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Avoir de l’entrejambe

Au pays de l’égalité femmes-hommes, le « manspreading » est dénoncé par les néoféministes. Mais ne serait-il pas plutôt un remède au manque de virilité de notre époque?


Pour de sombres histoires d’égalité hommes/femmes dont j’ai fini par m’accommoder raisonnablement, j’emmène parfois mon fils au parc. Assis sur un banc, je surveille le gosse d’un œil en matant les MILF de l’autre mais discrètement, à la dérobée, pour ne pas embarrasser d’éventuelles néoféministes pour qui le sentiment d’être un objet de désir est une expérience traumatisante.

Ainsi, je tue le temps en louchant, ravi de vivre au pays des femmes belles, libres, bien roulées et durablement désirables, et plein de compassion pour ceux de mes compatriotes que l’emprise communautaire et l’endogamie mettent au régime cacher ou hallal bien emballé, voire hermétiquement scellé, dans une ville où les mets les plus raffinés et les plus parfumés leur passent sous
le nez.

Couilles-en-éventaillothérapie

Comme l’a écrit Diderot, la vie est courte, mais les journées sont longues, surtout celles passées à garder des enfants, et surtout quand on préfère crever plutôt qu’entamer une conversation avec un papa poussette mal rasé, mal fagoté et un tantinet féminisé. Du coup, mâle solitaire et mal à l’aise, je m’ennuie un peu.

Enfin je m’ennuyais. Aujourd’hui, c’est différent. Des chercheurs dont je n’ai pas retenu les noms dans je ne sais plus quelle université (je ne suis pas Peggy Sastre) ont découvert que le « manspreading » (l’étalement masculin) qui consiste pour un homme à se tenir assis les jambes écartées dans un espace public, augmentait le taux de testostérone et diminuait le stress.

J’ai reçu la nouvelle comme étant la meilleure de l’année. À présent au parc, je ne perds plus mon temps. Comme d’autres vont à la piscine avec une ordonnance de balnéothérapie, je pratique sur mon banc mes séances de couilles-en-éventaillothérapie. Ce n’est pas remboursé par la Sécu mais les scientifiques ne se trompent pas : penser que je deviens plus mec parmi les femmes de
tous les genres, ça me détend.

Causeur: la France résiste au woke

Découvrez le sommaire de notre numéro de mai


Comme à d’autres moments critiques de son histoire, la France résiste ! A quoi ? A cette culture woke qui déferle sur nous en cherchant à saper les fondements de la société occidentale. Pour Elisabeth Lévy, il y a de bonnes raisons d’espérer que ce nouveau totalitarisme se cassera les dents sur l’esprit français. Certes, le salut ne viendra pas des hautes sphères de l’État, car Emmanuel Macron reste tiraillé entre le refus de déboulonner nos statues et la volonté de « déconstruire » notre histoire. Face à ceux qui voudraient nous diviser en racisés et racistes, le secret de notre résistance tient d’abord, explique notre directrice de rédaction, à « la supériorité d’un modèle français que les militants rejettent précisément parce qu’il se fiche de leurs origines. » A part le modèle républicain, Mathieu Bock-Côté voit un esprit de résistance dans l’art de vivre français, dans la sociabilité et la qualité du lien humain qui restent imperméables aux pires excès de la cancel culture. C’est justement son mariage d’amour avec la culture française que la franco-tunisienne Sonia Mabrouk raconte à Gil Mihaely. L’auteur d’Insoumission française, dont le portrait figure sur notre couverture,réprouve l’esprit woke comme un « mélange d’autodénigrement, de servitude et de rancœur » servant de « poison mortel qui coule dans les veines du pays. »

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Pour résister, il faut identifier ses points faibles et préparer la contre-attaque. Philippe Pichot dénonce la Loi Taubira qui, en taisant les traites africaines et musulmanes, stigmatise les seuls Européens pour communautariser la mémoire de l’esclavage. Erwan Seznec révèle le grand déraillement qui ébranle l’université française : si tant de dingueries sur la race et le genre ont cours dans les amphithéâtres, c’est parce que l’habitude de délirer avec autorité s’y est implantée au fil du temps. Répondant aux offensés professionnels qui se prétendent humiliés par la vue d’un comédien grimé en noir, Cyril Bennasar affirme qu’il ne peut pas croire que ses compatriotes noirs soient incapables d’apprécier l’humour, le second degré et l’autodérision. Nous pouvons tous renforcer notre propre esprit de résistance en lisant La Révolution racialiste, de Mathieu Bock-Côté, qualifiée par Elisabeth Lévy de « véritable manuel de guérilla à l’usage des universalistes », et en nous inspirant du courage d’Andy Ngo, le journaliste américain, présenté ici par moi-même, qui a enquêté sur les soi-disant « antifas », ces émeutiers organisés qui traduisent les théories du genre et de la race en actes de violence.

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Côté actu, Gérald Darmanin, se confiant à Elisabeth Lévy et à Gil Mihaely, affirme que l’islam est compatible avec la République, mais reconnaît que l’islamisme et l’immigration illégale sont un frein à l’intégration des musulmans en France. Parmi les mesures phares de la loi « séparatisme » que porte le ministre de l’Intérieur figure le retour discret de la double peine. Pour Natacha Polony, interviewée par Cyril Bennasar, le système démocratique français est actuellement tombé en panne. La directrice de Marianne, auteur de Sommes-nous encore en démocratie ?, voit la seule solution dans un recours à plus de souverainisme. Qu’en est-il justement de la dette souveraine à l’ère de la crise sanitaire ? Stéphane Germain explique que la distribution massive d’argent public ne s’arrêtera pas avant mai 2022, car cette gestion dispendieuse sert trop bien les intérêts du futur candidat, Emmanuel Macron. L’expert-psychiatre, Paul Bensussan, analyse l’affaire Sarah Halimi, en rappelant que, si le meurtrier était fou au moment des faits, il n’en est pas moins coupable d’un crime antisémite. François Bonardel et Paul Thibaud se penchent chacun sur la proposition de loi sur « la fin de vie » : est-il réellement possible de conjuguer liberté et dignité dans notre utopie individualiste ? Le sociologue Tarik Yildiz mène l’enquête sur une possible ingérence turque dans la politique française, tandis que Vladislav Davidzon raconte une ingérence américaine dans la politique ukrainienne destinée à influencer… les élections américaines.

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Selon le musicien américain Frank Zappa, il y a trop de livres et trop peu de temps pour les lire. Nous en avons donc lu pour vous. Frédéric Ferney a lu l’autobiographie de Barak Obama, on y trouvant du charme à condition de ne pas en être dupe, tandis que Basile de Koch a lu la première biographie de Marie-France Garaud, l’idole de sa jeunesse qu’il trouve toujours irrésistible. Jérôme Leroy salue une belle réédition des Fables de La Fontaine, publiée dans la collection Pléiade, pour fêter les 400 ans du poète. Nous ne sommes pas des bonobos ! C’est non seulement une évidence, mais aussi le titre du nouveau livre de l’éminent linguiste, Alain Bentolila, qui nous explique en quoi le langage humain est incomparablement plus ambitieux que la communication animale. Pour la musique, Sophie Bachat salue deux chanteuses légendaires, la Française au nom anglais, Sheila, et l’Anglaise au nom français, Marianne Faithfull. Deux icones des années 60 mais pas que. La preuve ? Elles sortent chacune un nouvel album. Combinant littérature et art de la table, Emmanuel Tresmontant nous rappelle combien Simenon, le créateur de Maigret, était un ardent défenseur de la culture française dont le haut lieu est le bistrot – cette même culture qui, pour Bock-Côté, incarne l’esprit de résistance. Dès la réouverture des terrasses, on va tous prendre le maquis…

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Tête de Pierre et tête d’Arabe

L’éditorial de mai d’Elisabeth Lévy


Le 7 juin 2009, alors que Manuel Valls serre des mains dans les rues d’Évry, il se fait pincer par la patrouille. Oubliant le micro-cravate dont l’a équipé une chaîne de télévision, le député-maire lâche entre les dents à son dir’ cab : « Tu me mets quelques Blancs… Enfin, quelques White, quelques Blancos ! » (comprendre : pour la photo). Toute la gauche se bouche vertueusement le nez, les journalistes exultent : on vous l’avait dit que ce type était de droite.

En 2016, pour avoir affirmé qu’il y a dans certaines classes de sa ville 90 % d’élèves musulmans et que c’est un problème, Robert Ménard a droit au traitement grand luxe : heures les plus sombres, fichage ethnique et procès qui ira jusqu’à sa relaxe définitive en 2019.

À peu près à la même époque, en 2015, des mères d’origine marocaine de Montpellier se plaignent qu’il n’y ait pas de blonds dans la classe de leur fils. Libération s’enthousiasme et espère que le gouvernement va enfin s’attaquer à la « ghettoïsation scolaire ».

Les ravis de la crèche multiculti

Ça ne doit pas donner des résultats fameux, car six ans plus tard, le 19 avril dernier, c’est encore à Montpellier que Naïma Amadou interpelle le président : son fils, explique-t-elle, lui a demandé si le prénom Pierre existait vraiment ou si c’était seulement dans les livres. Cette fois encore, les ravis de la crèche multiculti rivalisent dans l’empathie pour cette dame et dans la sévérité pour ces politiques qui ont « parqué ces populations ». Il ne vient pas à l’idée du président de demander à Naïma pourquoi elle n’a pas appelé son fils Pierre, d’ailleurs il ne lui vient pas d’idée du tout, il reste coi.

Toutefois, de nombreux commentateurs envisagent ouvertement que la tenue strictement islamique de Naïma, comme celle de nombreuses mères de son quartier, contredise son désir d’intégration. On sait grâce à Christophe Guilluy pourquoi les prolos old school (comme dirait Onfray) ont quitté les banlieues pour l’intermonde appelé France périphérique. Ce qui a changé, c’est qu’on peut le dire sans se faire trop insulter.

À lire aussi : “Quand on est française, on ne porte pas un hijab”

Des Blancos de Valls au Pierre de Naïma en passant par les élèves de Ménard et les blonds de Montpellier, le constat est identique : certains quartiers où l’immigration musulmane est majoritaire ne ressemblent plus vraiment à la France. Au point que même les habitants se plaignent de cet entre-soi qui prive leurs gosses de tout contact avec la culture majoritaire.

Or, Valls et Ménard ont reçu des flots d’invectives et Naïma des encouragements apitoyés. Ce deux poids, deux mesures ne tient pas seulement à la tête du client. Pour avoir le droit de voir ce que l’on voit, il ne suffit pas d’appartenir par naissance à un groupe victimisé, encore faut-il tenir le discours qui sied à une victime. Comme nos policiers ou militaires d’origine subsaharienne ou maghrébine, Sonia Mabrouk est accusée par les bons esprits de faire « la Française ».

Certains ont même le droit de compter. Alors, comme les Shadoks pompaient, ils comptent, inlassablement : les femmes, les Arabes, les Noirs, les handicapés, dans les conseils d’administration, les émissions de télé, les films, les prix Goncourt. Nul ne le leur reproche, pour peu qu’ils parviennent à la seule conclusion acceptable : il n’y en a pas assez. Inversement, si on compte les discriminations, les agressions sexuelles ou les bavures policières, il faut découvrir qu’il y en a toujours plus.

Le scandale « tête d’Arabe »

Mais c’est le scandale collatéral dont a accouché « l’affaire Pierre » par le truchement de votre servante qui montre que l’antiracisme peut devenir fou et rendre fou. Sur le plateau de Sonia Mabrouk à CNews, j’ai remarqué que les quartiers sans Pierre étaient aussi ceux où on pouvait se faire enquiquiner si on mangeait pendant le ramadan, même quand « on n’avait pas une tête d’Arabe », puis répondu en substance à Sonia Mabrouk (quoique avec moins d’assurance que je l’aurais voulu) que oui, elle aussi avait une « tête d’Arabe » – ravissante au demeurant. Expression peut-être un brin désinvolte, mais purement descriptive et évidemment dénuée de toute connotation péjorative. Deux jours plus tard, j’apprends que je suis en « TT » (« TrendingTopics ») sur Twitter, ce qui veut dire que je fais causer et pas en bien. La meilleure protection contre les raids numériques c’est encore de les ignorer.

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Cependant, les cris de chochottes offensées parviennent finalement à mes oreilles. Que des gens qui s’appellent « frère » ou « cousin » sur la seule base d’une ressemblance physique jouent les indignés parce qu’on remarque cette ressemblance ne me trouble guère. Pour autant, cette micro-polémique illustre l’aporie sur laquelle butent les chantres de la diversité. D’un côté, ils brandissent leurs différences comme des étendards et réclament pour elles de la visibilité – d’ailleurs, ils se définissent comme des minorités visibles. De l’autre, quand on voit ces différences, ils hurlent à l’agression raciste. Voyez-nous sans nous voir. Cette injonction contradictoire prouve par l’absurde la supériorité d’un modèle français que les militants rejettent précisément parce qu’il se fiche de leurs origines, qu’elles se voient ou pas à leur tête. Seulement, quand on se définit comme « racisé », on ne peut pas se passer de racistes. Au besoin, on en invente.

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Dans la famille Agag-Boudjahlat, je demande le frère…

Kamel Agag-Boudjahlat a été très éphémèrement candidat RN aux élections. Récit.


Désigné le 30 avril tête de liste pour le Rassemblement national dans le territoire de Belfort, Kamel Agag-Boudjahlat retire sa candidature trois jours plus tard.

La désignation avait fait parler d’elle : comme l’habitant du quartier de la Petite Hollande à Montbéliard le reconnaît lui-même, la « prise » était intéressante pour un parti en quête permanente de dédiabolisation, tout comme son expérience auprès de la jeunesse des quartiers difficiles était un réel atout. Mais elle avait aussi entraîné bon nombre de réactions indignées et tout un lot d’attaques et de menaces contre sa famille. Face à ces dernières, le candidat déclarait tenir bon, quoique difficilement, comptant sur le soutien plein et entier de Julien Odoul, chef de file de la région qui l’avait imposé.

À lire aussi, entretien avec Fatiha Agag-Boudjahlat: “Mon frère salafiste et mon frère témoin de Jéhovah considèrent l’homosexualité comme une abomination”

Après l’annonce de son désistement, c’est un tout autre son de cloche. Déclarant ne plus pouvoir supporter les menaces, tout comme l’incompréhension de nombre de ses proches ne s’expliquant pas son engagement, le chess-boxeur [nouveau sport hybride, mélangeant échecs et boxe anglaise ! NDLR] dit avoir voulu « infiltrer » le RN. Soucieux de poursuivre son combat en faveur des quartiers sensibles, un siège de conseiller régional lui avait paru confortable, et les sondages favorables au RN lui désignèrent la meilleure opportunité à saisir. L’idée était de « tomber » le masque une fois élu, et d’œuvrer alors comme représentant des quartiers prioritaires.

