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« C’est une prime aux plus radicaux »

À l’instar de la municipalité, Sciences-Po Grenoble est un vivier de militants islamo-gauchistes. Les syndicats étudiants y exercent un régime de terreur sur les professeurs et la direction qui préfèrent ne pas moufeter, par opportunisme ou conviction. Vue l’ambiance, mieux vaut ne pas déplaire. Les professeurs Vincent Tournier et Klaus Kinzler en ont fait les frais. Deuxième partie: témoignage de Klaus Kinzler, professeur agrégé de civilisation et de langue allemandes


Causeur. Vous attendiez-vous à ces insultes et à cet affichage public contre vous ?

Klaus Kinzler. Absolument pas. Je suis un libéral, autant économiquement et socialement. Cela fait de moi un oiseau rare dans un milieu où les gens sont majoritairement à gauche. Mais je ne m’attendais pas à être traité de fasciste. D’habitude pour m’insulter on me traitait plutôt d’« ultralibéral. »

Vous vous souvenez de signes avant-coureurs de cette emprise de l’extrême gauche à Sciences-Po Grenoble ?

C’est difficile à dire. Je crois que c’est surtout une question de génération. Avant, les professeurs avaient été formés à la vieille école, c’était des savants, ils avaient une conception exigeante de la science. Leur départ à la retraite a créé un appel d’air et beaucoup de jeunes professeurs ont été alors recrutés. Une partie de ceux-là sont très extrémistes dans leurs idées politiques et mélangent trop souvent recherche et militantisme. Or, l’affaire de Sciences-Po Grenoble a montré le pouvoir de ces enseignants et surtout l’emprise qu’ils exercent sur des gens qui ne sont pas radicaux, mais n’arrivent pas à trouver le courage de leur résister.

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Vous n’avez guère été soutenu par la direction ?

Disons qu’après la condamnation de l’affichage, le ton a vite changé, renvoyant tout le monde dos à dos. Il serait cependant faux de dire que la direction administrative de l’IEP est d’extrême gauche. La directrice de l’IEP, par exemple, est une personnalité modérée et je crois qu’elle aurait voulu refaire de l’IEP un lieu ouvert et de débats. Mais elle n’avait pas de majorité au conseil d’administration pour défendre ses vues raisonnables. En fait, son autorité était très faible et elle dépendait, et dépend, encore des « grandes gueules » de l’extrême gauche de l’institut, dont l’influence pèse sur le CA. Quand la crise est arrivée, elle a essayé d’amadouer tout le monde. Or déjà avec l’affaire dite « Sciences-Porc », on avait pu mesurer combien cette pondération frôlait la lâcheté. Cette initiative, qui appelait à la dénonciation sur les réseaux sociaux d’étudiants considérés comme sexistes, avait généré beaucoup d’abus. À cette occasion, la directrice avait déjà sacrifié ses convictions pour ne fâcher personne au sein du conseil d’administration. Là encore pas de sanction des abus, pas de débat. Le problème c’est que ce genre d’attitude offre une prime aux plus radicaux, qui ne sont souvent pas les plus représentatifs. À Sciences-Po Grenoble, il y a environ 70 professeurs permanents. J’estime à une vingtaine seulement les extrémistes. Le reste est raisonnablement de gauche, comme tout universitaire qui se respecte. Mais la majorité se tait, car s’ils contredisent ceux qui ont le pouvoir dans les CA, ils peuvent s’attirer beaucoup d’ennuis ; cela peut aller jusqu’à la perte des financements pour leur recherche. La plupart des profs se retirent du fonctionnement de l’IEP et se centrent sur leurs recherches.

Cette affaire a-t-elle nui à l’influence des enseignants-chercheurs situés à l’extrême gauche ?

Au contraire, cela les a renforcés. Il faut dire que Vincent Tournier et moi-même avons vu nos carrières affectées par cette histoire. Vincent a perdu son cours, j’ai été suspendu, nous avons dû nous battre en justice. Pendant ce temps, les étudiants ont été relaxés par le conseil de discipline, et personne au ministère n’a suggéré à la directrice, dont la gestion de la crise a été calamiteuse, de démissionner. Cela ne donne pas envie de résister puisque quand vous êtes victimes d’actes violents, non seulement vous perdez votre statut mais en plus, on finit par faire de vous un coupable, responsable de ce qui lui arrive. En réalité, l’urgence pour la direction de l’IEP était d’enjamber la crise, de faire croire que cette affaire était un accident qui ne disait rien de la réalité de ce qui se passe à Sciences-Po Grenoble. Il n’y a eu aucun retour sur la violence de cet affichage ou sur le climat de peur relevé par l’inspection lors de son enquête sur l’école. Lorsque la directrice évoque cette affaire, c’est pour la réduire – sans rire – à une campagne nauséabonde des médias nationaux et des réseaux sociaux visant à salir gratuitement l’image de l’institution. Il n’y a eu aucune remise en cause, pas de sanctions prononcées sinon à mon encontre. Le débat sur les retraites a montré à quel point l’emprise de l’extrême gauche restait puissante. Nombre d’étudiants actuels expliquent qu’ils ne disent jamais ce qu’ils pensent vraiment si ce n’est pas compatible avec la doxa de l’extrême gauche. Ils n’ont pas envie de faire l’objet de représailles sur les réseaux sociaux ou de devoir assumer le qualificatif de fasciste.

Quelles ont été les conséquences pour vous ?

J’ai simplement été mis à l’écart de l’IEP, « annulé ». D’abord à cause des menaces qui ont abouti à une mise sous protection policière. J’ai ensuite été suspendu puis j’ai subi le lot d’humiliations administratives dégradantes qui visent à vous éloigner en faisant en sorte que ce soit vous qui renonciez. Le rectorat m’a donc proposé un poste de professeur remplaçant dans un collège à 200 km de chez moi. Comme j’ai décliné cette proposition, on a fini par me caser dans un placard. On m’a confié une mission pour développer l’école à l’international, notamment en approfondissant les relations avec l’Allemagne, sauf que je n’ai le droit de parler avec aucun membre des universités allemandes. Dernière petite humiliation, j’ai obtenu la protection fonctionnelle en 2021. Celle-ci oblige normalement l’école à rembourser mes frais de justice. Or, alors que la procédure en première instance m’a déjà coûté plus d’une dizaine de milliers d’euros, l’IEP ignore mes demandes de remboursement. Il a pourtant déjà remboursé les frais de mon collègue, Vincent Tournier. Il est difficile de ne pas voir ce traitement comme une mesure de rétorsion. Dans ces conditions, je pense faire valoir mes droits à la retraite, car cette histoire finira par avoir des conséquences pour ma santé.

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Sciences-Po Grenoble, l’IEP dont le prince est l’étudiant

À l’instar de la municipalité, Sciences-Po Grenoble est un vivier de militants islamo-gauchistes. Les syndicats étudiants y exercent un régime de terreur sur les professeurs et la direction qui préfèrent ne pas moufeter, par opportunisme ou conviction. Vue l’ambiance, mieux vaut ne pas déplaire. Les professeurs Vincent Tournier et Klaus Kinzler en ont fait les frais. Première partie: témoignage de Vincent Tournier.


En mars 2021, Sciences-Po Grenoble a été secoué par un scandale révélateur de l’emprise de l’extrême gauche à l’université et des méthodes fascisantes avec lesquelles elle impose le silence et installe son pouvoir. Les noms de deux professeurs avaient été placardés sur la façade de l’école avec ce slogan : « Des fascistes dans nos amphis, l’islamophobie tue ». Leur tort : avoir osé dire que le terme « islamophobie » n’était pas scientifique et renvoyait au militantisme et non à une réalité sociale. Le rapport de l’inspection diligentée par le ministère suite à cette histoire évoque un climat de peur qu’un syndicat et son principal responsable ont installé au sein de l’institution sans susciter aucune réaction de la part de la direction. Causeur a voulu savoir ce qu’il était advenu des deux professeurs menacés de mort, Vincent Tournier et Klaus Kinzler.

Vincent Tournier © D.R.
« Il y a un avant et un après. » Entretien avec Vincent Tournier, maître de conférences de science politique à Sciences-Po Grenoble

Causeur. Avant le scandale de l’affichage, y a-t-il eu des signes indiquant que votre personne ou votre enseignement étaient contestés ?

Vincent Tournier. Je n’ai pas du tout anticipé la crise. Je n’étais pas très impliqué dans la vie interne de Sciences-Po. J’animais un cours sur l’islam. Deux ou trois ans avant les faits, la direction m’avait prévenu que des étudiants syndiqués avaient voulu le faire interdire. À l’époque, la direction m’avait invité à ne pas donner le sentiment de mettre tous les musulmans dans le même sac, ce qui m’avait tellement paru aller de soi que j’ai cru que cette histoire était réglée. Je n’ai pas su exactement ce qu’ils me reprochaient, mais je sais que certains constats passent très mal. C’est le cas, par exemple, lorsqu’on évoque l’importance des mariages consanguins dans le monde musulman, même en s’appuyant sur les analyses de la grande résistante et anthropologue Germaine Tillion, que nul ne peut soupçonner de racisme ou quand on décrit l’importance du fondamentalisme religieux, même si là encore il existe des données concordantes.

Comment avez-vous réagi lorsque vous avez appris que votre nom avait été affiché sur la porte de l’IEP assorti d’une association d’ « islamophobie » ?

Au départ, j’ai pensé que l’affaire allait rester strictement locale, mais très vite elle a pris une dimension nationale. À partir de ce moment, votre propre histoire vous échappe. Vous devenez le professeur menacé de mort : vous êtes soit la victime d’une cabale islamo-gauchiste pour les uns, soit le salaud dénoncé à bon escient par des étudiants justiciers pour les autres. Même quand vous êtes victime d’un acte violent, vous devenez celui par qui le scandale arrive : cela vous isole. C’est comme si vous étiez marqué au fer rouge. Il y a un avant et un après.

Comment avez-vous vécu la réaction de vos collègues, des étudiants, de la direction ?

Dans un premier temps, tous ont condamné la délation par voie d’affichage. Mais assez vite une lecture politique a émergé qui nous a attribué la responsabilité de la crise. Certains collègues ont même été très loin dans la critique, nous déniant le droit de parler d’islam. On voit aussi se mettre en place des réflexes prévisibles comme la volonté de protéger l’image de l’institution. Le pire, c’est que malgré le scandale provoqué par ces collages, les étudiants, notamment le leader de l’Union syndicale[1], ont assumé leur cabale lors d’une conférence de presse, en considérant que « des personnes concernées – donc des personnes musulmanes ou affiliées à l’islam » avaient été choquées par certains écrits. À aucun moment ils n’ont entrepris de faire marche arrière ou d’admettre leurs torts.

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Comment un syndicat étudiant peut-il exercer une telle influence ?

Il y a sûrement plusieurs raisons, mais il est clair que les différentes réformes de l’enseignement supérieur ont eu pour effet de donner aux représentants étudiants une place très importante au sein des conseils d’administration. La montée en force de l’évaluation des enseignements les incite à penser qu’ils disposent d’un droit de regard sur la pédagogie. Il est même prévu que les étudiants ne peuvent être sanctionnés lorsqu’ils dénoncent des discriminations, ce qui encourage à organiser une sorte de traque généralisée. On sous-traite aux étudiants la lutte contre les discriminations ou contre les violences faites aux femmes. Ceux-ci peuvent se sentir investis d’une mission de contrôle ou d’épuration qui vient conforter une radicalité déjà très présente. Les autorités universitaires n’ont alors plus vraiment la légitimité pour s’opposer à ces dérives. S’ajoute à cela la présence d’enseignants très politisés, y compris dans les instances de direction, ce qui crée un environnement propice aux dérapages.

Comment expliquer l’influence de syndicats très gauchistes sur les étudiants ?

La sélection des étudiants se fait certes par Parcoursup, mais l’un des facteurs de sélection, le plus discriminant, est l’engagement. Cela tend à favoriser des étudiants militants, immergés dans le monde associatif et politique. La diversité du recrutement en a pâti. On oublie aussi que le système tend désormais à sacraliser l’étudiant. Nombre de professeurs, pour conserver leur crédibilité, doivent faire preuve de prudence, voire de complaisance idéologique à l’égard des étudiants.

Et aujourd’hui, où en êtes-vous ?

Je travaille toujours à Sciences-Po Grenoble, mais mon cours a été supprimé faute d’étudiants. Je le regrette car je considère que ce sujet est aujourd’hui essentiel pour la société française. J’ai été placé pendant un temps sous protection policière suite à cette affaire. C’est une impression paradoxale. D’un côté c’est inquiétant, car cela vous rappelle la menace qui plane sur vous, mais de l’autre c’est très rassurant de voir arriver la cavalerie. D’autant que les gardes du corps sont souvent éminemment sympathiques et admirables. Sur un plan personnel, je n’ai pas flanché moralement, sans doute parce que je ne me suis jamais senti coupable de quoi que ce soit.


[1]. Le syndicat gauchiste mis en cause dans le climat délétère régnant à Sciences-Po Grenoble dont les agissements ont été dénoncés par le rapport de l’inspection diligentée par le ministère.

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Dysphorie de genre chez les enfants et les adolescents: haro sur les lanceurs d’alerte!

Des traitements hormonaux sont prescrits pour les jeunes convaincus d’être nés « dans le mauvais corps » sans considération sérieuse des bénéfices/risques et de la proportionnalité des soins. Résultat: leur corps est pathologisé pour le reste de leur vie. Ceux qui tentent de tirer la sonnette d’alarme sur les dangers de ce phénomène rencontrent une résistance acharnée de la part des transactivistes. Ces lanceurs d’alerte attendent la publication d’un rapport de la Haute Autorité de Santé qu’ils espèrent impartial.


