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«Emprise» : au nom des 99,9%…


Il serait temps que les hommes normaux qui avaient vingt ans dans les années 80 demandent des comptes aux winners du sexe qui trichaient en plaçant les femmes sous «emprise»…


Lorsque j’étais jeune et que je draguais, comme l’immense majorité de mes potes, je me prenais veste sur veste. Mon taux de réussite calculé sur une série longue était proche de 0%. Toutes les filles, toutes, les belles, les moches, les jeunes, les vieilles, les intelligentes, les idiotes, toutes, sans exception, voulaient sortir avec un tout petit nombre de garçons, 0,1% environ, toujours les mêmes, en général des gars beaux et virils, souvent un peu plus âgés, et/ou connus, et/ou riches, mais toujours très sûrs d’eux, des « winners ». Du genre PPDA ou ces types en boite assis aux meilleures tables, avec cinq mannequins de l’agence Élite autour d’eux, vous vous souvenez?

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Bref, la situation de marché était la suivante:

– moi et 99,9% des mecs, aucun succès.

– 0,1% des mecs croulaient sous la demande unanime des filles et ne pouvaient répondre à toutes ces sollicitations.

C’était un peu énervant mais on acceptait, car c’était ainsi qu’allait le monde. Cela ne nous empêchait ni d’être heureux, -on discutait entre copains, on regardait du foot, on jouait à la belote, pendant que les 0,1% d’élus faisaient l’amour-, ni de trouver -après mille échecs, sur un malentendu-, une femme qu’on aimait.

Grâce aux progrès scientifiques du  féminisme

Sauf que… je réalise aujourd’hui, grâce aux progrès scientifiques du féminisme, qu’en fait, les filles voulaient (au fond d’elles-mêmes) sortir avec moi et la majorité silencieuse! Mais voilà, elles étaient « SOUS EMPRISE » des 0,1% de mecs! En fait ces hommes les « violaient », selon la nouvelle définition. On le comprend aujourd’hui avec toutes ces femmes qui, 20 ou 30 ans après leur relation, accusent de viols ces mâles alpha, -précisément ceux qui nous piquaient toutes les nanas à l’époque-, car elles réalisent enfin, grâce, donc, aux magnifiques progrès de la science, qu’elles étaient « SOUS EMPRISE. »

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Au nom des 99,9% de mecs qui se prenaient des vestes, je demande aujourd’hui solennellement réparation, pour préjudice moral, à tous ces types qui ont couché avec des milliers de femmes, les PPDA, Patrick Bruel, chanteurs, artistes, acteurs, coureurs automobiles, présentateurs, sportifs, patrons millionnaires, pilotes de ligne, chirurgiens médiatiques et aussi les moins connus du grand public, toi Alex A, toi Samuel R (vous vous reconnaîtrez, c’est facile, à l’instant où j’écris ces mots, une fille nue, -SOUS EMPRISE-, différente de celle de la veille, sort de vos draps).

Une tricherie historique

Vous avez triché avec votre « EMPRISE » bande de salauds.

Nous, les hommes normaux, avons été privés de femmes à cause de vos pratiques déloyales: nous exigeons un dédommagement pour corriger cette tricherie historique.

Crise et châtiment

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A Trappes nigaud


Dans le tract qu’il a distribué contre Didier Lemaire, le maire de Trappes Ali Rabeh nous fait connaître son admiration pour Kery James. Le rappeur converti à l’islam ne s’était pourtant pas caché de ses attitudes misogynes par le passé.


L’épisode opposant le prof de philo, Didier Lemaire, au maire de Trappes, Ali Rabeh, a fait couler beaucoup d’encre. Affaire dans l’affaire, le maire de gauche est allé distribuer un tract blâmant l’enseignant au sein même de son lycée. Mais on a peu relevé qu’à la fin de la missive distribuée aux élèves figuraient quelques vers du rappeur « banlieusard et fier de l’être », Kery James. Né en Guadeloupe en 1977, Alix Mathurin (c’est son vrai nom) était reçu à la télévision par Ardisson en 2002 pour un disque dans lequel il racontait sa conversion à l’islam.

Question de l’homme au costard noir : « Vous refusez les interprétations intolérantes du Coran, mais, paraît-il, vous refusez de serrer la main aux femmes et même de leur faire la bise ? » Kery James : « Oui, a fortiori. Le Prophète ne faisait pas cela. Et les femmes du Prophète ne faisaient pas cela. […] Il faut pouvoir imaginer qu’il peut y avoir des gens qui ont des codes de savoir-vivre différents des nôtres. Il faut savoir respecter cela, voilà. » Ardisson poursuit cette enrichissante découverte de l’Autre : « Quand on va sur le site qui est indiqué sur votre album, on apprend, par exemple, qu’il ne faut pas frapper les femmes au visage. Ça veut dire qu’on a le droit de les frapper ailleurs ? » Kery James, pas gêné : « Non, cela ne veut pas dire cela. Cela veut juste dire que les frapper au visage est un péché plus grave encore. » Il explique ensuite pourquoi il a fait le choix de ne pas utiliser d’instruments à vent ou à cordes dans sa musique, car ils constituent des « péchés de l’oreille ». Rabeh écrit que, dans sa jeunesse, plein de doutes existentiels, il écoutait Kery James tous les jours sur le trajet de son lycée et que cela l’a aidé.

Heureusement que le CNRS, invité par Frédérique Vidal à se prononcer sur les dérives idéologiques à l’Université, est venu balayer toutes les inquiétudes : « L’islamo-gauchisme, slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique. »

La France terre d’accueil: l’agresseur du photographe de Reims avait déjà été condamné huit fois!

Anes Said K, 21 ans, est enfin en prison. Il aurait dû y être depuis longtemps et en tout cas expulsé. Des juges bienveillants et scrupuleux en ont décidé autrement.

C’est lui qui dans un déchainement glauque et bestial de violence a massacré le photographe de l’Union de Reims. Celui-ci est toujours dans le coma. Comme il s’agit d’un
journaliste, Darmanin s’en est soucié et a demandé une enquête approfondie sur son cas estimant qu’il y avait eu des failles dans la gestion de Anes Said K.

Un titre de séjour obtenu en Espagne

Nous pouvons l’aider à les trouver. À 13 ans Anes Said K était arrivé en France venant d’Espagne. De nationalité algérienne, il avait obtenu là-bas un titre de séjour. Puis avec sa famille il est parti pour la France. Entre notre pays et l’Espagne il n’y a plus de Pyrénées… Ainsi le veulent les Accords de Schengen.

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La valeur n’attendant pas le nombre des années, son parcours judiciaire a commencé au Tribunal pour enfants de Bobigny. Ensuite déménagement à Reims. Et là, devenu majeur, il a continué sur la voie empruntée à Bobigny. Ces deux dernières années, il a écopé de huit condamnations : vols, trafic de stupéfiants, violences en réunion. Les juges étaient habitués à le voir. Et pour le revoir ils ont pensé qu’il ne fallait pas le mettre en prison où il aurait échappé à leur affection.

La responsabilité des juges questionnée

On ne connait pas les peines auxquelles il a été condamné, le procureur de Reims n’ayant pas communiqué sur cette question. On peut supposer qu’elles étaient assorties d’un sursis. Mais est-ce qu’un sursis tient en cas de récidive ?

A lire aussi, Anne-Sophie Chazaud: Des “valeurs de la République” à géométrie variable

On sait en revanche, d’après le procureur de Reims, que ces peines étaient « aménageables ». C’est-à-dire commuées en travaux d’intérêt général. C’est d’ailleurs pour s’être soustrait à l’une de ces obligations qu’Anes Said K a passé quand même trente jours en prison.

Ce qui au regard de ses huit condamnations n’est pas excessif. L’a-t-on expulsé ensuite ? Les policiers le connaissaient bien. Ils ont fait leur travail en l’arrêtant à plusieurs reprises. Les juges eux aussi le connaissaient bien. Vous trouvez que les juges ont fait leur travail ?

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« Le photographe agressé à Reims été victime de notre folie migratoire »

À table!


Il manquait à tout amateur de cuisine et d’anecdotes culinaires une somme réunissant, avec humour et érudition, histoire, recettes et historiettes. C’est chose faite, il est encore tout chaud, c’est Le Bouquin de la gastronomie.


Jean Vitaux est un grand monsieur. Président de l’Académie des gastronomes – au fauteuil de Curnonsky, excusez du peu –, archiviste du Club des Cent et membre d’une ribambelle d’associations gourmandes, ses connaissances littéraires et académiques se doublent d’un savoir scientifique qui n’est pas inutile pour comprendre l’évolution de la gastronomie française au fil des siècles. Comme le souligne Nicolas d’Estienne d’Orves dans sa préface: « À bien y regarder, le goût est même le dernier sens que la France n’ait jamais cessé de faire rayonner. Si nous avons pu dicter la pensée, la politique, la diplomatie, une certaine philosophie, la littérature et les arts, cet empire s’est émoussé ; en revanche, chez nous, tout se passe encore à table. » Pour comprendre tous les rouages secrets, toutes les étapes nécessaires à l’élaboration de cet art de vivre, Jean Vitaux présente la gastronomie sous tous les angles: aspects théoriques et pratiques, ordonnancement des repas (service à la russe ou à la française), descriptions des produits et de leur usage, variations des recettes selon les classes sociales, sociologie du comportement du gastronome… sans oublier, bien sûr, les recettes. Son Bouquin en compte près de 500 ; des rôtis de Taillevent (XIVe siècle) aux bouillons d’apothicaires (tel ce bouillon de vipères pour purifier le sang), en passant par la grande cuisine bourgeoise du XIXe et, plus facile à réaliser, l’œuf à la coque ou la quiche au lard. Les amateurs retrouveront aussi quelques extraits du Festin Joyeux (1738), de J. Lebas. Les recettes sont en vers et, pour chacune, l’auteur indique sur l’air de quelle chanson elle doit être prononcée. Si Jean Vitaux consacre une large place aux gibiers, viandes rouges, foies gras et cassoulets, les recettes à base de légumes se comptent par dizaines: asperges à la Pompadour (de Monselet), concombres farcis (de Ligier), macédoines de légumes printaniers (d’Alexandre Dumas), purée d’oignons à la Soubise (de Carême), tomates farcies à la provençale (d’Escoffier), etc.

couv-bouquin-gastronomie-miniPlusieurs textes anciens et modernes prouvent par ailleurs que la question de la saisonnalité n’est pas la lubie d’une nouvelle génération de locavores, mais répond à un souci juste et humain, celui de savoir bien manger. Les plats proposés par Prosper Montagné (1865-1948) en sont la preuve. En janvier: barquettes d’huîtres à la normande ou darnes de saumon à la bourguignonne (sauce au vin rouge); en février, endives au parmesan; en mars, soufflé aux épinards dit à la florentine; en avril, paupiettes de merlan…

Ce livre se lit d’une main, l’autre étant occupée à tenir la casserole, et permet de méditer cette phrase de Brillat-Savarin : « La cuisine est le plus ancien des arts, car Adam naquit à jeun. »

Jean Vitaux, Le Bouquin de la gastronomie, Robert Laffont, 2020.

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Condamnée, Assa Traoré s’entête


Assa Traoré avait accusé sur Facebook les trois gendarmes qui ont interpellé son frère en juillet 2016 d’être responsables de sa mort, tout en dévoilant leur identité. Condamnée, elle persiste et continue de crier au complot, appuyée par des médias de gauche complaisants…


Après avoir été désavouée en appel, la sœur d’Adama Traoré continue d’attiser le ressentiment. Quitte à enfreindre la loi ?

Les revers s’accumulent pour la famille Traoré. Pourtant, notre égérie racialiste persiste et signe.

Suite au jugement de la cour d’appel de Paris qui l’a sanctionnée pour atteinte à la présomption d’innocence après qu’elle a divulgué les noms des gendarmes présents le jour du décès d’Adama, elle s’obstine. Malgré les injonctions de la Justice qui la condamne à verser quatre mille euros aux plaignants, ainsi qu’à afficher un communiqué sur Facebook et supprimer deux publications, Assa Traoré a réitéré ses accusations sur la page « La vérité pour Adama », livrant une nouvelle fois à une foule assoiffée de repentance les identités des militaires qui – d’après elle – auraient tué son frère.

L'avocat des Traoré, Yassine Bouzrou, serait-il prêt à tout ? © Michel Euler/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22355911_000008
L’avocat des Traoré, Yassine Bouzrou © Michel Euler/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22355911_000008

Alors que les forces de l’ordre paient déjà un lourd tribut face à la délinquance, qu’elles sont quotidiennement insultées, attaquées (pas moins de 379 faits de violences urbaines ont été recensés contre la police durant la seule période du premier confinement, dont 79 guets-apens ! NDLA ), et qu’elles figurent parmi les premières victimes du terrorisme, l’accusation publique, irresponsable et répétée envers ces fonctionnaires pourrait être perçue comme un appel à la haine, voire une mise en joue.

Manipulation et parano

Usant de procédés similaires dans ses diatribes anti-France, s’appuyant sur une vision fallacieuse et lacunaire de la colonisation occidentale, la jeune femme martèle avec véhémence que les gendarmes auraient du sang sur l’uniforme : « Les expertises concluent noir sur blanc que sans l’intervention des policiers, Adama ne serait pas mort. Donc Adama Traoré est mort entre les mains des gendarmes. » Or, douze rapports médicaux sur la mort d’Adama ont été réalisés en quatre ans, et aucun n’a conduit la Justice à revoir son jugement.

A relire, notre enquête: La vérité sur l’affaire Adama Traoré

Acculée une fois de plus, Assa Traoré flirte dorénavant avec la paranoïa, ou du moins en adopte le discours : « La vérité c’est qu’Assa Traoré est visée de manière particulière, parce qu’elle est à l’origine d’un vaste et historique mouvement citoyen, qui effraie les institutions racistes. » Si on la lit bien, Assa Traoré estime être le phare de tout un peuple freiné dans son émancipation. Pas moins!

Dans une posture à mi-chemin entre l’artiste incompris et le prisonnier politique et malgré l’indéfectible soutien médiatique dont elle bénéficie, la porte-parole de la famille désormais la plus connue de Beaumont-sur-Oise laisse entendre qu’elle subirait une cabale menée depuis les entrailles de l’État. Bagui, son frère, ne résiste pas non plus à la théorie du complot, quand il évoque l’intervention des gendarmes : « Je suis persuadé qu’ils avaient mis un contrat sur sa tête ».

«La vérité pour Adama» devrait être rebaptisée «La vérité d’Assa»

La page Facebook « La vérité pour Adama » présente un sacré mélange des genres. Au milieu des articles de Mediapart et des appels à manifester contre les « violences policières » et « l’islamophobie », on découvre le soutien d’eurodéputés écologistes et d’associations aux profils bien différents (Act Up, Extinction Rebellion, …).

