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Une rave de cauchemar

Gal Levy est un miraculé. Il dansait au Festival de Reïm, le 7 octobre, quand les tueurs du Hamas lui ont tiré dessus. Blessé, il est resté caché des heures durant. Nous l’avons rencontré à l’hôpital Sheba de Ramat Gan.


Il revenait d’Amérique du Sud où il avait passé quelques semaines après l’armée. Le pire qui pouvait arriver, pensait-il, c’était une rave party qui tourne au mauvais trip sous acide. Mais c’est la mort et la terreur qui se sont invitées au petit matin du samedi 7 octobre, au Festival de Reïm. J’ai rencontré Gal Levy au cours d’un voyage organisé par le KKL pour permettre à des journalistes de comprendre et de témoigner sur cette journée de barbarie antijuive.

C’est à l’hôpital Sheba, à Ramat Gan, où il est toujours soigné pour ses blessures, que Gal, 24 ans, nous a raconté cette matinée de terreur, la pluie de roquettes, l’assaut du Hamas et la fuite éperdue vers un abri de fortune.

À la bordée d’un bois, il est touché à la jambe par une balle. Il trouve refuge dans une construction sommaire mise en place par l’organisation du festival pour la vente des places de concert. Couché avec d’autres inconnus, dans les cris, la peur et les coups de feu, il se fait un garrot pour sauver sa jambe et sa vie.

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Un terroriste pénètre alors dans l’abri et vole montres, argent et portables.

Par miracle le tueur ne revient pas. Dans l’après-midi, Gal et les autres sont délivrés par Tsahal. Mais près de 200 jeunes ont été massacrés, dont deux de ses amis. Aujourd’hui, il se protège en se tenant loin des informations. Nous reprendrons bientôt de ses nouvelles.

Avant que son téléphone soit volé, il a échangé des messages avec un ami. Il nous a autorisés à les reproduire.

« Où es-tu ? »
« À l’entrée. Là où on distribue les bracelets. On m’a tiré dessus. Je perds du sang. J’ai un trou dans la jambe. J’ai été touché par une balle. »
« Fais un garrot. »
Gal envoie une photo de sa jambe.
« Plus fort. Tourne avec un bâton. »
« C’est fait »
« Il faut presser fort. »
« Je suis en vie. Mais ils tirent tout près. J’ai vraiment peur. J’ai besoin d’aide. »
« J’ai envoyé ta position à mon père, il s’en occupe, reste avec moi s’il te plaît. Sois fort. »
« Nous sommes à l’entrée, 5 personnes. On a besoin d’aide. Il y a un terroriste à 5 mètres de moi. Je ne peux pas répondre au téléphone. »

Aujourd’hui, Gal se protège en se tenant loin des informations. Nous reprendrons bientôt de ses nouvelles.

Se tenir à côté des Juifs de France ne nécessitait pas de porter atteinte à la laïcité

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Faire allumer par le grand rabbin de France la première bougie de Hanouka dans la cour de l’Élysée. Le symbole se voulait fort. D’autant plus marquant qu’il était destiné à faire oublier le refus d’Emmanuel Macron de participer à la grande marche contre l’antisémitisme, alors que les Juifs subissaient un niveau d’attaques sans précédent. Le problème est que le geste piétine la laïcité sans répondre à la réalité des discriminations et des violences que subissent les Juifs en France. Plutôt que maudire l’obscurité, il vaut mieux allumer une bougie, nul ne saurait être contre. Mais quand on est au pouvoir, les bougies qui font reculer l’obscurantisme sont les actes que l’on pose. Et en la matière, comme dans beaucoup d’autres, la politique d’Emmanuel Macron est illisible.


Dans un contexte de montée de l’antisémitisme, que le président choisisse un symbole fort pour montrer à quel point les Français de confession juive sont chers à la France, était nécessaire et important. Le contexte politique l’exige. Déjà par le passé, les juifs qui ne représentent que 0,6% des Français, étaient les plus attaqués pour des motifs religieux. En année standard, si l’on ose dire, ils subissent environ 500 actes antireligieux par an, quand ceux-ci sont évalués à 1000 environ pour les chrétiens et 170 pour les musulmans. Par an. Mais depuis le 7 octobre, en deux mois environ c’est plus de 1500 actes anti-juifs qui ont été recensés.

L’explosion de l’antisémitisme liée au massacre perpétré par le Hamas

Et ce qui a boosté l’explosion de l’antisémitisme est le massacre atroce perpétré par le Hamas en Israël. Un crime contre l’humanité qui a vu des terroristes surarmés décapiter des bébés, brûler vifs des enfants, violer les femmes, abattre les hommes, torturer des familles entières, profaner des cadavres. Le Hamas s’est comporté en Israël comme les héritiers des nazis et au lieu de susciter l’horreur, cela a abouti à une décompensation antisémite sur notre sol. Une décompensation qui ne concerne pas tout le monde. La violence à l’égard des Juifs et des occidentaux plus largement est relayée à la fois par l’extrême gauche et les islamistes. Mais les Français dans leur ensemble ont compris le message : « après le samedi vient le dimanche ». Ils ont compris qu’ils avaient sur leur sol aussi des rejetons du Hamas. Ils ont payé le prix du sang pour le savoir : la violence islamiste tue chez nous, années après années, et nul n’est à l’abri.

Le résultat du travail de l’islam politique sur la communauté musulmane en France

L’explosion de l’antisémitisme lié à l’importation du conflit israëlo-palestinien témoigne du poids de l’islam politique dans la communauté musulmane. Ce travail de réislamisation à mettre au crédit des frères musulmans, se double d’un rejet de l’appartenance à la France et d’un refus de l’intégration. Et il ne concerne pas, hélas, qu’une infime minorité de musulmans. Une étude IFOP et Elmaniya.tv montre que ceux-ci jugent que la laïcité est discriminatoire envers les Musulmans (78%), 65% sont pour le port du voile et il y a un vrai décalage entre cette population et le reste des Français : 50% des Musulmans font primer la religion sur les enseignements de l’école (les élèves devraient pouvoir refuser les cours qui heurtent leurs convictions religieuses) et ils sont trois fois plus nombreux (16% contre 5%) à ne pas condamner totalement l’assassinat du professeur de Français à Arras. Un chiffre qui monte à 31% dans la jeunesse musulmane[1].

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Ce sondage tord le cou au discours politique sur « l’infime minorité » de musulmans en rupture avec les valeurs de la République. Il témoigne surtout du fait que le travail politique effectué sur cette population par les islamistes fonctionne et qu’il est temps que la République réagisse fermement.

La laïcité maltraitée

Que le président de la République veuille dans ce cadre se tenir aux côtés des Juifs de France a du sens, la question est : était-ce la bonne façon de faire ?

Dans une société fracturée comme la nôtre, où les questions religieuses, instrumentalisées notamment par l’islam politique, prennent une importance mortifère, comment vont réagir les représentants des autres religions à qui on oppose la laïcité pour expliquer que les symboles religieux n’ont pas leur place au sein de la République quand le président en installe un dans la cour de l’Elysée ? Comment comprendre la ligne politique d’un homme qui refuse de participer à une marche contre l’antisémitisme, car il craint de froisser la communauté musulmane en France, et qui dans le même temps fait allumer la première bougie de Hanouka à l’Élysée par le grand rabbin de France ? Quelle est la prochaine étape ? Si une mosquée se fait attaquer ou une femme voilée, bousculer, il fera quoi notre président ? Sacrifier un mouton pour l’Aïd dans le jardin de l’Élysée ?

« L’Élysée, ce n’est pas l’endroit où allumer une bougie. J’ai été surpris. Je me demande pourquoi Macron l’a fait, ce n’est pas son rôle » regrettait ce matin Yonathan Arfi, le président du Crif, au micro de Jean-Jacques Bourdin.

Cette erreur commise est d’autant plus agaçante, qu’une fois de plus, obsédé par son image, le président n’a pas réfléchi aux conséquences de ses actes. S’il veut envoyer un signal fort à la communauté juive, alors il peut faire afficher le visage de tous nos concitoyens massacrés le 7 octobre en Israël par le Hamas. Il peut afficher en grand sur nos édifices publics le visage des otages encore détenus à Gaza, exiger du service public audiovisuel qu’il ouvre les journaux en rappelant que certains des nôtres sont aux mains des terroristes islamistes.

Un énième pétard symbolique mouillé

Mais ce n’est pas ce qu’il a fait. Il a au contraire donné l’impression que la religion juive bénéficiait d’un privilège. Exactement… ce que met en scène le discours antisémite. Tout comme les victimes d’attentats méritent mieux que des nounours et des bougies de la part de leurs gouvernements, même déposés sous forme de paroles martiales désincarnées et de compassion larmoyante, les Juifs de France méritent mieux que des symboles qui peuvent encore se retourner à terme contre eux.

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On est une fois de plus devant le énième pétard symbolique mouillé de cette présidence chaotique. Si le gouvernement veut vraiment agir contre l’antisémitisme, il va lui falloir arrêter de se payer de mots et assumer le réel. Si l’on ne pose pas un diagnostic sur le fait qu’aujourd’hui, l’explosion de violence antisémite est majoritairement liée à un travail de radicalisation politique qu’organisent chez nous l’extrême-gauche et l’islamisme, alors on ne pourra agir. Si on utilise l’ultra-droite pour éviter d’affronter l’antisémitisme arabo-musulman, alors la condition des Juifs en France continuera de se dégrader. Pour combattre concrètement l’antisémitisme, il faut dire comment il se manifeste : militantisme sur le voile, prosélytisme religieux, refus d’intégration, détestation de la France vue comme esclavagiste et colonialiste, justification de la violence politique, importation du conflit israélo-palestinien idéalisé de façon messianique…


Un déni destiné à masquer l’impuissance

Or le gouvernement n’ignore pas ces réalités, mais s’il ne les affronte pas c’est que son déni lui sert à masquer son sentiment d’impuissance. Ces gens veulent réellement bien faire, mais ils pensent qu’ils ont déjà perdu le contrôle, que leur pouvoir est faible et que trop d’autorité ferait éclater une société déjà fracturée. Ils essaient juste de gagner du temps. Ils pallient l’impuissance par des mots et des images. Mais la réalité les rattrape et ils ne comprennent pas les symboles qu’ils manipulent. De ce fait ils échouent à en faire des repères, des représentations communes des idéaux. Nous en arrivons à être incapables de combattre le voile alors que notre modèle de société démocratique est basé sur l’égalité des droits des êtres humains au-delà du sexe, de la « race », de la philosophie, de la religion. Cet idéal est beau et exigeant et nous en arrivons à être mis en accusation au nom de la liberté religieuse de porter un signe qui refuse aux femmes l’égalité en droit. Ce refus de se plier à la loi commune au nom d’un particularisme religieux n’est simplement pas acceptable eu égard aux fondamentaux de notre contrat social.

Notre modèle de société n’est pas parfait ? Notre histoire a sa part d’ombre ? Certes. Mais quel est le modèle de société des islamistes, de l’extrême-gauche ? Daesh ? L’Iran ? La Terreur ? Que font-ils concrètement des libertés individuelles ? de l’égalité en droit ? Il est temps de nommer l’idéologie qui nous attaque et de la désigner comme à la racine de trop de nos difficultés. Ce combat est politique, judiciaire, policier, éducatif, culturel. Surtout culturel. Il commence par poser des mots. Pas pour faire joli. Pour reconnaitre le réel. Ce serait déjà un grand pas. Avec Elisabeth Borne et son « sentiment d’insécurité »[2] on peut douter que ce gouvernement soit en capacité de le faire.

Silence coupable

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[1] https://www.causeur.fr/ifop-dans-nos-ecoles-31-des-jeunes-musulmans-scolarises-narrivent-pas-a-desapprouver-totalement-lattentat-darras-271304

[2] https://www.causeur.fr/elisabeth-borne-la-premiere-ministre-nest-pas-a-la-hauteur-271283

La vie quotidienne à Prague au temps de la Shoah

Dans son roman Vivre avec une étoile, l’écrivain tchèque et juif Jiří Weil relate la période de sa vie durant laquelle il fut plongé dans la clandestinité.


L’écrivain Jiří Weil (1900-1959) fut confronté, sa vie durant, à la situation chaotique de son pays, l’ancienne Tchécoslovaquie, placée au cœur d’une Europe à feu et à sang. Dans les années 20, il est étudiant à Prague et fait une thèse sur Gogol. Membre du PC, il vit de travaux journalistiques et de traductions de textes marxistes-léninistes. Il traduit aussi de la poésie. Il subit le contrecoup des purges staliniennes, en 1935, date à laquelle il est exclu du Parti et envoyé dans un camp de rééducation. Quand il revient à Prague, il publie un témoignage fracassant, De Moscou à la frontière (1937), dans lequel il dénonce le totalitarisme soviétique. Lorsque les nazis envahiront son pays, en 1939, sa situation deviendra intenable, d’abord en tant que communiste, mais surtout en tant que Juif. L’énergie qu’il n’avait pas mise à fuir l’Europe de Hitler, il la mettra à survivre au quotidien dans une Prague exsangue. En 1942, sur le point d’être déporté à Auschwitz, il parvient miraculeusement à faire croire qu’il s’est suicidé. Cette invention, digne d’une fiction romanesque, lui sauvera la vie. Il survivra jusqu’à la fin de la guerre dans la clandestinité, et c’est cette période de sa vie qu’il relate dans ce livre, son plus fameux, Vivre avec une étoile, publié en 1949.

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Dans la lignée d’un Kafka

Ce roman de Jiří Weil fut remarqué et soutenu par la suite par de célèbres auteurs, comme Harold Pinter ou Philip Roth. On connaît la passion de ce dernier pour la ville de Prague et ses habitants, et en particulier pour ses écrivains. Pour Philip Roth, de même que pour Jiří Weil, la référence presque absolue en littérature, c’est Kafka. Roth a vu en Weil un héritier du Procès. Dans son intéressante préface au roman de son confrère, Roth insiste sur « le ton neutre dont se servait Weil pour communiquer sa haine des nazis et sa pitié envers leurs victimes ». C’est ce style kafkaïen que Weil va utiliser, de manière très inspirée, pour raconter la Shoah à Prague – pas encore la Shoah des camps, celle d’Auschwitz, mais la Shoah en amont, celle de la longue traque des Juifs dans la ville, le piège implacable qui se referme sur eux. De tous ces Juifs, en cavale dans leurs propres quartiers, bien peu réussiront à avoir la vie sauve, comme on sait.

Rejeté de toutes parts

Jiří Weil décrit la longue descente aux enfers de son personnage principal, Josef Roubíček, ancien employé de banque, possédant pour tout logement un trou à rat humide et glacial. Il n’a presque plus d’argent pour s’acheter de la nourriture. Au début du roman, il est seul et sans amis : « je ne recevais aucune aide de personne », confie-t-il. Il était amoureux d’une certaine Růžena, mais elle a réussi à s’exiler. Il lui parle quand même, dans le vide, comme si elle venait toujours le voir, il se raccroche au souvenir de cette silhouette évanouie. C’est tout ce qui lui reste, en réalité.