La « dysphorie de genre » chez les enfants et adolescents fait couler beaucoup d’encre. Et il y a de quoi ! Très rares il y a encore quelques années, les demandes de transition ont littéralement explosé chez les mineurs : +5000% en vingt ans, selon certains observateurs. Il s’agit d’une véritable épidémie qui affecte enfants et adolescents, garçons et désormais majoritairement filles. Ces troubles sont les probables témoins du malaise croissant d’une jeunesse coincée entre des injonctions paradoxales, accablée par un environnement anxiogène, exposée aux violences et à la pornographie, déstabilisée par les confinements successifs, sursollicitée par les réseaux sociaux, abandonnée aux influenceurs et aux faux amis, privée d’accès à des soins psychothérapeutiques dignes de ce nom. L’emprise des réseaux sociaux dans les identifications trans explique sans doute en partie l’accroissement exponentiel de ces demandes par un effet de « contagion sociale ».

Devant un tel tableau, les réactions sont variées. Certains interprètent ces phénomènes comme une « libération de la parole » d’enfants « nés dans le mauvais corps ». Ils veulent déconstruire la binarité de la condition humaine et abolir l’assignation sexuelle au profit de la fluidité du genre. Ils font confiance à « l’autoidentification », un processus qui dépend uniquement du jugement de l’individu qui veut changer de genre. Ils appellent à organiser les demandes de transition, socialement et médicalement, avec une prise en charge psychologique réduite à un coaching de transition. Persuadés d’incarner la tolérance et le progrès, ils se nomment eux-mêmes « Transaffirmatifs ». D’autres contestent la naïveté de cette vision dualiste corps-esprit. Ils pensent que le déni de l’existence de deux sexes dans l’espèce humaine relève plus de la toute-puissance de la pensée que de la rationalité scientifique. Ils interrogent les nouveaux stéréotypes et enfermements sociaux sur lesquels débouche cette prétendue libération vis-à-vis du destin biologique. Soulignant la mobilité des identifications de genre dans l’enfant et l’adolescence, ils critiquent les prises en charge somatiques, axées sur les corps et non sur les esprits. Devant un malaise adolescent temporaire, ils ne veulent pas risquer des effets corporels définitifs. Ils se considèrent comme « Prudents ». Mais leurs détracteurs ne tarissent pas d’insultes à leur égard : « réacs », « fachos », « transphobes »… Devant un tel déluge de noms d’oiseaux, on ne sait où donner de la tête ! Essayons de la garder froide pour y voir un peu plus clair dans ce sujet difficile, qui est en train de devenir un véritable problème de santé publique.

Qu’il s’adresse à des enfants, des adolescents ou des adultes, le traitement « transaffirmatif » vise à valider le « ressenti » du patient qui souhaite changer de genre. Pour les enfants, le « Dutch protocol » (« protocole hollandais » en référence au pays où il a été mis au point) repose d’abord sur la prescription d’hormones : chez les 10-15 ans, des bloqueurs de puberté (des analogues de la LHRH) pour permettre une « pause » et éviter « l’agonie de la puberté » ; à partir de 15-16 ans, des hormones sexuelles « croisées » : testostérone pour une transition FtM (female to male), antiandrogène plus œstrogène pour une transition MtF (male to female). Dans notre pays la chirurgie de réassignation sexuelle est réservée aux adultes. À titre exceptionnel, des mastectomies peuvent cependant être pratiquées chez des jeunes filles mineures.

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Préconisée par l’autre parti (les Prudents), la psychothérapie cherche à expliciter le malaise du patient, à le situer dans sa dimension familiale, à traiter des co-mordibités sous-jacentes qui sont très fréquentes (jusqu’à 80% des jeunes) : troubles anxio-dépressifs, autisme et troubles du spectre autistique, schizophrénie, troubles obsessionnels compulsifs, anorexie, antécédents d’exposition à des violences physiques, morales et sexuelles, harcèlement… Elle vise une certaine réconciliation avec soi-même sans préjuger du genre que le jeune investira, tout en respectant le développement normal d’un être en devenir. Il n’y a donc aucune comparaison avec les funestes « thérapies de conversion » qui ont pu être imposées à certains homosexuels dans le but de « normaliser » leur orientation sexuelle.

Comment choisir entre ces deux approches ? La question ici n’est pas de s’opposer tout de go à un traitement et de se confier entièrement à l’autre, mais de peser avec soin le pour et le contre de chacun, en respectant deux principes : 1) apprécier le rapport bénéfice/risque, 2) évaluer la proportionnalité des soins. En matière de prescription thérapeutique (médicaments, interventions chirurgicales, psychothérapies, etc.), tout est une question « d’indication » : la raison pour laquelle on recommande telle ou telle technique. Par exemple, la mastectomie est l’ablation chirurgicale du sein. La technique est à peu près la même pour un sein cancéreux ou un sein normal chez une jeune fille s’identifiant comme garçon… Mais l’indication fait toute la différence : amputer un organe malade ou un organe sain, ce n’est pas la même chose ! Dans un cas, la mutilation, quoique regrettable, est nécessaire pour sauver la vie ; dans l’autre, elle apparaît comme au minimum disproportionnée par rapport au bénéfice attendu. Il faut donc juger le geste technique dans sa globalité, en rapportant les risques et séquelles du traitement aux risques et séquelles de la maladie sous-jacente. Comparer l’évolution (le devenir) avec et sans traitement, telle est la base de l’indication proportionnée du traitement en fonction de la maladie. Dans les cas où il n’y a pas de maladie objectivée, l’exigence d’innocuité du traitement est très grande. C’est ce qui se passe avec la chirurgie esthétique : s’adressant à des patients qui ne sont pas malades mais simplement insatisfaits de leur apparence corporelle, elle suppose non seulement une obligation de moyens mais aussi de résultats. Elle s’interdit de faire courir des risques – même si le patient, trop optimiste ou trop insouciant, le demande expressément. À l’opposé, il y a la cancérologie : face à des affections très graves, on y tolère des traitements aux nombreux effets secondaires. Ce n’est pas que le corps médical soit heureux d’imposer ces dangers et désagréments aux malades – il y a d’ailleurs une tendance en cancérologie à la « désescalade » pour s’adapter au mieux à la réalité des situations individuelles. Simplement, les risques thérapeutiques encourus paraissent proportionnés à la gravité de la maladie à traiter. 

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À noter qu’il ne suffit pas que le patient soit « demandeur » d’une thérapeutique pour que celle-ci soit effectivement indiquée. Même pour des adultes, il n’est pas facile d’évaluer pour soi-même le rapport bénéfice/risque. D’une part les connaissances scientifiques font défaut à la plupart des patients ; d’autre part, obnubilés par leurs problèmes présents, beaucoup négligent les évolutions à venir. Même correctement informés des bénéfices et risques des traitements, les patients ont souvent du mal à arbitrer entre bénéfices immédiats et risques futurs. Cette difficulté est encore plus grande s’agissant d’enfants, êtres en devenir à qui on ne peut pas reprocher de ne pas se projeter dans un destin d’adulte. « L’être adulte » est essentiellement différent de « l’être enfant », qui en est réduit à imaginer « ce que c’est d’être grand ». La vie sexuelle adulte en particulier, reste un mystère pour les enfants – et c’est heureux. Comment donc pourraient-ils engager en toute conscience des modifications irréversibles de leurs organes sexuels immatures ? Et ce, avant même d’avoir pu expérimenter les possibilités offertes par ces organes pleinement développés ?

Il faut ici décrire crûment la réalité : la prescription d’hormones dans un but de transition de genre expose à de nombreux risques et effets secondaires.

Pour les bloqueurs de puberté : perte de densité osseuse (ostéoporose), prise de poids, et bien sûr atrophie des organes génitaux restés au stade enfantin – ce qui est l’effet recherché, mais qui n’en est pas moins une mutilation aboutissant à un dysfonctionnement génital pouvant être définitif. Du fait du rôle des hormones sexuelles dans la maturation cérébrale, un risque cognitif est fortement suspecté. Le retentissement psychologique constitue aussi une importante prise de risque. Car il s’agit de priver un être humain d’une des phases les plus importantes de son évolution psychique : l’adolescence, phase de transformations et de maturation qui se produit sous l’impulsion du phénomène physiologique pubertaire. Enfin, il y a des effets sociaux : bloqué dans son développement physique et psychologique, le jeune se met peu à peu en décalage avec ses pairs, ce qui aggrave encore sa vulnérabilité. Alors qu’elle était censée être réversible à tout moment, la pause devient de fait une « voie à sens unique ». En témoignent les chiffres élevés de prescription d’hormones sexuelles croisées qui font suite aux bloqueurs de puberté (près de 95%).

Pour les hormones sexuelles croisées, prescrites à partir de l’adolescence et potentiellement au très long cours : prise de poids, hépatite, calculs biliaires, alopécie, acné ou sécheresse cutanée, risque cardiovasculaires, HTA, hypercoagulation (phlébite et embolie pulmonaire), agressivité, instabilité thymique, dépression, tumeurs bénignes et malignes ; atrophie vaginale, douleurs utérines, modification irréversible de la voix pour les FtM, atrophie testiculaire et impuissance pour les MtF  et risques cardio-vasculaires accrus ; et bien sûr pour toutes et tous, dysfonctionnement génital et stérilité.

Quant aux interventions chirurgicales, elles s’apparentent à de véritables mutilations qui impliquent, entre autres, la suppression des zones corporelles les plus érogènes. Nous ne parlerons pas ici de la chirurgie « du bas » (castration et reconstruction), interventions lourdes dont les résultats fonctionnels sont peu probants. Dans notre pays, ces interventions ne sont pas pratiquées chez les mineurs et sortent donc de notre sujet. Mais même la chirurgie « du haut » (mastectomie rebaptisée « torsoplastie ») est une amputation qui laisse cicatrices, douleurs, insensibilité et perte de fonction définitives.

Devant une telle liste de risques et d’effets secondaires, comment ne pas juger que chez les enfants et adolescents, le traitement transaffirmatif va à l’encontre des principes de rapport bénéfice/risque et de proportionnalité des soins ? Ce n’est pas que les jeunes présentant une véritable dysphorie de genre ne souffrent pas, de leur corps comme dans leuresprit. Mais l’hormonothérapie les expose à des risques importants pour des bénéfices douteux. Les bénéfices sociaux notamment (réduction de la suicidalité et intégration sociale harmonieuse) sont loin d’être prouvés. D’autre part, le très jeune âge des patients implique que le traitement, et les risques qui vont avec, sera poursuivi pendant très longtemps. Il s’agit en fait d’une médicalisation à vie, transformant un corps sain et autonome en un corps dysfonctionnel et dépendant, un corps que le traitement pathologise… pour toute la vie !

Dans l’indication très particulière de la dysphorie de genre de l’enfant, l’hormonothérapie est prescrite hors Autorisation de mise sur le marché. Les Prudents pensent que ce traitement expérimental ne devrait être envisagé que dans le cadre de protocoles de recherche stricts, avec toutes les précautions d’usage – notamment un diagnostic soigneusement élaboré au fil de nombreuses rencontres avec le patient et sa famille. La prescription d’hormones devrait rester exceptionnelle, envisagée seulement après épuisement de toutes les ressources non médicamenteuses. Le traitement non médicamenteux – pour parler clair, la psychothérapie, thérapie familiale comprise – étant à l’évidence bien moins dangereux que le traitement médicamenteux et chirurgical. Ce d’autant que les études les plus sérieuses montrent que la majorité de ces jeunes présentent des troubles psychiques sous-jacents. D’autre part, l’expérience prouve que la psychothérapie permet souvent aux enfants de passer ce cap difficile et de se réconcilier avec leur sexe de naissance : plus de 70% des cas se résolvent spontanément ou avec l’aide d’une prise en charge purement psychologique, ce qui évite la médicalisation à vie qui attend un grand nombre des jeunes soumis au traitement transaffirmatif.

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Par ailleurs, il faut souligner la fréquence croissante des « détransitions ». De plus en plus de jeunes adultes traités médicalement depuis l’enfance regrettent leur changement de genre. Ils expliquent alors que leur problème n’était pas lié à leur genre, mais à des pathologies psychiques qui n’ont pas été prises en charge correctement. Ces situations commencent à faire l’objet de procès, intentés contre les médecins et institutions accusés d’avoir précipité des transitions médicales voire chirurgicales.

Déjà plusieurs pays (Suède, Finlande, Grande-Bretagne, douze états des USA…), constatant les dangers et les limites de ces médicaments, font demi-tour dans le traitement de la dysphorie de genre de l’enfant et l’adolescent. Abandonnant le Dutch protocol, ils réglementent sévèrement la prescription d’hormones aux mineurs… quand ils ne les interdisent pas complètement, au nom d’un salutaire principe de précaution.

On l’a compris, les lignes ci-dessus ont été écrites du point de vue des Prudents. Des Prudents qui sont aussi des lanceurs d’alerte. Voici ce que nous voulons révéler au public : la prescription d’hormones à des enfants et des adolescents toujours plus nombreux, avant toute prise en charge psychologique approfondie, hors de toute Autorisation de mise sur le marché et de toute mesure, c’est le prochain scandale sanitaire qui plane sur notre pays. C’est une bombe prête à exploser, qui fera bientôt plus de bruit que l’affaire du Médiator !

