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«Les rêves échoués» de Carine Joaquim: cavale portugaise

Lectures et relectures d’été


Il y a trois personnages, finalement, dans Les Rêves échoués, le deuxième roman de Carine Joaquim édité à la Manufacture de livres: Clarisse, treize ans, bientôt quatorze qui veut se sauver; Tony, vingt ans qui va la sauver un moment et le Portugal d’où vient Tony qui va échouer à les sauver, l’un comme l’autre.

Parce que dans ce roman sur l’adolescence et ses révoltes logiques contre une classe moyenne asphyxiante et névrosée, contre une école qui ne croit plus en elle-même et une région parisienne, non-lieu par excellence (que Carine Joaquim nomme à peine), dans ce roman en colère donc, il s’agit bien de se sauver à tous les sens du terme. De fuir et de ressusciter, par l’amour si possible comme Don Pedro et la Reine morte dans les tombeaux d’Alcobaça que Tony fait visiter à Clarisse pendant leur cavale lusitanienne.  Carine Joaquim a d’ailleurs de bien jolies pages sur le Portugal, qui est aussi son pays d’origine, sur sa fraicheur atlantique, son aptitude à la mélancolie, ses rues blanches et sa relative bonne résistance à la puissance dissolvante du tourisme, sauf peut-être à Lisbonne, devenue hélas l’Ultima Thulé des retraités friqués.

Clarisse ou la révolte

C’est Clarisse qui prend en charge le récit dans Les Rêves échoués. Clarisse et ses parents séparés, Clarisse et sa révolte qui l’amène à se battre, insulter, devenir incontrôlable et mettre le feu à la voiture de sa prof de maths (j’ai eu la même envie en 4ème mais j’étais beaucoup moins courageux que Clarisse), Clarisse qui ne fait même pas partie des suspects habituels médiatiques, les « jeunes-des-cités ».

A lire aussi, Martin Pimentel: Le Portugal envahi par nos retraités

Le je de Clarisse sonne juste, le fait que Carine Joaquim continue d’enseigner le Français dans l’Essonne n’y est sans doute pas pour rien mais ça ne suffirait pas si elle n’était pas, de toute évidence, un écrivain. Ce qui plait dans Les Rêves échoués, c’est l’art de Carine Joaquim d’appuyer là où ça fait mal, ce qui est pour moi une définition possible du roman noir.

Là où ça fait mal: les parents et leurs petits égoïsmes sexuels la quarantaine venue, la solitude jamais atteinte sous cette forme-là par une jeunesse paradoxalement hyperconnectée, une école qui fait ce qu’elle peut mais qui est vite dépassée, et là dedans, la libido explosive, désespérée d’une adolescente qui aimerait aimer mais ne trouve rien d’aimable. L’ambiguïté, aussi, d’une relation assumée, égalitaire entre un garçon de vingt ans et une fille de quatorze. Carine Joaquim échappe non sans un certain panache subversif et discret à tous les nouveaux puritanismes pour célébrer cette scandaleuse liberté. Quelque part entre Sesimbra et Obidos, sous les bras étendus du Christ Roi à Lisbonne, Tony et Clarisse deviennent amants. Détournement de mineure, domination masculine, emprise, que sais-je encore, les différents partis de l’ordre mettront les étiquettes qu’ils veulent, Carine Joaquim en véritable écrivain, n’en a pas grand-chose à faire.

Utopie amoureuse

Ce que le lecteur voit, lui, c’est que s’il y a beaucoup de gris dans ce roman, il y a encore plus de lumière, celle d’un Portugal printanier, utopie amoureuse où la règle commune est oubliée, où les plaies de l’enfance cicatrisent (un peu) au soleil du Cap Espichel. Bien sûr, il faudra que tout cela cesse. La fin ouverte du roman de Carine Joaquim rend son histoire encore plus poignante.

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Il faut lire Les Rêves échoués, vite, parce que si certains jugent avec raison une société à l’état de ses prisons ou de ses écoles, on peut aussi la juger à ce qu’on fait des filles de quatorze ans. Ce n’est pas l’affaire de Carine Joaquim de juger, et c’est tant mieux : elle, elle se contente de raconter Clarisse.

Et elle le fait vraiment très bien.

Les rêves échoués de Carine Joaquim (La Manufacture de livres, 240 pages).

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Les futurs profs soumis à la question

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Madame, Mademoiselle, Monsieur,
Puisque ces marques de civilité qui font référence à « l’identité de genre » sont pourchassées par les maniaco-inclusifs, dont la pathologie obsessionnelle se répand plus vite que le Covid (dernier exemple : note interne de la DGFIP du 6 juillet à l’intention des contrôleurs fiscaux leur enjoignant de ne plus les utiliser dans leurs courriers aux contribuables), je propose de les utiliser partout où c’est possible afin de protéger ces belles expressions menacées de disparition.
Donc, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, il sera question ici d’une information récente concernant les épreuves orales des concours pour devenir enseignant. Lors d’une de ces épreuves il a été posé la question suivante : « En classe de moyenne section, vous remarquez que les garçons jouent à la voiture et les filles s’orientent vers le coin dînette. Comment résolvez-vous ce problème ? »
Depuis une semaine que cette information m’est tombée sous les yeux je n’arrive pas à l’oublier, tant elle me semble exemplaire de ce nouveau monde impossible à comprendre pour un boomer comme moi, mais aussi, et c’est bien plus grave, du terrorisme intellectuel aussi violent que sournois avec lequel il cherche à imposer son idéologie.
Impossible à comprendre parce que naguère ce genre de question, posée dans un concours pour futurs enseignants, aurait semblé un gag, une incongruité. Quelque chose de l’ordre de la fameuse énigme surréaliste : « quelle différence y a-t-il entre un oiseau ? ».
Cette question n’appelle pas de réponse. L’interrogé reste coi, bouche bée, avant de partir dans un éclat de rire. De la même façon, aucune personne sensée, à l’époque, n’aurait su répondre au « comment résolvez-vous ce problème ». Où est le problème ? Qu’est-ce qui ne va pas ? Pourquoi ne pas demander : il pleut, comment résolvez-vous ce problème… ?
Et pourtant nos candidats enseignants sont aujourd’hui sommés de répondre, ou de passer pour hostiles aux « valeurs de la République ».
Il y a là, en pure logique, une contradiction dans la question, qui n’apparaît peut-être pas tout de suite mais qui, en y regardant de plus près, met en évidence toute l’absurdité de l’idéologie woke comme la niaiserie de ses promoteurs.
En effet, la question posée infère, je dirais même impose, que le choix de jouer aux voitures pour les garçons et celui de jouer à la dinette pour les filles, est un problème. On ne demande pas au candidat ce qu’il en pense, il doit à priori se soumettre à l’injonction « ceci est un problème ».
Le terrorisme intellectuel sournois est bien là puisque, quelle que soit sa conception personnelle (qui pourrait être – quelle horreur – de penser que cela ne mérite pas d’intervention de sa part), il doit y renoncer, courber l’échine et soumettre sa personnalité au dictat de l’institution. S’il veut satisfaire le jury il doit faire sienne l’idéologie qui sous-tend la question.
Idéologie dont, attention Mesdames et Messieurs, nous allons maintenant démontrer l’absurdité logique :
(Filles + dinette) + (Garçons + voitures) = Problème
De ce postulat de départ nous pourrions déduire :
(Filles + voitures) + (Garçons + dinette) = Problème
En effet, si l’on échange les places entre dinette et voitures, il n’y a pas de raison que le problème disparaisse. Si l’on admet la première proposition on doit admettre la seconde. Mais cela signifie que, quelle que soit la situation il y a toujours un problème, ce qui constitue une sorte de boucle étrange. En effet, à quoi bon évoquer une situation comme problématique, si la solution induite est tout aussi problématique.
Évidemment nos modernes pédagogistes ne raisonnent pas ainsi (ou alors la question qu’ils posent est absurde comme nous venons de le voir). On peut supposer que pour eux la deuxième proposition est :
(Filles + voitures) + (Garçons + dinette) = Pas de problème
Mais ce qui saute alors aux yeux c’est la dimension purement idéologique de la question initiale qui porte le message suivant:
Si les filles vont vers la dinette et les garçons vers les voitures c’est un problème.
Si les filles vont vers les voitures et les garçons vers la dinette cela n’est plus un problème.
Comment justifier que l’on se questionne dans le premier cas et pas dans le second ? Logiquement c’est impossible, idéologiquement c’est très facile.
Comme ce questionnement est dans tous les cas ridicule, on peut supposer que sa visée réelle n’est pas là, mais peut-être simplement, et c’est très inquiétant, de briser l’échine de quiconque oserait questionner un progressisme devenu fou.

Vague d’attaques au couteau en France

On a du mal à suivre ! Alors que Causeur mettait sous presse son numéro d’été, consacré aux meurtres islamistes “dont on ne parle pas”, un retraité était tué gratuitement au couteau, à Trappes, le 10 juillet, et le lendemain, une femme de 48 ans était attaquée par un Érythréen au couteau à Montpellier. Analyse.


A Rodez, le 20 juin, un homme armé de deux couteaux a essayé de s’introduire dans le commissariat de Rodez. Faute d’y parvenir l’homme a poignardé le gérant de la pizzeria voisine. Au niveau de la carotide, bien sûr. Le 5 juillet, à Rennes, c’est un ressortissant afghan qui a essayé de s’en prendre à des policiers, tentant de trancher la gorge à celui qui voulait le maitriser. A Trappes, le 10 juillet, c’est un retraité qui a été attaqué et poignardé au cou et au torse, l’homme est décédé le lendemain. A Montpellier, ce 11 juillet, c’est un réfugié érythréen qui a tenté de poignarder deux femmes en plein centre-ville.

Tant de “déséquilibrés” dans nos rues

Les attaques au couteau ne cessent de se multiplier dans les pages des faits divers des journaux locaux. Elles ont souvent un autre point commun, l’attribution du crime à des déséquilibrés ou la qualification du caractère gratuit de l’acte. Pourtant une telle multiplication mériterait mieux que la résignation des pouvoirs publics ou le qualificatif « d’acte commis par un déséquilibré » qui fait office à la fois d’explication et de fermeture du ban et justifie une inaction qui devient de plus en plus coupable. Il se trouve que l’on peut mesurer l’explosion des homicides et tentatives d’homicide hors vol. Entre 2001 et 2019, ceux-ci ont bondi (plus de 70%). Un constat que corrobore l’augmentation générale des violences contre les personnes ou contre les dépositaires de l’autorité, qui ont doublé si on se réfère à l’année 2001. En 2019, on comptabilisait plus de 300 000 faits.

A ne pas manquer, aujourd’hui en kiosques: Causeur #103: Silence, on égorge

Selon l’Observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale, précieuse source d’information (est-ce justement à cause de cela qu’il a été dissous en décembre 2020 ?), les agressions au couteau font aujourd’hui 120 victimes par jour. Pour les années 2015 à 2017, ce sont plus de 44 000 victimes qui ont été recensées. Mais grâce à la fermeture de l’Observatoire, ces données sont devenues de plus en plus compliquées à extraire. La rupture dans le suivi et le traitement statistique rendant difficile de surcroît les comparaisons par la suite. Mais casser le thermomètre n’ayant jamais fait baisser la fièvre, et l’accumulation de faits divers parait montrer que cette « mode » n’est pas en train de passer. 37% des agressions armées dans l’espace public se font aujourd’hui au moyen d’un couteau. Cette arme est la plus utilisée pour commettre ce type de forfait, l’arme à feu ne représentant que 9% des agressions.