Une trahison ?

Être nommé tête de liste fut aisé : « il suffisait de parler de violences et d’insécurité », bien que la désignation par les instances supérieures de ce nouvel encarté sur foi de sa bonne mine irrita quelque peu les militants historiques. Il ôta cependant le masque plus vite que prévu, assortissant son coup de théâtre d’un appel à voter contre le RN et de l’annonce de la préparation d’un livre sur l’expérience.

La direction du parti de droite nationale, préfère, elle, dénoncer plutôt la campagne de harcèlement dont il fit l’objet, preuve, selon Julien Odoul, qu’aujourd’hui un Français d’origine maghrébine n’était pas libre de se présenter comme il l’entendait.

Les campagnes de harcèlement, c’est aussi le quotidien d’une autre Agag-Boudjahlat, célèbre, sœur ainée du précédent, enseignante, militante et essayiste : Fatiha Agag-Boudjahlat. Elle est en pleine promotion de son dernier ouvrage, les Nostalgériades (voir notre recension). Celle-ci, a récemment témoigné sur la violence des attaques qu’elle subissait, notamment de la part de Taha Bouhafs, qui, à l’annonce de la candidature de son frère n’avait pas manqué d’y voir une preuve de son prétendu extrémisme. L’essayiste défend son frère, dont elle se dit très proche et admiratrice du travail, dit qu’il y a une grande diversité d’opinions dans leur nombreuse fratrie et réaffirme son attachement à la liberté individuelle. Après l’annonce du retrait politique de ce dernier, elle n’a pas souhaité commenter davantage, quand Causeur la sollicite. Elle dit voir dans cet épisode un coup médiatique de Julien Odoul, et avoir tenté de dissuader son frère de rejoindre le RN, consciente de la violence qui en découlerait.

L’Éthiopie déclenchera-t-elle la guerre de l’eau?

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L’Éthiopie, où prennent leurs sources de nombreux fleuves, exploite son avantage naturel pour déstabiliser les équilibres stratégiques dans la région de la Corne d’Afrique et du bassin du Nil.


Alors que l’Éthiopie tient toujours à poursuivre son projet du grand barrage de la Renaissance en commençant juillet prochain la seconde phase de remplissage du réservoir, l’Égypte met en garde Addis Abeba contre la prise de mesures unilatérales. Le Caire appelle également la communauté internationale et notamment les États-Unis à intervenir afin de désamorcer cette crise qui pourrait déclencher une guerre dans la région.

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La crise s’est cristallisée en avril 2011 lorsqu’Addis Abeba prit unilatéralement la décision d’utiliser l’eau du Nil bleu pour remplir le mégabarrage hydroélectrique. L’Éthiopie annonçait vouloir produire de l’électricité alors qu’elle ne cherchait par là qu’à changer les règles du jeu et transformer l’eau du Nil en marchandise comme les autres. Or, le Nil, étant l’unique source d’eau en Égypte, est l’artère vitale des Égyptiens. C’est aux bords du Nil que l’Égyptien a établi sa civilisation depuis voilà sept mille ans. Il a creusé les ruisseaux, érigé les barrages et les ponts et a conduit l’eau du Nil jusqu’à l’intérieur des temples. L’Égypte a fondé ses projets de développement de son agriculture, son industrie et son commerce en tablant sur son quota de l’eau du Nil qui atteignait 55.5 milliards mètres cubes par an. Ce quota a été défini par l’accord sur le partage des eaux du Nil de 1959 et restait depuis inchangé malgré  une croissance démographique très forte portant la population égyptienne à quelques 105 millions contre 30 millions d’âmes au moment de la ratification de l’accord. Ainsi ce quota équivaut aujourd’hui 500 mètres cubes par an et par tête d’habitant, une quantité qui représente 50% du « seuil de pauvreté hydrique » fixé par la Banque Mondiale.

Barrage de la Renaissance © Adwa Pictures / AFP.

Des négociations permanentes

L’Ethiopie en revanche est très riche en eau : des précipitations d’un milliard de mètres-cubes par an, plus de 12 fleuves en sus du Nil bleu, de Sobat et d’Atbara sans oublier l’exploitation de plus de six barrages pour la production de l’électricité et pour l’agriculture.

Les négociations en cours actuellement entre l’Égypte, le Soudan et l’Ethiopie portent principalement sur le remplissage et le fonctionnement du barrage en vertu de la déclaration de principes signée par les trois parties en 2015. Or l’Ethiopie ne cesse de tenter d’entrainer les pourparlers sur d’autres terrains comme les anciennes conventions de 1929 et 1959 qui organisent la coopération entre les pays du bassin du Nil et l’utilisation des eaux du Nil et dont l’Ethiopie ne fut pas partie contractante. En outre, elle passe expressément sous silence la convention des frontières de 1902 qui l’engage à ne créer aucune œuvre au bord du Nil bleu ou dans la région controversée de Shangoul cédée par le Soudan (qui dépendait alors du gouvernement égyptien) en vertu de condition d’interdire sur l’intégralité de son territoire installations ou barrages qui nuiraient aux intérêts du Soudan. Rejetant des conventions qui ne l’engagent nullement et reniant les obligations que lui en imposent d’autres, l’Ethiopie confirme sa position discordante et contradictoire.

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Alors que le besoin de production d’électricité, argument mis en avant par Addis-Abeba, est discutable, l’Ethiopie tente d’accélérer le remplissage de son réservoir (de 14 à 74 milliards m3). Cette insistance sur le rythme – l’Egypte avait déjà accepté que le réservoir soit rempli dans une durée de 10-12 ans)  laisse planer les doutes sur les véritables intentions des Ethiopiens.

De plus, l’Éthiopie ne cesse d’invoquer « l’utilisation équitable des eaux du Nil », sauf qu’aucun rapport n’existe entre le partage des eaux dont parle Addis-Abeba et les négociations autour du dossier concret du barrage. Curieusement l’Éthiopie ne l’évoqua que l’année dernière pendant les négociations tenues sous les auspices de l’Union africaine. La déclaration de principes signée par les diverses parties en 2015 ne porte pas sur ce sujet. Bien au contraire, au cœur de cette déclaration se trouve le principe selon lequel les pays de l’aval ne seront pas lésés par ceux qui se trouvent en amont.

Des visées expansionnistes?

L’Ethiopie essaie tout simplement de faire croire – et accepter – qu’elle est propriétaire des eaux de tous les fleuves qui prennent leur source dans le plateau éthiopien. Pire encore, l’Ethiopie essaie de faire de ces eaux une arme économique et stratégique pour mettre à genou et appauvrir l’intégralité de la région. Autrement dit, l’Ethiopie exploite cet avantage naturel pour déstabiliser les équilibres stratégiques dans la région de la Corne d’ Afrique et du bassin du Nil. Elle tente aussi de s’imposer comme puissance hégémonique régionale et peut être suspectée de visées expansionnistes dans les territoires du Soudan et d’autres pays limitrophes. On ne peut pas exclure non plus une volonté de reprendre la main sur l’Erythrée et l’accès à la mer rouge (l’Ethiopie est un pays enclavé sans accès à la mer).

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C’est pourquoi l’Éthiopie refuse catégoriquement tout accord contraignant portant sur la gestion hydraulique du barrage : Addis-Abeba cherche à avoir les mains libres pour mettre en exécution sa grande stratégie dont chaque étape de cette crise en dévoile davantage.  Néanmoins, l’Éthiopie est tout à fait consciente que toute violation de l’accord de principes signé entre toutes les parties en 2015 l’exposera à de graves conséquences : l’Égypte se verra  alors en droit de prendre les mesures qu’elle juge pertinentes, y compris l’usage de la force et la déclaration de guerre, afin de préserver son quota des eaux du Nil. C’est pourquoi, il incombe à la communauté internationale et notamment les pays européens et les États-Unis d’intervenir rapidement, d’arrêter le remplissage du barrage et de parrainer de sérieuses négociations qui feraient entendre la voix de la raison à l’Éthiopie avant qu’il ne soit trop tard.

Drame d’Avignon: la France forte avec les faibles, faible avec les forts

Le meurtre par balle d’un policier d’Avignon près d’un point de deal mercredi doit nous inspirer, à tous, compassion et colère.


Compassion évidente envers ce policier tué – vraisemblablement par un dealer – alors qu’il intervenait sur un lieu de trafics bien connu. Envers sa famille, ses amis, tous ses proches. Envers ses collègues de terrain, envers une institution maltraitée, éprouvée, souvent vilipendée, mais qui même si elle a sa part de responsabilité n’en reste pas moins massivement inspirée par un authentique souci du bien commun et un véritable dévouement. Et colère. Colère envers une frange de la population qui a fait collectivement le choix de la délinquance, envers une magistrature indigne, envers les politiques de tous bords, envers de nombreux médias, envers la hiérarchie des forces de sécurité qui n’est pas à la hauteur de l’époque.

Bien sûr, il vaut mieux chercher des solutions que des coupables. Il n’empêche : savoir comment on en est arrivé là est important, et il n’est plus tolérable que ceux à cause de qui notre pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans la sauvagerie échappent à leurs responsabilités.

Compassion pour les uns, indifférence pour les autres

Il y a toute cette frange de la population qui a, collectivement, fait le choix de la délinquance. Trafics, économie souterraine, loi de silence, vision romantique du truand et exaltation du caïd, attachement à une culture où la brutalité est la norme et où l’idée même d’intérêt général fait hausser les épaules en ricanant. Oui, les habitants des zones de non-droit sont les premières victimes de ces bandes contre lesquelles l’État ne les protège pas, mais beaucoup sont aussi responsables de l’éducation qu’ils donnent – ou trop souvent qu’ils ne donnent pas – à leurs enfants. On sait les remarquables travaux du docteur Maurice Berger sur le sujet, sur le rôle crucial de l’environnement culturel et familial.

À lire aussi, Maurice Berger: Remettre la honte à sa juste place

Il y a cette magistrature gangrénée par l’idéologie du juge Baudot, pleine de compassion envers les criminels mais d’indifférence envers les victimes et d’hostilité envers les forces de l’ordre, cette magistrature accrochée à son privilège d’indépendance, qui se croît propriétaire du pouvoir judiciaire alors qu’elle n’en est que délégataire car en France la souveraineté, dont le pouvoir judiciaire est une composante, n’appartient qu’au peuple. Une corporation dont seule la légitimité est d’avoir réussi un concours professionnel, mais qui utilise l’autorité qui lui est confiée au mépris de la volonté générale et du bien commun, pour servir une vision idéologique et une obsession pour la forme au détriment du fond.

Culture de l’excuse

Il y a ces politiques, de tous bords, sans doute les premiers coupables. À gauche on retrouve l’idéologie, la culture de l’excuse, la négation du libre-arbitre qui conduit à affirmer que tout délinquant ne serait que le produit mécanique de conditions socio-économiques – quel terrible mépris envers ces centaines de milliers de gens qui malgré la pauvreté sont honnêtes et droits ! On trouve l’obsession pour la « réinsertion » et les « peines alternatives » qui conduit à faire mille fois plus pour les criminels que pour les honnêtes gens, et à faire prendre tous les risques aux seconds pour flatter son orgueil et se draper de vertu en se montrant compatissant envers les premiers. Taubira, Belloubet, Dupond-Moretti : tout est dit.

Et à droite ! Sarkozy a promis le karcher, mais n’a fait que de l’affichage et de la communication. Les gouvernements successifs n’ont jamais eu le courage d’affronter l’idéologisation de la magistrature, ni de faire adopter des lois à la hauteur de la situation et des enjeux, ni de mettre fin à l’inflation formaliste perpétuelle de la procédure pénale, de plus en plus chronophage pour les forces de l’ordre au détriment de la présence sur le terrain. Pire encore, au lieu d’assumer de dire le réel, la droite a laissé la gauche – dans ce domaine comme dans tant d’autres – imposer un magistère moral absurde, elle s’est pliée à cette arrogance de l’adversaire. Oui, la plus grande faute politique et morale de la droite est celle-ci : avoir permis à la gauche de fixer les limites de ce que l’on a le droit de dire, des questions que l’on a le droit de poser, des constats que l’on a le droit de faire.

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Et n’oublions pas, droite ou gauche, la faute qui consiste à avoir instrumentalisé les forces de l’ordre contre le peuple, faute dont Emmanuel Macron et sa majorité ont été les parangons pendant la crise des gilets jaunes, « en même temps » qu’ils montraient une indulgence coupable envers les casseurs ou des mouvements ouvertement haineux comme les manifestations de la famille Traoré. « Fort avec les faibles, faible avec les forts » : et on s’étonne ensuite qu’il y ait des catastrophes ? Que l’habitude de l’impunité pousse à aller toujours plus loin ?

Il y a ces médias, eux aussi massivement acquis à cette idéologie du « politiquement correct », eux aussi coupables d’avoir laissé le déni du réel s’investir d’une autorité morale et d’un pouvoir de censure dramatiques, eux aussi responsables d’avoir diffusé la méfiance systématique (quand ce n’est pas la haine) envers les forces de l’ordre, et une vision romantique idéalisée de la délinquance. Non, les criminels qui frappent aujourd’hui en France ne sont pas des Jean Valjean, ce sont des Thénardiers ! Les médias aussi ont du sang sur les mains. Et il y a les forces de l’ordre elles-mêmes. J’hésite à écrire ces lignes alors qu’elles sont en deuil, mais hélas ! Dans la police elle-même, il y a une hiérarchie trop soucieuse de se faire bien voir, trop adepte du « pas de vagues », trop éloignée du terrain. Une hiérarchie qui a laissé la « voie publique » être le parent pauvre des commissariats, et regarde passivement s’accumuler les missions « innovantes » au détriment du travail de fond, laborieux mais indispensable. Des organisations syndicales très soucieuses de mesures catégorielles et de rythmes horaires – avoir toujours plus en faisant toujours moins – mais très peu soucieuses d’efficacité opérationnelle, et de capacité à monter en puissance pour renforcer un équipage pris à partie. Malgré la valeur des hommes et des femmes qui servent sous l’uniforme, le constat est terrible : la police a abandonné des secteurs entiers du territoire, et là où elle « tient » encore c’est uniquement grâce au travail désormais incontournable des polices municipales.