Or, face à cette situation explosive, que constatent les lanceurs d’alerte, sidérés ? Que la résistance acharnée à leurs conseils de prudence émane d’associations censées représenter et défendre ceux-là même qui font l’objet de leur préoccupation – les personnes transgenres ! Nous sommes accusés de « transphobie », de « haine », de « thérapies de conversion »… Nos interventions dans les médias sont censurées… Nos conférences sont perturbées par des militants agressifs… Ceux parmi nous qui sont médecins sont traînés devant le Conseil de l’Ordre au prétexte de « charlatanisme » et de « désinformation médicale »…

Car en effet, dans l’affaire Médiator, les personnes en surpoids étaient bien « demandeurs » d’un traitement efficace. Certains poussaient pour que le benfluorex bénéficie d’une extension d’Autorisation de mise sur le marché depuis le diabète, son indication d’origine, vers l’obésité et même la simple surcharge pondérale. Comment pouvaient-ils savoir, les malheureux, que ce coupe-faim prétendument miracle était en fait un produit dangereux et même parfois mortel (entre 1000 et 2000 morts en France avant son interdiction en 2009) ?  Cependant, quand les révélations sur la toxicité du médicament ont commencé à percer, ils ne s’en sont pas pris aux lanceurs d’alerte. C’est au laboratoire qui commercialisait le poison qu’ils ont adressé leurs griefs, et à juste raison.

Il en va de la santé de milliers de jeunes en souffrance.

En vérité, les transactivistes qui nous attaquent ne représentent qu’eux-mêmes Par idéologie, ils étouffent la rationalité scientifique et tentent d’empêcher tout débat. Et en définitive, ils sacrifient des enfants fragiles à leur cause intransigeante.

La défense des plus vulnérables exige une vision plus élevée et plus désintéressée. Nous, lanceurs d’alerte sur le scandale de la médicalisation abusive d’enfants et adolescents s’interrogeant sur leur genre, demandons que les pouvoirs publics se saisissent de ce grave sujet.Nous attendons avec impatience le rapport de la Haute Autorité de Santé. Nous serons vigilants sur l’impartialité de ce rapport, que nous espérons libre de toute soumission à des groupes de pression. Il en va de la santé de milliers de jeunes en souffrance.

Norman Mailer, un centenaire par omission

Un des plus grands génies de la littérature américaine aurait eu 100 ans en 2023. Le silence qui entoure cet anniversaire n’a, hélas, rien de surprenant : à travers sa vie et son œuvre, Norman Mailer coche toutes les cases de la culture honnie par le wokisme.


Norman Mailer aurait eu 100 ans le 31 janvier 2023. Norman Mailer, ce nom vous dit quelque chose ? À vous, peut-être, mais pas à la majorité de nos contemporains. Mailer a pourtant connu en son temps une notoriété qui devait autant à son génie littéraire qu’à son art du scandale. Jusqu’à présent, le seul hommage médiatique a eu lieu sur Arte : la diffusion d’un documentaire (allemand) datant de 2021. Sinon, rien. Alors que se passe-t-il ? Est-ce parce qu’il y a trop de came, de femmes, d’alcool, de violence dans la vie et l’œuvre de ce sismographe qui a enregistré toutes les secousses de l’histoire américaine jusqu’à sa mort en 2007 ? L’explication serait courte. Après tout, Norman Mailer, sur le papier, aurait eu de quoi plaire à beaucoup de monde. Il était aussi une icône progressiste des années soixante, un de ces « gauchistes de Park Avenue » dépeints par Tom Wolfe. Pour comprendre les raisons de ce silence, de cette « vaporisation » orwellienne des deux côtés de l’Atlantique, une seule solution s’impose, toujours la même : revenir à l’œuvre.

Le style Mailer

Il faudrait peut-être imaginer, pour commencer, une scène à la Mailer. Disons une jeune femme qui prendrait un bain trop chaud. À côté d’elle, sur la céramique blanche, un verre de whisky. Elle aurait aussi, dans son sang, des molécules anxiolytiques pour dénouer ses muscles. Elle pleurerait un amour perdu. Elle se souviendrait alors des romans de Mailer parce qu’elle aurait bon goût en littérature. Elle relirait Le Parc aux cerfs (1955): « Où donc, en quel cimetière du ciel, reposent les mots d’amour des amants qui ont cessé de s’aimer ? » Et, plus loin, « mais Dieu, qui est le plus vieux des philosophes, me répond en son style sibyllin et désabusé : Regarde plutôt le sexe comme le corps du Temps, et le Temps, comme la naissance de rapports nouveaux. » La jeune femme serait-elle consolée ? Peut-être, même si Mailer n’a rien d’immédiatement consolant, ou alors, il offre une consolation d’une nature supérieure, parce qu’il arrive à nommer très précisément ce qui ne va plus. Le Parc aux cerfs est un roman d’amour qui se passe dans les milieux hollywoodiens en plein maccarthysme. Les « rapports nouveaux » apportés par le Temps sur lesquels Mailer parie, on comprend vite, aujourd’hui, qu’ils sont devenus, hélas, ceux d’un maccarthysme à l’envers, celui de l’idéologie woke qui ne supporte pas plus qu’un sénateur américain des années cinquante une autre vision du monde que la sienne et qui, comme lui, décide d’interdire toute dissidence en annulant ou en réécrivant et l’Histoire et les histoires. McCarthy inventeur de la cancel culture ? C’est évident. Norman Mailer « cancelé » pour son centenaire ? On se rapproche.

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Dès son premier roman, Les Nus et les Morts (1948), sur la guerre du Pacifique à laquelle il a participé, Mailer donne un coup de pied dans le ventre de la littérature ; il n’admet pas qu’elle soit restrictive, qu’elle ne soit que littéraire. Le jeune juif de Brooklyn a failli s’enfermer dans la légende du grand aîné, Hemingway : proclamations de virilité, goût prononcé pour l’alcool et les promenades mélancoliques sur la rive gauche de la Seine…

Mais il avait mieux à faire. Mailer a décidé une fois pour toutes de pratiquer un art du forage : tous ses livres, une petite trentaine traduits en français, sont une plongée dans des obsessions typiquement américaines, le sexe refoulé, puis libéré, puis de nouveau refoulé, la paranoïa généralisée et le Spectacle triomphant, pour reprendre le concept de Debord, c’est-à-dire la disparition de la réalité derrière sa représentation, ce qui amène aujourd’hui à confondre les mots pour dire un acte et l’acte lui-même, et conduit des organisateurs d’un festival de BD à interdire un auteur qu’ils avaient pourtant choisi comme invité d’honneur parce que celui-ci a publié des albums prétendument « pédophiles ». Évidemment, la mondialisation aidant, les obsessions dénoncées par Mailer sont devenues les nôtres : les mythes, comme les modes, franchissent les océans de plus en plus vite, et tout cela gifle désormais l’Europe, cette vieille dame qui croyait que son expérience et son sens de la mesure la mettaient à l’abri.

Un auteur pas vraiment « déconstruit »

L’œuvre de Mailer nous rappelle qu’un grand écrivain est celui qui inflige une blessure narcissique irréparable à son lecteur. Un lecteur, un vrai lecteur, était jusqu’à une date récente celui qui, précisément, désirait cette blessure narcissique et voulait être soumis à un véritable orage de la perception. On imagine sans mal que ce désir est inconcevable, aujourd’hui, pour des gens qui ne peuvent plus lire le mot « gros » dans un livre de Roald Dahl et demandent des avertissements (trigger warning en bon français) sur la quatrième de couverture comme en haut des séries Netflix.

Pourtant, Norman Mailer était à première vue un auteur tout à fait rassurant. Et la multiplicité de ses centres d’intérêt aurait pu lui nuire tant est répandu l’adage qui veut qu’un grand écrivain écrive toujours le même livre. Mais Mailer a parlé de tout : de la guerre, du sport, du cinéma dans Mémoires imaginaires de Marylin (1973), de la conquête de l’espace dans Bivouac sur la Lune (1970), de la peine de mort dans le monumental Chant du bourreau (1979), même si, en racontant l’histoire vraie de Gary Gilmore, un détenu qui réclame et obtient d’être exécuté, il pose le problème sous un angle peu orthodoxe. Mailer a même écrit un roman historique, apparemment grand public, avec La Nuit des temps (1979), qui se passe dans l’Égypte des pharaons. Aucune répugnance non plus à employer les archétypes de la fiction américaine comme le récit de chasse ou le roman noir dans Pourquoi sommes-nous au Vietnam ? (1967) et Les vrais durs ne dansent pas (1984).

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Alors pourquoi une telle onde de choc sur les lecteurs de son temps quand ils découvrent ces romans qui suivent les sentiers balisés de genres littéraires connus ? C’est que Mailer, pour reprendre le titre d’une vieille série américaine, semble parler en permanence « d’au-delà du réel ». Dans nos sociétés climatisées, l’ensemble des pulsions humaines sont occultées et refoulées. Tout va donc s’exprimer de manière souterraine, irrationnelle et, de ce fait, d’autant plus dangereuse.

Le monde contemporain, selon Mailer, est devenu le royaume du secret derrière la fausse transparence démocratique. Le FBI dans Rivages de Barbarie (1951) et la CIA dans l’extraordinaire Harlot et son fantôme(1992) sont une des incarnations de ce secret et les bêtes noires de Mailer comme, d’ailleurs, de son contemporain Philip K. Dick et quelques autres grands de la littérature américaine, Robert Littell, notamment, dans La Compagnie.

Mailer, par quoi commencer ?

À ce titre, Un rêve américain (1965) est un concentré de l’univers mailérien et nous conseillons vivement à qui veut découvrir notre auteur de commencer par celui-ci. Dans les hautes sphères du pouvoir et du show-biz, les personnages et notamment l’avocat Rojack n’ont qu’une solution pour vaincre leurs adversaires : concentrer, le plus souvent inconsciemment, toute l’énergie négative dont ils sont capables pour déclencher suicides et cancers. Ou comment, dans un club de jazz enfumé de Harlem, Mailer-Rojack invente, avec tout de même quelques années d’avance, les maladies psychosomatiques : « Dans le cadavre que je vis, la folie était entrée dans le sang. Les leucocytes gonflaient le foie, la rate, le cœur démesurément grossis. »

On a vu mieux pour être aimé dans les années 2020 où le maître-mot est – déjà – la bienveillance. Pour arranger son cas, Mailer fait de toutes les femmes des Lilith mortifères auxquelles il convient de se brûler pour renaître de ses cendres, comme il l’explique dans Prisonnier du sexe (1971), un livre écrit en réponse à La Politique du mâle de Kate Millett, icône du néo-féminisme. Dans cet essai célèbre, Mailer se retrouve aux côtés de D. H. Lawrence et de Henry Miller comme les pires représentants de la littérature patriarcale hétérosexuelle. On ne parlait pas encore de masculinisme, mais c’était tout comme.

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Les choses, maintenant, sont claires. Ne pas parler de Norman Mailer, le « canceler » par omission, est encore le meilleur moyen d’éviter le tribunal des réseaux sociaux, et de faire le dos rond pour ses éditeurs.

Mailer, pourtant, nous apprend à survivre en milieu hostile et à répondre à cette époque timorée et anémiée : par l’excès, le mauvais goût, le délire et une poésie sauvage et précise. La rédemption est à ce prix. Mailer l’avait magnifiquement compris : « J’avais grandi, j’avais survécu, j’étais capable de donner à ces parties de moi-même qui valent mieux que moi, et je pouvais trouver une consolation dans le sentiment que je commençais d’appartenir à ce monde d’orphelins qui est celui des artistes, des créateurs. »

Reste donc à le lire, et le relire, envers et contre tous.

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Le festival de Kahn

Dans son nouvel essai Comment on en est arrivé là (L’Observatoire), le journaliste Jean-François Kahn s’inquiète de la montée des extrêmes. Il pense que l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen conduirait le pays à la guerre civile.


Qu’on ne se méprenne pas ! On l’aime bien, Jean-François Kahn. On l’a connu patron de presse audacieux, courageux, suffisamment iconoclaste et hors mode pour mériter estime et reconnaissance. Et puis il y a chez lui une impressionnante faculté à brasser des idées, à les exposer et les défendre avec une ardeur touchante, communicative, cela en fourbissant une réthorique de vive passion où la gestuelle le dispute au verbe. Ça pétille, ça fuse, ça pétarade, ça flingue. Un vrai festival. Qu’on soit d’accord ou non, qu’importe au fond ! La vivacité d’esprit et la vigueur du plaidoyer ou du réquisitoire – c’est selon – suffisent à notre plaisir.  Or, voilà que, auteur fécond – une autre de ses vertus -, notre homme vient de publier un nouvel essai. Son titre : Comment on en est arrivé là. Sous-titre : « Quand la tentation des extrêmes risque de conduire à la guerre civile ». Le thème de l’ouvrage se trouve clairement résumé dans les envolées des interviews de l’auteur: « Si on continue à jouer aux cons, Marine Le Pen sera élue en 2027. » voilà la prédiction assenée de plateau en plateau. Perspective apocalyptique, on s’en doute, selon notre auteur. Ce qui le dévore d’angoisse ce n’est donc pas tant que la France soit en passe de rivaliser avec la Colombie quant à la prospérité des cartels de la drogue, que des gosses de quinze ou seize ans se fassent fumer à la kalachnikov jusque dans des préfectures ou des chefs-lieux de canton jusqu’alors assez paisibles et plutôt portés sur l’apéro merguez et la célébration annuelle du Beaujolais nouveau. Ce n’est pas non plus que la Mecque du libre esprit à la française – je parle ici de La Sorbonne – renonce à être ce qu’elle a à être au point de reculer de trouille devant le spectre immonde de l’obscurantisme woke. Ce n’est pas davantage que ce soit à des drag queens qu’on aille s’en remettre dans certaines médiathèques pour évoquer devant des enfants de trois à six ans ce qu’est la famille. La famille remasterisée transgenre et à géométrie extrêmement variable, bien entendu. Ce qui effraie notre JFK à nous n’est pas non plus que la  crétinisation de masse conduise à tabasser un bienfaiteur de l’humanité – je tiens en effet les chocolatiers, tous sans exception, pour des bienfaiteurs de l’humanité – au motif qu’il est un peu parent de l’épouse du chef de l’État. Bref, les raisons d’être horrifié ne manquent pas. On peut même dire qu’on nous en invente une nouvelle chaque matin, chaque midi et chaque soir, ou peu s’en faut. La liste en serait interminable. Mais selon l’ouvrage en question, l’horreur suprême serait donc de céder à la tentation des extrêmes et de propulser le RN à la tête de l’État. Il en résulterait, prédit l’auteur, un climat de guerre civile. Il est vrai que ce serait dommage tant est serein et réjouissant celui dans lequel nous plonge jour après jour l’extrême centre actuellement aux affaires.

