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Robert Ménard / 2027: « S’il faut mouiller la chemise… »

À mi-parcours de son deuxième mandat à la mairie de Béziers, Robert Ménard dresse un bilan d’étape. Si sa ville est devenue plus dynamique et plus sûre, il reconnaît être désarmé face à la pression islamique. Inquiet pour l’avenir du pays, il déplore que le président, qui a pourtant les mains libres, n’ait pas le courage de prendre les problèmes du pays à bras-le-corps… et prend date avec les Français.


Relire la première partie de notre grand entretien avec Robert Ménard


Parlons de votre bilan à Béziers, dont vous êtes le maire depuis près de dix ans. L’insécurité a-t-elle régressé ?

Oui, parce que j’ai mis sur la table des moyens colossaux. Mais est-ce aux communes de payer des polices municipales de plus en plus nombreuses et de mieux en mieux équipées ? Les représentants de l’État et du gouvernement n’ont que le mot « régalien » à la bouche. Ils nous expliquent que les grands enjeux, c’est leur rayon et que les maires n’ont qu’à s’occuper des crottes de chien. Eh bien, qu’ils commencent par garantir la sécurité de nos concitoyens ! L’État a, presque en « loucedé », refilé tout un tas de bébés aux maires, mais sans nous donner les moyens afférents.

Au-delà de la délinquance, parfois mêlé à elle, il y a le séparatisme culturel. Observez-vous sur ce front une aggravation ou une amélioration ?

Malheureusement, la réponse est évidente. On croise aujourd’hui des femmes habillées à l’afghane, des petites filles entièrement voilées qu’on ne voyait pas avant. Il y a quelques semaines, j’ai rappelé la loi à une jeune fille dont le visage était entièrement masqué et le corps couvert intégralement, mains comprises. Je lui ai demandé de se découvrir, ce qu’elle a fait.

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Toutes nos proclamations de « nous ne céderons pas » sont donc inutiles ?

Je me sens désarmé. Dans l’immense majorité des cas, ces filles voilées ou masquées oscillent entre affirmation identitaire et communautarisme exacerbé en haine de l’autre. Je sais remettre une ville en état, mener une politique sociale. L’État viendra à bout du terrorisme. Mais on ne sait pas changer ce qu’il y a dans la tête des gens. De plus, on l’oublie trop souvent, le changement technologique contribue aux radicalisations identitaires. Avec internet, les immigrés peuvent conserver un contact permanent avec leur culture d’origine et sont « cadenassés » par les algorithmes qui les maintiennent dans leur communauté. Nous ne savons pas forcément lutter contre une certaine séduction, l’attrait d’un monde arabe parfois puissant, souvent fantasmé, comme l’Arabie saoudite, par exemple, qui achète les stars du foot, envisage de construire une ville géante ultra-moderne, etc. En face, il faudrait renouer avec la fierté d’appartenir à cette France millénaire, à cette patrie de la liberté. Mais cela nécessite une volonté, une immense ambition.

Il faut commencer par interrompre les flux…

Oui, en tout cas les réduire au strict minimum car l’immigration zéro n’est qu’un slogan. Encore faut-il intégrer ceux qui sont là. L’Éducation nationale a longtemps cherché à m’imposer l’enseignement des langues d’origine, en l’espèce l’arabe et le turc, dans les petites classes. J’ai toujours refusé et ils ont arrêté de me casser les pieds avec ça. En revanche, dans les quartiers difficiles où il y a parfois plus de 90 % d’enfants d’origine étrangère, j’ai mis en place des cours du soir de français.

On peut aussi se battre sur des comportements : refuser les tenues islamiques à l’école par exemple.

Voilà pourquoi mon épouse Emmanuelle a déposé une proposition de loi pour instaurer l’uniforme à l’école. Des syndicats d’enseignants et des associations de parents d’élèves braillent, expliquant que ça ne réglera pas tous les problèmes. Réglons déjà celui des tenues ! J’ai donc écrit à Gabriel Attal pour le prendre au mot et lancer une expérimentation.

On demande aux communes de faire du logement social, mais les habitants ne veulent pas forcément de mixité. Est-ce un instrument politique efficace ?

Bien sûr qu’il faut construire des logements sociaux, mais si les gens ne veulent pas se mélanger, ce n’est pas les HLM qui vont fabriquer de l’intégration. Des cités entières ne sont peuplées que de gitans parce que ces gitans-là ne veulent vivre qu’avec d’autres gitans. On a le plus grand mal à mélanger des Maghrébins et des Turcs dans les mêmes cages d’escalier. Quand des gens issus de l’immigration viennent me demander des logements, ils commencent souvent par préciser qu’ils ne veulent pas de tel ou tel quartier, parfois d’ailleurs parce qu’il y a trop de gens de la même origine qu’eux… De même, devant les écoles, je suis fréquemment interpellé par les mamans maghrébines qui me demandent : « Où sont les petits Français ? » La clef, c’est le nombre. On peut intégrer des minorités, pas des groupes qui représentent 60, 70 ou 80 % de la population de telle école ou de tel quartier.

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Du point de vue d’un maire, la « machine France » fonctionne-t-elle ?

Cela dépend des interlocuteurs que l’on a. J’ai connu une période où le préfet et le sous-préfet me menaient une guerre politique permanente. Aujourd’hui, j’ai un préfet et un sous-préfet qui font leur métier, donc qui m’aident. Comme Michel Houellebecq, « je crois de moins en moins aux idées, je crois aux gens ». En réalité, la France ne fonctionne pas si mal que ça, il ne faut pas tomber dans le sombre panneau décliniste.

Vous qui prônez la bienveillance, avez eu des propos très violents, et à mon sens très injustes, à l’encontre d’Éric Zemmour. Regrettez-vous de l’avoir blessé et anéanti votre amitié ?

Évidemment ! Il y a des mots que je n’aurais pas dû prononcer. Être ironique et méchant, c’est facile et les gens applaudissent. Alors oui, même si j’ai de profonds désaccords avec Éric, j’aurais dû avoir avec lui un débat amical. Le problème, c’est qu’il est désormais prisonnier d’une sorte de fan-club catho-droitard qui ne lui laisse guère d’espoir de rassemblement.

Et vous, appartenez-vous à une famille politique ?

Sûrement pas et je ne le veux pas. Certains parleront de poujadisme, mais je pense que les partis politiques sont un problème en France. Comme les médias d’ailleurs. Politiquement, notre système fait qu’on se rallie non pas à un parti, mais à une personne. Et je ne vois pas à qui je pourrais me rallier aujourd’hui. Disons pour vous faire plaisir que je suis un démocrate attaché à un pouvoir plus proche des gens, plus respectueux des cultures locales et de la diversité française. Une sorte de fédéraliste un peu punk. Comme disait Romain Gary, « un minoritaire-né ».

Robert Ménard rencontre des locataires des HLM de Béziers, réunis devant l’agence OPHL du quartier de l’Iranget pour protester contre la hausse des tarifs énergétiques, 3 août 2023. © Stéphane Pocher/France Bleu

Si je peux jouer les idiotes, en quoi les médias sont-ils un problème ?

Ils passent leur temps à dénoncer tous ceux qui ne sont pas mainstream. Regardez le boucan autour du JDD ! Je ne partage pas forcément les idées de Geoffroy Lejeune, mais ce n’est pas un facho dangereux. Or, il y a eu quasi-unanimité des autres médias pour dire que son arrivée menaçait le pluralisme. Même Reporters sans Frontières a fait chorus : mais de quoi je me mêle ? Alors que, a contrario, les propos d’Edwy Plenel ne sont jamais questionnés.

En refusant toute affiliation politique, vous préservez votre liberté. Mais le prix à payer n’est-il pas une certaine solitude ?

Il est vrai que, quand je côtoie les états-majors politiques, je me sens seul, mais je reçois aussi beaucoup de soutiens et pas seulement dans ma ville. Alors, peut-être ma solitude est-elle une bonne chose. Les gens veulent du bon sens.

Le bon sens n’est pas une politique !

Et pourquoi donc ?

Parce que nous avons aussi besoin d’une vision, d’un récit, d’un roman national. Nous ne sommes pas ensemble simplement pour produire des richesses.

Mais on crève de ça ! Ça vous fait certainement plaisir d’avoir un chef de l’État qui lit des philosophes, mais ça ne sert à rien. On a besoin de gens qui ne promettent pas de tout régler, mais s’attaquent modestement à deux ou trois questions et s’y consacrent corps et âme.

Aujourd’hui, même les chansons de Michel Sardou sont devenues un enjeu de querelles…

Cette polémique en dit long sur l’état de la société. La jeune chanteuse qui exprime son dégoût des Lacs du Connemara est représentative d’une certaine jeunesse qui déteste tout ce qui est français et populaire. Ça doit lui sembler « sale ». Le tube de Sardou, comme les chansons de Claude François, est repris dans tout le pays depuis quarante ans, des bals de village aux soirées de mariage en passant par les communions ou les fêtes de promo. C’est cette popularité qui les rend jaloux. Et Sardou est la cible parfaite : gaulois ronchon, mâle hétéro, pas vraiment de gauche…

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Que pensez-vous de « tendresse » affichée des écolos pour le rappeur Médine ?

Soyons clairs : les Verts ont raison d’alerter sur le catastrophique changement climatique. Mais les extrémistes écolos sont dangereux, car ils veulent une véritable rupture anthropologique. Avec eux, c’est le retour au Néolithique. Et encore, ça doit leur sembler trop polluant. Quant à l’invitation faite à Médine, drôle d’idée politique, reprise d’ailleurs par LFI ; ce type, qui semble loin d’être idiot, est hors des clous. Son tweet sur Rachel Khan est sans conteste possible une saloperie antisémite digne d’un Soral. Et certains de ses clips sont plutôt inquiétants, comme celui où il dit sa détestation de notre République et de Marianne. L’extrême gauche française, dont font partie les écologistes, a le plus grand mal à rompre avec les pratiques clientélistes qu’elle dénonce pourtant chez ses adversaires. Ici, c’est tout simplement du racolage électoral !

Darmanin pense à 2027, et vous ?

Il y a la force du destin. On ne peut pas exclure une crise de grande ampleur qui frapperait soudain notre pays. Quelque chose d’incontrôlable. Dans une situation de ce genre, en tant que patriote, je répondrais présent. La situation de 2027 est préoccupante : qui pour succéder à Macron ? Quand j’entends les propos capitulards, munichois, d’un Sarkozy et le peu de réactions à droite, je me pose des questions. Je ne laisserai pas mon pays plonger dans l’inconnu. Et s’il faut mouiller la chemise…

La France à l’heure des choix: immigration contre prospérité économique

Selon une note de l’Institut Montaigne, qui fait couler beaucoup d’encre, la croissance économique et démographique de la France n’est maintenant possible que grâce à l’immigration.


Il faut lire la tribune que l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie (OID) a publiée dans Marianne. Il faut la lire parce qu’elle est un cri d’alarme nécessaire, et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour empêcher la catastrophe qui vient. Il faut la lire parce qu’elle est soigneusement factuelle, documentée, sourcée. Il faut la lire parce que même si elle ne fait que confirmer ce que vous savez déjà – ce que n’importe qui sait déjà, pour peu qu’il se donne la peine de regarder par sa fenêtre – elle vous donnera des arguments et des chiffres incontestables à opposer à ceux qui persistent encore dans le déni et le mensonge, elle vous donnera de quoi ouvrir les yeux de quiconque se laisse encore endormir par les chimères du « vivre-ensemble », de la « diversité qui est une chance » et d’une repentance postcoloniale délirante. Et pour faire bonne mesure, complétez cette remarquable tribune par les études statistiques que l’OID expose sur Twitter, elles aussi sont brillantes.

La France peut intégrer des individus, pas des peuples entiers

Non, l’immigration massive n’est pas une chance pour le pays d’accueil. Non, elle n’est pas une richesse. D’aucuns prétendent qu’elle serait une nécessité économique. Seulement, on se demande bien en quoi une république islamique du Frankistan (!) à l’économie dynamique serait préférable à une France peut-être un peu moins riche mais où Lola n’aurait pas été tuée. Eric Dupond-Moretti se plaindrait peut-être d’avoir plus du mal à trouver des gens pour ramasser ses poubelles, mais peut-être aussi un garde des Sceaux devrait-il se soucier un peu moins de ses poubelles et un peu plus de la sécurité des citoyens : l’immigration massive extra-européenne est nettement plus criminogène que les populations européennes. Ceci dit, il se trouve que même l’argument économique n’est qu’un mensonge de plus : dans ce domaine aussi, l’immigration massive est un fardeau. Tout au plus sert-elle un dumping social délétère, le 9-3 n’est absolument pas la Californie, et il ne semble pas que Trappes, Stains ou les quartiers nord de Marseille soient des eldorados pour les « métiers en tensions » – ou alors, qu’attendent nos chefs d’entreprises pour tous s’y implanter ? Depuis des décennies, l’immigration massive n’a résolu aucun des problèmes de la France, ni des autres pays qui accueillent de tels flux migratoires, mais en a causé beaucoup, et les a tous (ou presque tous) amplifiés. Au fait, a-t-on pensé à intégrer le coût des émeutes et razzias du début de l’été dans le bilan économique de l’immigration massive ? C’est que, d’après un rapport très officiel, « une grande majorité des émeutiers interpellés sont des jeunes individus de nationalité française, mais originaires de l’immigration (2e ou 3e génération), principalement du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne. »

Chiffres implacables

Au fait : il n’y a pas une immigration, mais des immigrations. Les chiffres, là encore, sont implacables, et les populations originaires d’Asie du Sud-Est ne présentent absolument pas les mêmes profils statistiques que les populations originaires d’Afrique subsaharienne ou du Maghreb. Les individus ne sont évidemment pas réductibles à de telles catégories, et peuvent différer totalement de ce qu’annoncent des profils statistiques, mais les tendances générales sont claires. Or, c’est la prise en compte des généralités qui doit fonder la décision politique – sans nier la possibilité de cas particuliers, mais sans essayer lâchement de se donner bonne conscience en se réfugiant derrière les cas particuliers pour refuser de voir les généralités qui bousculent la bien-pensance. Dans le monde réel, les êtres humains ne sont pas la matière brute interchangeable d’une ingénierie sociale qui engendrera l’Homme Nouveau par la grâce de la laïcité et des « valeurs de la République », toujours plus fréquemment invoquées mais toujours plus creuses. Ils ne sont pas non plus les agents tout aussi interchangeables d’un système économique dont l’horizon se limite à produire et à consommer, et qui n’imagine pas de plus sublime accomplissement que d’avoir une Rolex à 50 ans. Dans le monde réel, il existe ce qu’on appelle la culture, l’enracinement, le besoin de donner du sens, la soif de sacré, le désir de grandeur, l’enthousiasme. Dans le monde réel, toutes les civilisations ne se valent pas, et il y a une différence de nature entre civilisation et barbarie.

La France n’est pas un droit de l’homme

Ceci dit, ne commettons pas l’erreur de prendre nos dirigeants pour des imbéciles. Emmanuel Macron, quoi qu’on puisse penser de lui par ailleurs, n’est pas un idéologue mal dégrossi comme Mathieu Slama, qui considère que ce serait trahir « nos principes » de ne pas régulariser la totalité des migrants illégaux – je le trouve d’ailleurs beaucoup trop restrictif, ce garçon : donnons la nationalité française, le droit de vote et les aides sociales à l’humanité entière ! Et pas seulement à l’humanité, d’ailleurs, halte à la discrimination spéciste, Aymeric Caron n’a pas à parler au nom des moustiques, c’est de l’humansplaining, il est grand temps que les culicidés votent et que les femelles (et les mâles qui pondent, pas de transphobie) bénéficient de la CAF pour leurs œufs. Bref.

Emmanuel Macron, donc, a accès à toutes les données sur lesquelles s’appuient les études de l’OID comme celles de Marc Vanguard : elles sont, redisons-le, publiques, sourcées, vérifiables et vérifiées. Comme tous ceux qui l’entourent, Emmanuel Macron connaît les conséquences économiques, sociales, sociétales et sécuritaires de sa politique migratoire. Il sait que son prédécesseur a évoqué une partition du territoire qui deviendrait inévitable. Il sait que son ancien ministre de l’Intérieur a reconnu que de « côte à côte » nous nous dirigions vers un « face-à-face ». Lui-même, dans le débat de l’entre-deux-tours, a déclaré qu’interdire le hijab provoquerait une guerre civile. Pour citer Coluche, « les hommes politiques, j’vais vous faire un aveu, ne sont pas bêtes. Vous vous rendez compte de la gravité ? Ils sont intelligents. Ça veut dire que tout ce qu’ils font, ils le font exprès. »

Mais pourquoi ?

