« On va changer totalement le paradigme du ministère de la Justice. Au lieu de mettre l’accusé au centre, nous allons mettre la victime au centre » a affirmé Gérald Darmanin, sur LCI, mardi soir. Le garde des Sceaux a annoncé que les victimes seront désormais « notifiées » quand leur agresseur sort de prison. Cette instruction ministérielle prendra effet dès lundi prochain.
Gérald Darmanin annonce que les victimes seront notifiées lorsque leur agresseur sort de prison. D’abord, on ne dit pas les victimes sont « notifiées », mais il sera notifié aux victimes que. Cet anglicisme est logique : cette idée sort tout droit des séries policières américaines – dans lesquelles est récurrent le scénario où la victime apprend que son violeur/agresseur/tueur de proche sort de prison. Et généralement, il est resté malfaisant – ce qui témoigne d’une faible confiance dans la capacité de l’être humain à changer et dans celle de la Justice à réinsérer après avoir sanctionné.
Une attente légitime
Il est légitime que les victimes puissent suivre le parcours judiciaire du coupable. Et qu’elles puissent être reçues à leur demande par le Parquet, comme l’annonce également le ministre. Beaucoup disent qu’elles n’ont jamais aucune information, que personne ne s’enquiert de leur sort, que la Justice s’intéresse plus au coupable.
C’est possible, et ce n’est pas complètement anormal : le rôle de la Justice, c’est d’abord de sanctionner les coupables. C’est ça, la première réparation. Mais dans un Etat de droit, pour les sanctionner, on doit prouver (enfin normalement), donc les écouter conformément à nos règles fondamentales (contradictoire etc…). Ce qui me gêne, plus que les mesures concrètes satisfaisantes annoncées par le ministre, c’est donc l’emballage philosophique. Tout cela doit conduire, selon M. Darmanin, à mettre la victime, grande oubliée du système, au centre du système judiciaire.
Mais c’est normal, me répliquera-t-on. Non ! Fausse évidence ! C’est comme pour l’enfant au centre du système scolaire – cette philosophie pédagosiste qui a amené beaucoup de catastrophes… C’est une erreur de point de vue. La Justice est rendue au nom du peuple français, pas de la victime. Certes, le déclencheur c’est le préjudice, la souffrance causée. Mais ce n’est pas la victime qui apprécie le tort, fixe et exécute la peine. Un tiers qui est l’État s’interpose entre victime et coupable. Cela distingue la justice de la vengeance.
La mission première de la Justice, c’est d’abord protéger la société ; la réparation vient après. D’ailleurs, l’Etat poursuit même en l’absence de victimes (par exemple, lors d’un attentat raté) ou quand la victime est une personne morale (par exemple, dans le cas d’un abus de bien social).
Effets secondaires
La sacralisation de la victime a des effets délétères sur la société. Victime devient un statut social dont on ne se sort plus, voire un sujet de gloire (on veut les panthéoniser, on admire leur courage…).
Au lieu d’encourager les gens à se relever, on leur serine avec une gourmandise morbide à longueur de journées que leur trauma est irréparable (« votre vie est foutue et votre violeur va sortir… ») N’écoutons plus ces mauvais psychanalystes ! Non, ta vie n’est pas finie parce que tu as été violée. L’encouragement à la plainte engendre une société de plaintifs. Et se plaindre n’a jamais aidé personne.
Toute une partie de l’opinion estime que Bruno Retailleau est parti sur un coup de tête, et lui reproche d’avoir fait tomber le gouvernement. Désormais, M. Lecornu dirige l’exécutif avec les socialistes, abandonne la réforme des retraites et augmente les impôts… Mais non, l’ancien ministre de l’Intérieur n’est pas « détruit », défend notre chroniqueur…
Dans Le Canard enchaîné, on fait de l’esprit sur « une folle semaine où Macron s’est autodissous et Retailleau autodétruit ». Je vais laisser de côté le président de la République et contester l’appréciation négative portée sur l’ancien ministre de l’Intérieur et le toujours président du parti Les Républicains.
Wauquier-Retailleau, frères ennemis
Si j’insiste sur ce dernier plan, au sujet duquel sa victoire éclatante contre Laurent Wauquiez ne doit pas être oubliée, c’est qu’il m’a semblé que Bruno Retailleau, face à la multitude des nuisances aigres et politiques que le vaincu n’a cessé de lui adresser, a paru, dans un premier temps, éprouver une sorte de timidité pour « cheffer », d’autant plus que sa charge de ministre l’occupait déjà pleinement.
Depuis qu’il a quitté le gouvernement, dans les conditions que l’on sait, je pourrais me féliciter du fait que le parti, entre ses mains, avec le projet qu’il porte, contrairement aux oiseaux de mauvais augure, aux adversaires compulsifs et aux médias à la limite de la condescendance, va enfin forger une identité claire et vigoureuse, tenir une ligne cohérente et courageuse, avec à sa tête une personnalité d’une intégrité absolue, jamais contestée par quiconque. Je ne doute pas que, sorti des miasmes de ces derniers jours, Bruno Retailleau va comprendre que rien n’a changé dans son rapport avec la majorité de l’opinion publique, et que le fait de n’être plus ministre ne va pas obérer son avenir, qu’il soit candidat ou au service d’un autre qu’il aura choisi. Il me semble que sa liberté d’aujourd’hui va lui permettre de se consacrer à sa tâche capitale : créer, ou restaurer, une droite retrouvant l’estime publique non pas avec des promesses démesurées et démagogiques, mais avec la capacité de tenir les engagements plausibles et raisonnables qu’une pensée conservatrice se doit de cultiver.
Exclusions
Contre cette absurdité d’un président de parti qui n’a pas la main sur un groupe parlementaire dirigé par un brillant adversaire sans cesse rétif Laurent Wauquiez, Bruno Retailleau a enfin résolu, devant l’attitude de ministres inconséquents et irresponsables, de les exclure des Républicains – et cette autorité doit être le premier signe d’une conscience collective qui n’a plus honte d’être elle-même – et de rappeler aux députés que la peur de l’élection ne sera jamais la meilleure solution parlementaire, ni une embellie démocratique.
Peut-on douter un seul instant de la validité du point de vue de Bruno Retailleau, en désaccord avec la non-censure prônée par Laurent Wauquiez ? Il pourfend à juste titre l’aval de la suspension de la loi sur les retraites, avec les conséquences financières et calamiteuses qui pourtant en résulteront, validation en totale contradiction avec la vision de la droite républicaine, laquelle tenait à cette distinction capitale avec le Rassemblement national ?
Comment donner tort à Bruno Retailleau qui, la France étant majoritairement à droite, constate – pour la déplorer – la défaite en rase campagne de Sébastien Lecornu qui, malgré une habileté apparente ayant cherché à faire croire que la crise était une opportunité, a offert aux socialistes ce qu’ils réclamaient haut et fort ? Après des relations à la fois masquées et officielles avec Olivier Faure, le Premier ministre a livré, sans combattre, une victoire sur les retraites aux socialistes – sans qu’on soit assuré d’une issue favorable pour eux jusqu’au bout – et probablement ouvert la voie à d’autres avancées catastrophiques, comme la taxe Zucman…
Derrière cette divergence capitale entre Bruno Retailleau (soutenu par les meilleurs de la droite, notamment David Lisnard et François-Xavier Bellamy) et Laurent Wauquiez et ses députés frileux, se cachent à la fois un conflit politique et une dispute morale.
Quand on est de droite, selon Bruno Retailleau, on n’a plus le droit de se trahir ni de faire n’importe quoi. Contrairement à tant d’autres qui ont moqué sa naïveté sans voir que cette perte de confiance en Sébastien Lecornu relevait plus d’une incrédulité humaine que d’un dépit politique, BR est plus que jamais en position de continuer à incarner l’espérance forte qu’il a portée comme ministre hier et comme président des Républicains aujourd’hui. Et demain, pas du tout « détruit », il sera un atout fabuleux pour la droite.
La motion déposée au Parlement par les Combattants pour la liberté économique (EFF) du député sud-africain Julius Malema, visant à retirer des espaces publics tous les monuments liés à l’apartheid et au colonialisme, a une nouvelle fois ranimé la fracture raciale qui traverse le pays
En Afrique du Sud, la mémoire reste un champ de bataille qui met continuellement en lumière les divisions qui opposent les communautés noires et blanches d’Afrique du Sud depuis la fin du régime d’apartheid (1994).
« Rappels matériels »
Une nouvelle fois, connu pour leurs positions radicales et diatribes anti-blanches, les Combattants pour la liberté économique (EFF) n’y sont pas allés par quatre chemins : statues du général et Premier ministre Louis Botha, du Président Paul Kruger, du fondateur du Cap Jan van Riebeeck ou encore le monument Voortrekker érigé à la gloire des Boers qui ont battu les Zoulous à la bataille de Blood River (1838)…, tous ces symboles doivent disparaître de l’espace public selon le mouvement du député Julius Malema. Aux yeux de l’EFF, ils ne sont pas des témoins neutres de l’histoire, mais des rappels permanents de l’oppression raciale vécue par la majorité noire.
« Ce ne sont pas des symboles neutres de l’histoire. Ce sont des monuments du colonialisme et des rappels matériels que, bien que le régime politique de l’apartheid ait été officiellement vaincu, les structures idéologiques, culturelles et économiques de la conquête demeurent intactes », a dénoncé la députée Nontando Nolutshungu à l’origine de la récente motion déposée au Parlement fédéral. Et d’expliquer avec un certain mépris: « C’est pourquoi elles ont été placées dans les centres-villes, devant le Parlement, sur les plus hautes collines, afin que chaque enfant africain ayant grandi sous le colonialisme puisse lever les yeux et voir son oppresseur dépeint comme un héros. ».
En face, AfriForum, puissant lobby afrikaner, a immédiatement dénoncé une « attaque directe contre le patrimoine » de la minorité blanche. Son porte-parole, Ernst van Zyl, a accusé l’EFF de n’avoir rien construit et de se contenter d’encourager « la démolition et la division ». « Les politiciens qui ont prouvé leur impuissance à construire, comme l’EFF, encouragent simplement la destruction et la violence. L’EFF n’ayant pas construit la moindre école promise, ils se concentrent désormais sur des promesses de démolition de statues », a-t-il déclaré.