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Immigration: les bonnes recettes de Vanessa Krycève

Un débat « apaisé » avec 150 citoyens tirés au sort, un processus « démocratique, apartisan et fiable » avec experts et chercheurs: c’est le merveilleux programme que nous promet Vanessa Krycève pour cette convention citoyenne sur la question migratoire qu’elle appelle de ses vœux. Mais, le profil de cette entrepreneuse engagée incite à la méfiance face à ce qui pourrait être une entourloupe pseudo-démocratique…


En réaction à la loi-immigration portée par Gérald Darmanin, l’idée d’une convention citoyenne sur la migration est apparue dans les médias. Le 27 avril, Le Monde publiait une tribune de quarante associations qui défendait ce projet1. Le même jour, la porte-parole de ce collectif, Vanessa Krycève, était interrogée sur France Inter2. Pour rassembler les partisans de ce projet, un site internet a même été créé3 et une pétition, qui a recueilli plus de 36 000 signatures, a été lancée sur Change.org4. Une rapide consultation du site internet donne un avant-goût de l’orientation idéologique que pourrait avoir cette convention. En effet, parmi les personnalités soutenant le projet on retrouve Cédric Herrou (l’agriculteur pro-migrants) ou Olivier Legrain (un millionnaire qui a créé un fonds de dotation pour financer l’accueil de migrants)5. Du côté associatif, on retrouve, entre autres, deux collectifs ancrés à l’extrême gauche : Utopia 56 et la Ligue des Droits de l’Homme.

Donner un vernis démocratique à des propositions politiques rejetées par les Français

Le désir de la majorité des Français est connu depuis des années concernant la question migratoire : sondages après sondages, enquêtes après enquêtes, second tour du RN après second tour du RN. Mais cette volonté de restriction drastique de l’immigration ne plaît pas à Vanessa Krycève et consorts. L’objectif de ces derniers est d’empêcher le désir majoritaire sur ce sujet de se matérialiser politiquement. Et tout ça au nom de la démocratie ! Mais comment faire ? Comment faire pour donner un vernis démocratique à des propositions politiques rejetées par la majorité des Français ? Comment les duper tout en faisant accroire que la démocratie s’est exprimée ? Bon sang mais c’est bien sûr : une convention citoyenne sur la migration ! Pour s’en convaincre, il suffit d’écouter un peu Vanessa Krycève. Le 27 avril, elle a exposé, dans une vidéo de 20 minutes mis en ligne par le média Blast6, les raisons pour lesquelles une telle convention doit se tenir et la manière dont elle serait organisée.


Vanessa Krycève se présente comme entrepreneur dans le milieu de l’économie sociale et solidaire. Plus précisément elle indique avoir « fondé un projet qui œuvre pour un accueil digne des réfugiés et une entreprise qui accompagne les personnes réfugiées dans l’insertion professionnelle par la cuisine ». Cet élément biographique nous permet de la situer idéologiquement. Une marge d’erreur est toujours possible mais prenons le risque de prétendre qu’elle est plus proche de SOS Méditerranée que de Reconquête. Elle indique qu’elle aimerait voir advenir une « convention citoyenne sur la migration pour qu’il puisse y avoir un débat apaisé et serein sur le sujet migratoire ». Ce que ces gens appellent un débat « apaisé » c’est un débat auquel la droite ne participerait pas, car il est bien connu que c’est la droite qui hystérise le débat et certainement pas la gauche qui hurle à l’incitation à la haine à chaque fois que le mot « expulsion » est prononcé ou que l’expression « grand remplacement » est employée.

Après nous avoir expliqué qu’une convention citoyenne est un « outil démocratique », coordonné par le CESE, qui va permettre à 150 citoyens tirés au sort de débattre, Vanessa Krycève prétend que « la migration est un sujet très peu connu de l’ensemble de la population » et regrette que ce sujet soit « récupéré pour en faire des grandes polémiques ». Sujet « peu connu » dit-elle ? Curieux point de vue, ce sujet est en réalité bien connu de la majorité des citoyens ; il faut dire qu’en 2023 il est difficile de passer à côté. Des millions de Français éprouvent chaque jour ou subissent souvent ce qu’on appelle désormais le vivre-ensemble, et les difficultés qu’il charrie. Ils sont très au fait de cette réalité. 

Balisage idéologique 

Pour illustrer les « grandes polémiques » dont parle Madame Krycève, plusieurs extraits vidéos ont été choisis, tous en rapport avec l’affaire Lola, fillette française de 12 ans tuée à Paris par une Algérienne sous OQTF en octobre dernier. On y entend des responsables politiques de droite, comme Eric Zemmour, incriminer la politique migratoire du gouvernement comme responsable du drame… En parlant de « grandes polémiques » Madame Krycève et d’autres cherchent à disqualifier l’utilisation politique de faits, notamment de faits divers, dont ils regrettent la médiatisation. La mécanique est bien huilée. Dans un premier temps on cache le réel dérangeant, et lorsque, ce qui est le cas de temps en temps, ce réel dérangeant bénéficie d’une exposition médiatique, on s’emploie à le relativiser ou le minimiser. « Une convention citoyenne serait un bon moyen de faire de l’éducation populaire » avance Mme Krycève. On y arrive enfin. La volonté de ces militants se fait jour petit à petit. La convention citoyenne ne sera rien d’autre qu’un camp de rééducation, dans lequel les citoyens tirés au sort seront abreuvés d’un prêchi-prêcha immigrationniste qu’ils devront apprendre par cœur et recracher sans faute. Vanessa Krycève déclare ensuite que les participants seront accompagnés et éclairés par « des experts, des historiens, des sociologues, des démographes, des associations, des ONG, des personnes elles- mêmes issues d’un parcours migratoire, des patrons d’entreprises ». Tout semble déjà prévu pour baliser idéologiquement cette convention. Tous les chantres de l’immigration, bien dissimulés derrière leur titre d’experts, seront présents pour enseigner la bonne parole. L’historien viendra expliquer que l’immigration a toujours existé et qu’il est inutile de s’y opposer. Le sociologue discourra sur la montée de l’extrême droite en France et en Europe. Le démographe, Hervé Le Bras ou un autre Lyssenko probablement, prétendra que le grand remplacement est un fantasme et qu’il n’y a pas plus d’immigration aujourd’hui que sous Henri IV. L’idéologie des ONG et associations, comme Utopia 56 ou la LDH qui soutiennent la convention, est notoire; il n’est pas nécessaire de s’y attarder. Et enfin, les patrons d’entreprises, comme Thierry Marx7, viendront expliquer qu’ils manquent de main d’œuvre et qu’il faut vite régulariser des milliers de sans-papiers !

Vanessa Krycève a le culot de nous présenter cette convention citoyenne de rêve comme un « processus apartisan et fiable », tout en évoquant les « gardes fous et lignes rouges qu’on doit poser ». Il ne faudrait surtout pas que ça dérape. Il ne faudrait surtout pas que les participants deviennent incontrôlables à l’instar d’un fleuve qui sortirait de son lit. Au contraire, il faut les endormir ces braves gens. Ce qui explique les « lignes rouges », élément indispensable tel un cordon sanitaire pour empêcher toute idée nauséabonde d’émerger. Le peuple français se retrouve une nouvelle fois pris en étau entre d’un côté un gouvernement, qui à travers un énième projet de loi sur l’immigration (le 22e en 30 ans) lui fait miroiter une baisse de l’immigration qui n’adviendra jamais et de l’autre des associations, comme celles derrière cette idée de convention, qui s’opposent au souhait de la majorité en militant pour que la France accueille toujours plus d’étrangers.

Si vous n’êtes toujours pas convaincus par l’idée que ces gens de gauche tentent de mettre sur pied une entourloupe d’apparence démocratique sur le sujet de l’immigration, entourloupe qui porte le nom de convention citoyenne, voici un petit florilège des meilleures pensées de Vanessa Krycève :

« L’appel d’air est un fantasme »
« L’appel d’air est une aussi grosse fantaisie que le grand remplacement »
« La migration est un fait, comme le réchauffement climatique est un fait »
« La France qui historiquement est une terre d’accueil recule progressivement et accueille de moins en moins »
« Un référendum sur l’immigration c’est une idée d’extrême droite »

Apartisan et fiable, on vous dit !


1 « Une convention citoyenne sur la migration et l’intégration nous paraît pertinente » (lemonde.fr)

2 Vanessa Krycève : « Il est temps d’avoir un débat citoyen éclairé sur la question » de l’immigration

– YouTube

3 Pour Un débat Apaisé (pourundebatapaise.com)

4 Pétition · Immigration : donnons enfin la parole aux citoyens ! · Change.org

5 Qui est Olivier Legrain, le millionnaire qui met sa fortune au service des migrants ? (sudouest.fr) Fonds de dotation | RIACE France

6 FACE À LA HAINE ET AU FANTASME : UNE CONVENTION CITOYENNE SURL’IMMIGRATION – YouTube

7 “Arrêtons l’hypocrisie sur l’immigration” – Thierry Marx – C à Vous – 16/12/2022 – YouTube

Villerupt: on a tous droit à une 140ème chance de tuer?

Samedi dernier, à Villerupt, une fusillade a fait cinq blessés dont trois grièvement, sur fond de trafic de stupéfiants. L’auteur présumé des faits, Abdelkrim B, issu d’une famille de cinq enfants dont quatre sont connus pour des affaires de vols, de violences et de trafics, a déjà été impliqué dans près de 140 affaires judiciaires, condamné des dizaines de fois pour violences aggravées, vols aggravés, détention de stupéfiants, etc, et sortait de prison depuis à peine un mois. Cas d’école de l’effondrement de la chaîne pénale française.


Le maire (PCF) de Villerupt a beau parler d’un manque d’effectifs policiers dans sa commune, ce n’est pas le sujet. Le suspect a déjà été condamné à de très nombreuses reprises, ce qui veut dire qu’à de très nombreuses reprises la police a enquêté, l’a arrêté, et l’a conduit devant le tribunal avec assez de preuves pour qu’il soit condamné. Autrement dit la police a fait son travail, et même si son action est sans doute perfectible, les chiffres sont parlants : la police a très bien fait son travail. Le maillon faible de la chaîne pénale est ailleurs.

Condamné à plus de trente peines, récemment sorti de prison où « depuis qu’il a seize ans il ne fait que des allers-retours ». De toute évidence, les sanctions infligées à ce multirécidiviste ne l’ont pas dissuadé de persister dans ses activités délinquantes, et surtout, alors que sa détermination à vivre de trafics et de violence était bien connue, ne l’ont pas mis hors d’état de nuire. Là est le fiasco.

Faut-il en accuser l’institution judiciaire et les magistrats ? Oui, en partie. Le noyautage de la magistrature par des militants d’extrême-gauche qui se croient propriétaires du pouvoir judiciaire, alors qu’ils n’en sont que délégataires, et l’utilisent au profit de leur idéologie et certainement pas pour le bien commun, est connu depuis longtemps. Et la complaisance de la majorité des magistrats envers ces activistes, pour ne pas parler d’une atmosphère de sympathie envers leur idéologie, est évidente. Hervé Lehman, ancien juge d’instruction, y a consacré un excellent livre : « Soyez partiaux ! Itinéraire de la gauche judiciaire ». Mais on aurait tort de s’arrêter là.

Car enfin ! Qui crée les lois qu’instrumentalisent les « petits juges rouges » ? Qui laisse ces magistrats disciples d’Oswald Baudot trahir leur mission au nom de la « culture de l’excuse » et de leur militantisme ? Qui ne cesse de mettre des bâtons dans les roues de ceux parmi les magistrats qui se soucient sincèrement de la sécurité des innocents au lieu d’être obsédés par les droits des seuls coupables ? Les élus. Le Parlement. Les gouvernements qui se succèdent depuis des décennies. Par idéologie, on veut éviter l’emprisonnement. Par idéologie, mais aussi par intérêt, on empile les lois et chaque « simplification » voit le formalisme pénal devenir toujours plus chronophage, aboutissant à l’engorgement des services d’enquête. Aujourd’hui, la principale utilité du Code de Procédure Pénale est d’empêcher l’application du Code Pénal !

Le maire de Villerupt interpelle le ministre de l’Intérieur alors qu’il devrait s’en prendre au garde des Sceaux – et à tous ses prédécesseurs. LREM/Renaissance n’est pas responsable des décennies qui ont précédé son arrivée au pouvoir – mais est pleinement coupable de n’avoir rien fait depuis six ans pour remédier à la déliquescence de l’institution judiciaire.