A lire ensuite, Philippe Bilger: Assa Traoré nage en plein délire!

On y trouve également des portraits élogieux de la presse new-yorkaise au sujet de la sœur d’Adama, des vœux de bonnes fêtes adressés aux internautes musulmans avec l’inscription « Une pensée pour tous les opprimés », des photos avec Omar Sy ou bien encore à l’Assemblée Générale de Sciences Po Toulouse, une publicité pour le livre d’Assa Traoré et des totes bags (comprenez « des sacs en toile »), et même une opération spéciale Noël pour offrir des t-shirts aux abonnés « qui comme nous ont un proche en prison ».

Les Traoré adeptes de la self-justice

Soumettre à la vindicte populaire est symptomatique de la famille Traoré, dont la stratégie repose sur une méthode pas vraiment républicaine : la victimisation, quand elle ne suffit pas, laisse place à la vengeance. On retrouve ce caractère vindicatif dans l’expédition punitive menée par Yacouba Traoré contre le co-détenu qui, avant d’être indemnisé, avait accusé Adama de viol. Cet acte de violences en réunion – qualifié par le procureur de « véritable guet-apens » et de « sauvage agression » – lui vaudra dix-huit mois de prison. Bagui, le grand frère d’Adama, a également essayé de se faire justice lui-même. Déjà condamné – avec Ysoufou, un autre des frères Traoré – pour violences contre cinq policiers municipaux et trois gendarmes, puis pour trafic de drogue et extorsion violente sur deux femmes placées sous curatelle renforcée, il est cette fois-ci renvoyé devant les assises pour le doux motif de « tentative d’assassinat » durant les exactions qui avaient suivi la mort d’Adama.

Aujourd’hui, c’est donc Assa qui perpétue la tradition familiale. À ce rythme, et en constatant l’état d’engorgement de nos tribunaux, il faudra bientôt construire un palais de justice réservé exclusivement au clan.

L’affaire Sarah Halimi, ou les errements de la justice française

 


La Cour de cassation examine le dossier de Sarah Halimi, une dame juive de 65 ans morte défenestrée après avoir été sauvagement frappée par son voisin. La cour d’appel ayant considéré le meurtrier irresponsable de ses actes, c’est le dernier espoir pour la famille d’obtenir un procès. Retour sur une ignoble affaire qui suscite une terrible incompréhension. 


Un matin, à Paris, quelques jours avant la présidentielle 

Un immeuble du XI arrondissement, le matin du 4 avril 2017, il est environ 4 heures du matin lorsque Kobili Traoré, un homme de 27 ans, quitte son appartement situé au 30 rue Vaucouleurs pour se rendre au numéro 26 de la même rue. Il frappe énergiquement à la porte de la famille D, des connaissances de longue date, leurs parents étant originaires du même village malien que lui. Kobili semble agité : vêtu d’un tee-shirt, d’un bas de pyjama, pieds nus, il tient dans ses mains ses chaussures et un jean, le père de la famille D hésite à le faire entrer, mais finit par y consentir après quelques éclats de voix.

Selon les témoignages des protagonistes, sans aucune explication, le jeune homme qui habite dans l’immeuble mitoyen s’installe alors sur le canapé et tient des propos incohérents où il est question de mort et de démons. Les minutes passent et il paraît de plus en plus agressif et menaçant. Il affirmera plus tard ne pas se souvenir d’avoir usé de violence contre la famille D. Ce qui n’empêchera pas les membres de cette famille de prendre peur et de se retrancher dans une pièce qu’ils barricadent avec un meuble.De cet abri de fortune, ils l’entendent psalmodier des versets du Coran dans ce qui semblait être une prière. De longues minutes passent, quelqu’un de la famille téléphone à la police pour prévenir qu’un individu les séquestre. 

Entre temps, Kobili se change. Il enfile le jean et les chaussures qu’il avait en arrivant, puis enjambe la rambarde pour accéder au balcon d’à côté, celui de Sarah Halimi, revenant ainsi dans l’immeuble qu’il avait quitté un peu plus tôt… De là, en forçant les portes-fenêtres, il pénètre dans l’appartement de sa voisine, et une fois à l’intérieur, la vue d’une Menorah et d’un livre de prière lui font « perdre l’esprit ». Le calvaire de Madame Halimi commence… On ignore ce qui s’est exactement passé, car les deux seuls témoins sont Madame Halimi et son bourreau. Certains voisins auraient entendu des bruits sourds ressemblant à une course poursuite et à des coups, d’autres des hurlements et des gémissements de femme et la voix d’un homme qui proférait des insultes, entrecoupées de « Allah akbar ».

Une agression extrêmement violente

L’agresseur aurait commencé à battre Madame Halimi dans le salon. Quelques objets ensanglantés ainsi que les vêtements maculés de sang de l’agresseur attestent de l’extrême violence des coups. Kobili aurait traîné ensuite sa victime sur le balcon où il continue à la frapper en poussant des hurlements. C’est un tapage tel que des voisins des immeubles d’en face sont réveillés malgré les doubles vitrages. Des témoins contactent la police, l’informant qu’ un homme est en train de battre une femme en l’invectivant. 

Le calvaire aurait duré quelques minutes, avant que l’homme ne fasse basculer Madame Halimi par la rambarde du balcon. Des témoins, dont un policier, auraient entendu dire distinctement à ce moment : « Attention, une femme va se suicider ! » Tandis que le corps de Sarah Halimi gît trois étages en dessous, l’assassin refait tranquillement le trajet en sens inverse et retourne par le balcon dans l’appartement de la famille D. Lorsque la police intervient quelques minutes plus tard, Kobili est calme et se laisse arrêter sans résistance. En début d’après-midi, après quelques heures passées en garde à vue, il est transféré dans une unité psychiatrique.

Une affaire truffée de confusions et de tergiversations

Présence de la police

Suite à l’appel téléphonique initial de la famille D, une patrouille de police arrive rapidement sur les lieux. Alertés pour la séquestration, les policiers se postent derrière la porte. C’est à ce moment là qu’ils entendent les cris d’un homme, ceux d’une femme, et des bribes de mots en arabe venant de l’immeuble mitoyen. Pensant qu’ils faisaient face à une attaque terroriste, ils appellent du renfort.

Entre temps, la police reçoit d’autres appels où il est question d’un homme en train de violenter une femme sur le balcon. Pour la police, il y a donc deux incidents : chez les D, puis quelque part ailleurs dans l’immeuble. La configuration des lieux accentue la confusion : l’immeuble de la famille D et celui de Madame Halimi, de même que leurs appartements, sont mitoyens, cependant l’un se trouve au numéro 26 et l’autre au numéro 30; les policiers ne comprennent ni ce qui se passe vraiment ni où précisément. Quelques semaines après le drame, les proches de la victime dénoncent « l’inertie » des forces de l’ordre et « l’absence de coordination des services », et déposent une plainte pour « non-assistance à personne en danger. »

Le mobile antisémite

Malgré ce qui semble être une évidence, la motivation antisémite de l’assassinat ne sera retenue qu’en février 2018, soit onze mois après les faits. La raison en est que dans ses dépositions, l’agresseur affirme qu’il ignorait chez qui il se rendait (« cela aurait pu tomber sur n’importe qui»), écartant ainsi toute préméditation et donc motivation antisémite. Déclarations que conteste William Attal, le frère de la victime : « Ma sœur craignait terriblement cet homme, il l’avait traitée de sale juive […] Mais elle avait peur que porter plainte soit dangereux pour elle » a-t-il affirmé , ajoutant que celle-ci avait déposé une demande pour déménager à l’office HLM de Créteil. L’une des raisons de tant d’hésitations sur le caractère antisémite du crime pourrait s’expliquer par le contexte politique de l’époque. Au printemps 2017, nous étions en pleine campagne présidentielle, il était surtout question « de ne pas faire le jeu des extrêmes .» 

« La mort atroce de Sarah Halimi ne devait pas troubler la campagne électorale. Informer l’opinion risquait de l’encourager à « stigmatiser », « amalgamer » », écrivait l’essayiste Barbara Lefevre en 2018 dans nos colonnes.

Bouffée délirante et état psychologique discuté

En septembre 2017, une première expertise psychiatrique conclut à « l’altération du discernement au moment des faits », diagnostiquant chez Kobili Traoré « une bouffée délirante aiguë à thématique mystique et démonopathique », induite par sa consommation régulière de cannabis. Toutefois, ce premier rapport ne remettait pas en cause la responsabilité pénale de l’homme, susceptible donc de comparaître devant une Cour d’assises.

En avril 2018, une année après les faits, la magistrate en charge du dossier mandante d’autres experts pour évaluer à nouveau l’état psychiatrique du prévenu.

En mai et en juin suivants, deux entretiens d’une durée de deux heures, chacun menés avec Kobili, concluent à l’abolition totale du discernement, ce qui revient à la déclarer irresponsable de ses actes. De nombreux commentateurs contestent ce diagnostic et soulignent le fait que le suspect n’avait aucun antécédent psychiatrique, contrairement à son lourd casier judiciaire faisant mention de nombreuses incarcérations, notamment pour « vol, violences, usage et détention de stupéfiants, d’arme prohibée ». Pour Me Jean-Alex Buchinger, un des avocats de la famille, les réponses du prévenu sont « claires, structurées et préparées[…] elles prouvent qu’il n’était pas dans un état de démence ni à l’époque des faits, ni aujourd’hui », déclare-t-il à la presse.

Selon Me Caroline Toby et Me Francis Szpiner, avocats de la famille Halimi, en l’absence d’unanimité entre les experts, « il appartient à une juridiction de jugement de discuter les circonstances de purs faits, comme la tentative de maquillage du crime en suicide », mettant ainsi l’accent sur le fait que le prévenu ait eu suffisamment de discernement pour crier qu’une femme allait se suicider avant de la défenestrer. En décembre 2019, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris tranche la question : Kobiki est pénalement irresponsable, son procès n’aura pas lieu.

Incompréhension, indignations et mobilisations

La décision suscite alors un vif émoi, l’affaire Sarah Halimi prend une nouvelle dimension.

 MGilles-William Goldnadel, avocat de la sœur de Sarah Halimi, dénonçait alors une « décision idéologique » de la part des magistrats qui ont, selon lui, une « grande répugnance à condamner ceux qui sont considérés comme des victimes de la société ». Pour MFrancis Szpiner, conseil des trois enfants de la victime, cette décision « scandaleuse » pourrait constituer une jurisprudence. « On vient de créer dans notre pays une jurisprudence Sarah Halimi, c’est-à-dire que toute personne qui sera atteinte d’une bouffée délirante parce qu’elle aura pris une substance illicite et dangereuse pour la santé se verra exonérée de responsabilité pénale », avait-il déclaré dans la presse. Sur les réseaux sociaux, beaucoup de personnalités et d’anonymes contestent cette décision, rappelant que cette affaire ne concerne pas seulement la communauté juive mais l’ensemble des Français, il y va de la question d’impunité.

Les associations se mobilisent et le 5 janvier 2020, des manifestations et des marches blanches, réunissant des centaines de personnes, se déroulent dans plusieurs villes. L’affaire déchaîne alors tellement les passions qu’Emmanuel Macron se voit obligé d’en prendre acte. Deux semaines plus tard, lors d’un déplacement en Israël, le président de la République rappelle qu’un « pourvoi en cassation a été formulé et constitue une voie possible », soulignant que « le besoin de procès est là. » Bien que le président ait été « recadré » par la cour de cassation, cette affaire laisse un goût amer. 

D’autant plus que la cour de cassation ne réexaminera pas le fond du dossier, mais sa conformité juridique ; il n’est pas question de revenir sur l’abolition du discernement, mais de vérifier si la décision des magistrats de la cour d’appel est conforme.

Pitres à clic et club de buzz


L’émission #sansfiltre, proposée et diffusée sur les réseaux sociaux de Gabriel Attal, est une opération de propagande à destination des jeunes. Ce que tout le monde a bien compris. Mais son caractère éthiquement discutable doit être interrogé, alors que le porte-parole du gouvernement entend renouveler l’opération une fois par mois…


Ce 24 février, Monsieur Attal de Couriss, porte parole au prénom d’archange annonciateur, conviait à la Cour, pour son premier streaming vidéo via Youtube et Twitch, des influenceurs. Le casting était calibré pour ratisser large : queer, diversité, gay et face de droïdes experts en teint « glowy » et tutos «je colorie mes sourcils sans dépasser». Les principales parts de marché à séduire étaient là.

Quand le gouvernement veut faire le buzz…

 #Sans filtre, la nouvelle émission de Gabriel Attal, nous est présentée comme une opération de transparence branchée à destination des jeunes avec, comme alibi bienpensant, la volonté de rappeler l’importance de chaque geste dans la lutte anti-Covid. Mais s’agit-il vraiment de fraîche spontanéité renouvelant le jeu démocratique ? Le sujet mérite analyse au-delà du buzz de surface qui a brièvement fait frémir les médias en ligne.

L’information diffusée via l’AFP en juillet dernier et reprise par tous les médias donne une première idée de la stratégie sous-jacente. La volonté affichée cet été de «se doter à l’Élysée d’une équipe commando, chargée de fournir des résultats, d’améliorer la lisibilité et le récit de l’action publique et de préparer la campagne de 2022» a conduit au départ de Joseph Zimet et à son remplacement à la tête de la communication, par Clément Leonarduzzi, président de Publicis Consultants, branche Influence du groupe Publicis. Le pedigree de l’homme suffit à comprendre l’objectif.

La conscience écolo d’Enjoy Phoenix

Aujourd’hui, les fruits de cette greffe commencent à mûrir. Emmanuel Macron fait mine de s’improviser instagrameur dans des selfies, tel celui du défi lancé à Mac Fly et Carlito, respectivement 10ème et 12ème dans le classement en nombre d’abonnés des influenceurs français. Gabriel Attal multiplie les « live » allant jusqu’à interagir avec deux jeunes frères youtubeurs Néo et Swan de 16 et neuf ans.

Avant de nous la jouer Pretty woman à l’Élysée, Enjoy Phoenix, en février 2020, gratifiait déjà sa « communauté » d’une « journée dans la peau d’une ministre » en suivant Brune Poirson. Cinquante minutes d’enthousiasme auprès de sa Brune pour nous prouver que ce membre du gouvernement faisait beaucoup sans que nous le sachions, la preuve en étant qu’à peine 48 heures après qu’Enjoy Phoenix ait évoqué le problème des couverts en plastiques faussement estampillés « réutilisables », la ministre appelait déjà un fabricant de fourchettes pour lui dire que c’était mal. Elle a également eu les honneurs d’un « live » avec Gabriel Attal. Classée 4ème sur la liste des plus gros influenceurs français, la madone des réseaux est une belle prise pour les communicants de la Macronie et il convient de la rentabiliser.