Héritage colonial ou instruments d’oppression ?
Le cœur du débat est là : ces statues, sont-elles des repères historiques, ou encore des instruments de domination afrikaner ? Pour l’EFF, elles incarnent un système qui a volé la terre, criminalisé les langues africaines et effacé la dignité des Noirs. « Notre patrimoine, ce sont nos terres, nos minéraux et nos océans, et nous ne serons jamais libres tant que ces ressources n’appartiendront pas au peuple », insiste la troisième force politique de l’Afrique du Sud. De son côté, l’African National Congress (ANC) de feu Nelson Mandela tente de temporiser sur la question même si certains de leurs élus ne sont pas opposés à la ré-africanisation totale de l’Afrique du Sud.
Pour baeucoup d’Afrikaners, au contraire, ces velléités menacent l’existence même de leur « volk ». « La suppression d’une partie des symboles, des statues et du patrimoine de la communauté (boer) constitue une tentative éhontée de priver ce groupe de son identité et de son droit d’exister », déplore AfriForum, rappelant que l’histoire regorge d’exemples où « la répression physique ou la violence visant des communautés spécifiques ont été précédées d’actions similaires ».
Une fracture raciale toujours béante
Ce n’est pas la première fois que la question de la présence de ces statues cristallise les tensions. En 2015, des groupes d’étudiants noirs, initiateurs du mouvement #RhodesMustFall,avaient exigé le déboulonnage de la statue de Cecil Rhodes, présente à l’Université du Cap et dont le mausolée antique surplombe la ville du Cap de toute sa majesté. Acteur majeur de l’histoire coloniale britannique, il reste encore de nos jours l’incarnation de la suprématie blanche sur le continent africain. La violence de leur action avait contraint l’université à retirer la statue. Dernièrement c’est celle de Paul Kruger qui a provoqué un vif débat en Afrique du Sud. La statue du dernier dirigeant de la République du Transvaal, qui trône toujours au milieu de Pretoria, fait régulièrement les frais des militants de l’EFF.
Encore dernièrement, le 27 septembre, la jambe d’un des quatre soldats en bronze protégeant la statue de l’homme politique a été fracassée au lendemain de la journée du Patrimoine (Heritage day). Dans la seconde décennie des années 2000, de véritables affrontements avaient eu lieu entre partisans de l’extrême-droite blanche et ceux de l’extrême-gauche aux abords du parc qui abrite la statue. Lors de la vague du Black Lives Matter (BLM) qui avait également secoué le pays, la mairie avait refusé de répondre aux injonctions de cette mouvance exigeant que la statue soit enlevée de son socle.
Pretoria. DR.
L’EFF réclame aussi que les terres des Afrikaners soient redistribuées équitablement à la majorité noire, quand elle n’exige pas qu’on exproprie les blancs de leurs fermes qu’elles détiennent depuis des siècles ou appelle à les tuer. Le parti promet de poursuivre la « décolonisation des symboles » par le biais de lois et d’initiatives locales, comme le changement de nom du parc national Kruger et de l’aéroport international Kruger, qualifiés par ce mouvement d’hommages à un « raciste féroce ». AfriForum, de son côté, entend mobiliser la société civile pour protéger ce qu’il estime être un héritage légitime. Plusieurs milliers d’Afrikaners se sont récemment rassemblé au Voortrrekker monument afin de suivre un discours et un concert du chanteur Steve Hofmeyr connu pour ses slogans nationalistes et pour s’être enchaîné au pied de la statue de Paul Kruger en guise de protestation.
En réponse aux agissements des « décoloniaux » sud-africains, la droite afrikaner a fait ériger une réplique de la statue de Paul Kruger. Elle devrait être placée au centre de la ville d’Orania, un bastion autonome afrikaner qui rejette les principes de la nation arc-en-ciel et qui entend être le point de départ d’un projet devant mener les Afrikaners à prendre leur indépendance du reste de la nation sud-africaine. Plus de trente ans après la fin de l’apartheid, le constat est là : la réconciliation tant vendue par les télévisions du monde entier, Hollywood, compris, est un échec. L’Afrique du Sud reste prisonnière de cette dialectique, incapable à se trouver un récit commun : pour les uns, la mémoire afrikaner incarne l’injustice passée ; pour les autres, elle constitue une identité menacée.
À un sénateur s’inquiétant qu’en France une voiture soit volée toutes les cinq minutes, le ministère de l’Intérieur a cet été répondu (dans le JO du 7 août 2025) que « le renforcement de la présence des forces sur la voie publique est l’une des réponses les plus efficaces pour prévenir le fléau des vols de véhicules ». Comme si policiers et gendarmes n’avaient pas autre chose à faire que surveiller les parkings…
Le tableau, c’est qu’à part le pov’ gars qui se fait faucher sa tire et qu’a pas les thunes pour retrouver un volant, les autres acteurs s’en moquent. Pour les constructeurs, un automobiliste privé de sa voiture est un client potentiel. Les assurances ont bouclé leur ceinture de sécurité : non seulement 50 % des victimes ne sont pas assurées contre le vol (en 2024, alors que le ministère de l’Intérieur a enregistré 93 800 vols de voitures, seulement 47 144 dossiers d’indemnisation ont été déposés auprès des assureurs) et le surcoût est reporté sur les primes des autres automobilistes, comme pour une catastrophe naturelle. Quant au gouvernement qui veut moderniser et électrifier le parc automobile, il peut voir dans le vide causé par les vols une aide au grand remplacement. Et avec un certain cynisme une aide au développement…
Excepté le trafic très spécifique des voitures de grand luxe, la plupart des voitures volées sont la bagnole de M. Tout-le-Monde, des Renault Clio et Mégane, des Peugeot 308 et 3008, toujours des modèles si j’ose dire courants (avec un bon vieux moteur thermique) qui, sur leurs quatre roues ou en pièces détachées, sont mis en container et, depuis les ports de Marseille, de Sète, du Havre ou d’Anvers en Belgique, expédiés en Afrique, où selon Interpol, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Niger ou le Cameroun proposent des salons de l’auto… volée en France[1]. Le gouvernement pourrait en tirer un slogan : acheter une voiture électrique, elle ne sera pas volée, l’Afrique n’est pas équipée pour les faire rouler.
[1] « Interpol s’attaque au trafic de véhicules volés en coordonnant une opération de police en Afrique de l’Ouest », site d’Interpol, le 30 avril 2025 ; « Les voitures volées en France finissent le plus souvent au Mali et au Sénégal », Dakar-Echo.com, le 4 mai 2025.
Emmanuel Macron n’a pas pris la pire des décisions en nommant à Matignon un bon connaisseur de l’armée et de l’industrie de défense. À l’heure où Causeur se demande si le pays est foutu, le secteur militaire incarne peut- être le puissant levier de croissance dont la France a besoin.
Ce fut son dernier discours avant Matignon. Le 4 septembre, Sébastien Lecornu, encore ministre des Armées, était au Mont-Valérien pour inaugurer le commissariat au numérique de défense (CND), une nouvelle agence de renseignement censée, selon ses mots, « positionner la France parmi les trois premières puissances mondiales dans la course à l’IA de défense ». Équipé du plus grand supercalculateur militaire d’Europe, le CND a « l’ambition d’être au numérique ce que le CEA a été à l’atome », résume l’ancien maire de Vernon, très fier de ce projet directement issu de la loi de réarmement qu’il a présentée en 2023 et qui dote nos troupes d’une enveloppe record de 413 milliards d’euros sur les six prochaines années. L’un des seuls textes du gouvernement Borne adoptés sans 49.3.
C’est peu dire que Lecornu laisse, après trois ans et demi en poste, un bon souvenir à l’Hôtel de Brienne. Non content d’y avoir dopé le budget militaire, il peut s’enorgueillir d’une hausse massive des ventes d’armes françaises à l’étranger. La veille de sa nomination, tandis que, dans la salle des Quatre-Colonnes, les journalistes s’efforçaient d’arracher un bon mot aux Insoumis, il communiquait aux députés d’excellents chiffres d’exportation pour l’année 2024 : 21,6 milliards d’euros, soit la deuxième meilleure performance jamais enregistrée dans l’histoire de notre industrie de défense. C’est peut-être la meilleure nouvelle de la rentrée, voire de l’année. Au moment où tout semble perdu pour le pays, on se plaît à croire que l’exception militaire française est notre meilleur espoir de sortir par le haut du marécage économique, politique et social dans lequel nous pataugeons depuis des décennies.
La paix éternelle s’éloigne
Il y a trente ans, cette hypothèse aurait semblé ringarde, voire déplacée. Au début des années 1990, la plupart des dirigeants européens imaginaient qu’un monde pacifié était sur le point d’advenir. Fukuyama annonçait la fin de l’Histoire. Avec la chute de l’empire soviétique, l’usage de la force deviendrait obsolète. Les conflits étant réglés par le droit et le marché, les États pourraient réorienter leurs budgets militaires vers des priorités civiles : éducation, santé, infrastructures. C’est ce qu’on appelait alors les « dividendes de la paix ». Avec le recul, on est confondu par tant de naïveté et par une telle ignorance des enjeux de puissance et d’identité. La paix perpétuelle n’a pas eu lieu, et la promesse économique n’a pas davantage été tenue.
En France, les « dividendes de la paix » sont faciles à chiffrer. Depuis la chute du mur de Berlin, le budget de la défense nationale a connu une décrue continue, passant d’une moyenne de 4 % du PIB pendant la guerre froide à environ 1,8 % sur la période écoulée depuis lors. Si bien que notre pays peut estimer avoir économisé pas moins de 1 440 milliards d’euros depuis 1989. Seulement, au lieu de les investir, nous les avons dépensés pour financer notre train de vie…
L’Histoire a continué et les guerres aussi. L’effritement de l’ordre stratégique mondial, la poussée virulente de l’islamisme guerrier, l’annexion de la Crimée, la guerre au Donbass et l’invasion de l’Ukraine ont réactivé l’impératif du réarmement. Cependant, Emmanuel Macron ne l’a pas compris immédiatement. Sitôt élu en 2017, il impose une coupe de 850 millions d’euros dans le budget de la défense, quitte à provoquer une crise ouverte avec l’état-major et le départ du CEMA (chef d’état-major des armées). Cette décision vise essentiellement à maintenir le déficit public sous la barre des 3 % du PIB, pour rassurer Bruxelles et les marchés. Cependant, dès l’année suivante, il fait voter une hausse du budget annuel de l’armée, qui passe ainsi de 34 milliards en 2018 à 44 milliards en 2023.