Les solutions existent et sont connues. Au lieu de prêter l’oreille aux auteurs du « mur des cons », tout garde des Sceaux devrait commencer par lire Thibault de Montbrial, Maurice Cusson, Hugues Lagrange, Maurice Berger, les études de l’Institut pour la Justice qui tous parlent de la nécessité absolue de sanctions dissuasives (donc douloureuses pour le délinquant), systématiques, rapides et certaines – alors qu’aujourd’hui, d’un tribunal à l’autre, d’un juge à l’autre, les écarts constatés relèvent d’avantage de l’arbitraire aléatoire que d’une quelconque idée de justice. Rétablir les peines planchers, garantir l’exécution effective des peines prononcées, rendre à l’emprisonnement toute sa place et construire des prisons….

Tout garde des Sceaux devrait aussi lire les synthèses de l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie, n’en déplaise à ces médias qui se gardent bien d’évoquer le nom d’Abdelkrim B mais insistent sur le fait qu’il est né à Villerupt…. Tous les immigrés ne sont évidemment pas délinquants, et tous les délinquants ne sont évidemment pas immigrés ni issus de l’immigration, mais la surdélinquance de certaines immigrations (on ne parle clairement pas ici de nos concitoyens d’origine Vietnamienne….) est un élément central du problème et doit, impérativement, être prise en compte au plan politique. A Villerupt, et plus encore à Fameck où a été retrouvée la voiture du tireur, l’extrême violence de type mafieux, les règlements de compte claniques et le « halal way of life » avancent main dans la main.

Mais hélas ! Le macronisme n’a de cesse de faire méthodiquement le contraire de ce qu’il faudrait, au point que l’on pourrait presque croire l’ensauvagement voulu…. Après tout, un peuple habitué à raser les murs et baisser la tête devant la racaille aura bien du mal à trouver la force de dire « non » à ceux qui le privent petit à petit de sa souveraineté. Ibn Khaldoun (que même les bénéficiaires du Fonds Marianne auront du mal à accuser de « complotisme ») a tout dit à ce sujet il y a des siècles, le lecteur en trouvera ici un résumé que j’espère ludique, et pourra s’il souhaite l’approfondir se référer aux remarquables études de Gabriel Martinez-Gros.

Les magistrats sont responsables de la manière dont ils appliquent les lois, et dont certains d’entre eux l’instrumentalisent impunément, responsables de ne pas assez dénoncer cette instrumentalisation et les évolutions législatives qu’ils savent néfastes, mais ils ne font pas les lois. Quand celles-ci accordent plus de prix aux droits des coupables qu’à ceux des victimes, quand elles encouragent sans cesse les remises de peine, imposent des justifications interminables à toute décision qui pourrait faciliter l’enquête sous prétexte de garantir les « libertés » des suspects, ce sont nos élus les responsables. Face à cette procédure pénale décidément toujours faite pour protéger les criminels, il y a une solution non pas simpliste mais simple : revenir au Code de Procédure Pénale des années 90.

Avant l’introduction massive de la procédure accusatoire anglo-saxonne dans notre procédure traditionnellement inquisitoire, c’est-à-dire soucieuse avant tout de vérité objective, ce qui explique que les enquêteurs, le Parquet et les juges d’instruction instruisent « à charge et à décharge », là où le droit anglo-saxon vise à arbitrer entre des intérêts rivaux. Un exemple : DSK, reconnu coupable de viol (je ne me prononcerai pas sur l’effectivité de sa culpabilité, n’ayant pas les éléments pour juger), n’a pas été incarcéré puisqu’un arrangement financier a été trouvé avec sa victime. Pour la tradition anglo-saxonne, basée sur l’ancien wergeld, le « prix du sang » que le clan du coupable verse au clan de la victime, pour cette procédure accusatoire que l’UE voudrait imposer partout, tout va bien. Pour notre droit imprégné de tradition romaine et centré sur l’intérêt général, cela revient pour un homme fortuné à pouvoir s’acheter un « permis de violer », et c’est intolérable.

Et ne laissons pas la gauche pousser ses habituels cris d’orfraie en invoquant le « retour des heures les plus sombres ». La France des années 90, avant la loi Guigou de juin 2000 et la création du Juge des Libertés et de la Détention, n’avait rien d’un état policier. Même dans les années 80 nous étions un état de droit, où il ne faisait pas moins bon vivre qu’aujourd’hui, au contraire.

Dans l’urgence, et vu l’état catastrophique de la réponse pénale actuelle il y a urgence, la seule mesure réaliste et raisonnable est d’identifier un tournant (la loi Guigou n’est qu’une possibilité parmi d’autres) et de reprendre à l’identique le Code de Procédure Pénale tel qu’il était juste avant ce tournant. Puis de briser l’hégémonie culturelle de la « doctrine Baudot », en particulier à l’ENM, et de soutenir fermement ceux parmi les magistrats qui sont réellement au service du bien commun et de la sécurité de tous. Ensuite, et seulement ensuite, calmement, d’examiner à nouveaux frais toutes les évolutions législatives ultérieures au tournant identifié, au regard de leurs conséquences désormais connues grâce au recul des années, en débattre, de choisir celles qu’il serait bon de garder, et bien sûr de proposer d’autres innovations si nécessaire. Mais des innovations pragmatiques et non idéologiques, des innovations dont l’objectif serait non plus de donner des armes aux criminels pour se défendre des forces de l’ordre, mais tout au contraire de donner des armes aux forces de l’ordre pour défendre les honnêtes gens contre les criminels – et de rappeler à la magistrature que son rôle est d’appliquer les lois, et non de les instrumentaliser pour « corriger » ce qui lui déplaît dans la société. Tout l’inverse de ce que proclamait Oswald Baudot, en somme.

Et la responsabilité de cette remise en ordre, la responsabilité la plus lourde et la plus cruciale, est celle des politiques.

Antifas: une passion française?

En France, les antifas bénéficient d’un régime de faveur. Soutenus par la presse bien-pensante et couvés par les intellos nostalgiques de leurs années Mao, ces guérilleros luttent ouvertement contre l’autorité : l’État et sa police. S’appuyant autant sur la violence que sur la communication, ils livrent une guerre psychologique.


En France, pays centralisé à la gouvernance verticale et à l’esprit cartésien, on a du mal à comprendre les antifas, organisation anonyme, sans structure hiérarchique et sans manifeste politique explicite. Ces nouveaux révolutionnaires représentent une rupture par rapport au dirigisme robespierriste ou léniniste des extrémistes de gauche du passé. La France est néanmoins devenue une terre d’élection pour les antifas qui ont su marier les traditions anticapitalistes autochtones et des influences absorbées de l’étranger. Les origines de ces groupuscules se trouvent dans les bandes de « chasseurs de skinheads » des années 1980 et 1990. Plus structurés après 2000, ils importent des aspects de l’antifascisme allemand, notamment le logo antifa, combinant les drapeaux rouge et noir, et la tactique du black bloc. Ce terme désigne, non une organisation, mais un certain comportement dans les manifestations : port de vêtements noirs et de cagoules qui cachent l’identité des acteurs, manœuvres coordonnées qui maximisent l’efficacité d’actions violentes. Cette tactique a fait ses preuves au cours des protestations altermondialistes au sommet de l’OMC à Seattle en 1999, ainsi qu’au sommet du G8 à Gênes en 2001. Le premier groupe français à s’appeler antifa est l’Action antifasciste Paris-Banlieue (AFA P-B), créé entre 2007 et 2009. C’est à partir de la contestation de la loi Travail en 2016 que les groupuscules hexagonaux perfectionnent leur capacité à exploiter les grandes manifestations pour se mettre en avant et affronter les forces de l’ordre, notamment en se constituant en cortège de tête des défilés. À la différence des « casseurs », qui sont des opportunistes attirés par le pillage, les antifas dégradent les façades des entreprises et des banques en tant que symboles du capitalisme. À partir des 2017, les antifas américains apportent à leurs collègues français la doctrine wokiste et leur offrent l’exemple d’un réseau géographique à très grande échelle, d’une série de violences spectaculaires dirigées contre les institutions étatiques et de la campagne la plus développée pour couper le budget des forces de l’ordre. Derrière le désordre apparent des actions entreprises par les différents groupuscules antifas en France, il existe un projet commun. Plus inquiétant encore, ils ne sont pas marginalisés, mais font partie de tout un écosystème dédié à ce projet[1].

Une indiscipline disciplinée

Le principe d’organisation des antifas ne passe pas par l’adhésion formelle. Il n’y a pas d’encartés, mais des « bandes de potes » ou des groupements « affinitaires ». Les affinités en question sont suffisamment fortes pour inspirer une loyauté et une compréhension mutuelles hors du commun. Un site antifa, La Horde, affiche une liste de 62 groupes implantés dans les villes principales de France. Le nombre des militants semble en progression constante : de 1 500 en 2019, il passe à 2 500 en 2021. Pour certains événements, leurs rangs peuvent être gonflés par des renforts venus de l’étranger. Les antifas sont plutôt jeunes : la moyenne d’âge serait de 29 ans. Pour la plupart, ils sont blancs et 75 % sont des hommes. Ils recrutent parmi les lycéens et les étudiants, mais ne seraient pas tous des « fils de bourge ».

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Cette structure informelle reflète un changement radical par rapport à leurs ancêtres des années 1970-1990 qui s’organisaient de manière militaire pour réaliser assassinats et enlèvements, braquages de banques et attentats à la bombe. Ce changement a été codifié en France par la revue anonyme Tiqqun, dont deux numéros ont été publiés en 1999 et 2001. Un texte, dont un des auteurs serait Julien Coupat, le suspect principal dans l’affaire dite de Tarnac, préconise de remplacer la guerre contre le pouvoir actuel par « une guérilla diffuse ». Citant l’exemple des black blocs de Gênes, il recommande de confondre les autorités, toujours à la recherche de la main d’une seule organisation centralisée derrière un petit nombre d’actions criminelles de haute intensité, en les confrontant à « une multiplicité de foyers comme autant de failles dans la totalité capitaliste ». Le même auteur serait derrière le livre  L’insurrection qui vient, publié par un « Comité invisible » en 2007, qui précise : « Les Organisations sont un obstacle au fait de s’organiser. » Entre les deux textes, l’arrivée des plateformes en ligne a donné aux nouveaux réseaux ultra-gauchistes une efficacité inédite avec deux avantages à la clé. D’abord, ils paraissent comme une hydre à cent têtes : inutile de dissoudre un groupe, un autre le remplacera. Ensuite, il y a la force d’une entente tacite. Andy Ngo, le spécialiste américain des antifas, m’a expliqué que, en 2022, après la décision de la Cour suprême renversant Roe v. Wade, les antifas ont lancé une vague de terreur à travers les États-Unis, ciblant les organisations opposées à l’avortement, dont les bâtiments ont été incendiés, vandalisés ou tagués avec des menaces. Pour ce faire, il a suffi que les réseaux publient leurs noms et adresses sans autre consigne. Gilles Kepel a forgé le concept de « djihadisme d’atmosphère » : on pourrait parler ici d’« antifascisme d’atmosphère ». Pendant la période des protestations contre la loi sur les retraites, les antifas ont relayé sur leurs comptes Twitter des « flyers » au format identique annonçant des rendez-vous à tel endroit, à telle date. Par exemple, Antifa Lyon a annoncé : « RDV 13 avril 13h30 place Lyautey ». Bilan : 400 individus particulièrement violents dans le cortège des manifestants, cinq interpellations, trois manifestants et 12 policiers blessés. Les mêmes réseaux partagent des appels à témoins contre la police et des appels à dons pour payer les frais d’avocat des antifas arrêtés. En mars, une revue communiste, Contretemps, a déploré l’absence de coordination dans les efforts pour contrecarrer la loi sur les retraites. Normal : les antifas ont un tout autre objectif.

Stop the cops !

L’idéologie qui inspire ces réseaux est nébuleuse. Ils sont pour l’immigration, l’écologie, la Palestine, et contre le capitalisme, le racisme, l’islamophobie et le sexisme. S’ils combattent le fascisme, ce n’est pas seulement celui de l’extrême droite, car toute la société actuelle est fasciste à leurs yeux. Plus concrètement, les antifas entretiennent un culte de la violence maîtrisée et ciblée. Ils justifient ce culte par la nécessité de répondre à trois formes de violence préexistantes : celle de l’extrême droite, celle de la police et celle – dite « sociale » – inhérente à tout le système capitaliste. Se battre contre leurs homologues néonazis permet de s’aguerrir et renforcer l’esprit de corps, mais c’est surtout un alibi pour leur agressivité. Se battre contre la violence diffuse dans la société est très ambitieux : vandaliser quelques enseignes commerciales ne fera pas tomber le capitalisme.

Affrontement entre des black blocs et les forces de l’ordre durant une manifestation contre la réforme des retraites à Rennes, le 28 mars 2023. © Justin PICAUD/SIPA

Reste la police. La communication publique des antifas ne porte que sur leurs coups de force contre l’extrême droite mais leur vrai ennemi, ce sont les forces de l’ordre. Car ces dernières représentent le seul obstacle à une violence plus généralisée dirigée pas les antifas contre les autres institutions de la société. Sous sa forme idéale, le but des antifas est l’abolition de la police, mais de manière plus réaliste il s’agit de la démoraliser et de la discréditer dans l’opinion publique. Plus la sphère de l’action des forces de l’ordre sera limitée (par exemple par l’abolition de la BRAV-M), plus celle des révolutionnaires sera grande. Les antifas refusent l’idée que la police détient le monopole légitime de la violence : ils voudraient que ce monopole leur appartienne.