Comment expliquer une augmentation aussi notable des agressions au couteau, visant principalement la gorge ? La presse répugne à employer le terme d’égorgement. Non pour son sensationnalisme. Le sensationnalisme fait vendre et les journalistes ne se gênent pas pour exploiter cette aubaine. Non, là, ce qui les freine c’est que cette manière de tuer a une dimension sacrificielle et est souvent associée à une culture où se pratiquent encore les égorgements d’animaux chez soi. Certes la Révolution française sut couper des têtes, mais le geste de l’égorgement a depuis longtemps déserté notre quotidien. Il est revenu marquer notre imaginaire avec l’État islamique et ses mises en scène d’égorgement et de décapitation diffusées sur internet. A cette occasion on a vu également des enfants, extrêmement jeunes, s’entrainer à mimer le geste de l’égorgement sur des peluches. Ces images ont traumatisé les Occidentaux, d’autant qu’elles sont associées à des vagues d’attentats suicides et d’attaques au couteau qui ont frappé les consciences. De ce fait, face à la répugnance de nombres de politiques et de journalistes à appeler un chat, un chat, le public a pu avoir l’impression d’une censure, consciente ou inconsciente, qui frapperait le terme d’égorgement car elle renvoie à la culture musulmane et fait craindre un risque d’amalgame.

Une carte de France rouge écarlate

On sent chez nos élus les réminiscences de la petite phrase de Gérard Collomb, quittant le ministère de l’Intérieur sur cette sombre prédiction : « aujourd’hui nous vivons côte à côte, demain nous serons face à face ». Le plus intéressant dans cette phrase c’est qu’elle ne nomme jamais explicitement les communautés qui s’affronteraient ainsi, mais que tout le monde sait à quoi il fait allusion. Dans les attaques au couteau et dans la récurrence des « coups portés à la gorge », nombre de citoyens voient les prémisses de cette déclaration. Or ce n’est certainement pas en refusant de connaitre cette réalité et de la renseigner que l’on pourra agir.

A lire aussi: Il y a quelque chose de pourri dans le département des Yvelines

En effet, même un déséquilibré ne tue pas complètement au hasard et si les attaques au couteau se multiplient, c’est certes parce que c’est l’arme du pauvre, simple à utiliser et facile à se procurer. Mais c’est aussi parce que ce type de meurtre renvoie à un imaginaire qui parle aux plus fragiles, qui les rattache à un mode de représentation, voire à une communauté fantasmée. C’est un acte de puissance qui élève le meurtrier au rang de sacrificateur et rabaisse la victime au rang d’animal. On voit bien tout le potentiel narcissique contenu dans ce schéma. Or si on ne fait aucun effort pour comprendre ce qui explique l’augmentation importante de ce type d’agressions et de meurtres, il va être difficile de faire autrement que de blâmer la fatalité et de verser quelques larmes hypocrites sur l’ensauvagement constaté. Mais sans un travail rigoureux d’information et d’analyse sur toutes ces attaques, aucun travail de prévention ne peut être mené. Or le seul organisme qui délivrait une information compréhensible, claire et exploitable a été supprimé pour tout refondre au sein du service statistique du ministère de l’Intérieur. Lequel ne peut qu’être soumis aux injonctions politiques qui préfèrent souvent cacher la poussière du réel sous le tapis de la censure complaisante quand celle-ci dérange leurs représentations. Or c’est l’inverse qui est nécessaire pour faire baisser le niveau de violence : il faut construire des doctrines d’action claires appuyées sur des données factuelles. Il est nécessaire d’avoir une cartographie de ces attaques, des informations statistiques vérifiées sur le profil des agresseurs (âge, nationalité, motifs invoqués, antécédents judiciaires ou psychiatriques) et sur celui des agressés. En 2019 ce sont plus de 38 000 agressions qui ont été recensés contre les dépositaires de l’autorité. Or ceux-ci ont été désigné pour cible par les organisations islamistes. 

La multiplication des égorgements et la tentative pathétique de les transformer en coups de couteau portés à la gorge renvoie à l’idée que se développerait sur notre sol une façon de tuer qui ne serait ni de notre espace culturel, ni de notre temps. Le plus efficace, plutôt que de jouer la culpabilisation et le procès en racisme de ceux qui s’en étonnent, serait de disposer d’outils fiables pour mesurer ce qui se passe. Les ministères de la Justice et de l’Intérieur gagneraient à s’en donner les moyens. Cela pourrait même sauver des vies à terme.

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Vulcain n’a pas été dérangé…

Hier, les échanges entre le président de la République et Anne-Claire Coudray et Caroline Roux faisaient plus penser au tranquille déjeuner sur l’herbe de Manet qu’à un entretien politique.


Avec Emmanuel Macron, la tradition de ce rendez-vous, chaque année, le jour de la fête nationale, n’avait pas été respectée. D’où l’importance qu’on attachait à tort ou à raison aux échanges d’hier dans un cadre superbement champêtre.

Je n’ai rien trouvé à redire au principe de deux journalistes femmes procédant à l’interview. À partir du moment où l’excellence est garantie, la notion de parité dans un sens ou dans l’autre m’est totalement indifférente.

Puisque personne n’en parle, il faut bien se pencher sur la manière dont l’entretien a été mené et le confort dans lequel il a placé le président. Le milieu médiatique, par corporatisme, répugne à juger la pratique de ceux, hommes ou femmes, qui ont l’honneur de pouvoir procéder à un questionnement capital. Alors que la forme, en l’occurrence, est centrale. Passive, pas incisive, elle empêche un authentique dialogue républicain.

A lire aussi: 14 juillet: le jour où on a le droit d’aimer la France

Pour exposer brutalement ma perception, nous avons eu droit à un monologue présidentiel coupé par quelques questions (des interruptions multiples dont il ne se souciait pas). Emmanuel Macron a pu « dérouler » sur l’Ukraine, sur l’armement, sur le gaz russe, sur les crédits militaires, sur la sobriété énergétique. Quand on a abordé sur le tard des sujets plus sensibles, les retraites, l’Assemblée nationale et Uber, nous sommes évidemment restés sur notre faim.

Sur ce dernier thème – les liens de proximité entre la société mondiale Uber et le président -, face aux éloges dont il se gratifiait pour avoir favorisé Uber j’aurais attendu une interrogation directe sur le point suivant : convenait-il de se rengorger alors qu’à l’évidence, sur beaucoup de plans, Uber n’avait pas servi les intérêts français ?

J’entends bien qu’Emmanuel Macron use d’une méthode très efficace qui tient à sa nature, à son talent pour l’explication (non contredite) et à sa rouerie intellectuelle et politique. Il parle souvent trop longuement de sorte qu’occupant le terrain, il rend les interruptions malaisées, ou audacieuses, voire provocatrices.

Le problème qui s’est posé le 14 juillet est que l’une des journalistes, avec en permanence un sourire bienveillant comme si le président annonçait des merveilles, s’est plus exprimée que l’autre trop discrète et qui pourtant, les rares fois où elle a pu s’immiscer, l’a fait avec plus de vigueur et sans surjouer l’écoute aimable.

Ce monologue présidentiel a eu au fond pour dessein d’empêcher que le fond précisément puisse prêter à un véritable questionnement. Il a pour vocation d’interdire, face aux saillies et au mépris, par exemple des groupes ayant mis en échec le gouvernement à l’Assemblée nationale et de l’Assemblée nationale elle-même, toute réaction de la part des journalistes. Il a pour finalité, quand une journaliste a formulé une question d’importance – le gouvernement était-il informé de vos liens privilégiés avec Uber ? -, de la renvoyer dans ses cordes, avec dérision : « vous rigolez ou pas ? ».

On est encore loin, en France, de la pratique américaine où la multitude des questions n’autorise aucune fuite de la part des responsables politiques. Dans notre pays, le plus souvent, on oscille entre révérence et, plus rarement, grossièreté : deux caricatures d’entretien.

Vers la fin, le président a souligné – sa connaissance de la mythologie est indiscutable – qu’il ne se sentait pas ou plus Jupiter mais plutôt Vulcain, celui qui est à la forge et qui travaille sans relâche pour son pays. Pourquoi pas ? Mais il est sûr que Vulcain ne s’est pas fatigué lors de ces échanges dont on espérait trop. Bien au contraire, il s’est reposé. Dommage.

Tom Hanks, comédien déconstruit

Le wokisme ayant totalement gangrené Hollywood, l’acteur s’excuse d’avoir joué un homosexuel atteint du SIDA dans Philadelphia…


Nous vous parlions au mois de mars de l’actrice britannique Thandiwe Newton qui était venue maintes fois pleurer à la télévision pour s’excuser d’avoir accepté des rôles de femmes noires, alors qu’elle est métisse à peau claire.

Hollywood est aujourd’hui ébranlé par une nouvelle remise en cause : Tom Hanks, le 15 juin, en pleine promo du film Elvis, est revenu pour le New York Times sur son rôle emblématique d’avocat homosexuel atteint du sida dans le Philadelphia de Jonathan Demme, en 1993.

A lire aussi, Jeremy Stubbs: Enquête sur le lobby trans: l’argent n’a pas de sexe

« Est-ce qu’un homme hétéro pourrait refaire aujourd’hui ce que j’ai fait dans Philadelphia ? Non, et à juste titre », prêche le comédien selon la nouvelle doxa. On se demande alors ce qui l’a autorisé à jouer dans Il faut sauver le soldat Ryan, alors qu’il n’a pas fait la guerre ; ou dans Apollo 13 alors qu’il n’est jamais allé dans l’espace. Selon Hanks, c’est l’attitude du public qui a changé : « Je ne pense pas que les gens accepteraient l’inauthenticité d’un hétéro jouant un gay. » On ne sait pas ce qui est pire : cet acharnement à détruire le métier même de comédien, alors que toute la grâce de l’acteur est d’incarner ce qu’il n’est pas et ne sera jamais, ou cette façon d’entacher l’un des premiers films ayant donné une visibilité aux malades du sida. Le comédien avait perdu 15 kilos pour ce rôle mémorable, dans un film dont les séquences avaient été tournées chronologiquement pour montrer son irrémédiable dégradation physique. C’était une époque moins stérilement déconstructiviste où l’intérêt de l’art primait sur toute autre considération.

A lire ensuite, Sophie Bachat: Elvis: le roi est mort, vive le “King”!

Afin d’appliquer son nouveau et sinistre code Hayes de l’authenticité raciale et sexuelle, Hollywood devra ficher les comédiens selon leur sexe ou selon leur race. Cela nous ramènerait à une époque pire encore. À coup sûr la cause des minorités en sortira grandie.

Calomnie en douce et silence des pantoufles

L’État d’Israël, qui excelle au niveau mondial dans les domaines de la science et de la technologie, se voit gravement diffamé par l’Autorité palestinienne. Celle-ci l’accuse d’utiliser des cadavres pour mener des « expériences de laboratoire »…


Plus c’est gros, mieux ça passe

L’Autorité palestinienne est de plus en plus contestée pour sa corruption et sa brutalité.