Vers le règne des caïds et des milices

Dans la gendarmerie, certes le statut militaire est une garantie et un gage de capacité de réaction à l’urgence, mais pourquoi tant d’années de silence face à des dérives que chacun constate et connaît ? Pourquoi Bertrand Soubelet a-t-il été pratiquement le seul à oser dire ce que tout le monde sait ? Pourquoi une absolutisation du devoir de réserve au détriment du devoir d’alerter le peuple souverain sur la situation réelle de la France ? Alors que l’institution bénéficie – à juste titre – de la confiance de la grande majorité des citoyens et des élus, pourquoi ne pas dire ouvertement l’incapacité de la police à tenir le terrain qui lui est confié, et l’incurie désastreuse de la réponse pénale ? Et je ne parle pas des associations professionnelles (car si les militaires ne peuvent pas se syndiquer, ils disposent désormais d’un droit d’association) que l’on aimerait beaucoup plus offensives et beaucoup plus déterminées à se faire entendre.

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Le choix est simple. Nous pouvons continuer à nous payer de mots, exprimer notre tristesse et notre indignation, « condamner fermement », et laisser le pays glisser encore et encore vers le délitement. Laisser l’État démissionner toujours plus de ses responsabilités régaliennes pour se transformer en fermier général, et nous pousser vers le règne des caïds et des milices. Exactions des pillards et des bandes au détriment des plus faibles, groupes d’auto-défense pour ceux qui parviendront à s’organiser et à s’équiper, sécurité privée surarmée au seul bénéfice des plus fortunés, et ce sera l’ère des seigneurs de la guerre. La fragmentation de la France en multiples féodalités, ou l’avènement d’une dictature fanatique qui saura unifier les bandes les plus brutales et gouverner par la peur – c’est le rêve des islamistes – ou encore la prise de pouvoir par une oligarchie s’appuyant sur une supériorité technologique écrasante pour imposer sa volonté aux masses. Ou un héros, qui parviendra à fédérer les forces de l’ordre, les armées et le peuple pour refonder la France…  mais il serait bien imprudent d’attendre passivement l’émergence improbable d’un nouveau Napoléon, ou l’apparition miraculeuse d’une nouvelle Jeanne d’Arc.

Mais nous pouvons aussi reconquérir le territoire dès maintenant, sans attendre le chaos total ni l’homme providentiel. Construire des prisons, et les remplir. Rappeler à tous que dans « violence légitime » il y a « violence », et que les forces de l’ordre ont le droit et même le devoir d’en faire usage. Refonder totalement la chaîne pénale pour que le formalisme cesse d’être plus important que le fond, pour les peines soient véritablement dissuasives (par l’enfermement et en frappant au porte-feuille) et pour qu’elles soient effectives et douloureuses dès le premier fait, au lieu d’attendre qu’un jeune ait fait de la délinquance son mode de vie avant de se préoccuper enfin de le sanctionner. Oser, partout où il le faudra, proclamer l’état de siège. Et confronter enfin les magistrats aux conséquences de leurs décisions, obliger le pouvoir politique à trouver le courage de contraindre l’autorité judiciaire à rendre des comptes au seul souverain légitime de la France : le peuple français.

La droite est morte, vive la droite?

Deal implicite entre LR et LREM. C’est « Les Républicains En Marche »!


Le 4 mai 2021, la droite institutionnelle française est morte, absorbée par Emmanuel Macron.

L’UMP, née le 23 avril 2002 et rebaptisée Les Républicains le 30 mai 2015, n’aura pas tenu 20 ans ! En maintenant son soutien à Renaud Muselier, la direction des Républicains ne cache même plus sa stratégie pour 2022 : devenir le « flotteur droit » d’Emmanuel Macron. Le sigle LREM prend enfin tout son sens – était-ce l’objectif d’Emmanuel Macron dès le début ? –  Les Républicains En Marche.

Les Républicains apporteront leurs élus locaux à une Macronie qui en manque cruellement. Les élus locaux, eux, s’assurent de leur réélection avec une étiquette centriste élargie

Dans un premier temps, Christian Jacob a bien tenté de réagir verbalement à l’accord annoncé dimanche entre LREM et LR en PACA, pour faire croire à ses adhérents que les Républicains étaient toujours un parti d’opposition à Emmanuel Macron. Mais la commedia dell’arte n’a pas duré plus de deux jours. Mardi 4 mai, la Commission Nationale d’Investiture a « apporté son soutien à Renaud Muselier », avec pour seule condition de n’inclure aucun parlementaire ou ministre LREM sur sa liste. Ce qui autorise donc à offrir de nombreuses places sur la liste LR à des élus locaux LREM. Montrant pour sa part le peu de cas qu’il faisait de ces conditions, Renaud Muselier précisait mercredi matin qu’il ne refuserait pas Sophie Cluzel sur sa liste si cette dernière démissionnait de son poste de ministre d’Emmanuel Macron.

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Un deal implicite

Le seul tort de Renaud Muselier aura été de rendre visible trop tôt le rapprochement en cours entre le parti Les Républicains et Emmanuel Macron. Trop tôt, car dans certaines régions, dans certains cantons, Les Républicains ont encore besoin de faire croire aux électeurs qu’ils représentent une alternative à Emmanuel Macron. Mais dans les faits, le rapprochement ne fait que s’accélérer depuis 2017, où une partie des LR faisait campagne pour Emmanuel Macron et contre François Fillon. Aux Européennes de 2019, la plupart des cadres des Républicains n’avait fait que très timidement campagne pour la liste menée par François-Xavier Bellamy. Aux municipales de 2020, de très nombreux maires avaient rangé leur étiquette LR et négocié un soutien ou une investiture LREM. Aujourd’hui, aux départementales, des élus LREM sont investis par Les Républicains au détriment des élus LR dans plusieurs cantons, avec la bénédiction de Christian Jacob. Les candidats UDI – parti soutenant officiellement Emmanuel Macron, rappelons-le  – représentent presque la moitié des investitures communes LR-UDI dans les Hauts-de-Seine, les Yvelines ou l’Essonne. Là encore, avec la bénédiction de Christian Jacob. Ce dernier espère que ces accords électoraux locaux passeront inaperçus sur le plan national. Il est vrai que les élections départementales n’ont jamais passionné les rédactions parisiennes…

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Derrière les postures médiatiques, la stratégie – voulue ou subie ? – de la Direction actuelle des Républicains est donc bel et bien de faire des Républicains l’aile droite de la coalition gouvernementale à venir d’Emmanuel Macron. Le « deal » avec Emmanuel Macron est d’ailleurs limpide : les Républicains apporteront leurs élus locaux – maires, présidents de départements, présidents de régions – à une Macronie qui en manque cruellement. Les élus locaux, eux, s’assurent de leur réélection avec une étiquette centriste élargie et sans concurrence à droite, Les Républicains ayant disparu. Pour parachever le tout, Emmanuel Macron apportera en 2022 aux (anciens) Républicains des investitures aux législatives sans lesquelles les députés actuels n’ont aucune chance de se faire réélire, l’étiquette LR étant trop démonétisée sur le plan national. Les plus hauts cadres des Républicains se rêvent sans doute ministres, et pourront ainsi enfin cesser de regretter de ne pas avoir rejoint plus tôt leurs camarades Le Maire et Darmanin. Comment leur en vouloir, quand la rumeur court que Nicolas Sarkozy, toujours aussi peu désireux de voir un autre homme de droite lui succéder, aurait négocié un soutien à Emmanuel Macron pour la prochaine présidentielle contre la promesse de faire entrer François Baroin à Matignon en 2022 ?

Recomposition française

Saluons Emmanuel Macron qui aura réussi en à peine cinq ans à recomposer le paysage politique français : un parti centriste élargi avec pour seuls opposants d’un côté une gauche radicale désunie (LFI, Les Verts, quelques socialistes égarés) et de l’autre un Rassemblement National sans alliés, condamné à échouer éternellement au second tour de la présidentielle.

Et la droite dans tout cela ? L’absorption en cours des Républicains par Emmanuel Macron est à la fois une triste nouvelle et porteuse d’espoir. Triste, car on ne peut se réjouir de voir disparaître le parti qui aurait pu, avec Nicolas Sarkozy en 2007, enrayer le déclin français. Porteuse d’espoir car la disparition des Républicains comme parti de droite laisse la porte ouverte à la création d’un vrai parti de droite – où les dirigeants seront enfin en accord avec leurs adhérents – pour proposer une alternative crédible à Emmanuel Macron. Les présidentielles 2022 seront-elles l’occasion de voir naître ce parti ? À suivre…

Élections régionales: la droite festoie à Madrid

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La large victoire de la droite à la région de Madrid est un échec pour le gouvernement central. Pablo Iglesias (Podemos) a annoncé se retirer de la vie politique et le centre a perdu l’ensemble de ses élus. On annonce déjà un destin national à Isabel Díaz Ayuso, la présidente de la communauté de la capitale dont la politique libérale-conservatrice plait manifestement aux Madrilènes…


Un contexte houleux

Après l’échec de deux motions de censure régionales contre le Parti populaire (PP, droite conservatrice) dans la région de Murcie[1] et en Castille-et-León[2], le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE, social-démocratie) et toute la gauche espagnole en général espéraient pouvoir se rattraper en ce mardi 4 mai 2021 lors des élections régionales madrilènes. Organisé de manière anticipée à la suite de la dissolution du Parlement local par la présidente sortante, Isabel Díaz Ayuso (PP), le scrutin n’était en réalité qu’une conséquence de l’instabilité politique chronique qui touche l’Espagne depuis 2014-2015. Il était également le fruit de la méfiance de plus en plus grande entre les populares et leurs alliés de Citoyens (Cs, centre libéral).

L’objectif était donc, pour le président du gouvernement national Pedro Sánchez et ses alliés, de priver la droite du « joyau de la couronne », c’est-à-dire de la communauté autonome espagnole la plus riche et la plus dynamique du pays[3]. La Communauté de Madrid est, depuis 1995, le laboratoire des politiques libérales du Parti populaire, en particulier sous l’impulsion de l’ancienne présidente régionale Esperanza Aguirre (2003-2012) et de ses successeurs[4]. Pourtant, le scrutin d’il y a deux ans a été difficile pour la formation, minée par des scandales de corruption à répétition. Elle n’est en effet arrivée qu’en deuxième position dans l’autonomie avec 30 sièges sur 132, tandis que les socialistes faisaient la course en tête avec 37 élus[5].

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Une femme et une campagne

La tête de liste des popularesla jeune Díaz Ayuso (elle est née en 1978), semblait avoir été choisie pour perdre le scrutin et permettre d’assurer une transition passant par une cure d’opposition durant quatre ans. Fustigée pour ses déclarations-choc durant la campagne, elle était pourtant devenue locataire de la Maison royale du Courrier (siège de la présidence régionale, sur la Puerta del Sol) en 2019 grâce à un accord avec Citoyens et la droite « radicale » de Vox.

La discrète responsable politique s’est taillée en deux ans une réputation à l’ampleur nationale, notamment dans le cadre de la gestion de la pandémie de coronavirus, devenant ainsi l’ennemie à abattre pour toute la gauche. Son slogan de campagne, « Socialisme ou liberté » (auquel a rapidement répondu la devise « Fascisme ou liberté », inventée par la gauche « radicale ») témoignait dès le mois de mars dernier du ton général de la campagne. Cette dernière, marquée par une crispation inédite en Espagne, a vu se succéder les menaces de mort anonymes envoyées à plusieurs candidats (dont Isabel Díaz Ayuso elle-même[6]) et les jets de pierres de la part de militants « antifascistes » contre les participants et organisateurs d’une réunion publique de Vox dans un quartier populaire du sud de Madrid[7]. La polarisation du scrutin, tout à fait extrême, faisant donc s’affronter deux modèles de société apparemment irréconciliables, qui se taxaient mutuellement de « stalinisme » et de « nazisme ».

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Malgré la très grande popularité de la présidente sortante, qui avait notamment à son actif l’incroyable affection des hôteliers et restaurateurs de la région (auxquels elle avait permis de rester ouverts depuis juin 2020, en dépit de la situation sanitaire[8]), le combat semblait inégal. La gauche a en effet utilisé tous les moyens à sa disposition, entraînant bon nombre d’institutions normalement neutres (comme la Garde civile[9]) dans une campagne agressive, sale et interminable.

Le séisme du Parti populaire

Ladite campagne a néanmoins buté sur l’incroyable phénomène d’ayusomanía qui s’est développé depuis un an environ. Transformée en icône pop et en symbole même de la capitale, celle que ses partisans surnomment volontiers « Lady Madrid » était applaudie et acclamée partout durant ses déplacements dans la ville et en banlieue. Son visage était placardé dans de nombreuses vitrines de restaurants et de bars en remerciement pour sa politique d’ouverture, son nom était donné à des plats, des produits dérivés à son effigie pouvaient être achetés en ligne et elle apparaissait même sur l’étiquette d’une nouvelle marque de bière. Érigée en symbole de la « résistance » face au gouvernement de coalition qui dirige l’Espagne depuis janvier 2020, Isabel Díaz Ayuso a profité de cet essor dans l’opinion pour pratiquer un véritable « populisme d’État ». Bien qu’au pouvoir, elle n’a en effet eu de cesse que de vitupérer contre des élites (de gauche) « déconnectées » du peuple et de…

>>> Lire la fin de l’article sur le site de Conflits <<<

[1] Hermida, Xosé, « Fracasa la moción de censura de PSOE y Ciudadanos en Murcia », El País, 18 mars 2021.

[2] « El PSOE presenta una moción de censura en Castilla y León », El País, 10 mars 2021.

[3] Klein, Nicolas, « L’émergence silencieuse de Madrid », Conflits, janvier-février 2020, n° 25, page 24, et Magallón, Eduardo, « El sorpasso de Madrid a Cataluña como locomotora económica en gráficos », La Vanguardia, 28 juillet 2020

[4] Klein, Nicolas, « Madrid fait le choix de la liberté économique », Conflits, 9 janvier 2020.

[5] Les résultats officiels du scrutin sont consultables à cette adresse : https://resultados.elpais.com/elecciones/2019/autonomicas/12/index.html

[6] Navarro, Mayka, « «Estás muerta», las amenazas e insultos de la carta a Ayuso », La Vanguardia, 28 avril 2021.

[7] Nieto Jurado, Jesús, « Radicales de izquierda lanzan piedras a Abascal y Monasterio en su mitin de Vallecas », ABC, 8 avril 2021.

[8] Klein, Nicolas, « Madrid : mais comment font ces drôles d’Ibères ? », Causeur, 18 mars 2021.

[9] Campo, Susana et Esteban, Rocío, « La directora de la Guardia Civil que hace campaña por el PSOE cobra más de 120.000 euros anuales », La Razón, 27 avril 2021.