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S’ils se plaignent des « violences policières », leur vrai but n’est pas de les combattre, mais de les provoquer. Quand ils caillassent les forces de l’ordre, il s’agit de les décourager et de les énerver. Si la police riposte de manière musclée, et que des manifestants pacifiques sont atteints, les antifas et leurs alliés peuvent crier à la violence policière. Les manifestants blessés ou arrêtés deviennent autant de preuves de l’illégitimité des forces de l’ordre. Des images choquantes de CRS enveloppés par les flammes d’un cocktail Molotov démentissent la notion de l’invincibilité de la police, mais les antifas ne cherchent pas à tuer des policiers, car cela en ferait des martyrs dans l’opinion publique. Plutôt qu’une guerre tout court, c’est une guerre psychologique et de communication. (Voir leur manifeste « Abolir la première milice fasciste »).

L’écosystème antifa

Afin de gagner la bataille de l’opinion, les antifas disposent d’importants relais parmi les journalistes, les juristes, les ONG, les cinéastes, les éditeurs et les chercheurs. Les forces de l’ordre sont ainsi prises en tenaille entre les guérilleros qui les provoquent dans la rue et les intellos qui les condamnent sur la place publique. La formule « violences policières » est martelée sans relâche par la presse bien-pensante, de Libé à La Croix. Lors des manifestations, des antifas tweetent des noms d’avocats et les numéros de téléphone de « legal teams » prêtes à défendre des manifestants arrêtés. Le Syndicat des avocats de France et le Syndicat de la magistrature, très ancrés à gauche, jouent un rôle important dans les campagnes de censure des violences policières. Des ONG comme Amnesty International et des organismes supranationaux comme le Conseil de l’Europe ou l’ONU ont critiqué les méthodes des autorités françaises. Un site web, violencespolicières.fr, prétend recenser tous les cas. Que les intentions ici soient bonnes ou mauvaises, peu d’importance est accordée à la campagne de provocation et aux violences dont les forces de l’ordre sont l’objet.

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En même temps, un flot de livres récents se sont donné pour mission de justifier la violence révolutionnaire et l’abolition de la police. Les éditions Libre ont publié en français deux titres de l’anarchiste américain Peter Gelderloos :  Comment la non-violence protège l’État et L’Échec de la non-violence. L’ouvrage collectif Défaire la police, paru aux éditions Divergences, commence par un éloge du slogan antifa « All cops are bastards » (« Tous les flics sont des salauds »), souvent abrégé en « ACAB » ou réduit au code numérique 1312. La Fabrique, maison d’édition très en vue fondée en 1998 par le militant de gauche Éric Hazan, a édité non seulement les textes de Tiqqun et du Comité invisible, mais aussi une série de volumes comme La Domination policière de Mathieu Rigouste ou Que fait la police ? Et comment s’en passer de Paul Rocher. Un volume collectif, Police, contient un essai de David Dufresne, le réalisateur d’un film sur les violences policières, Un pays qui se tient sage, sorti en 2020, et un autre d’Antonin Bernanos, un ancien de l’AFA P-B, condamné pour son rôle dans l’incendie d’une voiture de police et l’agression d’un policier au quai de Valmy en 2016. Les chercheurs font aussi preuve de zèle : un Collectif des universitaires contre les violences policières a publié une tribune signée par 300 personnes sur le site du Club de Mediapart le 4 mai 2019. Une mention spéciale doit être réservée à la Française Gwenola Ricordeau, spécialiste de justice criminelle à l’université d’État de Californie à Chico. Elle vient de publier un recueil d’essais, pour la plupart traduits de l’américain, sous le titre significatif de 1312 raisons d’abolir la police. Son compte Twitter relaie les posts des antifas français, fait l’apologie de la « violence politique » et approuve un montage vidéo de scènes où la police est mise en échec ou agressée.

Pour boucler la boucle, les comptes antifas célèbrent la parution de son livre. C’est ainsi que la société française doit faire face, d’un côté, à une forme spécifique de terrorisme dirigée contre les forces de l’ordre et, de l’autre, à une campagne de propagande pour désarmer ces mêmes forces. Il faudra une sacrée grenade de désencerclement pour sortir de cette situation.

Montage retweeté le 10 avril 2023 par Gwénola Ricordeau.

[1] Parmi les sources de cet article : Andy Ngo, entretien du 10 avril 2023 ; Sébastien Bourdon, Une vie de lutte plutôt qu’une minute de silence : enquête sur les antifas (Seuil, 2023) ; Isabelle Sommier, « Les nouveaux habits noirs de l’anticapitalisme », Sciences humaines, n° 315 (2019/6) ; et les comptes Twitter de nombreux groupes antifas français.

Jean-Luc et la chocolaterie

Juste après l’intervention télévisée d’Emmanuel Macron lundi soir sur TF1, Jean-Baptiste Trogneux, l’un des petits neveux de Brigitte Macron, a été passé à tabac à Amiens, en marge d’une “casserolade”. Il souffrirait depuis de cotes cassées, d’un hématome et de doigts foulés ! Cette attaque détestable est dénoncée depuis 24 heures par l’ensemble de la classe politique. Huit personnes ont été arrêtées, trois d’entre elles seront présentées à la justice en comparution immédiate aujourd’hui. « Il a été confronté à la brutalité, à la violence et à la bêtise », a commenté le chef de l’Etat depuis l’Islande. Dans quelle mesure la radicalité et la violence des discours de l’extrême gauche peuvent-elles être tenues pour responsables de pareilles agressions?


Après l’agression de Jean-Baptiste Trogneux, certains accusent les « Insoumis » et leurs discours incendiaires.

Une condamnation unanime

Rappelons d’abord, quand même, que la condamnation est unanime. Chez les Insoumis, elle a été très claire pour François Ruffin (« on ne défend pas la démocratie en attaquant un chocolatier » a-t-il tweeté), et beaucoup plus entortillée chez Jean-Luc Mélenchon – disons allant beaucoup moins de soi.

Certains, comme l’avocat Thibault de Montbrial estiment que LFI a une responsabilité. C’est la thématique bien connue de la libération de la parole, généralement employée pour accuser MM. Zemmour ou Finkielkraut des crimes d’extrême droite comme ceux de Breivik.

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Chez beaucoup d’ « Insoumis », il y a en effet un appétit d’échafauds, de têtes sur des piques, un petit vent robespierriste. Mais pardon, s’agissant d’Emmanuel Macron, tout le monde a participé à la démolition (de l’extrême droite à l’extrême gauche, sans oublier nos médias qui s’attendrissent presque sur les « casserolades » ces derniers temps). Lundi soir, la casserolade a mal tourné. Dans tout cet arc politique, c’est la personne d’Emmanuel Macron et pas sa politique qui est érigée en explication universelle de nos malheurs. On ne parle plus du président de la République comme quelqu’un qui se tromperait ou ferait une mauvaise politique, mais comme un être malfaisant, un affameur cynique et cruel d’un peuple vierge de tout mal.


Ces propos virulents peuvent-ils pour autant être tenus pour responsables d’une agression?

C’est une question aussi intéressante qu’elle est indébrouillable. Les mots affectent le réel, c’est même leur vocation première, mais il est en même temps presque impossible d’assigner un acte à un propos – on le voit d’ailleurs dans l’affaire Samuel Paty.

Comment des citoyens se pensent-ils autorisés à tabasser un jeune homme ? Voilà une autre question qu’il faut en revanche se poser. L’explication est à mon sens peut-être moins chez l’émetteur des propos incendiaires que dans le cerveau des récepteurs. Dans ce problème, il y a une dimension un peu oubliée dont il nous faut de nouveau faire état : la baisse du niveau intellectuel dans la société. Dans le débat politique ou parlementaire, la violence est métaphorique, elle est symbolique. Même le plus bolcho des « Insoumis » ne rêve pas de guillotiner des patrons place de la Concorde. Enfin, j’imagine… Mais ce qui peut transformer la violence verbale en agression physique c’est l’incapacité à accéder à ce niveau symbolique, l’incapacité à verbaliser et à conceptualiser. On entre alors dans le règne de l’émotion brute et de la pulsion. Quand on n’a pas de mots, on cogne. De plus, on considère de nos jours que la colère a toujours raison.

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Ce passage à tabac gratuit, sans « pourquoi ? », est finalement un instantané de l’époque. Tout d’abord, les agresseurs s’y sont mis à huit contre un, cette lâcheté assumée est une scène de barbarie désormais fréquente – voire ordinaire. Si la civilisation, c’est le renoncement à la violence et le choix du langage comme moyen de résolution des conflits (le logos), nous sommes effectivement embarqués dans un processus de décivilisation (un sondage récent nous apprenait que 15 % des Français estimaient la violence comme un moyen légitime de régler ses problèmes). À tout cela, nous ne voyons pas de remède à court terme.

Cependant, la pire erreur serait de croire qu’on va éliminer la violence en corsetant le langage. Que les attaques personnelles et les invectives soient sanctionnées, qu’on ne résigne pas à ce que cela devienne de nouveaux réflexes dans nos rapports, oui. Mais attention à ne pas trop restreindre les bornes du convenable. Le débat public n’est pas une soirée de gala.


Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy du lundi au jeudi dans la matinale, après le journal de 8 heures.

Idéologie trans: même l’École alsacienne n’est pas épargnée!

Il n’est pas certain que notre ministre de l’Éducation nationale laisse ses enfants à l’École alsacienne, non parce qu’il voudrait montrer l’exemple en termes de «mixité sociale», mais parce qu’il a peut-être appris, comme nous, que l’idéologie transgenre est parvenue à distiller son poison dans cet établissement élitiste qu’on aurait pu croire épargné par cette folie…


Il y a quelques semaines, les élèves de 4e de ce noble établissement ont en effet été conviés à une réunion présentée à leurs parents comme une « invitation à la tolérance » alors qu’elle était en réalité une séance d’information très orientée sur la transidentité. C’est en lisant l’article de Clémence de Longraye sur le site de Boulevard Voltaire que nous l’avons appris. Cette séance de deux heures de bourrage de crâne était obligatoire.

L’association contre les violences sexuelles et sexistes HandsAway devait y prêcher la bonne parole. Selon une pratique qui n’a l’air de déranger personne mais qui pose quand même la question de savoir devant quelle association « partenaire » vont finalement se retrouver les élèves, HandsAway a confié à l’association OUTrans le soin d’animer ces deux heures d’information. Sur son site, OUTrans est fière d’annoncer qu’elle a été récemment consultée par l’Éducation nationale pour proposer des mesures dans le cadre du plan de lutte contre les LGBTphobies 2023-2026. Au milieu d’une très longue liste de revendications, l’association propose, naturellement, d’ « augmenter et sécuriser les financements associatifs LGBT », puis de « former les décideur.es politiques (ministres, cabinets, parlementaires) et la haute administration aux transidentités par/avec les asso trans », de « former par/avec les asso trans les délégué.es du Défenseur des droits sur les enjeux trans », de « créer un plan de formation national sur les transidentités par/avec les asso trans ». L’association réclame par ailleurs que soit « révisée/précisée la circulaire de 2021 pour les personnes trans en réaffirmant que la reconnaissance de l’identité de genre n’est pas soumise à l’autorité parentale » et que soit « supprimée l’obligation des toilettes séparées filles/garçons dans les constructions scolaires ». Dans la rubrique « formations », le déroulement d’une réunion est clairement décrit: présentation de l’association, lexique pour « que chacun.e utilise les termes à éviter et ceux à privilégier », présentation des « parcours de transition (sociale, légale et médicale) ». Le prosélytisme se substitue largement au combat contre la transphobie qui n’est qu’un prétexte. Cette association incite chaque élève non pas seulement à être « tolérant » envers les trans mais à entamer lui-même s’il le désire une transition et à « façonner son corps et son identité comme iel l’entend, c’est-à-dire avec ou sans modifications corporelles ». Des élèves de l’École alsacienne disent avoir subi une pression menaçante de la part des animatrices lors de cette réunion : « Quand on a dit qu’on ne voulait pas d’hommes trans dans les toilettes de filles, on s’est fait traiter de transphobes. » Cette réunion est apparue clairement à certains comme une session de recrutement: « On avait vraiment l’impression qu’elles voulaient nous pousser à devenir trans, que c’était super cool de faire une transition. »

Aucun recul

Cette propagande n’est pas nouvelle mais prend, année après année, une place de plus en plus importante dans les établissements scolaires, qu’ils soient publics, privés ou réputés pour leur élitisme. Sous couvert de lutter contre l’homophobie et la transphobie, l’Éducation nationale invite, à travers différents documents officiels, « à porter une attention particulière aux élèves transgenres ou qui s’interrogent sur leur identité de genre », et ne prend aucun recul sur le phénomène idéologique et propagandiste inhérent à la théorie du genre, entérinant ainsi, de facto, cette idéologie. Le ministère qui aurait dû se méfier de cette idéologie qui cible d’abord les très jeunes gens en cours de construction physique et mentale, a finalement capitulé – les associations les plus prosélytes considèrent à juste titre avoir gagné cette première bataille. La seconde, en cours de déploiement, est déjà bien avancée : présence de plus en plus fréquente dans les écoles (si possible dès l’école primaire), endoctrinement dans les lieux de formation (académie, INSPE, ENS, etc.), pressions auprès des maisons d’éditions pour inclure dans les manuels scolaires des notions sur le genre, sans compter le soutien d’associations pro-trans (Planning familial), de syndicats enseignants (Sud éducation) ou d’associations de parents d’élèves (FCPE). La circulaire Blanquer de 2021 intitulée « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » reste d’actualité. Elle autorise toutes les revendications des élèves endoctrinés en matière de changement de genre, de prénom, etc. Si « les enseignants ont le devoir d’accompagner les jeunes et de faire preuve à leur endroit de la plus grande bienveillance, de leur laisser la possibilité d’explorer une variété de cheminements sans les stigmatiser ou les enfermer dans l’une ou l’autre voie », les parents pourront en revanche être écartés de ce processus : « Si l’élève fait seul la démarche d’aborder la question de son identité de genre auprès d’un personnel de l’établissement, une communication avec les représentants légaux ne doit se faire qu’avec l’accord explicite de l’élève. » La France imitera-t-elle bientôt l’Écosse – le SNP (parti indépendantiste écossais) envisage, dans le cadre d’une enquête scolaire menée dans 59 écoles, de demander aux enfants de sept ans s’ils sont « homme, femme, non-binaire, transgenre ou autre », tandis que les Verts proposent que les enfants puissent changer de sexe dès l’âge de huit ans – , ou l’Espagne, où le changement de sexe au registre civil à partir de l’âge de 16 ans et sans le consentement des parents est possible, et où les écoles peuvent maintenant dénoncer aux services sociaux les parents refusant que leurs enfants changent de sexe ? Nous n’en sommes pas encore là, mais les associations pro-trans, profitant du soutien des mouvements politiques d’extrême gauche et des médias wokistes (la radio publique, Télérama et Libération en tête), ainsi que de la complicité de l’Éducation nationale, ne désespèrent pas d’obtenir un jour de tels résultats.