« On m’a chassé de partout, je ne peux plus partir nulle part. On veut me prendre cette chambre nue aussi, dans laquelle il pleut. » Il ne se fait plus d’illusions : « On va m’expédier vers une terre étrangère et là-bas, peut-être, on me tuera. Je ne crois pas qu’on me permettra de vivre. » Ses voisins à l’affût convoitent son misérable logis. Une femme lui dit : « votre baraque nous irait ». On a déjà entériné sa disparition définitive. L’étoile jaune qu’il doit coudre sur son vêtement, à la place du cœur, en est la préfiguration évidente.

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Solidarité et perspective de la déportation

Au fil du récit, Roubíček finit par rencontrer des personnages un peu plus bienveillants, qui lui apportent quelque secours matériel (de la nourriture), et du réconfort moral. Il se lie avec un ouvrier, Josef Materna, adepte de la solidarité entre travailleurs. Il revoit par hasard d’anciens amis juifs, qui se préparent à la déportation. Celle-ci se profile à l’horizon. Tous en parlent, ne sachant cependant pas exactement ce que cela signifiera pour eux. Ce sont en général juste des propos plus ou moins vagues : « Comme du bétail, explique quelqu’un qui croit être dans le secret. Ils les collent dans des wagons et les emmènent à l’est. Ils disent qu’on les évacue pour aller travailler. Mais ils prennent les vieux, les femmes, les enfants… » Jiří Weil évite de bout en bout les mots Juifs ou nazis, préférant rester dans le flou, et donnant ainsi à son récit une portée encore plus dramatique et plus universelle.

Dans Le Procès, Kafka employait pour ainsi dire le même procédé, poussé à l’extrême, n’indiquant ni le lieu ni le temps, ni rien de tangible, qui aurait pu sans doute rassurer le lecteur en lui suggérant que cela se passait ailleurs très loin. La prophétie de Kafka était déjà terrible. La description apocalyptique de Jiří Weil ne l’est pas moins. Il trace, au jour le jour, le sombre et réaliste tableau de cette fin du monde, de ce règne de la mort arrivant pour tout anéantir de la civilisation. Vivre avec une étoile est un roman essentiel pour comprendre ce qui s’est passé dans l’homme à cette époque encore récente. Cette intraitable leçon d’histoire nous concerne tous.


Jiří Weil, Vivre avec une étoile. Traduit du tchèque par Xavier Galmiche. Préface de Philip Roth. Éd. Denoël.

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Les chiens assaillent Depardieu, joyeux hallali!

Notre Gégé national est sous le feu des critiques, après la diffusion par France 2 de séquences filmées en Corée du Nord durant lesquelles l’acteur se montre assez odieusement grivois.


La soirée de chasse à mort commence par un “teasing” sur BFM TV, sur lequel je tombe par hasard pendant que ma chaîne favorite distille de la publicité racisée. Un certain Waleckx fait de la réclame pour son Complément d’enquête qui passera le soir même sur Antenne 2 à 23 heures. L’homme explique avec un sourire gourmand qu’il a récupéré le plus légalement du monde les rushes d’un film documentaire sur le voyage en Corée du Nord de Gérard Depardieu et Yann Moix. Ce film contient des images insoutenables prouvant que le vieil acteur est un des pires agresseurs et violeurs de femmes de notre époque, les soldats russes de Butcha et les terroristes du Hamas coupeurs de seins et extracteurs de fœtus à coups de couteau dans le ventre de leurs mères vont passer pour des garnements malpolis. Le jeune Waleckx a rapproché ces horreurs des accusations portées contre le vieux cerf par de jeunes biches pas si effarouchées que ça, il l’a rapproché de vieilles rumeurs que l’acteur lui-même aurait propagées sur sa folle jeunesse dans la jungle urbaine de Châteauroux. Et bingo, le puzzle assemblé a donné l’image d’un monstre ! Oubliez Crépol, oubliez Bir Hakeim, oubliez les kibboutz proches de Gaza, venez participer à la mise à mort de la bête.

Allusions sexuelles incessantes

Accepter une invitation en Corée du Nord pour les soixante-dix ans de cette belle république n’est certes pas le signe d’une conscience politique élevée. Faute morale qui ne tombe sous le coup d’aucune loi. La conduite de Gégé avec l’interprète coréenne est grossière, ses allusions au sexe de cette jeune femme sont incessantes, elle répond avec un sourire gêné. Commence alors la petite musique de l’omerta, personne ne critique l’inconduite de Gégé, ni en Corée, ni sur les innombrables tournages de film où il a travaillé. Gégé est au-dessus des lois, et on lui impute à crime la non-dénonciation par les autres…

La séquence du manège d’équitation me paraît le comble de la saloperie dénonciatrice. Une fillette de dix ans passe au galop devant lui. Il fait à Yann Moix un commentaire de corps de garde sur la jouissance éprouvée par les femmes quand leur clitoris se frotte à la selle d’un cheval cavalcadant. L’acteur ne touche nullement la fillette, ses paroles ne peuvent pas provoquer en elle un ressenti destructeur : elle passe au galop et ne comprend vraisemblablement pas le français, et encore moins le français fort épicé et libidineux parlé par Gérard. Mais le rapprochement fillette-propos salaces fait baver tous les chiens et on amène dans la clairière de l’hallali l’arme de destruction massive : la pédophilie ! Une vieille chipie précise : il a un imaginaire pédophile ! Après la police de la pensée, celle de l’imagination. L’imagination délirante est plutôt dans la tête de la chipie, puisque les réelles accusatrices de l’acteur sont des femmes adultes.

Complément d’enquête bat des records de crapulerie

Il faut le dire avec regret : le fameux documentaire coréen ne présente pas un monstre, mais un homme atteint de sénilité, qui rabâche ses obsessions sexuelles, ce qui encore une fois ne tombe sous le coup d’aucune loi. Mais notre société vogue joyeusement vers la criminalisation du désir masculin, surtout hétérosexuel mais parfois homosexuel comme le montre l’affaire Kevin Spacey, disons que les gays échappent un peu à l’intersectionnel. Jean-Louis Livi, l’ami producteur de Depardieu, qui intervient à la fin de ce Complément d’enquête qui bat ses propres records de crapulerie, avance une hypothèse. Le vieux cerf aurait des difficultés de rut, il ne couvrirait pas ses biches avec la même puissance qu’autrefois, et il bramerait son dépit par ces flots de grivoiserie.

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Entrée des violées. Les seules qui ont porté plainte en bonne et due forme. Les autres, toutes celles qui ne savent pas coller une gifle à un malotru ou, ne connaissant pas l’adresse du plus proche commissariat, préfèrent le tribunal médiatique, me paraissent des personnes dangereuses, à discréditer impérativement. Avec ces deux amantes de Gérard Depardieu qui ont porté plainte, c’est comme souvent parole contre parole, et dénonciations anachroniques. Je trouve dangereuse la phrase « les violées sont tellement sidérées qu’elles ne peuvent porter plaintes tout de suite ». Elle ouvre la porte à tous les faux souvenirs et à tous les chantages, principalement dirigés sur des hommes qui ont de l’argent. La première avait été doigtée, consentement, pas consentement ? Voir la problématique Vanessa Springora. La seconde, Charlotte Arnould, une petite jeune femme à l’air fragile qu’on a envie de protéger, a fait l’amour avec l’acteur chez celui-ci. Consentante, pas consentante, bien du plaisir aux enquêteurs. Mais voilà que huit jours après cette atrocité digne de Butcha ou des kibboutz, cette jeune femme, qui devrait avoir en horreur la rue Campagne-Première et tout le sixième arrondissement, retourne chez Depardieu et se retrouve dans ses draps, violée-pas violée. Personne n’a relevé cette incohérence. Dans l’affaire du cardinal Gerlier, on a reproché au prélat d’avoir couvert les agissements d’un prêtre dont la victime, un tout jeune homme majeur, s’était rendue à l’hôtel du violeur à Biarritz, y avait subi un sort terrible. À quelques semaines de là, le pauvre petit était remonté voir son prédateur dans une chambre d’hôtel de Lourdes. Le violé-reviolé et la violée-reviolée devraient être des personnages de vaudeville, ils sont les sujets d’attendrissement d’une époque très bête.

La télévision-délation

Dernier volet de la fresque assassine. Gérard aurait dit qu’à 9 ans, dans sa tumultueuse jeunesse castelroussine, il aurait participé plusieurs fois à des viols de jeunes femmes “qui n’attendaient que ça”. Aucune vieille dame de Châteauroux ne s’est réveillée soixante-cinq ans après les faits pour aller se plaindre de Gégé, mais ça viendra sûrement après l’émission du fouille-merde Waleckx. Il s’agit aussi d’une ignorance complète de ce que pouvaient être les garçons d’une époque moins pudibonde, où l’entreprise de dévirilisation des hommes n’était pas encore lancée par les féministes, où l’on riait plutôt de la vantardise masculine qu’on ne cherchait à la traîner en justice. La vantardise entre garçons, loin des oreilles féminines ! Toutes les filles que j’ai sautées ! Dès que j’entre dans un bal, elles tombent toutes à la renverse et on va voir la feuille à l’envers ! Bravo Waleckx, tu as raison d’arborer ton petit sourire carnassier ! Tu dégommes un grand acteur classé à droite, sa carrière est foutue. Tu te fais une grosse réputation dans le service public, ta carrière de sycophante sera splendide, tu fais oublier Crépol, Butcha, les kibboutz et l’islamisme ravageur. Coup double, triple, quadruple, quintuple !

Gérard Depardieu dans « Maigret » de Patrice Leconte (2022) © CINÉ-@ F COMME FILM et PASCAL CHANTIER – STÉPHANIE BRANCHU

IFOP: 31% des jeunes musulmans scolarisés n’arrivent pas à désapprouver totalement l’attentat d’Arras

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Abayas, terrorisme, laïcité: un sondage choc publié ce matin démontre que la jeunesse française musulmane se radicalise. 78% des musulmans jugent que la laïcité telle qu’elle est appliquée aujourd’hui en France par les pouvoirs publics est discriminatoire envers les musulmans. Nul ne peut désormais l’ignorer, une contre-société se dessine clairement


En France, l’islam fait débat sur tous les plateaux TV et fait régulièrement la une de bien des gazettes. Et les journalistes qui reprochent à leurs confrères de trop en parler en parlent eux-mêmes beaucoup. Alors, pour mesurer l’état des esprits en milieu musulman, la chaîne franco-arabe Elmaniya.tv1 (une chaîne lancée par d’anciens journalistes de la rédaction arabophone de France 24, et qui souhaite promouvoir « des valeurs laïques et humanistes aussi bien en France et dans le Monde arabe ») a commandé à l’IFOP une enquête2 pour cerner la place accordée par les musulmans de France à leur religion. Une enquête qui interroge aussi la réception des événements de ces dernières semaines, de l’interdiction de l’abaya à l’assassinat du professeur Dominique Bernard, et qui montre un décalage avec l’opinion du reste du pays. Un décalage qui ne se réduit pas parmi les jeunes générations, mais qui, bien au contraire, se creuse de façon inquiétante.

Lyon, 11 septembre 2023 © Mourad ALLILI/SIPA

Un îlot de religiosité dans une France athée

L’enquête a été réalisée auprès d’un panel de mille ressortissants musulmans – de nationalité française ou non – vivant en France métropolitaine. Les données ont été comparées à celles du reste de la population, que l’on qualifiera ici par facilité de lecture « les autres Français ». Les questions portent sur le rapport à la foi, le respect des principes religieux dans la vie de tous les jours ou encore le rapport à la laïcité à la française – bref, tout ce qui tracasse les Français en ce moment. Si 18% du reste de la population française se présente comme résolument athée (on trouve même parmi les adeptes des autres religions françaises un bloc de 12% d’individus se déclarant athées ; des « pratiquants non croyants » en quelque sorte), ils ne sont que 3% parmi leurs compatriotes musulmans à se reconnaître dans une telle case. Au contraire, 2/3 des musulmans de France se qualifient volontiers « croyants et religieux », contre 12% parmi l’ensemble des Français. En tout, 92% de la population musulmane se qualifie de religieuse, à des degrés divers. Sur un même territoire, coexistent donc une population très largement religieuse et une autre très détachée des choses du ciel.


Une divergence, sans trop de surprise, qui n’est pas sans effet sur le rapport à la science. Si plus de 80% des Français sont acquis à une explication scientifique de l’origine du monde, la population musulmane, elle, reste, à hauteur de 76%, attachée à une inspiration divine. Même les catholiques ou les juifs un peu sérieux ne suivent plus leur curé ou leur rabbin sur ces sujets et ont déclaré forfait face aux rationalistes sur ce terrain-là au moins.

Laïcité : un mot, deux définitions

Ce rapport différent aux choses du ciel se répercute dans la vie de la cité. Les musulmans divergent des autres Français quand il s’agit de donner une définition de la laïcité. Pour les musulmans, elle a pour enjeu premier d’assurer à tous la liberté de conscience et de mettre toutes les religions sur un pied d’égalité. Pour les autres, elle a aussi pour objectif de faire reculer l’influence des religions dans la société. Elle est en fait associée à la notion de sécularisation, trajectoire suivie avec plus ou moins de tumulte dans le pays depuis deux siècles et demi et qui a abouti à un effacement presque complet du religieux dans l’espace public.

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Avec des définitions aussi différentes, les évolutions législatives de ces dernières décennies n’ont pas été appréciées de la même façon selon que l’on se trouve en milieu musulman ou ailleurs. Pour 78% des musulmans, les lois de 2004 sur les signes religieux à l’école et de 2010 sur la burqa n’ont eu pour objectif que de les pointer du doigt et de les discriminer. Parmi les moins de 25 ans, ce chiffre monte à 80%.

Une divergence de point de vue qui tend à faire regarder nos compatriotes vers Metz et Strasbourg. Le sondage indique en effet que la population musulmane a les yeux de Chimène pour le Concordat de 1804, tel qu’il est encore appliqué en Alsace et en Moselle (passées à travers les gouttes de la loi de 1905, puisque rattachées au Reich allemand à cette époque), lequel permet le financement public des lieux de culte et des religieux. 75% des musulmans souhaitent son extension à l’ensemble du territoire, alors que l’idée ne séduit que 28% du reste de la population. Le sondage révèle toutefois une « lassitude » à l’égard du vieux laïcisme à la française parmi les jeunes générations puisque 60% des moins de 25 ans sont favorables à un retour au Concordat. Il y a une certaine ironie historique à constater qu’un peu plus de la moitié des sympathisants de LFI y sont favorables également, alors que l’abandon du régime spécial d’Alsace-Lorraine est une vieille revendication de l’extrême gauche laïcarde.


Les musulmans les plus éduqués parmi les plus revendicatifs ?