Napoléon Ier, une commémoration exaltée!

Une cérémonie haute en couleurs dans laquelle s’est glissé Frederic de Natal. De son côté, Emmanuel Macron a parlé d’une « commémoration éclairée » lors d’un discours à l’Institut.


C’est le personnage le plus connu après Jésus-Christ. Le 5 mai 1821, loin de ce peuple français « qu’il a tant aimé », s’éteignait un des héros de notre panthéon national. Tour à tour Général, Premier consul puis Empereur des Français, Napoléon Bonaparte a laissé derrière lui un legs qui continue de fasciner encore des générations d’Européens depuis deux siècles. Reposant dans un tombeau de quartzite rouge, au cœur même de l’Hôtel national des Invalides, la République française a décidé de commémorer la mémoire du « Petit caporal », mais sans le célébrer pour autant.

Un héritage dans lequel nous vivons

Napoléon Bonaparte a connu un destin unique. Un nom qui résonne avec celui des plus belles heures de notre histoire. Arcole, les Pyramides, Marengo, Austerlitz, Iéna, Eyau, Friedland… autant de batailles remportées par l’homme du 18 brumaire et qui aura marqué de son empreinte la première moitié du XIXᵉ siècle. Lycées, Banque de France, Légion d’honneur, les égouts, le Code civil, les préfets et même la numérotation pair-impair des rues, Napoléon Bonaparte a été aussi bien un talentueux militaire, dont les tactiques de guerre sont encore enseignées, qu’un réformateur de génie. Un héritage avec lequel nous vivons tous les jours, parfois sans même le savoir. 

A lire aussi, notre numéro spécial: Et si c’était lui? Notre dossier Napoléon

Lorsque survient sa première abdication en 1814, l’Aigle le ressent comme un déchirement national et ne pense qu’à son retour. L’épisode des cent jours achèvera de créer une légende qui se poursuit aujourd’hui, ancrée dans notre subconscient national. De sa défaite à Waterloo, il garde une amertume qu’il aura tout le loisir de ruminer à Sainte-Hélène où il sera envoyé en exil. Un petit caillou au large des côtes de l’Afrique du Sud, sous bonne garde de Britanniques trop zélés et heureux de s’être enfin débarrassé de « l’ogre corse » qui va écrire ici le dernier chapitre de sa vie.

Un instant solennel

« Vive l’empereur, vive la Nation ! » Les cris raisonnent en ce mercredi 5 mai 2021 dans l’Hôtel national des Invalides où les nostalgiques de l’Empire se sont rassemblés pour saluer cette figure historique. L’instant est solennel devant l’imposante structure où repose le fils de Charles Bonaparte et de Letizia Ramolino, « Madame mère ». Des gerbes de fleurs ont été disposées autour du tombeau pris d’assaut par les journalistes et la télévision. Sous le dôme des Invalides et le regard des grands noms de l’Empire, celui de Bonaparte en César étouffe de sa présence tous les participants. Venu accompagner de son épouse, le prince Murat, descendant du maréchal éponyme confie volontiers « son émotion » en descendant les marches qui les conduisent tous deux vers le lieu de repos éternel de Napoléon. Escorté par les élèves de l’école de Saint-Cyr, revêtus de leurs uniformes rouges et bleus, au passage de ces héritiers de l’empire, le salut est de rigueur. Dans l’armée française, on n’a pas oublié les fameuses charges épiques de Murat contre l’ennemi qui forcent l’admiration. Le temps d’une cérémonie, la France a renoué avec les fastes de l’Empire défunt, avec ses costumes chamarrés, dans un lieu emblématique où l’horloge du temps semble s’être arrêtée. 

A lire aussi: Napoléon est au-delà du bien et du mal

Venu de Londres où il réside, le prince Jean-Christophe Napoléon fait face à l’Histoire. Le prétendant au trône impérial de France (lire notre portrait), entouré d’officiers militaires, s’incline légèrement alors que retentit les premières notes d’une marche militaire. La cérémonie se veut loin de toutes les polémiques qui entourent ce bicentenaire et qui ont mis dans l’embarras le palais de l’Élysée. Dans une interview parue dans le magazine Point de Vue, le prince est revenu sur le sujet-phare qui a empoisonné ces festivités fermées au public et qui ont crispé comme divisé les Français. L’arrière petit-neveu de l’Aigle a volontiers reconnu que le rétablissement de l’esclavage avait été une faute, mais que l’Empereur l’avait réparée en le faisant interdire lors de son retour de l’ile d’Elbe en 1815. « Il est toujours délicat de juger une action ou une personne morte il y a deux siècles avec les critères et valeurs du XXIème siècle » se risque-t-il à rappeler.

Macron: “Nous avons tous en nous une part de Napoléon”

Si cette cérémonie manquait singulièrement d’éloges républicains, difficile d’ignorer la présence remarquée du maire de Nice et ancien ministre Christian Estrosi, comme celle de Valérie Pécresse. Très à l’aise avec le comte de Paris, la présidente de la Région île de France était tout sourire en face du Chef de la Maison royale de France. Un Jean d’Orléans venu en représentant de son ancêtre, Louis-Philippe Ier, le dernier roi des Français qui avait organisé le retour des restes de Napoléon Ier en France en 1840. Du monde politique au gotha en passant par celui de l’armée de Terre, la cour d’honneur des Invalides vibrait à l’unisson de la fanfare déployée pour l’occasion. Un regret, l’absence du président de la République, Emmanuel Macron, qui avait décidé de commémorer seul ce bicentenaire, loin des objectifs des photographes. Lors de son discours prononcé à l’Institut de France, le chef de l’État a pourtant affirmé qu’il « assumait tout » de cet « être complexe », prenant bien soin de préciser que la République reconnaissante de l’œuvre de Napoléon s’inscrivait dans un geste de « commémoration exaltée ».

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« De l’Empire nous avons renoncé au pire et de l’empereur nous avons gardé le meilleur. Son ultime intuition fut de vouloir combler le vide laissé par le roi le 21 janvier » n’a pas hésité à déclarer Emmanuel Macron. Napoléon Bonaparte ? Simplement une aventure palpitante ressassée à foison dont on ne se lasse jamais de découvrir les multiples facettes et qui reste malgré toutes controverses, une fierté nationale pour chaque Français.

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Du lesbianisme radical au “Meilleur des Mondes”, il n’y a qu’un pas

Pour les militantes les plus radicales de la “cause” lesbienne, l’homosexualité est avant tout abordée d’un point de vue politique, et pas du point de vue du désir. La déconstruction en cours du masculin accouchera-t-elle d’un monde inquiétant, où la sexualité telle que nous la connaissons aura disparu?


Dans Le Monde du 25 avril, est paru un article intitulé « La “joie” et le “soulagement” des féministes qui se “découvrent” lesbiennes. » Il y est question de femmes que leur « cheminement féministe » a conduit tout droit dans les bras de Sappho, de femmes qui ont « pris leur distance avec la domination hétérosexuelle » et ont fini sous la même couette que les précédentes, et de femmes qui voient « le lesbianisme comme une réponse politique au modèle pesant de l’hétérosexualité » et qui attendent leur tour dans le boudoir d’Alice Coffin qui se réjouit que « de plus en plus de jeunes femmes assument leur lesbianisme. »

Un combat contre l’hétéronormativité

Il semblerait que de plus en plus de femmes souffrent avec les hommes et ont décidé de virer leur cuti. Alice Coffin promet l’eldorado lesbien à ces femmes déboussolées qui se demandent si « l’hétéronormativité n’a pas tué leur créativité amoureuse. » Dans les dernières manifestations lesbiennes, des panneaux de recrutement sont brandis : « Libérez-vous du mâle, devenez lesbienne ! » ou « Engagez-vous dans le Gouinistan », accompagnés d’un argument de poids : « Mieux vaut une paire de mères qu’un père de merde. » Par conséquent, ces militants réclament la PMA au nom d’un droit à la procréation (ou droit-créance) qui augure le droit à avoir un enfant de la part des homosexuels. La GPA sera donc l’étape suivante en France, mais existe déjà ailleurs. Certaines cliniques spécialisées américaines ou ukrainiennes permettent de choisir le sexe et les caractéristiques physiques du futur enfant et préfigurent la Salle de Fécondation et le Centre d’Incubation imaginés par Huxley. L’utérus artificiel permettant l’ectogenèse est déjà dans les tuyaux et les chercheurs prévoient une application possible dans la seconde moitié du XXIe siècle.

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Vendredi dernier, Ovidie était l’invitée des Matins de Guillaume Erner sur France Culture. Cette spécialiste livre régulièrement les résultats de ses travaux sur les fluctuations de la fesse : « De nombreuses militantes rencontrent des difficultés à jouir en regardant le monde par le prisme de la domination masculine. Les femmes se posent la question de la provenance de leurs fantasmes, souvent issus du carcan patriarcal » (Télérama, 13 avril). Elle dit avoir rencontré des femmes qui sont dans « une forme de déconstruction » et qui ne veulent plus avoir de « sexualité pénétrative » ou « relationner avec les hommes. » Adepte des théories fumeuses autour du genre, elle considère que la sexualité relève d’une construction sociale et qu’il y a « des hommes aussi qui veulent se sortir de ses injonctions-là, de l’hétéronormativité », mais qu’on ne leur apprend pas à sortir « des règles de l’hétérosexualité » (sic). Elle est prête à donner des cours. D’ailleurs elle en donne. Cette dame fait des interventions dans les lycées et auprès des étudiants. Les lieux de transmission des savoirs que devraient être nos lycées laissent pénétrer dans leurs enceintes à peu près tout et n’importe quoi. Après les interventions de Lilian Thuram et Rokhaya Diallo sur le “racisme systémique”, voici celles d’Ovidie sur l’hétéronormativité à déconstruire et la pénétration à corriger. On s’étonnera après ça que nos adolescents vont de plus en plus mal.

Le processus mortifère de la non-binarité

Complètement perdus à force d’écouter les inepties décrites ci-dessus, de plus en plus de jeunes gens veulent “transitionner”. Des enfants, soutenus par des parents faiblards du bulbe et avides de passer à la télé, changent de “genre” à six ou sept ans, et certains, avec la complaisance de psychologues et de médecins faustiens, débutent des traitements irréversibles pour changer de sexe bien avant leur majorité. Tout aussi inquiétant, une proportion de plus en plus importante d’adolescents se dit non-binaire ou gender-fluid. Nous ne sommes qu’au début d’un processus mortifère qui se répand partout – Éducation nationale, universités, Sciences Po, associations néo-féministes, etc. – et qui participe à la construction d’un être humain nouveau, sans liens d’aucune sorte, fluide, intersexe, transformable, indéterminé et objet de toutes les expérimentations idéologiques présentes et à venir, même les plus dangereuses, même les plus inhumaines.

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La biologie étant, selon eux, une discipline “viriliste” et “patriarcale” (Judith Butler), les théoriciens du genre remettent en cause la perception naturelle des corps sexués et créent des abstractions censées troubler cette réalité qui ne leur convient pas. Les plus enragés de ces théoriciens se sont avérés être d’abord des lesbiennes radicales américaines, ennemies féroces de l’hétérosexualité. De Foucault, elles ont retenu l’idée de micro-pouvoirs détenus par les hommes hétérosexuels et imprégnant la société jusqu’à instituer une norme ; de Derrida, le concept de déconstruction qui postule que le réel n’existant pas en dehors du discours tenu sur lui par les dominants, il faut le déconstruire; de Barthes, l’idée d’un évanouissement du Phallus, ce « produit de l’oppression sociale, de la mauvaise histoire des hommes. » (1) Pour les lesbiennes radicales, toutes les règles naturelles ou symboliques doivent être abolies.

Le meilleur ou le pire des mondes ?

Alliés des causes LGBTQI+ ou néo-féministes, les moins fanatiques des homosexuels, des lesbiennes et des féministes militant pour de « nouveaux droits à » n’imaginent pas qu’eux-mêmes seront emportés par ce raz de marée détruisant toutes les limites (biologiques, symboliques, culturelles, etc.) et préparant le terrain transhumaniste de l’homme augmenté, monitoré de sa conception à sa disparition. Ce monde sans les tourments d’Eros et de Thanatos est décrit ainsi dans le livre de Huxley : « À présent nous avons l’État mondial. […] Les gens sont heureux ; ils obtiennent ce qu’ils veulent. […] Ils sont dans une sereine ignorance de la passion et de la mort ; ils ne sont encombrés de nuls pères ni mères ; ils n’ont pas d’épouses, pas d’enfants, pas d’amants, au sujet desquels ils pourraient éprouver des émotions violentes ; ils sont conditionnés de telle sorte que, pratiquement, ils ne peuvent s’empêcher de se conduire comme ils doivent. »

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Sexualité hygiénique, procréation en laboratoire, pharmacopée pour contrecarrer les rares moments de tristesse et de doute (donc de lucidité), contrôle social total jusqu’à la fin (euthanasie librement consentie), éradication de l’histoire (inutile au bonheur) et des livres (trop vieux), nous n’avons jamais été aussi près de voir concrètement se réaliser une partie de l’œuvre de Huxley qu’on qualifierait aujourd’hui de dystopique. D’ailleurs, quinze ans seulement après la sortie de son livre, l’auteur écrira dans la nouvelle préface de l’édition de 1946 : « À cette époque (1931) je l’avais lancée (cette utopie/dystopie) à six cents ans dans l’avenir. Aujourd’hui, il semble pratiquement possible que cette horreur puisse s’être abattue sur nous dans le délai d’un siècle. »

(1) Cette citation est tirée de Roland Barthes par Roland Barthes (Le Seuil, coll. Les écrivains de toujours). « La sexualité est un produit de l’oppression sociale, de la mauvaise histoire des hommes : un effet de civilisation, en somme. Dès lors, il se pourrait que la sexualité, notre sexualité, fût exemptée, périmée, annulée : évanoui le Phallus ! » Notre sexualité est bien entendu, pour Barthes, la sexualité “phallocentrique”, supposée être dominante et oppressive.

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Avoir de l’entrejambe

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Exemple de manspreading dans les transports © D.R.

Au pays de l’égalité femmes-hommes, le « manspreading » est dénoncé par les néoféministes. Mais ne serait-il pas plutôt un remède au manque de virilité de notre époque?


Pour de sombres histoires d’égalité hommes/femmes dont j’ai fini par m’accommoder raisonnablement, j’emmène parfois mon fils au parc. Assis sur un banc, je surveille le gosse d’un œil en matant les MILF de l’autre mais discrètement, à la dérobée, pour ne pas embarrasser d’éventuelles néoféministes pour qui le sentiment d’être un objet de désir est une expérience traumatisante.