Une démarche qui interroge

Avec de tels profils via Twitch, Gabriel Attal vient d’ajouter une fenêtre vers des millions d’enfants, d’adolescents et de jeunes adultes déjà approchés par Snapchat, Tik Tok, Instagram et Twitter.

C’est donc une stratégie de conquête du Far West virtuel et sauvage qui est en marche, l’occupation d’un espace numérique ultralibéral où foisonne, sans frontières ni shérif, le meilleur comme le pire. Et c’est précisément cette nature de zone médiatique non régulée qui doit nous interroger quant à l’éthique d’une telle démarche.

A lire ensuite, Gilles-William Goldnadel: Dissolution de Génération Identitaire: «Même sur le plan politicien, je ne trouve pas ça malin!»

En effet, le propre de cet univers est de starifier des gens normaux, tout en simulant la proximité avec leurs fans par un tutoiement de connivence, un vocabulaire familier et affectueux. Les distances et la hiérarchie s’effacent. De la même façon, une absence de cloisonnement permet à des vidéos de cuisine de côtoyer des contenus violents ou pornographiques, le tout étant aussi accessible à un mineur qu’à un adulte. Enfin, de nombreux contenus sponsorisés y sont travestis en simples informations, les influenceurs n’étant jamais que les hommes sandwiches du XXIème siècle. 

Ces ambigüités ont été parfaitement exploitées dans l’exercice de «grooming»[tooltips content= »Le « grooming » est un processus de préparation que les prédateurs utilisent gagner la confiance de l’enfant via internet (écoute, langage amical, techniques de partage de sentiments et de secrets…) »](1)[/tooltips] politique que nous a servi Gabriel Attal dans son émission: absence de cravate, tutoiement, posture corporelle ouverte, éléments de langage rassurants martelés : « le bout du tunnel », « le gouvernement travaille »… Le choix de participants n’étant pas en capacité de mener une réelle analyse politique du sujet lui a permis de dérouler sans contradiction majeure sa rhétorique. Le porte parole du gouvernement a même pu s’offrir le luxe de se tailler un costume de redresseur de torts à peu de frais en proposant de résoudre les cas particuliers que ses intervenants exposaient en guise de contestation de ses affirmations. Effrayant jeu de rôle en univers douteux, bien éloigné d’une innocente rénovation du débat politique par transposition sur un nouveau media.

Et donc tout le monde trouve ça normal?

C’est donc une magnifique opération de propagande, ciblant notamment des enfants qui commence, sans qu’aucun acteur politique ne s’en offusque. En outre, le simple fait qu’elle se déroule dans un espace aux nombreuses zones d’ombre rend la démarche éthiquement douteuse. Une nouvelle fois s’exprime l’ambigu « En même temps » marqueur du quinquennat : pendant qu’un ministre se charge de développer l’éducation aux dangers des réseaux sociaux, le président et le porte-parole du gouvernement en valorisent l’usage et en exploitent les leviers les plus douteux. Tout ce que l’agora compte de défenseurs de la démocratie se doit donc de s’emparer du sujet au plus vite car, si la nature de communication politique de l’opération a bien été identifiée, son caractère éthiquement discutable n’a pas fait objet de débats. L’Histoire nous a pourtant appris que la manipulation des enfants et des adolescents par un pouvoir politique ne se rencontre pas en temps démocratiques.

Des “valeurs de la République” à géométrie variable


Condamnation de Nicolas Sarkozy, dissolution de Génération identitaire: bienvenue dans la République des « oui mais ».


Jamais les fameuses « valeurs de la République » n’auront été autant évoquées, à la limite du mantra hypnotique, en « sautant sur sa chaise comme un cabri » eût dit le Général de Gaulle, à la mesure exacte de leur constant recul dans la sphère publique, tant du fait de la désagrégation de la société française que de leur non-respect par ceux-là mêmes qui sont chargés de les faire appliquer et de les incarner.

La condamnation spectaculaire de l’ancien président de la République en première instance en a fourni une première et consternante illustration, qui n’a du reste pas manqué de faire réagir et est venue dégrader un peu plus une image déjà très détériorée de la Justice dans l’esprit du peuple français, au nom duquel elle est supposée être rendue (selon quelque légende urbaine manifestement passée de mode).

Sarkozy victime d’un acharnement judiciaire peu commun

Cette condamnation vient ponctuer de manière provisoire des années d’un acharnement judiciaire peu commun, frisant régulièrement le parfait grotesque, ayant déployé des moyens d’investigation aussi considérables que partiaux, voire illégaux (mais bien entendu entérinés par une Cour de Cassation bien peu scrupuleuse). Écoutes téléphoniques de conversations entre un avocat et son client, déloyauté de la non-preuve (une prouesse !), interprétations farfelues voire paranoïaques et relevant par moments de la psychiatrie lourde des propos retenus comme « preuves » contre Nicolas Sarkozy, méthodes peu scrupuleuses d’instruction à charge, « chasse au Sarkozy » obsessionnelle (pour reprendre l’expression de l’avocat Régis de Castelnau dont nous recommandons véritablement l’ouvrage récent puisqu’absolument tout ce qui s’est déroulé cette semaine est venu prouver la justesse de son implacable démonstration), parjures (qui ne semblent poser aucun problème à personne), doute profitant à l’accusation, explications tarabiscotées venant justifier un jugement injustifiable tant sur le fond que sur la forme, endogamie néfaste et mélange des genres entre les parquets –financier ou pas- et le siège : tout y est pour décrire une séquence judiciaire qui fait honte à la République.

Que l’on ne s’y méprenne pas : il ne s’agit en aucun cas de défendre Nicolas Sarkozy au plan politique. Il s’agit de défendre, précisément, des principes et des valeurs, comme celles, fondamentales, du respect des droits de la défense, de la présomption d’innocence, de la charge de la preuve, du secret des échanges entre un avocat et son client, du secret de l’instruction tant de fois bafoué dans les dossiers Sarkozy et, plus généralement, dans une justice devenue clairement politique. Il n’appartient par exemple pas à l’ancien président d’apporter la preuve de son innocence, mais à l’accusation d’apporter celle de sa culpabilité, ce qui n’a pas été fait, celle-ci bafouillant en lieu et place un incompréhensible salmigondis fondé sur quelque obscur « faisceau d’indices », lesquels ont surtout permis de conclure qu’il existait un sérieux faisceau d’indices démontrant in vivo l’acharnement judiciaire visant sa tête de Turc préférée.

Sarkozy refuse de parler de “justice politique”

Outre le non-respect d’un certain nombre de règles de droit fondamentales, valables pour n’importe quel justiciable, cette séquence a également permis de vérifier la thèse d’une justice devenue politique, quand bien même Nicolas Sarkozy, par évidente prudence eu égard à ses fonctions passées, s’est refusé à la qualifier de la sorte dans son entretien accordé au Journal télévisé de TF1 le 3 mars. Une justice qui, après s’être en quelque sorte autonomisée du pouvoir politique afin de gagner en « indépendance », a totalement perdu en « impartialité » : le rôle délétère du Parquet National Financier, infiltré de tous côtés par les amis socialistes de François Hollande, faussant sans scrupule le libre jeu démocratique, n’est plus à démontrer, après le raid éclair contre François Fillon qui a eu pour but de porter Emmanuel Macron au pouvoir.

A lire aussi, Philippe Bilger: Verdict Sarkozy: non, Vincent Trémolet de Villers, il n’y a pas de « malaise dans la démocratie »!

Des personnalités politiques que l’on peut difficilement soupçonner de soutenir politiquement Nicolas Sarkozy ont du reste fait part de leur réaction scandalisée face à cet énième épisode de la guerre entre une partie non négligeable de la magistrature politisée, celle du Mur des Cons où, rappelons-le, l’ancien président de la République figurait en place centrale, et une opposition politique qui sera assez systématiquement inquiétée par la justice quand les amis dudit pouvoir peuvent dormir d’un sommeil paisible (pour l’instant et jusqu’à ce que les mouches changent d’âne). Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont ainsi eu des mots particulièrement fermes pour condamner ce dévoiement de la justice, indéniablement politisée dans le sens d’un pouvoir qui idéologiquement lui convient et en lequel elle se reconnaît, par endogamie et perméabilité sociale, culturelle. Notons d’ailleurs que le responsable de la France Insoumise tout comme la présidente du premier parti d’opposition du pays font bien entendu l’objet de procédures dont on peut penser qu’elles viendront peser, si besoin, dans le processus électoral de 2022, comme ce fut le cas en 2017. Les bons et loyaux services n’auront pas même besoin d’être sollicités par le pouvoir puisque, pour des raisons idéologiques et sociologiques, une partie importante de la magistrature se reconnaît parfaitement dans le pouvoir en place, ce que la répression sans aucuns états d’âme du mouvement social des Gilets Jaunes aura démontré ad nauseam, sans que les syndicats de magistrats pourtant voués à défendre les libertés publiques, ne s’en émeuvent plus que cela.

Une épée de Damoclès sur les présidentiables

Nicolas Sarkozy aura beau jeu de jouer la carte d’un rapprochement avec Emmanuel Macron (qui a très probablement perdu la main sur son alliée judiciaire de 2017, comme le prouvent les coups de semonce lancés par les magistrats à l’encontre du Garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti) : cela sera peine perdue puisque la magistrature a, d’une certaine manière, fait sécession, exactement de la façon dont Christopher Lasch décrivait la « trahison des élites ».

On le voit, bien au-delà du simple cas de Nicolas Sarkozy dont on finit par s’étonner qu’il n’ait pas été également mis en cause, tant qu’à faire, dans le dossier du petit Grégory ou dans une éventuelle complicité avec Gilles de Rais, il en va de la démocratie toute entière à travers le rôle que s’est désormais arrogé la Justice afin de peser directement dans le processus électoral, au point de le fausser et de déposséder encore un peu plus qu’il ne l’est déjà, le peuple de sa souveraineté en la matière. Rappelons d’ailleurs à ce titre que Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, principaux opposants au pouvoir en place, font comme par enchantement l’objet de procédures rocambolesques frisant parfois l’absurde, afin de bien leur rappeler cette épée de Damoclès déclenchable en permanence au-dessus de leurs têtes, et quoi que l’on pense de l’un comme de l’autre. 

Pour cette raison qui souligne avec force les dysfonctionnements antidémocratiques de la justice contemporaine (certains magistrats faisant fort honorablement exception à cet hybris devenu délétère), les personnalités qui se sont réjouies de la condamnation de Nicolas Sarkozy commettent à la fois une faute (morale, philosophique, démocratique) mais aussi une erreur tactique et stratégique majeure puisqu’elles semblent ignorer qu’à ce petit jeu elles seront toujours les prochaines, un jour, sur la liste des injustices qu’elles auront promues pour de stupides raisons idéologiques opportunistes ou pour assouvir quelques petites rancœurs recuites. C’est le prix que l’on finit toujours par payer pour le lâche renoncement aux principes supérieurs.

Génération identitaire: une dissolution farfelue

Tout semble se passer, concernant Nicolas Sarkozy, comme si, pour lui, au regard de son côté clivant, les règles fondamentales du droit pouvaient être escamotées et, qu’après tout, la fin devait bien pouvoir justifier les moyens : eh bien non, il n’y a pas de « mais », il n’y a pas de négociation possible avec ces principes supérieurs. L’on ne transige pas avec les valeurs de la République dont on se repaît par ailleurs du matin au soir à proportion qu’on les bafoue.

A lire aussi, du même auteur: Le réquisitoire brillant de Régis de Castelnau contre les turpitudes de notre Justice

L’on retrouve cette même bassesse de raisonnement au plan des censures apportées à la liberté d’expression de la part d’un camp idéologisé qui ne supporte pas certains points de vue et considère, là encore, que la fin justifie les moyens : le texte accompagnant la dissolution par le gouvernement de Génération Identitaire est, à ce titre, un salmigondis de la plus belle facture, creux, empli d’élucubrations et, surtout, de subjectivité idéologique, qui permet de comprendre tout l’arbitraire d’une décision aussi démagogique (à tort puisque plus de 60% des Français considèrent qu’il existe un problème d’immigration immaîtrisée : l’étape suivante consistera-t-elle à dissoudre le peuple lui-même, entreprise certes déjà pas mal avancée par divers moyens… ?) que tactiquement stupide. Dissoudre une organisation sur des bases juridiques farfelues, alors même que les membres de ladite organisation n’ont fait l’objet d’aucune condamnation, se réjouir de cette décision inepte au plan juridique mais aussi au plan des principes élémentaires de la liberté d’opinion et d’expression, relève de la même logique à courte vue que nous évoquions au sujet des réactions à la condamnation de Nicolas Sarkozy (et quand bien même ces deux événements ne sont pas liés politiquement l’un à l’autre, loin de là…) : promouvoir une idéologie plutôt que des principes et valeurs supérieurs, ajuster la République et la démocratie à ses propres convictions, considérer que « la fin justifie les moyens » en vertu d’une vision subjective de ce qui serait le Bien et ce qui serait le Mal, bref, reprendre encore et toujours ce ver dans le fruit de la République française énoncé de manière aporétique par Saint-Just : « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ». Sauf que, qui décide de qui sont les ennemis de la liberté ? N’oublions pas que ce fut le même Saint-Just qui promut avec zèle la loi dite des suspects, permettant d’incriminer un peu tout le monde et n’importe qui du moment que cela convenait au pouvoir révolutionnaire devenu délirant et psychopathique. L’on ne semble pas en être très loin, par les temps qui courent…

Face à cette folie idéologique, qui est le mal français post-révolutionnaire par excellence (et qui explique qu’on le retrouve surtout porté par les mouvances « de gauche » -à supposer que cette partition idéologique ait encore une quelconque force opératoire-), le peuple ne se retrouve pas : la justice ne semble plus rendue en son nom mais contre lui. De la même manière, il faudra expliquer aux justiciables-électeurs que, le jour-même de la dissolution de cette organisation dont on peut penser ce que l’on veut (tel n’est pas le sujet), l’on apprenne qu’un délinquant multirécidiviste algérien a plongé un journaliste entre la vie et la mort. L’on n’empêchera pas le peuple de suggérer tant à ses gouvernants qu’à leur bras armé judiciaire d’apporter plus de zèle à assurer sa sécurité, à chasser du territoire les criminels qui n’ont rien à y faire, à protéger les citoyens, les journalistes, les enseignants, les justiciables, le peuple français tout entier, plutôt qu’à poursuivre des objectifs de justice politique faussant le libre débat démocratique et électoral ou encore à empêcher la libre expression des convictions.

