Avec les 20 ans des émeutes urbaines déclenchées par la mort de Zyed et Bouna, on reparle des fameux « territoires perdus ». La France n’est plus minée seulement par l’islamisme, mais par le tribalisme solidaire – cette loyauté clanique, héritée des sociétés sans État, qui structure désormais nombre de quartiers, estime cette tribune. Sous couvert de paix sociale et de discours antiracistes, le pouvoir s’y soumet comme un dhimmi payant la djiziah à ses émirs locaux… Le résultat ? Un «Républi-clanisme», où la loi du groupe remplace celle de la République. Une analyse de David Duquesne, auteur de Ne fais pas ton Français (Grasset).
Ne fais pas ton Français !: Itinéraire d'un bâtard de la République
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Le tribalisme solidaire : la force obscure des sociétés sans État
Dans Ne fais pas ton Français, j’évoque ce que j’ai appelé l’ivresse du tribalisme solidaire. Cette fraternité communautaire viscérale lie les membres d’un même clan au détriment du droit, de la vérité et de la justice. Un vieux proverbe arabe en résume la logique :
« Moi contre mon frère, mon frère et moi contre mon cousin, mon cousin, mon frère et moi contre l’étranger. »
Ce réflexe n’est pas un vestige anthropologique : il structure encore la sociologie de certains territoires français.
Je l’ai vu de mes yeux à Sallaumines, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, à la fin des années 1980.
Un homme ivre, sans défense, fut lynché par une dizaine de jeunes, tous d’origine maghrébine, sous le regard passif de la foule.
L’un d’eux me lança fièrement : « C’est ça, la solidarité musulmane. » Cette phrase m’a vacciné contre la naïveté. J’avais sous les yeux le cœur du problème : une solidarité de clan, capable du meilleur – l’entraide, la chaleur, la loyauté – mais aussi du pire : la justification de la violence collective, la négation du juste.
Des tribus du Maghreb aux quartiers perdus de la République
Ce que j’ai observé à Sallaumines n’était pas un hasard, mais la réactivation d’un vieux schéma culturel importé des sociétés maghrébines.
Là-bas, la structure clanique – la hamula – repose sur un principe de solidarité absolue : l’agression d’un membre est vécue comme une attaque contre tout le groupe.
Ce système fit la force des conquérants arabes et berbères d’Al-Andalus, mais aussi la cause de leurs divisions internes.
Or, dans une société d’État centralisé comme la France, ce modèle devient explosif : il fragmente l’espace civique et substitue à la loi républicaine la loi du groupe.
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Partout où l’État recule, le clan avance.
Là où la police ne va plus, les caïds deviennent les chefs de guerre, s’appuyant sur le même mécanisme de loyauté tribale : ne jamais livrer un membre de la communauté à une autorité extérieure.
C’est ce ciment invisible qui explique la puissance des caïds, des islamistes et des indigénistes : ils exploitent la solidarité primaire d’un groupe refermé sur lui-même.
De la solidarité à la domination : le caïd comme figure centrale
Dans la culture arabo-musulmane, le caïd n’est pas un voyou au sens français, mais un meneur d’hommes, un chef respecté, capable d’assurer la sécurité et la prospérité du clan par la force. Son autorité repose sur la domination, non sur le droit. Battre un policier, humilier un professeur ou insulter un représentant de l’État n’est pas vu comme un crime, mais comme une victoire symbolique sur la puissance étrangère. Ainsi se maintient une hiérarchie parallèle : celle du pouvoir clanique, fondé sur la peur et la fierté, qui se substitue au pouvoir légitime de l’État.
Cette logique s’étend désormais aux territoires perdus de la République, où règnent des équilibres tacites, des « pactes de non-agression » entre élus locaux et chefs de quartiers. On achète la paix sociale avec des subventions, comme les dhimmis d’autrefois payaient la djiziah, l’impôt de capitation, aux émirs andalous pour ne pas être massacrés.
La soumission a simplement changé de forme : elle est devenue budgétaire, clientéliste et idéologique.
L’aveuglement des élites : l’éléphant dans la pièce
Le tribalisme solidaire est l’angle mort des sciences sociales françaises. On parle de pauvreté, de chômage, de racisme systémique, mais jamais du facteur culturel, car il heurte la doxa universaliste et met en péril la narration victimaire.