Ainsi, je tue le temps en louchant, ravi de vivre au pays des femmes belles, libres, bien roulées et durablement désirables, et plein de compassion pour ceux de mes compatriotes que l’emprise communautaire et l’endogamie mettent au régime cacher ou hallal bien emballé, voire hermétiquement scellé, dans une ville où les mets les plus raffinés et les plus parfumés leur passent sous
le nez.

Couilles-en-éventaillothérapie

Comme l’a écrit Diderot, la vie est courte, mais les journées sont longues, surtout celles passées à garder des enfants, et surtout quand on préfère crever plutôt qu’entamer une conversation avec un papa poussette mal rasé, mal fagoté et un tantinet féminisé. Du coup, mâle solitaire et mal à l’aise, je m’ennuie un peu.

Enfin je m’ennuyais. Aujourd’hui, c’est différent. Des chercheurs dont je n’ai pas retenu les noms dans je ne sais plus quelle université (je ne suis pas Peggy Sastre) ont découvert que le « manspreading » (l’étalement masculin) qui consiste pour un homme à se tenir assis les jambes écartées dans un espace public, augmentait le taux de testostérone et diminuait le stress.

J’ai reçu la nouvelle comme étant la meilleure de l’année. À présent au parc, je ne perds plus mon temps. Comme d’autres vont à la piscine avec une ordonnance de balnéothérapie, je pratique sur mon banc mes séances de couilles-en-éventaillothérapie. Ce n’est pas remboursé par la Sécu mais les scientifiques ne se trompent pas : penser que je deviens plus mec parmi les femmes de
tous les genres, ça me détend.

Causeur: la France résiste au woke

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© Causeur

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Comme à d’autres moments critiques de son histoire, la France résiste ! A quoi ? A cette culture woke qui déferle sur nous en cherchant à saper les fondements de la société occidentale. Pour Elisabeth Lévy, il y a de bonnes raisons d’espérer que ce nouveau totalitarisme se cassera les dents sur l’esprit français. Certes, le salut ne viendra pas des hautes sphères de l’État, car Emmanuel Macron reste tiraillé entre le refus de déboulonner nos statues et la volonté de « déconstruire » notre histoire. Face à ceux qui voudraient nous diviser en racisés et racistes, le secret de notre résistance tient d’abord, explique notre directrice de rédaction, à « la supériorité d’un modèle français que les militants rejettent précisément parce qu’il se fiche de leurs origines. » A part le modèle républicain, Mathieu Bock-Côté voit un esprit de résistance dans l’art de vivre français, dans la sociabilité et la qualité du lien humain qui restent imperméables aux pires excès de la cancel culture. C’est justement son mariage d’amour avec la culture française que la franco-tunisienne Sonia Mabrouk raconte à Gil Mihaely. L’auteur d’Insoumission française, dont le portrait figure sur notre couverture,réprouve l’esprit woke comme un « mélange d’autodénigrement, de servitude et de rancœur » servant de « poison mortel qui coule dans les veines du pays. »

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Pour résister, il faut identifier ses points faibles et préparer la contre-attaque. Philippe Pichot dénonce la Loi Taubira qui, en taisant les traites africaines et musulmanes, stigmatise les seuls Européens pour communautariser la mémoire de l’esclavage. Erwan Seznec révèle le grand déraillement qui ébranle l’université française : si tant de dingueries sur la race et le genre ont cours dans les amphithéâtres, c’est parce que l’habitude de délirer avec autorité s’y est implantée au fil du temps. Répondant aux offensés professionnels qui se prétendent humiliés par la vue d’un comédien grimé en noir, Cyril Bennasar affirme qu’il ne peut pas croire que ses compatriotes noirs soient incapables d’apprécier l’humour, le second degré et l’autodérision. Nous pouvons tous renforcer notre propre esprit de résistance en lisant La Révolution racialiste, de Mathieu Bock-Côté, qualifiée par Elisabeth Lévy de « véritable manuel de guérilla à l’usage des universalistes », et en nous inspirant du courage d’Andy Ngo, le journaliste américain, présenté ici par moi-même, qui a enquêté sur les soi-disant « antifas », ces émeutiers organisés qui traduisent les théories du genre et de la race en actes de violence.

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Côté actu, Gérald Darmanin, se confiant à Elisabeth Lévy et à Gil Mihaely, affirme que l’islam est compatible avec la République, mais reconnaît que l’islamisme et l’immigration illégale sont un frein à l’intégration des musulmans en France. Parmi les mesures phares de la loi « séparatisme » que porte le ministre de l’Intérieur figure le retour discret de la double peine. Pour Natacha Polony, interviewée par Cyril Bennasar, le système démocratique français est actuellement tombé en panne. La directrice de Marianne, auteur de Sommes-nous encore en démocratie ?, voit la seule solution dans un recours à plus de souverainisme. Qu’en est-il justement de la dette souveraine à l’ère de la crise sanitaire ? Stéphane Germain explique que la distribution massive d’argent public ne s’arrêtera pas avant mai 2022, car cette gestion dispendieuse sert trop bien les intérêts du futur candidat, Emmanuel Macron. L’expert-psychiatre, Paul Bensussan, analyse l’affaire Sarah Halimi, en rappelant que, si le meurtrier était fou au moment des faits, il n’en est pas moins coupable d’un crime antisémite. François Bonardel et Paul Thibaud se penchent chacun sur la proposition de loi sur « la fin de vie » : est-il réellement possible de conjuguer liberté et dignité dans notre utopie individualiste ? Le sociologue Tarik Yildiz mène l’enquête sur une possible ingérence turque dans la politique française, tandis que Vladislav Davidzon raconte une ingérence américaine dans la politique ukrainienne destinée à influencer… les élections américaines.

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Selon le musicien américain Frank Zappa, il y a trop de livres et trop peu de temps pour les lire. Nous en avons donc lu pour vous. Frédéric Ferney a lu l’autobiographie de Barak Obama, on y trouvant du charme à condition de ne pas en être dupe, tandis que Basile de Koch a lu la première biographie de Marie-France Garaud, l’idole de sa jeunesse qu’il trouve toujours irrésistible. Jérôme Leroy salue une belle réédition des Fables de La Fontaine, publiée dans la collection Pléiade, pour fêter les 400 ans du poète. Nous ne sommes pas des bonobos ! C’est non seulement une évidence, mais aussi le titre du nouveau livre de l’éminent linguiste, Alain Bentolila, qui nous explique en quoi le langage humain est incomparablement plus ambitieux que la communication animale. Pour la musique, Sophie Bachat salue deux chanteuses légendaires, la Française au nom anglais, Sheila, et l’Anglaise au nom français, Marianne Faithfull. Deux icones des années 60 mais pas que. La preuve ? Elles sortent chacune un nouvel album. Combinant littérature et art de la table, Emmanuel Tresmontant nous rappelle combien Simenon, le créateur de Maigret, était un ardent défenseur de la culture française dont le haut lieu est le bistrot – cette même culture qui, pour Bock-Côté, incarne l’esprit de résistance. Dès la réouverture des terrasses, on va tous prendre le maquis…

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Tête de Pierre et tête d’Arabe

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La journaliste Elisabeth Lévy © Pierre Olivier

L’éditorial de mai d’Elisabeth Lévy


Le 7 juin 2009, alors que Manuel Valls serre des mains dans les rues d’Évry, il se fait pincer par la patrouille. Oubliant le micro-cravate dont l’a équipé une chaîne de télévision, le député-maire lâche entre les dents à son dir’ cab : « Tu me mets quelques Blancs… Enfin, quelques White, quelques Blancos ! » (comprendre : pour la photo). Toute la gauche se bouche vertueusement le nez, les journalistes exultent : on vous l’avait dit que ce type était de droite.

En 2016, pour avoir affirmé qu’il y a dans certaines classes de sa ville 90 % d’élèves musulmans et que c’est un problème, Robert Ménard a droit au traitement grand luxe : heures les plus sombres, fichage ethnique et procès qui ira jusqu’à sa relaxe définitive en 2019.

À peu près à la même époque, en 2015, des mères d’origine marocaine de Montpellier se plaignent qu’il n’y ait pas de blonds dans la classe de leur fils. Libération s’enthousiasme et espère que le gouvernement va enfin s’attaquer à la « ghettoïsation scolaire ».

Les ravis de la crèche multiculti

Ça ne doit pas donner des résultats fameux, car six ans plus tard, le 19 avril dernier, c’est encore à Montpellier que Naïma Amadou interpelle le président : son fils, explique-t-elle, lui a demandé si le prénom Pierre existait vraiment ou si c’était seulement dans les livres. Cette fois encore, les ravis de la crèche multiculti rivalisent dans l’empathie pour cette dame et dans la sévérité pour ces politiques qui ont « parqué ces populations ». Il ne vient pas à l’idée du président de demander à Naïma pourquoi elle n’a pas appelé son fils Pierre, d’ailleurs il ne lui vient pas d’idée du tout, il reste coi.

Toutefois, de nombreux commentateurs envisagent ouvertement que la tenue strictement islamique de Naïma, comme celle de nombreuses mères de son quartier, contredise son désir d’intégration. On sait grâce à Christophe Guilluy pourquoi les prolos old school (comme dirait Onfray) ont quitté les banlieues pour l’intermonde appelé France périphérique. Ce qui a changé, c’est qu’on peut le dire sans se faire trop insulter.

À lire aussi : “Quand on est française, on ne porte pas un hijab”

Des Blancos de Valls au Pierre de Naïma en passant par les élèves de Ménard et les blonds de Montpellier, le constat est identique : certains quartiers où l’immigration musulmane est majoritaire ne ressemblent plus vraiment à la France. Au point que même les habitants se plaignent de cet entre-soi qui prive leurs gosses de tout contact avec la culture majoritaire.

Or, Valls et Ménard ont reçu des flots d’invectives et Naïma des encouragements apitoyés. Ce deux poids, deux mesures ne tient pas seulement à la tête du client. Pour avoir le droit de voir ce que l’on voit, il ne suffit pas d’appartenir par naissance à un groupe victimisé, encore faut-il tenir le discours qui sied à une victime. Comme nos policiers ou militaires d’origine subsaharienne ou maghrébine, Sonia Mabrouk est accusée par les bons esprits de faire « la Française ».

Certains ont même le droit de compter. Alors, comme les Shadoks pompaient, ils comptent, inlassablement : les femmes, les Arabes, les Noirs, les handicapés, dans les conseils d’administration, les émissions de télé, les films, les prix Goncourt. Nul ne le leur reproche, pour peu qu’ils parviennent à la seule conclusion acceptable : il n’y en a pas assez. Inversement, si on compte les discriminations, les agressions sexuelles ou les bavures policières, il faut découvrir qu’il y en a toujours plus.

Le scandale « tête d’Arabe »

Mais c’est le scandale collatéral dont a accouché « l’affaire Pierre » par le truchement de votre servante qui montre que l’antiracisme peut devenir fou et rendre fou. Sur le plateau de Sonia Mabrouk à CNews, j’ai remarqué que les quartiers sans Pierre étaient aussi ceux où on pouvait se faire enquiquiner si on mangeait pendant le ramadan, même quand « on n’avait pas une tête d’Arabe », puis répondu en substance à Sonia Mabrouk (quoique avec moins d’assurance que je l’aurais voulu) que oui, elle aussi avait une « tête d’Arabe » – ravissante au demeurant. Expression peut-être un brin désinvolte, mais purement descriptive et évidemment dénuée de toute connotation péjorative. Deux jours plus tard, j’apprends que je suis en « TT » (« TrendingTopics ») sur Twitter, ce qui veut dire que je fais causer et pas en bien. La meilleure protection contre les raids numériques c’est encore de les ignorer.

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Cependant, les cris de chochottes offensées parviennent finalement à mes oreilles. Que des gens qui s’appellent « frère » ou « cousin » sur la seule base d’une ressemblance physique jouent les indignés parce qu’on remarque cette ressemblance ne me trouble guère. Pour autant, cette micro-polémique illustre l’aporie sur laquelle butent les chantres de la diversité. D’un côté, ils brandissent leurs différences comme des étendards et réclament pour elles de la visibilité – d’ailleurs, ils se définissent comme des minorités visibles. De l’autre, quand on voit ces différences, ils hurlent à l’agression raciste. Voyez-nous sans nous voir. Cette injonction contradictoire prouve par l’absurde la supériorité d’un modèle français que les militants rejettent précisément parce qu’il se fiche de leurs origines, qu’elles se voient ou pas à leur tête. Seulement, quand on se définit comme « racisé », on ne peut pas se passer de racistes. Au besoin, on en invente.

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Dans la famille Agag-Boudjahlat, je demande le frère…

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Kamel Agag-Boudjahlat, © capture d'écran France Bourgogne-Franche-Comté

Kamel Agag-Boudjahlat a été très éphémèrement candidat RN aux élections. Récit.


Désigné le 30 avril tête de liste pour le Rassemblement national dans le territoire de Belfort, Kamel Agag-Boudjahlat retire sa candidature trois jours plus tard.

La désignation avait fait parler d’elle : comme l’habitant du quartier de la Petite Hollande à Montbéliard le reconnaît lui-même, la « prise » était intéressante pour un parti en quête permanente de dédiabolisation, tout comme son expérience auprès de la jeunesse des quartiers difficiles était un réel atout. Mais elle avait aussi entraîné bon nombre de réactions indignées et tout un lot d’attaques et de menaces contre sa famille. Face à ces dernières, le candidat déclarait tenir bon, quoique difficilement, comptant sur le soutien plein et entier de Julien Odoul, chef de file de la région qui l’avait imposé.

À lire aussi, entretien avec Fatiha Agag-Boudjahlat: “Mon frère salafiste et mon frère témoin de Jéhovah considèrent l’homosexualité comme une abomination”

Après l’annonce de son désistement, c’est un tout autre son de cloche. Déclarant ne plus pouvoir supporter les menaces, tout comme l’incompréhension de nombre de ses proches ne s’expliquant pas son engagement, le chess-boxeur [nouveau sport hybride, mélangeant échecs et boxe anglaise ! NDLR] dit avoir voulu « infiltrer » le RN. Soucieux de poursuivre son combat en faveur des quartiers sensibles, un siège de conseiller régional lui avait paru confortable, et les sondages favorables au RN lui désignèrent la meilleure opportunité à saisir. L’idée était de « tomber » le masque une fois élu, et d’œuvrer alors comme représentant des quartiers prioritaires.

Une trahison ?