Tout simplement parce que l’immigration massive est nécessaire pour dissoudre la culture française dans le multiculturalisme, et ainsi mettre fin au sentiment d’unité nécessaire pour que le peuple revendique sa souveraineté, et surtout pour abolir la décence commune qui, pour l’instant, freine encore dans leurs appétits ceux que Christophe Guilluy appelle les anywhere. L’extrême-centre envie les « élites » du tiers-monde qui peuvent tout se permettre, et rêve donc de tiers-mondiser la France. Ambition suicidaire : la libanisation en cours, si elle se poursuit, conduira aux mêmes résultats qu’au Liban, dont Thibault de Montbrial rappelait récemment qu’avant son effondrement il était surnommé « la Suisse du Moyen-Orient » – comme quoi, la prospérité économique ne fait pas tout.

Qu’on parle de « créolisation » comme Jean-Luc Mélenchon, de « transition démographique » et « bouleversement d’une rapidité inouïe » comme Emmanuel Macron, ou de « grand remplacement » comme Éric Zemmour, les conséquences de l’immigration massive sont infiniment plus importantes que toute considération relative aux « métiers en tension » ou à des espoirs économiques systématiquement démentis par le réel. Oui, lisez l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie, et faites-vous votre idée…

Boycott Sephora: quand le racolage islamiste d’une marque révolte les réseaux sociaux

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« Boycott Sephora », c’est le hashtag qui monte sur les réseaux sociaux. Mais pourquoi la chaîne de cosmétiques fait-elle l’objet d’un tel rejet ? la raison est simple : celle-ci a choisi de soutenir les « hijabeuses », ces joueuses de football voilées qui, à coup de provocations et de procès, veulent imposer leur voile sur les terrains et dans les compétitions sportives.


Sephora a mis en scène les tristement célèbres « hijabeuses » dans un clip sirupeux, véritable ode au hijab. Ce hijab, signe politico-religieux, qui fait de la femme une inférieure et marque l’impureté de sa chevelure et de son corps. Cela au moment même où on tue des femmes en Iran parce qu’elles osent retirer ce signe sexiste.

Qu’une marque qui s’adresse aux femmes mette en valeur un signe sexiste au nom de l’inclusion est aussi cohérent que si une association antiraciste choisissait d’organiser un défilé de mode pour populariser l’uniforme du Klu Klux Klan. On marche d’autant plus sur la tête que ces hijabeuses sont cornaquées par une association loin d’être inconnue : Alliance citoyenne. Cette association a déjà fait beaucoup parler d’elle et se fait de plus en plus le relais des revendications des islamistes, canal frères musulmans.

Quand on se prend un tacle du Conseil d’État, on ouvre un autre front

Alliance citoyenne tente d’imposer le voile partout. A la piscine en investissant de force les bassins en burka de bain (dite burkini), alors que celle-ci est interdite. Sur les terrains de foot en imposant le port du hijab au nom de l’inclusion des musulmanes, quand bien même la plupart des musulmanes ne sont pas voilées. On a récemment appris que le père venu revendiquer pour sa fille le port de l’abaya à l’école dans l’émission de Cyril Hanouna était également très proche d’Alliance citoyenne. Ce délicieux géniteur gère la mosquée de l’Elsau à Strasbourg, fermée en 2021 pour cause de radicalisation et apprécie l’imam Iqioussen, expulsé de France à cause de ses prêches haineux.

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Les hijabeuses ne sont pas une bande de jeunes filles un tantinet exaltées qui font leur crise d’adolescence, ce sont des produits du militantisme islamiste comme de l’exaltation identitaire et « raciale ». Ces filles sont instrumentalisées et envoyées au front (à l’école ou sur les terrains), avec un discours politique visant à générer des conflits avec les institutions (Education nationale, fédérations sportives…). Alors qu’elles refusent la règle commune et piétinent la loi, elles inventent une histoire de persécution et se victimisent à outrance. Elles mènent également des offensives judiciaires qui dénotent la volonté d’attaquer l’État sur deux fronts ; d’abord en faisant du séparatisme la mesure de la soumission à l’islam : le bon musulman ne saurait être qu’un islamiste. Ensuite en instrumentalisant l’appareil judiciaire contre nos institutions et en attaquant les piliers de notre contrat social. Dotées de fonds conséquents, les hijabeuses sont mêmes allées jusqu’au conseil d’État pour tenter d’imposer le voile à la Fédération française de Football. Elles ont échoué.

L’assimilation, voilà l’ennemi !

Pourquoi tant d’excitation autour du voile de la part de ces militantes alors que l’on peut mettre un bonnet de bain à la piscine si on veut cacher ses cheveux, par exemple ? Parce que le but est d’imposer un signe distinctif qui distingue les musulmans des autres. Voilà pourquoi se cacher les cheveux dans un bonnet de bain ne suffit pas. La première étape de la réislamisation, premier objectif des militants de l’islam politique, est la distinction. Cela permet de tracer une frontière entre le musulman et celui qui ne l’est pas et, une fois cette frontière tracée, de forcer tous les musulmans à adopter les marqueurs islamistes sous peine d’être taxé de n’être pas assez musulman, trop Français, trop assimilé.

A ne pas manquer, notre magazine en kiosques : Causeur #115: Gauche Médine contre France Sardou

L’imposition de signes distinctifs et le consentement des femmes voilées à leur propre oppression permet donc aux islamistes de se démarquer, de faire pression et de mesurer leur influence. Mais surtout, cela permet de traiter « d’islamophobes » tous ceux qui osent critiquer la démarche. C’est même là le but premier : avant tout déstabiliser les fondamentaux occidentaux, à commencer par l’égalité et surtout l’égalité homme/femme, en utilisant la liberté comme une arme de perturbation massive de la réalité.

Car le plus drôle c’est que si la logique de réislamisation fonctionne, le burkini et le hijab de sport seront vite relégués au placard et un barbu se chargera d’expliquer à ces idiotes utiles que leur place est à la maison, que les femmes bien ne vont pas au stade et ne jouent au football et qu’elles ne doivent pas non plus aller à la piscine en vêtement moulant. L’offensive sur le voile et les discours qui l’accompagnent sont là pour semer le trouble et détruire les principes qui fondent la légitimité d’une nation. La démarche est profondément perverse  : c’est un signe sexiste, il est présenté comme une liberté. C’est une marque d’infériorité, il est présenté comme une forme d’affirmation de soi et de prise de pouvoir. C’est une logique d’effacement, il est revendiqué comme une affirmation identitaire.

Sauf que partout où le voile est obligatoire, le statut des femmes est celui d’éternelle mineure. Partout où il est majoritaire, les femmes n’ont pas les mêmes droits que les hommes. Pire même, il est révélateur d’un refus d’accorder à tous les humains la même dignité. Refus qui se traduit par une infériorité juridique pour les femmes et les non-musulmans. Et cela n’est pas l’apanage des islamistes. Dans tous les pays où l’islam est religion d’État, l’égalité n’existe pas et la femme est infériorisée. Alors, pourquoi Sephora se compromet ainsi ?

La tarte à la crème marketing de l’inclusivité

D’abord reconnaissons-le, certaines grandes entreprises sont très sensibles au discours de l’islam politique dont elles reprennent les codes et les éléments de langage. C’est le cas de Nike et de Levis notamment. Le maître mot de leur démarche : l’inclusivité. Enfin pas avec tout le monde. Aux États-Unis, Sephora a exclu une influenceuse beauté avec qui elle était en contrat car celle-ci était de droite.

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Mais d’un point de vue cynique, la démarche de Séphora est sans doute avant tout commerciale. Le voile fait de la femme un sexe sur patte, c’est pourquoi elle doit être ensevelie. Mais une femme réduite à sa fonction sexuelle n’existe que pour être à disposition des hommes. Sa seule existence, c’est la séduction et la maternité. De quoi investir dans les cosmétiques et le maquillage si elle est belle et investir deux fois plus si elle ne l’est pas… Reléguée à la maison, la femme est une cliente captive qui paradoxalement dépense beaucoup en parfumerie, crème et maquillage pour retenir un mari dont elle est dépendante.

Mais le plus drôle, finalement, c’est de voir à quel point la complaisance envers le militantisme lié à l’islam politique amène l’augmentation des revendications du public visé. Sous la publication de Sephora encensant les hijabeuses, les militantes islamistes se plaignent que Sephora n’emploie pas de femmes voilées. Elles lui reprochent de vouloir faire des « likes » mais de ne pas aller au bout de la démarche. Du côté de ceux et de celles pour qui promouvoir le voile, c’est trahir les femmes en acceptant qu’elles soient traitées en mineures et en inférieures, la réponse n’a pas tardé. Le slogan de la campagne publicitaire de Sephora est « The unlimited Power of Beauty » (le pouvoir illimité de la beauté), les internautes en ont fait : « The unlimited Power of Sharia » (le pouvoir illimité de la Sharia). C’est effectivement bien plus crédible et juste.


Elisabeth Lévy : « Sephora : pour le marché, le grand remplacement a commencé ! »

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Sud Radio, juste après le journal de 8 heures.

Marseille

Marseille, ses bars, ses comptoirs, des zincs plus beaux qu’à Blagnac. La grande école du mensonge. L’industrie du mensonge. Avec ses menteurs de génie. Si le mensonge est beau, il sera patiné de bouche à oreille, mâtiné de quartier en quartier, pour revenir customisé sur le comptoir d’où il s’était envolé, devant son auteur fier comme un toréro de Pampelune.


Le plus gros trafic aérien de bobards au monde. Pilotés par des garis qui ne sortaient que la nuit, le col du Mac Douglas relevé, convoyés par des caïds qui jetaient l’os aux chiens, juste pour observer la réaction. Du grand art.

Marseille et le Stade. Le Vélodrome. Où il n’y a jamais trop eu de vélos. Mais des bicyclettes! Celles de Josip Skoblar ! Jospi ! Il était chaussé par Hungaria, et avait toute la ville à ses pieds.

Marseille et ses cagoles. Belles et colorées comme des girelles royales. Et pas de l’élevage, que du sauvage, colorisé par Almodovar et mis en peinture par Ambrogiani. Et pas de noir et blanc. Du rouge, que des couleurs de chaudasse, le pastel c’est pour le pastis, le jaune.

Marseille et ses poissons qui parlent. Celui qui parle le plus c’est le rouget, une vraie donneuse. À l’époque, ceux d’Honorine, sur le Vieux-Port, ne balançaient pas que sous la torture.

-”Regardez mes rougets, ils parlent encore!”
-”Ouais mais ça fait longtemps qu’ils bougent plus!”
-”C’est toi qui vas plus bouger si tu parles encore!”

Tout ça c’est fini, balayé par le Mistral, relégué aux archives, figé dans la nostalgie. La ville qui a créé le pain de savon est rongée par la crasse. Et la mort. La mort en terrasse, la mort au balcon. Le combat du terrain est perdu. Et ce n’est pas avec une compagnie de CRS, même d’usine, que la reconquête peut s’enclencher. Envoyez la Financière et frappez où ça fait mal. Vous devez ça à cette ville, que vous avez massacré, en ouvrant les vannes sans le dosage qui garantit que la machine à intégrer puisse tourner. Faites vite.


Ma vieille peau

Marseille, le sel et le plomb te font la peau
L’iode et le vent du large te laissent un dépôt,
Pas à la banque, dans les poches du perfecto,
La mise à l’amende, façon de voir l’impôt

Tes yeux bleus délavés par la cataracte
Le regard rivé à prier la Madone
Pour une crise de foi, l’Ohème, l’énième maldonne,
Sous une pluie de sang ta pupille se contracte

Meilleure des machines à laver le malheur
De l’Estaque aux Goudes on étend du bonheur
Des races en larmes sèchent au souffle de ton accent
Ce mélange d’épices, de poisson, de safran

L’élu corrompu a gavé ton tambour,
Tes bras ouverts se ferment un peu à l’amour,
Pour t’en sortir faut lire l’Histoire de la Mer,
Faire consensus autour de la Bonne Mère

De Chine t’as ram’né de l’opium et un bleu,
Le César du tissu, l’Oscar de l’entreprise,
Pour tes marins perdus, tes joueurs de blues,
Tu as le mac à dames au bord de la crise

Ton bitume sait qu’la nuit tous les chats sont gris,
Tes rats syndiqués, gras com l’port de Cassis,
Les quais de la Joliette c’est du pain béni,
À l’Evêché ça balance debout, assis

Tes taxis prennent les tapins plus tes cagoles,
Qu’on calcule au bar beaucoup moins à l’église,
Le fini-parti laisse la poubelle pas prise,
Le coup d’balai c’est pour Scotto et Pagnol

Championne du monde du “sur la tête de ma mère”,
Un génocide de mamans au cimetière,
Des bobards plus gros que les croix de Saint-Pierre,
Aux mamans un trou, aux belles-mères un cratère

Tu crachais du 11, un beau noyau d’olive,
C’était du sélectif, pas du n’importe quoi,
Des fadas crachent à la kalash des ogives,
Faut les choper au niveau du cash, au foie

Ma vieille caisse cabossée
Ma vieille ville carrossée
Réagis pour les gosses
Range au placard ta crosse

J’parie sur toi ma vieille
J’prie pour que ton soleil
T’passe un savon sans plomb
Chasse la mort au balcon

Le fleuve Moix

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Le premier tome du journal de Yann Moix (Hors de moi, août 2023, Bouquins / Grasset) est plein de réjouissantes vacheries. Florilège. La lecture de ces 1200 premières pages est parfois âpre, mais offre aussi des fulgurances.


Avec le premier volume de son Journal, de plus de 1200 pages, qui ne couvre que douze mois (juin 2016 à juin 2017), Yann Moix va alimenter sa légende noire d’écrivain moitrinaire, pour reprendre l’adjectif de Michel Déon. À l’époque, Moix est chroniqueur dans l’émission « On n’est pas couché », de Laurent Ruquier. Il interroge, parfois rudement, les invités de la semaine. Il le fait en compagnie de Léa Salamé. Dans son Journal, au titre éloquent, Hors de moi, dédié à Philippe Sollers, il brosse les portraits de Ruquier et de Salamé. Le diariste n’est pas trop féroce. Ruquier : « C’est un homme de parole. Dans ce milieu de fripouilles, cela n’a point de prix. » Mais il ajoute : « Dépourvu d’affect, il ne peut se comporter que comme un chef d’entreprise, un capitaine en campagne. » Léa Salamé « est une fille intelligente et terriblement maligne. » Mais – il y a toujours un coup de griffe avec Moix – il s’interroge sur sa culture générale : « Elle sait ce que Jean-François Copé faisait en juin 2002 mais n’a jamais entendu parler des Cent-Jours. » Ses uppercuts, il les réserve à d’autres. François Hollande : « Comme d’habitude, Hollande est en dessous de tout : il veut ‘’punir’’ l’Angleterre. Petit monsieur. Minuscule quinquennat. » ; Jean-Luc Mélenchon : « un apparatchik caractériel » ; Éric Zemmour : « c’est un systématique. Péguy les détestait ; je ne les aime pas non plus. » ; Jean Daniel, figure intellectuelle progressiste, est écartelé : « Seul Jean Daniel pense qu’être Jean Daniel est quelque chose de considérable. À la vérité, c’est un second couteau. » La liste est longue des victimes de Moix. Parfois, c’est assez juste ; souvent, c’est méchant. Il arrive que ce soit franchement outré. Le diariste incontinent est, par exemple, vachard avec Malraux, alors qu’il révère André Suarès. Or, Suarès était l’un des maitres à penser de Malraux… L’auteur de La Condition humaine, après-guerre, écrivit dans une lettre au sujet de Suarès se battre « avec des édredons depuis trois mois pour qu’une rue de Paris porte enfin son nom. » (Lettres choisies, 1920-1976, Folio, 2016). Au fond, tout cela a peu d’importance. Il faut descendre le fleuve Moix et accepter les remous, les rapides, les embardées, les récifs, la tête qui chavire, la nausée… On est embarqués sur la canonnière du Yan-Tsé, avec Steve McQueen, que Moix adore. Car l’écrivain a des préférences très affirmées. Outre ses idoles, André Gide, dont il éclaire avec honnêteté les zones d’ombre, Charles Péguy, ou encore Sacha Guitry, il croque avec sensibilité BHL, Montherlant, Dominique Jamet, Juliette Gréco, François Truffaut, Maurice G. Dantec, Dostoïevski, et les autres. Il cite Alain Robbe-Grillet, tombé dans l’oubli ou presque, parce que la France a perdu son élite cultivée. Voici : « Dans la continuité d’un récit, il y a deux sortes de ruptures possibles : le manque et la contradiction. Dans la contradiction, pas de manque, mais, tout d’un coup, un contraire. » C’est ce qui arrive à lire Moix : un contraire qui nous oblige à sortir de nos certitudes, et à reprendre le chemin fertile de la contradiction. Car sur le fleuve Moix, ça pense, et tout le temps. Ça pense à propos de la religion, du judaïsme, du christianisme, des femmes, de la souffrance animale (superbes pages), du sadisme de l’Homme, de son impuissance qui conduit au crime, à sa jouissance pour le crime, etc. Alors, oui, c’est âpre, ça dérange, ça énerve, mais c’est salutaire pour l’esprit.

