Pour les militantes les plus radicales de la “cause” lesbienne, l’homosexualité est avant tout abordée d’un point de vue politique, et pas du point de vue du désir. La déconstruction en cours du masculin accouchera-t-elle d’un monde inquiétant, où la sexualité telle que nous la connaissons aura disparu?
Dans Le Monde du 25 avril, est paru un article intitulé « La “joie” et le “soulagement” des féministes qui se “découvrent” lesbiennes. » Il y est question de femmes que leur « cheminement féministe » a conduit tout droit dans les bras de Sappho, de femmes qui ont « pris leur distance avec la domination hétérosexuelle » et ont fini sous la même couette que les précédentes, et de femmes qui voient « le lesbianisme comme une réponse politique au modèle pesant de l’hétérosexualité » et qui attendent leur tour dans le boudoir d’Alice Coffin qui se réjouit que « de plus en plus de jeunes femmes assument leur lesbianisme. »
Un combat contre l’hétéronormativité
Il semblerait que de plus en plus de femmes souffrent avec les hommes et ont décidé de virer leur cuti. Alice Coffin promet l’eldorado lesbien à ces femmes déboussolées qui se demandent si « l’hétéronormativité n’a pas tué leur créativité amoureuse. » Dans les dernières manifestations lesbiennes, des panneaux de recrutement sont brandis : « Libérez-vous du mâle, devenez lesbienne ! » ou « Engagez-vous dans le Gouinistan », accompagnés d’un argument de poids : « Mieux vaut une paire de mères qu’un père de merde. » Par conséquent, ces militants réclament la PMA au nom d’un droit à la procréation (ou droit-créance) qui augure le droit à avoir un enfant de la part des homosexuels. La GPA sera donc l’étape suivante en France, mais existe déjà ailleurs. Certaines cliniques spécialisées américaines ou ukrainiennes permettent de choisir le sexe et les caractéristiques physiques du futur enfant et préfigurent la Salle de Fécondation et le Centre d’Incubation imaginés par Huxley. L’utérus artificiel permettant l’ectogenèse est déjà dans les tuyaux et les chercheurs prévoient une application possible dans la seconde moitié du XXIe siècle.
À lire aussi : Alice Coffin, la femme barbante
Vendredi dernier, Ovidie était l’invitée des Matins de Guillaume Erner sur France Culture. Cette spécialiste livre régulièrement les résultats de ses travaux sur les fluctuations de la fesse : « De nombreuses militantes rencontrent des difficultés à jouir en regardant le monde par le prisme de la domination masculine. Les femmes se posent la question de la provenance de leurs fantasmes, souvent issus du carcan patriarcal » (Télérama, 13 avril). Elle dit avoir rencontré des femmes qui sont dans « une forme de déconstruction » et qui ne veulent plus avoir de « sexualité pénétrative » ou « relationner avec les hommes. » Adepte des théories fumeuses autour du genre, elle considère que la sexualité relève d’une construction sociale et qu’il y a « des hommes aussi qui veulent se sortir de ses injonctions-là, de l’hétéronormativité », mais qu’on ne leur apprend pas à sortir « des règles de l’hétérosexualité » (sic). Elle est prête à donner des cours. D’ailleurs elle en donne. Cette dame fait des interventions dans les lycées et auprès des étudiants. Les lieux de transmission des savoirs que devraient être nos lycées laissent pénétrer dans leurs enceintes à peu près tout et n’importe quoi. Après les interventions de Lilian Thuram et Rokhaya Diallo sur le “racisme systémique”, voici celles d’Ovidie sur l’hétéronormativité à déconstruire et la pénétration à corriger. On s’étonnera après ça que nos adolescents vont de plus en plus mal.
Le processus mortifère de la non-binarité
Complètement perdus à force d’écouter les inepties décrites ci-dessus, de plus en plus de jeunes gens veulent “transitionner”. Des enfants, soutenus par des parents faiblards du bulbe et avides de passer à la télé, changent de “genre” à six ou sept ans, et certains, avec la complaisance de psychologues et de médecins faustiens, débutent des traitements irréversibles pour changer de sexe bien avant leur majorité. Tout aussi inquiétant, une proportion de plus en plus importante d’adolescents se dit non-binaire ou gender-fluid. Nous ne sommes qu’au début d’un processus mortifère qui se répand partout – Éducation nationale, universités, Sciences Po, associations néo-féministes, etc. – et qui participe à la construction d’un être humain nouveau, sans liens d’aucune sorte, fluide, intersexe, transformable, indéterminé et objet de toutes les expérimentations idéologiques présentes et à venir, même les plus dangereuses, même les plus inhumaines.