Que lui reste-t-il pour exister ? Israël. En l’absence de quelque chose de précis permettant de se plaindre de l’ennemi, une surenchère absurde lui vaut une écoute distraite des Palestiniens et une ferveur accrue des idiots utiles occidentaux.

La dernière trouvaille vient du Premier ministre, Mohammad Shtayyeh : Israël se livrerait à des expériences médicales sur les cadavres des terroristes palestiniens[1]. Les autorités israéliennes se sont indignées de cette accusation, qui n’est, évidemment, pas assortie de la moindre preuve et qui mériterait la qualification « d’attaque éhontée contre les droits de l’homme et l’éthique scientifique », sauf que c’est Shtayyeh qui l’emploie, contre l’État juif.

Attaque éhontée contre les droits de l’homme

La détention au secret de deux handicapés mentaux israéliens[2] depuis, respectivement, 2014 et 2015 relève de cette qualification. Si l’on ajoute que l’un est noir et l’autre musulman, et que l’État hébreu fait tout ce qui est possible pour les récupérer, on met aussi à bas l’accusation d’apartheid.

Est-ce pour cette raison que ces deux prisonniers n’ont aucun soutien de la part des ONG françaises et aucun écho dans les médias, si soucieux du sort de Salah Haouri, accusé de participation à un attentat terroriste et qui « n’est autorisé à recevoir qu’une visite par mois, et ne peut pas avoir de contact téléphonique avec sa famille[3]» et de Ahed Tamimi, artiste pallywoodienne spécialiste de la provocation anti-appelés israéliens, qui a fini par écoper de huit mois de prison pour incitation au meurtre et qui ne regrette rien de rien[4] ?

Prouver l’absence de crime est plus difficile que découvrir un criminel

Comment prouve-t-on l’inexistence d’un fait ? Par l’absence de motif. Les universités israéliennes sont lieux d’excellence et de découvertes scientifiques innombrables : la caméra gélule, qui permet de suivre le parcours digestif sans invasion, les radiations alpha pour traiter le cancer de la prostate sans opérer, le sang artificiel pour pallier l’absence de donneurs[5] et même de la viande imprimée en 3D sans recours animal pour fournir des protéines aux véganes. Et leurs laboratoires auraient besoin de procéder à des expériences sur des cadavres, comme au Moyen-Âge ?

Les inconditionnels de la cause palestinienne qui haussent les épaules avec indulgence devant les excès et les projections de leurs protégés ne montrent pas la sincérité de leur militantisme, seulement leur paternalisme. 

Leur responsabilité est pourtant engagée quand des Merah prennent ces mensonges au pied de la lettre : « Je tue des juifs en France, parce que ces mêmes juifs-là (…) tuent des innocents en Palestine. » Pourtant, nul ne songe à les incriminer.


[1] https://www.timesofisrael.com/pa-premier-shtayyeh-claims-israel-conducting-lab-experiments-on-palestinian-bodies/

[2] https://www.hrw.org/fr/news/2017/05/03/deux-israeliens-detenus-au-secret-gaza

[3] https://www.la-croix.com/Monde/Israel-lavocat-franco-palestinien-Salah-Hamouri-detenu-trois-mois-plus-2022-06-07-1201218800

[4] https://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/apres-8-mois-dans-une-prison-israelienne-ahed-tamimi-ne-regrette-rien_2028540.html

[5] https://nocamels.com/2022/06/redc-biotech-blood-donation-lab/

La surprise du chef du Kremlin

Non seulement les services de renseignements américains disposaient d’informations leur permettant d’annoncer l’invasion russe de l’Ukraine mais ils ont aussi su les interpréter correctement, ce dont les services français et européens ont été incapables. Il ne s’agit pas seulement de savoir si l’adversaire peut frapper, mais s’il souhaite le faire.


Tout le monde s’est trompé, à la notable exception des services de renseignement américains. En Europe, aucun service n’a vu venir l’invasion de l’Ukraine. Cette question du renseignement et de son échec est, à un moment ou un autre, cruciale dans presque toutes les guerres et les crises depuis la Seconde Guerre mondiale. Souvent, il s’agit d’un défaut d’alerte stratégique, c’est-à-dire de la capacité de prévoir le passage à l’acte de l’adversaire. De Pearl Harbour et Barbarossa en 1941 en passant par la guerre du Kippour en 1973, jusqu’ à l’annexion sans combat de la Crimée par la Russie en 2014 ou la chute rapide de Kaboul et l’évaporation de l’armée afghane pendant l’été 2021, pour ne citer que les cas les plus célèbres, des États dotés de moyens conséquents de renseignement et d’analyse ont été surpris quand l’ennemi a frappé.

La méthode des « indicateurs d’alerte »

Pour pouvoir informer les dirigeants suffisamment tôt pour qu’ils puissent contrecarrer les plans de l’ennemi, les services de renseignement utilisent la méthode des « indicateurs d’alerte ». Il s’agit des signes précurseurs révélant non seulement les capacités de l’ennemi, mais aussi ses intentions. Dans le cas de l’invasion russe de l’Ukraine, l’un de ces indicateurs a été l’approvisionnement des unités russes stationnées en Biélorussie en sang et autres matériels médicaux destinés à traiter les blessés (information publiée par l’agence Reuters le 29 janvier 2022 à la base des rapports des services estoniens). Certains de ces moyens étant périssables et indispensables, leur distribution suggère la préparation d’une action d’envergure sans pour autant donner une certitude absolue. Si d’autres éléments de contexte convergent dans ce sens, les services émettent une alerte. Or, un indice contradictoire a induit les Ukrainiens en erreur : ils n’ont pas observé les préparations tactiques qui, selon la doctrine russe, précèdent le déclenchement d’une opération. C’est probablement l’absence de cette étape qui a conduit les services ukrainiens à contredire les Américains et conclure que Poutine bluffait. Les Russes n’ont pas agi comme d’habitude, précisément pour tromper leur adversaire.

Ces exemples démontrent que l’alerte et l’avertissement relèvent toujours du jugement. Malgré les capacités impressionnantes dont disposent les alliés occidentaux pour détecter les activités russes et leur volonté de partager informations et analyses, les services otaniens et les Ukrainiens eux-mêmes ne sont pas parvenus aux mêmes conclusions.

La technologie spatiale au service du renseignement

Pourtant, de nombreuses pièces du puzzle étaient disponibles, à partir de sources ouvertes et souvent en temps réel ou presque, y compris (et c’est l’une des grandes nouveautés de cette guerre) pour les médias et les opinions publiques. Le renforcement militaire de Moscou, notamment en Biélorussie, était connu, discuté et analysé depuis au moins avril 2021. L’imagerie satellitaire de la société américaine de technologie spatiale Maxar et les informations recueillies sur les médias sociaux dessinaient un tableau assez clair de la crise, presque comme s’il s’était agi de suivre une tempête tropicale montante.

L’histoire commence au début du printemps 2021 quand la Russie effectue des « vérifications surprises » de ses forces dans les régions militaires (une série d’exercices militaires), en réponse à des mouvements supposés agressifs des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN. Lors d’une réunion au siège de l’OTAN à la mi-avril 2021, le secrétaire d’État américain Antony Blinken déclare qu’il s’agit de « la plus grande concentration de forces russes aux frontières de l’Ukraine depuis 2014 ». Dans la foulée, le président Biden réaffirme l’engagement américain envers l’Ukraine. Les analystes suivent également de près l’exercice Zapad, qui a lieu chaque année dans les quatre principaux districts militaires de la Russie. Or, Zapad-2021 semble avoir comme objectif à plus long terme l’intégration des forces biélorusses dans les structures militaires dirigées par la Russie, ce qui laisse présager de la position de Biélorussie dans tout conflit futur.

A lire aussi : Lech Walesa veut ramener la Russie à “50 millions d’habitants” !

Le problème est toujours d’apprécier si l’adversaire qui sans aucun doute peut frapper, souhaite le faire. S’il s’agissait du Luxembourg, l’absence totale de capacité d’agir nous dispense de nous interroger sur ses intentions. En revanche, Poutine, qui possédait à l’évidence la capacité d’agir, entendait-il l’utiliser pour mener une guerre des nerfs diplomatique contre l’Ukraine et l’Occident ? Avait-il en tête une opération limitée, ou comptait-il poursuivre des objectifs maximalistes, c’est-à-dire lancer ses forces pour prendre le contrôle l’ensemble de l’Ukraine ? Et quand passerait-il à l’acte ?

En décembre, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche déclare que, selon les services de renseignement, « Poutine n’a pas encore pris de décision », une position encore dominante en janvier.

Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov, lors d’une rencontre à Genève, en marge d’une conférence sur la sécurité européenne, 21 janvier 2022 © Sergei Bobylev/TASS/SIPA USA/37080984/BF

Toutefois, si les intentions ultimes de Moscou n’étaient pas claires, les responsables des services de renseignement occidentaux savaient parfaitement ce qui se passait sur le terrain. D’après des documents des services américains consultés par des journalistes du Washington Post en décembre 2021, les responsables américains pensaient que la Russie avait déjà déployé 70 000 soldats et serait capable d’en déployer jusqu’à 175 000 le long de la frontière ukrainienne. Organisée en une centaine de « groupes tactiques de bataillons », cette force serait capable de passer à l’offensive début 2022. C’est sur la base de ces analyses que, début décembre 2021, lors de discussions à Copenhague, Blinken prévient son homologue russe, Sergeï Lavrov, qu’en cas d’invasion la Russie fera face à de « graves conséquences ».

À peu près au même moment, les responsables britanniques commencent eux aussi à redouter la perspective d’une invasion russe de l’Ukraine, car les unités déployées pour Zapad-2021 sont restées en Biélorussie au lieu de rentrer vers leurs bases. D’importants stocks de munitions sont également laissés sur place. L’imagerie satellitaire révèle le déploiement progressif de troupes russes et, surtout, celui des unités nécessaires au soutien technique et logistique d’une invasion. Fin janvier 2022, le service de renseignement extérieur de l’Estonie estime que « les forces armées russes sont prêtes à se lancer dans une opération militaire de grande envergure contre l’Ukraine à partir de la deuxième moitié de février » : « une fois ce niveau de préparation militaire atteint, précise-t-il, il ne faut plus qu’une décision politique pour lancer l’opération. »

Le renseignement militaire français se plante

Néanmoins, il y avait des différences d’appréciation entre les membres de l’OTAN. Les responsables français, par exemple, en désaccord avec leurs homologues américains et britanniques, maintenaient qu’une attaque, bien que probable, serait retardée dans l’attente de conditions météorologiques favorables. « Les Américains disaient que les Russes allaient attaquer, a déclaré le chef d’état-major des armées, le général Thierry Burkhard, mais nos services pensaient que la conquête de l’Ukraine aurait un coût monstrueux et que les Russes avaient d’autres options. » Selon Burkhard, les renseignements militaires français se sont ralliés à l’idée d’une offensive imminente à la veille de celle-ci, après avoir reçu des renseignements des leurs alliés de l’OTAN. Le départ prématuré du général Éric Vidaud, directeur du renseignement militaire, en mars dernier est sans doute lié à cette erreur d’évaluation.

