser tout le pays

Le choc viendra si la France ose regarder le réel en face, si elle se rappelle qu’elle n’est pas une idée mais une civilisation.

La chute, en revanche, se produira si elle continue de se raconter qu’il suffit de “vivre-ensemble” pour que la guerre des clans s’éteigne d’elle-même.

Mais si l’on fait enfin le bon diagnostic, alors il faut en tirer des conséquences concrètes.

Il faut revoir la politique migratoire, non par haine mais par lucidité, pour ne pas reproduire sur le sol français les structures claniques des pays d’origine. Et il faut repenser la politique du logement, afin de rompre avec les logiques de concentration ethnico-culturelle qui servent d’incubateurs à ces normes socioculturelles. En continuant à regrouper, par “solidarité”, ceux qu’il faudrait mêler à la cité commune, on organise la sécession du pays réel. La France ne peut pas rester une mosaïque de “douars urbains” subventionnés, où le vivre-ensemble se transforme en vivre-à-part. Si nous persistons dans cette voie, nous Seinesaintdeniserons tout le pays — et ce mot-là dit bien ce qu’il veut dire : transformer la nation entière en un territoire morcelé, où la loi du clan se substitue à la loi commune.

Nous aurons alors cru la sauver par la tolérance pendant que nous l’étranglions par le mensonge. La chroniqueuse Sabrina Medjebeur l’a bien vu : il ne s’agit plus d’un problème de coexistence, mais de survie politique et morale. Il faudra une génération de Français décidés à reconstruire la cité, non sur la peur ou la repentance, mais sur la vérité nue du réel. Car comme le disait Lacordaire : « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit. »

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