Il n’y a pas qu’à la cantine ou au moment d’enfiler son foulard le matin que ces différences se traduisent. Les uns et les autres ont en effet eu une lecture assez différente des événements de cet automne chargé. Quand 81% des Français approuvent l’interdiction de l’abaya et des qamis, 72% des ressortissants musulmans la désapprouvent. Et c’est la population musulmane la plus diplômée et la plus aisée socialement qui est encore plus hostile à cette décision ministérielle, puisque ce chiffre montre à 80% parmi les professions intellectuelles supérieures.

Arras, 14 octobre 2023 © FRANCOIS GREUEZ/SIPA

Enfin, le drame d’Arras d’octobre dernier, au cours duquel l’enseignant Dominique Bernard a été poignardé par un ressortissant ingouche, ne fait pas l’objet d’une réprobation totalement similaire. 91% des Français désapprouvent totalement ce geste, contre 78% des musulmans. On trouve parmi ceux-ci 6% à qui l’événement n’a fait ni chaud ni froid ; 5 autres pour cent qui ne le condamnent pas ; et un total de 16% qui ne le condamnent pas totalement ou qui peuvent comprendre une partie des motivations de l’auteur. Un chiffre bien élevé pour le meurtre d’un enseignant tué au hasard parmi plusieurs autres, et qui ne s’est même pas particulièrement distingué par le blasphème du prophète Mahomet ou autre reproche fait à Samuel Paty en 2020.


Plus inquiétants encore sont les effets générationnels mesurés par le sondage et le phénomène de durcissement des plus jeunes. Chez les 25-34 ans, on observe que 75% des musulmans se qualifient de « religieux », contre les 66% cités plus haut pour l’ensemble de la population musulmane. Si l’on observe finement les chiffres, on remarque, parmi les plus de 50 ans, une part importante de musulmans modérément religieux, plutôt en phase, pour le dire simplement, avec la rationalité occidentale, quand ces chiffres s’effondrent parmi les nouvelles générations. C’est comme si la population musulmane avait évolué de façon tout à fait opposée au reste du pays : alors que chez les catholiques, les mamies un peu bigotes ont dû accepter les mini-jupes de leurs petites-filles, parmi les musulmans, la tata restée dans les années 80 (SOS Racisme-Smaïn-saucisson) a dû apprendre à vivre avec ses nièces voilées. Chez les musulmans actuellement scolarisés, 31% n’arrivent pas à désapprouver totalement le meurtre d’Arras ! On l’a vu plus haut, l’acquisition d’un statut social confortable ne semble pas non plus être un vecteur de « désislamisation » ou de fléchissement, contrairement à ce que peut écrire un Arnaud Lacheret, très optimiste dans son dernier livre, Les intégrés. En fait, c’est comme si les ressorts de l’adhésion à la France, par la réussite matérielle et par les joies de la vie à la française, avaient largement échoué auprès de la population musulmane. N’est-il pas exaspérant d’observer tant de nos concitoyens issus de l’immigration maghrébine, dont les familles ont pourtant quitté les sociétés rétrogrades des pays d’origine pour trouver chez nous une vie meilleure et jouir de nos libertés, se faire à présent les agents de l’islamisation de la France ?

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  1. https://elmaniya.tv/ ↩︎
  2. https://www.causeur.fr/wp-content/uploads/2023/12/Synthese_Ifop_ElmaniyaTV_2023.12.07.pdf
    Étude Ifop pour Imaniya.TV réalisée du 21 au 29 novembre 2023 par questionnaire auto-administré en ligne auprès d’un échantillon de 1 002 personnes, représentatif de la population de religion musulmane vivant en France métropolitaine âgée de 15 ans et plus.  ↩︎

L’année lyrique parisienne finit en apothéose

L’opéra d’Offenbach, les Contes d’Hoffmann, à l’Opéra Bastille


« Belle nuit, Ô nuit d’amour, /souris à nos ivresses, /Nuit plus douce que le jour/ Emporte nos tendresses (…) / Zéphirs embrasés/ Donnez-nous nos baisers… » Etc. Sur le livret coquin du seul Jules Barbier (son fidèle compère librettiste Michel Carré, co-auteur de la pièce éponyme, étant mort en 1872) c’est la mélodie de la célèbre barcarolle vénitienne qui ouvre le 3ème acte des Contes d’Hoffmann. Millésime 1881, l’opéra posthume – et même inachevé – de Jacques Offenbach (1819-1880) est magnifié comme jamais par la prodigieuse mise en scène de Robert Carsen.  

Dispositif vertigineux

C’est que, produite en l’an 2000, sa régie, un quart de siècle après, n’a pas pris une ride. La mise en abyme – le théâtre dans le théâtre – demeure un motif récurrent chez le grand scénographe canadien. Sur le plateau de l’Opéra-Bastille, les rangées parallèles des fauteuils d’orchestre en velours rouge se balancent latéralement sur un rythme de valse, en miroir de la vraie salle : énorme partouze où s’abandonnent les spectateurs supposés d’une représentation de Don Giovanni. C’est avec ébahissement que le public de l’Opéra-Bastille découvre ce dispositif vertigineux. De bout en bout, le faste visuel des transformations architecturales du décor, passant des coulisses à la fosse d’orchestre, reste le premier régal de ce spectacle.

À lire aussi, du même auteur: Citius, altius, fortius

À travers le récit des trois amours passés d’Hoffmann, – Olympia, Antonia et Julietta – est merveilleusement exploitée la veine tout à la fois burlesque, allègre et teintée de mélancolie de la partition. Un des morceaux de bravoure étant sans conteste la chanson d’Olympia (« Tout ce qui chante et résonne/ Et soupire tour à tour/ Emeut son cœur qui frissonne/ D’amour ») que campe, irrésistiblement drôle en blanche automate carapaçonnée de bakélite, la soprano sud-africaine Pretty Yende. Si elle n’est pas à son meilleur dans les vocalises de haute voltige qu’exige le rôle, le ténébreux baryton-basse américain Christian Van Horn excelle quant à lui dans ses quatre costumes lucifériens. Angela Brower offre à la Muse son très subtil vibrato, malgré un phrasé qui manque de netteté ; Antonia, sous les traits de la soprano Rachel Willis-Sorensen, qu’on entendait chanter pour la première fois dans les murs de l’Opéra de Paris, dispense un timbre solidement charnu, ultra précis dans l’articulation, et ce jusque dans les aigus les plus redoutables.

Hallucinant Benjamin Bernheim

Mais surtout, surtout, le ténor francophone Benjamin Bernheim incarne un Hoffmann proprement inoubliable, tant dans la perfection vocale que dans la présence scénique : hallucinant ! Ce spectacle confinerait à la légende sans le bémol d’une direction orchestrale quelque peu métronomique et manquant cruellement de liant,  sous la battue rigide de Madame Eun Sun Kim, la directrice musicale de l’Opéra de San Francisco, originaire de Corée du Sud. Le ténor russe Dmitry Korchak, qu’on a entendu ici l’an passé dans La Cerenentola, relaiera Benjamin Bernheim dans le rôle- titre, à partir du 21 décembre, pour les trois dernières représentations. Autant dire que l’année 2023 promet de finir en apothéose – au moins à l’opéra…

Benjamin Bernheim – Photo: Emilie Brouchon Opéra national de Paris/Bastille

Les Contes d’Hoffmann. Opéra fantastique en un prologue, trois actes et un épilogue, de Jacques Offenbach (1881). Direction : Eun Sun Kim. Mise en scène : Robert Carsen. Orchestre et chœurs de l’opéra national de Paris. Avec Benjamin Bernheim/ Dimitry Korchak (30 nov., 9, 12, 15,18 déc./ 21, 24,27 déc.), Christian Van Horn, Leonardo Cortellazzi, Vincent Le Texier, Pretty Yende, Rachel Willis-Serensen, Antoinette Dennenfeld, Angela Brower…  Durée : 3h30

À noter que Les Contes d’Hoffmann sera diffusé le samedi 20 janvier 2024 à 20h sur France Musique dans l’émission « Samedi à l’opéra » présentée par Judith Chaine.

Jeunesse sans filtre

L’accès de la jeunesse à l’émission abrutissante et nocive « Frenchie Shore » inquiète. La ministre de la Culture, elle, s’inquiète prioritairement de l’existence des chaînes de Vincent Bolloré.


« J’aime pas trop embrasser », confie la jeune Kara. « Parce que tu préfères sucer ? » lui répond, goguenard, le jeune homme avec qui elle est en train de faire connaissance. La séquence inaugurale du premier épisode de « Frenchie Shore » donne d’entrée de jeu une idée assez précise du niveau de la nouvelle série de téléréalité mise à l’antenne sur MTV. On y retrouve une bande de dix jeunes exhibitionnistes dans une villa du Cap d’Agde. Si le ton humoristique et érotique est revendiqué, le programme a soulevé des questions quant à sa diffusion auprès des plus jeunes.

Dans le premier épisode, on peut assister à une scène de coprophagie (pour rire) ou faire la connaissance de Ouryel, jeune femme se revendiquant tout en plastique, et ayant visiblement hâte de faire la fête :« J’ai trop la dalle, ça fait un mois que je n’ai pas ken. J’aime le cul. Là où il y a de la bite, il y a Ouryel », nous apprend-elle, avant de défiler en string. Depuis, elle a fait son coming out trans. L’émission semble d’ailleurs être un concours permanent de twerk (toutes les participantes ont été recrutées pour leur énorme pétard), d’engueulades et de beuveries. C’est Loana sous amphétamines, et sans aucune censure.

A lire aussi : Les neuneus du peep-show

En réalité, dès l’apparition du Loft, en 2001, le ver était dans le fruit. Certains voulaient alors interdire la téléréalité, inquiets quant au respect de la dignité humaine. On aurait peut-être dû les écouter. « Frenchie Shore » est déconseillé au moins de 16 ans et présente des ébats sexuels. Interrogée sur la nocivité de l’émission, Rima Abdul Malak a déclaré que si « ce programme est déconseillé aux moins de 16 ans, n’importe qui peut tomber dessus sur les réseaux sociaux comme ça m’est arrivé ». Mais la ministre précise qu’elle se gardera « bien de commenter les choix des chaînes et des plateformes ». Le 9 février, elle était moins tendre avec les chaînes de Bolloré, se demandant « si la reconduction de la fréquence [de CNews et de C8] était justifiée ou pas ». Décérébrer la jeunesse tout en envisageant de museler les opinions conservatrices, ça nous dessine quand même une drôle de politique macroniste pour notre audiovisuel !

Bulletin de notes de Gabriel Attal: «encouragements» du conseil de classe!

Parents et enseignants sont invités à rester dans leur rôle, et les élèves à accepter le redoublement. Les annonces de Gabriel Attal sont très satisfaisantes, mais à confirmer dans leur application, prévient notre contributeur


Cela pourrait se résumer à chacun dans son rôle, enseignants comme parents, et chaque élève à son niveau, selon ses capacités et son mérite. Mes premières réactions aux annonces ministérielles sont globalement positives, même si bien entendu, au regard de la situation de notre école, j’en attendais davantage, comme toujours, car je souhaite ardemment un changement en profondeur.

Déjà, sur la forme, nous recevons un mail en fin de matinée, avant que le ministre ne s’adresse aux médias en début d’après-midi, ce qui conforte l’idée d’être mieux reconnus dans notre professionnalisme, et mieux considérés au plus haut niveau. Un changement que beaucoup de collègues apprécieront car nous avons très mal vécu l’absence totale de communication, notamment pendant les deux années du Covid, où nous prenions nos directives en suivant les chaînes d’informations ! Gabriel Attal s’adresse à nous en priorité, et l’exprime : « Mais c’est à vous que je m’adresse d’abord. A vous que je fais mes annonces. C’est pour moi tout à la fois une question de respect et l’expression d’une conviction forte : c’est avec les professeurs, par les professeurs, grâce aux professeurs, que nous relèverons le défi de l’élévation du niveau. »

Collège inique

Sur le fond, je préfère surtout commenter les principales mesures annoncées pour le primaire, mais il est évident qu’il fallait casser la spirale négative du collège unique. Les classes de niveau vont donc dans le bon sens, même si d’autres transformations sont attendues, notamment en matière d’orientation et d’alternance. Car il est manifeste que les élèves du niveau faible auront besoin d’être soutenus dans les apprentissages et encadrés pour envisager leur professionnalisation, donc choisir les orientations adaptées. Et là, nous savons bien que c’est LE point faible parmi les nombreuses défaillances de l’Éducation nationale.

A lire aussi, Elisabeth Lévy: Groupes de niveau au collège: la « Attal-mania » aura-t-elle raison de la bronca des profs?

Au sujet de l’école primaire, une mesure était particulièrement attendue, nous en parlions encore le midi même en salle des maîtres, à propos du redoublement. Laisser les parents décider au final de l’opportunité du redoublement – que l’on daigne enfin nommer alors qu’auparavant on l’habillait du doux euphémisme « maintien » – dénotait clairement de l’absence de reconnaissance du professionnalisme des enseignants et de la piètre place que la société leur accordait. Là, les collègues sont enfin reconnus et leur rôle est affirmé. Malgré tout, le redoublement ne peut pas être la solution à toutes les difficultés qui sont diverses et variées, et ne doit pas être source de conflits avec les familles. Car il apparaît toujours dans chaque situation difficile que le dialogue avec les parents et la clarification auprès de l’enfant/élève que sa famille et l’école ont le même discours et vont dans la même direction permettent de construire les bases de la progression de l’élève en rassurant l’enfant. Ainsi, je préconise un examen simple et assez court à faire passer aux élèves pour lesquels il y a désaccord entre l’école et les parents au sujet du redoublement. Cette épreuve écrite et orale de quelques heures au maximum, à effectuer en deux ou trois fois tout au plus, pourrait être sous la responsabilité de l’inspection de circonscription afin d’affirmer la neutralité dans la passation et l’évaluation de la situation scolaire. Cela permettrait de désamorcer les conflits et conforterait les deux parties, parents comme enseignants, car il est toujours très difficile d’être objectif sur la pertinence du passage ou non dans la classe supérieure. Nous savons souvent que les difficultés ne permettront pas à l’élève de suivre, mais nous savons aussi que le redoublement sera malheureusement souvent sans effet. Donc, une nouvelle fois se pose le problème de l’orientation et je suis intimement convaincu que c’est le sujet à traiter en priorité à l’Education nationale. A tous les niveaux, maternelle, élémentaire et bien sûr secondaire.

Retour aux fondamentaux

Des classes de niveau en élémentaire ne sont ni souhaitables ni envisageables, notamment en raison du faible nombre d’élèves de beaucoup d’écoles, mais nous pourrions tout à fait prévoir des classes passerelles qui permettraient à certains élèves de bénéficier d’une année supplémentaire, en faible effectif pour acquérir les notions de base de leur classe d’âge. Nous pourrions envisager deux classes passerelles, pas toujours dans la même école, l’une après le CE1, l’autre après le CM1, avant que les élèves concernés n’intègrent le niveau supérieur, donc le CE2 ou le CM2. Dans bien des cas, cela serait plus efficace, et pas nécessairement plus coûteux que de nombreux redoublements.