Les responsables français n’étaient pas les seuls à sous-estimer le danger. Des sources de sécurité ont déclaré à Der Spiegel que le chef du BND allemand, Bruno Kahl, a dû être secouru par une mission d’urgence des forces spéciales, car il se trouvait en Ukraine pour des entretiens lorsque l’invasion a commencé.

A lire aussi : Le poids des morts, le choc des photos

Projeter son propre raisonnement dans l’esprit de l’adversaire, comme l’ont fait les analystes français est une erreur d’analyse courante et parfaitement humaine : on attend de l’autre qu’il raisonne comme nous, qu’il ait peur et qu’il souffre des mêmes choses que nous. Les analystes français avaient raison de dire que l’invasion risquait de coûter extrêmement cher aux Russes, les quatre premiers mois de la guerre le prouvent. Seulement, soit Poutine n’a pas la même idée de ce que veut signifie un « coût monstrueux », soit pour lui le jeu en valait la chandelle, soit enfin il n’avait pas l’information dont disposaient les Français, notamment sur l’état réel des forces armées russes.

Répétons-le, la France n’a pas été, loin s’en faut, la seule à se planter. Sur la foi d’évaluations britanniques et américaines, en plus de celles de ses propres services, un conseiller en renseignement proche de Zelensky a déclaré au quotidien israélien Haaretz qu’il pensait que Poutine bluffait jusqu’au jour J. Il s’attendait à ce que Poutine atteigne ses objectifs sans envahir le pays. La cote de popularité de Zelensky était faible, la situation politique instable, et la pression ne cessait de monter. Pourquoi la Russie devait-elle frapper à ce moment-là ? Pourquoi ne pas attendre que les fruits tombent d’eux-mêmes, sans secouer l’arbre ? Heureusement pour eux, ces erreurs des analystes ukrainiens n’ont pas affaibli la stratégie défensive de leur pays, car le gouvernement, tout en espérant le meilleur, se préparait énergiquement au pire.

Pour compléter le tableau, ajoutons que, le 19 février, le président Biden s’est déclaré convaincu qu’une attaque aurait lieu dans les prochains jours. L’évaluation de la communauté du renseignement américaine selon laquelle Poutine ne prendrait pas de décision définitive du moment exacte de l’attaque avant la dernière minute était exacte : l’invasion russe a pris tout le monde par surprise… y compris des membres du gouvernement et des forces armées russes.

La résistance ukrainienne négligée

De plus, si les analystes occidentaux avaient globalement percé les intentions de Poutine, ils ont commis la même erreur d’appréciation que lui sur l’état des forces ukrainiennes : face à une invasion russe, pensaient-ils, l’Ukraine tomberait rapidement. Si la guerre risquait de coûter cher à la Russie, ce serait plutôt dans la phase de l’occupation et non pendant l’invasion. Certains spécialistes, comme Michael Kofman, se sont ouvertement interrogés sur leur tendance systématique à surévaluer les forces russes (tout comme leurs aïeux de l’époque de la guerre froide). Cependant, ces analyses n’ont pas empêché le Royaume-Uni et les États-Unis d’intervenir pour renforcer rapidement les défenses de l’Ukraine. Il faut donc atténuer la sévérité de la critique : les renseignements tactiques et les moyens matériels mis à la disposition de l’Ukraine ont sans doute contribué à la capacité de ses forces armées de mettre en échec les plans russes, notamment celui qui prévoyait de décapiter le pouvoir ukrainien en quarante-huit ou soixante-douze heures. Une fois les forces russes déstabilisées par cet échec, les Ukrainiens et leurs alliés ont su profiter de la situation et renverser la tendance.

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Quelles conclusions en tirer ? Tout d’abord, l’abondance et la qualité des informations disponibles pour le grand public doivent inciter politiques et journalistes à apprendre comment les traiter. Il leur faut notamment faire la différence entre capacité et volonté, et éviter autant que faire se peut de projeter leurs propres intentions et manières de voir sur les autres.

Ensuite, il faut admettre que, quelles que soient leurs erreurs en Irak et en Afghanistan, les Américains et les Britanniques ont démontré des capacités impressionnantes dans la production de renseignements utiles (de bonne qualité et au bon moment) à leurs gouvernements. Ces renseignements ont permis à l’OTAN de mettre en échec la stratégie de Poutine.

Intermachette

Un différend de stationnement aux abords d’un Intermarché de Montpellier a donné suite à un lynchage d’une violence inouïe…


En ce mois de juin, la France a été touchée par une vague de chaleur. Les coups de soleil ont fait leur apparition, mais parallèlement, les coups tout court n’ont pas disparu.

Le directeur d’un Intermarché de Montpellier en a fait la terrible expérience récemment. En effet, ce dernier a eu l’infortune d’être agressé, à deux reprises, par les mêmes personnes, à quelques jours d’intervalle.

A lire aussi : Le désenchantement du destin français a commué la terre d’accueil en un espace de conquête

Tout commence le 3 juin, lorsque ce Montpelliérain de 31 ans constate qu’un véhicule bloque l’entrée de la réserve de son magasin. Il décide de garer son camion derrière ce véhicule, tout en laissant ses coordonnées sur le pare-brise. Mal lui en a pris, car peu de temps après, il reçoit l’appel d’une femme, qui l’insulte et le menace d’endommager son camion s’il ne rapplique pas au plus vite. Arrivé sur les lieux il se retrouve face à une furie de 20 ans, accompagnée de son père, qui le prend à partie également. Il rejoint son camion pour échapper à cette situation, mais le frère de la jeune femme, qu’il n’avait pas vu, sort de sa cachette et une bagarre éclate entre les deux hommes. Comme un malheur n’arrive jamais seul, un deuxième homme surgit et l’attaque par derrière. Le père de famille s’en mêle aussi, le touchant au visage avec un objet en bois.

La victime a refusé de porter plainte, par peur des représailles, car la charmante famille habite à proximité de chez lui. Mais le 14 juin, rebelote. Alors qu’il est en train de charger son camion, il se retrouve face à deux individus : le premier l’asperge de bombe lacrymogène tandis que le deuxième le menace de mort en brandissant une machette. Un coup de cette dernière va lui laisser une plaie béante sur la main gauche et une incapacité totale de 15 jours.

A lire ensuite, Céline Pina: Vague d’attaques au couteau en France

Cette fois, il déposa plainte. Le frère et la sœur ont été arrêtés mais pas la troisième personne, qu’il n’est pas parvenu à identifier. L’un des slogans d’ Intermarché est « Tous unis contre la vie chère ». Espérons qu’un jour nous serons tous unis contre l’ensauvagement.

Source: Midi Libre

Obsessions roumaines

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Le cinéaste Bogdan Georges Apegtri, dans «Dédales», nous donne un thriller cérébral et violent au dénouement ambigu.


Quel secret innommable couve cette jeune et belle novice voilée de noir, qu’un taxi attend au pied du couvent dont elle s’échappe en catimini, aidée par une consœur qui, avec des mines de conspiratrice, lui confie son téléphone portable? De très lents plans-séquences fixent les longs dialogues entre le chauffeur et sa passagère – procédé qui rappelle inévitablement l’esthétique millimétrée du grand cinéaste iranien Jafar Panahdi (« Taxi Téhéran », « Trois visages »). Mais ici nous sommes dans l’espace rural d’une Roumanie pétrie de religiosité, à l’écart des grandes villes. Loin des regards, la pudique jeune fille revêt des habits civils pour se rendre à un rendez-vous de consultation au service de gynécologie de l’hôpital local. Le motif n’est pas énoncé – mais on sait bien de quoi il retourne.

Fugue clandestine

C’est avec beaucoup de subtilité que le cinéaste Bogdan Georges Apegtri travaille ainsi l’ellipse et le hors champ, laissant le spectateur cogiter à loisir.  Pour le retour de sa fugue clandestine, la demoiselle tombe sur un chauffeur de taxi aux questions quelque peu intrusives – et toujours ces plans fixes au cordeau captant, imperturbables, l’habitacle du véhicule au fil des répliques… Le taxi fait un détour, bizarrement, vers les piles d’un pont isolé, en pleine nature. Soi-disant pour laisser sa prude passagère enfiler à nouveau sa chasuble. Séquence-charnière de « Dédales » (dont, mieux inspiré, le titre original est Miracol : « miracle »).

Séquence d’autant plus atroce qu’étirée à l’extrême et sciemment filmée à bonne distance, elle esquive le voyeurisme, mais sans priver le spectateur des interminables braillements de la victime. Point de bascule à partir de quoi l’acharnement de l’inspecteur de police (l’acteur Emanuel Parvu, à son meilleur) pour arracher leurs secrets aux protagonistes se heurte aux dédales de sa propre logique intime. Celle qui, par un ultime, magistral effet de surprise – coup de génie du cinéaste -, jettera le doute sur le véritable dénouement…

Singulier Bogdan George Apetri, réalisateur de 56 ans implanté de longue date aux Etats-Unis où il professe la mise en scène à l’université Columbia de New-York, mais qui retourne dans son village natal du nord de la Roumanie, pour y tourner concurremment, en 2019, un autre long métrage jamais sorti chez nous en salles, « Unidentified », avec les mêmes acteurs dans des rôles différents, premier volet d’une trilogie qu’il s’apprête à clôturer cette année. Toujours à la maison.

Dédales (titre original : Miracol). Film de Bogdan Georges Apetri. Avec Ioana Bugarin, Emmanuel Parvu, Cezar Antal. Roumanie/République tchèque/ Lettonie, couleur. Durée : 1h58. En salles le 20 juillet.

Il n’ y a pas eu de 14 juillet à Trèbes!

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C’est la ville où le colonel Beltrame a été égorgé par un islamiste.


Le 14 juillet est notre fête nationale. On célèbre la prise de la Bastille en 1789. Et par la même occasion, on rend hommage à ceux qui sont morts pour la France.

Et c’est bien pour la France qu’est mort le colonel Beltrame. La cérémonie, normalement, devait se dérouler devant le monument aux morts. Y figurent les 104 noms des enfants de Trèbes tués pendant les deux guerres mondiales. Le nom de Beltrame n’y est pas inscrit, parce qu’il n’est pas mort à la guerre. Pourtant, il y a bien une guerre en France contre les islamistes ?

Et le maire de la ville a annulé les commémorations. Il était malade, indisposé ? Malade d’être obligé, comme le protocole le veut, de s’afficher avec le député de la région : ce dernier, Christophe Barthès a été élu sous les couleurs du Rassemblement national !

Le maire de Trèbes est très sélectif dans ses fréquentations. Que dira-t-il à ces électeurs qui ont voté pour Marine Le Pen ? Ignore-t-il que l’assassinat du colonel Beltrame est pour beaucoup dans leurs votes ?

Le maire de Trèbes est un Tartuffe : « Cachez ces électeurs que je ne saurai voir !». Il est encore maire pour quelques temps. Lors des prochaines élections municipales, il ne le sera sans doute plus.