Les ratés suédois et britanniques devraient alerter Pap Ndiaye

Les psychiatres et les pédopsychiatres tirent la sonnette d’alarme: nombre d’enfants et d’adolescents souffrant de troubles psychiques trop rapidement rangés dans la catégorie « dysphorie de genre » échappent à une prise en charge sérieuse. D’autres, ne souffrant de rien d’autre que des tiraillements hormonaux, émotifs et affectifs liés à l’adolescence, mais ayant subi la propagande trans à travers les réseaux sociaux et l’école, se laissent entraîner dans un processus de « transition » conduisant le plus souvent à une catastrophe psychique et, parfois, physique – troubles mentaux, médicalisation à vie, chirurgie amputatrice, etc. La Suède et le Royaume-Uni savent ce que leur laxisme face au phénomène trans a coûté à des centaines de leurs adolescents et ont décidé de contrôler très fermement les structures médicales ainsi que les associations propageant l’idéologie trans. Il est temps, en France, d’ouvrir les yeux et de prendre des décisions radicales.

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Il n’y a pas 36 solutions pour empêcher l’idéologie du genre d’empoisonner l’esprit  des enfants. Il faut frapper fort : aucune association distillant ce poison ne devrait pouvoir entrer dans les écoles ; aucun manuel scolaire mentionnant un principe, un document ou une thèse relevant de l’idéologie du genre ne devrait pouvoir être proposé aux enseignants ; aucune sortie scolaire prévoyant la rencontre d’élèves et de « drag-queens » ne devrait être autorisée.

Discours délirants

Les associations LGBT n’ont rien à faire dans les établissements scolaires : la lutte contre les « LGBTphobies » n’est souvent qu’un prétexte pour véhiculer les notions idéologiques sur le genre et, de plus en plus, tenir des discours délirants sur le « patriarcat », la « masculinité toxique» et « l’hétéronormativité » ou faire la publicité pour la PMA et la GPA. Les cours sur « la sexualité » doivent reposer sur des données scientifiques et biologiques et sur rien d’autre – en aucun cas ils ne doivent être dispensés par des associations comme le Planning familial ou par du personnel parascolaire. Bref, l’école doit redevenir un véritable lieu d’instruction et non cette garderie sociale dans laquelle les sujets annexes au projet sociétal des « minorités » et des progressistes wokes supplantent la transmission des connaissances.

Pap Ndiaye affirmait il y a quelque mois que les mesures prises par son ministère n’ont « rien à voir avec la théorie du genre ». Pourtant, la théorie du genre a fait son nid dans l’école, d’une manière ou d’une autre. Dans une école élitiste que nous pouvions croire à l’abri de ce genre de mésaventures, l’École alsacienne, les militants d’une association radicale et prosélyte ont pu diffuser l’idéologie trans. Qu’en pense M. Pap Ndiaye, dont les enfants sont inscrits dans ladite école ? Était-il au courant de la tenue de cette « réunion d’information » sur la transidentité ? Accepte-t-il que ses enfants subissent cette propagande ? Plus globalement, est-il prêt à endosser la co-responsabilité des conséquences de la propagation de l’idéologie trans à l’école et du « premier grand scandale médical et éthique du XXIe siècle [1] » annoncé ?


[1] Caroline Eliacheff et Céline Masson, La fabrique de l’enfant-transgenre, Éditions de L’Observatoire.

« C’est une prime aux plus radicaux »

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Klaus Kinzler © D.R.

À l’instar de la municipalité, Sciences-Po Grenoble est un vivier de militants islamo-gauchistes. Les syndicats étudiants y exercent un régime de terreur sur les professeurs et la direction qui préfèrent ne pas moufeter, par opportunisme ou conviction. Vue l’ambiance, mieux vaut ne pas déplaire. Les professeurs Vincent Tournier et Klaus Kinzler en ont fait les frais. Deuxième partie: témoignage de Klaus Kinzler, professeur agrégé de civilisation et de langue allemandes


Causeur. Vous attendiez-vous à ces insultes et à cet affichage public contre vous ?

Klaus Kinzler. Absolument pas. Je suis un libéral, autant économiquement et socialement. Cela fait de moi un oiseau rare dans un milieu où les gens sont majoritairement à gauche. Mais je ne m’attendais pas à être traité de fasciste. D’habitude pour m’insulter on me traitait plutôt d’« ultralibéral. »

Vous vous souvenez de signes avant-coureurs de cette emprise de l’extrême gauche à Sciences-Po Grenoble ?

C’est difficile à dire. Je crois que c’est surtout une question de génération. Avant, les professeurs avaient été formés à la vieille école, c’était des savants, ils avaient une conception exigeante de la science. Leur départ à la retraite a créé un appel d’air et beaucoup de jeunes professeurs ont été alors recrutés. Une partie de ceux-là sont très extrémistes dans leurs idées politiques et mélangent trop souvent recherche et militantisme. Or, l’affaire de Sciences-Po Grenoble a montré le pouvoir de ces enseignants et surtout l’emprise qu’ils exercent sur des gens qui ne sont pas radicaux, mais n’arrivent pas à trouver le courage de leur résister.

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Vous n’avez guère été soutenu par la direction ?

Disons qu’après la condamnation de l’affichage, le ton a vite changé, renvoyant tout le monde dos à dos. Il serait cependant faux de dire que la direction administrative de l’IEP est d’extrême gauche. La directrice de l’IEP, par exemple, est une personnalité modérée et je crois qu’elle aurait voulu refaire de l’IEP un lieu ouvert et de débats. Mais elle n’avait pas de majorité au conseil d’administration pour défendre ses vues raisonnables. En fait, son autorité était très faible et elle dépendait, et dépend, encore des « grandes gueules » de l’extrême gauche de l’institut, dont l’influence pèse sur le CA. Quand la crise est arrivée, elle a essayé d’amadouer tout le monde. Or déjà avec l’affaire dite « Sciences-Porc », on avait pu mesurer combien cette pondération frôlait la lâcheté. Cette initiative, qui appelait à la dénonciation sur les réseaux sociaux d’étudiants considérés comme sexistes, avait généré beaucoup d’abus. À cette occasion, la directrice avait déjà sacrifié ses convictions pour ne fâcher personne au sein du conseil d’administration. Là encore pas de sanction des abus, pas de débat. Le problème c’est que ce genre d’attitude offre une prime aux plus radicaux, qui ne sont souvent pas les plus représentatifs. À Sciences-Po Grenoble, il y a environ 70 professeurs permanents. J’estime à une vingtaine seulement les extrémistes. Le reste est raisonnablement de gauche, comme tout universitaire qui se respecte. Mais la majorité se tait, car s’ils contredisent ceux qui ont le pouvoir dans les CA, ils peuvent s’attirer beaucoup d’ennuis ; cela peut aller jusqu’à la perte des financements pour leur recherche. La plupart des profs se retirent du fonctionnement de l’IEP et se centrent sur leurs recherches.

Cette affaire a-t-elle nui à l’influence des enseignants-chercheurs situés à l’extrême gauche ?

Au contraire, cela les a renforcés. Il faut dire que Vincent Tournier et moi-même avons vu nos carrières affectées par cette histoire. Vincent a perdu son cours, j’ai été suspendu, nous avons dû nous battre en justice. Pendant ce temps, les étudiants ont été relaxés par le conseil de discipline, et personne au ministère n’a suggéré à la directrice, dont la gestion de la crise a été calamiteuse, de démissionner. Cela ne donne pas envie de résister puisque quand vous êtes victimes d’actes violents, non seulement vous perdez votre statut mais en plus, on finit par faire de vous un coupable, responsable de ce qui lui arrive. En réalité, l’urgence pour la direction de l’IEP était d’enjamber la crise, de faire croire que cette affaire était un accident qui ne disait rien de la réalité de ce qui se passe à Sciences-Po Grenoble. Il n’y a eu aucun retour sur la violence de cet affichage ou sur le climat de peur relevé par l’inspection lors de son enquête sur l’école. Lorsque la directrice évoque cette affaire, c’est pour la réduire – sans rire – à une campagne nauséabonde des médias nationaux et des réseaux sociaux visant à salir gratuitement l’image de l’institution. Il n’y a eu aucune remise en cause, pas de sanctions prononcées sinon à mon encontre. Le débat sur les retraites a montré à quel point l’emprise de l’extrême gauche restait puissante. Nombre d’étudiants actuels expliquent qu’ils ne disent jamais ce qu’ils pensent vraiment si ce n’est pas compatible avec la doxa de l’extrême gauche. Ils n’ont pas envie de faire l’objet de représailles sur les réseaux sociaux ou de devoir assumer le qualificatif de fasciste.

Quelles ont été les conséquences pour vous ?

J’ai simplement été mis à l’écart de l’IEP, « annulé ». D’abord à cause des menaces qui ont abouti à une mise sous protection policière. J’ai ensuite été suspendu puis j’ai subi le lot d’humiliations administratives dégradantes qui visent à vous éloigner en faisant en sorte que ce soit vous qui renonciez. Le rectorat m’a donc proposé un poste de professeur remplaçant dans un collège à 200 km de chez moi. Comme j’ai décliné cette proposition, on a fini par me caser dans un placard. On m’a confié une mission pour développer l’école à l’international, notamment en approfondissant les relations avec l’Allemagne, sauf que je n’ai le droit de parler avec aucun membre des universités allemandes. Dernière petite humiliation, j’ai obtenu la protection fonctionnelle en 2021. Celle-ci oblige normalement l’école à rembourser mes frais de justice. Or, alors que la procédure en première instance m’a déjà coûté plus d’une dizaine de milliers d’euros, l’IEP ignore mes demandes de remboursement. Il a pourtant déjà remboursé les frais de mon collègue, Vincent Tournier. Il est difficile de ne pas voir ce traitement comme une mesure de rétorsion. Dans ces conditions, je pense faire valoir mes droits à la retraite, car cette histoire finira par avoir des conséquences pour ma santé.

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Sciences-Po Grenoble, l’IEP dont le prince est l’étudiant

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© D.R.

À l’instar de la municipalité, Sciences-Po Grenoble est un vivier de militants islamo-gauchistes. Les syndicats étudiants y exercent un régime de terreur sur les professeurs et la direction qui préfèrent ne pas moufeter, par opportunisme ou conviction. Vue l’ambiance, mieux vaut ne pas déplaire. Les professeurs Vincent Tournier et Klaus Kinzler en ont fait les frais. Première partie: témoignage de Vincent Tournier.


En mars 2021, Sciences-Po Grenoble a été secoué par un scandale révélateur de l’emprise de l’extrême gauche à l’université et des méthodes fascisantes avec lesquelles elle impose le silence et installe son pouvoir. Les noms de deux professeurs avaient été placardés sur la façade de l’école avec ce slogan : « Des fascistes dans nos amphis, l’islamophobie tue ». Leur tort : avoir osé dire que le terme « islamophobie » n’était pas scientifique et renvoyait au militantisme et non à une réalité sociale. Le rapport de l’inspection diligentée par le ministère suite à cette histoire évoque un climat de peur qu’un syndicat et son principal responsable ont installé au sein de l’institution sans susciter aucune réaction de la part de la direction. Causeur a voulu savoir ce qu’il était advenu des deux professeurs menacés de mort, Vincent Tournier et Klaus Kinzler.

Vincent Tournier © D.R.
« Il y a un avant et un après. » Entretien avec Vincent Tournier, maître de conférences de science politique à Sciences-Po Grenoble

Causeur. Avant le scandale de l’affichage, y a-t-il eu des signes indiquant que votre personne ou votre enseignement étaient contestés ?