À gauche, LFI, le PCF et les écologistes dénoncent une fuite en avant militariste et atlantiste aux dépens de la transition climatique et de la justice sociale. À l’autre bout du spectre politique, si le RN n’est pas hostile au réarmement, il en critique l’orientation et reproche au gouvernement de placer la France dans une dépendance vis-à-vis de l’OTAN, de l’Union européenne et des États-Unis.
Puissant levier de croissance
Cependant, depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, le clivage atlantistes/gaullistes a perdu de sa pertinence. Quel que soit son degré de souverainisme, tout esprit réaliste reconnaît qu’un retrait des troupes américaines du sol européen impose au Vieux Continent d’en compenser l’absence.
La nécessité du réarmement peut être vue comme un fardeau de plus au regard de notre dette publique abyssale. Mais à long terme, il s’agit peut-être d’une opportunité économique et politique unique. La défense est en effet l’un des plus puissants leviers de croissance et de transformation industrielle qu’un pays puisse connaître, les États-Unis en offrent la démonstration éclatante. Depuis plus d’un demi-siècle, le Pentagone est le grand parrain des plus importantes innovations technologiques américaines. Microprocesseurs, internet, GPS, reconnaissance faciale, drones, satellites : tous ces outils ont été inventés au sein de programmes militaires votés à Washington, souvent dans le cadre de l’agence Darpa (Defense Advanced Research Projects Agency).
En France aussi, les retombées de la R&D menée dans le secteur de la défense sont loin d’être négligeables : le laser Mégajoule à Bordeaux ou les technologies de cybersécurité issues de l’Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information) et de la DGA (Direction générale de l’armement) dont de très beaux cas d’école de synergies vertueuses entre politique d’armement et progrès économique. Autre exemple incontournable, le moteur LEAP (Leading Edge Aviation Propulsion, ou propulsion aéronautique de pointe). Fruit d’une collaboration entre l’entreprise française Safran et son concurrent américain General Electric, il équipe aujourd’hui la majorité des avions de ligne moyen-courrier de nouvelle génération, comme l’Airbus A320neo et le Boeing 737 Max. Sa conception est calquée sur celle d’un turboréacteur révolutionnaire initialement mis au point pour des avions de chasse comme le Rafale. En France, le succès du LEAP se mesure en dizaines de milliers d’emplois, notamment dans les usines de Villaroche (Seine-et-Marne), Châtellerault (Vienne), Le Creusot (Saône-et-Loire) et Bordes (Pyrénées-Atlantiques), ainsi que chez les centaines de sous-traitants qui composent l’écosystème aéronautique du pays.
Toutes les activités françaises liées à la défense n’ont pas ce bonheur. Depuis trente ans, les fabricants nationaux de munitions ont vu leurs effectifs divisés par quatre. Longtemps, ce secteur a été piloté par la Direction des poudres, devenue par la suite GIAT Industries puis Nexter. On comptait à l’époque sur le territoire une douzaine de sites majeurs produisant obus, cartouches, explosifs et composants pyrotechniques, souvent en régie directe de l’État. À son apogée, l’ensemble de la filière munitions, y compris la recherche et développement, l’ingénierie, la fabrication et la logistique, représentait près de 20 000 emplois.
Las, au cours des années 2000, Paris a décidé de réduire le stock stratégique français, estimant que le risque de conflit était faible ou limité – ce qui incite à une certaine prudence quant aux prévisions d’experts. Des restructurations ont conduit à la fermeture ou à la reconversion de nombreux établissements, comme à Toulouse ou Angers, et à la privatisation partielle ou totale de certains acteurs, tels que la SNPE, devenue Eurenco. La France s’est retrouvée, comme beaucoup de ses voisins européens, avec une base industrielle de défense fragile, dépendante de quelques sites et de chaînes logistiques ultra-tendues.
L’usine KNDS de Bourges, groupe franco-allemand spécialisé dans la fabrication de chars de combat, véhicules blindés, systèmes d’artillerie et munitions, mars 2025. Charles Bury/SIPA
Au cours de ces mêmes années, la France s’est enfoncée dans une crise économique, marquée par une croissance atone, un déficit budgétaire persistant et une balance commerciale continuellement dégradée. Certes, elle n’est pas seule dans ce cas mais chez nous, le système politique – gouvernants comme gouvernés – a été incapable de parvenir à un consensus sur les causes de ce marasme, donc sur une stratégie crédible de sortie. Un véritable « front du refus » s’est formé, chaque groupe d’intérêts s’efforçant de préserver tel avantage, tel régime spécial ou telle niche fiscale, et de démontrer que c’était aux autres de payer. Les élections de 2022 et plus encore celles de 2024 ont traduit cette incapacité en un rapport de forces parlementaire synonyme de blocage.
Dans ce contexte, une leçon historique mérite d’être rappelée : dans les démocraties libérales, il est plus facile de s’unir contre un ennemi que pour un projet abstrait. Les grandes décisions fondatrices et les redressements économiques ont davantage été imposés par des urgences militaires ou géopolitiques que par des consensus rationnels et progressistes. L’accroissement de notre effort de défense pourrait donc réactiver une dynamique vertueuse. Réarmer la France, ce n’est pas seulement repenser nos priorités de sécurité, mais aussi réengager l’État dans sa mission régalienne, redonner du sens à l’action publique. Sur le plan politique, cela permettrait de nous fédérer autour d’une cause concrète, compréhensible et vitale. Sur le plan économique, ce serait l’occasion de réindustrialiser nos territoires, relancer la recherche publique et privée, dynamiser les formations techniques et créer des dizaines de milliers d’emplois qualifiés, pérennes et bien payés. La France ne doit pas rater ce rendez-vous. On peut faire du réarmement non pas un fardeau et bien plus qu’un investissement, mais une nouvelle boussole pour une transformation nationale. Une urgence, mais aussi une chance.
Selon notre chroniqueur, les Français sont les otages oubliés d’une caste « progressiste » qui se radicalise. Sébastien Lecornu a prononcé hier après midi son discours de politique générale, abandonné la réforme des retraites et pourrait échapper à la censure demain.
Plutôt le retour au socialisme en lambeaux que la parole redonnée aux Français. C’est à cette survie paniquarde que s’est prêté hier Laurent Wauquiez, patron des députés LR, qui a appelé son groupe à ne pas voter la censure demain pour éviter une dissolution et de nouvelles législatives. Cette faute démocratique discrédite son auteur. Son irresponsabilité met aussi un terme à l’ambition qu’avait Bruno Retailleau de faire des Républicains un mouvement alternatif crédible au macronisme. Certes, le président LR a expliqué pour sa part qu’il censurerait le gouvernement, jeudi, s’il était député. François-Xavier Bellamy et David Lisnard sont aussi sur cette position. Cependant, l’absence d’autorité de Retailleau sur sa formation parlementaire le rend spectateur du naufrage de son parti. L’histoire de l’effondrement des LR retiendra que la droite de gouvernement, jugeant le programme RN dangereux car socialiste, aura apporté le soutien de ses députés à une politique dictée par Olivier Faure (PS) et la CFDT à Sébastien Lecornu, pour prix de son sursis comme Premier ministre. Outre la suspension de la réforme des retraites, le gouvernement prévoit 14 milliards d’euros de hausses d’impôts, notamment sur les plus riches, et un programme d’économie réduit au minimum (25 milliards). À moins que les députés LR ne retrouvent très vite la raison en refusant d’acter leur suicide politique, ils s’apprêtent à participer à un putsch parlementaire conduit par un PS fantomatique (10% des députés) représentant une idéologie en faillite ayant fait 1,7% à la dernière présidentielle. La démocratie sera la première victime.
Les Français sont les derniers otages oubliés. Il est urgent de les délivrer d’une classe politique qui a perdu le Nord. Cette caste ne pense qu’à une chose : sauver sa peau en maintenant l’étouffoir sur la société éruptive. Alors que le progressisme est comptable des désastres économiques et civilisationnels accumulés en son nom depuis des décennies, son retour par chantage parlementaire illustre la déchéance d’un système sclérosé et la plaie de l’aveuglement dans la conduite de la politique. L’effondrement du macronisme, avatar de la sociale-démocratie en déroute, a pour effet paradoxal de redonner de l’autorité à des idées tordues. On savait Emmanuel Macron prêt à tout pour s’accrocher à son pouvoir monarchique. Le voir néanmoins se résoudre à enterrer la seule réforme de son quinquennat pour sauver son énième gouvernement dit sa radicalité. Un homme dangereux s’est retranché à l’Elysée. Il est soutenu, dans un pacte de corruption tacite, par des députés qui, comme s’en est félicité Lecornu jeudi dernier, représentent « une majorité absolue qui refuse la dissolution », c’est-à-dire qui craignent une victoire plus que probable du RN. La débandade des LR incitera-t-elle enfin Retailleau à couper les ponts avec ceux de son groupe qui veulent se diluer dans le moribond « bloc central » et qui l’entrainent dans leur traitrise ? Beaucoup de temps a été perdu. Marine Le Pen peut dire merci à ses pitoyables adversaires. Ils la défendent si bien.