À lire aussi : La chasse aux TERF aura-t-elle raison du féminisme?
La biologie étant, selon eux, une discipline “viriliste” et “patriarcale” (Judith Butler), les théoriciens du genre remettent en cause la perception naturelle des corps sexués et créent des abstractions censées troubler cette réalité qui ne leur convient pas. Les plus enragés de ces théoriciens se sont avérés être d’abord des lesbiennes radicales américaines, ennemies féroces de l’hétérosexualité. De Foucault, elles ont retenu l’idée de micro-pouvoirs détenus par les hommes hétérosexuels et imprégnant la société jusqu’à instituer une norme ; de Derrida, le concept de déconstruction qui postule que le réel n’existant pas en dehors du discours tenu sur lui par les dominants, il faut le déconstruire; de Barthes, l’idée d’un évanouissement du Phallus, ce « produit de l’oppression sociale, de la mauvaise histoire des hommes. » (1) Pour les lesbiennes radicales, toutes les règles naturelles ou symboliques doivent être abolies.
Le meilleur ou le pire des mondes ?
Alliés des causes LGBTQI+ ou néo-féministes, les moins fanatiques des homosexuels, des lesbiennes et des féministes militant pour de « nouveaux droits à » n’imaginent pas qu’eux-mêmes seront emportés par ce raz de marée détruisant toutes les limites (biologiques, symboliques, culturelles, etc.) et préparant le terrain transhumaniste de l’homme augmenté, monitoré de sa conception à sa disparition. Ce monde sans les tourments d’Eros et de Thanatos est décrit ainsi dans le livre de Huxley : « À présent nous avons l’État mondial. […] Les gens sont heureux ; ils obtiennent ce qu’ils veulent. […] Ils sont dans une sereine ignorance de la passion et de la mort ; ils ne sont encombrés de nuls pères ni mères ; ils n’ont pas d’épouses, pas d’enfants, pas d’amants, au sujet desquels ils pourraient éprouver des émotions violentes ; ils sont conditionnés de telle sorte que, pratiquement, ils ne peuvent s’empêcher de se conduire comme ils doivent. »
A lire aussi: Au menu du Français anxieux, «tout vaccin» et «bien mourir»
Sexualité hygiénique, procréation en laboratoire, pharmacopée pour contrecarrer les rares moments de tristesse et de doute (donc de lucidité), contrôle social total jusqu’à la fin (euthanasie librement consentie), éradication de l’histoire (inutile au bonheur) et des livres (trop vieux), nous n’avons jamais été aussi près de voir concrètement se réaliser une partie de l’œuvre de Huxley qu’on qualifierait aujourd’hui de dystopique. D’ailleurs, quinze ans seulement après la sortie de son livre, l’auteur écrira dans la nouvelle préface de l’édition de 1946 : « À cette époque (1931) je l’avais lancée (cette utopie/dystopie) à six cents ans dans l’avenir. Aujourd’hui, il semble pratiquement possible que cette horreur puisse s’être abattue sur nous dans le délai d’un siècle. »
(1) Cette citation est tirée de Roland Barthes par Roland Barthes (Le Seuil, coll. Les écrivains de toujours). « La sexualité est un produit de l’oppression sociale, de la mauvaise histoire des hommes : un effet de civilisation, en somme. Dès lors, il se pourrait que la sexualité, notre sexualité, fût exemptée, périmée, annulée : évanoui le Phallus ! » Notre sexualité est bien entendu, pour Barthes, la sexualité “phallocentrique”, supposée être dominante et oppressive.
La philosophie devenue folle: Le genre, l'animal, la mort
Price: 20,90 €
26 used & new available from 11,49 €
La théorie du genre ou Le monde rêvé des anges: essai
Price: 17,90 €
18 used & new available from 2,39 €