«Les rêves échoués» de Carine Joaquim: cavale portugaise

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L'écrivain Carine Joaquim © PASCAL ITO

Lectures et relectures d’été


Il y a trois personnages, finalement, dans Les Rêves échoués, le deuxième roman de Carine Joaquim édité à la Manufacture de livres: Clarisse, treize ans, bientôt quatorze qui veut se sauver; Tony, vingt ans qui va la sauver un moment et le Portugal d’où vient Tony qui va échouer à les sauver, l’un comme l’autre.

Parce que dans ce roman sur l’adolescence et ses révoltes logiques contre une classe moyenne asphyxiante et névrosée, contre une école qui ne croit plus en elle-même et une région parisienne, non-lieu par excellence (que Carine Joaquim nomme à peine), dans ce roman en colère donc, il s’agit bien de se sauver à tous les sens du terme. De fuir et de ressusciter, par l’amour si possible comme Don Pedro et la Reine morte dans les tombeaux d’Alcobaça que Tony fait visiter à Clarisse pendant leur cavale lusitanienne.  Carine Joaquim a d’ailleurs de bien jolies pages sur le Portugal, qui est aussi son pays d’origine, sur sa fraicheur atlantique, son aptitude à la mélancolie, ses rues blanches et sa relative bonne résistance à la puissance dissolvante du tourisme, sauf peut-être à Lisbonne, devenue hélas l’Ultima Thulé des retraités friqués.

Clarisse ou la révolte

C’est Clarisse qui prend en charge le récit dans Les Rêves échoués. Clarisse et ses parents séparés, Clarisse et sa révolte qui l’amène à se battre, insulter, devenir incontrôlable et mettre le feu à la voiture de sa prof de maths (j’ai eu la même envie en 4ème mais j’étais beaucoup moins courageux que Clarisse), Clarisse qui ne fait même pas partie des suspects habituels médiatiques, les « jeunes-des-cités ».

A lire aussi, Martin Pimentel: Le Portugal envahi par nos retraités

Le je de Clarisse sonne juste, le fait que Carine Joaquim continue d’enseigner le Français dans l’Essonne n’y est sans doute pas pour rien mais ça ne suffirait pas si elle n’était pas, de toute évidence, un écrivain. Ce qui plait dans Les Rêves échoués, c’est l’art de Carine Joaquim d’appuyer là où ça fait mal, ce qui est pour moi une définition possible du roman noir.

Là où ça fait mal: les parents et leurs petits égoïsmes sexuels la quarantaine venue, la solitude jamais atteinte sous cette forme-là par une jeunesse paradoxalement hyperconnectée, une école qui fait ce qu’elle peut mais qui est vite dépassée, et là dedans, la libido explosive, désespérée d’une adolescente qui aimerait aimer mais ne trouve rien d’aimable. L’ambiguïté, aussi, d’une relation assumée, égalitaire entre un garçon de vingt ans et une fille de quatorze. Carine Joaquim échappe non sans un certain panache subversif et discret à tous les nouveaux puritanismes pour célébrer cette scandaleuse liberté. Quelque part entre Sesimbra et Obidos, sous les bras étendus du Christ Roi à Lisbonne, Tony et Clarisse deviennent amants. Détournement de mineure, domination masculine, emprise, que sais-je encore, les différents partis de l’ordre mettront les étiquettes qu’ils veulent, Carine Joaquim en véritable écrivain, n’en a pas grand-chose à faire.

Utopie amoureuse

Ce que le lecteur voit, lui, c’est que s’il y a beaucoup de gris dans ce roman, il y a encore plus de lumière, celle d’un Portugal printanier, utopie amoureuse où la règle commune est oubliée, où les plaies de l’enfance cicatrisent (un peu) au soleil du Cap Espichel. Bien sûr, il faudra que tout cela cesse. La fin ouverte du roman de Carine Joaquim rend son histoire encore plus poignante.

A lire aussi, du même auteur: Marcel Aymé: Martin, notre contemporain multiple

Il faut lire Les Rêves échoués, vite, parce que si certains jugent avec raison une société à l’état de ses prisons ou de ses écoles, on peut aussi la juger à ce qu’on fait des filles de quatorze ans. Ce n’est pas l’affaire de Carine Joaquim de juger, et c’est tant mieux : elle, elle se contente de raconter Clarisse.

Et elle le fait vraiment très bien.

Les rêves échoués de Carine Joaquim (La Manufacture de livres, 240 pages).

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Les futurs profs soumis à la question

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Image d'illustration Unsplash

Madame, Mademoiselle, Monsieur,
Puisque ces marques de civilité qui font référence à « l’identité de genre » sont pourchassées par les maniaco-inclusifs, dont la pathologie obsessionnelle se répand plus vite que le Covid (dernier exemple : note interne de la DGFIP du 6 juillet à l’intention des contrôleurs fiscaux leur enjoignant de ne plus les utiliser dans leurs courriers aux contribuables), je propose de les utiliser partout où c’est possible afin de protéger ces belles expressions menacées de disparition.
Donc, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, il sera question ici d’une information récente concernant les épreuves orales des concours pour devenir enseignant. Lors d’une de ces épreuves il a été posé la question suivante : « En classe de moyenne section, vous remarquez que les garçons jouent à la voiture et les filles s’orientent vers le coin dînette. Comment résolvez-vous ce problème ? »
Depuis une semaine que cette information m’est tombée sous les yeux je n’arrive pas à l’oublier, tant elle me semble exemplaire de ce nouveau monde impossible à comprendre pour un boomer comme moi, mais aussi, et c’est bien plus grave, du terrorisme intellectuel aussi violent que sournois avec lequel il cherche à imposer son idéologie.
Impossible à comprendre parce que naguère ce genre de question, posée dans un concours pour futurs enseignants, aurait semblé un gag, une incongruité. Quelque chose de l’ordre de la fameuse énigme surréaliste : « quelle différence y a-t-il entre un oiseau ? ».
Cette question n’appelle pas de réponse. L’interrogé reste coi, bouche bée, avant de partir dans un éclat de rire. De la même façon, aucune personne sensée, à l’époque, n’aurait su répondre au « comment résolvez-vous ce problème ». Où est le problème ? Qu’est-ce qui ne va pas ? Pourquoi ne pas demander : il pleut, comment résolvez-vous ce problème… ?
Et pourtant nos candidats enseignants sont aujourd’hui sommés de répondre, ou de passer pour hostiles aux « valeurs de la République ».
Il y a là, en pure logique, une contradiction dans la question, qui n’apparaît peut-être pas tout de suite mais qui, en y regardant de plus près, met en évidence toute l’absurdité de l’idéologie woke comme la niaiserie de ses promoteurs.
En effet, la question posée infère, je dirais même impose, que le choix de jouer aux voitures pour les garçons et celui de jouer à la dinette pour les filles, est un problème. On ne demande pas au candidat ce qu’il en pense, il doit à priori se soumettre à l’injonction « ceci est un problème ».
Le terrorisme intellectuel sournois est bien là puisque, quelle que soit sa conception personnelle (qui pourrait être – quelle horreur – de penser que cela ne mérite pas d’intervention de sa part), il doit y renoncer, courber l’échine et soumettre sa personnalité au dictat de l’institution. S’il veut satisfaire le jury il doit faire sienne l’idéologie qui sous-tend la question.
Idéologie dont, attention Mesdames et Messieurs, nous allons maintenant démontrer l’absurdité logique :
(Filles + dinette) + (Garçons + voitures) = Problème
De ce postulat de départ nous pourrions déduire :
(Filles + voitures) + (Garçons + dinette) = Problème
En effet, si l’on échange les places entre dinette et voitures, il n’y a pas de raison que le problème disparaisse. Si l’on admet la première proposition on doit admettre la seconde. Mais cela signifie que, quelle que soit la situation il y a toujours un problème, ce qui constitue une sorte de boucle étrange. En effet, à quoi bon évoquer une situation comme problématique, si la solution induite est tout aussi problématique.
Évidemment nos modernes pédagogistes ne raisonnent pas ainsi (ou alors la question qu’ils posent est absurde comme nous venons de le voir). On peut supposer que pour eux la deuxième proposition est :
(Filles + voitures) + (Garçons + dinette) = Pas de problème
Mais ce qui saute alors aux yeux c’est la dimension purement idéologique de la question initiale qui porte le message suivant:
Si les filles vont vers la dinette et les garçons vers les voitures c’est un problème.
Si les filles vont vers les voitures et les garçons vers la dinette cela n’est plus un problème.
Comment justifier que l’on se questionne dans le premier cas et pas dans le second ? Logiquement c’est impossible, idéologiquement c’est très facile.
Comme ce questionnement est dans tous les cas ridicule, on peut supposer que sa visée réelle n’est pas là, mais peut-être simplement, et c’est très inquiétant, de briser l’échine de quiconque oserait questionner un progressisme devenu fou.

Vague d’attaques au couteau en France

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On a du mal à suivre ! Alors que Causeur mettait sous presse son numéro d’été, consacré aux meurtres islamistes “dont on ne parle pas”, un retraité était tué gratuitement au couteau, à Trappes, le 10 juillet, et le lendemain, une femme de 48 ans était attaquée par un Érythréen au couteau à Montpellier. Analyse.


A Rodez, le 20 juin, un homme armé de deux couteaux a essayé de s’introduire dans le commissariat de Rodez. Faute d’y parvenir l’homme a poignardé le gérant de la pizzeria voisine. Au niveau de la carotide, bien sûr. Le 5 juillet, à Rennes, c’est un ressortissant afghan qui a essayé de s’en prendre à des policiers, tentant de trancher la gorge à celui qui voulait le maitriser. A Trappes, le 10 juillet, c’est un retraité qui a été attaqué et poignardé au cou et au torse, l’homme est décédé le lendemain. A Montpellier, ce 11 juillet, c’est un réfugié érythréen qui a tenté de poignarder deux femmes en plein centre-ville.

Tant de “déséquilibrés” dans nos rues

Les attaques au couteau ne cessent de se multiplier dans les pages des faits divers des journaux locaux. Elles ont souvent un autre point commun, l’attribution du crime à des déséquilibrés ou la qualification du caractère gratuit de l’acte. Pourtant une telle multiplication mériterait mieux que la résignation des pouvoirs publics ou le qualificatif « d’acte commis par un déséquilibré » qui fait office à la fois d’explication et de fermeture du ban et justifie une inaction qui devient de plus en plus coupable. Il se trouve que l’on peut mesurer l’explosion des homicides et tentatives d’homicide hors vol. Entre 2001 et 2019, ceux-ci ont bondi (plus de 70%). Un constat que corrobore l’augmentation générale des violences contre les personnes ou contre les dépositaires de l’autorité, qui ont doublé si on se réfère à l’année 2001. En 2019, on comptabilisait plus de 300 000 faits.

A ne pas manquer, aujourd’hui en kiosques: Causeur #103: Silence, on égorge

Selon l’Observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale, précieuse source d’information (est-ce justement à cause de cela qu’il a été dissous en décembre 2020 ?), les agressions au couteau font aujourd’hui 120 victimes par jour. Pour les années 2015 à 2017, ce sont plus de 44 000 victimes qui ont été recensées. Mais grâce à la fermeture de l’Observatoire, ces données sont devenues de plus en plus compliquées à extraire. La rupture dans le suivi et le traitement statistique rendant difficile de surcroît les comparaisons par la suite. Mais casser le thermomètre n’ayant jamais fait baisser la fièvre, et l’accumulation de faits divers parait montrer que cette « mode » n’est pas en train de passer. 37% des agressions armées dans l’espace public se font aujourd’hui au moyen d’un couteau. Cette arme est la plus utilisée pour commettre ce type de forfait, l’arme à feu ne représentant que 9% des agressions.