Le père d’un chroniqueur judiciaire, magistrat, fait retirer ses trois enfants à une mère. Cela lui est reproché. Le fils décide de mener l’enquête…
Chronique d’un cas de conscience, dernier ouvrage de Pierre Commeine, est-il un roman, un récit et/ou une chronique ? Difficile à dire, même si, dès l’avertissement, son auteur nous prévient : « Ce roman s’inspire d’une histoire bien réelle, comme en témoignent différentes coupures de presse de l’époque, sous le titre : « Rendez-moi mes enfants ! » Cependant, le détail des faits rapportés, la description des lieux ainsi que les noms cités sont strictement de pure fiction. En conséquence, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait que pure coïncidence. »
Pierre Commeine est loin d’être un inconnu. Né dans l’Aisne d’une mère française et d’un père belge, passionné par l’histoire (en particulier la Première Guerre mondiale), la peinture et la photographie, il a publié de nombreux ouvrages, essais et romans.
Le procès Goldman en arrière-plan
Que nous raconte-t-il dans Chronique d’un cas de conscience ? Le chroniqueur judiciaire Philippe Minouflet remet de l’ordre dans les papiers de son père, procureur de profession, récemment décédé. Il découvre un numéro du journal Détective daté du 16 septembre 1957. Dans un article, on lui reproche d’avoir fait retirer à une mère ses trois enfants pour amoralité; le journaliste lui reproche également d’avoir jugé « en son âme et conscience » et non pas en se référant au Code pénal et aux lois en vigueur. Philippe Minouflet décide de mener l’enquête afin de se forger une opinion sur la décision de justice prise par son père. Pour ce faire, il rencontre les témoins de ce drame familial. « Ainsi, détaillant son enquête menée au cours de l’année 1985, il nous raconte le parcours du chroniqueur judiciaire et nous fait suivre le procès de Pierre Goldman à Amiens en 1976 », explique l’éditeur en quatrième de couverture du livre. « Enfin, il nous plonge dans le Vailly-sur-Aisne des années quarante et cinquante, avec celle qui déclarait avoir toujours été déchirée par ses passions de femme en proie à ses démons intérieurs, et qui criait au tribunal : « Rendez-moi mes enfants ! »… »
Dans cet opus à la construction habile mais parfois complexe, on croise beaucoup de monde, dont l’excellent avocat amiénois Pascal Pouillot, le chanteur et producteur Pierre Barouh (proche de Pierre Goldman), Jean-René Huleu, l’un des fondateurs de Libération. Il nous donne à lire de beaux passages sur les deux dernières guerres, en particulier dans l’Aisne, et éclaire avec délicatesse le psychisme d’illustres inconnus dont Lucie Anglade, la mère éplorée. À découvrir.
Chronique d’un cas de conscience, Pierre Commeine ; à contresens éditions. 255 pages.
Ça par exemple! Dans son nouveau parti, Zarah Sultana est confrontée à des tensions internes dues à des divisions idéologiques – doux euphémisme – et à un mystérieux sexisme de ses collègues masculins.
Jeremy Corbyn, le frère d’armes de Jean-Luc Mélenchon en islamo-gauchisme, vient de subir un revers dans sa création d’un nouveau parti destiné à porter cette idéologie socialiste aux relents antisémites. Rappelons que Corbyn, député depuis quarante-deux ans, a été le chef des travaillistes entre 2015 et 2020. Démissionnaire après la défaite humiliante du parti en 2019, il est suspendu par le nouveau leader, Keir Starmer, parce qu’il aurait encouragé une atmosphère de judéophobie décomplexée.
Annonçant qu’il se présentera comme indépendant lors des élections de 2024, il est expulsé du parti. Il forme ensuite une « alliance indépendante » avec quatre autres députés, tous des hommes musulmans élus sur un programme pro-Gaza. En juillet 2025 une nouvelle recrue permet de transformer cette affiliation en parti politique. Il s’agit de Zarah Sultana, 31 ans, musulmane d’ascendance pakistanaise, élue députée travailliste en 2019 et de nouveau en 2024. Suspendue du parti en juillet 2024 pour avoir voté contre le gouvernement de Starmer, elle démissionne un an plus tard et entre en négociations avec Corbyn. Mais quand elle annonce le lancement d’un nouveau parti au nom provisoire de « Your Party », l’entourage de Corbyn l’accuse de prendre une initiative prématurée. Your Party est néanmoins lancé peu après avec les deux élus comme cofondateurs. Pourtant, des fissures refont surface en septembre, quand Sultana lance une invitation en ligne pour recruter des adhérents. Des cadres du parti l’accusent de prendre encore une initiative personnelle et tentent d’annuler l’opération. Des militants favorables à Sultana ripostent en exigeant l’élection d’un comité directeur.
Cependant les désaccords ne portent pas que sur le modèle de fonctionnement. Le transgenrisme, fer de lance progressiste, ne plaît pas aux musulmans conservateurs, tandis que Sultana n’avait pas compté avec le masculinisme de ses coreligionnaires. Elle se prétend marginalisée par ses collègues qu’elle accuse de former un « club pour garçons sexiste ». Islam et gauchisme ne font pas toujours bon ménage.
Les autorités françaises, à quelque niveau que ce soit, ne sont pas à la hauteur. Et Boualem Sansal va croupir en enfermement jusqu’à sa mort si une poigne politique ne s’en mêle pas !
Comment ne pas songer, en ces jours miraculeux, au président Donald Trump qui a réussi le tour de force, à la fois en soutenant Israël et en contraignant le Hamas, de faire libérer les trop rares otages encore vivants, avec tous les disparus – il n’y a plus une seule femme… – après ces 738 jours d’enfer ?
Cette immense allégresse collective, consensuelle et déchirante, qui a rassemblé dans une sombre joie les Israéliens, avec ce splendide hymne composé pour la libération des otages et leur « retour au pays », sera inoubliable, et le 13 octobre un jour à jamais singulier, où les affrontements politiques, à peu près partout, ont cédé le pas à un bonheur intense.
Certes ce n’est que la première phase du plan de Donald Trump mais puis-je dire qu’elle se suffit pour l’instant à elle-même, dans l’attente de la deuxième – avec la menace d’un Hamas réglant ses comptes – et des suivantes qui promettent d’être encore plus délicates. Elles seront cependant dans les mains et l’énergie d’un homme qui accomplit ce qu’il annonce et n’a pas pour vocation de rompre devant les obstacles diplomatiques et une Histoire faite de crises paraissant insolubles…
Je n’oublie pas la Russie et l’Ukraine et j’ai bien conscience que, s’étant heurté à un dictateur cynique, sans foi ni loi, Vladimir Poutine, il s’est d’une certaine manière désengagé, en devenant pourtant plus équitable avec le président Zelensky, au profit de cet Himalaya concernant le conflit israélo-palestinien.
J’admets volontiers que le comportement du président Trump, lunatique, instable, fluctuant, contradictoire, m’a à plusieurs reprises inquiété et déplu mais que pèse ma modeste critique face à ce triomphe des vies sauvegardées et arrachées à leurs bourreaux ! Pour moi, Donald Trump restera pour toujours l’homme de ce salut auquel personne ne croyait. Sauf lui.
Je n’ai pas aimé, de notre piètre ministre des Affaires étrangères jusqu’à Valérie Hayer face à Robert Ménard (sur BFM TV), la réticence, voire le dédain, avec lesquels les autorités françaises ont cherché à se tailler une mince place dans une négociation et une pression américaines qui les ont dépassées…
Il est clair qu’on ne saurait attendre de la France, diminuée et affaiblie comme elle est sur le plan national, un rôle équivalent à celui de l’immense puissance américaine désireuse, en permanence, de se manifester et de permettre à son président atypique de faire mentir ses adversaires compulsifs… En revanche, de notre pays, il aurait été sain d’entendre des éloges sans aigreur et le fair play d’une « grenouille n’aspirant pas à se faire passer pour un bœuf »…
Boualem Sansal est en train de disparaître, de subir l’inaction coupable de nos dirigeants, même si cette personnalité extraordinaire et indomptable ne s’efface pas de nos mémoires. C’est pourquoi, aussi absurde que soit mon appel, aussi utopique qu’apparaisse, à ce point, l’immixtion de Donald Trump dans nos affaires, je me résous à adresser au président américain cette injonction admirative : Donald Trump, faites libérer Boualem Sansal !
Appropriation culturelle : retour sur la terrible affaire entre le Mexique et Adidas
Le 8 août, la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum Pardo s’avance sur la scène du Palais national de Mexico. Derrière elle, l’objet de sa conférence de presse – et de son courroux – s’affiche sur un écran géant : il s’agit… d’une paire de baskets Adidas.
Une vive polémique secoue en effet le pays depuis le lancement du dernier modèle de la firme allemande. Baptisé « Oaxaca Slip-On », celui-ci s’inspire ouvertement des huaraches, sandales traditionnelles tressées qui font la fierté des artisans de la région d’Oaxaca depuis des générations. Mais une banale accusation de plagiat industriel ne saurait suffire : assez vite, l’infamant chiffon rouge de l’appropriation culturelle est agité. « Ce n’est pas seulement un design, il s’agit de la culture, de l’histoire et de l’identité d’un peuple, et nous ne permettrons pas qu’il soit traité comme une marchandise », a tonné, avec force lyrisme, Salomon Jara Cruz, gouverneur de l’État d’Oaxaca, sur X. Car au Mexique, on ne badine pas avec la question indigéniste : depuis 2021, la loi prévoit des amendes, voire des peines de prison, en cas « d’utilisation non autorisée de la propriété intellectuelle et culturelle des peuples indigènes et afro-mexicains ». Plusieurs fabricants de prêt-à-porter tels que Shein, Zara ou Isabelle Marant ont d’ores et déjà été poursuivis pour ce motif.
Prise dans la tourmente des réseaux sociaux, menacée d’une action judiciaire, la marque aux trois bandes espère limiter le « bad buzz » en s’engageant à collaborer avec la communauté locale « dans un dialogue respectueux qui honore son héritage culturel ». Les excuses fébriles pleuvent comme à Gravelotte : Willy Chavarria, le designer – américain d’origine mexicaine – des souliers de la discorde se répand en remords et contritions publiques. Mais rien n’y fera, et les sneakers honnies seront, fin août, définitivement retirées des plateformes de vente. Plus que jamais, l’extension du domaine de l’appropriation culturelle est en marche. Et la décolonisation s’applique intégralement, de la tête aux pieds.