A lire aussi: IFOP: 31% des jeunes musulmans scolarisés n’arrivent pas à désapprouver totalement l’attentat d’Arras

La deuxième mesure principale pour l’école élémentaire concerne la lecture et les manuels scolaires, essentiellement en CP et CE1. Si j’estime que cela va dans le bon sens, j’ai malheureusement l’assurance d’être très minoritaire parmi les collègues. J’entends déjà certains hurler vivement : « Et ma liberté pédagogique ! » même si les mêmes ne savent pas souvent quoi faire de ladite liberté. Cela entérine également un retournement de position car depuis plusieurs années le discours officiel de la hiérarchie sur le terrain est très négatif au sujet de l’utilisation des manuels, ni manuel ni photocopie… donc il ne reste pas grand-chose. Évidemment, une nouvelle fois, les effets de cette mesure dépendront de son application et ainsi des manuels qui seront labellisés et financés par l’Éducation nationale, comme de l’utilisation – ou non – que les collègues en feront dans les classes.

En guise de conclusion de ces premières réactions « à chaud » j’ai une impression mitigée au sujet des contenus d’apprentissage. Si les changements de programme vont dans le sens d’une clarification au sujet des méthodes (très bien pour la méthode de Singapour en mathématiques) et du recentrage sur les matières fondamentales, les annonces ministérielles ne sont pas nettes au sujet des cycles. J’imagine que les attendus de fin d’année (et de mi-parcours) ajoutés à la possibilité accrue de faire redoubler les élèves actent la fin de la logique des cycles à l’école.

Malgré tout, nous attendions davantage de précisions afin d’avoir la certitude que nous en avons réellement fini avec cette absence de décision franche. Notre école a besoin de transformations profondes axées sur des éléments simples – programmes et organisation de la scolarité – clairs et communiqués à tous comme étant les nouveaux piliers, les repères stables et structurés à considérer pour enfin inverser la chute du niveau.

Citius, altius, fortius

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Pari(s) de la modernité, 1905-1925, une exposition au Petit Palais nous permettant de replonger dans des temps malheureusement révolus


Citius, altius, fortius : « plus vite, plus haut, plus fort ». Telle fut la devise choisie par les Jeux Olympiques de Paris, en 1924. Un siècle plus tard, le spectacle de la Ville-Lumière du premier après-guerre laisse rêveur.

Le Petit Palais s’est fait comme une spécialité de monter d’ambitieuses expositions patrimoniales combinant beaux-arts, art de vivre, documents d’histoire, matériaux de l’industrie et des techniques, en sorte de nous restituer l’air du temps de toute une époque. Ainsi la récente exposition Sarah Bernhardt ne se contentait-elle pas de retracer la carrière d’une icône : c’était une immersion dans un demi-siècle de vie française – mondaine, artistique, sociale.  

Quand Paris était aimable et rayonnante

Au prix d’un anagramme un peu facile, Pari(s) de la modernité, 1905-1925 enjambe la Grande guerre pour faire le grand écart dans cette vingtaine d’années qui, de la Belle-Epoque aux Années folles, propulse la capitale au rang envié de Ville-Monde, métropole somptueuse, aimable et rayonnante. En comparaison, le Paris poussif, bas de plafond et faiblard de l’ère – de l’aire – Hidalgo nourrit le regret de ce Temps perdu.

Temps illusoirement retrouvé, donc, à travers une manifestation qui vient clôturer un cycle commencé en 2014 avec Paris 1900, la Ville spectacle et continué en 2019 avec Paris Romantique (1815- 1858). Ce genre d’exposition « transversale » comporte un double risque : puiser indéfiniment dans le même réservoir d’œuvres et d’objets déjà montrés ou visibles dans les collections des grands et petits musées ; répéter la sempiternelle histoire dans un carambolage dénué de toute approche critique un peu neuve.

A lire aussi, du même auteur: Ubu en Roumanie

Cet écueil, ce « dernier volet » l’esquive de plusieurs façons. D’abord, en mariant chronologie et approches thématiques dans des sections où la géographie parisienne et ses quartiers (Montmartre, Montparnasse, les Champs-Elysées, le vaste périmètre où se tient l’expo Arts Déco en 1925, de la Concorde au Grand Palais) fixe la toile de fond d’une vitalité qui se décline dans l’industrie comme dans toutes les disciplines artistiques, mais aussi dans les mœurs libérales d’un Paris décidément moins pisse-froid que celui de 2023.

Tamara de Lempicka, Saint-Moritz, 1929 © ADAGP, Paris

Un parcours émaillé de belles surprises visuelles

Ensuite, à travers la palette subtile de la scénographie discrète et fluide signée Philippe Pumain, qui dispense un parcours habilement séquencé, émaillé de belles surprises visuelles, tel cet authentique aéroplane Depertusson type B de 1911 qui, rapporté du Musée de l’Air et de l’Espace, au Bourget, trône en majesté dans une salle. Ou encore, cet imposant Ours blanc, plâtre patiné sculpté en 1922 par François Pompon – un dépôt du Museum d’histoire naturelle au musée de l’Homme…  Mais surtout, l’exposition réunit pas mal de pièces issues de collections privées, ou extraites de fonds peu connus. Certes, on n’y verra pas Les demoiselles d’Avignon (1907) mais on ne translate pas depuis New-York un Picasso aussi iconique. En revanche, l’extraordinaire Charmeuse de serpents (1907) du Douanier Rousseau a pu quitter sa cimaise du musée d’Orsay, pour voisiner avec une robe « Minaret » signée Paul Poiret, toilette portée par la marquise de Luppé en 1911, et exhumée d’une collection privée. Ou un diadème de la collection Cartier, millésimé 1914. De plaisants dessins de Sem nous rappellent le scandale du « massacre du printemps » orchestré à l’occasion du fameux Sacre… de Stravinski.  On découvre au passage un joli portrait au feutre du poète Apollinaire signé du jeune Cocteau, des photos d’époque nous montrent le Paris de l’arrière, pendant la Grande guerre. Une toile de Vallotton, superbe, transportée du musée de l’Oise, nous dévoile les Soldats sénégalais au camp de Mailly, en 1917. La Victoire ouvre le temps des « Années folles » : baptisée Saint-Moritz, une merveilleuse petite huile de Tamara de Lempicka montre une skieuse en col roulé blanc et pull rouge vif qui fixe les pics alpins d’un air rêveur ; une étude de Jacques-Emile Blanche nous peint les traits du beau Radiguet, le poète du Diable au corps et du Bal du Comte d’Orgel ; Man Ray portraiture le travesti Barbette ; la Revue nègre rappelle que dans le Paris joyeux de Joséphine Baker il n’y a ni femmes voilées, ni ségrégation… L’alcool y est alors à peine moins prohibé que l’opium. La Ville-Lumière ne roulait pas encore tous feux éteints…

Béchereau, Deperdussin Aéroplane Deperdussin type B, 1911 © ADAGP, Paris

A lire aussi, Pascal Louvrier: Le bal de Radiguet

Préfacé par la maire Hidalgo avec toute la platitude de commande attendue – « Déjà Paris se distinguait comme capitale internationale de la culture et des arts » (sic) –  mais dirigé de main de maître par Juliette Singer, le catalogue de l’exposition rassemble des textes de belle tenue, qui restituent avec toute l’érudition requise l’esprit de ces temps révolus à jamais.  

A voir : Le Paris de la modernité, 1905-1925. Petit-Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris. Exposition jusqu’au 14 avril 2024. Du mardi au dimanche 10h-18h. Nocturnes les vendredis et samedis jusqu’à 20h. Informations et réservations sur petitpalais.paris.fr  

A lire : Catalogue de l’exposition, relié 368p. 280 illustr. Paris Musées.

Le Paris de la modernité

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Non aux crèches de Noël! Oui au Plug anal!

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Déconstruction. Nos responsables politiques sont excessivement tatillons avec nos jolies crèches de Noël. Alors qu’ils n’ont pas un mot pour les pires horreurs de l’art contemporain. Coup de gueule


Non aux crèches de Noël dans nos villes ! Oui au Plug anal de Paul McCarthy place Vendôme ! Oui aux Boîtes de merda d’artista de Manzoni dans nos musées ! Oui au Vomi et à l’Urine de Ben ! Oui au Vagin de la reine d’Anish Kapoor dans les jardins du Château de Versailles ! Oui à l’Urinoir de Duchamp ! Oui à la monumentale scène de zoophilie, Domestikator, de Van Lieshout devant le centre Pompidou ! Oui à l’érection géante de Mickey au Grand Palais ! Oui au Clitoris dressé comme une mante religieuse sur l’esplanade du Trocadéro ! Oui à la photo primée par la Fnac d’un imbécile s’essuyant les fesses avec l’emblème national ! Oui aux écrans de télévision montrant au CAPC de Bordeaux des enfants se masturbant !  Oui au chaos de pierres tombales déversées par Jan Fabre dans la galerie du Cycle de Marie de Médicis de Rubens au Louvre ! Oui aux pneus de tracteur installés à l’Opéra Garnier par Claude Lévêque mis en examen pour viols sur mineurs ! Oui au Christ en croix noyé dans l’urine à Avignon par Andress Serano ! Oui à la fellation de Miriam Cahn au Palais de Tokyo ! Et encore une fois, non aux crèches de Noël !

Inculture française

Allons plus loin ! Encourageons nos politiques à partager leur inculture française qui, elle, existe bien ! Oui à la nécessité de transmettre ces œuvres magistrales aux jeunes générations ! Oui au financement de la puérilité pour donner des repères à nos collégiens et pouvoir bâtir avec eux un monde adulte ! Oui à la sensibilisation des immigrés à ces joyaux de la création contemporaine pour favoriser leur assimilation ! Oui à cette vulgarité pour combattre la violence et « le risque de basculement de notre société » ! Oui à l’obscénité pour élargir l’approche multiculturaliste de notre nation ! Oui à une initiation décomplexée du sexe pour une appréhension plus ouverte des valeurs de la République ! Oui à la liberté d’expression mais surtout et d’abord au degré zéro de cette liberté pour laquelle serait mort Jean Moulin ! Oui à la vigilance des élus qui emboîtent le pas aux minorités agissantes par peur de porter l’infamie d’un retour à l’ordre moral ! Oui à leur bêtise ! Oui à leur lâcheté !

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Quand les Français comprendront-ils que lorsque des élus subventionnent la réalisation d’un projet dit artistique, c’est toujours sur fond d’élimination des autres projets en compétition ?  Que pleuvent sur leurs décisions les critiques, les quolibets ou les insultes, ils savent que le projet le plus vulgaire, le plus insignifiant, le plus coûteux sera protégé par la sacro-sainte liberté d’expression dont ils viendront se gargariser sur les plateaux de télévision avec des mines énamourées d’amateur d’art. Sans doute n’avaient-ils à examiner dans leurs commissions opaques que des projets encore plus indignes, plus insignifiants, plus coûteux que ceux qu’ils ont retenus. On va bien sûr les croire.

Ce petit monde pervers et corrompu se moque depuis des années des Français. Ne nous racontons pas d’histoire, c’est sur le plan culturel que les coups de boutoirs contre les fondements de notre société ont commencé d’être portés.  L’autorité s’est sabordée en se commettant avec la lie des impuissants et des prévaricateurs qui ont fait main basse sur nombre d’institutions. L’inquiétante progression de l’insécurité n’est pas tombée du ciel. À l’origine des graves dysfonctionnements dans un pays, on trouve toujours ses dirigeants.

La fronde de la Ligue des droits de l’Homme

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) vient de saisir le tribunal administratif de Montpellier pour demander la suppression de la crèche installée par le maire (RN) Louis Aliot. Sa présidente départementale assure sans honte que « la France et ses racines sont laïques et pas chrétiennes ». Rien d’étonnant, la LDH n’est nullement obsédée par la défense de la laïcité. Elle n’a en effet jamais saisi le tribunal administratif pour demander l’annulation de l’organisation par la Mairie de Paris de la « Nuit du Ramadan » dans les locaux de l’hôtel de ville. N’oublions pas que la LDH avait obtenu du Conseil d’Etat qu’il rappelle que la photo du jeune homme qui s’essuyait les fesses avec le drapeau français était, en tant qu’œuvre d’art, protégée par la liberté d’expression. Ne nous trompons pas, l’attaque récurrente contre les crèches de Noël est une attaque contre la France et les Français. Il s’agit d’un ressentiment à l’égard de ce que nous sommes, de ce que nous avons été, de ce qu’a signifié notre pays aux yeux du monde. « Carthago delenda est ! »

A lire aussi : Les ravis de la crèche

La liberté d’expression est dans notre pays l’enseigne d’une boutique où l’on trouve tout et son contraire. La politique culturelle dans une démocratie représentative consiste à laisser des assemblées d’élus ou des ministres faire les courses de leurs concitoyens à leur place. Au vu des vessies qu’on veut leur faire prendre pour des lanternes depuis des décennies et qui envahissent l’espace public, l’organisation de référendums ne serait pas pire. Elle ne serait pas non plus la solution. Il n’y en a qu’une, même si elle n’est pas satisfaisante : il conviendrait que ceux qui au sommet de l’Etat sont comptables des politiques culturelles sachent ce qu’ils disent, sachent ce qu’ils font.

Quand François Hollande donne une interview au Journal des arts le 30 novembre dernier, il fait comme Nicolas Sarkozy avec son livre Promenades. Tous deux se parfument l’âme pour faire oublier leur mâchoire de petit carnassier. Leur niveau de réflexion sur la culture laisse la voie libre à tous les petits malins qui ont appris à siphonner les crédits de la rue de Valois. « La culture est frondeuse par définition », déclare Hollande qui ainsi parle pour ne rien dire et joint la parole au geste d’hier. Le dimanche 2 avril 2017, il avait rendu visite au Palais de Tokyo à un nommé Antoine Poincheval qui venait de s’enfermer depuis quelques jours dans une cage en plexiglas pour couver une douzaine d’œufs. Ce fut la rencontre au sommet d’un « sans dents » étonné et d’un « sans tête » hilare. Nos misérables politiques, désormais sans aucune tenue, n’ont rien compris. Désemparés, ils regardent maintenant le sang couler dans nos rues.

Une rave de cauchemar

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Gal Lévy © Stéphane Edelson

Gal Levy est un miraculé. Il dansait au Festival de Reïm, le 7 octobre, quand les tueurs du Hamas lui ont tiré dessus. Blessé, il est resté caché des heures durant. Nous l’avons rencontré à l’hôpital Sheba de Ramat Gan.


Il revenait d’Amérique du Sud où il avait passé quelques semaines après l’armée. Le pire qui pouvait arriver, pensait-il, c’était une rave party qui tourne au mauvais trip sous acide. Mais c’est la mort et la terreur qui se sont invitées au petit matin du samedi 7 octobre, au Festival de Reïm. J’ai rencontré Gal Levy au cours d’un voyage organisé par le KKL pour permettre à des journalistes de comprendre et de témoigner sur cette journée de barbarie antijuive.