Être nommé tête de liste fut aisé : « il suffisait de parler de violences et d’insécurité », bien que la désignation par les instances supérieures de ce nouvel encarté sur foi de sa bonne mine irrita quelque peu les militants historiques. Il ôta cependant le masque plus vite que prévu, assortissant son coup de théâtre d’un appel à voter contre le RN et de l’annonce de la préparation d’un livre sur l’expérience.

La direction du parti de droite nationale, préfère, elle, dénoncer plutôt la campagne de harcèlement dont il fit l’objet, preuve, selon Julien Odoul, qu’aujourd’hui un Français d’origine maghrébine n’était pas libre de se présenter comme il l’entendait.

Les campagnes de harcèlement, c’est aussi le quotidien d’une autre Agag-Boudjahlat, célèbre, sœur ainée du précédent, enseignante, militante et essayiste : Fatiha Agag-Boudjahlat. Elle est en pleine promotion de son dernier ouvrage, les Nostalgériades (voir notre recension). Celle-ci, a récemment témoigné sur la violence des attaques qu’elle subissait, notamment de la part de Taha Bouhafs, qui, à l’annonce de la candidature de son frère n’avait pas manqué d’y voir une preuve de son prétendu extrémisme. L’essayiste défend son frère, dont elle se dit très proche et admiratrice du travail, dit qu’il y a une grande diversité d’opinions dans leur nombreuse fratrie et réaffirme son attachement à la liberté individuelle. Après l’annonce du retrait politique de ce dernier, elle n’a pas souhaité commenter davantage, quand Causeur la sollicite. Elle dit voir dans cet épisode un coup médiatique de Julien Odoul, et avoir tenté de dissuader son frère de rejoindre le RN, consciente de la violence qui en découlerait.

L’Éthiopie déclenchera-t-elle la guerre de l’eau?

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Abdelrahim Ali, député égyptien et président du CEMO (centre des études du Moyen-Orient) à Paris.

L’Éthiopie, où prennent leurs sources de nombreux fleuves, exploite son avantage naturel pour déstabiliser les équilibres stratégiques dans la région de la Corne d’Afrique et du bassin du Nil.


Alors que l’Éthiopie tient toujours à poursuivre son projet du grand barrage de la Renaissance en commençant juillet prochain la seconde phase de remplissage du réservoir, l’Égypte met en garde Addis Abeba contre la prise de mesures unilatérales. Le Caire appelle également la communauté internationale et notamment les États-Unis à intervenir afin de désamorcer cette crise qui pourrait déclencher une guerre dans la région.

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La crise s’est cristallisée en avril 2011 lorsqu’Addis Abeba prit unilatéralement la décision d’utiliser l’eau du Nil bleu pour remplir le mégabarrage hydroélectrique. L’Éthiopie annonçait vouloir produire de l’électricité alors qu’elle ne cherchait par là qu’à changer les règles du jeu et transformer l’eau du Nil en marchandise comme les autres. Or, le Nil, étant l’unique source d’eau en Égypte, est l’artère vitale des Égyptiens. C’est aux bords du Nil que l’Égyptien a établi sa civilisation depuis voilà sept mille ans. Il a creusé les ruisseaux, érigé les barrages et les ponts et a conduit l’eau du Nil jusqu’à l’intérieur des temples. L’Égypte a fondé ses projets de développement de son agriculture, son industrie et son commerce en tablant sur son quota de l’eau du Nil qui atteignait 55.5 milliards mètres cubes par an. Ce quota a été défini par l’accord sur le partage des eaux du Nil de 1959 et restait depuis inchangé malgré  une croissance démographique très forte portant la population égyptienne à quelques 105 millions contre 30 millions d’âmes au moment de la ratification de l’accord. Ainsi ce quota équivaut aujourd’hui 500 mètres cubes par an et par tête d’habitant, une quantité qui représente 50% du « seuil de pauvreté hydrique » fixé par la Banque Mondiale.

Barrage de la Renaissance © Adwa Pictures / AFP.

Des négociations permanentes

L’Ethiopie en revanche est très riche en eau : des précipitations d’un milliard de mètres-cubes par an, plus de 12 fleuves en sus du Nil bleu, de Sobat et d’Atbara sans oublier l’exploitation de plus de six barrages pour la production de l’électricité et pour l’agriculture.

Les négociations en cours actuellement entre l’Égypte, le Soudan et l’Ethiopie portent principalement sur le remplissage et le fonctionnement du barrage en vertu de la déclaration de principes signée par les trois parties en 2015. Or l’Ethiopie ne cesse de tenter d’entrainer les pourparlers sur d’autres terrains comme les anciennes conventions de 1929 et 1959 qui organisent la coopération entre les pays du bassin du Nil et l’utilisation des eaux du Nil et dont l’Ethiopie ne fut pas partie contractante. En outre, elle passe expressément sous silence la convention des frontières de 1902 qui l’engage à ne créer aucune œuvre au bord du Nil bleu ou dans la région controversée de Shangoul cédée par le Soudan (qui dépendait alors du gouvernement égyptien) en vertu de condition d’interdire sur l’intégralité de son territoire installations ou barrages qui nuiraient aux intérêts du Soudan. Rejetant des conventions qui ne l’engagent nullement et reniant les obligations que lui en imposent d’autres, l’Ethiopie confirme sa position discordante et contradictoire.

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Alors que le besoin de production d’électricité, argument mis en avant par Addis-Abeba, est discutable, l’Ethiopie tente d’accélérer le remplissage de son réservoir (de 14 à 74 milliards m3). Cette insistance sur le rythme – l’Egypte avait déjà accepté que le réservoir soit rempli dans une durée de 10-12 ans)  laisse planer les doutes sur les véritables intentions des Ethiopiens.

De plus, l’Éthiopie ne cesse d’invoquer « l’utilisation équitable des eaux du Nil », sauf qu’aucun rapport n’existe entre le partage des eaux dont parle Addis-Abeba et les négociations autour du dossier concret du barrage. Curieusement l’Éthiopie ne l’évoqua que l’année dernière pendant les négociations tenues sous les auspices de l’Union africaine. La déclaration de principes signée par les diverses parties en 2015 ne porte pas sur ce sujet. Bien au contraire, au cœur de cette déclaration se trouve le principe selon lequel les pays de l’aval ne seront pas lésés par ceux qui se trouvent en amont.

Des visées expansionnistes?

L’Ethiopie essaie tout simplement de faire croire – et accepter – qu’elle est propriétaire des eaux de tous les fleuves qui prennent leur source dans le plateau éthiopien. Pire encore, l’Ethiopie essaie de faire de ces eaux une arme économique et stratégique pour mettre à genou et appauvrir l’intégralité de la région. Autrement dit, l’Ethiopie exploite cet avantage naturel pour déstabiliser les équilibres stratégiques dans la région de la Corne d’ Afrique et du bassin du Nil. Elle tente aussi de s’imposer comme puissance hégémonique régionale et peut être suspectée de visées expansionnistes dans les territoires du Soudan et d’autres pays limitrophes. On ne peut pas exclure non plus une volonté de reprendre la main sur l’Erythrée et l’accès à la mer rouge (l’Ethiopie est un pays enclavé sans accès à la mer).

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C’est pourquoi l’Éthiopie refuse catégoriquement tout accord contraignant portant sur la gestion hydraulique du barrage : Addis-Abeba cherche à avoir les mains libres pour mettre en exécution sa grande stratégie dont chaque étape de cette crise en dévoile davantage.  Néanmoins, l’Éthiopie est tout à fait consciente que toute violation de l’accord de principes signé entre toutes les parties en 2015 l’exposera à de graves conséquences : l’Égypte se verra  alors en droit de prendre les mesures qu’elle juge pertinentes, y compris l’usage de la force et la déclaration de guerre, afin de préserver son quota des eaux du Nil. C’est pourquoi, il incombe à la communauté internationale et notamment les pays européens et les États-Unis d’intervenir rapidement, d’arrêter le remplissage du barrage et de parrainer de sérieuses négociations qui feraient entendre la voix de la raison à l’Éthiopie avant qu’il ne soit trop tard.

Drame d’Avignon: la France forte avec les faibles, faible avec les forts

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Un policier sécurise les lieux du crime, Avignon, 5 mai 2021 © CLEMENT MAHOUDEAU / AFP.

Le meurtre par balle d’un policier d’Avignon près d’un point de deal mercredi doit nous inspirer, à tous, compassion et colère.


Compassion évidente envers ce policier tué – vraisemblablement par un dealer – alors qu’il intervenait sur un lieu de trafics bien connu. Envers sa famille, ses amis, tous ses proches. Envers ses collègues de terrain, envers une institution maltraitée, éprouvée, souvent vilipendée, mais qui même si elle a sa part de responsabilité n’en reste pas moins massivement inspirée par un authentique souci du bien commun et un véritable dévouement. Et colère. Colère envers une frange de la population qui a fait collectivement le choix de la délinquance, envers une magistrature indigne, envers les politiques de tous bords, envers de nombreux médias, envers la hiérarchie des forces de sécurité qui n’est pas à la hauteur de l’époque.

Bien sûr, il vaut mieux chercher des solutions que des coupables. Il n’empêche : savoir comment on en est arrivé là est important, et il n’est plus tolérable que ceux à cause de qui notre pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans la sauvagerie échappent à leurs responsabilités.

Compassion pour les uns, indifférence pour les autres

Il y a toute cette frange de la population qui a, collectivement, fait le choix de la délinquance. Trafics, économie souterraine, loi de silence, vision romantique du truand et exaltation du caïd, attachement à une culture où la brutalité est la norme et où l’idée même d’intérêt général fait hausser les épaules en ricanant. Oui, les habitants des zones de non-droit sont les premières victimes de ces bandes contre lesquelles l’État ne les protège pas, mais beaucoup sont aussi responsables de l’éducation qu’ils donnent – ou trop souvent qu’ils ne donnent pas – à leurs enfants. On sait les remarquables travaux du docteur Maurice Berger sur le sujet, sur le rôle crucial de l’environnement culturel et familial.

À lire aussi, Maurice Berger: Remettre la honte à sa juste place

Il y a cette magistrature gangrénée par l’idéologie du juge Baudot, pleine de compassion envers les criminels mais d’indifférence envers les victimes et d’hostilité envers les forces de l’ordre, cette magistrature accrochée à son privilège d’indépendance, qui se croît propriétaire du pouvoir judiciaire alors qu’elle n’en est que délégataire car en France la souveraineté, dont le pouvoir judiciaire est une composante, n’appartient qu’au peuple. Une corporation dont seule la légitimité est d’avoir réussi un concours professionnel, mais qui utilise l’autorité qui lui est confiée au mépris de la volonté générale et du bien commun, pour servir une vision idéologique et une obsession pour la forme au détriment du fond.

Culture de l’excuse

Il y a ces politiques, de tous bords, sans doute les premiers coupables. À gauche on retrouve l’idéologie, la culture de l’excuse, la négation du libre-arbitre qui conduit à affirmer que tout délinquant ne serait que le produit mécanique de conditions socio-économiques – quel terrible mépris envers ces centaines de milliers de gens qui malgré la pauvreté sont honnêtes et droits ! On trouve l’obsession pour la « réinsertion » et les « peines alternatives » qui conduit à faire mille fois plus pour les criminels que pour les honnêtes gens, et à faire prendre tous les risques aux seconds pour flatter son orgueil et se draper de vertu en se montrant compatissant envers les premiers. Taubira, Belloubet, Dupond-Moretti : tout est dit.

Et à droite ! Sarkozy a promis le karcher, mais n’a fait que de l’affichage et de la communication. Les gouvernements successifs n’ont jamais eu le courage d’affronter l’idéologisation de la magistrature, ni de faire adopter des lois à la hauteur de la situation et des enjeux, ni de mettre fin à l’inflation formaliste perpétuelle de la procédure pénale, de plus en plus chronophage pour les forces de l’ordre au détriment de la présence sur le terrain. Pire encore, au lieu d’assumer de dire le réel, la droite a laissé la gauche – dans ce domaine comme dans tant d’autres – imposer un magistère moral absurde, elle s’est pliée à cette arrogance de l’adversaire. Oui, la plus grande faute politique et morale de la droite est celle-ci : avoir permis à la gauche de fixer les limites de ce que l’on a le droit de dire, des questions que l’on a le droit de poser, des constats que l’on a le droit de faire.

À lire aussi, Pierre Cretin: 2022: sans alliance des droites, pas de victoire possible !

Et n’oublions pas, droite ou gauche, la faute qui consiste à avoir instrumentalisé les forces de l’ordre contre le peuple, faute dont Emmanuel Macron et sa majorité ont été les parangons pendant la crise des gilets jaunes, « en même temps » qu’ils montraient une indulgence coupable envers les casseurs ou des mouvements ouvertement haineux comme les manifestations de la famille Traoré. « Fort avec les faibles, faible avec les forts » : et on s’étonne ensuite qu’il y ait des catastrophes ? Que l’habitude de l’impunité pousse à aller toujours plus loin ?

Il y a ces médias, eux aussi massivement acquis à cette idéologie du « politiquement correct », eux aussi coupables d’avoir laissé le déni du réel s’investir d’une autorité morale et d’un pouvoir de censure dramatiques, eux aussi responsables d’avoir diffusé la méfiance systématique (quand ce n’est pas la haine) envers les forces de l’ordre, et une vision romantique idéalisée de la délinquance. Non, les criminels qui frappent aujourd’hui en France ne sont pas des Jean Valjean, ce sont des Thénardiers ! Les médias aussi ont du sang sur les mains. Et il y a les forces de l’ordre elles-mêmes. J’hésite à écrire ces lignes alors qu’elles sont en deuil, mais hélas ! Dans la police elle-même, il y a une hiérarchie trop soucieuse de se faire bien voir, trop adepte du « pas de vagues », trop éloignée du terrain. Une hiérarchie qui a laissé la « voie publique » être le parent pauvre des commissariats, et regarde passivement s’accumuler les missions « innovantes » au détriment du travail de fond, laborieux mais indispensable. Des organisations syndicales très soucieuses de mesures catégorielles et de rythmes horaires – avoir toujours plus en faisant toujours moins – mais très peu soucieuses d’efficacité opérationnelle, et de capacité à monter en puissance pour renforcer un équipage pris à partie. Malgré la valeur des hommes et des femmes qui servent sous l’uniforme, le constat est terrible : la police a abandonné des secteurs entiers du territoire, et là où elle « tient » encore c’est uniquement grâce au travail désormais incontournable des polices municipales.