« On va changer totalement le paradigme du ministère de la Justice. Au lieu de mettre l’accusé au centre, nous allons mettre la victime au centre » a affirmé Gérald Darmanin, sur LCI, mardi soir. Le garde des Sceaux a annoncé que les victimes seront désormais « notifiées » quand leur agresseur sort de prison. Cette instruction ministérielle prendra effet dès lundi prochain.
Gérald Darmanin annonce que les victimes seront notifiées lorsque leur agresseur sort de prison. D’abord, on ne dit pas les victimes sont « notifiées », mais il sera notifié aux victimes que. Cet anglicisme est logique : cette idée sort tout droit des séries policières américaines – dans lesquelles est récurrent le scénario où la victime apprend que son violeur/agresseur/tueur de proche sort de prison. Et généralement, il est resté malfaisant – ce qui témoigne d’une faible confiance dans la capacité de l’être humain à changer et dans celle de la Justice à réinsérer après avoir sanctionné.
Une attente légitime
Il est légitime que les victimes puissent suivre le parcours judiciaire du coupable. Et qu’elles puissent être reçues à leur demande par le Parquet, comme l’annonce également le ministre. Beaucoup disent qu’elles n’ont jamais aucune information, que personne ne s’enquiert de leur sort, que la Justice s’intéresse plus au coupable.
C’est possible, et ce n’est pas complètement anormal : le rôle de la Justice, c’est d’abord de sanctionner les coupables. C’est ça, la première réparation. Mais dans un Etat de droit, pour les sanctionner, on doit prouver (enfin normalement), donc les écouter conformément à nos règles fondamentales (contradictoire etc…). Ce qui me gêne, plus que les mesures concrètes satisfaisantes annoncées par le ministre, c’est donc l’emballage philosophique. Tout cela doit conduire, selon M. Darmanin, à mettre la victime, grande oubliée du système, au centre du système judiciaire.
Mais c’est normal, me répliquera-t-on. Non ! Fausse évidence ! C’est comme pour l’enfant au centre du système scolaire – cette philosophie pédagosiste qui a amené beaucoup de catastrophes… C’est une erreur de point de vue. La Justice est rendue au nom du peuple français, pas de la victime. Certes, le déclencheur c’est le préjudice, la souffrance causée. Mais ce n’est pas la victime qui apprécie le tort, fixe et exécute la peine. Un tiers qui est l’État s’interpose entre victime et coupable. Cela distingue la justice de la vengeance.
La mission première de la Justice, c’est d’abord protéger la société ; la réparation vient après. D’ailleurs, l’Etat poursuit même en l’absence de victimes (par exemple, lors d’un attentat raté) ou quand la victime est une personne morale (par exemple, dans le cas d’un abus de bien social).
Effets secondaires
La sacralisation de la victime a des effets délétères sur la société. Victime devient un statut social dont on ne se sort plus, voire un sujet de gloire (on veut les panthéoniser, on admire leur courage…).
Au lieu d’encourager les gens à se relever, on leur serine avec une gourmandise morbide à longueur de journées que leur trauma est irréparable (« votre vie est foutue et votre violeur va sortir… ») N’écoutons plus ces mauvais psychanalystes ! Non, ta vie n’est pas finie parce que tu as été violée. L’encouragement à la plainte engendre une société de plaintifs. Et se plaindre n’a jamais aidé personne.
Toute une partie de l’opinion estime que Bruno Retailleau est parti sur un coup de tête, et lui reproche d’avoir fait tomber le gouvernement. Désormais, M. Lecornu dirige l’exécutif avec les socialistes, abandonne la réforme des retraites et augmente les impôts… Mais non, l’ancien ministre de l’Intérieur n’est pas « détruit », défend notre chroniqueur…
Dans Le Canard enchaîné, on fait de l’esprit sur « une folle semaine où Macron s’est autodissous et Retailleau autodétruit ». Je vais laisser de côté le président de la République et contester l’appréciation négative portée sur l’ancien ministre de l’Intérieur et le toujours président du parti Les Républicains.
Wauquier-Retailleau, frères ennemis
Si j’insiste sur ce dernier plan, au sujet duquel sa victoire éclatante contre Laurent Wauquiez ne doit pas être oubliée, c’est qu’il m’a semblé que Bruno Retailleau, face à la multitude des nuisances aigres et politiques que le vaincu n’a cessé de lui adresser, a paru, dans un premier temps, éprouver une sorte de timidité pour « cheffer », d’autant plus que sa charge de ministre l’occupait déjà pleinement.
Depuis qu’il a quitté le gouvernement, dans les conditions que l’on sait, je pourrais me féliciter du fait que le parti, entre ses mains, avec le projet qu’il porte, contrairement aux oiseaux de mauvais augure, aux adversaires compulsifs et aux médias à la limite de la condescendance, va enfin forger une identité claire et vigoureuse, tenir une ligne cohérente et courageuse, avec à sa tête une personnalité d’une intégrité absolue, jamais contestée par quiconque. Je ne doute pas que, sorti des miasmes de ces derniers jours, Bruno Retailleau va comprendre que rien n’a changé dans son rapport avec la majorité de l’opinion publique, et que le fait de n’être plus ministre ne va pas obérer son avenir, qu’il soit candidat ou au service d’un autre qu’il aura choisi. Il me semble que sa liberté d’aujourd’hui va lui permettre de se consacrer à sa tâche capitale : créer, ou restaurer, une droite retrouvant l’estime publique non pas avec des promesses démesurées et démagogiques, mais avec la capacité de tenir les engagements plausibles et raisonnables qu’une pensée conservatrice se doit de cultiver.
Exclusions
Contre cette absurdité d’un président de parti qui n’a pas la main sur un groupe parlementaire dirigé par un brillant adversaire sans cesse rétif Laurent Wauquiez, Bruno Retailleau a enfin résolu, devant l’attitude de ministres inconséquents et irresponsables, de les exclure des Républicains – et cette autorité doit être le premier signe d’une conscience collective qui n’a plus honte d’être elle-même – et de rappeler aux députés que la peur de l’élection ne sera jamais la meilleure solution parlementaire, ni une embellie démocratique.
Peut-on douter un seul instant de la validité du point de vue de Bruno Retailleau, en désaccord avec la non-censure prônée par Laurent Wauquiez ? Il pourfend à juste titre l’aval de la suspension de la loi sur les retraites, avec les conséquences financières et calamiteuses qui pourtant en résulteront, validation en totale contradiction avec la vision de la droite républicaine, laquelle tenait à cette distinction capitale avec le Rassemblement national ?
Comment donner tort à Bruno Retailleau qui, la France étant majoritairement à droite, constate – pour la déplorer – la défaite en rase campagne de Sébastien Lecornu qui, malgré une habileté apparente ayant cherché à faire croire que la crise était une opportunité, a offert aux socialistes ce qu’ils réclamaient haut et fort ? Après des relations à la fois masquées et officielles avec Olivier Faure, le Premier ministre a livré, sans combattre, une victoire sur les retraites aux socialistes – sans qu’on soit assuré d’une issue favorable pour eux jusqu’au bout – et probablement ouvert la voie à d’autres avancées catastrophiques, comme la taxe Zucman…
Derrière cette divergence capitale entre Bruno Retailleau (soutenu par les meilleurs de la droite, notamment David Lisnard et François-Xavier Bellamy) et Laurent Wauquiez et ses députés frileux, se cachent à la fois un conflit politique et une dispute morale.
Quand on est de droite, selon Bruno Retailleau, on n’a plus le droit de se trahir ni de faire n’importe quoi. Contrairement à tant d’autres qui ont moqué sa naïveté sans voir que cette perte de confiance en Sébastien Lecornu relevait plus d’une incrédulité humaine que d’un dépit politique, BR est plus que jamais en position de continuer à incarner l’espérance forte qu’il a portée comme ministre hier et comme président des Républicains aujourd’hui. Et demain, pas du tout « détruit », il sera un atout fabuleux pour la droite.
La motion déposée au Parlement par les Combattants pour la liberté économique (EFF) du député sud-africain Julius Malema, visant à retirer des espaces publics tous les monuments liés à l’apartheid et au colonialisme, a une nouvelle fois ranimé la fracture raciale qui traverse le pays
En Afrique du Sud, la mémoire reste un champ de bataille qui met continuellement en lumière les divisions qui opposent les communautés noires et blanches d’Afrique du Sud depuis la fin du régime d’apartheid (1994).
« Rappels matériels »
Une nouvelle fois, connu pour leurs positions radicales et diatribes anti-blanches, les Combattants pour la liberté économique (EFF) n’y sont pas allés par quatre chemins : statues du général et Premier ministre Louis Botha, du Président Paul Kruger, du fondateur du Cap Jan van Riebeeck ou encore le monument Voortrekker érigé à la gloire des Boers qui ont battu les Zoulous à la bataille de Blood River (1838)…, tous ces symboles doivent disparaître de l’espace public selon le mouvement du député Julius Malema. Aux yeux de l’EFF, ils ne sont pas des témoins neutres de l’histoire, mais des rappels permanents de l’oppression raciale vécue par la majorité noire.
« Ce ne sont pas des symboles neutres de l’histoire. Ce sont des monuments du colonialisme et des rappels matériels que, bien que le régime politique de l’apartheid ait été officiellement vaincu, les structures idéologiques, culturelles et économiques de la conquête demeurent intactes », a dénoncé la députée Nontando Nolutshungu à l’origine de la récente motion déposée au Parlement fédéral. Et d’expliquer avec un certain mépris: « C’est pourquoi elles ont été placées dans les centres-villes, devant le Parlement, sur les plus hautes collines, afin que chaque enfant africain ayant grandi sous le colonialisme puisse lever les yeux et voir son oppresseur dépeint comme un héros. ».
En face, AfriForum, puissant lobby afrikaner, a immédiatement dénoncé une « attaque directe contre le patrimoine » de la minorité blanche. Son porte-parole, Ernst van Zyl, a accusé l’EFF de n’avoir rien construit et de se contenter d’encourager « la démolition et la division ». « Les politiciens qui ont prouvé leur impuissance à construire, comme l’EFF, encouragent simplement la destruction et la violence. L’EFF n’ayant pas construit la moindre école promise, ils se concentrent désormais sur des promesses de démolition de statues », a-t-il déclaré.