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Je croyais avoir lu tous les commentaires sur les grands romans de Sollers. Je me disais qu’il fallait le lire, lui, et contourner les exégètes, parfois assommants Et voilà que Moix commente Paradis, qui « est le plus grand ouvrage classique de l’après-guerre, il s’adapte à toutes les vitesses, se greffe sur toutes les allures ; il est au langage ce que le VTT est au sol bossué des alentours de Verdun (…) C’est le seul roman ‘’récent’’ (1981 quand même) qui puisse se targuer d’englober, en un seul souffle, l’ensemble des connaissances actuelles, des données que nous possédons sur le monde. » Et puis, cette fulgurance, une parmi tant d’autres dans Hors de moi, à propos de l’auteur de Femmes : « Sollers sait que, dans la vraie littérature, la forme doit toucher le fond. »


Moix nous fait beaucoup de confidences sur lui – hypocondrie, jalousie, détestation du bruit. Ce genre littéraire s’y prête, me direz-vous. Il y en a une, assez touchante. « J’ai parfois le fantasme d’être gardien de phare, confie Moix ; pour écrire. Comme sport, monter et descendre les escaliers. Puis lire et écrire toute la journée. Sans la moindre interruption. » Et envoyer quelques signaux aux contemporains perdus dans la nuit.

Yann Moix, Hors de moi, Journal, Bouquins/Grasset.

Année zéro - numéro 1

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Tremblement de terre: pourquoi cette demande de soutien à géométrie variable?

Et pourquoi pas la France, en l’occurrence, qui semble si contrariée?


Les catastrophes naturelles ne manquent pas, tout comme les élans de solidarité internationale. Mais une offre de soutien ne vaut pas blanc-seing pour le pays qui se propose d’aider. Il faut un minimum d’organisation et de logistique pour accueillir les équipes de secours venues du monde entier, qui peuvent vite se révéler une charge plutôt qu’un soulagement. On se souvient de l’aide internationale envoyée au Sri Lanka lors du tsunami de 2005 et dont plus de la moitié de l’aide, notamment financière, n’est jamais arrivée, ou a été mal dispatchée. Le Maroc a fait le choix, contrairement à la Turquie et la Syrie en février dernier, de filtrer les propositions de soutien, probablement pour avant tout gérer en interne (a priori un pays est souverain et est bien en droit de décider lui-même des soutiens qu’il souhaite avoir), et d’accepter en fonction des besoins qu’il a du point de vue technique, matériel et logistique.

Feu d’artifice de solidarité internationale

Au-delà du capital sympathie que le Maroc a pour l’Espagne, l’Allemagne, le Qatar et les Émirats arabes unis comme la Tchéquie, il y a fort à parier que ces propositions de soutien étaient mieux ficelées pour parer à l’urgence, que les élans tous azimuts de certains pays. Et puis, la nouvelle dynamique des accords d’Abraham va jouer pour beaucoup, notamment avec Abu Dhabi mais sûrement très vite avec Tel Aviv. Il faut aider mais il faut « bien » aider, au risque de voir l’engorgement sur place devenir totalement contre-productif. Dans ce feu d’artifice de solidarité internationale, la France, qui se réveille, semble ruminer le déni affiché par Rabat. Il y a des raisons à cela, et qu’Emmanuel Macron semble oublier. Paris tente de se racheter après deux ans de crise politique majeure entre les deux pays. Le Palais y voit sûrement un certain opportunisme, et préfère se tourner vers d’autres pays moins « problématiques » pour lui.

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Certes, il faut réagir dans les 48 à 72 heures pour espérer trouver le plus grand nombre de rescapés mais la tâche est ardue, tant la violence du tremblement de terre a été forte, l’évènement inattendu ou imprévisible, et le moment le pire, c’est-à-dire en pleine nuit quand les gens dorment. Un élan de solidarité s’est avant tout organisé sur place, déjà, à Marrakech et dans la campagne qui va jusqu’à l’épicentre, dans l’Atlas – même si beaucoup de populations se plaignent ouvertement du manque de secours sur place. Beaucoup tendent à penser que le Maroc, qui a ce stade n’avait quasi rien formulé, aura besoin de toutes les mains et de tous les soutiens matériels. Chine, Turquie, Grande-Bretagne, États-Unis, Israël sont parmi les premiers pays à avoir proposé leur soutien, sans réponse nette. Au-delà de la catastrophe, en géopolitique, les drames humains peuvent souvent renforcer des alliances ou en redéfinir d’autres. C’est un opportunisme politique comme un autre.

La France ne peut imposer une aide dont ne veut pas Rabat pour l’instant. Ce n’est pas de l’arrogance, mais le fruit d’un passé tumultueux entre ces deux pays, depuis deux ans, au profit de l’Algérie. Certes, Paris vient de débloquer une aide d’urgence de quelques 2 millions euros mais encore hier les deux pays se regardaient en chiens de faïence.

Macron privilégie l’Algérie

Face aux béni oui-oui du bon-sentimentalisme, les catastrophes naturelles ne doivent pas servir à de la récupération politique. On peut imaginer que la catastrophe peut montrer la bonne foi et la sincérité des uns et des autres, et offrir la chance d’un rétablissement de bonnes relations avec un pays incontournable du Maghreb, pour notre politique et pour nos échanges économiques. Or la défiance de Rabat avec Paris est maximale. Pourquoi ? À l’automne 2021, Paris avait annoncé sa volonté de réduire le nombre de visas accordés aux Marocains pour venir sur le sol français, reprochant au Maroc comme à d’autres pays du Maghreb de ne pas collaborer assez avec les autorités hexagonales en cas d’irrégularité de séjour et nécessité d’expulsion. Puis, vint l’affaire Pegasus, une vaste affaire d’espionnage d’une officine israélienne qui aurait surveillé nombre de personnes de la société civile marocaine et même des personnalités françaises dont Emmanuel Macron, pour le compte du Maroc, et que certains voient aujourd’hui davantage comme une opération orchestrée de toutes pièces pour déstabiliser le régime chérifien au profit de l’Algérie [1].

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Le président Macron a fait le choix clair de l’Algérie depuis deux ans, refusant de reconnaître le plan d’autonomie du Sahara proposé par Rabat, alors que Donald Trump avait lancé le mouvement, qu’Israël l’avait fait dans le cadre des accords d’Abraham, et que des pays européens comme l’Allemagne ou l’Espagne ont déjà apporté leur soutien à Mohammed VI. Dans le contexte de la guerre en Ukraine, la France, en quête de gaz, s’était ouvertement rapproché avec de grands sabots du régime algérien. Emmanuel Macron espérait bien en obtenir, puis s’était rendu dans le pays il y a un an à l’occasion des 60 ans de l’indépendance d’Alger. Mais la claque a été similaire : Alger n’a pas de gaz pour Paris. Tout ça pour ça ?

Paris ne peut indéfiniment par son attitude agressive, arrogante et orientée, continuer à se fâcher avec la terre entière, à commencer par l’Afrique. Le rejet de Paris est à son paroxysme et on le voit notamment au Sahel. La catastrophe que vit Rabat jouera plein pot sur ses futures relations, en Afrique, et probablement vers le « Sud global » qui ne cesse de monter, et de représenter une alternative  – sérieuse et viable ? c’est est une autre question. Pendant ce temps-là, l’Algérie renforçait sans complexes un peu plus encore son partenariat stratégique avec la Russie en juin dernier, comme si la guerre en Ukraine n’avait jamais existé.


[1] L’affaire Pégasus, les dessous d’une guerre de l’information, Alain Jourdan, Le Cherche Midi, Paris, 2023.

Sommet du G20: vers une victoire totale des BRICS?

Pour les Occidentaux, le 18e sommet du G20, qui s’est tenu à New Delhi du 9 au 10 septembre, s’est malheureusement terminé sans avancée sur la guerre en Ukraine ou le climat. Pour le reste du monde, la donne est différente. Encourager les envies de puissance de l’Inde semble être une bonne idée pour nous… Les analyses du think tank le Millénaire.


C’est tout comme si le dernier sommet du G20 avait démontré que l’avenir de l’Ukraine et la préservation du climat s’apparentaient à deux marottes occidentales, sans figurer dans les priorités des pays émergents ! Ceux-ci semblent davantage occupés à reconfigurer la marche du monde sans l’Occident, au point de démonétiser le G20, instance regroupant l’Occident et les pays émergents, au profit des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) où nous sommes absents et dont le sommet de Johannesburg d’août a été une réussite avec un agrandissement du groupe.

Une perte d’influence du G20 depuis de nombreuses années

Symbole d’un monde multipolaire né après l’effondrement soviétique, le G20 n’a pas atteint ses objectifs. Le groupe a été instauré après les crises économiques asiatiques de 1997-1998 et la difficulté de combattre leurs effets nocifs faute de coopération. En effet, avec l’interconnexion des marchés internationaux, chaque crise dans une zone géographique peut déstabiliser toutes les autres économies du reste du monde. Le G20 devait aider à la coopération internationale en rassemblant des pays qui représentent 85% du PIB mondial, 75% des échanges commerciaux et deux tiers de la population du globe.

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Mais le groupe n’a pas aidé à surmonter la crise sanitaire ou la guerre en Ukraine qui ont bouleversé nos certitudes et fragilisé l’économie mondiale. Le déclin du G20 est illustré par la difficulté de mener à bien son rôle – celui de redynamiser la coopération économique mondiale. En plus de son manque d’efficacité, le groupe est vu comme illégitime et éloigné des réalités des pays émergents. Ainsi, les principaux leaders du monde, comme Xi Jinping ou Vladimir Poutine, boudent l’organisation et pensent qu’elle dessert leurs intérêts.

Montée en puissance des BRICS : vers une victoire totale ?

La guerre en Ukraine a rebattu les cartes entre les instances mondiales au profit des BRICS. Cela s’explique en partie par la ligne politique adoptée par le groupe, soit la défense d’un équilibre économique et politique mondial multipolaire, qui vient concurrencer celui du G7 et du G20. Ces deux dernières sont perçues par les BRICS comme le moteur de l’influence des États-Unis et de l’Union européenne et auraient pour ambition l’établissement d’une gouvernance unipolaire du monde. La volonté de sortir de l’influence occidentale et de celle du dollar par le biais de nouvelles institutions séduit le reste du monde. Une preuve de cette attractivité nouvelle est le nombre de candidatures important à l’entrée dans le groupe des BRICS : six nouveaux pays intégreront le groupe dès janvier prochain. Une ferveur qui rappelle celle qui a accompagné le lancement du Mouvement des Non Alignés dans les années 1950.

Pourtant, la victoire des BRICS n’est pas totale. Comme son prédécesseur, le groupe des BRICS manque de cohérence et il sera difficile de renverser l’ordre établi rapidement. Malgré les oppositions frontales entre les BRICS et les Occidentaux concernant le commerce, la gouvernance globale ou le changement climatique, les réalisations concrètes manquent alors que la Nouvelle Banque de Développement fondée en 2014 reste la seule réalisation des BRICS pour le moment…

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En effet, il ne suffit plus uniquement de s’opposer au modèle occidental, même si cela est bien accueilli dans les pays qui refusent le modèle que l’on cherche à leur imposer, mais il faut offrir des solutions concrètes. De plus, les oppositions internes sur la stratégie à l’égard de l’Occident, principalement entre la Chine et d’autres pays plus modérés, mettent à mal les ambitions du groupe. Les nouvelles adhésions pourraient accentuer tout cela avec des différences de régimes, de cultures ou d’affinités.

L’Occident battra-t-il longtemps en retraite?

Face à un basculement des rapports de force au profit des BRICS, l’Occident avance désuni. Sur l’Ukraine, si l’opposition à la Russie a suscité une réactivation de l’OTAN, cela s’est fait à la faveur de l’action de Joe Biden au service des intérêts américains. À titre d’exemple, les livraisons de F16 à l’Ukraine ont été rendues possibles par l’accord américain. Pourtant, les intérêts des États-Unis et de l’Europe s’éloignent progressivement, notamment quant à la défense du Vieux-continent ou encore concernant des dossiers économiques comme l’énergie ou la réindustrialisation – avec la menace sur l’industrie européenne que fait peser la loi américaine Inflation Reduction Act (IRA).

Concernant les relations avec les pays du Sud, les coups d’État au Niger et au Gabon ont placé l’Afrique sur le devant de la scène, comme en témoigne l’adhésion de l’Union africaine au G20. Seulement, la situation au Niger révèle une volonté de dégagisme des puissances occidentales, notamment la France, symbole d’un modèle qui ne suscite plus autant d’intérêt.

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Toutefois, les Occidentaux ont encore des cartes en mains. Ils espèrent en effet jouer sur les dissensions au sein des BRICS, entre la Chine et l’Inde, pour arriver à leurs fins et exister dans l’Indopacifique. À ce titre, encourager les envies de puissance de l’Inde semble être une bonne idée – c’est ce qu’ont pu faire Joe Biden, Emmanuel Macron ou même Ursula Von der Leyen. La rivalité entre l’Inde et son voisin chinois est la clé pour empêcher la prise d’influence globale des BRICS et de Xi Jinping sur la zone, dont les vues hégémoniques ne plaisent pas en Inde. En effet, on observe un regain des tensions diplomatiques entre les deux pays, alors que la Chine a publié il y a quelques semaines une carte dans laquelle elle annexe des régions indiennes. De plus, sur le plan économique, la Chine traverse une crise structurelle, lorsque l’Inde se porte à merveille avec une population jeune et une économie qui croît (7% de croissance sont attendus cette année) ce qui en fait un allié de choix. La mort de l’Occident n’est pas pour aujourd’hui, mais de profonds décalages existent entre ses attentes et celles du reste du monde. Faute de remise en cause et d’action de sa part, l’avenir du monde pourrait bien s’écrire sans lui.


Pierre Clairé* et Sean Scull**

*Directeur adjoint des Études et spécialiste des questions internationales et européennes.
**Analyste au Millénaire.

Guerre en Ukraine, droit d’inventaire

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Après l’espoir de la contre-offensive ukrainienne, le temps des désillusions pour les soutiens de Kiev.


La réaction occidentale à la guerre en Ukraine a eu des conséquences désastreuses pour les peuples européens. Souvenons-nous. Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, nous étions en pleine euphorie post-Covid. La croissance de 7% était au rendez-vous, l’économie reprenait, les taux d’intérêt étaient proches de 1% ; le « rebond » allait permettre de gommer le passé récent et l’optimisme était de mise. Et puis patatras. Suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les États-Unis et l’Union européenne ont décidé de faire de ce conflit territorial limité, dont les conséquences pour l’Europe et le monde étaient difficiles à mesurer, un enjeu moral et géopolitique majeur. L’Occident ne doutant pas de lui-même, la crise serait courte et, bientôt, la Russie à genoux. Droit dans ses bottes, l’impayable ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, annonçait « l’effondrement de l’économie russe ». Quant à l’armée russe, elle serait tellement obsolète qu’il suffirait de donner à l’armée ukrainienne quelques matériels de haute technologie pour qu’elle aussi s’effondre.

L’économie russe plus résiliente qu’escompté

Dix-neuf mois et onze trains européens de sanctions plus tard, – des sanctions d’une « efficacité redoutable » selon le même prescient Le Maire en mars 2022 – l’économie russe est, certes, en difficulté mais ne s’est nullement effondrée et fait même preuve d’une étonnante résilience. Ce sont les économies européennes qui sont en (quasi) récession et une inflation inédite depuis les années 70 touche de plein fouet les ménages. Les Européens se sont souvent trouvés confrontés à des choix que l’on croyait révolus entre se chauffer et se nourrir correctement ! Contrairement aux illusions européennes, seuls les pays occidentaux ont adopté des sanctions, le reste du monde n’a pas suivi et continue à entretenir de bonnes relations avec la Russie, les grands pays comme l’Inde, le Brésil ou encore l’Arabie Saoudite, restant prudemment neutres et tirent profit économiquement des sanctions.

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La contre-offensive ukrainienne qui, selon les experts de LCI, ne devait être qu’une formalité, a échoué au prix de dizaines de milliers de morts et de blessés ukrainiens dont des milliers d’amputés qui resteront marqués à vie. C’est une boucherie que les chaînes de télévision refusent de nous montrer mais que l’on peut voir sur Telegram. Chaque avancée d’un kilomètre carré coûte inutilement des centaines d’hommes. En les envoyant sauter en vain sur des mines, Biden et Zelensky se comportent de manière irresponsable. Les mêmes qui se demandent comment on a pu envoyer les poilus à la mort dans des offensives absurdes, refusent de voir qu’il s’agit de l’équivalent moderne des assauts de 14-18. Comme à cette époque, la propagande nous aveugle sur la réalité de cette guerre et les échecs de l’armée ukrainienne. De couteuses offensives sont présentées comme des percées prometteuses avant de retomber dans l’oubli médiatique.