Le spectacle observé cette semaine est celui, très préoccupant, d’une démocratie malade.

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Jean-Claude Carrière, aux racines de l’écriture

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L’écrivain-scénariste, merveilleux touche-à-tout, incarnait une expression libre et foisonnante


Hier, mon TER Centre-Val de Loire, ex-Corail, longeait le fleuve sauvage en flirtant avec la très yé-yé Nationale 7. Les paysages défilaient dans leur éternité reposante et leur tristesse monacale. Que la France semble apaisée d’un wagon désert, une triste journée d’hiver. Je regrettais seulement qu’un voile de pluie ne vienne pas compléter ce décor, le mélancoliser à l’extrême, m’arracher quelques palpitations supplémentaires.

Je suis un irrécupérable passéiste

Cette vue de l’esprit est trompeuse, je l’admets, elle met à distance les turpitudes des territoires comme on les appelle idiotement aujourd’hui, leur violence et leur fragilité internes. Irrécupérable passéiste, j’aime cependant les campagnes qui s’inclinent devant la nature brute, ce sol argilo-calcaire qui nous tient debout et qui nous a fait grandir. Je m’enivre de tous ces bourgs abandonnés aux rideaux baissés et du bruit d’une mobylette en fond sonore. Je fuis l’agitation humaine et l’activisme marchand, tous deux fortement suspects à mes yeux. Alors, je quitte la capitale et retourne chez moi, chez les miens. Mon « Cher » et ma « Nièvre » sont des compagnons d’infortune qui n’agressent pas le regard, ni la mémoire. Ils demeurent à hauteur d’hommes. Ils ne font ni retape, ni déballage sentimental. Ils portent en eux les marques d’un long purgatoire. Ils ont l’habitude d’être extraits de la communauté nationale. Leur déshérence n’intéresse personne sauf leurs propres enfants. Natifs de ces départements ruraux, nous gardons les traces d’une amertume mal soignée et d’un ricanement paysan.

A lire aussi, du même auteur: Et les médias ont oublié Jean Carmet…

Sachez que l’on se moque bien de vos gesticulations citadines et de vos pistes cyclables. Les terres beauceronnes, ces larges étendues céréalières tellement ennuyeuses laissaient enfin place à mes vignes, nous approchions du but et puis, surgit, impétueux, le piton de Sancerre, quelques kilomètres après, le village de Pouilly, le pont de la Charité ou plus loin encore la cathédrale Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte de Nevers. Pour ce voyage, j’avais emporté avec moi Le vin bourru (paru chez Plon) de Jean-Claude Carrière qui nous a quittés en février dernier. Je l’avais lu à sa sortie, il y a déjà vingt ans. Un fil invisible, entre lui l’occitan né en 1931 et moi, le berrichon né sous Giscard sous-tendait des généalogies semblables. Nos deux générations partageaient quelques bribes d’humanités ancestrales, de travaux agricoles oubliés ou de manies domestiques. En pleine bulle internet, j’avais retrouvé sous sa plume des moments simples, de ces permanences qui réchauffent le cœur. Comme Carrière, ma grand-mère usait de la lampe à pétrole les jours de coupures d’électricité et considérait la danse comme l’un des premiers devoirs masculins. L’intelligence de nos aïeux me manque, leurs connaissances sur les plantes, les animaux et tout ce qui était nécessaire à une vie quotidienne équilibrée.

Notre monde spécialisé et vain…

« Je suis toujours frappé, dans nos existences réservées pour la plupart à une seule activité, aplanie et facilitée grâce à tant d’engins, par la réflexion jadis nécessaire, par l’agilité forcée de l’esprit devant cent décisions à prendre chaque jour, devant un emploi du temps irrégulier, d’autant plus difficile à établir que le paysan en est le seul maître » écrivait-il. Nous avons perdu des pans entiers de ce savoir-là. Je me demande aussi si des personnalités aussi intenses et prolixes que Jean-Claude Carrière pourraient voir le jour dans un monde spécialisé et vain? De Pierre Étaix à Borsalino, de La Piscine à Cyrano, de Buñuel à Marielle, de Normale Sup à Jean Carmet, cet homme en lettres majuscules avait décloisonné les arts. Il pouvait parler et écrire sur tout, le cinéma, l’histoire, les astres, les religions ou la méditation. Son intelligence ne se limitait pas aux domaines réservés. Nos élites pourraient s’en inspirer, ouvrir les fenêtres, se laisser pénétrer par d’autres champs de recherches. Son affection pour Carmet m’a toujours ému. Bourgueil n’est que le prolongement de mon Sancerrois. Carrière avait décelé, comme Georges Conchon en son temps, le caractère profondément lumineux de l’acteur, assemblage rare de poésie vagabonde et de folie joyeuse. Il avait ainsi préfacé Je suis le badaud de moi-même son livre désordonné qui lui ressemblait tant : « Son regard percevait ce qui échappait à beaucoup d’autres. Son intelligence, sa présence auraient fait de lui un Trésor vivant au Japon. Il était un de nos trésors ». Cette définition s’applique à lui-même. Jean-Claude Carrière était bien l’un de nos trésors.

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Verdict Sarkozy: non, Vincent Trémolet de Villers, il n’y a pas de « malaise dans la démocratie »!

Depuis que le jugement a été rendu le 1er mars et les condamnations prononcées contre Nicolas Sarkozy, Thierry Herzog et Gilbert Azibert, une multitude de réactions et de dénonciations extrêmes qui vitupèrent une décision qu’elles n’ont pas lue, mettent ensemble des politiques inconditionnels – jusqu’au ministre de l’Intérieur, le respect d’un côté, le pouvoir de l’autre ! -, des avocats naturellement critiques et beaucoup de médias prenant pour un « coup de tonnerre » ce qui devrait être perçu comme une administration normale de la Justice (CNews, Sud Radio).

Et, bien sûr, les grands mots : malaise dans la démocratie pour Vincent Trémolet de Villers dans le Figaro, crise politique, déclin de la République, qui n’ont que le tort de se tromper de cible et d’oublier que nous n’avons qu’un seul devoir : appréhender l’acte judiciaire dans sa spécificité, faire respecter l’état de droit, prendre acte de l’appel et si, le moment venu, il aboutissait à la relaxe des prévenus, l’accepter comme la preuve de l’importance des voies de recours et du regard pluraliste et parfois contradictoire qu’elles permettent.

On ne peut pas en même temps décrier, salir, souvent avec une totale ignorance et mauvaise foi, la décision du 1er mars et se féliciter que les prévenus aient pu relever appel : il faudrait choisir. L’opprobre ou la sérénité ?

Les juges sont saisis sur le plan judiciaire, mais c’est leur prêter un immense pouvoir qui serait exclusif et qu’ils n’ont pas que de les prétendre créateurs ou destructeurs des destins politiques.

Ce qui a suscité cette effervescence majoritairement insultante contre le tribunal correctionnel, les magistrats et le PNF tient au fait que les mêmes, nombreux, reprochant en l’occurrence à la justice d’être partisane et politisée, portent sur ce jugement une appréciation elle-même partisane et politisée.

Exception : je tiens à saluer la parfaite dignité des avocats des trois prévenus. Ils fourbissent d’autres armes pour le futur et c’est normal, car ils ont sans doute conscience que leur stratégie de dénégations systématiques n’a pas été la bonne.

Il faut noter le honteux silence du garde des Sceaux et donc son aval tacite à l’égard des attaques scandaleuses à l’encontre d’un univers dont pour faire un coup politique on lui a pourtant confié la responsabilité et la défense!

En effet, si on avait l’honnêteté de s’arrêter au seul plan judiciaire, que pourrait-on dire ?

Des écoutes recueillies dans le cadre d’une autre procédure – grâce à un filet dérivant, je l’admets bien volontiers – ont révélé des échanges entre un avocat et son client, usant l’un et l’autre d’une fausse identité, dont la plupart se rapportaient à la préparation d’infractions susceptibles d’incriminer le trio plus tard condamné.

A lire aussi: Élisabeth Lévy sur le verdict Sarkozy: «Cette affaire me donne sacrément envie de voter Sarko!»

Corruption, trafic d’influence, violation du secret professionnel et recel pouvaient qualifier ces agissements programmés. Le fait que le pacte conclu dans les conversations n’ait pas eu de traduction effective n’a rigoureusement aucune importance en droit sur la nature des délits principaux.

Les débats devant le tribunal correctionnel ont été intenses, nourris et exemplaires. J’ai pourtant noté d’emblée, de la part de certains chroniqueurs judiciaires, une sorte de parti pris qui ne laissait pas d’inquiéter sur leur compétence technique et judiciaire, en tout cas sur leur intuition.

D’ailleurs, sans paradoxe, j’ai compris que la condamnation de Nicolas Sarkozy était pressentie et crainte quand une offensive violente contre le PNF a été mise en branle, quelques jours avant le jugement, par Le Point, aux sympathies pro-sarkozystes connues.

Jugement qui a été légèrement inférieur aux convaincantes réquisitions du parquet puisque la peine d’un an ferme accompagnant le sursis pour Nicolas Sarkozy, permet un aménagement, ne prévoit pas l’inéligibilité et n’interdit pas le principe d’une éventuelle nouvelle candidature.

Les motivations de cette décision (257 pages) mêlent une argumentation technique précise et pointue à des considérations morales et démocratiques quand il s’agit d’expliquer la nature de la sanction. Ce qui est on ne peut plus normal.

Pas de preuves, paraît-il? Lesquelles auraient persuadé les soutiens politiques de Nicolas Sarkozy ?

Il ne me semble pas que l’ire brillante d’Élisabeth Lévy soit pertinente sur ce plan pas davantage que la globalité approximative d’Éric Zemmour évoquant une décision sous la dictée de Mediapart et faisant passer pour des certitudes ce qui relève de sa constante détestation des juges.

Par conséquent, à bien considérer le processus judiciaire dans son ensemble – et j’y inclus la discutable périphérie procédurale des fadettes – il n’y a rien qui, le jugement rendu, permette de le frapper d’illégalité ou même d’illégitimité. Sauf à tenir une ligne affichant un Nicolas Sarkozy innocent par principe et virginal malgré une dizaine de procédures, au fil du temps, à ses basques, certaines l’ayant d’ailleurs exonéré.

Ce qui réduit à rien l’accusation d’acharnement judiciaire et montre que depuis la honteuse insulte sur les « petits pois » ou le Mur des cons, de l’eau judiciaire a coulé sous les ponts. Si Nicolas Sarkozy est relaxé en appel, je parie qu’on le verra alors vanter l’état de droit et ces magistrats qui auront eu raison de lui donner raison.

Le PNF qui, sous l’égide d’une configuration de gauche, a matraqué judiciairement François Fillon – celui-ci y a mis du sien ensuite ! – n’avait rien à voir avec celui d’aujourd’hui, dirigé par Jean-François Bohnert, un magistrat impartial et mesuré qui a rappelé le très faible pourcentage d’affaires politiques (un peu plus d’une dizaine) dans le vivier du PNF, la majorité tenant à du droit pénal financier ayant rapporté des milliards.

Alors procès politique ? Banalement oui. Il n’est pas indifférent qu’un ancien président de la République soit renvoyé devant un tribunal correctionnel et condamné à une peine partiellement ferme. Mais procès non politique si on entend par là qu’une juridiction aurait voulu « se payer » Nicolas Sarkozy, son excellent avocat sous influence et un magistrat discutable et discuté.

J’aurais rêvé qu’on prît tout simplement ce procès et cette décision pour la preuve d’une démocratie devenant de plus en plus exemplaire. Non pas malaise dans celle-ci mais exactement le contraire.

En effet, que la prévention pénale ait été infime, voire dérisoire aux yeux de certains ne me paraît pas un argument décisif. Rien n’est négligeable de ce qui est imputé à l’homme qui a ou a eu le pouvoir suprême. Il a des devoirs, des obligations, une exigence d’éthique et de rectitude. Il se doit d’être irréprochable.

C’est la fonction dévoyée qui justifie la gravité de la peine, pas les infractions. Même si je ne suis pas de ceux qui ont une vision hémiplégique de la délinquance, impitoyable pour celle du commun et emplie d’indulgence relativiste, voire cynique pour celle des puissants dans quelque domaine que ce soit.

Il y a en ce moment une responsabilité délétère de nos « élites », qui devraient inspirer, modérer, faire comprendre, faire réfléchir sur ce qui devrait pourtant être perçu comme une avancée de la République, une bienfaisante égalité entre les citoyens à partir de leur statut et de leur mission.

Je remercie amèrement le Figaro et TF1 d’avoir offert la démonstration inverse puisque Nicolas Sarkozy a pu développer, en vertu d’un privilège indu rompant tous les principes d’une justice équitable, « un complotisme anti-juges » et une affirmation répétée de son innocence, démentie le 1er mars et qui le sera peut-être encore en appel. Un abus, une complaisance que je juge choquants.

Derrière une aspiration formelle à l’égalité, les Français au fond révèrent les supériorités de type régalien. Même sanctionné, Nicolas Sarkozy est un parfait exemple de cette tendance.

Il me semble intéressant de relever que Nicolas Sarkozy a fondé ses protestations renouvelées sur le fait que journalistes et avocats, lors des débats, avaient considéré qu’il n’y avait aucune preuve contre lui. Ce serait comique si nous n’étions pas confrontés à une affaire désastreuse pour la République et qui bizarrement a conduit gauche, droite et les extrêmes à une sorte de connivence et de prudence lâches. On ne sait jamais, cela pourrait nous arriver !

Si je comprends bien le fil du temps, on a longtemps reproché à la magistrature d’être trop soumise. Maintenant, d’être trop indépendante. Qu’importe ! Les chiens aboient, la caravane doit passer.

Je conclus donc. Aucun malaise dans la démocratie.

Ou alors d’une autre sorte.

En effet, le seul vrai, authentique, désastreux malaise est qu’on puisse sans honte, légitimement, sereinement, poursuivre ou condamner un ancien président de la République pour des agissements que la Justice non seulement n’a pas inventés, mais qu’elle a le devoir et l’honneur de prendre en charge.