Héritage colonial ou instruments d’oppression ?
Le cœur du débat est là : ces statues, sont-elles des repères historiques, ou encore des instruments de domination afrikaner ? Pour l’EFF, elles incarnent un système qui a volé la terre, criminalisé les langues africaines et effacé la dignité des Noirs. « Notre patrimoine, ce sont nos terres, nos minéraux et nos océans, et nous ne serons jamais libres tant que ces ressources n’appartiendront pas au peuple », insiste la troisième force politique de l’Afrique du Sud. De son côté, l’African National Congress (ANC) de feu Nelson Mandela tente de temporiser sur la question même si certains de leurs élus ne sont pas opposés à la ré-africanisation totale de l’Afrique du Sud.
Pour baeucoup d’Afrikaners, au contraire, ces velléités menacent l’existence même de leur « volk ». « La suppression d’une partie des symboles, des statues et du patrimoine de la communauté (boer) constitue une tentative éhontée de priver ce groupe de son identité et de son droit d’exister », déplore AfriForum, rappelant que l’histoire regorge d’exemples où « la répression physique ou la violence visant des communautés spécifiques ont été précédées d’actions similaires ».
Une fracture raciale toujours béante
Ce n’est pas la première fois que la question de la présence de ces statues cristallise les tensions. En 2015, des groupes d’étudiants noirs, initiateurs du mouvement #RhodesMustFall,avaient exigé le déboulonnage de la statue de Cecil Rhodes, présente à l’Université du Cap et dont le mausolée antique surplombe la ville du Cap de toute sa majesté. Acteur majeur de l’histoire coloniale britannique, il reste encore de nos jours l’incarnation de la suprématie blanche sur le continent africain. La violence de leur action avait contraint l’université à retirer la statue. Dernièrement c’est celle de Paul Kruger qui a provoqué un vif débat en Afrique du Sud. La statue du dernier dirigeant de la République du Transvaal, qui trône toujours au milieu de Pretoria, fait régulièrement les frais des militants de l’EFF.
Encore dernièrement, le 27 septembre, la jambe d’un des quatre soldats en bronze protégeant la statue de l’homme politique a été fracassée au lendemain de la journée du Patrimoine (Heritage day). Dans la seconde décennie des années 2000, de véritables affrontements avaient eu lieu entre partisans de l’extrême-droite blanche et ceux de l’extrême-gauche aux abords du parc qui abrite la statue. Lors de la vague du Black Lives Matter (BLM) qui avait également secoué le pays, la mairie avait refusé de répondre aux injonctions de cette mouvance exigeant que la statue soit enlevée de son socle.
Pretoria. DR.
L’EFF réclame aussi que les terres des Afrikaners soient redistribuées équitablement à la majorité noire, quand elle n’exige pas qu’on exproprie les blancs de leurs fermes qu’elles détiennent depuis des siècles ou appelle à les tuer. Le parti promet de poursuivre la « décolonisation des symboles » par le biais de lois et d’initiatives locales, comme le changement de nom du parc national Kruger et de l’aéroport international Kruger, qualifiés par ce mouvement d’hommages à un « raciste féroce ». AfriForum, de son côté, entend mobiliser la société civile pour protéger ce qu’il estime être un héritage légitime. Plusieurs milliers d’Afrikaners se sont récemment rassemblé au Voortrrekker monument afin de suivre un discours et un concert du chanteur Steve Hofmeyr connu pour ses slogans nationalistes et pour s’être enchaîné au pied de la statue de Paul Kruger en guise de protestation.
En réponse aux agissements des « décoloniaux » sud-africains, la droite afrikaner a fait ériger une réplique de la statue de Paul Kruger. Elle devrait être placée au centre de la ville d’Orania, un bastion autonome afrikaner qui rejette les principes de la nation arc-en-ciel et qui entend être le point de départ d’un projet devant mener les Afrikaners à prendre leur indépendance du reste de la nation sud-africaine. Plus de trente ans après la fin de l’apartheid, le constat est là : la réconciliation tant vendue par les télévisions du monde entier, Hollywood, compris, est un échec. L’Afrique du Sud reste prisonnière de cette dialectique, incapable à se trouver un récit commun : pour les uns, la mémoire afrikaner incarne l’injustice passée ; pour les autres, elle constitue une identité menacée.
À un sénateur s’inquiétant qu’en France une voiture soit volée toutes les cinq minutes, le ministère de l’Intérieur a cet été répondu (dans le JO du 7 août 2025) que « le renforcement de la présence des forces sur la voie publique est l’une des réponses les plus efficaces pour prévenir le fléau des vols de véhicules ». Comme si policiers et gendarmes n’avaient pas autre chose à faire que surveiller les parkings…
Le tableau, c’est qu’à part le pov’ gars qui se fait faucher sa tire et qu’a pas les thunes pour retrouver un volant, les autres acteurs s’en moquent. Pour les constructeurs, un automobiliste privé de sa voiture est un client potentiel. Les assurances ont bouclé leur ceinture de sécurité : non seulement 50 % des victimes ne sont pas assurées contre le vol (en 2024, alors que le ministère de l’Intérieur a enregistré 93 800 vols de voitures, seulement 47 144 dossiers d’indemnisation ont été déposés auprès des assureurs) et le surcoût est reporté sur les primes des autres automobilistes, comme pour une catastrophe naturelle. Quant au gouvernement qui veut moderniser et électrifier le parc automobile, il peut voir dans le vide causé par les vols une aide au grand remplacement. Et avec un certain cynisme une aide au développement…
Excepté le trafic très spécifique des voitures de grand luxe, la plupart des voitures volées sont la bagnole de M. Tout-le-Monde, des Renault Clio et Mégane, des Peugeot 308 et 3008, toujours des modèles si j’ose dire courants (avec un bon vieux moteur thermique) qui, sur leurs quatre roues ou en pièces détachées, sont mis en container et, depuis les ports de Marseille, de Sète, du Havre ou d’Anvers en Belgique, expédiés en Afrique, où selon Interpol, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Niger ou le Cameroun proposent des salons de l’auto… volée en France[1]. Le gouvernement pourrait en tirer un slogan : acheter une voiture électrique, elle ne sera pas volée, l’Afrique n’est pas équipée pour les faire rouler.
[1] « Interpol s’attaque au trafic de véhicules volés en coordonnant une opération de police en Afrique de l’Ouest », site d’Interpol, le 30 avril 2025 ; « Les voitures volées en France finissent le plus souvent au Mali et au Sénégal », Dakar-Echo.com, le 4 mai 2025.
Emmanuel Macron n’a pas pris la pire des décisions en nommant à Matignon un bon connaisseur de l’armée et de l’industrie de défense. À l’heure où Causeur se demande si le pays est foutu, le secteur militaire incarne peut- être le puissant levier de croissance dont la France a besoin.
Ce fut son dernier discours avant Matignon. Le 4 septembre, Sébastien Lecornu, encore ministre des Armées, était au Mont-Valérien pour inaugurer le commissariat au numérique de défense (CND), une nouvelle agence de renseignement censée, selon ses mots, « positionner la France parmi les trois premières puissances mondiales dans la course à l’IA de défense ». Équipé du plus grand supercalculateur militaire d’Europe, le CND a « l’ambition d’être au numérique ce que le CEA a été à l’atome », résume l’ancien maire de Vernon, très fier de ce projet directement issu de la loi de réarmement qu’il a présentée en 2023 et qui dote nos troupes d’une enveloppe record de 413 milliards d’euros sur les six prochaines années. L’un des seuls textes du gouvernement Borne adoptés sans 49.3.
C’est peu dire que Lecornu laisse, après trois ans et demi en poste, un bon souvenir à l’Hôtel de Brienne. Non content d’y avoir dopé le budget militaire, il peut s’enorgueillir d’une hausse massive des ventes d’armes françaises à l’étranger. La veille de sa nomination, tandis que, dans la salle des Quatre-Colonnes, les journalistes s’efforçaient d’arracher un bon mot aux Insoumis, il communiquait aux députés d’excellents chiffres d’exportation pour l’année 2024 : 21,6 milliards d’euros, soit la deuxième meilleure performance jamais enregistrée dans l’histoire de notre industrie de défense. C’est peut-être la meilleure nouvelle de la rentrée, voire de l’année. Au moment où tout semble perdu pour le pays, on se plaît à croire que l’exception militaire française est notre meilleur espoir de sortir par le haut du marécage économique, politique et social dans lequel nous pataugeons depuis des décennies.
La paix éternelle s’éloigne
Il y a trente ans, cette hypothèse aurait semblé ringarde, voire déplacée. Au début des années 1990, la plupart des dirigeants européens imaginaient qu’un monde pacifié était sur le point d’advenir. Fukuyama annonçait la fin de l’Histoire. Avec la chute de l’empire soviétique, l’usage de la force deviendrait obsolète. Les conflits étant réglés par le droit et le marché, les États pourraient réorienter leurs budgets militaires vers des priorités civiles : éducation, santé, infrastructures. C’est ce qu’on appelait alors les « dividendes de la paix ». Avec le recul, on est confondu par tant de naïveté et par une telle ignorance des enjeux de puissance et d’identité. La paix perpétuelle n’a pas eu lieu, et la promesse économique n’a pas davantage été tenue.
En France, les « dividendes de la paix » sont faciles à chiffrer. Depuis la chute du mur de Berlin, le budget de la défense nationale a connu une décrue continue, passant d’une moyenne de 4 % du PIB pendant la guerre froide à environ 1,8 % sur la période écoulée depuis lors. Si bien que notre pays peut estimer avoir économisé pas moins de 1 440 milliards d’euros depuis 1989. Seulement, au lieu de les investir, nous les avons dépensés pour financer notre train de vie…
L’Histoire a continué et les guerres aussi. L’effritement de l’ordre stratégique mondial, la poussée virulente de l’islamisme guerrier, l’annexion de la Crimée, la guerre au Donbass et l’invasion de l’Ukraine ont réactivé l’impératif du réarmement. Cependant, Emmanuel Macron ne l’a pas compris immédiatement. Sitôt élu en 2017, il impose une coupe de 850 millions d’euros dans le budget de la défense, quitte à provoquer une crise ouverte avec l’état-major et le départ du CEMA (chef d’état-major des armées). Cette décision vise essentiellement à maintenir le déficit public sous la barre des 3 % du PIB, pour rassurer Bruxelles et les marchés. Cependant, dès l’année suivante, il fait voter une hausse du budget annuel de l’armée, qui passe ainsi de 34 milliards en 2018 à 44 milliards en 2023.