On ne parle plus du pipeline Nord Stream

Sans vision stratégique et sans grands succès tactiques, les lignes rouges militaires (missiles à longue portée, chars, avions de chasse,…) ont été allègrement franchies les unes après les autres. Personne ne s’indigne plus de l’usage par l’Ukraine d’armes à sous-munitions, extrêmement létales, interdites par le droit européen, pas plus que de projectiles à uranium appauvri dont l’impact sur la santé suscite des interrogations. Quant au danger de recours à l’arme nucléaire, il semble oublié. Ksenia Sobtchak, une opposante à Poutine, n’a pourtant pas tort en affirmant qu’il pourrait y recourir. À cet égard, il est heureux que la contre-offensive ait échoué, la question de son utilisation en cas de recul russe perdant provisoirement de son actualité, mais l’Occident ferait bien de se souvenir que la menace nucléaire est toujours bien réelle et qu’une nouvelle guerre mondiale n’est pas exclue. 

Sur le plan géopolitique, l’Union européenne confirme son rang de nain. Elle supporte le poids des réfugiés, l’inflation, les coûts exorbitants de l’énergie et paiera pour la reconstruction de l’Ukraine pendant que les États-Unis font tourner leurs usines d’armement à plein régime et profitent de la hausse des prix du gaz et des céréales. L’Allemagne et l’Union européenne ne semblent nullement pressées de dénoncer les coupables de l’acte de terrorisme international contre leurs infrastructures, les pipelines Nord Stream. Qu’il s’agisse des États-Unis, de l’Ukraine ou des deux, le silence européen à ce sujet est incompréhensible et humiliant. Apparemment, même poser la question serait incongru, comme le montre une vidéo d’un parlementaire belge s’attirant les quolibets de l’assemblée. Où sont les unes indignées des journaux dénonçant ce scandale d’un allié détruisant une infrastructure clé d’un pays ami ?

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Tout cela pour l’Ukraine, un des pays les moins démocratiques de l’Europe, sans presse libre, dominé par des oligarques, réprimant sa minorité russophone depuis le coup d’État de 2014 et détournant les aides massives qu’elle reçoit des contribuables occidentaux. Un pays avec à sa tête un comique vulgaire, qui comme dans la chanson de France Gall « jouait du piano debout » mais avec son sexe, devenu le pantin des Occidentaux et se comportant en véritable autocrate détenteur de tous les pouvoirs. Avec un pays exsangue, de plus en plus vide et aux infrastructures détruites, à l’heure où de plus en plus d’hommes ukrainiens cherchent par tous les moyens à échapper à la mobilisation (et on les comprend, mais ils n’ont pas droit à la compréhension médiatique des fusillés de 1917 !), que sait-on de la volonté du peuple ukrainien de continuer dans cette folle logique guerrière ? Sans minimiser le défi qu’elle représente en pleine guerre et avec plus de 12 millions de déplacés, l’élection présidentielle prévue en mars 2024 aura-t-elle lieu et donnera-t-elle la possibilité à un candidat de la paix de se présenter ?

Hélas, malgré l’échec patent de la stratégie actuelle, l’Occident a été trop loin pour reconnaître son erreur de départ et procéder à un aggiornamento. Il faut donc s’attendre à plus de morts, plus d’armements sophistiqués livrés à ce régime jusqu’au-boutiste, à des prix (surtout de l’énergie) élevés et fluctuants ainsi qu’à une accélération de la perte de l’influence occidentale dans le monde. Rarement, on aura vu des gouvernements européens se moquer à ce point de l’intérêt de leurs propres peuples. Il y a donc peu d’espoir, sauf si l’opinion américaine venait à rejeter massivement le soutien à l’Ukraine, comme elle a en son temps cessé de soutenir des guerres qui se sont toutes mal terminées, au Vietnam, en Irak et en Afghanistan. À bon entendeur…

Le bantoustan français

L’abaya, insiste Jean-Paul Brighelli, n’est qu’un symptôme. La cause, c’est l’éparpillement façon puzzle de ce qui fut jadis une république « une et indivisible ». Eclatée en « communautés », la France n’a plus d’ambition d’assimilation, ce qui fut le cœur de son destin au fil des siècles. Explication.


Je sors de chez moi, à Marseille. Cent mètres plus loin, c’est le bas de la Canebière : foulards islamiques, abayas, djellabas et autres tenues outremarines envahissent l’espace et s’y déplacent comme chez eux. Ici, une femme sur trois est voilée, un homme sur quatre affronte en babouches la crasse de la rue. On entend parler essentiellement ce nouveau créole fait de bouts de français, de quelques mots d’arabe, de langues berbères et africaines. Je devrais m’en fiche. Après tout, je vis dans une ville dont un quartier s’appelle les Catalans, dont la rue Paradis et Beaumont sont peuplés de descendants d’Arméniens, où les Juifs séfarades sont légion, où les ex-Corses pullulent, où Kurdes et Turcs se regardent en chiens de faïence tous les samedis sous l’ombrière du Vieux-Port. Une ville fondée par des Grecs, peuplée de Gaulois, de Romains, de barbares divers, et de toutes les nations de la Méditerranée. Que me chaut ?

Les joueurs de rugby n’ont pas de problème avec la Marseillaise, eux

Le problème, c’est que, des siècles durant, ces étrangers qui bourlinguaient dans tous les dialectes et apprenaient par hasard des bouts de provençal faisaient de leur mieux pour s’intégrer, dès qu’ils choisissaient de se sédentariser. Ils envoyaient leurs enfants à l’école, entraient dans l’administration, la marine ou l’industrie — et faisaient souche. Ainsi se construit un grand peuple. C’est d’ailleurs un mélange de toutes ces origines qui en 1914 partit sur le front de l’Est — les monuments aux morts en témoignent.

Posons d’emblée une question qui fâche : combien de Marseillais aujourd’hui — j’entends de gens qui vivent dans la cité phocéenne, qu’ils y soient nés ou non — seraient prêts à mourir pour la France ? Combien pour réciter ces vers de Corneille :
« Mourir pour le pays est un si digne sort
Qu’on briguerait en foule une si belle mort. » (Horace, II, 3)

Combien pour résister comme les gens de Manouchian ? Combien pour entonner la Marseillaise ?

Ça a commencé avec Christian Karembeu, refusant au nom des Kanaks de chanter l’hymne de la République : il aurait dû être viré immédiatement. Lui, et tous ceux qui boudaient ostensiblement l’hymne national. Avez-vous remarqué, ces jours-ci, que les joueurs de rugby n’ont aucun problème avec la Marseillaise ? Le foot est un sport pourri d’enfants gâtés pourris.

Libé, en revanche, a un problème avec le rugby. Toute la gauche conformiste (pléonasme !) est tombée comme un seul homme sur la pantomime qui, à l’ouverture de la compétition, a mis en scène un Jean Dujardin à béret et une Française d’opérette. « Allez la Rance ! » a titré cet organe indiscret de l’islamo-gauchisme — l’internationalisme libéral s’est glissé sans encombre dans les habits douteux du trotskysme. « Carte postale sépia d’une France qui sent la naphtaline ». Le journal fondé par Sartre a-t-il la moindre idée de la France qui joue au rugby ? Ses journalistes passent-ils le périphérique ?

Ça a continué lors d’un France-Algérie de sinistre mémoire, où la Marseillaise fut carrément huée par l’assistance à majorité maghrébine. Chirac a choisi de partir. Il aurait dû faire évacuer le stade, et ne réintégrer les spectateurs qu’après leur avoir fait passer un examen de bonnes mœurs patriotiques. Comme les Siciliens lors des Vêpres siciliennes, pour trier les vrais insulaires et les Normands envahisseurs. Que des Algériens soutiennent l’équipe de leur pays, à la bonne heure ! Mais que des descendants d’Algériens, immigrés de troisième ou quatrième génération, en fassent autant, alors qu’ils sont Français, c’est une autre histoire.

Le salafistes de plus en plus visibles

C’est la nôtre. Incapables d’intégrer à la nation les enfants qui nous sont confiés, grâce à des programmes absurdes, des profs manipulés par les pédagogues qui les (dé)forment, des associations financées par le ministère qui viennent faire des « interventions » dans les lycées et collèges pour vendre l’intersectionnalité des luttes, et des salafistes qui œuvrent de plus en plus à visage découvert, les petits Français d’origine étrangère retournent à leurs pseudo-racines (ils sont nés ici, dans leur immense majorité), comme des vignes mal taillées retournent à la jungle. Comme les enfants livrés à eux-mêmes, dans Sa Majesté des Mouches, retournent à la barbarie. C’est sur le front de l’Education que nous avons perdu la guerre.
Nous devons lancer une contre-offensive, et prêcher désormais la tolérance zéro. Tu tiens à venir en abaya ? Ta prime de rentrée est supprimée. Tu refuses de faire des devoirs parce que c’est le ramadan ? Ta bourse est supprimée. Tu te lances avec les autres racailles de ton quartier dans des opérations de soldes sauvages ? Tes allocs sont indéfiniment différées. Le facteur économique est déterminant en dernière instance, comme disait le regretté Karl Marx.

Certes, un détenu sur quatre, en France, est étranger. Mais cela ne représente guère que 18 000 personnes — qui encombrent les prisons parce qu’elles n’usent pas de la possibilité de libération préventive, de peur d’être renvoyées dans leurs pays d’origine. Qui d’ailleurs rechignerait à les reprendre : imaginez-vous que Cuba aurait accepté de récupérer les voyous que le gouvernement castriste a expédiés aux Etats-Unis — rappelez-vous le début de Scarface

Faire porter aux seuls immigrés (au sens plein du terme) la responsabilité de la décadence française est une hallucination qui a coûté cher à Zemmour, aux présidentielles — et qui lui coûtera cher aux Européennes. Toute monomanie se paie cash.

Le massacre de l’égalitarisme

Le problème, ce sont les Français. Français de toutes origines, auxquels on n’enseigne plus la langue ni l’Histoire de ce cher vieux pays. Que l’on parque dans des collèges-ghetto, au lieu de les trier, de les sélectionner, de les faire passer à la moulinette de l’élitisme républicain, au lieu de les massacrer à grands coups d’égalitarisme.

Je suis pour une vraie mixité — une mixité pédagogique, par classes de niveau, avec des programmes adaptés, dans le seul objectif d’amener chacun au plus haut de ses capacités. Avec port de l’uniforme au besoin. Et apprentissage de l’hymne national : les petits Américains, pourtant fort diversifiés, questions ethnies, connaissent par cœur le Star Spangled Banner. Quant aux profs qui refuseraient de l’enseigner, inscrivons-les à un stage gratuit de cinq ans dans les rizières camarguaises, le temps de faire leur autocritique…

Sinon demain, à Marseille et à Saint-Denis d’abord, et dans toute la France ensuite, la charia vous expliquera de quel bois elle se chauffe — et édifie des bûchers.

Macron en fait-il trop?

Notre président de la République serait-il « too much » ? La personnalité d’Emmanuel Macron est un sujet inépuisable pour notre chroniqueur.


À ceux qui pourraient me reprocher de négliger le fond de la politique d’Emmanuel Macron, je répondrais que celle-ci est tellement fluctuante, contradictoire au gré des tactiques et des circonstances, qu’il ne me semble pas choquant de laisser de côté dans ce billet ce qui relève d’un frénétique opportunisme. Alors que plusieurs événements d’importance inégale, sur le plan national comme international, justifient au contraire qu’on focalise sur la psychologie de notre président de la République qui semble toujours aller un peu trop loin, sans privilégier la mesure, la discrétion voire le silence quand ils seraient, à l’évidence, nécessaires.

L’affront africain

Beaucoup d’initiatives d’Emmanuel Macron me paraissent en effet avoir pour dénominateur commun l’irruption d’une subjectivité impérieuse, dans un univers où la rationalité et le bon sens devraient être de mise. N’oublions pas que ce président nous a promis, comme ses prédécesseurs, une France unie, rassemblée mais que jamais, lors de son départ, elle ne sera plus fracturée.

Sans disposer de toutes les lumières, je n’ai pas l’impression qu’en Europe, il ait suscité une adhésion admirative, cette dernière ne pouvant provenir que d’actes et de propositions objectivement pertinents. Emmanuel Macron engendre au contraire l’hostilité de certains pays à cause d’une affirmation trop élogieuse et surestimée de soi et de son rôle. L’affront du Maroc refusant l’aide de la France, malgré un désastre humain et matériel incommensurable et l’acceptation du soutien d’autres pays, ne relève sans doute pas seulement d’une exclusive considération de la France pour l’Algérie mais de la dégradation des modalités personnelles de relations qui, longtemps, au-delà de l’urbanité diplomatique, pouvaient être qualifiées (sans illusions toutefois) d’amicales. La récente débandade africaine, tant au Mali qu’au Niger et au Gabon, avec la crainte d’autres bouleversements, n’est-elle pas liée en grande partie au tempérament de notre chef d’Etat qui a souvent une posture à contre-temps – il se cabre quand il faudrait feindre de plier, il se soumet lorsque la résistance serait bienvenue ?

Moi, moi, moi…

Les épisodes qui, dans une quotidienneté et un climat démocratiques, démontrent l’irrésistible intrusion de son « moi », sont multiples. Par exemple, l’invention de ces gadgets liés à de la pure communication : le Conseil national de la refondation, les conventions citoyennes et tant d’autres billevesées qui n’ont absolument pas pour vocation d’être utiles à la République mais seulement de projeter la lumière sur leur concepteur. Avec une volonté forcenée de fuir les processus ordinaires, notamment parlementaires, parce qu’ils contredisent l’expansion de soi (malgré le soutien d’un groupe inconditionnel) à cause de cette déplorable majorité relative… L’abus du 49-3 est la revanche, aussi constitutionnelle qu’elle soit, d’un ego contrarié.

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On verra si « les Rencontres de Saint-Denis » entrent dans la catégorie des aréopages inutiles, faussement consensuels, visant à flatter leur initiateur ou si elles auront des conséquences opératoires : en tout cas LR a décidé d’être optimiste.

Jamais peur du ridicule

Ses voltes seraient amusantes si elles ne révélaient pas que la seule certitude d’Emmanuel Macron est qu’il vaut plus que les autres et que donc ses embardées ne sont jamais ridicules puisqu’elles émanent de lui ! Ainsi, il fait exclure d’abord de l’arc républicain, sur le plan parlementaire, LFI et RN avant de décréter, les Rencontres passées, qu’il « faut associer toutes les forces politiques, y compris les extrêmes. Il ne faut pas les boycotter mais les affronter les yeux dans les yeux ». Qu’importe que la grandiloquence succède au mépris et que le point de vue ait radicalement varié : ce qui compte est la seule unité apportée par l’arbitraire du président !

Pour rejoindre des moments plus dérisoires, comment apprécier l’intervention d’Emmanuel Macron venant, avant le début de la Coupe du monde, encourager au nom du pays l’équipe de France, autrement que comme la prestation un zeste ridicule d’une personnalité incapable de rester à sa place, Emmanuel Macron se prenant quelques minutes pour Fabien Galthié ! Il est navrant de constater que l’intelligence n’apprend pas la réserve : parfois elle l’empêche. Dans le même ordre, qu’avait-il besoin d’introduire de force son « je » avant le début du match France-Nouvelle-Zélande, dans la proclamation de l’ouverture d’une Coupe du monde, alors que son silence aurait eu infiniment plus d’allure que cet ostentatoire exhibition de soi ? D’où les huées et les sifflets – qui n’ont certes pas donné au monde une belle image du lien de la nation avec son président – explicables par le sentiment collectif d’une forme de surabondance… Je pourrais continuer mon analyse par la relation d’autres épisodes graves ou futiles qui tous placent le caractère du président au centre du jeu parce que son « je » ne conçoit pas de s’effacer, même pour les causes que sincèrement il défend. Ce tempérament « too much » qui l’incite sans cesse à sortir du cadre, à rompre l’équilibre délicat entre l’exercice de la fonction et le narcissisme du rôle, qui fait de lui un des présidents les plus autoritaires et solitaires (ce qui va de pair) de la Ve République, lui est propre. S’il fallait tenter une comparaison, il n’aurait pas été absurde de songer à Nicolas Sarkozy (qui a été aussi « too much »), mais il me semble que chez lui l’excès, les débordements, se rapportaient plus au besoin d’action et à son énergie qu’à la dilection de son être. À lire ce billet, j’espère échapper au grief lassant de ne m’intéresser qu’à la personnalité de nos présidents, aujourd’hui d’Emmanuel Macron. Pour celui-ci, rien n’est compréhensible sans les ombres et les lumières de son être, sans l’implacable fatalité qui le conduit à confondre le légitime pouvoir qui lui est dévolu avec le narcissisme impérieux et superfétatoire dont il se repaît. Si Emmanuel Macron est souvent mal-aimé, c’est à cause de cette méprise.

Robert Ménard / 2027: « S’il faut mouiller la chemise… »

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Robert Ménard © Mairie de Béziers

À mi-parcours de son deuxième mandat à la mairie de Béziers, Robert Ménard dresse un bilan d’étape. Si sa ville est devenue plus dynamique et plus sûre, il reconnaît être désarmé face à la pression islamique. Inquiet pour l’avenir du pays, il déplore que le président, qui a pourtant les mains libres, n’ait pas le courage de prendre les problèmes du pays à bras-le-corps… et prend date avec les Français.


Relire la première partie de notre grand entretien avec Robert Ménard


Parlons de votre bilan à Béziers, dont vous êtes le maire depuis près de dix ans. L’insécurité a-t-elle régressé ?