C’est à l’hôpital Sheba, à Ramat Gan, où il est toujours soigné pour ses blessures, que Gal, 24 ans, nous a raconté cette matinée de terreur, la pluie de roquettes, l’assaut du Hamas et la fuite éperdue vers un abri de fortune.

À la bordée d’un bois, il est touché à la jambe par une balle. Il trouve refuge dans une construction sommaire mise en place par l’organisation du festival pour la vente des places de concert. Couché avec d’autres inconnus, dans les cris, la peur et les coups de feu, il se fait un garrot pour sauver sa jambe et sa vie.

A lire aussi: Causeur #118: Zemmour à Jérusalem. «Réarmer l’Occident»

Un terroriste pénètre alors dans l’abri et vole montres, argent et portables.

Par miracle le tueur ne revient pas. Dans l’après-midi, Gal et les autres sont délivrés par Tsahal. Mais près de 200 jeunes ont été massacrés, dont deux de ses amis. Aujourd’hui, il se protège en se tenant loin des informations. Nous reprendrons bientôt de ses nouvelles.

Avant que son téléphone soit volé, il a échangé des messages avec un ami. Il nous a autorisés à les reproduire.

« Où es-tu ? »
« À l’entrée. Là où on distribue les bracelets. On m’a tiré dessus. Je perds du sang. J’ai un trou dans la jambe. J’ai été touché par une balle. »
« Fais un garrot. »
Gal envoie une photo de sa jambe.
« Plus fort. Tourne avec un bâton. »
« C’est fait »
« Il faut presser fort. »
« Je suis en vie. Mais ils tirent tout près. J’ai vraiment peur. J’ai besoin d’aide. »
« J’ai envoyé ta position à mon père, il s’en occupe, reste avec moi s’il te plaît. Sois fort. »
« Nous sommes à l’entrée, 5 personnes. On a besoin d’aide. Il y a un terroriste à 5 mètres de moi. Je ne peux pas répondre au téléphone. »

Aujourd’hui, Gal se protège en se tenant loin des informations. Nous reprendrons bientôt de ses nouvelles.

Se tenir à côté des Juifs de France ne nécessitait pas de porter atteinte à la laïcité

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Le président Macron et le rabbin Haïm Korsia dans la salle des fêtes de l'Elysée, 7 décembre 2023. DR.

Faire allumer par le grand rabbin de France la première bougie de Hanouka dans la cour de l’Élysée. Le symbole se voulait fort. D’autant plus marquant qu’il était destiné à faire oublier le refus d’Emmanuel Macron de participer à la grande marche contre l’antisémitisme, alors que les Juifs subissaient un niveau d’attaques sans précédent. Le problème est que le geste piétine la laïcité sans répondre à la réalité des discriminations et des violences que subissent les Juifs en France. Plutôt que maudire l’obscurité, il vaut mieux allumer une bougie, nul ne saurait être contre. Mais quand on est au pouvoir, les bougies qui font reculer l’obscurantisme sont les actes que l’on pose. Et en la matière, comme dans beaucoup d’autres, la politique d’Emmanuel Macron est illisible.


Dans un contexte de montée de l’antisémitisme, que le président choisisse un symbole fort pour montrer à quel point les Français de confession juive sont chers à la France, était nécessaire et important. Le contexte politique l’exige. Déjà par le passé, les juifs qui ne représentent que 0,6% des Français, étaient les plus attaqués pour des motifs religieux. En année standard, si l’on ose dire, ils subissent environ 500 actes antireligieux par an, quand ceux-ci sont évalués à 1000 environ pour les chrétiens et 170 pour les musulmans. Par an. Mais depuis le 7 octobre, en deux mois environ c’est plus de 1500 actes anti-juifs qui ont été recensés.

L’explosion de l’antisémitisme liée au massacre perpétré par le Hamas

Et ce qui a boosté l’explosion de l’antisémitisme est le massacre atroce perpétré par le Hamas en Israël. Un crime contre l’humanité qui a vu des terroristes surarmés décapiter des bébés, brûler vifs des enfants, violer les femmes, abattre les hommes, torturer des familles entières, profaner des cadavres. Le Hamas s’est comporté en Israël comme les héritiers des nazis et au lieu de susciter l’horreur, cela a abouti à une décompensation antisémite sur notre sol. Une décompensation qui ne concerne pas tout le monde. La violence à l’égard des Juifs et des occidentaux plus largement est relayée à la fois par l’extrême gauche et les islamistes. Mais les Français dans leur ensemble ont compris le message : « après le samedi vient le dimanche ». Ils ont compris qu’ils avaient sur leur sol aussi des rejetons du Hamas. Ils ont payé le prix du sang pour le savoir : la violence islamiste tue chez nous, années après années, et nul n’est à l’abri.

Le résultat du travail de l’islam politique sur la communauté musulmane en France

L’explosion de l’antisémitisme lié à l’importation du conflit israëlo-palestinien témoigne du poids de l’islam politique dans la communauté musulmane. Ce travail de réislamisation à mettre au crédit des frères musulmans, se double d’un rejet de l’appartenance à la France et d’un refus de l’intégration. Et il ne concerne pas, hélas, qu’une infime minorité de musulmans. Une étude IFOP et Elmaniya.tv montre que ceux-ci jugent que la laïcité est discriminatoire envers les Musulmans (78%), 65% sont pour le port du voile et il y a un vrai décalage entre cette population et le reste des Français : 50% des Musulmans font primer la religion sur les enseignements de l’école (les élèves devraient pouvoir refuser les cours qui heurtent leurs convictions religieuses) et ils sont trois fois plus nombreux (16% contre 5%) à ne pas condamner totalement l’assassinat du professeur de Français à Arras. Un chiffre qui monte à 31% dans la jeunesse musulmane[1].

A lire aussi, du même auteur: Affaire Ruth Elkrief: non, Jean-Luc Mélenchon n’a pas «dérapé»

Ce sondage tord le cou au discours politique sur « l’infime minorité » de musulmans en rupture avec les valeurs de la République. Il témoigne surtout du fait que le travail politique effectué sur cette population par les islamistes fonctionne et qu’il est temps que la République réagisse fermement.

La laïcité maltraitée

Que le président de la République veuille dans ce cadre se tenir aux côtés des Juifs de France a du sens, la question est : était-ce la bonne façon de faire ?

Dans une société fracturée comme la nôtre, où les questions religieuses, instrumentalisées notamment par l’islam politique, prennent une importance mortifère, comment vont réagir les représentants des autres religions à qui on oppose la laïcité pour expliquer que les symboles religieux n’ont pas leur place au sein de la République quand le président en installe un dans la cour de l’Elysée ? Comment comprendre la ligne politique d’un homme qui refuse de participer à une marche contre l’antisémitisme, car il craint de froisser la communauté musulmane en France, et qui dans le même temps fait allumer la première bougie de Hanouka à l’Élysée par le grand rabbin de France ? Quelle est la prochaine étape ? Si une mosquée se fait attaquer ou une femme voilée, bousculer, il fera quoi notre président ? Sacrifier un mouton pour l’Aïd dans le jardin de l’Élysée ?

« L’Élysée, ce n’est pas l’endroit où allumer une bougie. J’ai été surpris. Je me demande pourquoi Macron l’a fait, ce n’est pas son rôle » regrettait ce matin Yonathan Arfi, le président du Crif, au micro de Jean-Jacques Bourdin.

Cette erreur commise est d’autant plus agaçante, qu’une fois de plus, obsédé par son image, le président n’a pas réfléchi aux conséquences de ses actes. S’il veut envoyer un signal fort à la communauté juive, alors il peut faire afficher le visage de tous nos concitoyens massacrés le 7 octobre en Israël par le Hamas. Il peut afficher en grand sur nos édifices publics le visage des otages encore détenus à Gaza, exiger du service public audiovisuel qu’il ouvre les journaux en rappelant que certains des nôtres sont aux mains des terroristes islamistes.

Un énième pétard symbolique mouillé

Mais ce n’est pas ce qu’il a fait. Il a au contraire donné l’impression que la religion juive bénéficiait d’un privilège. Exactement… ce que met en scène le discours antisémite. Tout comme les victimes d’attentats méritent mieux que des nounours et des bougies de la part de leurs gouvernements, même déposés sous forme de paroles martiales désincarnées et de compassion larmoyante, les Juifs de France méritent mieux que des symboles qui peuvent encore se retourner à terme contre eux.

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On est une fois de plus devant le énième pétard symbolique mouillé de cette présidence chaotique. Si le gouvernement veut vraiment agir contre l’antisémitisme, il va lui falloir arrêter de se payer de mots et assumer le réel. Si l’on ne pose pas un diagnostic sur le fait qu’aujourd’hui, l’explosion de violence antisémite est majoritairement liée à un travail de radicalisation politique qu’organisent chez nous l’extrême-gauche et l’islamisme, alors on ne pourra agir. Si on utilise l’ultra-droite pour éviter d’affronter l’antisémitisme arabo-musulman, alors la condition des Juifs en France continuera de se dégrader. Pour combattre concrètement l’antisémitisme, il faut dire comment il se manifeste : militantisme sur le voile, prosélytisme religieux, refus d’intégration, détestation de la France vue comme esclavagiste et colonialiste, justification de la violence politique, importation du conflit israélo-palestinien idéalisé de façon messianique…


Un déni destiné à masquer l’impuissance

Or le gouvernement n’ignore pas ces réalités, mais s’il ne les affronte pas c’est que son déni lui sert à masquer son sentiment d’impuissance. Ces gens veulent réellement bien faire, mais ils pensent qu’ils ont déjà perdu le contrôle, que leur pouvoir est faible et que trop d’autorité ferait éclater une société déjà fracturée. Ils essaient juste de gagner du temps. Ils pallient l’impuissance par des mots et des images. Mais la réalité les rattrape et ils ne comprennent pas les symboles qu’ils manipulent. De ce fait ils échouent à en faire des repères, des représentations communes des idéaux. Nous en arrivons à être incapables de combattre le voile alors que notre modèle de société démocratique est basé sur l’égalité des droits des êtres humains au-delà du sexe, de la « race », de la philosophie, de la religion. Cet idéal est beau et exigeant et nous en arrivons à être mis en accusation au nom de la liberté religieuse de porter un signe qui refuse aux femmes l’égalité en droit. Ce refus de se plier à la loi commune au nom d’un particularisme religieux n’est simplement pas acceptable eu égard aux fondamentaux de notre contrat social.

Notre modèle de société n’est pas parfait ? Notre histoire a sa part d’ombre ? Certes. Mais quel est le modèle de société des islamistes, de l’extrême-gauche ? Daesh ? L’Iran ? La Terreur ? Que font-ils concrètement des libertés individuelles ? de l’égalité en droit ? Il est temps de nommer l’idéologie qui nous attaque et de la désigner comme à la racine de trop de nos difficultés. Ce combat est politique, judiciaire, policier, éducatif, culturel. Surtout culturel. Il commence par poser des mots. Pas pour faire joli. Pour reconnaitre le réel. Ce serait déjà un grand pas. Avec Elisabeth Borne et son « sentiment d’insécurité »[2] on peut douter que ce gouvernement soit en capacité de le faire.

Silence coupable

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[1] https://www.causeur.fr/ifop-dans-nos-ecoles-31-des-jeunes-musulmans-scolarises-narrivent-pas-a-desapprouver-totalement-lattentat-darras-271304

[2] https://www.causeur.fr/elisabeth-borne-la-premiere-ministre-nest-pas-a-la-hauteur-271283

La vie quotidienne à Prague au temps de la Shoah

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Couverture de "Vivre avec une étoile", de Jiří Weil, D.R

Dans son roman Vivre avec une étoile, l’écrivain tchèque et juif Jiří Weil relate la période de sa vie durant laquelle il fut plongé dans la clandestinité.


L’écrivain Jiří Weil (1900-1959) fut confronté, sa vie durant, à la situation chaotique de son pays, l’ancienne Tchécoslovaquie, placée au cœur d’une Europe à feu et à sang. Dans les années 20, il est étudiant à Prague et fait une thèse sur Gogol. Membre du PC, il vit de travaux journalistiques et de traductions de textes marxistes-léninistes. Il traduit aussi de la poésie. Il subit le contrecoup des purges staliniennes, en 1935, date à laquelle il est exclu du Parti et envoyé dans un camp de rééducation. Quand il revient à Prague, il publie un témoignage fracassant, De Moscou à la frontière (1937), dans lequel il dénonce le totalitarisme soviétique. Lorsque les nazis envahiront son pays, en 1939, sa situation deviendra intenable, d’abord en tant que communiste, mais surtout en tant que Juif. L’énergie qu’il n’avait pas mise à fuir l’Europe de Hitler, il la mettra à survivre au quotidien dans une Prague exsangue. En 1942, sur le point d’être déporté à Auschwitz, il parvient miraculeusement à faire croire qu’il s’est suicidé. Cette invention, digne d’une fiction romanesque, lui sauvera la vie. Il survivra jusqu’à la fin de la guerre dans la clandestinité, et c’est cette période de sa vie qu’il relate dans ce livre, son plus fameux, Vivre avec une étoile, publié en 1949.

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Dans la lignée d’un Kafka

Ce roman de Jiří Weil fut remarqué et soutenu par la suite par de célèbres auteurs, comme Harold Pinter ou Philip Roth. On connaît la passion de ce dernier pour la ville de Prague et ses habitants, et en particulier pour ses écrivains. Pour Philip Roth, de même que pour Jiří Weil, la référence presque absolue en littérature, c’est Kafka. Roth a vu en Weil un héritier du Procès. Dans son intéressante préface au roman de son confrère, Roth insiste sur « le ton neutre dont se servait Weil pour communiquer sa haine des nazis et sa pitié envers leurs victimes ». C’est ce style kafkaïen que Weil va utiliser, de manière très inspirée, pour raconter la Shoah à Prague – pas encore la Shoah des camps, celle d’Auschwitz, mais la Shoah en amont, celle de la longue traque des Juifs dans la ville, le piège implacable qui se referme sur eux. De tous ces Juifs, en cavale dans leurs propres quartiers, bien peu réussiront à avoir la vie sauve, comme on sait.

Rejeté de toutes parts

Jiří Weil décrit la longue descente aux enfers de son personnage principal, Josef Roubíček, ancien employé de banque, possédant pour tout logement un trou à rat humide et glacial. Il n’a presque plus d’argent pour s’acheter de la nourriture. Au début du roman, il est seul et sans amis : « je ne recevais aucune aide de personne », confie-t-il. Il était amoureux d’une certaine Růžena, mais elle a réussi à s’exiler. Il lui parle quand même, dans le vide, comme si elle venait toujours le voir, il se raccroche au souvenir de cette silhouette évanouie. C’est tout ce qui lui reste, en réalité.