À gauche, LFI, le PCF et les écologistes dénoncent une fuite en avant militariste et atlantiste aux dépens de la transition climatique et de la justice sociale. À l’autre bout du spectre politique, si le RN n’est pas hostile au réarmement, il en critique l’orientation et reproche au gouvernement de placer la France dans une dépendance vis-à-vis de l’OTAN, de l’Union européenne et des États-Unis.
Puissant levier de croissance
Cependant, depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, le clivage atlantistes/gaullistes a perdu de sa pertinence. Quel que soit son degré de souverainisme, tout esprit réaliste reconnaît qu’un retrait des troupes américaines du sol européen impose au Vieux Continent d’en compenser l’absence.
La nécessité du réarmement peut être vue comme un fardeau de plus au regard de notre dette publique abyssale. Mais à long terme, il s’agit peut-être d’une opportunité économique et politique unique. La défense est en effet l’un des plus puissants leviers de croissance et de transformation industrielle qu’un pays puisse connaître, les États-Unis en offrent la démonstration éclatante. Depuis plus d’un demi-siècle, le Pentagone est le grand parrain des plus importantes innovations technologiques américaines. Microprocesseurs, internet, GPS, reconnaissance faciale, drones, satellites : tous ces outils ont été inventés au sein de programmes militaires votés à Washington, souvent dans le cadre de l’agence Darpa (Defense Advanced Research Projects Agency).
En France aussi, les retombées de la R&D menée dans le secteur de la défense sont loin d’être négligeables : le laser Mégajoule à Bordeaux ou les technologies de cybersécurité issues de l’Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information) et de la DGA (Direction générale de l’armement) dont de très beaux cas d’école de synergies vertueuses entre politique d’armement et progrès économique. Autre exemple incontournable, le moteur LEAP (Leading Edge Aviation Propulsion, ou propulsion aéronautique de pointe). Fruit d’une collaboration entre l’entreprise française Safran et son concurrent américain General Electric, il équipe aujourd’hui la majorité des avions de ligne moyen-courrier de nouvelle génération, comme l’Airbus A320neo et le Boeing 737 Max. Sa conception est calquée sur celle d’un turboréacteur révolutionnaire initialement mis au point pour des avions de chasse comme le Rafale. En France, le succès du LEAP se mesure en dizaines de milliers d’emplois, notamment dans les usines de Villaroche (Seine-et-Marne), Châtellerault (Vienne), Le Creusot (Saône-et-Loire) et Bordes (Pyrénées-Atlantiques), ainsi que chez les centaines de sous-traitants qui composent l’écosystème aéronautique du pays.
Toutes les activités françaises liées à la défense n’ont pas ce bonheur. Depuis trente ans, les fabricants nationaux de munitions ont vu leurs effectifs divisés par quatre. Longtemps, ce secteur a été piloté par la Direction des poudres, devenue par la suite GIAT Industries puis Nexter. On comptait à l’époque sur le territoire une douzaine de sites majeurs produisant obus, cartouches, explosifs et composants pyrotechniques, souvent en régie directe de l’État. À son apogée, l’ensemble de la filière munitions, y compris la recherche et développement, l’ingénierie, la fabrication et la logistique, représentait près de 20 000 emplois.
Las, au cours des années 2000, Paris a décidé de réduire le stock stratégique français, estimant que le risque de conflit était faible ou limité – ce qui incite à une certaine prudence quant aux prévisions d’experts. Des restructurations ont conduit à la fermeture ou à la reconversion de nombreux établissements, comme à Toulouse ou Angers, et à la privatisation partielle ou totale de certains acteurs, tels que la SNPE, devenue Eurenco. La France s’est retrouvée, comme beaucoup de ses voisins européens, avec une base industrielle de défense fragile, dépendante de quelques sites et de chaînes logistiques ultra-tendues.
L’usine KNDS de Bourges, groupe franco-allemand spécialisé dans la fabrication de chars de combat, véhicules blindés, systèmes d’artillerie et munitions, mars 2025. Charles Bury/SIPA
Au cours de ces mêmes années, la France s’est enfoncée dans une crise économique, marquée par une croissance atone, un déficit budgétaire persistant et une balance commerciale continuellement dégradée. Certes, elle n’est pas seule dans ce cas mais chez nous, le système politique – gouvernants comme gouvernés – a été incapable de parvenir à un consensus sur les causes de ce marasme, donc sur une stratégie crédible de sortie. Un véritable « front du refus » s’est formé, chaque groupe d’intérêts s’efforçant de préserver tel avantage, tel régime spécial ou telle niche fiscale, et de démontrer que c’était aux autres de payer. Les élections de 2022 et plus encore celles de 2024 ont traduit cette incapacité en un rapport de forces parlementaire synonyme de blocage.
Dans ce contexte, une leçon historique mérite d’être rappelée : dans les démocraties libérales, il est plus facile de s’unir contre un ennemi que pour un projet abstrait. Les grandes décisions fondatrices et les redressements économiques ont davantage été imposés par des urgences militaires ou géopolitiques que par des consensus rationnels et progressistes. L’accroissement de notre effort de défense pourrait donc réactiver une dynamique vertueuse. Réarmer la France, ce n’est pas seulement repenser nos priorités de sécurité, mais aussi réengager l’État dans sa mission régalienne, redonner du sens à l’action publique. Sur le plan politique, cela permettrait de nous fédérer autour d’une cause concrète, compréhensible et vitale. Sur le plan économique, ce serait l’occasion de réindustrialiser nos territoires, relancer la recherche publique et privée, dynamiser les formations techniques et créer des dizaines de milliers d’emplois qualifiés, pérennes et bien payés. La France ne doit pas rater ce rendez-vous. On peut faire du réarmement non pas un fardeau et bien plus qu’un investissement, mais une nouvelle boussole pour une transformation nationale. Une urgence, mais aussi une chance.
Selon notre chroniqueur, les Français sont les otages oubliés d’une caste « progressiste » qui se radicalise. Sébastien Lecornu a prononcé hier après midi son discours de politique générale, abandonné la réforme des retraites et pourrait échapper à la censure demain.
Plutôt le retour au socialisme en lambeaux que la parole redonnée aux Français. C’est à cette survie paniquarde que s’est prêté hier Laurent Wauquiez, patron des députés LR, qui a appelé son groupe à ne pas voter la censure demain pour éviter une dissolution et de nouvelles législatives. Cette faute démocratique discrédite son auteur. Son irresponsabilité met aussi un terme à l’ambition qu’avait Bruno Retailleau de faire des Républicains un mouvement alternatif crédible au macronisme. Certes, le président LR a expliqué pour sa part qu’il censurerait le gouvernement, jeudi, s’il était député. François-Xavier Bellamy et David Lisnard sont aussi sur cette position. Cependant, l’absence d’autorité de Retailleau sur sa formation parlementaire le rend spectateur du naufrage de son parti. L’histoire de l’effondrement des LR retiendra que la droite de gouvernement, jugeant le programme RN dangereux car socialiste, aura apporté le soutien de ses députés à une politique dictée par Olivier Faure (PS) et la CFDT à Sébastien Lecornu, pour prix de son sursis comme Premier ministre. Outre la suspension de la réforme des retraites, le gouvernement prévoit 14 milliards d’euros de hausses d’impôts, notamment sur les plus riches, et un programme d’économie réduit au minimum (25 milliards). À moins que les députés LR ne retrouvent très vite la raison en refusant d’acter leur suicide politique, ils s’apprêtent à participer à un putsch parlementaire conduit par un PS fantomatique (10% des députés) représentant une idéologie en faillite ayant fait 1,7% à la dernière présidentielle. La démocratie sera la première victime.
Les Français sont les derniers otages oubliés. Il est urgent de les délivrer d’une classe politique qui a perdu le Nord. Cette caste ne pense qu’à une chose : sauver sa peau en maintenant l’étouffoir sur la société éruptive. Alors que le progressisme est comptable des désastres économiques et civilisationnels accumulés en son nom depuis des décennies, son retour par chantage parlementaire illustre la déchéance d’un système sclérosé et la plaie de l’aveuglement dans la conduite de la politique. L’effondrement du macronisme, avatar de la sociale-démocratie en déroute, a pour effet paradoxal de redonner de l’autorité à des idées tordues. On savait Emmanuel Macron prêt à tout pour s’accrocher à son pouvoir monarchique. Le voir néanmoins se résoudre à enterrer la seule réforme de son quinquennat pour sauver son énième gouvernement dit sa radicalité. Un homme dangereux s’est retranché à l’Elysée. Il est soutenu, dans un pacte de corruption tacite, par des députés qui, comme s’en est félicité Lecornu jeudi dernier, représentent « une majorité absolue qui refuse la dissolution », c’est-à-dire qui craignent une victoire plus que probable du RN. La débandade des LR incitera-t-elle enfin Retailleau à couper les ponts avec ceux de son groupe qui veulent se diluer dans le moribond « bloc central » et qui l’entrainent dans leur traitrise ? Beaucoup de temps a été perdu. Marine Le Pen peut dire merci à ses pitoyables adversaires. Ils la défendent si bien.
Le romancier Pierre Commeine photographié en 2025. DR.