Oui, parce que j’ai mis sur la table des moyens colossaux. Mais est-ce aux communes de payer des polices municipales de plus en plus nombreuses et de mieux en mieux équipées ? Les représentants de l’État et du gouvernement n’ont que le mot « régalien » à la bouche. Ils nous expliquent que les grands enjeux, c’est leur rayon et que les maires n’ont qu’à s’occuper des crottes de chien. Eh bien, qu’ils commencent par garantir la sécurité de nos concitoyens ! L’État a, presque en « loucedé », refilé tout un tas de bébés aux maires, mais sans nous donner les moyens afférents.

Au-delà de la délinquance, parfois mêlé à elle, il y a le séparatisme culturel. Observez-vous sur ce front une aggravation ou une amélioration ?

Malheureusement, la réponse est évidente. On croise aujourd’hui des femmes habillées à l’afghane, des petites filles entièrement voilées qu’on ne voyait pas avant. Il y a quelques semaines, j’ai rappelé la loi à une jeune fille dont le visage était entièrement masqué et le corps couvert intégralement, mains comprises. Je lui ai demandé de se découvrir, ce qu’elle a fait.

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Toutes nos proclamations de « nous ne céderons pas » sont donc inutiles ?

Je me sens désarmé. Dans l’immense majorité des cas, ces filles voilées ou masquées oscillent entre affirmation identitaire et communautarisme exacerbé en haine de l’autre. Je sais remettre une ville en état, mener une politique sociale. L’État viendra à bout du terrorisme. Mais on ne sait pas changer ce qu’il y a dans la tête des gens. De plus, on l’oublie trop souvent, le changement technologique contribue aux radicalisations identitaires. Avec internet, les immigrés peuvent conserver un contact permanent avec leur culture d’origine et sont « cadenassés » par les algorithmes qui les maintiennent dans leur communauté. Nous ne savons pas forcément lutter contre une certaine séduction, l’attrait d’un monde arabe parfois puissant, souvent fantasmé, comme l’Arabie saoudite, par exemple, qui achète les stars du foot, envisage de construire une ville géante ultra-moderne, etc. En face, il faudrait renouer avec la fierté d’appartenir à cette France millénaire, à cette patrie de la liberté. Mais cela nécessite une volonté, une immense ambition.

Il faut commencer par interrompre les flux…

Oui, en tout cas les réduire au strict minimum car l’immigration zéro n’est qu’un slogan. Encore faut-il intégrer ceux qui sont là. L’Éducation nationale a longtemps cherché à m’imposer l’enseignement des langues d’origine, en l’espèce l’arabe et le turc, dans les petites classes. J’ai toujours refusé et ils ont arrêté de me casser les pieds avec ça. En revanche, dans les quartiers difficiles où il y a parfois plus de 90 % d’enfants d’origine étrangère, j’ai mis en place des cours du soir de français.

On peut aussi se battre sur des comportements : refuser les tenues islamiques à l’école par exemple.

Voilà pourquoi mon épouse Emmanuelle a déposé une proposition de loi pour instaurer l’uniforme à l’école. Des syndicats d’enseignants et des associations de parents d’élèves braillent, expliquant que ça ne réglera pas tous les problèmes. Réglons déjà celui des tenues ! J’ai donc écrit à Gabriel Attal pour le prendre au mot et lancer une expérimentation.

On demande aux communes de faire du logement social, mais les habitants ne veulent pas forcément de mixité. Est-ce un instrument politique efficace ?

Bien sûr qu’il faut construire des logements sociaux, mais si les gens ne veulent pas se mélanger, ce n’est pas les HLM qui vont fabriquer de l’intégration. Des cités entières ne sont peuplées que de gitans parce que ces gitans-là ne veulent vivre qu’avec d’autres gitans. On a le plus grand mal à mélanger des Maghrébins et des Turcs dans les mêmes cages d’escalier. Quand des gens issus de l’immigration viennent me demander des logements, ils commencent souvent par préciser qu’ils ne veulent pas de tel ou tel quartier, parfois d’ailleurs parce qu’il y a trop de gens de la même origine qu’eux… De même, devant les écoles, je suis fréquemment interpellé par les mamans maghrébines qui me demandent : « Où sont les petits Français ? » La clef, c’est le nombre. On peut intégrer des minorités, pas des groupes qui représentent 60, 70 ou 80 % de la population de telle école ou de tel quartier.

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Du point de vue d’un maire, la « machine France » fonctionne-t-elle ?

Cela dépend des interlocuteurs que l’on a. J’ai connu une période où le préfet et le sous-préfet me menaient une guerre politique permanente. Aujourd’hui, j’ai un préfet et un sous-préfet qui font leur métier, donc qui m’aident. Comme Michel Houellebecq, « je crois de moins en moins aux idées, je crois aux gens ». En réalité, la France ne fonctionne pas si mal que ça, il ne faut pas tomber dans le sombre panneau décliniste.

Vous qui prônez la bienveillance, avez eu des propos très violents, et à mon sens très injustes, à l’encontre d’Éric Zemmour. Regrettez-vous de l’avoir blessé et anéanti votre amitié ?

Évidemment ! Il y a des mots que je n’aurais pas dû prononcer. Être ironique et méchant, c’est facile et les gens applaudissent. Alors oui, même si j’ai de profonds désaccords avec Éric, j’aurais dû avoir avec lui un débat amical. Le problème, c’est qu’il est désormais prisonnier d’une sorte de fan-club catho-droitard qui ne lui laisse guère d’espoir de rassemblement.

Et vous, appartenez-vous à une famille politique ?

Sûrement pas et je ne le veux pas. Certains parleront de poujadisme, mais je pense que les partis politiques sont un problème en France. Comme les médias d’ailleurs. Politiquement, notre système fait qu’on se rallie non pas à un parti, mais à une personne. Et je ne vois pas à qui je pourrais me rallier aujourd’hui. Disons pour vous faire plaisir que je suis un démocrate attaché à un pouvoir plus proche des gens, plus respectueux des cultures locales et de la diversité française. Une sorte de fédéraliste un peu punk. Comme disait Romain Gary, « un minoritaire-né ».

Robert Ménard rencontre des locataires des HLM de Béziers, réunis devant l’agence OPHL du quartier de l’Iranget pour protester contre la hausse des tarifs énergétiques, 3 août 2023. © Stéphane Pocher/France Bleu

Si je peux jouer les idiotes, en quoi les médias sont-ils un problème ?

Ils passent leur temps à dénoncer tous ceux qui ne sont pas mainstream. Regardez le boucan autour du JDD ! Je ne partage pas forcément les idées de Geoffroy Lejeune, mais ce n’est pas un facho dangereux. Or, il y a eu quasi-unanimité des autres médias pour dire que son arrivée menaçait le pluralisme. Même Reporters sans Frontières a fait chorus : mais de quoi je me mêle ? Alors que, a contrario, les propos d’Edwy Plenel ne sont jamais questionnés.

En refusant toute affiliation politique, vous préservez votre liberté. Mais le prix à payer n’est-il pas une certaine solitude ?

Il est vrai que, quand je côtoie les états-majors politiques, je me sens seul, mais je reçois aussi beaucoup de soutiens et pas seulement dans ma ville. Alors, peut-être ma solitude est-elle une bonne chose. Les gens veulent du bon sens.

Le bon sens n’est pas une politique !

Et pourquoi donc ?

Parce que nous avons aussi besoin d’une vision, d’un récit, d’un roman national. Nous ne sommes pas ensemble simplement pour produire des richesses.

Mais on crève de ça ! Ça vous fait certainement plaisir d’avoir un chef de l’État qui lit des philosophes, mais ça ne sert à rien. On a besoin de gens qui ne promettent pas de tout régler, mais s’attaquent modestement à deux ou trois questions et s’y consacrent corps et âme.

Aujourd’hui, même les chansons de Michel Sardou sont devenues un enjeu de querelles…

Cette polémique en dit long sur l’état de la société. La jeune chanteuse qui exprime son dégoût des Lacs du Connemara est représentative d’une certaine jeunesse qui déteste tout ce qui est français et populaire. Ça doit lui sembler « sale ». Le tube de Sardou, comme les chansons de Claude François, est repris dans tout le pays depuis quarante ans, des bals de village aux soirées de mariage en passant par les communions ou les fêtes de promo. C’est cette popularité qui les rend jaloux. Et Sardou est la cible parfaite : gaulois ronchon, mâle hétéro, pas vraiment de gauche…

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Que pensez-vous de « tendresse » affichée des écolos pour le rappeur Médine ?

Soyons clairs : les Verts ont raison d’alerter sur le catastrophique changement climatique. Mais les extrémistes écolos sont dangereux, car ils veulent une véritable rupture anthropologique. Avec eux, c’est le retour au Néolithique. Et encore, ça doit leur sembler trop polluant. Quant à l’invitation faite à Médine, drôle d’idée politique, reprise d’ailleurs par LFI ; ce type, qui semble loin d’être idiot, est hors des clous. Son tweet sur Rachel Khan est sans conteste possible une saloperie antisémite digne d’un Soral. Et certains de ses clips sont plutôt inquiétants, comme celui où il dit sa détestation de notre République et de Marianne. L’extrême gauche française, dont font partie les écologistes, a le plus grand mal à rompre avec les pratiques clientélistes qu’elle dénonce pourtant chez ses adversaires. Ici, c’est tout simplement du racolage électoral !

Darmanin pense à 2027, et vous ?

Il y a la force du destin. On ne peut pas exclure une crise de grande ampleur qui frapperait soudain notre pays. Quelque chose d’incontrôlable. Dans une situation de ce genre, en tant que patriote, je répondrais présent. La situation de 2027 est préoccupante : qui pour succéder à Macron ? Quand j’entends les propos capitulards, munichois, d’un Sarkozy et le peu de réactions à droite, je me pose des questions. Je ne laisserai pas mon pays plonger dans l’inconnu. Et s’il faut mouiller la chemise…

La France à l’heure des choix: immigration contre prospérité économique

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Manifestation contre le projet de loi immigration, Paris, 25 mars 2023 © ISA HARSIN/SIPA

Selon une note de l’Institut Montaigne, qui fait couler beaucoup d’encre, la croissance économique et démographique de la France n’est maintenant possible que grâce à l’immigration.


Il faut lire la tribune que l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie (OID) a publiée dans Marianne. Il faut la lire parce qu’elle est un cri d’alarme nécessaire, et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour empêcher la catastrophe qui vient. Il faut la lire parce qu’elle est soigneusement factuelle, documentée, sourcée. Il faut la lire parce que même si elle ne fait que confirmer ce que vous savez déjà – ce que n’importe qui sait déjà, pour peu qu’il se donne la peine de regarder par sa fenêtre – elle vous donnera des arguments et des chiffres incontestables à opposer à ceux qui persistent encore dans le déni et le mensonge, elle vous donnera de quoi ouvrir les yeux de quiconque se laisse encore endormir par les chimères du « vivre-ensemble », de la « diversité qui est une chance » et d’une repentance postcoloniale délirante. Et pour faire bonne mesure, complétez cette remarquable tribune par les études statistiques que l’OID expose sur Twitter, elles aussi sont brillantes.

La France peut intégrer des individus, pas des peuples entiers

Non, l’immigration massive n’est pas une chance pour le pays d’accueil. Non, elle n’est pas une richesse. D’aucuns prétendent qu’elle serait une nécessité économique. Seulement, on se demande bien en quoi une république islamique du Frankistan (!) à l’économie dynamique serait préférable à une France peut-être un peu moins riche mais où Lola n’aurait pas été tuée. Eric Dupond-Moretti se plaindrait peut-être d’avoir plus du mal à trouver des gens pour ramasser ses poubelles, mais peut-être aussi un garde des Sceaux devrait-il se soucier un peu moins de ses poubelles et un peu plus de la sécurité des citoyens : l’immigration massive extra-européenne est nettement plus criminogène que les populations européennes. Ceci dit, il se trouve que même l’argument économique n’est qu’un mensonge de plus : dans ce domaine aussi, l’immigration massive est un fardeau. Tout au plus sert-elle un dumping social délétère, le 9-3 n’est absolument pas la Californie, et il ne semble pas que Trappes, Stains ou les quartiers nord de Marseille soient des eldorados pour les « métiers en tensions » – ou alors, qu’attendent nos chefs d’entreprises pour tous s’y implanter ? Depuis des décennies, l’immigration massive n’a résolu aucun des problèmes de la France, ni des autres pays qui accueillent de tels flux migratoires, mais en a causé beaucoup, et les a tous (ou presque tous) amplifiés. Au fait, a-t-on pensé à intégrer le coût des émeutes et razzias du début de l’été dans le bilan économique de l’immigration massive ? C’est que, d’après un rapport très officiel, « une grande majorité des émeutiers interpellés sont des jeunes individus de nationalité française, mais originaires de l’immigration (2e ou 3e génération), principalement du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne. »

Chiffres implacables

Au fait : il n’y a pas une immigration, mais des immigrations. Les chiffres, là encore, sont implacables, et les populations originaires d’Asie du Sud-Est ne présentent absolument pas les mêmes profils statistiques que les populations originaires d’Afrique subsaharienne ou du Maghreb. Les individus ne sont évidemment pas réductibles à de telles catégories, et peuvent différer totalement de ce qu’annoncent des profils statistiques, mais les tendances générales sont claires. Or, c’est la prise en compte des généralités qui doit fonder la décision politique – sans nier la possibilité de cas particuliers, mais sans essayer lâchement de se donner bonne conscience en se réfugiant derrière les cas particuliers pour refuser de voir les généralités qui bousculent la bien-pensance. Dans le monde réel, les êtres humains ne sont pas la matière brute interchangeable d’une ingénierie sociale qui engendrera l’Homme Nouveau par la grâce de la laïcité et des « valeurs de la République », toujours plus fréquemment invoquées mais toujours plus creuses. Ils ne sont pas non plus les agents tout aussi interchangeables d’un système économique dont l’horizon se limite à produire et à consommer, et qui n’imagine pas de plus sublime accomplissement que d’avoir une Rolex à 50 ans. Dans le monde réel, il existe ce qu’on appelle la culture, l’enracinement, le besoin de donner du sens, la soif de sacré, le désir de grandeur, l’enthousiasme. Dans le monde réel, toutes les civilisations ne se valent pas, et il y a une différence de nature entre civilisation et barbarie.

La France n’est pas un droit de l’homme

Ceci dit, ne commettons pas l’erreur de prendre nos dirigeants pour des imbéciles. Emmanuel Macron, quoi qu’on puisse penser de lui par ailleurs, n’est pas un idéologue mal dégrossi comme Mathieu Slama, qui considère que ce serait trahir « nos principes » de ne pas régulariser la totalité des migrants illégaux – je le trouve d’ailleurs beaucoup trop restrictif, ce garçon : donnons la nationalité française, le droit de vote et les aides sociales à l’humanité entière ! Et pas seulement à l’humanité, d’ailleurs, halte à la discrimination spéciste, Aymeric Caron n’a pas à parler au nom des moustiques, c’est de l’humansplaining, il est grand temps que les culicidés votent et que les femelles (et les mâles qui pondent, pas de transphobie) bénéficient de la CAF pour leurs œufs. Bref.

Emmanuel Macron, donc, a accès à toutes les données sur lesquelles s’appuient les études de l’OID comme celles de Marc Vanguard : elles sont, redisons-le, publiques, sourcées, vérifiables et vérifiées. Comme tous ceux qui l’entourent, Emmanuel Macron connaît les conséquences économiques, sociales, sociétales et sécuritaires de sa politique migratoire. Il sait que son prédécesseur a évoqué une partition du territoire qui deviendrait inévitable. Il sait que son ancien ministre de l’Intérieur a reconnu que de « côte à côte » nous nous dirigions vers un « face-à-face ». Lui-même, dans le débat de l’entre-deux-tours, a déclaré qu’interdire le hijab provoquerait une guerre civile. Pour citer Coluche, « les hommes politiques, j’vais vous faire un aveu, ne sont pas bêtes. Vous vous rendez compte de la gravité ? Ils sont intelligents. Ça veut dire que tout ce qu’ils font, ils le font exprès. »

Mais pourquoi ?

Tout simplement parce que l’immigration massive est nécessaire pour dissoudre la culture française dans le multiculturalisme, et ainsi mettre fin au sentiment d’unité nécessaire pour que le peuple revendique sa souveraineté, et surtout pour abolir la décence commune qui, pour l’instant, freine encore dans leurs appétits ceux que Christophe Guilluy appelle les anywhere. L’extrême-centre envie les « élites » du tiers-monde qui peuvent tout se permettre, et rêve donc de tiers-mondiser la France. Ambition suicidaire : la libanisation en cours, si elle se poursuit, conduira aux mêmes résultats qu’au Liban, dont Thibault de Montbrial rappelait récemment qu’avant son effondrement il était surnommé « la Suisse du Moyen-Orient » – comme quoi, la prospérité économique ne fait pas tout.