« On m’a chassé de partout, je ne peux plus partir nulle part. On veut me prendre cette chambre nue aussi, dans laquelle il pleut. » Il ne se fait plus d’illusions : « On va m’expédier vers une terre étrangère et là-bas, peut-être, on me tuera. Je ne crois pas qu’on me permettra de vivre. » Ses voisins à l’affût convoitent son misérable logis. Une femme lui dit : « votre baraque nous irait ». On a déjà entériné sa disparition définitive. L’étoile jaune qu’il doit coudre sur son vêtement, à la place du cœur, en est la préfiguration évidente.

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Solidarité et perspective de la déportation

Au fil du récit, Roubíček finit par rencontrer des personnages un peu plus bienveillants, qui lui apportent quelque secours matériel (de la nourriture), et du réconfort moral. Il se lie avec un ouvrier, Josef Materna, adepte de la solidarité entre travailleurs. Il revoit par hasard d’anciens amis juifs, qui se préparent à la déportation. Celle-ci se profile à l’horizon. Tous en parlent, ne sachant cependant pas exactement ce que cela signifiera pour eux. Ce sont en général juste des propos plus ou moins vagues : « Comme du bétail, explique quelqu’un qui croit être dans le secret. Ils les collent dans des wagons et les emmènent à l’est. Ils disent qu’on les évacue pour aller travailler. Mais ils prennent les vieux, les femmes, les enfants… » Jiří Weil évite de bout en bout les mots Juifs ou nazis, préférant rester dans le flou, et donnant ainsi à son récit une portée encore plus dramatique et plus universelle.

Dans Le Procès, Kafka employait pour ainsi dire le même procédé, poussé à l’extrême, n’indiquant ni le lieu ni le temps, ni rien de tangible, qui aurait pu sans doute rassurer le lecteur en lui suggérant que cela se passait ailleurs très loin. La prophétie de Kafka était déjà terrible. La description apocalyptique de Jiří Weil ne l’est pas moins. Il trace, au jour le jour, le sombre et réaliste tableau de cette fin du monde, de ce règne de la mort arrivant pour tout anéantir de la civilisation. Vivre avec une étoile est un roman essentiel pour comprendre ce qui s’est passé dans l’homme à cette époque encore récente. Cette intraitable leçon d’histoire nous concerne tous.


Jiří Weil, Vivre avec une étoile. Traduit du tchèque par Xavier Galmiche. Préface de Philip Roth. Éd. Denoël.

Vivre avec une étoile

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Les chiens assaillent Depardieu, joyeux hallali!

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Militantes féministes à Toulouse, mai 2023 © FRED SCHEIBER/SIPA

Notre Gégé national est sous le feu des critiques, après la diffusion par France 2 de séquences filmées en Corée du Nord durant lesquelles l’acteur se montre assez odieusement grivois.


La soirée de chasse à mort commence par un “teasing” sur BFM TV, sur lequel je tombe par hasard pendant que ma chaîne favorite distille de la publicité racisée. Un certain Waleckx fait de la réclame pour son Complément d’enquête qui passera le soir même sur Antenne 2 à 23 heures. L’homme explique avec un sourire gourmand qu’il a récupéré le plus légalement du monde les rushes d’un film documentaire sur le voyage en Corée du Nord de Gérard Depardieu et Yann Moix. Ce film contient des images insoutenables prouvant que le vieil acteur est un des pires agresseurs et violeurs de femmes de notre époque, les soldats russes de Butcha et les terroristes du Hamas coupeurs de seins et extracteurs de fœtus à coups de couteau dans le ventre de leurs mères vont passer pour des garnements malpolis. Le jeune Waleckx a rapproché ces horreurs des accusations portées contre le vieux cerf par de jeunes biches pas si effarouchées que ça, il l’a rapproché de vieilles rumeurs que l’acteur lui-même aurait propagées sur sa folle jeunesse dans la jungle urbaine de Châteauroux. Et bingo, le puzzle assemblé a donné l’image d’un monstre ! Oubliez Crépol, oubliez Bir Hakeim, oubliez les kibboutz proches de Gaza, venez participer à la mise à mort de la bête.

Allusions sexuelles incessantes

Accepter une invitation en Corée du Nord pour les soixante-dix ans de cette belle république n’est certes pas le signe d’une conscience politique élevée. Faute morale qui ne tombe sous le coup d’aucune loi. La conduite de Gégé avec l’interprète coréenne est grossière, ses allusions au sexe de cette jeune femme sont incessantes, elle répond avec un sourire gêné. Commence alors la petite musique de l’omerta, personne ne critique l’inconduite de Gégé, ni en Corée, ni sur les innombrables tournages de film où il a travaillé. Gégé est au-dessus des lois, et on lui impute à crime la non-dénonciation par les autres…

La séquence du manège d’équitation me paraît le comble de la saloperie dénonciatrice. Une fillette de dix ans passe au galop devant lui. Il fait à Yann Moix un commentaire de corps de garde sur la jouissance éprouvée par les femmes quand leur clitoris se frotte à la selle d’un cheval cavalcadant. L’acteur ne touche nullement la fillette, ses paroles ne peuvent pas provoquer en elle un ressenti destructeur : elle passe au galop et ne comprend vraisemblablement pas le français, et encore moins le français fort épicé et libidineux parlé par Gérard. Mais le rapprochement fillette-propos salaces fait baver tous les chiens et on amène dans la clairière de l’hallali l’arme de destruction massive : la pédophilie ! Une vieille chipie précise : il a un imaginaire pédophile ! Après la police de la pensée, celle de l’imagination. L’imagination délirante est plutôt dans la tête de la chipie, puisque les réelles accusatrices de l’acteur sont des femmes adultes.

Complément d’enquête bat des records de crapulerie

Il faut le dire avec regret : le fameux documentaire coréen ne présente pas un monstre, mais un homme atteint de sénilité, qui rabâche ses obsessions sexuelles, ce qui encore une fois ne tombe sous le coup d’aucune loi. Mais notre société vogue joyeusement vers la criminalisation du désir masculin, surtout hétérosexuel mais parfois homosexuel comme le montre l’affaire Kevin Spacey, disons que les gays échappent un peu à l’intersectionnel. Jean-Louis Livi, l’ami producteur de Depardieu, qui intervient à la fin de ce Complément d’enquête qui bat ses propres records de crapulerie, avance une hypothèse. Le vieux cerf aurait des difficultés de rut, il ne couvrirait pas ses biches avec la même puissance qu’autrefois, et il bramerait son dépit par ces flots de grivoiserie.

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Entrée des violées. Les seules qui ont porté plainte en bonne et due forme. Les autres, toutes celles qui ne savent pas coller une gifle à un malotru ou, ne connaissant pas l’adresse du plus proche commissariat, préfèrent le tribunal médiatique, me paraissent des personnes dangereuses, à discréditer impérativement. Avec ces deux amantes de Gérard Depardieu qui ont porté plainte, c’est comme souvent parole contre parole, et dénonciations anachroniques. Je trouve dangereuse la phrase « les violées sont tellement sidérées qu’elles ne peuvent porter plaintes tout de suite ». Elle ouvre la porte à tous les faux souvenirs et à tous les chantages, principalement dirigés sur des hommes qui ont de l’argent. La première avait été doigtée, consentement, pas consentement ? Voir la problématique Vanessa Springora. La seconde, Charlotte Arnould, une petite jeune femme à l’air fragile qu’on a envie de protéger, a fait l’amour avec l’acteur chez celui-ci. Consentante, pas consentante, bien du plaisir aux enquêteurs. Mais voilà que huit jours après cette atrocité digne de Butcha ou des kibboutz, cette jeune femme, qui devrait avoir en horreur la rue Campagne-Première et tout le sixième arrondissement, retourne chez Depardieu et se retrouve dans ses draps, violée-pas violée. Personne n’a relevé cette incohérence. Dans l’affaire du cardinal Gerlier, on a reproché au prélat d’avoir couvert les agissements d’un prêtre dont la victime, un tout jeune homme majeur, s’était rendue à l’hôtel du violeur à Biarritz, y avait subi un sort terrible. À quelques semaines de là, le pauvre petit était remonté voir son prédateur dans une chambre d’hôtel de Lourdes. Le violé-reviolé et la violée-reviolée devraient être des personnages de vaudeville, ils sont les sujets d’attendrissement d’une époque très bête.

La télévision-délation

Dernier volet de la fresque assassine. Gérard aurait dit qu’à 9 ans, dans sa tumultueuse jeunesse castelroussine, il aurait participé plusieurs fois à des viols de jeunes femmes “qui n’attendaient que ça”. Aucune vieille dame de Châteauroux ne s’est réveillée soixante-cinq ans après les faits pour aller se plaindre de Gégé, mais ça viendra sûrement après l’émission du fouille-merde Waleckx. Il s’agit aussi d’une ignorance complète de ce que pouvaient être les garçons d’une époque moins pudibonde, où l’entreprise de dévirilisation des hommes n’était pas encore lancée par les féministes, où l’on riait plutôt de la vantardise masculine qu’on ne cherchait à la traîner en justice. La vantardise entre garçons, loin des oreilles féminines ! Toutes les filles que j’ai sautées ! Dès que j’entre dans un bal, elles tombent toutes à la renverse et on va voir la feuille à l’envers ! Bravo Waleckx, tu as raison d’arborer ton petit sourire carnassier ! Tu dégommes un grand acteur classé à droite, sa carrière est foutue. Tu te fais une grosse réputation dans le service public, ta carrière de sycophante sera splendide, tu fais oublier Crépol, Butcha, les kibboutz et l’islamisme ravageur. Coup double, triple, quadruple, quintuple !

Gérard Depardieu dans « Maigret » de Patrice Leconte (2022) © CINÉ-@ F COMME FILM et PASCAL CHANTIER – STÉPHANIE BRANCHU

IFOP: 31% des jeunes musulmans scolarisés n’arrivent pas à désapprouver totalement l’attentat d’Arras

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Paris, 23 septembre 2023 © Gabrielle CEZARD/SIPA

Abayas, terrorisme, laïcité: un sondage choc publié ce matin démontre que la jeunesse française musulmane se radicalise. 78% des musulmans jugent que la laïcité telle qu’elle est appliquée aujourd’hui en France par les pouvoirs publics est discriminatoire envers les musulmans. Nul ne peut désormais l’ignorer, une contre-société se dessine clairement


En France, l’islam fait débat sur tous les plateaux TV et fait régulièrement la une de bien des gazettes. Et les journalistes qui reprochent à leurs confrères de trop en parler en parlent eux-mêmes beaucoup. Alors, pour mesurer l’état des esprits en milieu musulman, la chaîne franco-arabe Elmaniya.tv1 (une chaîne lancée par d’anciens journalistes de la rédaction arabophone de France 24, et qui souhaite promouvoir « des valeurs laïques et humanistes aussi bien en France et dans le Monde arabe ») a commandé à l’IFOP une enquête2 pour cerner la place accordée par les musulmans de France à leur religion. Une enquête qui interroge aussi la réception des événements de ces dernières semaines, de l’interdiction de l’abaya à l’assassinat du professeur Dominique Bernard, et qui montre un décalage avec l’opinion du reste du pays. Un décalage qui ne se réduit pas parmi les jeunes générations, mais qui, bien au contraire, se creuse de façon inquiétante.

Lyon, 11 septembre 2023 © Mourad ALLILI/SIPA

Un îlot de religiosité dans une France athée

L’enquête a été réalisée auprès d’un panel de mille ressortissants musulmans – de nationalité française ou non – vivant en France métropolitaine. Les données ont été comparées à celles du reste de la population, que l’on qualifiera ici par facilité de lecture « les autres Français ». Les questions portent sur le rapport à la foi, le respect des principes religieux dans la vie de tous les jours ou encore le rapport à la laïcité à la française – bref, tout ce qui tracasse les Français en ce moment. Si 18% du reste de la population française se présente comme résolument athée (on trouve même parmi les adeptes des autres religions françaises un bloc de 12% d’individus se déclarant athées ; des « pratiquants non croyants » en quelque sorte), ils ne sont que 3% parmi leurs compatriotes musulmans à se reconnaître dans une telle case. Au contraire, 2/3 des musulmans de France se qualifient volontiers « croyants et religieux », contre 12% parmi l’ensemble des Français. En tout, 92% de la population musulmane se qualifie de religieuse, à des degrés divers. Sur un même territoire, coexistent donc une population très largement religieuse et une autre très détachée des choses du ciel.


Une divergence, sans trop de surprise, qui n’est pas sans effet sur le rapport à la science. Si plus de 80% des Français sont acquis à une explication scientifique de l’origine du monde, la population musulmane, elle, reste, à hauteur de 76%, attachée à une inspiration divine. Même les catholiques ou les juifs un peu sérieux ne suivent plus leur curé ou leur rabbin sur ces sujets et ont déclaré forfait face aux rationalistes sur ce terrain-là au moins.

Laïcité : un mot, deux définitions

Ce rapport différent aux choses du ciel se répercute dans la vie de la cité. Les musulmans divergent des autres Français quand il s’agit de donner une définition de la laïcité. Pour les musulmans, elle a pour enjeu premier d’assurer à tous la liberté de conscience et de mettre toutes les religions sur un pied d’égalité. Pour les autres, elle a aussi pour objectif de faire reculer l’influence des religions dans la société. Elle est en fait associée à la notion de sécularisation, trajectoire suivie avec plus ou moins de tumulte dans le pays depuis deux siècles et demi et qui a abouti à un effacement presque complet du religieux dans l’espace public.

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Avec des définitions aussi différentes, les évolutions législatives de ces dernières décennies n’ont pas été appréciées de la même façon selon que l’on se trouve en milieu musulman ou ailleurs. Pour 78% des musulmans, les lois de 2004 sur les signes religieux à l’école et de 2010 sur la burqa n’ont eu pour objectif que de les pointer du doigt et de les discriminer. Parmi les moins de 25 ans, ce chiffre monte à 80%.

Une divergence de point de vue qui tend à faire regarder nos compatriotes vers Metz et Strasbourg. Le sondage indique en effet que la population musulmane a les yeux de Chimène pour le Concordat de 1804, tel qu’il est encore appliqué en Alsace et en Moselle (passées à travers les gouttes de la loi de 1905, puisque rattachées au Reich allemand à cette époque), lequel permet le financement public des lieux de culte et des religieux. 75% des musulmans souhaitent son extension à l’ensemble du territoire, alors que l’idée ne séduit que 28% du reste de la population. Le sondage révèle toutefois une « lassitude » à l’égard du vieux laïcisme à la française parmi les jeunes générations puisque 60% des moins de 25 ans sont favorables à un retour au Concordat. Il y a une certaine ironie historique à constater qu’un peu plus de la moitié des sympathisants de LFI y sont favorables également, alors que l’abandon du régime spécial d’Alsace-Lorraine est une vieille revendication de l’extrême gauche laïcarde.


Les musulmans les plus éduqués parmi les plus revendicatifs ?