Le père d’un chroniqueur judiciaire, magistrat, fait retirer ses trois enfants à une mère. Cela lui est reproché. Le fils décide de mener l’enquête…
Chronique d’un cas de conscience, dernier ouvrage de Pierre Commeine, est-il un roman, un récit et/ou une chronique ? Difficile à dire, même si, dès l’avertissement, son auteur nous prévient : « Ce roman s’inspire d’une histoire bien réelle, comme en témoignent différentes coupures de presse de l’époque, sous le titre : « Rendez-moi mes enfants ! » Cependant, le détail des faits rapportés, la description des lieux ainsi que les noms cités sont strictement de pure fiction. En conséquence, toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ne serait que pure coïncidence. »
Pierre Commeine est loin d’être un inconnu. Né dans l’Aisne d’une mère française et d’un père belge, passionné par l’histoire (en particulier la Première Guerre mondiale), la peinture et la photographie, il a publié de nombreux ouvrages, essais et romans.
Le procès Goldman en arrière-plan
Que nous raconte-t-il dans Chronique d’un cas de conscience ? Le chroniqueur judiciaire Philippe Minouflet remet de l’ordre dans les papiers de son père, procureur de profession, récemment décédé. Il découvre un numéro du journal Détective daté du 16 septembre 1957. Dans un article, on lui reproche d’avoir fait retirer à une mère ses trois enfants pour amoralité; le journaliste lui reproche également d’avoir jugé « en son âme et conscience » et non pas en se référant au Code pénal et aux lois en vigueur. Philippe Minouflet décide de mener l’enquête afin de se forger une opinion sur la décision de justice prise par son père. Pour ce faire, il rencontre les témoins de ce drame familial. « Ainsi, détaillant son enquête menée au cours de l’année 1985, il nous raconte le parcours du chroniqueur judiciaire et nous fait suivre le procès de Pierre Goldman à Amiens en 1976 », explique l’éditeur en quatrième de couverture du livre. « Enfin, il nous plonge dans le Vailly-sur-Aisne des années quarante et cinquante, avec celle qui déclarait avoir toujours été déchirée par ses passions de femme en proie à ses démons intérieurs, et qui criait au tribunal : « Rendez-moi mes enfants ! »… »
Dans cet opus à la construction habile mais parfois complexe, on croise beaucoup de monde, dont l’excellent avocat amiénois Pascal Pouillot, le chanteur et producteur Pierre Barouh (proche de Pierre Goldman), Jean-René Huleu, l’un des fondateurs de Libération. Il nous donne à lire de beaux passages sur les deux dernières guerres, en particulier dans l’Aisne, et éclaire avec délicatesse le psychisme d’illustres inconnus dont Lucie Anglade, la mère éplorée. À découvrir.
Chronique d’un cas de conscience, Pierre Commeine ; à contresens éditions. 255 pages.
Ça par exemple! Dans son nouveau parti, Zarah Sultana est confrontée à des tensions internes dues à des divisions idéologiques – doux euphémisme – et à un mystérieux sexisme de ses collègues masculins.
Jeremy Corbyn, le frère d’armes de Jean-Luc Mélenchon en islamo-gauchisme, vient de subir un revers dans sa création d’un nouveau parti destiné à porter cette idéologie socialiste aux relents antisémites. Rappelons que Corbyn, député depuis quarante-deux ans, a été le chef des travaillistes entre 2015 et 2020. Démissionnaire après la défaite humiliante du parti en 2019, il est suspendu par le nouveau leader, Keir Starmer, parce qu’il aurait encouragé une atmosphère de judéophobie décomplexée.
Annonçant qu’il se présentera comme indépendant lors des élections de 2024, il est expulsé du parti. Il forme ensuite une « alliance indépendante » avec quatre autres députés, tous des hommes musulmans élus sur un programme pro-Gaza. En juillet 2025 une nouvelle recrue permet de transformer cette affiliation en parti politique. Il s’agit de Zarah Sultana, 31 ans, musulmane d’ascendance pakistanaise, élue députée travailliste en 2019 et de nouveau en 2024. Suspendue du parti en juillet 2024 pour avoir voté contre le gouvernement de Starmer, elle démissionne un an plus tard et entre en négociations avec Corbyn. Mais quand elle annonce le lancement d’un nouveau parti au nom provisoire de « Your Party », l’entourage de Corbyn l’accuse de prendre une initiative prématurée. Your Party est néanmoins lancé peu après avec les deux élus comme cofondateurs. Pourtant, des fissures refont surface en septembre, quand Sultana lance une invitation en ligne pour recruter des adhérents. Des cadres du parti l’accusent de prendre encore une initiative personnelle et tentent d’annuler l’opération. Des militants favorables à Sultana ripostent en exigeant l’élection d’un comité directeur.
Cependant les désaccords ne portent pas que sur le modèle de fonctionnement. Le transgenrisme, fer de lance progressiste, ne plaît pas aux musulmans conservateurs, tandis que Sultana n’avait pas compté avec le masculinisme de ses coreligionnaires. Elle se prétend marginalisée par ses collègues qu’elle accuse de former un « club pour garçons sexiste ». Islam et gauchisme ne font pas toujours bon ménage.
Les autorités françaises, à quelque niveau que ce soit, ne sont pas à la hauteur. Et Boualem Sansal va croupir en enfermement jusqu’à sa mort si une poigne politique ne s’en mêle pas !
Comment ne pas songer, en ces jours miraculeux, au président Donald Trump qui a réussi le tour de force, à la fois en soutenant Israël et en contraignant le Hamas, de faire libérer les trop rares otages encore vivants, avec tous les disparus – il n’y a plus une seule femme… – après ces 738 jours d’enfer ?
Cette immense allégresse collective, consensuelle et déchirante, qui a rassemblé dans une sombre joie les Israéliens, avec ce splendide hymne composé pour la libération des otages et leur « retour au pays », sera inoubliable, et le 13 octobre un jour à jamais singulier, où les affrontements politiques, à peu près partout, ont cédé le pas à un bonheur intense.
Certes ce n’est que la première phase du plan de Donald Trump mais puis-je dire qu’elle se suffit pour l’instant à elle-même, dans l’attente de la deuxième – avec la menace d’un Hamas réglant ses comptes – et des suivantes qui promettent d’être encore plus délicates. Elles seront cependant dans les mains et l’énergie d’un homme qui accomplit ce qu’il annonce et n’a pas pour vocation de rompre devant les obstacles diplomatiques et une Histoire faite de crises paraissant insolubles…
Je n’oublie pas la Russie et l’Ukraine et j’ai bien conscience que, s’étant heurté à un dictateur cynique, sans foi ni loi, Vladimir Poutine, il s’est d’une certaine manière désengagé, en devenant pourtant plus équitable avec le président Zelensky, au profit de cet Himalaya concernant le conflit israélo-palestinien.
J’admets volontiers que le comportement du président Trump, lunatique, instable, fluctuant, contradictoire, m’a à plusieurs reprises inquiété et déplu mais que pèse ma modeste critique face à ce triomphe des vies sauvegardées et arrachées à leurs bourreaux ! Pour moi, Donald Trump restera pour toujours l’homme de ce salut auquel personne ne croyait. Sauf lui.
Je n’ai pas aimé, de notre piètre ministre des Affaires étrangères jusqu’à Valérie Hayer face à Robert Ménard (sur BFM TV), la réticence, voire le dédain, avec lesquels les autorités françaises ont cherché à se tailler une mince place dans une négociation et une pression américaines qui les ont dépassées…
Il est clair qu’on ne saurait attendre de la France, diminuée et affaiblie comme elle est sur le plan national, un rôle équivalent à celui de l’immense puissance américaine désireuse, en permanence, de se manifester et de permettre à son président atypique de faire mentir ses adversaires compulsifs… En revanche, de notre pays, il aurait été sain d’entendre des éloges sans aigreur et le fair play d’une « grenouille n’aspirant pas à se faire passer pour un bœuf »…
Boualem Sansal est en train de disparaître, de subir l’inaction coupable de nos dirigeants, même si cette personnalité extraordinaire et indomptable ne s’efface pas de nos mémoires. C’est pourquoi, aussi absurde que soit mon appel, aussi utopique qu’apparaisse, à ce point, l’immixtion de Donald Trump dans nos affaires, je me résous à adresser au président américain cette injonction admirative : Donald Trump, faites libérer Boualem Sansal !
Appropriation culturelle : retour sur la terrible affaire entre le Mexique et Adidas
Le 8 août, la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum Pardo s’avance sur la scène du Palais national de Mexico. Derrière elle, l’objet de sa conférence de presse – et de son courroux – s’affiche sur un écran géant : il s’agit… d’une paire de baskets Adidas.
Une vive polémique secoue en effet le pays depuis le lancement du dernier modèle de la firme allemande. Baptisé « Oaxaca Slip-On », celui-ci s’inspire ouvertement des huaraches, sandales traditionnelles tressées qui font la fierté des artisans de la région d’Oaxaca depuis des générations. Mais une banale accusation de plagiat industriel ne saurait suffire : assez vite, l’infamant chiffon rouge de l’appropriation culturelle est agité. « Ce n’est pas seulement un design, il s’agit de la culture, de l’histoire et de l’identité d’un peuple, et nous ne permettrons pas qu’il soit traité comme une marchandise », a tonné, avec force lyrisme, Salomon Jara Cruz, gouverneur de l’État d’Oaxaca, sur X. Car au Mexique, on ne badine pas avec la question indigéniste : depuis 2021, la loi prévoit des amendes, voire des peines de prison, en cas « d’utilisation non autorisée de la propriété intellectuelle et culturelle des peuples indigènes et afro-mexicains ». Plusieurs fabricants de prêt-à-porter tels que Shein, Zara ou Isabelle Marant ont d’ores et déjà été poursuivis pour ce motif.
Prise dans la tourmente des réseaux sociaux, menacée d’une action judiciaire, la marque aux trois bandes espère limiter le « bad buzz » en s’engageant à collaborer avec la communauté locale « dans un dialogue respectueux qui honore son héritage culturel ». Les excuses fébriles pleuvent comme à Gravelotte : Willy Chavarria, le designer – américain d’origine mexicaine – des souliers de la discorde se répand en remords et contritions publiques. Mais rien n’y fera, et les sneakers honnies seront, fin août, définitivement retirées des plateformes de vente. Plus que jamais, l’extension du domaine de l’appropriation culturelle est en marche. Et la décolonisation s’applique intégralement, de la tête aux pieds.