Comment expliquer une augmentation aussi notable des agressions au couteau, visant principalement la gorge ? La presse répugne à employer le terme d’égorgement. Non pour son sensationnalisme. Le sensationnalisme fait vendre et les journalistes ne se gênent pas pour exploiter cette aubaine. Non, là, ce qui les freine c’est que cette manière de tuer a une dimension sacrificielle et est souvent associée à une culture où se pratiquent encore les égorgements d’animaux chez soi. Certes la Révolution française sut couper des têtes, mais le geste de l’égorgement a depuis longtemps déserté notre quotidien. Il est revenu marquer notre imaginaire avec l’État islamique et ses mises en scène d’égorgement et de décapitation diffusées sur internet. A cette occasion on a vu également des enfants, extrêmement jeunes, s’entrainer à mimer le geste de l’égorgement sur des peluches. Ces images ont traumatisé les Occidentaux, d’autant qu’elles sont associées à des vagues d’attentats suicides et d’attaques au couteau qui ont frappé les consciences. De ce fait, face à la répugnance de nombres de politiques et de journalistes à appeler un chat, un chat, le public a pu avoir l’impression d’une censure, consciente ou inconsciente, qui frapperait le terme d’égorgement car elle renvoie à la culture musulmane et fait craindre un risque d’amalgame.

Une carte de France rouge écarlate

On sent chez nos élus les réminiscences de la petite phrase de Gérard Collomb, quittant le ministère de l’Intérieur sur cette sombre prédiction : « aujourd’hui nous vivons côte à côte, demain nous serons face à face ». Le plus intéressant dans cette phrase c’est qu’elle ne nomme jamais explicitement les communautés qui s’affronteraient ainsi, mais que tout le monde sait à quoi il fait allusion. Dans les attaques au couteau et dans la récurrence des « coups portés à la gorge », nombre de citoyens voient les prémisses de cette déclaration. Or ce n’est certainement pas en refusant de connaitre cette réalité et de la renseigner que l’on pourra agir.

A lire aussi: Il y a quelque chose de pourri dans le département des Yvelines

En effet, même un déséquilibré ne tue pas complètement au hasard et si les attaques au couteau se multiplient, c’est certes parce que c’est l’arme du pauvre, simple à utiliser et facile à se procurer. Mais c’est aussi parce que ce type de meurtre renvoie à un imaginaire qui parle aux plus fragiles, qui les rattache à un mode de représentation, voire à une communauté fantasmée. C’est un acte de puissance qui élève le meurtrier au rang de sacrificateur et rabaisse la victime au rang d’animal. On voit bien tout le potentiel narcissique contenu dans ce schéma. Or si on ne fait aucun effort pour comprendre ce qui explique l’augmentation importante de ce type d’agressions et de meurtres, il va être difficile de faire autrement que de blâmer la fatalité et de verser quelques larmes hypocrites sur l’ensauvagement constaté. Mais sans un travail rigoureux d’information et d’analyse sur toutes ces attaques, aucun travail de prévention ne peut être mené. Or le seul organisme qui délivrait une information compréhensible, claire et exploitable a été supprimé pour tout refondre au sein du service statistique du ministère de l’Intérieur. Lequel ne peut qu’être soumis aux injonctions politiques qui préfèrent souvent cacher la poussière du réel sous le tapis de la censure complaisante quand celle-ci dérange leurs représentations. Or c’est l’inverse qui est nécessaire pour faire baisser le niveau de violence : il faut construire des doctrines d’action claires appuyées sur des données factuelles. Il est nécessaire d’avoir une cartographie de ces attaques, des informations statistiques vérifiées sur le profil des agresseurs (âge, nationalité, motifs invoqués, antécédents judiciaires ou psychiatriques) et sur celui des agressés. En 2019 ce sont plus de 38 000 agressions qui ont été recensés contre les dépositaires de l’autorité. Or ceux-ci ont été désigné pour cible par les organisations islamistes. 

La multiplication des égorgements et la tentative pathétique de les transformer en coups de couteau portés à la gorge renvoie à l’idée que se développerait sur notre sol une façon de tuer qui ne serait ni de notre espace culturel, ni de notre temps. Le plus efficace, plutôt que de jouer la culpabilisation et le procès en racisme de ceux qui s’en étonnent, serait de disposer d’outils fiables pour mesurer ce qui se passe. Les ministères de la Justice et de l’Intérieur gagneraient à s’en donner les moyens. Cela pourrait même sauver des vies à terme.

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Vulcain n’a pas été dérangé…

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Hier, les échanges entre le président de la République et Anne-Claire Coudray et Caroline Roux faisaient plus penser au tranquille déjeuner sur l’herbe de Manet qu’à un entretien politique.


Avec Emmanuel Macron, la tradition de ce rendez-vous, chaque année, le jour de la fête nationale, n’avait pas été respectée. D’où l’importance qu’on attachait à tort ou à raison aux échanges d’hier dans un cadre superbement champêtre.

Je n’ai rien trouvé à redire au principe de deux journalistes femmes procédant à l’interview. À partir du moment où l’excellence est garantie, la notion de parité dans un sens ou dans l’autre m’est totalement indifférente.

Puisque personne n’en parle, il faut bien se pencher sur la manière dont l’entretien a été mené et le confort dans lequel il a placé le président. Le milieu médiatique, par corporatisme, répugne à juger la pratique de ceux, hommes ou femmes, qui ont l’honneur de pouvoir procéder à un questionnement capital. Alors que la forme, en l’occurrence, est centrale. Passive, pas incisive, elle empêche un authentique dialogue républicain.

A lire aussi: 14 juillet: le jour où on a le droit d’aimer la France

Pour exposer brutalement ma perception, nous avons eu droit à un monologue présidentiel coupé par quelques questions (des interruptions multiples dont il ne se souciait pas). Emmanuel Macron a pu « dérouler » sur l’Ukraine, sur l’armement, sur le gaz russe, sur les crédits militaires, sur la sobriété énergétique. Quand on a abordé sur le tard des sujets plus sensibles, les retraites, l’Assemblée nationale et Uber, nous sommes évidemment restés sur notre faim.

Sur ce dernier thème – les liens de proximité entre la société mondiale Uber et le président -, face aux éloges dont il se gratifiait pour avoir favorisé Uber j’aurais attendu une interrogation directe sur le point suivant : convenait-il de se rengorger alors qu’à l’évidence, sur beaucoup de plans, Uber n’avait pas servi les intérêts français ?

J’entends bien qu’Emmanuel Macron use d’une méthode très efficace qui tient à sa nature, à son talent pour l’explication (non contredite) et à sa rouerie intellectuelle et politique. Il parle souvent trop longuement de sorte qu’occupant le terrain, il rend les interruptions malaisées, ou audacieuses, voire provocatrices.

Le problème qui s’est posé le 14 juillet est que l’une des journalistes, avec en permanence un sourire bienveillant comme si le président annonçait des merveilles, s’est plus exprimée que l’autre trop discrète et qui pourtant, les rares fois où elle a pu s’immiscer, l’a fait avec plus de vigueur et sans surjouer l’écoute aimable.

Ce monologue présidentiel a eu au fond pour dessein d’empêcher que le fond précisément puisse prêter à un véritable questionnement. Il a pour vocation d’interdire, face aux saillies et au mépris, par exemple des groupes ayant mis en échec le gouvernement à l’Assemblée nationale et de l’Assemblée nationale elle-même, toute réaction de la part des journalistes. Il a pour finalité, quand une journaliste a formulé une question d’importance – le gouvernement était-il informé de vos liens privilégiés avec Uber ? -, de la renvoyer dans ses cordes, avec dérision : « vous rigolez ou pas ? ».

On est encore loin, en France, de la pratique américaine où la multitude des questions n’autorise aucune fuite de la part des responsables politiques. Dans notre pays, le plus souvent, on oscille entre révérence et, plus rarement, grossièreté : deux caricatures d’entretien.

Vers la fin, le président a souligné – sa connaissance de la mythologie est indiscutable – qu’il ne se sentait pas ou plus Jupiter mais plutôt Vulcain, celui qui est à la forge et qui travaille sans relâche pour son pays. Pourquoi pas ? Mais il est sûr que Vulcain ne s’est pas fatigué lors de ces échanges dont on espérait trop. Bien au contraire, il s’est reposé. Dommage.

Tom Hanks, comédien déconstruit

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Tom Hanks D.R.

Le wokisme ayant totalement gangrené Hollywood, l’acteur s’excuse d’avoir joué un homosexuel atteint du SIDA dans Philadelphia…


Nous vous parlions au mois de mars de l’actrice britannique Thandiwe Newton qui était venue maintes fois pleurer à la télévision pour s’excuser d’avoir accepté des rôles de femmes noires, alors qu’elle est métisse à peau claire.

Hollywood est aujourd’hui ébranlé par une nouvelle remise en cause : Tom Hanks, le 15 juin, en pleine promo du film Elvis, est revenu pour le New York Times sur son rôle emblématique d’avocat homosexuel atteint du sida dans le Philadelphia de Jonathan Demme, en 1993.

A lire aussi, Jeremy Stubbs: Enquête sur le lobby trans: l’argent n’a pas de sexe

« Est-ce qu’un homme hétéro pourrait refaire aujourd’hui ce que j’ai fait dans Philadelphia ? Non, et à juste titre », prêche le comédien selon la nouvelle doxa. On se demande alors ce qui l’a autorisé à jouer dans Il faut sauver le soldat Ryan, alors qu’il n’a pas fait la guerre ; ou dans Apollo 13 alors qu’il n’est jamais allé dans l’espace. Selon Hanks, c’est l’attitude du public qui a changé : « Je ne pense pas que les gens accepteraient l’inauthenticité d’un hétéro jouant un gay. » On ne sait pas ce qui est pire : cet acharnement à détruire le métier même de comédien, alors que toute la grâce de l’acteur est d’incarner ce qu’il n’est pas et ne sera jamais, ou cette façon d’entacher l’un des premiers films ayant donné une visibilité aux malades du sida. Le comédien avait perdu 15 kilos pour ce rôle mémorable, dans un film dont les séquences avaient été tournées chronologiquement pour montrer son irrémédiable dégradation physique. C’était une époque moins stérilement déconstructiviste où l’intérêt de l’art primait sur toute autre considération.

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Afin d’appliquer son nouveau et sinistre code Hayes de l’authenticité raciale et sexuelle, Hollywood devra ficher les comédiens selon leur sexe ou selon leur race. Cela nous ramènerait à une époque pire encore. À coup sûr la cause des minorités en sortira grandie.

Calomnie en douce et silence des pantoufles

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Le Premier Ministre palestinien Mohammad Shtayyeh, lors de la réunion annuelle du groupe des donateurs pour la Palestine, à la Commission européenne de Bruxelles, le 10 mai 2022 © Olivier Matthys/AP/SIPA

L’État d’Israël, qui excelle au niveau mondial dans les domaines de la science et de la technologie, se voit gravement diffamé par l’Autorité palestinienne. Celle-ci l’accuse d’utiliser des cadavres pour mener des « expériences de laboratoire »…


Plus c’est gros, mieux ça passe

L’Autorité palestinienne est de plus en plus contestée pour sa corruption et sa brutalité.