Qu’on parle de « créolisation » comme Jean-Luc Mélenchon, de « transition démographique » et « bouleversement d’une rapidité inouïe » comme Emmanuel Macron, ou de « grand remplacement » comme Éric Zemmour, les conséquences de l’immigration massive sont infiniment plus importantes que toute considération relative aux « métiers en tension » ou à des espoirs économiques systématiquement démentis par le réel. Oui, lisez l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie, et faites-vous votre idée…

Boycott Sephora: quand le racolage islamiste d’une marque révolte les réseaux sociaux

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© Anthony Behar/Sipa USA/SIPA

« Boycott Sephora », c’est le hashtag qui monte sur les réseaux sociaux. Mais pourquoi la chaîne de cosmétiques fait-elle l’objet d’un tel rejet ? la raison est simple : celle-ci a choisi de soutenir les « hijabeuses », ces joueuses de football voilées qui, à coup de provocations et de procès, veulent imposer leur voile sur les terrains et dans les compétitions sportives.


Sephora a mis en scène les tristement célèbres « hijabeuses » dans un clip sirupeux, véritable ode au hijab. Ce hijab, signe politico-religieux, qui fait de la femme une inférieure et marque l’impureté de sa chevelure et de son corps. Cela au moment même où on tue des femmes en Iran parce qu’elles osent retirer ce signe sexiste.

Qu’une marque qui s’adresse aux femmes mette en valeur un signe sexiste au nom de l’inclusion est aussi cohérent que si une association antiraciste choisissait d’organiser un défilé de mode pour populariser l’uniforme du Klu Klux Klan. On marche d’autant plus sur la tête que ces hijabeuses sont cornaquées par une association loin d’être inconnue : Alliance citoyenne. Cette association a déjà fait beaucoup parler d’elle et se fait de plus en plus le relais des revendications des islamistes, canal frères musulmans.

Quand on se prend un tacle du Conseil d’État, on ouvre un autre front

Alliance citoyenne tente d’imposer le voile partout. A la piscine en investissant de force les bassins en burka de bain (dite burkini), alors que celle-ci est interdite. Sur les terrains de foot en imposant le port du hijab au nom de l’inclusion des musulmanes, quand bien même la plupart des musulmanes ne sont pas voilées. On a récemment appris que le père venu revendiquer pour sa fille le port de l’abaya à l’école dans l’émission de Cyril Hanouna était également très proche d’Alliance citoyenne. Ce délicieux géniteur gère la mosquée de l’Elsau à Strasbourg, fermée en 2021 pour cause de radicalisation et apprécie l’imam Iqioussen, expulsé de France à cause de ses prêches haineux.

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Les hijabeuses ne sont pas une bande de jeunes filles un tantinet exaltées qui font leur crise d’adolescence, ce sont des produits du militantisme islamiste comme de l’exaltation identitaire et « raciale ». Ces filles sont instrumentalisées et envoyées au front (à l’école ou sur les terrains), avec un discours politique visant à générer des conflits avec les institutions (Education nationale, fédérations sportives…). Alors qu’elles refusent la règle commune et piétinent la loi, elles inventent une histoire de persécution et se victimisent à outrance. Elles mènent également des offensives judiciaires qui dénotent la volonté d’attaquer l’État sur deux fronts ; d’abord en faisant du séparatisme la mesure de la soumission à l’islam : le bon musulman ne saurait être qu’un islamiste. Ensuite en instrumentalisant l’appareil judiciaire contre nos institutions et en attaquant les piliers de notre contrat social. Dotées de fonds conséquents, les hijabeuses sont mêmes allées jusqu’au conseil d’État pour tenter d’imposer le voile à la Fédération française de Football. Elles ont échoué.

L’assimilation, voilà l’ennemi !

Pourquoi tant d’excitation autour du voile de la part de ces militantes alors que l’on peut mettre un bonnet de bain à la piscine si on veut cacher ses cheveux, par exemple ? Parce que le but est d’imposer un signe distinctif qui distingue les musulmans des autres. Voilà pourquoi se cacher les cheveux dans un bonnet de bain ne suffit pas. La première étape de la réislamisation, premier objectif des militants de l’islam politique, est la distinction. Cela permet de tracer une frontière entre le musulman et celui qui ne l’est pas et, une fois cette frontière tracée, de forcer tous les musulmans à adopter les marqueurs islamistes sous peine d’être taxé de n’être pas assez musulman, trop Français, trop assimilé.

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L’imposition de signes distinctifs et le consentement des femmes voilées à leur propre oppression permet donc aux islamistes de se démarquer, de faire pression et de mesurer leur influence. Mais surtout, cela permet de traiter « d’islamophobes » tous ceux qui osent critiquer la démarche. C’est même là le but premier : avant tout déstabiliser les fondamentaux occidentaux, à commencer par l’égalité et surtout l’égalité homme/femme, en utilisant la liberté comme une arme de perturbation massive de la réalité.

Car le plus drôle c’est que si la logique de réislamisation fonctionne, le burkini et le hijab de sport seront vite relégués au placard et un barbu se chargera d’expliquer à ces idiotes utiles que leur place est à la maison, que les femmes bien ne vont pas au stade et ne jouent au football et qu’elles ne doivent pas non plus aller à la piscine en vêtement moulant. L’offensive sur le voile et les discours qui l’accompagnent sont là pour semer le trouble et détruire les principes qui fondent la légitimité d’une nation. La démarche est profondément perverse  : c’est un signe sexiste, il est présenté comme une liberté. C’est une marque d’infériorité, il est présenté comme une forme d’affirmation de soi et de prise de pouvoir. C’est une logique d’effacement, il est revendiqué comme une affirmation identitaire.

Sauf que partout où le voile est obligatoire, le statut des femmes est celui d’éternelle mineure. Partout où il est majoritaire, les femmes n’ont pas les mêmes droits que les hommes. Pire même, il est révélateur d’un refus d’accorder à tous les humains la même dignité. Refus qui se traduit par une infériorité juridique pour les femmes et les non-musulmans. Et cela n’est pas l’apanage des islamistes. Dans tous les pays où l’islam est religion d’État, l’égalité n’existe pas et la femme est infériorisée. Alors, pourquoi Sephora se compromet ainsi ?

La tarte à la crème marketing de l’inclusivité

D’abord reconnaissons-le, certaines grandes entreprises sont très sensibles au discours de l’islam politique dont elles reprennent les codes et les éléments de langage. C’est le cas de Nike et de Levis notamment. Le maître mot de leur démarche : l’inclusivité. Enfin pas avec tout le monde. Aux États-Unis, Sephora a exclu une influenceuse beauté avec qui elle était en contrat car celle-ci était de droite.

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Mais d’un point de vue cynique, la démarche de Séphora est sans doute avant tout commerciale. Le voile fait de la femme un sexe sur patte, c’est pourquoi elle doit être ensevelie. Mais une femme réduite à sa fonction sexuelle n’existe que pour être à disposition des hommes. Sa seule existence, c’est la séduction et la maternité. De quoi investir dans les cosmétiques et le maquillage si elle est belle et investir deux fois plus si elle ne l’est pas… Reléguée à la maison, la femme est une cliente captive qui paradoxalement dépense beaucoup en parfumerie, crème et maquillage pour retenir un mari dont elle est dépendante.

Mais le plus drôle, finalement, c’est de voir à quel point la complaisance envers le militantisme lié à l’islam politique amène l’augmentation des revendications du public visé. Sous la publication de Sephora encensant les hijabeuses, les militantes islamistes se plaignent que Sephora n’emploie pas de femmes voilées. Elles lui reprochent de vouloir faire des « likes » mais de ne pas aller au bout de la démarche. Du côté de ceux et de celles pour qui promouvoir le voile, c’est trahir les femmes en acceptant qu’elles soient traitées en mineures et en inférieures, la réponse n’a pas tardé. Le slogan de la campagne publicitaire de Sephora est « The unlimited Power of Beauty » (le pouvoir illimité de la beauté), les internautes en ont fait : « The unlimited Power of Sharia » (le pouvoir illimité de la Sharia). C’est effectivement bien plus crédible et juste.


Elisabeth Lévy : « Sephora : pour le marché, le grand remplacement a commencé ! »

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Sud Radio, juste après le journal de 8 heures.

Marseille

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Marseille. Unsplash

Marseille, ses bars, ses comptoirs, des zincs plus beaux qu’à Blagnac. La grande école du mensonge. L’industrie du mensonge. Avec ses menteurs de génie. Si le mensonge est beau, il sera patiné de bouche à oreille, mâtiné de quartier en quartier, pour revenir customisé sur le comptoir d’où il s’était envolé, devant son auteur fier comme un toréro de Pampelune.


Le plus gros trafic aérien de bobards au monde. Pilotés par des garis qui ne sortaient que la nuit, le col du Mac Douglas relevé, convoyés par des caïds qui jetaient l’os aux chiens, juste pour observer la réaction. Du grand art.

Marseille et le Stade. Le Vélodrome. Où il n’y a jamais trop eu de vélos. Mais des bicyclettes! Celles de Josip Skoblar ! Jospi ! Il était chaussé par Hungaria, et avait toute la ville à ses pieds.

Marseille et ses cagoles. Belles et colorées comme des girelles royales. Et pas de l’élevage, que du sauvage, colorisé par Almodovar et mis en peinture par Ambrogiani. Et pas de noir et blanc. Du rouge, que des couleurs de chaudasse, le pastel c’est pour le pastis, le jaune.

Marseille et ses poissons qui parlent. Celui qui parle le plus c’est le rouget, une vraie donneuse. À l’époque, ceux d’Honorine, sur le Vieux-Port, ne balançaient pas que sous la torture.

-”Regardez mes rougets, ils parlent encore!”
-”Ouais mais ça fait longtemps qu’ils bougent plus!”
-”C’est toi qui vas plus bouger si tu parles encore!”

Tout ça c’est fini, balayé par le Mistral, relégué aux archives, figé dans la nostalgie. La ville qui a créé le pain de savon est rongée par la crasse. Et la mort. La mort en terrasse, la mort au balcon. Le combat du terrain est perdu. Et ce n’est pas avec une compagnie de CRS, même d’usine, que la reconquête peut s’enclencher. Envoyez la Financière et frappez où ça fait mal. Vous devez ça à cette ville, que vous avez massacré, en ouvrant les vannes sans le dosage qui garantit que la machine à intégrer puisse tourner. Faites vite.


Ma vieille peau

Marseille, le sel et le plomb te font la peau
L’iode et le vent du large te laissent un dépôt,
Pas à la banque, dans les poches du perfecto,
La mise à l’amende, façon de voir l’impôt

Tes yeux bleus délavés par la cataracte
Le regard rivé à prier la Madone
Pour une crise de foi, l’Ohème, l’énième maldonne,
Sous une pluie de sang ta pupille se contracte

Meilleure des machines à laver le malheur
De l’Estaque aux Goudes on étend du bonheur
Des races en larmes sèchent au souffle de ton accent
Ce mélange d’épices, de poisson, de safran

L’élu corrompu a gavé ton tambour,
Tes bras ouverts se ferment un peu à l’amour,
Pour t’en sortir faut lire l’Histoire de la Mer,
Faire consensus autour de la Bonne Mère

De Chine t’as ram’né de l’opium et un bleu,
Le César du tissu, l’Oscar de l’entreprise,
Pour tes marins perdus, tes joueurs de blues,
Tu as le mac à dames au bord de la crise

Ton bitume sait qu’la nuit tous les chats sont gris,
Tes rats syndiqués, gras com l’port de Cassis,
Les quais de la Joliette c’est du pain béni,
À l’Evêché ça balance debout, assis

Tes taxis prennent les tapins plus tes cagoles,
Qu’on calcule au bar beaucoup moins à l’église,
Le fini-parti laisse la poubelle pas prise,
Le coup d’balai c’est pour Scotto et Pagnol

Championne du monde du “sur la tête de ma mère”,
Un génocide de mamans au cimetière,
Des bobards plus gros que les croix de Saint-Pierre,
Aux mamans un trou, aux belles-mères un cratère

Tu crachais du 11, un beau noyau d’olive,
C’était du sélectif, pas du n’importe quoi,
Des fadas crachent à la kalash des ogives,
Faut les choper au niveau du cash, au foie

Ma vieille caisse cabossée
Ma vieille ville carrossée
Réagis pour les gosses
Range au placard ta crosse

J’parie sur toi ma vieille
J’prie pour que ton soleil
T’passe un savon sans plomb
Chasse la mort au balcon

Le fleuve Moix

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Photographe: Hannah Assouline

Le premier tome du journal de Yann Moix (Hors de moi, août 2023, Bouquins / Grasset) est plein de réjouissantes vacheries. Florilège. La lecture de ces 1200 premières pages est parfois âpre, mais offre aussi des fulgurances.


Avec le premier volume de son Journal, de plus de 1200 pages, qui ne couvre que douze mois (juin 2016 à juin 2017), Yann Moix va alimenter sa légende noire d’écrivain moitrinaire, pour reprendre l’adjectif de Michel Déon. À l’époque, Moix est chroniqueur dans l’émission « On n’est pas couché », de Laurent Ruquier. Il interroge, parfois rudement, les invités de la semaine. Il le fait en compagnie de Léa Salamé. Dans son Journal, au titre éloquent, Hors de moi, dédié à Philippe Sollers, il brosse les portraits de Ruquier et de Salamé. Le diariste n’est pas trop féroce. Ruquier : « C’est un homme de parole. Dans ce milieu de fripouilles, cela n’a point de prix. » Mais il ajoute : « Dépourvu d’affect, il ne peut se comporter que comme un chef d’entreprise, un capitaine en campagne. » Léa Salamé « est une fille intelligente et terriblement maligne. » Mais – il y a toujours un coup de griffe avec Moix – il s’interroge sur sa culture générale : « Elle sait ce que Jean-François Copé faisait en juin 2002 mais n’a jamais entendu parler des Cent-Jours. » Ses uppercuts, il les réserve à d’autres. François Hollande : « Comme d’habitude, Hollande est en dessous de tout : il veut ‘’punir’’ l’Angleterre. Petit monsieur. Minuscule quinquennat. » ; Jean-Luc Mélenchon : « un apparatchik caractériel » ; Éric Zemmour : « c’est un systématique. Péguy les détestait ; je ne les aime pas non plus. » ; Jean Daniel, figure intellectuelle progressiste, est écartelé : « Seul Jean Daniel pense qu’être Jean Daniel est quelque chose de considérable. À la vérité, c’est un second couteau. » La liste est longue des victimes de Moix. Parfois, c’est assez juste ; souvent, c’est méchant. Il arrive que ce soit franchement outré. Le diariste incontinent est, par exemple, vachard avec Malraux, alors qu’il révère André Suarès. Or, Suarès était l’un des maitres à penser de Malraux… L’auteur de La Condition humaine, après-guerre, écrivit dans une lettre au sujet de Suarès se battre « avec des édredons depuis trois mois pour qu’une rue de Paris porte enfin son nom. » (Lettres choisies, 1920-1976, Folio, 2016). Au fond, tout cela a peu d’importance. Il faut descendre le fleuve Moix et accepter les remous, les rapides, les embardées, les récifs, la tête qui chavire, la nausée… On est embarqués sur la canonnière du Yan-Tsé, avec Steve McQueen, que Moix adore. Car l’écrivain a des préférences très affirmées. Outre ses idoles, André Gide, dont il éclaire avec honnêteté les zones d’ombre, Charles Péguy, ou encore Sacha Guitry, il croque avec sensibilité BHL, Montherlant, Dominique Jamet, Juliette Gréco, François Truffaut, Maurice G. Dantec, Dostoïevski, et les autres. Il cite Alain Robbe-Grillet, tombé dans l’oubli ou presque, parce que la France a perdu son élite cultivée. Voici : « Dans la continuité d’un récit, il y a deux sortes de ruptures possibles : le manque et la contradiction. Dans la contradiction, pas de manque, mais, tout d’un coup, un contraire. » C’est ce qui arrive à lire Moix : un contraire qui nous oblige à sortir de nos certitudes, et à reprendre le chemin fertile de la contradiction. Car sur le fleuve Moix, ça pense, et tout le temps. Ça pense à propos de la religion, du judaïsme, du christianisme, des femmes, de la souffrance animale (superbes pages), du sadisme de l’Homme, de son impuissance qui conduit au crime, à sa jouissance pour le crime, etc. Alors, oui, c’est âpre, ça dérange, ça énerve, mais c’est salutaire pour l’esprit.

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Je croyais avoir lu tous les commentaires sur les grands romans de Sollers. Je me disais qu’il fallait le lire, lui, et contourner les exégètes, parfois assommants Et voilà que Moix commente Paradis, qui « est le plus grand ouvrage classique de l’après-guerre, il s’adapte à toutes les vitesses, se greffe sur toutes les allures ; il est au langage ce que le VTT est au sol bossué des alentours de Verdun (…) C’est le seul roman ‘’récent’’ (1981 quand même) qui puisse se targuer d’englober, en un seul souffle, l’ensemble des connaissances actuelles, des données que nous possédons sur le monde. » Et puis, cette fulgurance, une parmi tant d’autres dans Hors de moi, à propos de l’auteur de Femmes : « Sollers sait que, dans la vraie littérature, la forme doit toucher le fond. »


Moix nous fait beaucoup de confidences sur lui – hypocondrie, jalousie, détestation du bruit. Ce genre littéraire s’y prête, me direz-vous. Il y en a une, assez touchante. « J’ai parfois le fantasme d’être gardien de phare, confie Moix ; pour écrire. Comme sport, monter et descendre les escaliers. Puis lire et écrire toute la journée. Sans la moindre interruption. » Et envoyer quelques signaux aux contemporains perdus dans la nuit.