Résultat : la gauche postcoloniale, les universitaires indigénistes et une partie de la droite technocratique s’accordent sur un même mensonge confortable : celui d’un État oppresseur face à des victimes structurelles. Ce déni n’est pas seulement moral, il est mortel pour la nation. Car tant que la République refusera de nommer le tribalisme, elle nourrira le monstre – un monstre qui ne se bat pas pour des idées, mais pour le butin, le territoire et l’honneur du clan.
Al Françalus, ou la République en trompe-l’œil
La France a désormais son Al Françalus : un territoire de coexistence illusoire, un califat Potemkine bâti sur le déni et la culpabilité. Les façades restent républicaines, les institutions fonctionnent encore, les discours sont truffés de références à la fraternité, à la laïcité, à l’égalité. Mais derrière ce décor, la réalité se délite. Les mêmes mots recouvrent d’autres sens : la fraternité devient communautarisme, la tolérance devient capitulation, et la laïcité devient neutralisation de la France elle-même.
Le Républi-clanisme, c’est cela : une République vidée de sa substance, infiltrée par les logiques tribales qu’elle ne comprend plus et qu’elle n’ose plus combattre.
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Les élus locaux pactisent avec les seigneurs du quartier, les associations communautaires se substituent aux institutions, et la peur s’installe dans le quotidien des citoyens ordinaires, devenus étrangers chez eux.
On assiste à un phénomène paradoxal : la France n’est plus coloniale, elle est recolonisée. Non par la force d’une armée, mais par l’idéologie, la démographie et la lâcheté. Les anciens colonisés ont importé leurs structures claniques, leurs réflexes d’allégeance, leur vision hiérarchisée du monde. Et l’État, rongé par la culpabilité postcoloniale, s’interdit d’y opposer sa propre verticalité. Il abdique son rôle de souverain, se réduit à une ONG qui distribue la paix sociale à crédit. Cette démission ouvre un espace où prospèrent les caïds, les islamistes et les militants indigénistes, qui jouent chacun leur partition dans la même symphonie : celle du tribalisme triomphant. Les uns dominent par la violence, les autres par la foi, les derniers par le discours victimaire. Le résultat est identique : la République s’efface, le clan règne.
La France, en somme, n’est plus un État-nation : elle devient une mosaïque de tribus, où la force du groupe l’emporte sur la loi commune. Une Al Françalus à visage démocratique, où les dhimmis d’aujourd’hui s’appellent contribuables, fonctionnaires, professeurs, policiers. Ils paient la djiziah moderne : impôts, subventions, silences et excuses. Tout cela pour ne pas être massacrés symboliquement, pour éviter d’être traités de racistes, d’islamophobes ou d’extrémistes.
Revenir au réel, ou Seinesaintdeniser tout le pays
Le choc viendra si la France ose regarder le réel en face, si elle se rappelle qu’elle n’est pas une idée mais une civilisation.
La chute, en revanche, se produira si elle continue de se raconter qu’il suffit de “vivre-ensemble” pour que la guerre des clans s’éteigne d’elle-même.
Mais si l’on fait enfin le bon diagnostic, alors il faut en tirer des conséquences concrètes.
Il faut revoir la politique migratoire, non par haine mais par lucidité, pour ne pas reproduire sur le sol français les structures claniques des pays d’origine. Et il faut repenser la politique du logement, afin de rompre avec les logiques de concentration ethnico-culturelle qui servent d’incubateurs à ces normes socioculturelles. En continuant à regrouper, par “solidarité”, ceux qu’il faudrait mêler à la cité commune, on organise la sécession du pays réel. La France ne peut pas rester une mosaïque de “douars urbains” subventionnés, où le vivre-ensemble se transforme en vivre-à-part. Si nous persistons dans cette voie, nous Seinesaintdeniserons tout le pays — et ce mot-là dit bien ce qu’il veut dire : transformer la nation entière en un territoire morcelé, où la loi du clan se substitue à la loi commune.
Nous aurons alors cru la sauver par la tolérance pendant que nous l’étranglions par le mensonge. La chroniqueuse Sabrina Medjebeur l’a bien vu : il ne s’agit plus d’un problème de coexistence, mais de survie politique et morale. Il faudra une génération de Français décidés à reconstruire la cité, non sur la peur ou la repentance, mais sur la vérité nue du réel. Car comme le disait Lacordaire : « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit. »
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