Vers le règne des caïds et des milices

Dans la gendarmerie, certes le statut militaire est une garantie et un gage de capacité de réaction à l’urgence, mais pourquoi tant d’années de silence face à des dérives que chacun constate et connaît ? Pourquoi Bertrand Soubelet a-t-il été pratiquement le seul à oser dire ce que tout le monde sait ? Pourquoi une absolutisation du devoir de réserve au détriment du devoir d’alerter le peuple souverain sur la situation réelle de la France ? Alors que l’institution bénéficie – à juste titre – de la confiance de la grande majorité des citoyens et des élus, pourquoi ne pas dire ouvertement l’incapacité de la police à tenir le terrain qui lui est confié, et l’incurie désastreuse de la réponse pénale ? Et je ne parle pas des associations professionnelles (car si les militaires ne peuvent pas se syndiquer, ils disposent désormais d’un droit d’association) que l’on aimerait beaucoup plus offensives et beaucoup plus déterminées à se faire entendre.

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Le choix est simple. Nous pouvons continuer à nous payer de mots, exprimer notre tristesse et notre indignation, « condamner fermement », et laisser le pays glisser encore et encore vers le délitement. Laisser l’État démissionner toujours plus de ses responsabilités régaliennes pour se transformer en fermier général, et nous pousser vers le règne des caïds et des milices. Exactions des pillards et des bandes au détriment des plus faibles, groupes d’auto-défense pour ceux qui parviendront à s’organiser et à s’équiper, sécurité privée surarmée au seul bénéfice des plus fortunés, et ce sera l’ère des seigneurs de la guerre. La fragmentation de la France en multiples féodalités, ou l’avènement d’une dictature fanatique qui saura unifier les bandes les plus brutales et gouverner par la peur – c’est le rêve des islamistes – ou encore la prise de pouvoir par une oligarchie s’appuyant sur une supériorité technologique écrasante pour imposer sa volonté aux masses. Ou un héros, qui parviendra à fédérer les forces de l’ordre, les armées et le peuple pour refonder la France…  mais il serait bien imprudent d’attendre passivement l’émergence improbable d’un nouveau Napoléon, ou l’apparition miraculeuse d’une nouvelle Jeanne d’Arc.

Mais nous pouvons aussi reconquérir le territoire dès maintenant, sans attendre le chaos total ni l’homme providentiel. Construire des prisons, et les remplir. Rappeler à tous que dans « violence légitime » il y a « violence », et que les forces de l’ordre ont le droit et même le devoir d’en faire usage. Refonder totalement la chaîne pénale pour que le formalisme cesse d’être plus important que le fond, pour les peines soient véritablement dissuasives (par l’enfermement et en frappant au porte-feuille) et pour qu’elles soient effectives et douloureuses dès le premier fait, au lieu d’attendre qu’un jeune ait fait de la délinquance son mode de vie avant de se préoccuper enfin de le sanctionner. Oser, partout où il le faudra, proclamer l’état de siège. Et confronter enfin les magistrats aux conséquences de leurs décisions, obliger le pouvoir politique à trouver le courage de contraindre l’autorité judiciaire à rendre des comptes au seul souverain légitime de la France : le peuple français.

La droite est morte, vive la droite?

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Le Président des Républicains Christian Jacob, avril 2021 © Jacques Witt/SIPA Numéro de reportage : 01014213_000015

Deal implicite entre LR et LREM. C’est « Les Républicains En Marche »!


Le 4 mai 2021, la droite institutionnelle française est morte, absorbée par Emmanuel Macron.

L’UMP, née le 23 avril 2002 et rebaptisée Les Républicains le 30 mai 2015, n’aura pas tenu 20 ans ! En maintenant son soutien à Renaud Muselier, la direction des Républicains ne cache même plus sa stratégie pour 2022 : devenir le « flotteur droit » d’Emmanuel Macron. Le sigle LREM prend enfin tout son sens – était-ce l’objectif d’Emmanuel Macron dès le début ? –  Les Républicains En Marche.

Les Républicains apporteront leurs élus locaux à une Macronie qui en manque cruellement. Les élus locaux, eux, s’assurent de leur réélection avec une étiquette centriste élargie

Dans un premier temps, Christian Jacob a bien tenté de réagir verbalement à l’accord annoncé dimanche entre LREM et LR en PACA, pour faire croire à ses adhérents que les Républicains étaient toujours un parti d’opposition à Emmanuel Macron. Mais la commedia dell’arte n’a pas duré plus de deux jours. Mardi 4 mai, la Commission Nationale d’Investiture a « apporté son soutien à Renaud Muselier », avec pour seule condition de n’inclure aucun parlementaire ou ministre LREM sur sa liste. Ce qui autorise donc à offrir de nombreuses places sur la liste LR à des élus locaux LREM. Montrant pour sa part le peu de cas qu’il faisait de ces conditions, Renaud Muselier précisait mercredi matin qu’il ne refuserait pas Sophie Cluzel sur sa liste si cette dernière démissionnait de son poste de ministre d’Emmanuel Macron.

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Un deal implicite

Le seul tort de Renaud Muselier aura été de rendre visible trop tôt le rapprochement en cours entre le parti Les Républicains et Emmanuel Macron. Trop tôt, car dans certaines régions, dans certains cantons, Les Républicains ont encore besoin de faire croire aux électeurs qu’ils représentent une alternative à Emmanuel Macron. Mais dans les faits, le rapprochement ne fait que s’accélérer depuis 2017, où une partie des LR faisait campagne pour Emmanuel Macron et contre François Fillon. Aux Européennes de 2019, la plupart des cadres des Républicains n’avait fait que très timidement campagne pour la liste menée par François-Xavier Bellamy. Aux municipales de 2020, de très nombreux maires avaient rangé leur étiquette LR et négocié un soutien ou une investiture LREM. Aujourd’hui, aux départementales, des élus LREM sont investis par Les Républicains au détriment des élus LR dans plusieurs cantons, avec la bénédiction de Christian Jacob. Les candidats UDI – parti soutenant officiellement Emmanuel Macron, rappelons-le  – représentent presque la moitié des investitures communes LR-UDI dans les Hauts-de-Seine, les Yvelines ou l’Essonne. Là encore, avec la bénédiction de Christian Jacob. Ce dernier espère que ces accords électoraux locaux passeront inaperçus sur le plan national. Il est vrai que les élections départementales n’ont jamais passionné les rédactions parisiennes…

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Derrière les postures médiatiques, la stratégie – voulue ou subie ? – de la Direction actuelle des Républicains est donc bel et bien de faire des Républicains l’aile droite de la coalition gouvernementale à venir d’Emmanuel Macron. Le « deal » avec Emmanuel Macron est d’ailleurs limpide : les Républicains apporteront leurs élus locaux – maires, présidents de départements, présidents de régions – à une Macronie qui en manque cruellement. Les élus locaux, eux, s’assurent de leur réélection avec une étiquette centriste élargie et sans concurrence à droite, Les Républicains ayant disparu. Pour parachever le tout, Emmanuel Macron apportera en 2022 aux (anciens) Républicains des investitures aux législatives sans lesquelles les députés actuels n’ont aucune chance de se faire réélire, l’étiquette LR étant trop démonétisée sur le plan national. Les plus hauts cadres des Républicains se rêvent sans doute ministres, et pourront ainsi enfin cesser de regretter de ne pas avoir rejoint plus tôt leurs camarades Le Maire et Darmanin. Comment leur en vouloir, quand la rumeur court que Nicolas Sarkozy, toujours aussi peu désireux de voir un autre homme de droite lui succéder, aurait négocié un soutien à Emmanuel Macron pour la prochaine présidentielle contre la promesse de faire entrer François Baroin à Matignon en 2022 ?

Recomposition française

Saluons Emmanuel Macron qui aura réussi en à peine cinq ans à recomposer le paysage politique français : un parti centriste élargi avec pour seuls opposants d’un côté une gauche radicale désunie (LFI, Les Verts, quelques socialistes égarés) et de l’autre un Rassemblement National sans alliés, condamné à échouer éternellement au second tour de la présidentielle.

Et la droite dans tout cela ? L’absorption en cours des Républicains par Emmanuel Macron est à la fois une triste nouvelle et porteuse d’espoir. Triste, car on ne peut se réjouir de voir disparaître le parti qui aurait pu, avec Nicolas Sarkozy en 2007, enrayer le déclin français. Porteuse d’espoir car la disparition des Républicains comme parti de droite laisse la porte ouverte à la création d’un vrai parti de droite – où les dirigeants seront enfin en accord avec leurs adhérents – pour proposer une alternative crédible à Emmanuel Macron. Les présidentielles 2022 seront-elles l’occasion de voir naître ce parti ? À suivre…

Élections régionales: la droite festoie à Madrid

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Le leader de Podemos, Pablo Iglesias, annonce se retirer de la vie politique, après la victoire de la droite aux élections régionales de Madrid, le 4 mai, Kiko Huesca (es-ES)/EFE/SIPA, 01017372_000001

La large victoire de la droite à la région de Madrid est un échec pour le gouvernement central. Pablo Iglesias (Podemos) a annoncé se retirer de la vie politique et le centre a perdu l’ensemble de ses élus. On annonce déjà un destin national à Isabel Díaz Ayuso, la présidente de la communauté de la capitale dont la politique libérale-conservatrice plait manifestement aux Madrilènes…


Un contexte houleux

Après l’échec de deux motions de censure régionales contre le Parti populaire (PP, droite conservatrice) dans la région de Murcie[1] et en Castille-et-León[2], le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE, social-démocratie) et toute la gauche espagnole en général espéraient pouvoir se rattraper en ce mardi 4 mai 2021 lors des élections régionales madrilènes. Organisé de manière anticipée à la suite de la dissolution du Parlement local par la présidente sortante, Isabel Díaz Ayuso (PP), le scrutin n’était en réalité qu’une conséquence de l’instabilité politique chronique qui touche l’Espagne depuis 2014-2015. Il était également le fruit de la méfiance de plus en plus grande entre les populares et leurs alliés de Citoyens (Cs, centre libéral).

L’objectif était donc, pour le président du gouvernement national Pedro Sánchez et ses alliés, de priver la droite du « joyau de la couronne », c’est-à-dire de la communauté autonome espagnole la plus riche et la plus dynamique du pays[3]. La Communauté de Madrid est, depuis 1995, le laboratoire des politiques libérales du Parti populaire, en particulier sous l’impulsion de l’ancienne présidente régionale Esperanza Aguirre (2003-2012) et de ses successeurs[4]. Pourtant, le scrutin d’il y a deux ans a été difficile pour la formation, minée par des scandales de corruption à répétition. Elle n’est en effet arrivée qu’en deuxième position dans l’autonomie avec 30 sièges sur 132, tandis que les socialistes faisaient la course en tête avec 37 élus[5].

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Une femme et une campagne

La tête de liste des popularesla jeune Díaz Ayuso (elle est née en 1978), semblait avoir été choisie pour perdre le scrutin et permettre d’assurer une transition passant par une cure d’opposition durant quatre ans. Fustigée pour ses déclarations-choc durant la campagne, elle était pourtant devenue locataire de la Maison royale du Courrier (siège de la présidence régionale, sur la Puerta del Sol) en 2019 grâce à un accord avec Citoyens et la droite « radicale » de Vox.

La discrète responsable politique s’est taillée en deux ans une réputation à l’ampleur nationale, notamment dans le cadre de la gestion de la pandémie de coronavirus, devenant ainsi l’ennemie à abattre pour toute la gauche. Son slogan de campagne, « Socialisme ou liberté » (auquel a rapidement répondu la devise « Fascisme ou liberté », inventée par la gauche « radicale ») témoignait dès le mois de mars dernier du ton général de la campagne. Cette dernière, marquée par une crispation inédite en Espagne, a vu se succéder les menaces de mort anonymes envoyées à plusieurs candidats (dont Isabel Díaz Ayuso elle-même[6]) et les jets de pierres de la part de militants « antifascistes » contre les participants et organisateurs d’une réunion publique de Vox dans un quartier populaire du sud de Madrid[7]. La polarisation du scrutin, tout à fait extrême, faisant donc s’affronter deux modèles de société apparemment irréconciliables, qui se taxaient mutuellement de « stalinisme » et de « nazisme ».

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Malgré la très grande popularité de la présidente sortante, qui avait notamment à son actif l’incroyable affection des hôteliers et restaurateurs de la région (auxquels elle avait permis de rester ouverts depuis juin 2020, en dépit de la situation sanitaire[8]), le combat semblait inégal. La gauche a en effet utilisé tous les moyens à sa disposition, entraînant bon nombre d’institutions normalement neutres (comme la Garde civile[9]) dans une campagne agressive, sale et interminable.

Le séisme du Parti populaire

Ladite campagne a néanmoins buté sur l’incroyable phénomène d’ayusomanía qui s’est développé depuis un an environ. Transformée en icône pop et en symbole même de la capitale, celle que ses partisans surnomment volontiers « Lady Madrid » était applaudie et acclamée partout durant ses déplacements dans la ville et en banlieue. Son visage était placardé dans de nombreuses vitrines de restaurants et de bars en remerciement pour sa politique d’ouverture, son nom était donné à des plats, des produits dérivés à son effigie pouvaient être achetés en ligne et elle apparaissait même sur l’étiquette d’une nouvelle marque de bière. Érigée en symbole de la « résistance » face au gouvernement de coalition qui dirige l’Espagne depuis janvier 2020, Isabel Díaz Ayuso a profité de cet essor dans l’opinion pour pratiquer un véritable « populisme d’État ». Bien qu’au pouvoir, elle n’a en effet eu de cesse que de vitupérer contre des élites (de gauche) « déconnectées » du peuple et de…

>>> Lire la fin de l’article sur le site de Conflits <<<

[1] Hermida, Xosé, « Fracasa la moción de censura de PSOE y Ciudadanos en Murcia », El País, 18 mars 2021.

[2] « El PSOE presenta una moción de censura en Castilla y León », El País, 10 mars 2021.

[3] Klein, Nicolas, « L’émergence silencieuse de Madrid », Conflits, janvier-février 2020, n° 25, page 24, et Magallón, Eduardo, « El sorpasso de Madrid a Cataluña como locomotora económica en gráficos », La Vanguardia, 28 juillet 2020

[4] Klein, Nicolas, « Madrid fait le choix de la liberté économique », Conflits, 9 janvier 2020.

[5] Les résultats officiels du scrutin sont consultables à cette adresse : https://resultados.elpais.com/elecciones/2019/autonomicas/12/index.html

[6] Navarro, Mayka, « «Estás muerta», las amenazas e insultos de la carta a Ayuso », La Vanguardia, 28 avril 2021.