Il n’y a pas qu’à la cantine ou au moment d’enfiler son foulard le matin que ces différences se traduisent. Les uns et les autres ont en effet eu une lecture assez différente des événements de cet automne chargé. Quand 81% des Français approuvent l’interdiction de l’abaya et des qamis, 72% des ressortissants musulmans la désapprouvent. Et c’est la population musulmane la plus diplômée et la plus aisée socialement qui est encore plus hostile à cette décision ministérielle, puisque ce chiffre montre à 80% parmi les professions intellectuelles supérieures.

Arras, 14 octobre 2023 © FRANCOIS GREUEZ/SIPA

Enfin, le drame d’Arras d’octobre dernier, au cours duquel l’enseignant Dominique Bernard a été poignardé par un ressortissant ingouche, ne fait pas l’objet d’une réprobation totalement similaire. 91% des Français désapprouvent totalement ce geste, contre 78% des musulmans. On trouve parmi ceux-ci 6% à qui l’événement n’a fait ni chaud ni froid ; 5 autres pour cent qui ne le condamnent pas ; et un total de 16% qui ne le condamnent pas totalement ou qui peuvent comprendre une partie des motivations de l’auteur. Un chiffre bien élevé pour le meurtre d’un enseignant tué au hasard parmi plusieurs autres, et qui ne s’est même pas particulièrement distingué par le blasphème du prophète Mahomet ou autre reproche fait à Samuel Paty en 2020.


Plus inquiétants encore sont les effets générationnels mesurés par le sondage et le phénomène de durcissement des plus jeunes. Chez les 25-34 ans, on observe que 75% des musulmans se qualifient de « religieux », contre les 66% cités plus haut pour l’ensemble de la population musulmane. Si l’on observe finement les chiffres, on remarque, parmi les plus de 50 ans, une part importante de musulmans modérément religieux, plutôt en phase, pour le dire simplement, avec la rationalité occidentale, quand ces chiffres s’effondrent parmi les nouvelles générations. C’est comme si la population musulmane avait évolué de façon tout à fait opposée au reste du pays : alors que chez les catholiques, les mamies un peu bigotes ont dû accepter les mini-jupes de leurs petites-filles, parmi les musulmans, la tata restée dans les années 80 (SOS Racisme-Smaïn-saucisson) a dû apprendre à vivre avec ses nièces voilées. Chez les musulmans actuellement scolarisés, 31% n’arrivent pas à désapprouver totalement le meurtre d’Arras ! On l’a vu plus haut, l’acquisition d’un statut social confortable ne semble pas non plus être un vecteur de « désislamisation » ou de fléchissement, contrairement à ce que peut écrire un Arnaud Lacheret, très optimiste dans son dernier livre, Les intégrés. En fait, c’est comme si les ressorts de l’adhésion à la France, par la réussite matérielle et par les joies de la vie à la française, avaient largement échoué auprès de la population musulmane. N’est-il pas exaspérant d’observer tant de nos concitoyens issus de l’immigration maghrébine, dont les familles ont pourtant quitté les sociétés rétrogrades des pays d’origine pour trouver chez nous une vie meilleure et jouir de nos libertés, se faire à présent les agents de l’islamisation de la France ?

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  1. https://elmaniya.tv/ ↩︎
  2. https://www.causeur.fr/wp-content/uploads/2023/12/Synthese_Ifop_ElmaniyaTV_2023.12.07.pdf
    Étude Ifop pour Imaniya.TV réalisée du 21 au 29 novembre 2023 par questionnaire auto-administré en ligne auprès d’un échantillon de 1 002 personnes, représentatif de la population de religion musulmane vivant en France métropolitaine âgée de 15 ans et plus.  ↩︎

L’année lyrique parisienne finit en apothéose

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Les Contes d'Hoffmann 2023 © Emilie Brouchon / Opéra national de Paris

L’opéra d’Offenbach, les Contes d’Hoffmann, à l’Opéra Bastille


« Belle nuit, Ô nuit d’amour, /souris à nos ivresses, /Nuit plus douce que le jour/ Emporte nos tendresses (…) / Zéphirs embrasés/ Donnez-nous nos baisers… » Etc. Sur le livret coquin du seul Jules Barbier (son fidèle compère librettiste Michel Carré, co-auteur de la pièce éponyme, étant mort en 1872) c’est la mélodie de la célèbre barcarolle vénitienne qui ouvre le 3ème acte des Contes d’Hoffmann. Millésime 1881, l’opéra posthume – et même inachevé – de Jacques Offenbach (1819-1880) est magnifié comme jamais par la prodigieuse mise en scène de Robert Carsen.  

Dispositif vertigineux

C’est que, produite en l’an 2000, sa régie, un quart de siècle après, n’a pas pris une ride. La mise en abyme – le théâtre dans le théâtre – demeure un motif récurrent chez le grand scénographe canadien. Sur le plateau de l’Opéra-Bastille, les rangées parallèles des fauteuils d’orchestre en velours rouge se balancent latéralement sur un rythme de valse, en miroir de la vraie salle : énorme partouze où s’abandonnent les spectateurs supposés d’une représentation de Don Giovanni. C’est avec ébahissement que le public de l’Opéra-Bastille découvre ce dispositif vertigineux. De bout en bout, le faste visuel des transformations architecturales du décor, passant des coulisses à la fosse d’orchestre, reste le premier régal de ce spectacle.

À lire aussi, du même auteur: Citius, altius, fortius

À travers le récit des trois amours passés d’Hoffmann, – Olympia, Antonia et Julietta – est merveilleusement exploitée la veine tout à la fois burlesque, allègre et teintée de mélancolie de la partition. Un des morceaux de bravoure étant sans conteste la chanson d’Olympia (« Tout ce qui chante et résonne/ Et soupire tour à tour/ Emeut son cœur qui frissonne/ D’amour ») que campe, irrésistiblement drôle en blanche automate carapaçonnée de bakélite, la soprano sud-africaine Pretty Yende. Si elle n’est pas à son meilleur dans les vocalises de haute voltige qu’exige le rôle, le ténébreux baryton-basse américain Christian Van Horn excelle quant à lui dans ses quatre costumes lucifériens. Angela Brower offre à la Muse son très subtil vibrato, malgré un phrasé qui manque de netteté ; Antonia, sous les traits de la soprano Rachel Willis-Sorensen, qu’on entendait chanter pour la première fois dans les murs de l’Opéra de Paris, dispense un timbre solidement charnu, ultra précis dans l’articulation, et ce jusque dans les aigus les plus redoutables.

Hallucinant Benjamin Bernheim

Mais surtout, surtout, le ténor francophone Benjamin Bernheim incarne un Hoffmann proprement inoubliable, tant dans la perfection vocale que dans la présence scénique : hallucinant ! Ce spectacle confinerait à la légende sans le bémol d’une direction orchestrale quelque peu métronomique et manquant cruellement de liant,  sous la battue rigide de Madame Eun Sun Kim, la directrice musicale de l’Opéra de San Francisco, originaire de Corée du Sud. Le ténor russe Dmitry Korchak, qu’on a entendu ici l’an passé dans La Cerenentola, relaiera Benjamin Bernheim dans le rôle- titre, à partir du 21 décembre, pour les trois dernières représentations. Autant dire que l’année 2023 promet de finir en apothéose – au moins à l’opéra…

Benjamin Bernheim – Photo: Emilie Brouchon Opéra national de Paris/Bastille

Les Contes d’Hoffmann. Opéra fantastique en un prologue, trois actes et un épilogue, de Jacques Offenbach (1881). Direction : Eun Sun Kim. Mise en scène : Robert Carsen. Orchestre et chœurs de l’opéra national de Paris. Avec Benjamin Bernheim/ Dimitry Korchak (30 nov., 9, 12, 15,18 déc./ 21, 24,27 déc.), Christian Van Horn, Leonardo Cortellazzi, Vincent Le Texier, Pretty Yende, Rachel Willis-Serensen, Antoinette Dennenfeld, Angela Brower…  Durée : 3h30

À noter que Les Contes d’Hoffmann sera diffusé le samedi 20 janvier 2024 à 20h sur France Musique dans l’émission « Samedi à l’opéra » présentée par Judith Chaine.

Jeunesse sans filtre

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© MTV

L’accès de la jeunesse à l’émission abrutissante et nocive « Frenchie Shore » inquiète. La ministre de la Culture, elle, s’inquiète prioritairement de l’existence des chaînes de Vincent Bolloré.


« J’aime pas trop embrasser », confie la jeune Kara. « Parce que tu préfères sucer ? » lui répond, goguenard, le jeune homme avec qui elle est en train de faire connaissance. La séquence inaugurale du premier épisode de « Frenchie Shore » donne d’entrée de jeu une idée assez précise du niveau de la nouvelle série de téléréalité mise à l’antenne sur MTV. On y retrouve une bande de dix jeunes exhibitionnistes dans une villa du Cap d’Agde. Si le ton humoristique et érotique est revendiqué, le programme a soulevé des questions quant à sa diffusion auprès des plus jeunes.

Dans le premier épisode, on peut assister à une scène de coprophagie (pour rire) ou faire la connaissance de Ouryel, jeune femme se revendiquant tout en plastique, et ayant visiblement hâte de faire la fête :« J’ai trop la dalle, ça fait un mois que je n’ai pas ken. J’aime le cul. Là où il y a de la bite, il y a Ouryel », nous apprend-elle, avant de défiler en string. Depuis, elle a fait son coming out trans. L’émission semble d’ailleurs être un concours permanent de twerk (toutes les participantes ont été recrutées pour leur énorme pétard), d’engueulades et de beuveries. C’est Loana sous amphétamines, et sans aucune censure.

A lire aussi : Les neuneus du peep-show

En réalité, dès l’apparition du Loft, en 2001, le ver était dans le fruit. Certains voulaient alors interdire la téléréalité, inquiets quant au respect de la dignité humaine. On aurait peut-être dû les écouter. « Frenchie Shore » est déconseillé au moins de 16 ans et présente des ébats sexuels. Interrogée sur la nocivité de l’émission, Rima Abdul Malak a déclaré que si « ce programme est déconseillé aux moins de 16 ans, n’importe qui peut tomber dessus sur les réseaux sociaux comme ça m’est arrivé ». Mais la ministre précise qu’elle se gardera « bien de commenter les choix des chaînes et des plateformes ». Le 9 février, elle était moins tendre avec les chaînes de Bolloré, se demandant « si la reconduction de la fréquence [de CNews et de C8] était justifiée ou pas ». Décérébrer la jeunesse tout en envisageant de museler les opinions conservatrices, ça nous dessine quand même une drôle de politique macroniste pour notre audiovisuel !

Bulletin de notes de Gabriel Attal: «encouragements» du conseil de classe!

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Gabriel Attal, Paris, 22 novembre 2023 © Lionel Guericolas/MPP/SIPA

Parents et enseignants sont invités à rester dans leur rôle, et les élèves à accepter le redoublement. Les annonces de Gabriel Attal sont très satisfaisantes, mais à confirmer dans leur application, prévient notre contributeur


Cela pourrait se résumer à chacun dans son rôle, enseignants comme parents, et chaque élève à son niveau, selon ses capacités et son mérite. Mes premières réactions aux annonces ministérielles sont globalement positives, même si bien entendu, au regard de la situation de notre école, j’en attendais davantage, comme toujours, car je souhaite ardemment un changement en profondeur.

Déjà, sur la forme, nous recevons un mail en fin de matinée, avant que le ministre ne s’adresse aux médias en début d’après-midi, ce qui conforte l’idée d’être mieux reconnus dans notre professionnalisme, et mieux considérés au plus haut niveau. Un changement que beaucoup de collègues apprécieront car nous avons très mal vécu l’absence totale de communication, notamment pendant les deux années du Covid, où nous prenions nos directives en suivant les chaînes d’informations ! Gabriel Attal s’adresse à nous en priorité, et l’exprime : « Mais c’est à vous que je m’adresse d’abord. A vous que je fais mes annonces. C’est pour moi tout à la fois une question de respect et l’expression d’une conviction forte : c’est avec les professeurs, par les professeurs, grâce aux professeurs, que nous relèverons le défi de l’élévation du niveau. »

Collège inique

Sur le fond, je préfère surtout commenter les principales mesures annoncées pour le primaire, mais il est évident qu’il fallait casser la spirale négative du collège unique. Les classes de niveau vont donc dans le bon sens, même si d’autres transformations sont attendues, notamment en matière d’orientation et d’alternance. Car il est manifeste que les élèves du niveau faible auront besoin d’être soutenus dans les apprentissages et encadrés pour envisager leur professionnalisation, donc choisir les orientations adaptées. Et là, nous savons bien que c’est LE point faible parmi les nombreuses défaillances de l’Éducation nationale.

A lire aussi, Elisabeth Lévy: Groupes de niveau au collège: la « Attal-mania » aura-t-elle raison de la bronca des profs?

Au sujet de l’école primaire, une mesure était particulièrement attendue, nous en parlions encore le midi même en salle des maîtres, à propos du redoublement. Laisser les parents décider au final de l’opportunité du redoublement – que l’on daigne enfin nommer alors qu’auparavant on l’habillait du doux euphémisme « maintien » – dénotait clairement de l’absence de reconnaissance du professionnalisme des enseignants et de la piètre place que la société leur accordait. Là, les collègues sont enfin reconnus et leur rôle est affirmé. Malgré tout, le redoublement ne peut pas être la solution à toutes les difficultés qui sont diverses et variées, et ne doit pas être source de conflits avec les familles. Car il apparaît toujours dans chaque situation difficile que le dialogue avec les parents et la clarification auprès de l’enfant/élève que sa famille et l’école ont le même discours et vont dans la même direction permettent de construire les bases de la progression de l’élève en rassurant l’enfant. Ainsi, je préconise un examen simple et assez court à faire passer aux élèves pour lesquels il y a désaccord entre l’école et les parents au sujet du redoublement. Cette épreuve écrite et orale de quelques heures au maximum, à effectuer en deux ou trois fois tout au plus, pourrait être sous la responsabilité de l’inspection de circonscription afin d’affirmer la neutralité dans la passation et l’évaluation de la situation scolaire. Cela permettrait de désamorcer les conflits et conforterait les deux parties, parents comme enseignants, car il est toujours très difficile d’être objectif sur la pertinence du passage ou non dans la classe supérieure. Nous savons souvent que les difficultés ne permettront pas à l’élève de suivre, mais nous savons aussi que le redoublement sera malheureusement souvent sans effet. Donc, une nouvelle fois se pose le problème de l’orientation et je suis intimement convaincu que c’est le sujet à traiter en priorité à l’Education nationale. A tous les niveaux, maternelle, élémentaire et bien sûr secondaire.