 

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«Emprise» : au nom des 99,9%…

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Claire Chazal et Patrick Poivre d'Arvor en 1999 © SUREAU/TF1/SIPA Numéro de reportage : TF135000611_000008

Il serait temps que les hommes normaux qui avaient vingt ans dans les années 80 demandent des comptes aux winners du sexe qui trichaient en plaçant les femmes sous «emprise»…


Lorsque j’étais jeune et que je draguais, comme l’immense majorité de mes potes, je me prenais veste sur veste. Mon taux de réussite calculé sur une série longue était proche de 0%. Toutes les filles, toutes, les belles, les moches, les jeunes, les vieilles, les intelligentes, les idiotes, toutes, sans exception, voulaient sortir avec un tout petit nombre de garçons, 0,1% environ, toujours les mêmes, en général des gars beaux et virils, souvent un peu plus âgés, et/ou connus, et/ou riches, mais toujours très sûrs d’eux, des « winners ». Du genre PPDA ou ces types en boite assis aux meilleures tables, avec cinq mannequins de l’agence Élite autour d’eux, vous vous souvenez?

A lire aussi, Elisabeth Lévy: Couvrez ce sang que je ne saurais voir

Bref, la situation de marché était la suivante:

– moi et 99,9% des mecs, aucun succès.

– 0,1% des mecs croulaient sous la demande unanime des filles et ne pouvaient répondre à toutes ces sollicitations.

C’était un peu énervant mais on acceptait, car c’était ainsi qu’allait le monde. Cela ne nous empêchait ni d’être heureux, -on discutait entre copains, on regardait du foot, on jouait à la belote, pendant que les 0,1% d’élus faisaient l’amour-, ni de trouver -après mille échecs, sur un malentendu-, une femme qu’on aimait.

Grâce aux progrès scientifiques du  féminisme

Sauf que… je réalise aujourd’hui, grâce aux progrès scientifiques du féminisme, qu’en fait, les filles voulaient (au fond d’elles-mêmes) sortir avec moi et la majorité silencieuse! Mais voilà, elles étaient « SOUS EMPRISE » des 0,1% de mecs! En fait ces hommes les « violaient », selon la nouvelle définition. On le comprend aujourd’hui avec toutes ces femmes qui, 20 ou 30 ans après leur relation, accusent de viols ces mâles alpha, -précisément ceux qui nous piquaient toutes les nanas à l’époque-, car elles réalisent enfin, grâce, donc, aux magnifiques progrès de la science, qu’elles étaient « SOUS EMPRISE. »

A lire aussi, Jean-Paul Brighelli: Les souvenirs de viols se ramassent à la pelle

Au nom des 99,9% de mecs qui se prenaient des vestes, je demande aujourd’hui solennellement réparation, pour préjudice moral, à tous ces types qui ont couché avec des milliers de femmes, les PPDA, Patrick Bruel, chanteurs, artistes, acteurs, coureurs automobiles, présentateurs, sportifs, patrons millionnaires, pilotes de ligne, chirurgiens médiatiques et aussi les moins connus du grand public, toi Alex A, toi Samuel R (vous vous reconnaîtrez, c’est facile, à l’instant où j’écris ces mots, une fille nue, -SOUS EMPRISE-, différente de celle de la veille, sort de vos draps).

Une tricherie historique

Vous avez triché avec votre « EMPRISE » bande de salauds.

Nous, les hommes normaux, avons été privés de femmes à cause de vos pratiques déloyales: nous exigeons un dédommagement pour corriger cette tricherie historique.

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A Trappes nigaud

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Ali Rabeh © D.R.

Dans le tract qu’il a distribué contre Didier Lemaire, le maire de Trappes Ali Rabeh nous fait connaître son admiration pour Kery James. Le rappeur converti à l’islam ne s’était pourtant pas caché de ses attitudes misogynes par le passé.


L’épisode opposant le prof de philo, Didier Lemaire, au maire de Trappes, Ali Rabeh, a fait couler beaucoup d’encre. Affaire dans l’affaire, le maire de gauche est allé distribuer un tract blâmant l’enseignant au sein même de son lycée. Mais on a peu relevé qu’à la fin de la missive distribuée aux élèves figuraient quelques vers du rappeur « banlieusard et fier de l’être », Kery James. Né en Guadeloupe en 1977, Alix Mathurin (c’est son vrai nom) était reçu à la télévision par Ardisson en 2002 pour un disque dans lequel il racontait sa conversion à l’islam.

Question de l’homme au costard noir : « Vous refusez les interprétations intolérantes du Coran, mais, paraît-il, vous refusez de serrer la main aux femmes et même de leur faire la bise ? » Kery James : « Oui, a fortiori. Le Prophète ne faisait pas cela. Et les femmes du Prophète ne faisaient pas cela. […] Il faut pouvoir imaginer qu’il peut y avoir des gens qui ont des codes de savoir-vivre différents des nôtres. Il faut savoir respecter cela, voilà. » Ardisson poursuit cette enrichissante découverte de l’Autre : « Quand on va sur le site qui est indiqué sur votre album, on apprend, par exemple, qu’il ne faut pas frapper les femmes au visage. Ça veut dire qu’on a le droit de les frapper ailleurs ? » Kery James, pas gêné : « Non, cela ne veut pas dire cela. Cela veut juste dire que les frapper au visage est un péché plus grave encore. » Il explique ensuite pourquoi il a fait le choix de ne pas utiliser d’instruments à vent ou à cordes dans sa musique, car ils constituent des « péchés de l’oreille ». Rabeh écrit que, dans sa jeunesse, plein de doutes existentiels, il écoutait Kery James tous les jours sur le trajet de son lycée et que cela l’a aidé.

Heureusement que le CNRS, invité par Frédérique Vidal à se prononcer sur les dérives idéologiques à l’Université, est venu balayer toutes les inquiétudes : « L’islamo-gauchisme, slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique. »

La France terre d’accueil: l’agresseur du photographe de Reims avait déjà été condamné huit fois!

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Anes Said K, 21 ans, est enfin en prison. Il aurait dû y être depuis longtemps et en tout cas expulsé. Des juges bienveillants et scrupuleux en ont décidé autrement.

C’est lui qui dans un déchainement glauque et bestial de violence a massacré le photographe de l’Union de Reims. Celui-ci est toujours dans le coma. Comme il s’agit d’un
journaliste, Darmanin s’en est soucié et a demandé une enquête approfondie sur son cas estimant qu’il y avait eu des failles dans la gestion de Anes Said K.

Un titre de séjour obtenu en Espagne

Nous pouvons l’aider à les trouver. À 13 ans Anes Said K était arrivé en France venant d’Espagne. De nationalité algérienne, il avait obtenu là-bas un titre de séjour. Puis avec sa famille il est parti pour la France. Entre notre pays et l’Espagne il n’y a plus de Pyrénées… Ainsi le veulent les Accords de Schengen.

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La valeur n’attendant pas le nombre des années, son parcours judiciaire a commencé au Tribunal pour enfants de Bobigny. Ensuite déménagement à Reims. Et là, devenu majeur, il a continué sur la voie empruntée à Bobigny. Ces deux dernières années, il a écopé de huit condamnations : vols, trafic de stupéfiants, violences en réunion. Les juges étaient habitués à le voir. Et pour le revoir ils ont pensé qu’il ne fallait pas le mettre en prison où il aurait échappé à leur affection.

La responsabilité des juges questionnée

On ne connait pas les peines auxquelles il a été condamné, le procureur de Reims n’ayant pas communiqué sur cette question. On peut supposer qu’elles étaient assorties d’un sursis. Mais est-ce qu’un sursis tient en cas de récidive ?

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On sait en revanche, d’après le procureur de Reims, que ces peines étaient « aménageables ». C’est-à-dire commuées en travaux d’intérêt général. C’est d’ailleurs pour s’être soustrait à l’une de ces obligations qu’Anes Said K a passé quand même trente jours en prison.

Ce qui au regard de ses huit condamnations n’est pas excessif. L’a-t-on expulsé ensuite ? Les policiers le connaissaient bien. Ils ont fait leur travail en l’arrêtant à plusieurs reprises. Les juges eux aussi le connaissaient bien. Vous trouvez que les juges ont fait leur travail ?

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« Le photographe agressé à Reims été victime de notre folie migratoire »

À table!

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Détail de la couverture "Le Bouquin de la gastronomie" de Jean Vitaux © Editions Robert Laffont / Bouquins

Il manquait à tout amateur de cuisine et d’anecdotes culinaires une somme réunissant, avec humour et érudition, histoire, recettes et historiettes. C’est chose faite, il est encore tout chaud, c’est Le Bouquin de la gastronomie.


Jean Vitaux est un grand monsieur. Président de l’Académie des gastronomes – au fauteuil de Curnonsky, excusez du peu –, archiviste du Club des Cent et membre d’une ribambelle d’associations gourmandes, ses connaissances littéraires et académiques se doublent d’un savoir scientifique qui n’est pas inutile pour comprendre l’évolution de la gastronomie française au fil des siècles. Comme le souligne Nicolas d’Estienne d’Orves dans sa préface: « À bien y regarder, le goût est même le dernier sens que la France n’ait jamais cessé de faire rayonner. Si nous avons pu dicter la pensée, la politique, la diplomatie, une certaine philosophie, la littérature et les arts, cet empire s’est émoussé ; en revanche, chez nous, tout se passe encore à table. » Pour comprendre tous les rouages secrets, toutes les étapes nécessaires à l’élaboration de cet art de vivre, Jean Vitaux présente la gastronomie sous tous les angles: aspects théoriques et pratiques, ordonnancement des repas (service à la russe ou à la française), descriptions des produits et de leur usage, variations des recettes selon les classes sociales, sociologie du comportement du gastronome… sans oublier, bien sûr, les recettes. Son Bouquin en compte près de 500 ; des rôtis de Taillevent (XIVe siècle) aux bouillons d’apothicaires (tel ce bouillon de vipères pour purifier le sang), en passant par la grande cuisine bourgeoise du XIXe et, plus facile à réaliser, l’œuf à la coque ou la quiche au lard. Les amateurs retrouveront aussi quelques extraits du Festin Joyeux (1738), de J. Lebas. Les recettes sont en vers et, pour chacune, l’auteur indique sur l’air de quelle chanson elle doit être prononcée. Si Jean Vitaux consacre une large place aux gibiers, viandes rouges, foies gras et cassoulets, les recettes à base de légumes se comptent par dizaines: asperges à la Pompadour (de Monselet), concombres farcis (de Ligier), macédoines de légumes printaniers (d’Alexandre Dumas), purée d’oignons à la Soubise (de Carême), tomates farcies à la provençale (d’Escoffier), etc.

couv-bouquin-gastronomie-miniPlusieurs textes anciens et modernes prouvent par ailleurs que la question de la saisonnalité n’est pas la lubie d’une nouvelle génération de locavores, mais répond à un souci juste et humain, celui de savoir bien manger. Les plats proposés par Prosper Montagné (1865-1948) en sont la preuve. En janvier: barquettes d’huîtres à la normande ou darnes de saumon à la bourguignonne (sauce au vin rouge); en février, endives au parmesan; en mars, soufflé aux épinards dit à la florentine; en avril, paupiettes de merlan…

Ce livre se lit d’une main, l’autre étant occupée à tenir la casserole, et permet de méditer cette phrase de Brillat-Savarin : « La cuisine est le plus ancien des arts, car Adam naquit à jeun. »

Jean Vitaux, Le Bouquin de la gastronomie, Robert Laffont, 2020.

Le Bouquin de la gastronomie

Price: 31,00 €

18 used & new available from 15,04 €

Condamnée, Assa Traoré s’entête

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Assa Traoré, juin 2020 © ERIC DESSONS/JDD/SIPA Numéro de reportage : 00967167_000006

Assa Traoré avait accusé sur Facebook les trois gendarmes qui ont interpellé son frère en juillet 2016 d’être responsables de sa mort, tout en dévoilant leur identité. Condamnée, elle persiste et continue de crier au complot, appuyée par des médias de gauche complaisants…


Après avoir été désavouée en appel, la sœur d’Adama Traoré continue d’attiser le ressentiment. Quitte à enfreindre la loi ?

Les revers s’accumulent pour la famille Traoré. Pourtant, notre égérie racialiste persiste et signe.

Suite au jugement de la cour d’appel de Paris qui l’a sanctionnée pour atteinte à la présomption d’innocence après qu’elle a divulgué les noms des gendarmes présents le jour du décès d’Adama, elle s’obstine. Malgré les injonctions de la Justice qui la condamne à verser quatre mille euros aux plaignants, ainsi qu’à afficher un communiqué sur Facebook et supprimer deux publications, Assa Traoré a réitéré ses accusations sur la page « La vérité pour Adama », livrant une nouvelle fois à une foule assoiffée de repentance les identités des militaires qui – d’après elle – auraient tué son frère.

L'avocat des Traoré, Yassine Bouzrou, serait-il prêt à tout ? © Michel Euler/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22355911_000008
L’avocat des Traoré, Yassine Bouzrou © Michel Euler/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22355911_000008

Alors que les forces de l’ordre paient déjà un lourd tribut face à la délinquance, qu’elles sont quotidiennement insultées, attaquées (pas moins de 379 faits de violences urbaines ont été recensés contre la police durant la seule période du premier confinement, dont 79 guets-apens ! NDLA ), et qu’elles figurent parmi les premières victimes du terrorisme, l’accusation publique, irresponsable et répétée envers ces fonctionnaires pourrait être perçue comme un appel à la haine, voire une mise en joue.

Manipulation et parano

Usant de procédés similaires dans ses diatribes anti-France, s’appuyant sur une vision fallacieuse et lacunaire de la colonisation occidentale, la jeune femme martèle avec véhémence que les gendarmes auraient du sang sur l’uniforme : « Les expertises concluent noir sur blanc que sans l’intervention des policiers, Adama ne serait pas mort. Donc Adama Traoré est mort entre les mains des gendarmes. » Or, douze rapports médicaux sur la mort d’Adama ont été réalisés en quatre ans, et aucun n’a conduit la Justice à revoir son jugement.

A relire, notre enquête: La vérité sur l’affaire Adama Traoré

Acculée une fois de plus, Assa Traoré flirte dorénavant avec la paranoïa, ou du moins en adopte le discours : « La vérité c’est qu’Assa Traoré est visée de manière particulière, parce qu’elle est à l’origine d’un vaste et historique mouvement citoyen, qui effraie les institutions racistes. » Si on la lit bien, Assa Traoré estime être le phare de tout un peuple freiné dans son émancipation. Pas moins!

Dans une posture à mi-chemin entre l’artiste incompris et le prisonnier politique et malgré l’indéfectible soutien médiatique dont elle bénéficie, la porte-parole de la famille désormais la plus connue de Beaumont-sur-Oise laisse entendre qu’elle subirait une cabale menée depuis les entrailles de l’État. Bagui, son frère, ne résiste pas non plus à la théorie du complot, quand il évoque l’intervention des gendarmes : « Je suis persuadé qu’ils avaient mis un contrat sur sa tête ».