[7] Nieto Jurado, Jesús, « Radicales de izquierda lanzan piedras a Abascal y Monasterio en su mitin de Vallecas », ABC, 8 avril 2021.

[8] Klein, Nicolas, « Madrid : mais comment font ces drôles d’Ibères ? », Causeur, 18 mars 2021.

[9] Campo, Susana et Esteban, Rocío, « La directora de la Guardia Civil que hace campaña por el PSOE cobra más de 120.000 euros anuales », La Razón, 27 avril 2021.

Napoléon Ier, une commémoration exaltée!

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Emmanuel Macron et sa femme Brigitte aux Invalides, 5 mai 2021 © Christophe Petit Tesson/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22564866_000011

Une cérémonie haute en couleurs dans laquelle s’est glissé Frederic de Natal. De son côté, Emmanuel Macron a parlé d’une « commémoration éclairée » lors d’un discours à l’Institut.


C’est le personnage le plus connu après Jésus-Christ. Le 5 mai 1821, loin de ce peuple français « qu’il a tant aimé », s’éteignait un des héros de notre panthéon national. Tour à tour Général, Premier consul puis Empereur des Français, Napoléon Bonaparte a laissé derrière lui un legs qui continue de fasciner encore des générations d’Européens depuis deux siècles. Reposant dans un tombeau de quartzite rouge, au cœur même de l’Hôtel national des Invalides, la République française a décidé de commémorer la mémoire du « Petit caporal », mais sans le célébrer pour autant.

Un héritage dans lequel nous vivons

Napoléon Bonaparte a connu un destin unique. Un nom qui résonne avec celui des plus belles heures de notre histoire. Arcole, les Pyramides, Marengo, Austerlitz, Iéna, Eyau, Friedland… autant de batailles remportées par l’homme du 18 brumaire et qui aura marqué de son empreinte la première moitié du XIXᵉ siècle. Lycées, Banque de France, Légion d’honneur, les égouts, le Code civil, les préfets et même la numérotation pair-impair des rues, Napoléon Bonaparte a été aussi bien un talentueux militaire, dont les tactiques de guerre sont encore enseignées, qu’un réformateur de génie. Un héritage avec lequel nous vivons tous les jours, parfois sans même le savoir. 

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Lorsque survient sa première abdication en 1814, l’Aigle le ressent comme un déchirement national et ne pense qu’à son retour. L’épisode des cent jours achèvera de créer une légende qui se poursuit aujourd’hui, ancrée dans notre subconscient national. De sa défaite à Waterloo, il garde une amertume qu’il aura tout le loisir de ruminer à Sainte-Hélène où il sera envoyé en exil. Un petit caillou au large des côtes de l’Afrique du Sud, sous bonne garde de Britanniques trop zélés et heureux de s’être enfin débarrassé de « l’ogre corse » qui va écrire ici le dernier chapitre de sa vie.

Un instant solennel

« Vive l’empereur, vive la Nation ! » Les cris raisonnent en ce mercredi 5 mai 2021 dans l’Hôtel national des Invalides où les nostalgiques de l’Empire se sont rassemblés pour saluer cette figure historique. L’instant est solennel devant l’imposante structure où repose le fils de Charles Bonaparte et de Letizia Ramolino, « Madame mère ». Des gerbes de fleurs ont été disposées autour du tombeau pris d’assaut par les journalistes et la télévision. Sous le dôme des Invalides et le regard des grands noms de l’Empire, celui de Bonaparte en César étouffe de sa présence tous les participants. Venu accompagner de son épouse, le prince Murat, descendant du maréchal éponyme confie volontiers « son émotion » en descendant les marches qui les conduisent tous deux vers le lieu de repos éternel de Napoléon. Escorté par les élèves de l’école de Saint-Cyr, revêtus de leurs uniformes rouges et bleus, au passage de ces héritiers de l’empire, le salut est de rigueur. Dans l’armée française, on n’a pas oublié les fameuses charges épiques de Murat contre l’ennemi qui forcent l’admiration. Le temps d’une cérémonie, la France a renoué avec les fastes de l’Empire défunt, avec ses costumes chamarrés, dans un lieu emblématique où l’horloge du temps semble s’être arrêtée. 

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Venu de Londres où il réside, le prince Jean-Christophe Napoléon fait face à l’Histoire. Le prétendant au trône impérial de France (lire notre portrait), entouré d’officiers militaires, s’incline légèrement alors que retentit les premières notes d’une marche militaire. La cérémonie se veut loin de toutes les polémiques qui entourent ce bicentenaire et qui ont mis dans l’embarras le palais de l’Élysée. Dans une interview parue dans le magazine Point de Vue, le prince est revenu sur le sujet-phare qui a empoisonné ces festivités fermées au public et qui ont crispé comme divisé les Français. L’arrière petit-neveu de l’Aigle a volontiers reconnu que le rétablissement de l’esclavage avait été une faute, mais que l’Empereur l’avait réparée en le faisant interdire lors de son retour de l’ile d’Elbe en 1815. « Il est toujours délicat de juger une action ou une personne morte il y a deux siècles avec les critères et valeurs du XXIème siècle » se risque-t-il à rappeler.

Macron: “Nous avons tous en nous une part de Napoléon”

Si cette cérémonie manquait singulièrement d’éloges républicains, difficile d’ignorer la présence remarquée du maire de Nice et ancien ministre Christian Estrosi, comme celle de Valérie Pécresse. Très à l’aise avec le comte de Paris, la présidente de la Région île de France était tout sourire en face du Chef de la Maison royale de France. Un Jean d’Orléans venu en représentant de son ancêtre, Louis-Philippe Ier, le dernier roi des Français qui avait organisé le retour des restes de Napoléon Ier en France en 1840. Du monde politique au gotha en passant par celui de l’armée de Terre, la cour d’honneur des Invalides vibrait à l’unisson de la fanfare déployée pour l’occasion. Un regret, l’absence du président de la République, Emmanuel Macron, qui avait décidé de commémorer seul ce bicentenaire, loin des objectifs des photographes. Lors de son discours prononcé à l’Institut de France, le chef de l’État a pourtant affirmé qu’il « assumait tout » de cet « être complexe », prenant bien soin de préciser que la République reconnaissante de l’œuvre de Napoléon s’inscrivait dans un geste de « commémoration exaltée ».

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« De l’Empire nous avons renoncé au pire et de l’empereur nous avons gardé le meilleur. Son ultime intuition fut de vouloir combler le vide laissé par le roi le 21 janvier » n’a pas hésité à déclarer Emmanuel Macron. Napoléon Bonaparte ? Simplement une aventure palpitante ressassée à foison dont on ne se lasse jamais de découvrir les multiples facettes et qui reste malgré toutes controverses, une fierté nationale pour chaque Français.

Pour Napoléon

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Du lesbianisme radical au “Meilleur des Mondes”, il n’y a qu’un pas

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Alice Coffin, co-présidente de l'Association des journalistes LGBT (AJL), Paris, décembre 2019 © CHAUVEAU/SIPA Numéro de reportage : 00937532_000012

Pour les militantes les plus radicales de la “cause” lesbienne, l’homosexualité est avant tout abordée d’un point de vue politique, et pas du point de vue du désir. La déconstruction en cours du masculin accouchera-t-elle d’un monde inquiétant, où la sexualité telle que nous la connaissons aura disparu?


Dans Le Monde du 25 avril, est paru un article intitulé « La “joie” et le “soulagement” des féministes qui se “découvrent” lesbiennes. » Il y est question de femmes que leur « cheminement féministe » a conduit tout droit dans les bras de Sappho, de femmes qui ont « pris leur distance avec la domination hétérosexuelle » et ont fini sous la même couette que les précédentes, et de femmes qui voient « le lesbianisme comme une réponse politique au modèle pesant de l’hétérosexualité » et qui attendent leur tour dans le boudoir d’Alice Coffin qui se réjouit que « de plus en plus de jeunes femmes assument leur lesbianisme. »

Un combat contre l’hétéronormativité

Il semblerait que de plus en plus de femmes souffrent avec les hommes et ont décidé de virer leur cuti. Alice Coffin promet l’eldorado lesbien à ces femmes déboussolées qui se demandent si « l’hétéronormativité n’a pas tué leur créativité amoureuse. » Dans les dernières manifestations lesbiennes, des panneaux de recrutement sont brandis : « Libérez-vous du mâle, devenez lesbienne ! » ou « Engagez-vous dans le Gouinistan », accompagnés d’un argument de poids : « Mieux vaut une paire de mères qu’un père de merde. » Par conséquent, ces militants réclament la PMA au nom d’un droit à la procréation (ou droit-créance) qui augure le droit à avoir un enfant de la part des homosexuels. La GPA sera donc l’étape suivante en France, mais existe déjà ailleurs. Certaines cliniques spécialisées américaines ou ukrainiennes permettent de choisir le sexe et les caractéristiques physiques du futur enfant et préfigurent la Salle de Fécondation et le Centre d’Incubation imaginés par Huxley. L’utérus artificiel permettant l’ectogenèse est déjà dans les tuyaux et les chercheurs prévoient une application possible dans la seconde moitié du XXIe siècle.

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Vendredi dernier, Ovidie était l’invitée des Matins de Guillaume Erner sur France Culture. Cette spécialiste livre régulièrement les résultats de ses travaux sur les fluctuations de la fesse : « De nombreuses militantes rencontrent des difficultés à jouir en regardant le monde par le prisme de la domination masculine. Les femmes se posent la question de la provenance de leurs fantasmes, souvent issus du carcan patriarcal » (Télérama, 13 avril). Elle dit avoir rencontré des femmes qui sont dans « une forme de déconstruction » et qui ne veulent plus avoir de « sexualité pénétrative » ou « relationner avec les hommes. » Adepte des théories fumeuses autour du genre, elle considère que la sexualité relève d’une construction sociale et qu’il y a « des hommes aussi qui veulent se sortir de ses injonctions-là, de l’hétéronormativité », mais qu’on ne leur apprend pas à sortir « des règles de l’hétérosexualité » (sic). Elle est prête à donner des cours. D’ailleurs elle en donne. Cette dame fait des interventions dans les lycées et auprès des étudiants. Les lieux de transmission des savoirs que devraient être nos lycées laissent pénétrer dans leurs enceintes à peu près tout et n’importe quoi. Après les interventions de Lilian Thuram et Rokhaya Diallo sur le “racisme systémique”, voici celles d’Ovidie sur l’hétéronormativité à déconstruire et la pénétration à corriger. On s’étonnera après ça que nos adolescents vont de plus en plus mal.

Le processus mortifère de la non-binarité

Complètement perdus à force d’écouter les inepties décrites ci-dessus, de plus en plus de jeunes gens veulent “transitionner”. Des enfants, soutenus par des parents faiblards du bulbe et avides de passer à la télé, changent de “genre” à six ou sept ans, et certains, avec la complaisance de psychologues et de médecins faustiens, débutent des traitements irréversibles pour changer de sexe bien avant leur majorité. Tout aussi inquiétant, une proportion de plus en plus importante d’adolescents se dit non-binaire ou gender-fluid. Nous ne sommes qu’au début d’un processus mortifère qui se répand partout – Éducation nationale, universités, Sciences Po, associations néo-féministes, etc. – et qui participe à la construction d’un être humain nouveau, sans liens d’aucune sorte, fluide, intersexe, transformable, indéterminé et objet de toutes les expérimentations idéologiques présentes et à venir, même les plus dangereuses, même les plus inhumaines.

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La biologie étant, selon eux, une discipline “viriliste” et “patriarcale” (Judith Butler), les théoriciens du genre remettent en cause la perception naturelle des corps sexués et créent des abstractions censées troubler cette réalité qui ne leur convient pas. Les plus enragés de ces théoriciens se sont avérés être d’abord des lesbiennes radicales américaines, ennemies féroces de l’hétérosexualité. De Foucault, elles ont retenu l’idée de micro-pouvoirs détenus par les hommes hétérosexuels et imprégnant la société jusqu’à instituer une norme ; de Derrida, le concept de déconstruction qui postule que le réel n’existant pas en dehors du discours tenu sur lui par les dominants, il faut le déconstruire; de Barthes, l’idée d’un évanouissement du Phallus, ce « produit de l’oppression sociale, de la mauvaise histoire des hommes. » (1) Pour les lesbiennes radicales, toutes les règles naturelles ou symboliques doivent être abolies.

Le meilleur ou le pire des mondes ?

Alliés des causes LGBTQI+ ou néo-féministes, les moins fanatiques des homosexuels, des lesbiennes et des féministes militant pour de « nouveaux droits à » n’imaginent pas qu’eux-mêmes seront emportés par ce raz de marée détruisant toutes les limites (biologiques, symboliques, culturelles, etc.) et préparant le terrain transhumaniste de l’homme augmenté, monitoré de sa conception à sa disparition. Ce monde sans les tourments d’Eros et de Thanatos est décrit ainsi dans le livre de Huxley : « À présent nous avons l’État mondial. […] Les gens sont heureux ; ils obtiennent ce qu’ils veulent. […] Ils sont dans une sereine ignorance de la passion et de la mort ; ils ne sont encombrés de nuls pères ni mères ; ils n’ont pas d’épouses, pas d’enfants, pas d’amants, au sujet desquels ils pourraient éprouver des émotions violentes ; ils sont conditionnés de telle sorte que, pratiquement, ils ne peuvent s’empêcher de se conduire comme ils doivent. »

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Sexualité hygiénique, procréation en laboratoire, pharmacopée pour contrecarrer les rares moments de tristesse et de doute (donc de lucidité), contrôle social total jusqu’à la fin (euthanasie librement consentie), éradication de l’histoire (inutile au bonheur) et des livres (trop vieux), nous n’avons jamais été aussi près de voir concrètement se réaliser une partie de l’œuvre de Huxley qu’on qualifierait aujourd’hui de dystopique. D’ailleurs, quinze ans seulement après la sortie de son livre, l’auteur écrira dans la nouvelle préface de l’édition de 1946 : « À cette époque (1931) je l’avais lancée (cette utopie/dystopie) à six cents ans dans l’avenir. Aujourd’hui, il semble pratiquement possible que cette horreur puisse s’être abattue sur nous dans le délai d’un siècle. »

(1) Cette citation est tirée de Roland Barthes par Roland Barthes (Le Seuil, coll. Les écrivains de toujours). « La sexualité est un produit de l’oppression sociale, de la mauvaise histoire des hommes : un effet de civilisation, en somme. Dès lors, il se pourrait que la sexualité, notre sexualité, fût exemptée, périmée, annulée : évanoui le Phallus ! » Notre sexualité est bien entendu, pour Barthes, la sexualité “phallocentrique”, supposée être dominante et oppressive.

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