Yann Moix, Hors de moi, Journal, Bouquins/Grasset.

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Tremblement de terre: pourquoi cette demande de soutien à géométrie variable?

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Après le séisme au Maroc, le président Emmanuel Macron a renouvellé sa proposition d'aide, et a fustigé sur Twitter des « polémiques qui n'ont pas lieu d'être », 12 septembre 2023. Image : Twitter.

Et pourquoi pas la France, en l’occurrence, qui semble si contrariée?


Les catastrophes naturelles ne manquent pas, tout comme les élans de solidarité internationale. Mais une offre de soutien ne vaut pas blanc-seing pour le pays qui se propose d’aider. Il faut un minimum d’organisation et de logistique pour accueillir les équipes de secours venues du monde entier, qui peuvent vite se révéler une charge plutôt qu’un soulagement. On se souvient de l’aide internationale envoyée au Sri Lanka lors du tsunami de 2005 et dont plus de la moitié de l’aide, notamment financière, n’est jamais arrivée, ou a été mal dispatchée. Le Maroc a fait le choix, contrairement à la Turquie et la Syrie en février dernier, de filtrer les propositions de soutien, probablement pour avant tout gérer en interne (a priori un pays est souverain et est bien en droit de décider lui-même des soutiens qu’il souhaite avoir), et d’accepter en fonction des besoins qu’il a du point de vue technique, matériel et logistique.

Feu d’artifice de solidarité internationale

Au-delà du capital sympathie que le Maroc a pour l’Espagne, l’Allemagne, le Qatar et les Émirats arabes unis comme la Tchéquie, il y a fort à parier que ces propositions de soutien étaient mieux ficelées pour parer à l’urgence, que les élans tous azimuts de certains pays. Et puis, la nouvelle dynamique des accords d’Abraham va jouer pour beaucoup, notamment avec Abu Dhabi mais sûrement très vite avec Tel Aviv. Il faut aider mais il faut « bien » aider, au risque de voir l’engorgement sur place devenir totalement contre-productif. Dans ce feu d’artifice de solidarité internationale, la France, qui se réveille, semble ruminer le déni affiché par Rabat. Il y a des raisons à cela, et qu’Emmanuel Macron semble oublier. Paris tente de se racheter après deux ans de crise politique majeure entre les deux pays. Le Palais y voit sûrement un certain opportunisme, et préfère se tourner vers d’autres pays moins « problématiques » pour lui.

A lire aussi: Séisme: pourquoi les Marocains acceptent-ils l’aide espagnole (et pas la nôtre)?

Certes, il faut réagir dans les 48 à 72 heures pour espérer trouver le plus grand nombre de rescapés mais la tâche est ardue, tant la violence du tremblement de terre a été forte, l’évènement inattendu ou imprévisible, et le moment le pire, c’est-à-dire en pleine nuit quand les gens dorment. Un élan de solidarité s’est avant tout organisé sur place, déjà, à Marrakech et dans la campagne qui va jusqu’à l’épicentre, dans l’Atlas – même si beaucoup de populations se plaignent ouvertement du manque de secours sur place. Beaucoup tendent à penser que le Maroc, qui a ce stade n’avait quasi rien formulé, aura besoin de toutes les mains et de tous les soutiens matériels. Chine, Turquie, Grande-Bretagne, États-Unis, Israël sont parmi les premiers pays à avoir proposé leur soutien, sans réponse nette. Au-delà de la catastrophe, en géopolitique, les drames humains peuvent souvent renforcer des alliances ou en redéfinir d’autres. C’est un opportunisme politique comme un autre.

La France ne peut imposer une aide dont ne veut pas Rabat pour l’instant. Ce n’est pas de l’arrogance, mais le fruit d’un passé tumultueux entre ces deux pays, depuis deux ans, au profit de l’Algérie. Certes, Paris vient de débloquer une aide d’urgence de quelques 2 millions euros mais encore hier les deux pays se regardaient en chiens de faïence.

Macron privilégie l’Algérie

Face aux béni oui-oui du bon-sentimentalisme, les catastrophes naturelles ne doivent pas servir à de la récupération politique. On peut imaginer que la catastrophe peut montrer la bonne foi et la sincérité des uns et des autres, et offrir la chance d’un rétablissement de bonnes relations avec un pays incontournable du Maghreb, pour notre politique et pour nos échanges économiques. Or la défiance de Rabat avec Paris est maximale. Pourquoi ? À l’automne 2021, Paris avait annoncé sa volonté de réduire le nombre de visas accordés aux Marocains pour venir sur le sol français, reprochant au Maroc comme à d’autres pays du Maghreb de ne pas collaborer assez avec les autorités hexagonales en cas d’irrégularité de séjour et nécessité d’expulsion. Puis, vint l’affaire Pegasus, une vaste affaire d’espionnage d’une officine israélienne qui aurait surveillé nombre de personnes de la société civile marocaine et même des personnalités françaises dont Emmanuel Macron, pour le compte du Maroc, et que certains voient aujourd’hui davantage comme une opération orchestrée de toutes pièces pour déstabiliser le régime chérifien au profit de l’Algérie [1].

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Le président Macron a fait le choix clair de l’Algérie depuis deux ans, refusant de reconnaître le plan d’autonomie du Sahara proposé par Rabat, alors que Donald Trump avait lancé le mouvement, qu’Israël l’avait fait dans le cadre des accords d’Abraham, et que des pays européens comme l’Allemagne ou l’Espagne ont déjà apporté leur soutien à Mohammed VI. Dans le contexte de la guerre en Ukraine, la France, en quête de gaz, s’était ouvertement rapproché avec de grands sabots du régime algérien. Emmanuel Macron espérait bien en obtenir, puis s’était rendu dans le pays il y a un an à l’occasion des 60 ans de l’indépendance d’Alger. Mais la claque a été similaire : Alger n’a pas de gaz pour Paris. Tout ça pour ça ?

Paris ne peut indéfiniment par son attitude agressive, arrogante et orientée, continuer à se fâcher avec la terre entière, à commencer par l’Afrique. Le rejet de Paris est à son paroxysme et on le voit notamment au Sahel. La catastrophe que vit Rabat jouera plein pot sur ses futures relations, en Afrique, et probablement vers le « Sud global » qui ne cesse de monter, et de représenter une alternative  – sérieuse et viable ? c’est est une autre question. Pendant ce temps-là, l’Algérie renforçait sans complexes un peu plus encore son partenariat stratégique avec la Russie en juin dernier, comme si la guerre en Ukraine n’avait jamais existé.


[1] L’affaire Pégasus, les dessous d’une guerre de l’information, Alain Jourdan, Le Cherche Midi, Paris, 2023.

L'Affaire Pegasus - Les dessous d'une guerre de l'information

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Sommet du G20: vers une victoire totale des BRICS?

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Le président américain Joe Biden et le Premier ministre indien Narendra, New Delhi, Sommet du G20, 11 septembre 2023 Modi © EPN/Newscom/SIPA

Pour les Occidentaux, le 18e sommet du G20, qui s’est tenu à New Delhi du 9 au 10 septembre, s’est malheureusement terminé sans avancée sur la guerre en Ukraine ou le climat. Pour le reste du monde, la donne est différente. Encourager les envies de puissance de l’Inde semble être une bonne idée pour nous… Les analyses du think tank le Millénaire.


C’est tout comme si le dernier sommet du G20 avait démontré que l’avenir de l’Ukraine et la préservation du climat s’apparentaient à deux marottes occidentales, sans figurer dans les priorités des pays émergents ! Ceux-ci semblent davantage occupés à reconfigurer la marche du monde sans l’Occident, au point de démonétiser le G20, instance regroupant l’Occident et les pays émergents, au profit des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) où nous sommes absents et dont le sommet de Johannesburg d’août a été une réussite avec un agrandissement du groupe.

Une perte d’influence du G20 depuis de nombreuses années

Symbole d’un monde multipolaire né après l’effondrement soviétique, le G20 n’a pas atteint ses objectifs. Le groupe a été instauré après les crises économiques asiatiques de 1997-1998 et la difficulté de combattre leurs effets nocifs faute de coopération. En effet, avec l’interconnexion des marchés internationaux, chaque crise dans une zone géographique peut déstabiliser toutes les autres économies du reste du monde. Le G20 devait aider à la coopération internationale en rassemblant des pays qui représentent 85% du PIB mondial, 75% des échanges commerciaux et deux tiers de la population du globe.

A lire aussi: Séisme: pourquoi les Marocains acceptent-ils l’aide espagnole (et pas la nôtre)?

Mais le groupe n’a pas aidé à surmonter la crise sanitaire ou la guerre en Ukraine qui ont bouleversé nos certitudes et fragilisé l’économie mondiale. Le déclin du G20 est illustré par la difficulté de mener à bien son rôle – celui de redynamiser la coopération économique mondiale. En plus de son manque d’efficacité, le groupe est vu comme illégitime et éloigné des réalités des pays émergents. Ainsi, les principaux leaders du monde, comme Xi Jinping ou Vladimir Poutine, boudent l’organisation et pensent qu’elle dessert leurs intérêts.

Montée en puissance des BRICS : vers une victoire totale ?

La guerre en Ukraine a rebattu les cartes entre les instances mondiales au profit des BRICS. Cela s’explique en partie par la ligne politique adoptée par le groupe, soit la défense d’un équilibre économique et politique mondial multipolaire, qui vient concurrencer celui du G7 et du G20. Ces deux dernières sont perçues par les BRICS comme le moteur de l’influence des États-Unis et de l’Union européenne et auraient pour ambition l’établissement d’une gouvernance unipolaire du monde. La volonté de sortir de l’influence occidentale et de celle du dollar par le biais de nouvelles institutions séduit le reste du monde. Une preuve de cette attractivité nouvelle est le nombre de candidatures important à l’entrée dans le groupe des BRICS : six nouveaux pays intégreront le groupe dès janvier prochain. Une ferveur qui rappelle celle qui a accompagné le lancement du Mouvement des Non Alignés dans les années 1950.

Pourtant, la victoire des BRICS n’est pas totale. Comme son prédécesseur, le groupe des BRICS manque de cohérence et il sera difficile de renverser l’ordre établi rapidement. Malgré les oppositions frontales entre les BRICS et les Occidentaux concernant le commerce, la gouvernance globale ou le changement climatique, les réalisations concrètes manquent alors que la Nouvelle Banque de Développement fondée en 2014 reste la seule réalisation des BRICS pour le moment…

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En effet, il ne suffit plus uniquement de s’opposer au modèle occidental, même si cela est bien accueilli dans les pays qui refusent le modèle que l’on cherche à leur imposer, mais il faut offrir des solutions concrètes. De plus, les oppositions internes sur la stratégie à l’égard de l’Occident, principalement entre la Chine et d’autres pays plus modérés, mettent à mal les ambitions du groupe. Les nouvelles adhésions pourraient accentuer tout cela avec des différences de régimes, de cultures ou d’affinités.

L’Occident battra-t-il longtemps en retraite?

Face à un basculement des rapports de force au profit des BRICS, l’Occident avance désuni. Sur l’Ukraine, si l’opposition à la Russie a suscité une réactivation de l’OTAN, cela s’est fait à la faveur de l’action de Joe Biden au service des intérêts américains. À titre d’exemple, les livraisons de F16 à l’Ukraine ont été rendues possibles par l’accord américain. Pourtant, les intérêts des États-Unis et de l’Europe s’éloignent progressivement, notamment quant à la défense du Vieux-continent ou encore concernant des dossiers économiques comme l’énergie ou la réindustrialisation – avec la menace sur l’industrie européenne que fait peser la loi américaine Inflation Reduction Act (IRA).

Concernant les relations avec les pays du Sud, les coups d’État au Niger et au Gabon ont placé l’Afrique sur le devant de la scène, comme en témoigne l’adhésion de l’Union africaine au G20. Seulement, la situation au Niger révèle une volonté de dégagisme des puissances occidentales, notamment la France, symbole d’un modèle qui ne suscite plus autant d’intérêt.

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Toutefois, les Occidentaux ont encore des cartes en mains. Ils espèrent en effet jouer sur les dissensions au sein des BRICS, entre la Chine et l’Inde, pour arriver à leurs fins et exister dans l’Indopacifique. À ce titre, encourager les envies de puissance de l’Inde semble être une bonne idée – c’est ce qu’ont pu faire Joe Biden, Emmanuel Macron ou même Ursula Von der Leyen. La rivalité entre l’Inde et son voisin chinois est la clé pour empêcher la prise d’influence globale des BRICS et de Xi Jinping sur la zone, dont les vues hégémoniques ne plaisent pas en Inde. En effet, on observe un regain des tensions diplomatiques entre les deux pays, alors que la Chine a publié il y a quelques semaines une carte dans laquelle elle annexe des régions indiennes. De plus, sur le plan économique, la Chine traverse une crise structurelle, lorsque l’Inde se porte à merveille avec une population jeune et une économie qui croît (7% de croissance sont attendus cette année) ce qui en fait un allié de choix. La mort de l’Occident n’est pas pour aujourd’hui, mais de profonds décalages existent entre ses attentes et celles du reste du monde. Faute de remise en cause et d’action de sa part, l’avenir du monde pourrait bien s’écrire sans lui.


Pierre Clairé* et Sean Scull**

*Directeur adjoint des Études et spécialiste des questions internationales et européennes.
**Analyste au Millénaire.

Guerre en Ukraine, droit d’inventaire

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Deux femmes devant un immeuble bombardé par les troupes russes, Izioum, Ukraine, 10 septembre 2023 © Ukrinform/SIPA

Après l’espoir de la contre-offensive ukrainienne, le temps des désillusions pour les soutiens de Kiev.


La réaction occidentale à la guerre en Ukraine a eu des conséquences désastreuses pour les peuples européens. Souvenons-nous. Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, nous étions en pleine euphorie post-Covid. La croissance de 7% était au rendez-vous, l’économie reprenait, les taux d’intérêt étaient proches de 1% ; le « rebond » allait permettre de gommer le passé récent et l’optimisme était de mise. Et puis patatras. Suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les États-Unis et l’Union européenne ont décidé de faire de ce conflit territorial limité, dont les conséquences pour l’Europe et le monde étaient difficiles à mesurer, un enjeu moral et géopolitique majeur. L’Occident ne doutant pas de lui-même, la crise serait courte et, bientôt, la Russie à genoux. Droit dans ses bottes, l’impayable ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, annonçait « l’effondrement de l’économie russe ». Quant à l’armée russe, elle serait tellement obsolète qu’il suffirait de donner à l’armée ukrainienne quelques matériels de haute technologie pour qu’elle aussi s’effondre.

L’économie russe plus résiliente qu’escompté

Dix-neuf mois et onze trains européens de sanctions plus tard, – des sanctions d’une « efficacité redoutable » selon le même prescient Le Maire en mars 2022 – l’économie russe est, certes, en difficulté mais ne s’est nullement effondrée et fait même preuve d’une étonnante résilience. Ce sont les économies européennes qui sont en (quasi) récession et une inflation inédite depuis les années 70 touche de plein fouet les ménages. Les Européens se sont souvent trouvés confrontés à des choix que l’on croyait révolus entre se chauffer et se nourrir correctement ! Contrairement aux illusions européennes, seuls les pays occidentaux ont adopté des sanctions, le reste du monde n’a pas suivi et continue à entretenir de bonnes relations avec la Russie, les grands pays comme l’Inde, le Brésil ou encore l’Arabie Saoudite, restant prudemment neutres et tirent profit économiquement des sanctions.

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La contre-offensive ukrainienne qui, selon les experts de LCI, ne devait être qu’une formalité, a échoué au prix de dizaines de milliers de morts et de blessés ukrainiens dont des milliers d’amputés qui resteront marqués à vie. C’est une boucherie que les chaînes de télévision refusent de nous montrer mais que l’on peut voir sur Telegram. Chaque avancée d’un kilomètre carré coûte inutilement des centaines d’hommes. En les envoyant sauter en vain sur des mines, Biden et Zelensky se comportent de manière irresponsable. Les mêmes qui se demandent comment on a pu envoyer les poilus à la mort dans des offensives absurdes, refusent de voir qu’il s’agit de l’équivalent moderne des assauts de 14-18. Comme à cette époque, la propagande nous aveugle sur la réalité de cette guerre et les échecs de l’armée ukrainienne. De couteuses offensives sont présentées comme des percées prometteuses avant de retomber dans l’oubli médiatique.