«La vérité pour Adama» devrait être rebaptisée «La vérité d’Assa»

La page Facebook « La vérité pour Adama » présente un sacré mélange des genres. Au milieu des articles de Mediapart et des appels à manifester contre les « violences policières » et « l’islamophobie », on découvre le soutien d’eurodéputés écologistes et d’associations aux profils bien différents (Act Up, Extinction Rebellion, …).

A lire ensuite, Philippe Bilger: Assa Traoré nage en plein délire!

On y trouve également des portraits élogieux de la presse new-yorkaise au sujet de la sœur d’Adama, des vœux de bonnes fêtes adressés aux internautes musulmans avec l’inscription « Une pensée pour tous les opprimés », des photos avec Omar Sy ou bien encore à l’Assemblée Générale de Sciences Po Toulouse, une publicité pour le livre d’Assa Traoré et des totes bags (comprenez « des sacs en toile »), et même une opération spéciale Noël pour offrir des t-shirts aux abonnés « qui comme nous ont un proche en prison ».

Les Traoré adeptes de la self-justice

Soumettre à la vindicte populaire est symptomatique de la famille Traoré, dont la stratégie repose sur une méthode pas vraiment républicaine : la victimisation, quand elle ne suffit pas, laisse place à la vengeance. On retrouve ce caractère vindicatif dans l’expédition punitive menée par Yacouba Traoré contre le co-détenu qui, avant d’être indemnisé, avait accusé Adama de viol. Cet acte de violences en réunion – qualifié par le procureur de « véritable guet-apens » et de « sauvage agression » – lui vaudra dix-huit mois de prison. Bagui, le grand frère d’Adama, a également essayé de se faire justice lui-même. Déjà condamné – avec Ysoufou, un autre des frères Traoré – pour violences contre cinq policiers municipaux et trois gendarmes, puis pour trafic de drogue et extorsion violente sur deux femmes placées sous curatelle renforcée, il est cette fois-ci renvoyé devant les assises pour le doux motif de « tentative d’assassinat » durant les exactions qui avaient suivi la mort d’Adama.

Aujourd’hui, c’est donc Assa qui perpétue la tradition familiale. À ce rythme, et en constatant l’état d’engorgement de nos tribunaux, il faudra bientôt construire un palais de justice réservé exclusivement au clan.

L’affaire Sarah Halimi, ou les errements de la justice française

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Marche blanche en hommage à Sarah Halimi, en bas de son immeuble du XIe arrondissement de Paris, 9 avril 2017. Crédit photo : Plume Heters Tannenbaum / Hans Lucas

 


La Cour de cassation examine le dossier de Sarah Halimi, une dame juive de 65 ans morte défenestrée après avoir été sauvagement frappée par son voisin. La cour d’appel ayant considéré le meurtrier irresponsable de ses actes, c’est le dernier espoir pour la famille d’obtenir un procès. Retour sur une ignoble affaire qui suscite une terrible incompréhension. 


Un matin, à Paris, quelques jours avant la présidentielle 

Un immeuble du XI arrondissement, le matin du 4 avril 2017, il est environ 4 heures du matin lorsque Kobili Traoré, un homme de 27 ans, quitte son appartement situé au 30 rue Vaucouleurs pour se rendre au numéro 26 de la même rue. Il frappe énergiquement à la porte de la famille D, des connaissances de longue date, leurs parents étant originaires du même village malien que lui. Kobili semble agité : vêtu d’un tee-shirt, d’un bas de pyjama, pieds nus, il tient dans ses mains ses chaussures et un jean, le père de la famille D hésite à le faire entrer, mais finit par y consentir après quelques éclats de voix.

Selon les témoignages des protagonistes, sans aucune explication, le jeune homme qui habite dans l’immeuble mitoyen s’installe alors sur le canapé et tient des propos incohérents où il est question de mort et de démons. Les minutes passent et il paraît de plus en plus agressif et menaçant. Il affirmera plus tard ne pas se souvenir d’avoir usé de violence contre la famille D. Ce qui n’empêchera pas les membres de cette famille de prendre peur et de se retrancher dans une pièce qu’ils barricadent avec un meuble.De cet abri de fortune, ils l’entendent psalmodier des versets du Coran dans ce qui semblait être une prière. De longues minutes passent, quelqu’un de la famille téléphone à la police pour prévenir qu’un individu les séquestre. 

Entre temps, Kobili se change. Il enfile le jean et les chaussures qu’il avait en arrivant, puis enjambe la rambarde pour accéder au balcon d’à côté, celui de Sarah Halimi, revenant ainsi dans l’immeuble qu’il avait quitté un peu plus tôt… De là, en forçant les portes-fenêtres, il pénètre dans l’appartement de sa voisine, et une fois à l’intérieur, la vue d’une Menorah et d’un livre de prière lui font « perdre l’esprit ». Le calvaire de Madame Halimi commence… On ignore ce qui s’est exactement passé, car les deux seuls témoins sont Madame Halimi et son bourreau. Certains voisins auraient entendu des bruits sourds ressemblant à une course poursuite et à des coups, d’autres des hurlements et des gémissements de femme et la voix d’un homme qui proférait des insultes, entrecoupées de « Allah akbar ».

Une agression extrêmement violente

L’agresseur aurait commencé à battre Madame Halimi dans le salon. Quelques objets ensanglantés ainsi que les vêtements maculés de sang de l’agresseur attestent de l’extrême violence des coups. Kobili aurait traîné ensuite sa victime sur le balcon où il continue à la frapper en poussant des hurlements. C’est un tapage tel que des voisins des immeubles d’en face sont réveillés malgré les doubles vitrages. Des témoins contactent la police, l’informant qu’ un homme est en train de battre une femme en l’invectivant. 

Le calvaire aurait duré quelques minutes, avant que l’homme ne fasse basculer Madame Halimi par la rambarde du balcon. Des témoins, dont un policier, auraient entendu dire distinctement à ce moment : « Attention, une femme va se suicider ! » Tandis que le corps de Sarah Halimi gît trois étages en dessous, l’assassin refait tranquillement le trajet en sens inverse et retourne par le balcon dans l’appartement de la famille D. Lorsque la police intervient quelques minutes plus tard, Kobili est calme et se laisse arrêter sans résistance. En début d’après-midi, après quelques heures passées en garde à vue, il est transféré dans une unité psychiatrique.

Une affaire truffée de confusions et de tergiversations

Présence de la police

Suite à l’appel téléphonique initial de la famille D, une patrouille de police arrive rapidement sur les lieux. Alertés pour la séquestration, les policiers se postent derrière la porte. C’est à ce moment là qu’ils entendent les cris d’un homme, ceux d’une femme, et des bribes de mots en arabe venant de l’immeuble mitoyen. Pensant qu’ils faisaient face à une attaque terroriste, ils appellent du renfort.

Entre temps, la police reçoit d’autres appels où il est question d’un homme en train de violenter une femme sur le balcon. Pour la police, il y a donc deux incidents : chez les D, puis quelque part ailleurs dans l’immeuble. La configuration des lieux accentue la confusion : l’immeuble de la famille D et celui de Madame Halimi, de même que leurs appartements, sont mitoyens, cependant l’un se trouve au numéro 26 et l’autre au numéro 30; les policiers ne comprennent ni ce qui se passe vraiment ni où précisément. Quelques semaines après le drame, les proches de la victime dénoncent « l’inertie » des forces de l’ordre et « l’absence de coordination des services », et déposent une plainte pour « non-assistance à personne en danger. »

Le mobile antisémite

Malgré ce qui semble être une évidence, la motivation antisémite de l’assassinat ne sera retenue qu’en février 2018, soit onze mois après les faits. La raison en est que dans ses dépositions, l’agresseur affirme qu’il ignorait chez qui il se rendait (« cela aurait pu tomber sur n’importe qui»), écartant ainsi toute préméditation et donc motivation antisémite. Déclarations que conteste William Attal, le frère de la victime : « Ma sœur craignait terriblement cet homme, il l’avait traitée de sale juive […] Mais elle avait peur que porter plainte soit dangereux pour elle » a-t-il affirmé , ajoutant que celle-ci avait déposé une demande pour déménager à l’office HLM de Créteil. L’une des raisons de tant d’hésitations sur le caractère antisémite du crime pourrait s’expliquer par le contexte politique de l’époque. Au printemps 2017, nous étions en pleine campagne présidentielle, il était surtout question « de ne pas faire le jeu des extrêmes .» 

« La mort atroce de Sarah Halimi ne devait pas troubler la campagne électorale. Informer l’opinion risquait de l’encourager à « stigmatiser », « amalgamer » », écrivait l’essayiste Barbara Lefevre en 2018 dans nos colonnes.

Bouffée délirante et état psychologique discuté

En septembre 2017, une première expertise psychiatrique conclut à « l’altération du discernement au moment des faits », diagnostiquant chez Kobili Traoré « une bouffée délirante aiguë à thématique mystique et démonopathique », induite par sa consommation régulière de cannabis. Toutefois, ce premier rapport ne remettait pas en cause la responsabilité pénale de l’homme, susceptible donc de comparaître devant une Cour d’assises.

En avril 2018, une année après les faits, la magistrate en charge du dossier mandante d’autres experts pour évaluer à nouveau l’état psychiatrique du prévenu.

En mai et en juin suivants, deux entretiens d’une durée de deux heures, chacun menés avec Kobili, concluent à l’abolition totale du discernement, ce qui revient à la déclarer irresponsable de ses actes. De nombreux commentateurs contestent ce diagnostic et soulignent le fait que le suspect n’avait aucun antécédent psychiatrique, contrairement à son lourd casier judiciaire faisant mention de nombreuses incarcérations, notamment pour « vol, violences, usage et détention de stupéfiants, d’arme prohibée ». Pour Me Jean-Alex Buchinger, un des avocats de la famille, les réponses du prévenu sont « claires, structurées et préparées[…] elles prouvent qu’il n’était pas dans un état de démence ni à l’époque des faits, ni aujourd’hui », déclare-t-il à la presse.

Selon Me Caroline Toby et Me Francis Szpiner, avocats de la famille Halimi, en l’absence d’unanimité entre les experts, « il appartient à une juridiction de jugement de discuter les circonstances de purs faits, comme la tentative de maquillage du crime en suicide », mettant ainsi l’accent sur le fait que le prévenu ait eu suffisamment de discernement pour crier qu’une femme allait se suicider avant de la défenestrer. En décembre 2019, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris tranche la question : Kobiki est pénalement irresponsable, son procès n’aura pas lieu.

Incompréhension, indignations et mobilisations

La décision suscite alors un vif émoi, l’affaire Sarah Halimi prend une nouvelle dimension.

 MGilles-William Goldnadel, avocat de la sœur de Sarah Halimi, dénonçait alors une « décision idéologique » de la part des magistrats qui ont, selon lui, une « grande répugnance à condamner ceux qui sont considérés comme des victimes de la société ». Pour MFrancis Szpiner, conseil des trois enfants de la victime, cette décision « scandaleuse » pourrait constituer une jurisprudence. « On vient de créer dans notre pays une jurisprudence Sarah Halimi, c’est-à-dire que toute personne qui sera atteinte d’une bouffée délirante parce qu’elle aura pris une substance illicite et dangereuse pour la santé se verra exonérée de responsabilité pénale », avait-il déclaré dans la presse. Sur les réseaux sociaux, beaucoup de personnalités et d’anonymes contestent cette décision, rappelant que cette affaire ne concerne pas seulement la communauté juive mais l’ensemble des Français, il y va de la question d’impunité.

Les associations se mobilisent et le 5 janvier 2020, des manifestations et des marches blanches, réunissant des centaines de personnes, se déroulent dans plusieurs villes. L’affaire déchaîne alors tellement les passions qu’Emmanuel Macron se voit obligé d’en prendre acte. Deux semaines plus tard, lors d’un déplacement en Israël, le président de la République rappelle qu’un « pourvoi en cassation a été formulé et constitue une voie possible », soulignant que « le besoin de procès est là. » Bien que le président ait été « recadré » par la cour de cassation, cette affaire laisse un goût amer. 

D’autant plus que la cour de cassation ne réexaminera pas le fond du dossier, mais sa conformité juridique ; il n’est pas question de revenir sur l’abolition du discernement, mais de vérifier si la décision des magistrats de la cour d’appel est conforme.

Pitres à clic et club de buzz

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Gabriel Attal à Bordeaux, janvier 2021 © UGO AMEZ/SIPA

L’émission #sansfiltre, proposée et diffusée sur les réseaux sociaux de Gabriel Attal, est une opération de propagande à destination des jeunes. Ce que tout le monde a bien compris. Mais son caractère éthiquement discutable doit être interrogé, alors que le porte-parole du gouvernement entend renouveler l’opération une fois par mois…


Ce 24 février, Monsieur Attal de Couriss, porte parole au prénom d’archange annonciateur, conviait à la Cour, pour son premier streaming vidéo via Youtube et Twitch, des influenceurs. Le casting était calibré pour ratisser large : queer, diversité, gay et face de droïdes experts en teint « glowy » et tutos «je colorie mes sourcils sans dépasser». Les principales parts de marché à séduire étaient là.

Quand le gouvernement veut faire le buzz…

 #Sans filtre, la nouvelle émission de Gabriel Attal, nous est présentée comme une opération de transparence branchée à destination des jeunes avec, comme alibi bienpensant, la volonté de rappeler l’importance de chaque geste dans la lutte anti-Covid. Mais s’agit-il vraiment de fraîche spontanéité renouvelant le jeu démocratique ? Le sujet mérite analyse au-delà du buzz de surface qui a brièvement fait frémir les médias en ligne.

L’information diffusée via l’AFP en juillet dernier et reprise par tous les médias donne une première idée de la stratégie sous-jacente. La volonté affichée cet été de «se doter à l’Élysée d’une équipe commando, chargée de fournir des résultats, d’améliorer la lisibilité et le récit de l’action publique et de préparer la campagne de 2022» a conduit au départ de Joseph Zimet et à son remplacement à la tête de la communication, par Clément Leonarduzzi, président de Publicis Consultants, branche Influence du groupe Publicis. Le pedigree de l’homme suffit à comprendre l’objectif.

La conscience écolo d’Enjoy Phoenix

Aujourd’hui, les fruits de cette greffe commencent à mûrir. Emmanuel Macron fait mine de s’improviser instagrameur dans des selfies, tel celui du défi lancé à Mac Fly et Carlito, respectivement 10ème et 12ème dans le classement en nombre d’abonnés des influenceurs français. Gabriel Attal multiplie les « live » allant jusqu’à interagir avec deux jeunes frères youtubeurs Néo et Swan de 16 et neuf ans.