Retour aux fondamentaux

Des classes de niveau en élémentaire ne sont ni souhaitables ni envisageables, notamment en raison du faible nombre d’élèves de beaucoup d’écoles, mais nous pourrions tout à fait prévoir des classes passerelles qui permettraient à certains élèves de bénéficier d’une année supplémentaire, en faible effectif pour acquérir les notions de base de leur classe d’âge. Nous pourrions envisager deux classes passerelles, pas toujours dans la même école, l’une après le CE1, l’autre après le CM1, avant que les élèves concernés n’intègrent le niveau supérieur, donc le CE2 ou le CM2. Dans bien des cas, cela serait plus efficace, et pas nécessairement plus coûteux que de nombreux redoublements.

A lire aussi: IFOP: 31% des jeunes musulmans scolarisés n’arrivent pas à désapprouver totalement l’attentat d’Arras

La deuxième mesure principale pour l’école élémentaire concerne la lecture et les manuels scolaires, essentiellement en CP et CE1. Si j’estime que cela va dans le bon sens, j’ai malheureusement l’assurance d’être très minoritaire parmi les collègues. J’entends déjà certains hurler vivement : « Et ma liberté pédagogique ! » même si les mêmes ne savent pas souvent quoi faire de ladite liberté. Cela entérine également un retournement de position car depuis plusieurs années le discours officiel de la hiérarchie sur le terrain est très négatif au sujet de l’utilisation des manuels, ni manuel ni photocopie… donc il ne reste pas grand-chose. Évidemment, une nouvelle fois, les effets de cette mesure dépendront de son application et ainsi des manuels qui seront labellisés et financés par l’Éducation nationale, comme de l’utilisation – ou non – que les collègues en feront dans les classes.

En guise de conclusion de ces premières réactions « à chaud » j’ai une impression mitigée au sujet des contenus d’apprentissage. Si les changements de programme vont dans le sens d’une clarification au sujet des méthodes (très bien pour la méthode de Singapour en mathématiques) et du recentrage sur les matières fondamentales, les annonces ministérielles ne sont pas nettes au sujet des cycles. J’imagine que les attendus de fin d’année (et de mi-parcours) ajoutés à la possibilité accrue de faire redoubler les élèves actent la fin de la logique des cycles à l’école.

Malgré tout, nous attendions davantage de précisions afin d’avoir la certitude que nous en avons réellement fini avec cette absence de décision franche. Notre école a besoin de transformations profondes axées sur des éléments simples – programmes et organisation de la scolarité – clairs et communiqués à tous comme étant les nouveaux piliers, les repères stables et structurés à considérer pour enfin inverser la chute du niveau.

Citius, altius, fortius

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Robert Delaunay, La femme et la tour (détail), 1925 © BPK, Berlin, Dist. RMN-Grand Palais / image Staatsgalerie Stuttgart © ADAGP, Paris

Pari(s) de la modernité, 1905-1925, une exposition au Petit Palais nous permettant de replonger dans des temps malheureusement révolus


Citius, altius, fortius : « plus vite, plus haut, plus fort ». Telle fut la devise choisie par les Jeux Olympiques de Paris, en 1924. Un siècle plus tard, le spectacle de la Ville-Lumière du premier après-guerre laisse rêveur.

Le Petit Palais s’est fait comme une spécialité de monter d’ambitieuses expositions patrimoniales combinant beaux-arts, art de vivre, documents d’histoire, matériaux de l’industrie et des techniques, en sorte de nous restituer l’air du temps de toute une époque. Ainsi la récente exposition Sarah Bernhardt ne se contentait-elle pas de retracer la carrière d’une icône : c’était une immersion dans un demi-siècle de vie française – mondaine, artistique, sociale.  

Quand Paris était aimable et rayonnante

Au prix d’un anagramme un peu facile, Pari(s) de la modernité, 1905-1925 enjambe la Grande guerre pour faire le grand écart dans cette vingtaine d’années qui, de la Belle-Epoque aux Années folles, propulse la capitale au rang envié de Ville-Monde, métropole somptueuse, aimable et rayonnante. En comparaison, le Paris poussif, bas de plafond et faiblard de l’ère – de l’aire – Hidalgo nourrit le regret de ce Temps perdu.

Temps illusoirement retrouvé, donc, à travers une manifestation qui vient clôturer un cycle commencé en 2014 avec Paris 1900, la Ville spectacle et continué en 2019 avec Paris Romantique (1815- 1858). Ce genre d’exposition « transversale » comporte un double risque : puiser indéfiniment dans le même réservoir d’œuvres et d’objets déjà montrés ou visibles dans les collections des grands et petits musées ; répéter la sempiternelle histoire dans un carambolage dénué de toute approche critique un peu neuve.

A lire aussi, du même auteur: Ubu en Roumanie

Cet écueil, ce « dernier volet » l’esquive de plusieurs façons. D’abord, en mariant chronologie et approches thématiques dans des sections où la géographie parisienne et ses quartiers (Montmartre, Montparnasse, les Champs-Elysées, le vaste périmètre où se tient l’expo Arts Déco en 1925, de la Concorde au Grand Palais) fixe la toile de fond d’une vitalité qui se décline dans l’industrie comme dans toutes les disciplines artistiques, mais aussi dans les mœurs libérales d’un Paris décidément moins pisse-froid que celui de 2023.

Tamara de Lempicka, Saint-Moritz, 1929 © ADAGP, Paris

Un parcours émaillé de belles surprises visuelles

Ensuite, à travers la palette subtile de la scénographie discrète et fluide signée Philippe Pumain, qui dispense un parcours habilement séquencé, émaillé de belles surprises visuelles, tel cet authentique aéroplane Depertusson type B de 1911 qui, rapporté du Musée de l’Air et de l’Espace, au Bourget, trône en majesté dans une salle. Ou encore, cet imposant Ours blanc, plâtre patiné sculpté en 1922 par François Pompon – un dépôt du Museum d’histoire naturelle au musée de l’Homme…  Mais surtout, l’exposition réunit pas mal de pièces issues de collections privées, ou extraites de fonds peu connus. Certes, on n’y verra pas Les demoiselles d’Avignon (1907) mais on ne translate pas depuis New-York un Picasso aussi iconique. En revanche, l’extraordinaire Charmeuse de serpents (1907) du Douanier Rousseau a pu quitter sa cimaise du musée d’Orsay, pour voisiner avec une robe « Minaret » signée Paul Poiret, toilette portée par la marquise de Luppé en 1911, et exhumée d’une collection privée. Ou un diadème de la collection Cartier, millésimé 1914. De plaisants dessins de Sem nous rappellent le scandale du « massacre du printemps » orchestré à l’occasion du fameux Sacre… de Stravinski.  On découvre au passage un joli portrait au feutre du poète Apollinaire signé du jeune Cocteau, des photos d’époque nous montrent le Paris de l’arrière, pendant la Grande guerre. Une toile de Vallotton, superbe, transportée du musée de l’Oise, nous dévoile les Soldats sénégalais au camp de Mailly, en 1917. La Victoire ouvre le temps des « Années folles » : baptisée Saint-Moritz, une merveilleuse petite huile de Tamara de Lempicka montre une skieuse en col roulé blanc et pull rouge vif qui fixe les pics alpins d’un air rêveur ; une étude de Jacques-Emile Blanche nous peint les traits du beau Radiguet, le poète du Diable au corps et du Bal du Comte d’Orgel ; Man Ray portraiture le travesti Barbette ; la Revue nègre rappelle que dans le Paris joyeux de Joséphine Baker il n’y a ni femmes voilées, ni ségrégation… L’alcool y est alors à peine moins prohibé que l’opium. La Ville-Lumière ne roulait pas encore tous feux éteints…

Béchereau, Deperdussin Aéroplane Deperdussin type B, 1911 © ADAGP, Paris

A lire aussi, Pascal Louvrier: Le bal de Radiguet

Préfacé par la maire Hidalgo avec toute la platitude de commande attendue – « Déjà Paris se distinguait comme capitale internationale de la culture et des arts » (sic) –  mais dirigé de main de maître par Juliette Singer, le catalogue de l’exposition rassemble des textes de belle tenue, qui restituent avec toute l’érudition requise l’esprit de ces temps révolus à jamais.  

A voir : Le Paris de la modernité, 1905-1925. Petit-Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris. Exposition jusqu’au 14 avril 2024. Du mardi au dimanche 10h-18h. Nocturnes les vendredis et samedis jusqu’à 20h. Informations et réservations sur petitpalais.paris.fr  

A lire : Catalogue de l’exposition, relié 368p. 280 illustr. Paris Musées.

Le Paris de la modernité

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Non aux crèches de Noël! Oui au Plug anal!

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La crèche municipale de l'hôtel de ville de Perpignan. © Twitter de Louis Aliot / zebulon photo 2023.

Déconstruction. Nos responsables politiques sont excessivement tatillons avec nos jolies crèches de Noël. Alors qu’ils n’ont pas un mot pour les pires horreurs de l’art contemporain. Coup de gueule


Non aux crèches de Noël dans nos villes ! Oui au Plug anal de Paul McCarthy place Vendôme ! Oui aux Boîtes de merda d’artista de Manzoni dans nos musées ! Oui au Vomi et à l’Urine de Ben ! Oui au Vagin de la reine d’Anish Kapoor dans les jardins du Château de Versailles ! Oui à l’Urinoir de Duchamp ! Oui à la monumentale scène de zoophilie, Domestikator, de Van Lieshout devant le centre Pompidou ! Oui à l’érection géante de Mickey au Grand Palais ! Oui au Clitoris dressé comme une mante religieuse sur l’esplanade du Trocadéro ! Oui à la photo primée par la Fnac d’un imbécile s’essuyant les fesses avec l’emblème national ! Oui aux écrans de télévision montrant au CAPC de Bordeaux des enfants se masturbant !  Oui au chaos de pierres tombales déversées par Jan Fabre dans la galerie du Cycle de Marie de Médicis de Rubens au Louvre ! Oui aux pneus de tracteur installés à l’Opéra Garnier par Claude Lévêque mis en examen pour viols sur mineurs ! Oui au Christ en croix noyé dans l’urine à Avignon par Andress Serano ! Oui à la fellation de Miriam Cahn au Palais de Tokyo ! Et encore une fois, non aux crèches de Noël !

Inculture française

Allons plus loin ! Encourageons nos politiques à partager leur inculture française qui, elle, existe bien ! Oui à la nécessité de transmettre ces œuvres magistrales aux jeunes générations ! Oui au financement de la puérilité pour donner des repères à nos collégiens et pouvoir bâtir avec eux un monde adulte ! Oui à la sensibilisation des immigrés à ces joyaux de la création contemporaine pour favoriser leur assimilation ! Oui à cette vulgarité pour combattre la violence et « le risque de basculement de notre société » ! Oui à l’obscénité pour élargir l’approche multiculturaliste de notre nation ! Oui à une initiation décomplexée du sexe pour une appréhension plus ouverte des valeurs de la République ! Oui à la liberté d’expression mais surtout et d’abord au degré zéro de cette liberté pour laquelle serait mort Jean Moulin ! Oui à la vigilance des élus qui emboîtent le pas aux minorités agissantes par peur de porter l’infamie d’un retour à l’ordre moral ! Oui à leur bêtise ! Oui à leur lâcheté !

A lire aussi : Défense et illustration de la bonne langue française

Quand les Français comprendront-ils que lorsque des élus subventionnent la réalisation d’un projet dit artistique, c’est toujours sur fond d’élimination des autres projets en compétition ?  Que pleuvent sur leurs décisions les critiques, les quolibets ou les insultes, ils savent que le projet le plus vulgaire, le plus insignifiant, le plus coûteux sera protégé par la sacro-sainte liberté d’expression dont ils viendront se gargariser sur les plateaux de télévision avec des mines énamourées d’amateur d’art. Sans doute n’avaient-ils à examiner dans leurs commissions opaques que des projets encore plus indignes, plus insignifiants, plus coûteux que ceux qu’ils ont retenus. On va bien sûr les croire.

Ce petit monde pervers et corrompu se moque depuis des années des Français. Ne nous racontons pas d’histoire, c’est sur le plan culturel que les coups de boutoirs contre les fondements de notre société ont commencé d’être portés.  L’autorité s’est sabordée en se commettant avec la lie des impuissants et des prévaricateurs qui ont fait main basse sur nombre d’institutions. L’inquiétante progression de l’insécurité n’est pas tombée du ciel. À l’origine des graves dysfonctionnements dans un pays, on trouve toujours ses dirigeants.

La fronde de la Ligue des droits de l’Homme

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) vient de saisir le tribunal administratif de Montpellier pour demander la suppression de la crèche installée par le maire (RN) Louis Aliot. Sa présidente départementale assure sans honte que « la France et ses racines sont laïques et pas chrétiennes ». Rien d’étonnant, la LDH n’est nullement obsédée par la défense de la laïcité. Elle n’a en effet jamais saisi le tribunal administratif pour demander l’annulation de l’organisation par la Mairie de Paris de la « Nuit du Ramadan » dans les locaux de l’hôtel de ville. N’oublions pas que la LDH avait obtenu du Conseil d’Etat qu’il rappelle que la photo du jeune homme qui s’essuyait les fesses avec le drapeau français était, en tant qu’œuvre d’art, protégée par la liberté d’expression. Ne nous trompons pas, l’attaque récurrente contre les crèches de Noël est une attaque contre la France et les Français. Il s’agit d’un ressentiment à l’égard de ce que nous sommes, de ce que nous avons été, de ce qu’a signifié notre pays aux yeux du monde. « Carthago delenda est ! »

A lire aussi : Les ravis de la crèche

La liberté d’expression est dans notre pays l’enseigne d’une boutique où l’on trouve tout et son contraire. La politique culturelle dans une démocratie représentative consiste à laisser des assemblées d’élus ou des ministres faire les courses de leurs concitoyens à leur place. Au vu des vessies qu’on veut leur faire prendre pour des lanternes depuis des décennies et qui envahissent l’espace public, l’organisation de référendums ne serait pas pire. Elle ne serait pas non plus la solution. Il n’y en a qu’une, même si elle n’est pas satisfaisante : il conviendrait que ceux qui au sommet de l’Etat sont comptables des politiques culturelles sachent ce qu’ils disent, sachent ce qu’ils font.

Quand François Hollande donne une interview au Journal des arts le 30 novembre dernier, il fait comme Nicolas Sarkozy avec son livre Promenades. Tous deux se parfument l’âme pour faire oublier leur mâchoire de petit carnassier. Leur niveau de réflexion sur la culture laisse la voie libre à tous les petits malins qui ont appris à siphonner les crédits de la rue de Valois. « La culture est frondeuse par définition », déclare Hollande qui ainsi parle pour ne rien dire et joint la parole au geste d’hier. Le dimanche 2 avril 2017, il avait rendu visite au Palais de Tokyo à un nommé Antoine Poincheval qui venait de s’enfermer depuis quelques jours dans une cage en plexiglas pour couver une douzaine d’œufs. Ce fut la rencontre au sommet d’un « sans dents » étonné et d’un « sans tête » hilare. Nos misérables politiques, désormais sans aucune tenue, n’ont rien compris. Désemparés, ils regardent maintenant le sang couler dans nos rues.