Que lui reste-t-il pour exister ? Israël. En l’absence de quelque chose de précis permettant de se plaindre de l’ennemi, une surenchère absurde lui vaut une écoute distraite des Palestiniens et une ferveur accrue des idiots utiles occidentaux.

La dernière trouvaille vient du Premier ministre, Mohammad Shtayyeh : Israël se livrerait à des expériences médicales sur les cadavres des terroristes palestiniens[1]. Les autorités israéliennes se sont indignées de cette accusation, qui n’est, évidemment, pas assortie de la moindre preuve et qui mériterait la qualification « d’attaque éhontée contre les droits de l’homme et l’éthique scientifique », sauf que c’est Shtayyeh qui l’emploie, contre l’État juif.

Attaque éhontée contre les droits de l’homme

La détention au secret de deux handicapés mentaux israéliens[2] depuis, respectivement, 2014 et 2015 relève de cette qualification. Si l’on ajoute que l’un est noir et l’autre musulman, et que l’État hébreu fait tout ce qui est possible pour les récupérer, on met aussi à bas l’accusation d’apartheid.

Est-ce pour cette raison que ces deux prisonniers n’ont aucun soutien de la part des ONG françaises et aucun écho dans les médias, si soucieux du sort de Salah Haouri, accusé de participation à un attentat terroriste et qui « n’est autorisé à recevoir qu’une visite par mois, et ne peut pas avoir de contact téléphonique avec sa famille[3]» et de Ahed Tamimi, artiste pallywoodienne spécialiste de la provocation anti-appelés israéliens, qui a fini par écoper de huit mois de prison pour incitation au meurtre et qui ne regrette rien de rien[4] ?

Prouver l’absence de crime est plus difficile que découvrir un criminel

Comment prouve-t-on l’inexistence d’un fait ? Par l’absence de motif. Les universités israéliennes sont lieux d’excellence et de découvertes scientifiques innombrables : la caméra gélule, qui permet de suivre le parcours digestif sans invasion, les radiations alpha pour traiter le cancer de la prostate sans opérer, le sang artificiel pour pallier l’absence de donneurs[5] et même de la viande imprimée en 3D sans recours animal pour fournir des protéines aux véganes. Et leurs laboratoires auraient besoin de procéder à des expériences sur des cadavres, comme au Moyen-Âge ?

Les inconditionnels de la cause palestinienne qui haussent les épaules avec indulgence devant les excès et les projections de leurs protégés ne montrent pas la sincérité de leur militantisme, seulement leur paternalisme. 

Leur responsabilité est pourtant engagée quand des Merah prennent ces mensonges au pied de la lettre : « Je tue des juifs en France, parce que ces mêmes juifs-là (…) tuent des innocents en Palestine. » Pourtant, nul ne songe à les incriminer.


[1] https://www.timesofisrael.com/pa-premier-shtayyeh-claims-israel-conducting-lab-experiments-on-palestinian-bodies/

[2] https://www.hrw.org/fr/news/2017/05/03/deux-israeliens-detenus-au-secret-gaza

[3] https://www.la-croix.com/Monde/Israel-lavocat-franco-palestinien-Salah-Hamouri-detenu-trois-mois-plus-2022-06-07-1201218800

[4] https://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/apres-8-mois-dans-une-prison-israelienne-ahed-tamimi-ne-regrette-rien_2028540.html

[5] https://nocamels.com/2022/06/redc-biotech-blood-donation-lab/

La surprise du chef du Kremlin

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Vladimir Poutine au côté de son ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, Moscou, 22 juin 2022 © Sergei Bobylev/TASS/Sipa USA/40036671/AK

Non seulement les services de renseignements américains disposaient d’informations leur permettant d’annoncer l’invasion russe de l’Ukraine mais ils ont aussi su les interpréter correctement, ce dont les services français et européens ont été incapables. Il ne s’agit pas seulement de savoir si l’adversaire peut frapper, mais s’il souhaite le faire.


Tout le monde s’est trompé, à la notable exception des services de renseignement américains. En Europe, aucun service n’a vu venir l’invasion de l’Ukraine. Cette question du renseignement et de son échec est, à un moment ou un autre, cruciale dans presque toutes les guerres et les crises depuis la Seconde Guerre mondiale. Souvent, il s’agit d’un défaut d’alerte stratégique, c’est-à-dire de la capacité de prévoir le passage à l’acte de l’adversaire. De Pearl Harbour et Barbarossa en 1941 en passant par la guerre du Kippour en 1973, jusqu’ à l’annexion sans combat de la Crimée par la Russie en 2014 ou la chute rapide de Kaboul et l’évaporation de l’armée afghane pendant l’été 2021, pour ne citer que les cas les plus célèbres, des États dotés de moyens conséquents de renseignement et d’analyse ont été surpris quand l’ennemi a frappé.

La méthode des « indicateurs d’alerte »

Pour pouvoir informer les dirigeants suffisamment tôt pour qu’ils puissent contrecarrer les plans de l’ennemi, les services de renseignement utilisent la méthode des « indicateurs d’alerte ». Il s’agit des signes précurseurs révélant non seulement les capacités de l’ennemi, mais aussi ses intentions. Dans le cas de l’invasion russe de l’Ukraine, l’un de ces indicateurs a été l’approvisionnement des unités russes stationnées en Biélorussie en sang et autres matériels médicaux destinés à traiter les blessés (information publiée par l’agence Reuters le 29 janvier 2022 à la base des rapports des services estoniens). Certains de ces moyens étant périssables et indispensables, leur distribution suggère la préparation d’une action d’envergure sans pour autant donner une certitude absolue. Si d’autres éléments de contexte convergent dans ce sens, les services émettent une alerte. Or, un indice contradictoire a induit les Ukrainiens en erreur : ils n’ont pas observé les préparations tactiques qui, selon la doctrine russe, précèdent le déclenchement d’une opération. C’est probablement l’absence de cette étape qui a conduit les services ukrainiens à contredire les Américains et conclure que Poutine bluffait. Les Russes n’ont pas agi comme d’habitude, précisément pour tromper leur adversaire.

Ces exemples démontrent que l’alerte et l’avertissement relèvent toujours du jugement. Malgré les capacités impressionnantes dont disposent les alliés occidentaux pour détecter les activités russes et leur volonté de partager informations et analyses, les services otaniens et les Ukrainiens eux-mêmes ne sont pas parvenus aux mêmes conclusions.

La technologie spatiale au service du renseignement

Pourtant, de nombreuses pièces du puzzle étaient disponibles, à partir de sources ouvertes et souvent en temps réel ou presque, y compris (et c’est l’une des grandes nouveautés de cette guerre) pour les médias et les opinions publiques. Le renforcement militaire de Moscou, notamment en Biélorussie, était connu, discuté et analysé depuis au moins avril 2021. L’imagerie satellitaire de la société américaine de technologie spatiale Maxar et les informations recueillies sur les médias sociaux dessinaient un tableau assez clair de la crise, presque comme s’il s’était agi de suivre une tempête tropicale montante.

L’histoire commence au début du printemps 2021 quand la Russie effectue des « vérifications surprises » de ses forces dans les régions militaires (une série d’exercices militaires), en réponse à des mouvements supposés agressifs des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN. Lors d’une réunion au siège de l’OTAN à la mi-avril 2021, le secrétaire d’État américain Antony Blinken déclare qu’il s’agit de « la plus grande concentration de forces russes aux frontières de l’Ukraine depuis 2014 ». Dans la foulée, le président Biden réaffirme l’engagement américain envers l’Ukraine. Les analystes suivent également de près l’exercice Zapad, qui a lieu chaque année dans les quatre principaux districts militaires de la Russie. Or, Zapad-2021 semble avoir comme objectif à plus long terme l’intégration des forces biélorusses dans les structures militaires dirigées par la Russie, ce qui laisse présager de la position de Biélorussie dans tout conflit futur.

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Le problème est toujours d’apprécier si l’adversaire qui sans aucun doute peut frapper, souhaite le faire. S’il s’agissait du Luxembourg, l’absence totale de capacité d’agir nous dispense de nous interroger sur ses intentions. En revanche, Poutine, qui possédait à l’évidence la capacité d’agir, entendait-il l’utiliser pour mener une guerre des nerfs diplomatique contre l’Ukraine et l’Occident ? Avait-il en tête une opération limitée, ou comptait-il poursuivre des objectifs maximalistes, c’est-à-dire lancer ses forces pour prendre le contrôle l’ensemble de l’Ukraine ? Et quand passerait-il à l’acte ?

En décembre, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche déclare que, selon les services de renseignement, « Poutine n’a pas encore pris de décision », une position encore dominante en janvier.

Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov, lors d’une rencontre à Genève, en marge d’une conférence sur la sécurité européenne, 21 janvier 2022 © Sergei Bobylev/TASS/SIPA USA/37080984/BF

Toutefois, si les intentions ultimes de Moscou n’étaient pas claires, les responsables des services de renseignement occidentaux savaient parfaitement ce qui se passait sur le terrain. D’après des documents des services américains consultés par des journalistes du Washington Post en décembre 2021, les responsables américains pensaient que la Russie avait déjà déployé 70 000 soldats et serait capable d’en déployer jusqu’à 175 000 le long de la frontière ukrainienne. Organisée en une centaine de « groupes tactiques de bataillons », cette force serait capable de passer à l’offensive début 2022. C’est sur la base de ces analyses que, début décembre 2021, lors de discussions à Copenhague, Blinken prévient son homologue russe, Sergeï Lavrov, qu’en cas d’invasion la Russie fera face à de « graves conséquences ».

À peu près au même moment, les responsables britanniques commencent eux aussi à redouter la perspective d’une invasion russe de l’Ukraine, car les unités déployées pour Zapad-2021 sont restées en Biélorussie au lieu de rentrer vers leurs bases. D’importants stocks de munitions sont également laissés sur place. L’imagerie satellitaire révèle le déploiement progressif de troupes russes et, surtout, celui des unités nécessaires au soutien technique et logistique d’une invasion. Fin janvier 2022, le service de renseignement extérieur de l’Estonie estime que « les forces armées russes sont prêtes à se lancer dans une opération militaire de grande envergure contre l’Ukraine à partir de la deuxième moitié de février » : « une fois ce niveau de préparation militaire atteint, précise-t-il, il ne faut plus qu’une décision politique pour lancer l’opération. »

Le renseignement militaire français se plante

Néanmoins, il y avait des différences d’appréciation entre les membres de l’OTAN. Les responsables français, par exemple, en désaccord avec leurs homologues américains et britanniques, maintenaient qu’une attaque, bien que probable, serait retardée dans l’attente de conditions météorologiques favorables. « Les Américains disaient que les Russes allaient attaquer, a déclaré le chef d’état-major des armées, le général Thierry Burkhard, mais nos services pensaient que la conquête de l’Ukraine aurait un coût monstrueux et que les Russes avaient d’autres options. » Selon Burkhard, les renseignements militaires français se sont ralliés à l’idée d’une offensive imminente à la veille de celle-ci, après avoir reçu des renseignements des leurs alliés de l’OTAN. Le départ prématuré du général Éric Vidaud, directeur du renseignement militaire, en mars dernier est sans doute lié à cette erreur d’évaluation.