On ne parle plus du pipeline Nord Stream

Sans vision stratégique et sans grands succès tactiques, les lignes rouges militaires (missiles à longue portée, chars, avions de chasse,…) ont été allègrement franchies les unes après les autres. Personne ne s’indigne plus de l’usage par l’Ukraine d’armes à sous-munitions, extrêmement létales, interdites par le droit européen, pas plus que de projectiles à uranium appauvri dont l’impact sur la santé suscite des interrogations. Quant au danger de recours à l’arme nucléaire, il semble oublié. Ksenia Sobtchak, une opposante à Poutine, n’a pourtant pas tort en affirmant qu’il pourrait y recourir. À cet égard, il est heureux que la contre-offensive ait échoué, la question de son utilisation en cas de recul russe perdant provisoirement de son actualité, mais l’Occident ferait bien de se souvenir que la menace nucléaire est toujours bien réelle et qu’une nouvelle guerre mondiale n’est pas exclue. 

Sur le plan géopolitique, l’Union européenne confirme son rang de nain. Elle supporte le poids des réfugiés, l’inflation, les coûts exorbitants de l’énergie et paiera pour la reconstruction de l’Ukraine pendant que les États-Unis font tourner leurs usines d’armement à plein régime et profitent de la hausse des prix du gaz et des céréales. L’Allemagne et l’Union européenne ne semblent nullement pressées de dénoncer les coupables de l’acte de terrorisme international contre leurs infrastructures, les pipelines Nord Stream. Qu’il s’agisse des États-Unis, de l’Ukraine ou des deux, le silence européen à ce sujet est incompréhensible et humiliant. Apparemment, même poser la question serait incongru, comme le montre une vidéo d’un parlementaire belge s’attirant les quolibets de l’assemblée. Où sont les unes indignées des journaux dénonçant ce scandale d’un allié détruisant une infrastructure clé d’un pays ami ?

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Tout cela pour l’Ukraine, un des pays les moins démocratiques de l’Europe, sans presse libre, dominé par des oligarques, réprimant sa minorité russophone depuis le coup d’État de 2014 et détournant les aides massives qu’elle reçoit des contribuables occidentaux. Un pays avec à sa tête un comique vulgaire, qui comme dans la chanson de France Gall « jouait du piano debout » mais avec son sexe, devenu le pantin des Occidentaux et se comportant en véritable autocrate détenteur de tous les pouvoirs. Avec un pays exsangue, de plus en plus vide et aux infrastructures détruites, à l’heure où de plus en plus d’hommes ukrainiens cherchent par tous les moyens à échapper à la mobilisation (et on les comprend, mais ils n’ont pas droit à la compréhension médiatique des fusillés de 1917 !), que sait-on de la volonté du peuple ukrainien de continuer dans cette folle logique guerrière ? Sans minimiser le défi qu’elle représente en pleine guerre et avec plus de 12 millions de déplacés, l’élection présidentielle prévue en mars 2024 aura-t-elle lieu et donnera-t-elle la possibilité à un candidat de la paix de se présenter ?

Hélas, malgré l’échec patent de la stratégie actuelle, l’Occident a été trop loin pour reconnaître son erreur de départ et procéder à un aggiornamento. Il faut donc s’attendre à plus de morts, plus d’armements sophistiqués livrés à ce régime jusqu’au-boutiste, à des prix (surtout de l’énergie) élevés et fluctuants ainsi qu’à une accélération de la perte de l’influence occidentale dans le monde. Rarement, on aura vu des gouvernements européens se moquer à ce point de l’intérêt de leurs propres peuples. Il y a donc peu d’espoir, sauf si l’opinion américaine venait à rejeter massivement le soutien à l’Ukraine, comme elle a en son temps cessé de soutenir des guerres qui se sont toutes mal terminées, au Vietnam, en Irak et en Afghanistan. À bon entendeur…

Le bantoustan français

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Lyon, 11 septembre 2023 © Mourad ALLILI/SIPA

L’abaya, insiste Jean-Paul Brighelli, n’est qu’un symptôme. La cause, c’est l’éparpillement façon puzzle de ce qui fut jadis une république « une et indivisible ». Eclatée en « communautés », la France n’a plus d’ambition d’assimilation, ce qui fut le cœur de son destin au fil des siècles. Explication.


Je sors de chez moi, à Marseille. Cent mètres plus loin, c’est le bas de la Canebière : foulards islamiques, abayas, djellabas et autres tenues outremarines envahissent l’espace et s’y déplacent comme chez eux. Ici, une femme sur trois est voilée, un homme sur quatre affronte en babouches la crasse de la rue. On entend parler essentiellement ce nouveau créole fait de bouts de français, de quelques mots d’arabe, de langues berbères et africaines. Je devrais m’en fiche. Après tout, je vis dans une ville dont un quartier s’appelle les Catalans, dont la rue Paradis et Beaumont sont peuplés de descendants d’Arméniens, où les Juifs séfarades sont légion, où les ex-Corses pullulent, où Kurdes et Turcs se regardent en chiens de faïence tous les samedis sous l’ombrière du Vieux-Port. Une ville fondée par des Grecs, peuplée de Gaulois, de Romains, de barbares divers, et de toutes les nations de la Méditerranée. Que me chaut ?

Les joueurs de rugby n’ont pas de problème avec la Marseillaise, eux

Le problème, c’est que, des siècles durant, ces étrangers qui bourlinguaient dans tous les dialectes et apprenaient par hasard des bouts de provençal faisaient de leur mieux pour s’intégrer, dès qu’ils choisissaient de se sédentariser. Ils envoyaient leurs enfants à l’école, entraient dans l’administration, la marine ou l’industrie — et faisaient souche. Ainsi se construit un grand peuple. C’est d’ailleurs un mélange de toutes ces origines qui en 1914 partit sur le front de l’Est — les monuments aux morts en témoignent.

Posons d’emblée une question qui fâche : combien de Marseillais aujourd’hui — j’entends de gens qui vivent dans la cité phocéenne, qu’ils y soient nés ou non — seraient prêts à mourir pour la France ? Combien pour réciter ces vers de Corneille :
« Mourir pour le pays est un si digne sort
Qu’on briguerait en foule une si belle mort. » (Horace, II, 3)

Combien pour résister comme les gens de Manouchian ? Combien pour entonner la Marseillaise ?

Ça a commencé avec Christian Karembeu, refusant au nom des Kanaks de chanter l’hymne de la République : il aurait dû être viré immédiatement. Lui, et tous ceux qui boudaient ostensiblement l’hymne national. Avez-vous remarqué, ces jours-ci, que les joueurs de rugby n’ont aucun problème avec la Marseillaise ? Le foot est un sport pourri d’enfants gâtés pourris.

Libé, en revanche, a un problème avec le rugby. Toute la gauche conformiste (pléonasme !) est tombée comme un seul homme sur la pantomime qui, à l’ouverture de la compétition, a mis en scène un Jean Dujardin à béret et une Française d’opérette. « Allez la Rance ! » a titré cet organe indiscret de l’islamo-gauchisme — l’internationalisme libéral s’est glissé sans encombre dans les habits douteux du trotskysme. « Carte postale sépia d’une France qui sent la naphtaline ». Le journal fondé par Sartre a-t-il la moindre idée de la France qui joue au rugby ? Ses journalistes passent-ils le périphérique ?

Ça a continué lors d’un France-Algérie de sinistre mémoire, où la Marseillaise fut carrément huée par l’assistance à majorité maghrébine. Chirac a choisi de partir. Il aurait dû faire évacuer le stade, et ne réintégrer les spectateurs qu’après leur avoir fait passer un examen de bonnes mœurs patriotiques. Comme les Siciliens lors des Vêpres siciliennes, pour trier les vrais insulaires et les Normands envahisseurs. Que des Algériens soutiennent l’équipe de leur pays, à la bonne heure ! Mais que des descendants d’Algériens, immigrés de troisième ou quatrième génération, en fassent autant, alors qu’ils sont Français, c’est une autre histoire.

Le salafistes de plus en plus visibles

C’est la nôtre. Incapables d’intégrer à la nation les enfants qui nous sont confiés, grâce à des programmes absurdes, des profs manipulés par les pédagogues qui les (dé)forment, des associations financées par le ministère qui viennent faire des « interventions » dans les lycées et collèges pour vendre l’intersectionnalité des luttes, et des salafistes qui œuvrent de plus en plus à visage découvert, les petits Français d’origine étrangère retournent à leurs pseudo-racines (ils sont nés ici, dans leur immense majorité), comme des vignes mal taillées retournent à la jungle. Comme les enfants livrés à eux-mêmes, dans Sa Majesté des Mouches, retournent à la barbarie. C’est sur le front de l’Education que nous avons perdu la guerre.
Nous devons lancer une contre-offensive, et prêcher désormais la tolérance zéro. Tu tiens à venir en abaya ? Ta prime de rentrée est supprimée. Tu refuses de faire des devoirs parce que c’est le ramadan ? Ta bourse est supprimée. Tu te lances avec les autres racailles de ton quartier dans des opérations de soldes sauvages ? Tes allocs sont indéfiniment différées. Le facteur économique est déterminant en dernière instance, comme disait le regretté Karl Marx.

Certes, un détenu sur quatre, en France, est étranger. Mais cela ne représente guère que 18 000 personnes — qui encombrent les prisons parce qu’elles n’usent pas de la possibilité de libération préventive, de peur d’être renvoyées dans leurs pays d’origine. Qui d’ailleurs rechignerait à les reprendre : imaginez-vous que Cuba aurait accepté de récupérer les voyous que le gouvernement castriste a expédiés aux Etats-Unis — rappelez-vous le début de Scarface

Faire porter aux seuls immigrés (au sens plein du terme) la responsabilité de la décadence française est une hallucination qui a coûté cher à Zemmour, aux présidentielles — et qui lui coûtera cher aux Européennes. Toute monomanie se paie cash.

Le massacre de l’égalitarisme

Le problème, ce sont les Français. Français de toutes origines, auxquels on n’enseigne plus la langue ni l’Histoire de ce cher vieux pays. Que l’on parque dans des collèges-ghetto, au lieu de les trier, de les sélectionner, de les faire passer à la moulinette de l’élitisme républicain, au lieu de les massacrer à grands coups d’égalitarisme.

Je suis pour une vraie mixité — une mixité pédagogique, par classes de niveau, avec des programmes adaptés, dans le seul objectif d’amener chacun au plus haut de ses capacités. Avec port de l’uniforme au besoin. Et apprentissage de l’hymne national : les petits Américains, pourtant fort diversifiés, questions ethnies, connaissent par cœur le Star Spangled Banner. Quant aux profs qui refuseraient de l’enseigner, inscrivons-les à un stage gratuit de cinq ans dans les rizières camarguaises, le temps de faire leur autocritique…

Sinon demain, à Marseille et à Saint-Denis d’abord, et dans toute la France ensuite, la charia vous expliquera de quel bois elle se chauffe — et édifie des bûchers.

Macron en fait-il trop?

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Le président en déplacement au Bangladesh, 11 septembre 2023 © Jacques Witt/SIPA

Notre président de la République serait-il « too much » ? La personnalité d’Emmanuel Macron est un sujet inépuisable pour notre chroniqueur.


À ceux qui pourraient me reprocher de négliger le fond de la politique d’Emmanuel Macron, je répondrais que celle-ci est tellement fluctuante, contradictoire au gré des tactiques et des circonstances, qu’il ne me semble pas choquant de laisser de côté dans ce billet ce qui relève d’un frénétique opportunisme. Alors que plusieurs événements d’importance inégale, sur le plan national comme international, justifient au contraire qu’on focalise sur la psychologie de notre président de la République qui semble toujours aller un peu trop loin, sans privilégier la mesure, la discrétion voire le silence quand ils seraient, à l’évidence, nécessaires.

L’affront africain

Beaucoup d’initiatives d’Emmanuel Macron me paraissent en effet avoir pour dénominateur commun l’irruption d’une subjectivité impérieuse, dans un univers où la rationalité et le bon sens devraient être de mise. N’oublions pas que ce président nous a promis, comme ses prédécesseurs, une France unie, rassemblée mais que jamais, lors de son départ, elle ne sera plus fracturée.

Sans disposer de toutes les lumières, je n’ai pas l’impression qu’en Europe, il ait suscité une adhésion admirative, cette dernière ne pouvant provenir que d’actes et de propositions objectivement pertinents. Emmanuel Macron engendre au contraire l’hostilité de certains pays à cause d’une affirmation trop élogieuse et surestimée de soi et de son rôle. L’affront du Maroc refusant l’aide de la France, malgré un désastre humain et matériel incommensurable et l’acceptation du soutien d’autres pays, ne relève sans doute pas seulement d’une exclusive considération de la France pour l’Algérie mais de la dégradation des modalités personnelles de relations qui, longtemps, au-delà de l’urbanité diplomatique, pouvaient être qualifiées (sans illusions toutefois) d’amicales. La récente débandade africaine, tant au Mali qu’au Niger et au Gabon, avec la crainte d’autres bouleversements, n’est-elle pas liée en grande partie au tempérament de notre chef d’Etat qui a souvent une posture à contre-temps – il se cabre quand il faudrait feindre de plier, il se soumet lorsque la résistance serait bienvenue ?

Moi, moi, moi…

Les épisodes qui, dans une quotidienneté et un climat démocratiques, démontrent l’irrésistible intrusion de son « moi », sont multiples. Par exemple, l’invention de ces gadgets liés à de la pure communication : le Conseil national de la refondation, les conventions citoyennes et tant d’autres billevesées qui n’ont absolument pas pour vocation d’être utiles à la République mais seulement de projeter la lumière sur leur concepteur. Avec une volonté forcenée de fuir les processus ordinaires, notamment parlementaires, parce qu’ils contredisent l’expansion de soi (malgré le soutien d’un groupe inconditionnel) à cause de cette déplorable majorité relative… L’abus du 49-3 est la revanche, aussi constitutionnelle qu’elle soit, d’un ego contrarié.

A lire aussi, Nicolas Lévine: Ouverture du Mondial: pensez-vous sincèrement que Macron a été sifflé pour le 49-3?

On verra si « les Rencontres de Saint-Denis » entrent dans la catégorie des aréopages inutiles, faussement consensuels, visant à flatter leur initiateur ou si elles auront des conséquences opératoires : en tout cas LR a décidé d’être optimiste.

Jamais peur du ridicule

Ses voltes seraient amusantes si elles ne révélaient pas que la seule certitude d’Emmanuel Macron est qu’il vaut plus que les autres et que donc ses embardées ne sont jamais ridicules puisqu’elles émanent de lui ! Ainsi, il fait exclure d’abord de l’arc républicain, sur le plan parlementaire, LFI et RN avant de décréter, les Rencontres passées, qu’il « faut associer toutes les forces politiques, y compris les extrêmes. Il ne faut pas les boycotter mais les affronter les yeux dans les yeux ». Qu’importe que la grandiloquence succède au mépris et que le point de vue ait radicalement varié : ce qui compte est la seule unité apportée par l’arbitraire du président !

Pour rejoindre des moments plus dérisoires, comment apprécier l’intervention d’Emmanuel Macron venant, avant le début de la Coupe du monde, encourager au nom du pays l’équipe de France, autrement que comme la prestation un zeste ridicule d’une personnalité incapable de rester à sa place, Emmanuel Macron se prenant quelques minutes pour Fabien Galthié ! Il est navrant de constater que l’intelligence n’apprend pas la réserve : parfois elle l’empêche. Dans le même ordre, qu’avait-il besoin d’introduire de force son « je » avant le début du match France-Nouvelle-Zélande, dans la proclamation de l’ouverture d’une Coupe du monde, alors que son silence aurait eu infiniment plus d’allure que cet ostentatoire exhibition de soi ? D’où les huées et les sifflets – qui n’ont certes pas donné au monde une belle image du lien de la nation avec son président – explicables par le sentiment collectif d’une forme de surabondance… Je pourrais continuer mon analyse par la relation d’autres épisodes graves ou futiles qui tous placent le caractère du président au centre du jeu parce que son « je » ne conçoit pas de s’effacer, même pour les causes que sincèrement il défend. Ce tempérament « too much » qui l’incite sans cesse à sortir du cadre, à rompre l’équilibre délicat entre l’exercice de la fonction et le narcissisme du rôle, qui fait de lui un des présidents les plus autoritaires et solitaires (ce qui va de pair) de la Ve République, lui est propre. S’il fallait tenter une comparaison, il n’aurait pas été absurde de songer à Nicolas Sarkozy (qui a été aussi « too much »), mais il me semble que chez lui l’excès, les débordements, se rapportaient plus au besoin d’action et à son énergie qu’à la dilection de son être. À lire ce billet, j’espère échapper au grief lassant de ne m’intéresser qu’à la personnalité de nos présidents, aujourd’hui d’Emmanuel Macron. Pour celui-ci, rien n’est compréhensible sans les ombres et les lumières de son être, sans l’implacable fatalité qui le conduit à confondre le légitime pouvoir qui lui est dévolu avec le narcissisme impérieux et superfétatoire dont il se repaît. Si Emmanuel Macron est souvent mal-aimé, c’est à cause de cette méprise.