Avant de nous la jouer Pretty woman à l’Élysée, Enjoy Phoenix, en février 2020, gratifiait déjà sa « communauté » d’une « journée dans la peau d’une ministre » en suivant Brune Poirson. Cinquante minutes d’enthousiasme auprès de sa Brune pour nous prouver que ce membre du gouvernement faisait beaucoup sans que nous le sachions, la preuve en étant qu’à peine 48 heures après qu’Enjoy Phoenix ait évoqué le problème des couverts en plastiques faussement estampillés « réutilisables », la ministre appelait déjà un fabricant de fourchettes pour lui dire que c’était mal. Elle a également eu les honneurs d’un « live » avec Gabriel Attal. Classée 4ème sur la liste des plus gros influenceurs français, la madone des réseaux est une belle prise pour les communicants de la Macronie et il convient de la rentabiliser.

Une démarche qui interroge

Avec de tels profils via Twitch, Gabriel Attal vient d’ajouter une fenêtre vers des millions d’enfants, d’adolescents et de jeunes adultes déjà approchés par Snapchat, Tik Tok, Instagram et Twitter.

C’est donc une stratégie de conquête du Far West virtuel et sauvage qui est en marche, l’occupation d’un espace numérique ultralibéral où foisonne, sans frontières ni shérif, le meilleur comme le pire. Et c’est précisément cette nature de zone médiatique non régulée qui doit nous interroger quant à l’éthique d’une telle démarche.

A lire ensuite, Gilles-William Goldnadel: Dissolution de Génération Identitaire: «Même sur le plan politicien, je ne trouve pas ça malin!»

En effet, le propre de cet univers est de starifier des gens normaux, tout en simulant la proximité avec leurs fans par un tutoiement de connivence, un vocabulaire familier et affectueux. Les distances et la hiérarchie s’effacent. De la même façon, une absence de cloisonnement permet à des vidéos de cuisine de côtoyer des contenus violents ou pornographiques, le tout étant aussi accessible à un mineur qu’à un adulte. Enfin, de nombreux contenus sponsorisés y sont travestis en simples informations, les influenceurs n’étant jamais que les hommes sandwiches du XXIème siècle. 

Ces ambigüités ont été parfaitement exploitées dans l’exercice de «grooming»[tooltips content= »Le « grooming » est un processus de préparation que les prédateurs utilisent gagner la confiance de l’enfant via internet (écoute, langage amical, techniques de partage de sentiments et de secrets…) »](1)[/tooltips] politique que nous a servi Gabriel Attal dans son émission: absence de cravate, tutoiement, posture corporelle ouverte, éléments de langage rassurants martelés : « le bout du tunnel », « le gouvernement travaille »… Le choix de participants n’étant pas en capacité de mener une réelle analyse politique du sujet lui a permis de dérouler sans contradiction majeure sa rhétorique. Le porte parole du gouvernement a même pu s’offrir le luxe de se tailler un costume de redresseur de torts à peu de frais en proposant de résoudre les cas particuliers que ses intervenants exposaient en guise de contestation de ses affirmations. Effrayant jeu de rôle en univers douteux, bien éloigné d’une innocente rénovation du débat politique par transposition sur un nouveau media.

Et donc tout le monde trouve ça normal?

C’est donc une magnifique opération de propagande, ciblant notamment des enfants qui commence, sans qu’aucun acteur politique ne s’en offusque. En outre, le simple fait qu’elle se déroule dans un espace aux nombreuses zones d’ombre rend la démarche éthiquement douteuse. Une nouvelle fois s’exprime l’ambigu « En même temps » marqueur du quinquennat : pendant qu’un ministre se charge de développer l’éducation aux dangers des réseaux sociaux, le président et le porte-parole du gouvernement en valorisent l’usage et en exploitent les leviers les plus douteux. Tout ce que l’agora compte de défenseurs de la démocratie se doit donc de s’emparer du sujet au plus vite car, si la nature de communication politique de l’opération a bien été identifiée, son caractère éthiquement discutable n’a pas fait objet de débats. L’Histoire nous a pourtant appris que la manipulation des enfants et des adolescents par un pouvoir politique ne se rencontre pas en temps démocratiques.

Des “valeurs de la République” à géométrie variable

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Nicolas Sarkozy au journal de 20 heures de TF1, hier soir © Jacques Witt/SIPA Numéro de reportage : 01007355_000007

Condamnation de Nicolas Sarkozy, dissolution de Génération identitaire: bienvenue dans la République des « oui mais ».


Jamais les fameuses « valeurs de la République » n’auront été autant évoquées, à la limite du mantra hypnotique, en « sautant sur sa chaise comme un cabri » eût dit le Général de Gaulle, à la mesure exacte de leur constant recul dans la sphère publique, tant du fait de la désagrégation de la société française que de leur non-respect par ceux-là mêmes qui sont chargés de les faire appliquer et de les incarner.

La condamnation spectaculaire de l’ancien président de la République en première instance en a fourni une première et consternante illustration, qui n’a du reste pas manqué de faire réagir et est venue dégrader un peu plus une image déjà très détériorée de la Justice dans l’esprit du peuple français, au nom duquel elle est supposée être rendue (selon quelque légende urbaine manifestement passée de mode).

Sarkozy victime d’un acharnement judiciaire peu commun

Cette condamnation vient ponctuer de manière provisoire des années d’un acharnement judiciaire peu commun, frisant régulièrement le parfait grotesque, ayant déployé des moyens d’investigation aussi considérables que partiaux, voire illégaux (mais bien entendu entérinés par une Cour de Cassation bien peu scrupuleuse). Écoutes téléphoniques de conversations entre un avocat et son client, déloyauté de la non-preuve (une prouesse !), interprétations farfelues voire paranoïaques et relevant par moments de la psychiatrie lourde des propos retenus comme « preuves » contre Nicolas Sarkozy, méthodes peu scrupuleuses d’instruction à charge, « chasse au Sarkozy » obsessionnelle (pour reprendre l’expression de l’avocat Régis de Castelnau dont nous recommandons véritablement l’ouvrage récent puisqu’absolument tout ce qui s’est déroulé cette semaine est venu prouver la justesse de son implacable démonstration), parjures (qui ne semblent poser aucun problème à personne), doute profitant à l’accusation, explications tarabiscotées venant justifier un jugement injustifiable tant sur le fond que sur la forme, endogamie néfaste et mélange des genres entre les parquets –financier ou pas- et le siège : tout y est pour décrire une séquence judiciaire qui fait honte à la République.

Que l’on ne s’y méprenne pas : il ne s’agit en aucun cas de défendre Nicolas Sarkozy au plan politique. Il s’agit de défendre, précisément, des principes et des valeurs, comme celles, fondamentales, du respect des droits de la défense, de la présomption d’innocence, de la charge de la preuve, du secret des échanges entre un avocat et son client, du secret de l’instruction tant de fois bafoué dans les dossiers Sarkozy et, plus généralement, dans une justice devenue clairement politique. Il n’appartient par exemple pas à l’ancien président d’apporter la preuve de son innocence, mais à l’accusation d’apporter celle de sa culpabilité, ce qui n’a pas été fait, celle-ci bafouillant en lieu et place un incompréhensible salmigondis fondé sur quelque obscur « faisceau d’indices », lesquels ont surtout permis de conclure qu’il existait un sérieux faisceau d’indices démontrant in vivo l’acharnement judiciaire visant sa tête de Turc préférée.

Sarkozy refuse de parler de “justice politique”

Outre le non-respect d’un certain nombre de règles de droit fondamentales, valables pour n’importe quel justiciable, cette séquence a également permis de vérifier la thèse d’une justice devenue politique, quand bien même Nicolas Sarkozy, par évidente prudence eu égard à ses fonctions passées, s’est refusé à la qualifier de la sorte dans son entretien accordé au Journal télévisé de TF1 le 3 mars. Une justice qui, après s’être en quelque sorte autonomisée du pouvoir politique afin de gagner en « indépendance », a totalement perdu en « impartialité » : le rôle délétère du Parquet National Financier, infiltré de tous côtés par les amis socialistes de François Hollande, faussant sans scrupule le libre jeu démocratique, n’est plus à démontrer, après le raid éclair contre François Fillon qui a eu pour but de porter Emmanuel Macron au pouvoir.

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Des personnalités politiques que l’on peut difficilement soupçonner de soutenir politiquement Nicolas Sarkozy ont du reste fait part de leur réaction scandalisée face à cet énième épisode de la guerre entre une partie non négligeable de la magistrature politisée, celle du Mur des Cons où, rappelons-le, l’ancien président de la République figurait en place centrale, et une opposition politique qui sera assez systématiquement inquiétée par la justice quand les amis dudit pouvoir peuvent dormir d’un sommeil paisible (pour l’instant et jusqu’à ce que les mouches changent d’âne). Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont ainsi eu des mots particulièrement fermes pour condamner ce dévoiement de la justice, indéniablement politisée dans le sens d’un pouvoir qui idéologiquement lui convient et en lequel elle se reconnaît, par endogamie et perméabilité sociale, culturelle. Notons d’ailleurs que le responsable de la France Insoumise tout comme la présidente du premier parti d’opposition du pays font bien entendu l’objet de procédures dont on peut penser qu’elles viendront peser, si besoin, dans le processus électoral de 2022, comme ce fut le cas en 2017. Les bons et loyaux services n’auront pas même besoin d’être sollicités par le pouvoir puisque, pour des raisons idéologiques et sociologiques, une partie importante de la magistrature se reconnaît parfaitement dans le pouvoir en place, ce que la répression sans aucuns états d’âme du mouvement social des Gilets Jaunes aura démontré ad nauseam, sans que les syndicats de magistrats pourtant voués à défendre les libertés publiques, ne s’en émeuvent plus que cela.

Une épée de Damoclès sur les présidentiables

Nicolas Sarkozy aura beau jeu de jouer la carte d’un rapprochement avec Emmanuel Macron (qui a très probablement perdu la main sur son alliée judiciaire de 2017, comme le prouvent les coups de semonce lancés par les magistrats à l’encontre du Garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti) : cela sera peine perdue puisque la magistrature a, d’une certaine manière, fait sécession, exactement de la façon dont Christopher Lasch décrivait la « trahison des élites ».

On le voit, bien au-delà du simple cas de Nicolas Sarkozy dont on finit par s’étonner qu’il n’ait pas été également mis en cause, tant qu’à faire, dans le dossier du petit Grégory ou dans une éventuelle complicité avec Gilles de Rais, il en va de la démocratie toute entière à travers le rôle que s’est désormais arrogé la Justice afin de peser directement dans le processus électoral, au point de le fausser et de déposséder encore un peu plus qu’il ne l’est déjà, le peuple de sa souveraineté en la matière. Rappelons d’ailleurs à ce titre que Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, principaux opposants au pouvoir en place, font comme par enchantement l’objet de procédures rocambolesques frisant parfois l’absurde, afin de bien leur rappeler cette épée de Damoclès déclenchable en permanence au-dessus de leurs têtes, et quoi que l’on pense de l’un comme de l’autre. 

Pour cette raison qui souligne avec force les dysfonctionnements antidémocratiques de la justice contemporaine (certains magistrats faisant fort honorablement exception à cet hybris devenu délétère), les personnalités qui se sont réjouies de la condamnation de Nicolas Sarkozy commettent à la fois une faute (morale, philosophique, démocratique) mais aussi une erreur tactique et stratégique majeure puisqu’elles semblent ignorer qu’à ce petit jeu elles seront toujours les prochaines, un jour, sur la liste des injustices qu’elles auront promues pour de stupides raisons idéologiques opportunistes ou pour assouvir quelques petites rancœurs recuites. C’est le prix que l’on finit toujours par payer pour le lâche renoncement aux principes supérieurs.

Génération identitaire: une dissolution farfelue

Tout semble se passer, concernant Nicolas Sarkozy, comme si, pour lui, au regard de son côté clivant, les règles fondamentales du droit pouvaient être escamotées et, qu’après tout, la fin devait bien pouvoir justifier les moyens : eh bien non, il n’y a pas de « mais », il n’y a pas de négociation possible avec ces principes supérieurs. L’on ne transige pas avec les valeurs de la République dont on se repaît par ailleurs du matin au soir à proportion qu’on les bafoue.

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L’on retrouve cette même bassesse de raisonnement au plan des censures apportées à la liberté d’expression de la part d’un camp idéologisé qui ne supporte pas certains points de vue et considère, là encore, que la fin justifie les moyens : le texte accompagnant la dissolution par le gouvernement de Génération Identitaire est, à ce titre, un salmigondis de la plus belle facture, creux, empli d’élucubrations et, surtout, de subjectivité idéologique, qui permet de comprendre tout l’arbitraire d’une décision aussi démagogique (à tort puisque plus de 60% des Français considèrent qu’il existe un problème d’immigration immaîtrisée : l’étape suivante consistera-t-elle à dissoudre le peuple lui-même, entreprise certes déjà pas mal avancée par divers moyens… ?) que tactiquement stupide. Dissoudre une organisation sur des bases juridiques farfelues, alors même que les membres de ladite organisation n’ont fait l’objet d’aucune condamnation, se réjouir de cette décision inepte au plan juridique mais aussi au plan des principes élémentaires de la liberté d’opinion et d’expression, relève de la même logique à courte vue que nous évoquions au sujet des réactions à la condamnation de Nicolas Sarkozy (et quand bien même ces deux événements ne sont pas liés politiquement l’un à l’autre, loin de là…) : promouvoir une idéologie plutôt que des principes et valeurs supérieurs, ajuster la République et la démocratie à ses propres convictions, considérer que « la fin justifie les moyens » en vertu d’une vision subjective de ce qui serait le Bien et ce qui serait le Mal, bref, reprendre encore et toujours ce ver dans le fruit de la République française énoncé de manière aporétique par Saint-Just : « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ». Sauf que, qui décide de qui sont les ennemis de la liberté ? N’oublions pas que ce fut le même Saint-Just qui promut avec zèle la loi dite des suspects, permettant d’incriminer un peu tout le monde et n’importe qui du moment que cela convenait au pouvoir révolutionnaire devenu délirant et psychopathique. L’on ne semble pas en être très loin, par les temps qui courent…

Face à cette folie idéologique, qui est le mal français post-révolutionnaire par excellence (et qui explique qu’on le retrouve surtout porté par les mouvances « de gauche » -à supposer que cette partition idéologique ait encore une quelconque force opératoire-), le peuple ne se retrouve pas : la justice ne semble plus rendue en son nom mais contre lui. De la même manière, il faudra expliquer aux justiciables-électeurs que, le jour-même de la dissolution de cette organisation dont on peut penser ce que l’on veut (tel n’est pas le sujet), l’on apprenne qu’un délinquant multirécidiviste algérien a plongé un journaliste entre la vie et la mort. L’on n’empêchera pas le peuple de suggérer tant à ses gouvernants qu’à leur bras armé judiciaire d’apporter plus de zèle à assurer sa sécurité, à chasser du territoire les criminels qui n’ont rien à y faire, à protéger les citoyens, les journalistes, les enseignants, les justiciables, le peuple français tout entier, plutôt qu’à poursuivre des objectifs de justice politique faussant le libre débat démocratique et électoral ou encore à empêcher la libre expression des convictions.