Les responsables français n’étaient pas les seuls à sous-estimer le danger. Des sources de sécurité ont déclaré à Der Spiegel que le chef du BND allemand, Bruno Kahl, a dû être secouru par une mission d’urgence des forces spéciales, car il se trouvait en Ukraine pour des entretiens lorsque l’invasion a commencé.

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Projeter son propre raisonnement dans l’esprit de l’adversaire, comme l’ont fait les analystes français est une erreur d’analyse courante et parfaitement humaine : on attend de l’autre qu’il raisonne comme nous, qu’il ait peur et qu’il souffre des mêmes choses que nous. Les analystes français avaient raison de dire que l’invasion risquait de coûter extrêmement cher aux Russes, les quatre premiers mois de la guerre le prouvent. Seulement, soit Poutine n’a pas la même idée de ce que veut signifie un « coût monstrueux », soit pour lui le jeu en valait la chandelle, soit enfin il n’avait pas l’information dont disposaient les Français, notamment sur l’état réel des forces armées russes.

Répétons-le, la France n’a pas été, loin s’en faut, la seule à se planter. Sur la foi d’évaluations britanniques et américaines, en plus de celles de ses propres services, un conseiller en renseignement proche de Zelensky a déclaré au quotidien israélien Haaretz qu’il pensait que Poutine bluffait jusqu’au jour J. Il s’attendait à ce que Poutine atteigne ses objectifs sans envahir le pays. La cote de popularité de Zelensky était faible, la situation politique instable, et la pression ne cessait de monter. Pourquoi la Russie devait-elle frapper à ce moment-là ? Pourquoi ne pas attendre que les fruits tombent d’eux-mêmes, sans secouer l’arbre ? Heureusement pour eux, ces erreurs des analystes ukrainiens n’ont pas affaibli la stratégie défensive de leur pays, car le gouvernement, tout en espérant le meilleur, se préparait énergiquement au pire.

Pour compléter le tableau, ajoutons que, le 19 février, le président Biden s’est déclaré convaincu qu’une attaque aurait lieu dans les prochains jours. L’évaluation de la communauté du renseignement américaine selon laquelle Poutine ne prendrait pas de décision définitive du moment exacte de l’attaque avant la dernière minute était exacte : l’invasion russe a pris tout le monde par surprise… y compris des membres du gouvernement et des forces armées russes.

La résistance ukrainienne négligée

De plus, si les analystes occidentaux avaient globalement percé les intentions de Poutine, ils ont commis la même erreur d’appréciation que lui sur l’état des forces ukrainiennes : face à une invasion russe, pensaient-ils, l’Ukraine tomberait rapidement. Si la guerre risquait de coûter cher à la Russie, ce serait plutôt dans la phase de l’occupation et non pendant l’invasion. Certains spécialistes, comme Michael Kofman, se sont ouvertement interrogés sur leur tendance systématique à surévaluer les forces russes (tout comme leurs aïeux de l’époque de la guerre froide). Cependant, ces analyses n’ont pas empêché le Royaume-Uni et les États-Unis d’intervenir pour renforcer rapidement les défenses de l’Ukraine. Il faut donc atténuer la sévérité de la critique : les renseignements tactiques et les moyens matériels mis à la disposition de l’Ukraine ont sans doute contribué à la capacité de ses forces armées de mettre en échec les plans russes, notamment celui qui prévoyait de décapiter le pouvoir ukrainien en quarante-huit ou soixante-douze heures. Une fois les forces russes déstabilisées par cet échec, les Ukrainiens et leurs alliés ont su profiter de la situation et renverser la tendance.

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Quelles conclusions en tirer ? Tout d’abord, l’abondance et la qualité des informations disponibles pour le grand public doivent inciter politiques et journalistes à apprendre comment les traiter. Il leur faut notamment faire la différence entre capacité et volonté, et éviter autant que faire se peut de projeter leurs propres intentions et manières de voir sur les autres.

Ensuite, il faut admettre que, quelles que soient leurs erreurs en Irak et en Afghanistan, les Américains et les Britanniques ont démontré des capacités impressionnantes dans la production de renseignements utiles (de bonne qualité et au bon moment) à leurs gouvernements. Ces renseignements ont permis à l’OTAN de mettre en échec la stratégie de Poutine.

Intermachette

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Photo d'illustration. Intermarché Hyper, péage de Roussillon, Isère, 2021 © ROMAIN DOUCELIN/SIPA

Un différend de stationnement aux abords d’un Intermarché de Montpellier a donné suite à un lynchage d’une violence inouïe…


En ce mois de juin, la France a été touchée par une vague de chaleur. Les coups de soleil ont fait leur apparition, mais parallèlement, les coups tout court n’ont pas disparu.

Le directeur d’un Intermarché de Montpellier en a fait la terrible expérience récemment. En effet, ce dernier a eu l’infortune d’être agressé, à deux reprises, par les mêmes personnes, à quelques jours d’intervalle.

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Tout commence le 3 juin, lorsque ce Montpelliérain de 31 ans constate qu’un véhicule bloque l’entrée de la réserve de son magasin. Il décide de garer son camion derrière ce véhicule, tout en laissant ses coordonnées sur le pare-brise. Mal lui en a pris, car peu de temps après, il reçoit l’appel d’une femme, qui l’insulte et le menace d’endommager son camion s’il ne rapplique pas au plus vite. Arrivé sur les lieux il se retrouve face à une furie de 20 ans, accompagnée de son père, qui le prend à partie également. Il rejoint son camion pour échapper à cette situation, mais le frère de la jeune femme, qu’il n’avait pas vu, sort de sa cachette et une bagarre éclate entre les deux hommes. Comme un malheur n’arrive jamais seul, un deuxième homme surgit et l’attaque par derrière. Le père de famille s’en mêle aussi, le touchant au visage avec un objet en bois.

La victime a refusé de porter plainte, par peur des représailles, car la charmante famille habite à proximité de chez lui. Mais le 14 juin, rebelote. Alors qu’il est en train de charger son camion, il se retrouve face à deux individus : le premier l’asperge de bombe lacrymogène tandis que le deuxième le menace de mort en brandissant une machette. Un coup de cette dernière va lui laisser une plaie béante sur la main gauche et une incapacité totale de 15 jours.

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Cette fois, il déposa plainte. Le frère et la sœur ont été arrêtés mais pas la troisième personne, qu’il n’est pas parvenu à identifier. L’un des slogans d’ Intermarché est « Tous unis contre la vie chère ». Espérons qu’un jour nous serons tous unis contre l’ensauvagement.

Source: Midi Libre

Obsessions roumaines

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"Dédales" (Miracle) de Bogdan Georges Apegtri (2022) © Memento Distribution

Le cinéaste Bogdan Georges Apegtri, dans «Dédales», nous donne un thriller cérébral et violent au dénouement ambigu.


Quel secret innommable couve cette jeune et belle novice voilée de noir, qu’un taxi attend au pied du couvent dont elle s’échappe en catimini, aidée par une consœur qui, avec des mines de conspiratrice, lui confie son téléphone portable? De très lents plans-séquences fixent les longs dialogues entre le chauffeur et sa passagère – procédé qui rappelle inévitablement l’esthétique millimétrée du grand cinéaste iranien Jafar Panahdi (« Taxi Téhéran », « Trois visages »). Mais ici nous sommes dans l’espace rural d’une Roumanie pétrie de religiosité, à l’écart des grandes villes. Loin des regards, la pudique jeune fille revêt des habits civils pour se rendre à un rendez-vous de consultation au service de gynécologie de l’hôpital local. Le motif n’est pas énoncé – mais on sait bien de quoi il retourne.

Fugue clandestine

C’est avec beaucoup de subtilité que le cinéaste Bogdan Georges Apegtri travaille ainsi l’ellipse et le hors champ, laissant le spectateur cogiter à loisir.  Pour le retour de sa fugue clandestine, la demoiselle tombe sur un chauffeur de taxi aux questions quelque peu intrusives – et toujours ces plans fixes au cordeau captant, imperturbables, l’habitacle du véhicule au fil des répliques… Le taxi fait un détour, bizarrement, vers les piles d’un pont isolé, en pleine nature. Soi-disant pour laisser sa prude passagère enfiler à nouveau sa chasuble. Séquence-charnière de « Dédales » (dont, mieux inspiré, le titre original est Miracol : « miracle »).

Séquence d’autant plus atroce qu’étirée à l’extrême et sciemment filmée à bonne distance, elle esquive le voyeurisme, mais sans priver le spectateur des interminables braillements de la victime. Point de bascule à partir de quoi l’acharnement de l’inspecteur de police (l’acteur Emanuel Parvu, à son meilleur) pour arracher leurs secrets aux protagonistes se heurte aux dédales de sa propre logique intime. Celle qui, par un ultime, magistral effet de surprise – coup de génie du cinéaste -, jettera le doute sur le véritable dénouement…

Singulier Bogdan George Apetri, réalisateur de 56 ans implanté de longue date aux Etats-Unis où il professe la mise en scène à l’université Columbia de New-York, mais qui retourne dans son village natal du nord de la Roumanie, pour y tourner concurremment, en 2019, un autre long métrage jamais sorti chez nous en salles, « Unidentified », avec les mêmes acteurs dans des rôles différents, premier volet d’une trilogie qu’il s’apprête à clôturer cette année. Toujours à la maison.

Dédales (titre original : Miracol). Film de Bogdan Georges Apetri. Avec Ioana Bugarin, Emmanuel Parvu, Cezar Antal. Roumanie/République tchèque/ Lettonie, couleur. Durée : 1h58. En salles le 20 juillet.

Il n’ y a pas eu de 14 juillet à Trèbes!

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C’est la ville où le colonel Beltrame a été égorgé par un islamiste.


Le 14 juillet est notre fête nationale. On célèbre la prise de la Bastille en 1789. Et par la même occasion, on rend hommage à ceux qui sont morts pour la France.

Et c’est bien pour la France qu’est mort le colonel Beltrame. La cérémonie, normalement, devait se dérouler devant le monument aux morts. Y figurent les 104 noms des enfants de Trèbes tués pendant les deux guerres mondiales. Le nom de Beltrame n’y est pas inscrit, parce qu’il n’est pas mort à la guerre. Pourtant, il y a bien une guerre en France contre les islamistes ?

Et le maire de la ville a annulé les commémorations. Il était malade, indisposé ? Malade d’être obligé, comme le protocole le veut, de s’afficher avec le député de la région : ce dernier, Christophe Barthès a été élu sous les couleurs du Rassemblement national !

Le maire de Trèbes est très sélectif dans ses fréquentations. Que dira-t-il à ces électeurs qui ont voté pour Marine Le Pen ? Ignore-t-il que l’assassinat du colonel Beltrame est pour beaucoup dans leurs votes ?

Le maire de Trèbes est un Tartuffe : « Cachez ces électeurs que je ne saurai voir !». Il est encore maire pour quelques temps. Lors des prochaines élections municipales, il ne le sera sans doute plus.