Le spectacle observé cette semaine est celui, très préoccupant, d’une démocratie malade.

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Jean-Claude Carrière, aux racines de l’écriture

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L'écrivain et scènariste français Jean-Claure Carrière, photographié en 2006 © BALTEL/SIPA Numéro de reportage : 00527468_000009

L’écrivain-scénariste, merveilleux touche-à-tout, incarnait une expression libre et foisonnante


Hier, mon TER Centre-Val de Loire, ex-Corail, longeait le fleuve sauvage en flirtant avec la très yé-yé Nationale 7. Les paysages défilaient dans leur éternité reposante et leur tristesse monacale. Que la France semble apaisée d’un wagon désert, une triste journée d’hiver. Je regrettais seulement qu’un voile de pluie ne vienne pas compléter ce décor, le mélancoliser à l’extrême, m’arracher quelques palpitations supplémentaires.

Je suis un irrécupérable passéiste

Cette vue de l’esprit est trompeuse, je l’admets, elle met à distance les turpitudes des territoires comme on les appelle idiotement aujourd’hui, leur violence et leur fragilité internes. Irrécupérable passéiste, j’aime cependant les campagnes qui s’inclinent devant la nature brute, ce sol argilo-calcaire qui nous tient debout et qui nous a fait grandir. Je m’enivre de tous ces bourgs abandonnés aux rideaux baissés et du bruit d’une mobylette en fond sonore. Je fuis l’agitation humaine et l’activisme marchand, tous deux fortement suspects à mes yeux. Alors, je quitte la capitale et retourne chez moi, chez les miens. Mon « Cher » et ma « Nièvre » sont des compagnons d’infortune qui n’agressent pas le regard, ni la mémoire. Ils demeurent à hauteur d’hommes. Ils ne font ni retape, ni déballage sentimental. Ils portent en eux les marques d’un long purgatoire. Ils ont l’habitude d’être extraits de la communauté nationale. Leur déshérence n’intéresse personne sauf leurs propres enfants. Natifs de ces départements ruraux, nous gardons les traces d’une amertume mal soignée et d’un ricanement paysan.

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Sachez que l’on se moque bien de vos gesticulations citadines et de vos pistes cyclables. Les terres beauceronnes, ces larges étendues céréalières tellement ennuyeuses laissaient enfin place à mes vignes, nous approchions du but et puis, surgit, impétueux, le piton de Sancerre, quelques kilomètres après, le village de Pouilly, le pont de la Charité ou plus loin encore la cathédrale Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte de Nevers. Pour ce voyage, j’avais emporté avec moi Le vin bourru (paru chez Plon) de Jean-Claude Carrière qui nous a quittés en février dernier. Je l’avais lu à sa sortie, il y a déjà vingt ans. Un fil invisible, entre lui l’occitan né en 1931 et moi, le berrichon né sous Giscard sous-tendait des généalogies semblables. Nos deux générations partageaient quelques bribes d’humanités ancestrales, de travaux agricoles oubliés ou de manies domestiques. En pleine bulle internet, j’avais retrouvé sous sa plume des moments simples, de ces permanences qui réchauffent le cœur. Comme Carrière, ma grand-mère usait de la lampe à pétrole les jours de coupures d’électricité et considérait la danse comme l’un des premiers devoirs masculins. L’intelligence de nos aïeux me manque, leurs connaissances sur les plantes, les animaux et tout ce qui était nécessaire à une vie quotidienne équilibrée.

Notre monde spécialisé et vain…

« Je suis toujours frappé, dans nos existences réservées pour la plupart à une seule activité, aplanie et facilitée grâce à tant d’engins, par la réflexion jadis nécessaire, par l’agilité forcée de l’esprit devant cent décisions à prendre chaque jour, devant un emploi du temps irrégulier, d’autant plus difficile à établir que le paysan en est le seul maître » écrivait-il. Nous avons perdu des pans entiers de ce savoir-là. Je me demande aussi si des personnalités aussi intenses et prolixes que Jean-Claude Carrière pourraient voir le jour dans un monde spécialisé et vain? De Pierre Étaix à Borsalino, de La Piscine à Cyrano, de Buñuel à Marielle, de Normale Sup à Jean Carmet, cet homme en lettres majuscules avait décloisonné les arts. Il pouvait parler et écrire sur tout, le cinéma, l’histoire, les astres, les religions ou la méditation. Son intelligence ne se limitait pas aux domaines réservés. Nos élites pourraient s’en inspirer, ouvrir les fenêtres, se laisser pénétrer par d’autres champs de recherches. Son affection pour Carmet m’a toujours ému. Bourgueil n’est que le prolongement de mon Sancerrois. Carrière avait décelé, comme Georges Conchon en son temps, le caractère profondément lumineux de l’acteur, assemblage rare de poésie vagabonde et de folie joyeuse. Il avait ainsi préfacé Je suis le badaud de moi-même son livre désordonné qui lui ressemblait tant : « Son regard percevait ce qui échappait à beaucoup d’autres. Son intelligence, sa présence auraient fait de lui un Trésor vivant au Japon. Il était un de nos trésors ». Cette définition s’applique à lui-même. Jean-Claude Carrière était bien l’un de nos trésors.

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Verdict Sarkozy: non, Vincent Trémolet de Villers, il n’y a pas de « malaise dans la démocratie »!

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Septembre 2020 © ISA HARSIN/SIPA Numéro de reportage : 00983542_000028

Depuis que le jugement a été rendu le 1er mars et les condamnations prononcées contre Nicolas Sarkozy, Thierry Herzog et Gilbert Azibert, une multitude de réactions et de dénonciations extrêmes qui vitupèrent une décision qu’elles n’ont pas lue, mettent ensemble des politiques inconditionnels – jusqu’au ministre de l’Intérieur, le respect d’un côté, le pouvoir de l’autre ! -, des avocats naturellement critiques et beaucoup de médias prenant pour un « coup de tonnerre » ce qui devrait être perçu comme une administration normale de la Justice (CNews, Sud Radio).

Et, bien sûr, les grands mots : malaise dans la démocratie pour Vincent Trémolet de Villers dans le Figaro, crise politique, déclin de la République, qui n’ont que le tort de se tromper de cible et d’oublier que nous n’avons qu’un seul devoir : appréhender l’acte judiciaire dans sa spécificité, faire respecter l’état de droit, prendre acte de l’appel et si, le moment venu, il aboutissait à la relaxe des prévenus, l’accepter comme la preuve de l’importance des voies de recours et du regard pluraliste et parfois contradictoire qu’elles permettent.

On ne peut pas en même temps décrier, salir, souvent avec une totale ignorance et mauvaise foi, la décision du 1er mars et se féliciter que les prévenus aient pu relever appel : il faudrait choisir. L’opprobre ou la sérénité ?

Les juges sont saisis sur le plan judiciaire, mais c’est leur prêter un immense pouvoir qui serait exclusif et qu’ils n’ont pas que de les prétendre créateurs ou destructeurs des destins politiques.

Ce qui a suscité cette effervescence majoritairement insultante contre le tribunal correctionnel, les magistrats et le PNF tient au fait que les mêmes, nombreux, reprochant en l’occurrence à la justice d’être partisane et politisée, portent sur ce jugement une appréciation elle-même partisane et politisée.

Exception : je tiens à saluer la parfaite dignité des avocats des trois prévenus. Ils fourbissent d’autres armes pour le futur et c’est normal, car ils ont sans doute conscience que leur stratégie de dénégations systématiques n’a pas été la bonne.

Il faut noter le honteux silence du garde des Sceaux et donc son aval tacite à l’égard des attaques scandaleuses à l’encontre d’un univers dont pour faire un coup politique on lui a pourtant confié la responsabilité et la défense!

En effet, si on avait l’honnêteté de s’arrêter au seul plan judiciaire, que pourrait-on dire ?

Des écoutes recueillies dans le cadre d’une autre procédure – grâce à un filet dérivant, je l’admets bien volontiers – ont révélé des échanges entre un avocat et son client, usant l’un et l’autre d’une fausse identité, dont la plupart se rapportaient à la préparation d’infractions susceptibles d’incriminer le trio plus tard condamné.

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Corruption, trafic d’influence, violation du secret professionnel et recel pouvaient qualifier ces agissements programmés. Le fait que le pacte conclu dans les conversations n’ait pas eu de traduction effective n’a rigoureusement aucune importance en droit sur la nature des délits principaux.

Les débats devant le tribunal correctionnel ont été intenses, nourris et exemplaires. J’ai pourtant noté d’emblée, de la part de certains chroniqueurs judiciaires, une sorte de parti pris qui ne laissait pas d’inquiéter sur leur compétence technique et judiciaire, en tout cas sur leur intuition.

D’ailleurs, sans paradoxe, j’ai compris que la condamnation de Nicolas Sarkozy était pressentie et crainte quand une offensive violente contre le PNF a été mise en branle, quelques jours avant le jugement, par Le Point, aux sympathies pro-sarkozystes connues.

Jugement qui a été légèrement inférieur aux convaincantes réquisitions du parquet puisque la peine d’un an ferme accompagnant le sursis pour Nicolas Sarkozy, permet un aménagement, ne prévoit pas l’inéligibilité et n’interdit pas le principe d’une éventuelle nouvelle candidature.

Les motivations de cette décision (257 pages) mêlent une argumentation technique précise et pointue à des considérations morales et démocratiques quand il s’agit d’expliquer la nature de la sanction. Ce qui est on ne peut plus normal.

Pas de preuves, paraît-il? Lesquelles auraient persuadé les soutiens politiques de Nicolas Sarkozy ?

Il ne me semble pas que l’ire brillante d’Élisabeth Lévy soit pertinente sur ce plan pas davantage que la globalité approximative d’Éric Zemmour évoquant une décision sous la dictée de Mediapart et faisant passer pour des certitudes ce qui relève de sa constante détestation des juges.

Par conséquent, à bien considérer le processus judiciaire dans son ensemble – et j’y inclus la discutable périphérie procédurale des fadettes – il n’y a rien qui, le jugement rendu, permette de le frapper d’illégalité ou même d’illégitimité. Sauf à tenir une ligne affichant un Nicolas Sarkozy innocent par principe et virginal malgré une dizaine de procédures, au fil du temps, à ses basques, certaines l’ayant d’ailleurs exonéré.

Ce qui réduit à rien l’accusation d’acharnement judiciaire et montre que depuis la honteuse insulte sur les « petits pois » ou le Mur des cons, de l’eau judiciaire a coulé sous les ponts. Si Nicolas Sarkozy est relaxé en appel, je parie qu’on le verra alors vanter l’état de droit et ces magistrats qui auront eu raison de lui donner raison.

Le PNF qui, sous l’égide d’une configuration de gauche, a matraqué judiciairement François Fillon – celui-ci y a mis du sien ensuite ! – n’avait rien à voir avec celui d’aujourd’hui, dirigé par Jean-François Bohnert, un magistrat impartial et mesuré qui a rappelé le très faible pourcentage d’affaires politiques (un peu plus d’une dizaine) dans le vivier du PNF, la majorité tenant à du droit pénal financier ayant rapporté des milliards.

Alors procès politique ? Banalement oui. Il n’est pas indifférent qu’un ancien président de la République soit renvoyé devant un tribunal correctionnel et condamné à une peine partiellement ferme. Mais procès non politique si on entend par là qu’une juridiction aurait voulu « se payer » Nicolas Sarkozy, son excellent avocat sous influence et un magistrat discutable et discuté.

J’aurais rêvé qu’on prît tout simplement ce procès et cette décision pour la preuve d’une démocratie devenant de plus en plus exemplaire. Non pas malaise dans celle-ci mais exactement le contraire.

En effet, que la prévention pénale ait été infime, voire dérisoire aux yeux de certains ne me paraît pas un argument décisif. Rien n’est négligeable de ce qui est imputé à l’homme qui a ou a eu le pouvoir suprême. Il a des devoirs, des obligations, une exigence d’éthique et de rectitude. Il se doit d’être irréprochable.

C’est la fonction dévoyée qui justifie la gravité de la peine, pas les infractions. Même si je ne suis pas de ceux qui ont une vision hémiplégique de la délinquance, impitoyable pour celle du commun et emplie d’indulgence relativiste, voire cynique pour celle des puissants dans quelque domaine que ce soit.

Il y a en ce moment une responsabilité délétère de nos « élites », qui devraient inspirer, modérer, faire comprendre, faire réfléchir sur ce qui devrait pourtant être perçu comme une avancée de la République, une bienfaisante égalité entre les citoyens à partir de leur statut et de leur mission.

Je remercie amèrement le Figaro et TF1 d’avoir offert la démonstration inverse puisque Nicolas Sarkozy a pu développer, en vertu d’un privilège indu rompant tous les principes d’une justice équitable, « un complotisme anti-juges » et une affirmation répétée de son innocence, démentie le 1er mars et qui le sera peut-être encore en appel. Un abus, une complaisance que je juge choquants.

Derrière une aspiration formelle à l’égalité, les Français au fond révèrent les supériorités de type régalien. Même sanctionné, Nicolas Sarkozy est un parfait exemple de cette tendance.

Il me semble intéressant de relever que Nicolas Sarkozy a fondé ses protestations renouvelées sur le fait que journalistes et avocats, lors des débats, avaient considéré qu’il n’y avait aucune preuve contre lui. Ce serait comique si nous n’étions pas confrontés à une affaire désastreuse pour la République et qui bizarrement a conduit gauche, droite et les extrêmes à une sorte de connivence et de prudence lâches. On ne sait jamais, cela pourrait nous arriver !

Si je comprends bien le fil du temps, on a longtemps reproché à la magistrature d’être trop soumise. Maintenant, d’être trop indépendante. Qu’importe ! Les chiens aboient, la caravane doit passer.

Je conclus donc. Aucun malaise dans la démocratie.

Ou alors d’une autre sorte.

En effet, le seul vrai, authentique, désastreux malaise est qu’on puisse sans honte, légitimement, sereinement, poursuivre ou condamner un ancien président de la République pour des agissements que la Justice non seulement n’a pas inventés, mais qu’elle a le devoir et l’honneur de prendre en charge.

 

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