Vincent Tournier. Je n’ai pas du tout anticipé la crise. Je n’étais pas très impliqué dans la vie interne de Sciences-Po. J’animais un cours sur l’islam. Deux ou trois ans avant les faits, la direction m’avait prévenu que des étudiants syndiqués avaient voulu le faire interdire. À l’époque, la direction m’avait invité à ne pas donner le sentiment de mettre tous les musulmans dans le même sac, ce qui m’avait tellement paru aller de soi que j’ai cru que cette histoire était réglée. Je n’ai pas su exactement ce qu’ils me reprochaient, mais je sais que certains constats passent très mal. C’est le cas, par exemple, lorsqu’on évoque l’importance des mariages consanguins dans le monde musulman, même en s’appuyant sur les analyses de la grande résistante et anthropologue Germaine Tillion, que nul ne peut soupçonner de racisme ou quand on décrit l’importance du fondamentalisme religieux, même si là encore il existe des données concordantes.

Comment avez-vous réagi lorsque vous avez appris que votre nom avait été affiché sur la porte de l’IEP assorti d’une association d’ « islamophobie » ?

Au départ, j’ai pensé que l’affaire allait rester strictement locale, mais très vite elle a pris une dimension nationale. À partir de ce moment, votre propre histoire vous échappe. Vous devenez le professeur menacé de mort : vous êtes soit la victime d’une cabale islamo-gauchiste pour les uns, soit le salaud dénoncé à bon escient par des étudiants justiciers pour les autres. Même quand vous êtes victime d’un acte violent, vous devenez celui par qui le scandale arrive : cela vous isole. C’est comme si vous étiez marqué au fer rouge. Il y a un avant et un après.

Comment avez-vous vécu la réaction de vos collègues, des étudiants, de la direction ?

Dans un premier temps, tous ont condamné la délation par voie d’affichage. Mais assez vite une lecture politique a émergé qui nous a attribué la responsabilité de la crise. Certains collègues ont même été très loin dans la critique, nous déniant le droit de parler d’islam. On voit aussi se mettre en place des réflexes prévisibles comme la volonté de protéger l’image de l’institution. Le pire, c’est que malgré le scandale provoqué par ces collages, les étudiants, notamment le leader de l’Union syndicale[1], ont assumé leur cabale lors d’une conférence de presse, en considérant que « des personnes concernées – donc des personnes musulmanes ou affiliées à l’islam » avaient été choquées par certains écrits. À aucun moment ils n’ont entrepris de faire marche arrière ou d’admettre leurs torts.

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Comment un syndicat étudiant peut-il exercer une telle influence ?

Il y a sûrement plusieurs raisons, mais il est clair que les différentes réformes de l’enseignement supérieur ont eu pour effet de donner aux représentants étudiants une place très importante au sein des conseils d’administration. La montée en force de l’évaluation des enseignements les incite à penser qu’ils disposent d’un droit de regard sur la pédagogie. Il est même prévu que les étudiants ne peuvent être sanctionnés lorsqu’ils dénoncent des discriminations, ce qui encourage à organiser une sorte de traque généralisée. On sous-traite aux étudiants la lutte contre les discriminations ou contre les violences faites aux femmes. Ceux-ci peuvent se sentir investis d’une mission de contrôle ou d’épuration qui vient conforter une radicalité déjà très présente. Les autorités universitaires n’ont alors plus vraiment la légitimité pour s’opposer à ces dérives. S’ajoute à cela la présence d’enseignants très politisés, y compris dans les instances de direction, ce qui crée un environnement propice aux dérapages.

Comment expliquer l’influence de syndicats très gauchistes sur les étudiants ?

La sélection des étudiants se fait certes par Parcoursup, mais l’un des facteurs de sélection, le plus discriminant, est l’engagement. Cela tend à favoriser des étudiants militants, immergés dans le monde associatif et politique. La diversité du recrutement en a pâti. On oublie aussi que le système tend désormais à sacraliser l’étudiant. Nombre de professeurs, pour conserver leur crédibilité, doivent faire preuve de prudence, voire de complaisance idéologique à l’égard des étudiants.

Et aujourd’hui, où en êtes-vous ?

Je travaille toujours à Sciences-Po Grenoble, mais mon cours a été supprimé faute d’étudiants. Je le regrette car je considère que ce sujet est aujourd’hui essentiel pour la société française. J’ai été placé pendant un temps sous protection policière suite à cette affaire. C’est une impression paradoxale. D’un côté c’est inquiétant, car cela vous rappelle la menace qui plane sur vous, mais de l’autre c’est très rassurant de voir arriver la cavalerie. D’autant que les gardes du corps sont souvent éminemment sympathiques et admirables. Sur un plan personnel, je n’ai pas flanché moralement, sans doute parce que je ne me suis jamais senti coupable de quoi que ce soit.


[1]. Le syndicat gauchiste mis en cause dans le climat délétère régnant à Sciences-Po Grenoble dont les agissements ont été dénoncés par le rapport de l’inspection diligentée par le ministère.

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Dysphorie de genre chez les enfants et les adolescents: haro sur les lanceurs d’alerte!

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Amber Far, une Anglaise qui, regrettant sa transition de femme à homme, a détransitionné en appelant à la révision des règles concernant la chirurgie de réattribution sexuelle CATERS/SIPA 01082646_000001

Des traitements hormonaux sont prescrits pour les jeunes convaincus d’être nés « dans le mauvais corps » sans considération sérieuse des bénéfices/risques et de la proportionnalité des soins. Résultat: leur corps est pathologisé pour le reste de leur vie. Ceux qui tentent de tirer la sonnette d’alarme sur les dangers de ce phénomène rencontrent une résistance acharnée de la part des transactivistes. Ces lanceurs d’alerte attendent la publication d’un rapport de la Haute Autorité de Santé qu’ils espèrent impartial.


La « dysphorie de genre » chez les enfants et adolescents fait couler beaucoup d’encre. Et il y a de quoi ! Très rares il y a encore quelques années, les demandes de transition ont littéralement explosé chez les mineurs : +5000% en vingt ans, selon certains observateurs. Il s’agit d’une véritable épidémie qui affecte enfants et adolescents, garçons et désormais majoritairement filles. Ces troubles sont les probables témoins du malaise croissant d’une jeunesse coincée entre des injonctions paradoxales, accablée par un environnement anxiogène, exposée aux violences et à la pornographie, déstabilisée par les confinements successifs, sursollicitée par les réseaux sociaux, abandonnée aux influenceurs et aux faux amis, privée d’accès à des soins psychothérapeutiques dignes de ce nom. L’emprise des réseaux sociaux dans les identifications trans explique sans doute en partie l’accroissement exponentiel de ces demandes par un effet de « contagion sociale ».

Devant un tel tableau, les réactions sont variées. Certains interprètent ces phénomènes comme une « libération de la parole » d’enfants « nés dans le mauvais corps ». Ils veulent déconstruire la binarité de la condition humaine et abolir l’assignation sexuelle au profit de la fluidité du genre. Ils font confiance à « l’autoidentification », un processus qui dépend uniquement du jugement de l’individu qui veut changer de genre. Ils appellent à organiser les demandes de transition, socialement et médicalement, avec une prise en charge psychologique réduite à un coaching de transition. Persuadés d’incarner la tolérance et le progrès, ils se nomment eux-mêmes « Transaffirmatifs ». D’autres contestent la naïveté de cette vision dualiste corps-esprit. Ils pensent que le déni de l’existence de deux sexes dans l’espèce humaine relève plus de la toute-puissance de la pensée que de la rationalité scientifique. Ils interrogent les nouveaux stéréotypes et enfermements sociaux sur lesquels débouche cette prétendue libération vis-à-vis du destin biologique. Soulignant la mobilité des identifications de genre dans l’enfant et l’adolescence, ils critiquent les prises en charge somatiques, axées sur les corps et non sur les esprits. Devant un malaise adolescent temporaire, ils ne veulent pas risquer des effets corporels définitifs. Ils se considèrent comme « Prudents ». Mais leurs détracteurs ne tarissent pas d’insultes à leur égard : « réacs », « fachos », « transphobes »… Devant un tel déluge de noms d’oiseaux, on ne sait où donner de la tête ! Essayons de la garder froide pour y voir un peu plus clair dans ce sujet difficile, qui est en train de devenir un véritable problème de santé publique.

Qu’il s’adresse à des enfants, des adolescents ou des adultes, le traitement « transaffirmatif » vise à valider le « ressenti » du patient qui souhaite changer de genre. Pour les enfants, le « Dutch protocol » (« protocole hollandais » en référence au pays où il a été mis au point) repose d’abord sur la prescription d’hormones : chez les 10-15 ans, des bloqueurs de puberté (des analogues de la LHRH) pour permettre une « pause » et éviter « l’agonie de la puberté » ; à partir de 15-16 ans, des hormones sexuelles « croisées » : testostérone pour une transition FtM (female to male), antiandrogène plus œstrogène pour une transition MtF (male to female). Dans notre pays la chirurgie de réassignation sexuelle est réservée aux adultes. À titre exceptionnel, des mastectomies peuvent cependant être pratiquées chez des jeunes filles mineures.

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Préconisée par l’autre parti (les Prudents), la psychothérapie cherche à expliciter le malaise du patient, à le situer dans sa dimension familiale, à traiter des co-mordibités sous-jacentes qui sont très fréquentes (jusqu’à 80% des jeunes) : troubles anxio-dépressifs, autisme et troubles du spectre autistique, schizophrénie, troubles obsessionnels compulsifs, anorexie, antécédents d’exposition à des violences physiques, morales et sexuelles, harcèlement… Elle vise une certaine réconciliation avec soi-même sans préjuger du genre que le jeune investira, tout en respectant le développement normal d’un être en devenir. Il n’y a donc aucune comparaison avec les funestes « thérapies de conversion » qui ont pu être imposées à certains homosexuels dans le but de « normaliser » leur orientation sexuelle.

Comment choisir entre ces deux approches ? La question ici n’est pas de s’opposer tout de go à un traitement et de se confier entièrement à l’autre, mais de peser avec soin le pour et le contre de chacun, en respectant deux principes : 1) apprécier le rapport bénéfice/risque, 2) évaluer la proportionnalité des soins. En matière de prescription thérapeutique (médicaments, interventions chirurgicales, psychothérapies, etc.), tout est une question « d’indication » : la raison pour laquelle on recommande telle ou telle technique. Par exemple, la mastectomie est l’ablation chirurgicale du sein. La technique est à peu près la même pour un sein cancéreux ou un sein normal chez une jeune fille s’identifiant comme garçon… Mais l’indication fait toute la différence : amputer un organe malade ou un organe sain, ce n’est pas la même chose ! Dans un cas, la mutilation, quoique regrettable, est nécessaire pour sauver la vie ; dans l’autre, elle apparaît comme au minimum disproportionnée par rapport au bénéfice attendu. Il faut donc juger le geste technique dans sa globalité, en rapportant les risques et séquelles du traitement aux risques et séquelles de la maladie sous-jacente. Comparer l’évolution (le devenir) avec et sans traitement, telle est la base de l’indication proportionnée du traitement en fonction de la maladie. Dans les cas où il n’y a pas de maladie objectivée, l’exigence d’innocuité du traitement est très grande. C’est ce qui se passe avec la chirurgie esthétique : s’adressant à des patients qui ne sont pas malades mais simplement insatisfaits de leur apparence corporelle, elle suppose non seulement une obligation de moyens mais aussi de résultats. Elle s’interdit de faire courir des risques – même si le patient, trop optimiste ou trop insouciant, le demande expressément. À l’opposé, il y a la cancérologie : face à des affections très graves, on y tolère des traitements aux nombreux effets secondaires. Ce n’est pas que le corps médical soit heureux d’imposer ces dangers et désagréments aux malades – il y a d’ailleurs une tendance en cancérologie à la « désescalade » pour s’adapter au mieux à la réalité des situations individuelles. Simplement, les risques thérapeutiques encourus paraissent proportionnés à la gravité de la maladie à traiter. 

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À noter qu’il ne suffit pas que le patient soit « demandeur » d’une thérapeutique pour que celle-ci soit effectivement indiquée. Même pour des adultes, il n’est pas facile d’évaluer pour soi-même le rapport bénéfice/risque. D’une part les connaissances scientifiques font défaut à la plupart des patients ; d’autre part, obnubilés par leurs problèmes présents, beaucoup négligent les évolutions à venir. Même correctement informés des bénéfices et risques des traitements, les patients ont souvent du mal à arbitrer entre bénéfices immédiats et risques futurs. Cette difficulté est encore plus grande s’agissant d’enfants, êtres en devenir à qui on ne peut pas reprocher de ne pas se projeter dans un destin d’adulte. « L’être adulte » est essentiellement différent de « l’être enfant », qui en est réduit à imaginer « ce que c’est d’être grand ». La vie sexuelle adulte en particulier, reste un mystère pour les enfants – et c’est heureux. Comment donc pourraient-ils engager en toute conscience des modifications irréversibles de leurs organes sexuels immatures ? Et ce, avant même d’avoir pu expérimenter les possibilités offertes par ces organes pleinement développés ?

Il faut ici décrire crûment la réalité : la prescription d’hormones dans un but de transition de genre expose à de nombreux risques et effets secondaires.

Pour les bloqueurs de puberté : perte de densité osseuse (ostéoporose), prise de poids, et bien sûr atrophie des organes génitaux restés au stade enfantin – ce qui est l’effet recherché, mais qui n’en est pas moins une mutilation aboutissant à un dysfonctionnement génital pouvant être définitif. Du fait du rôle des hormones sexuelles dans la maturation cérébrale, un risque cognitif est fortement suspecté. Le retentissement psychologique constitue aussi une importante prise de risque. Car il s’agit de priver un être humain d’une des phases les plus importantes de son évolution psychique : l’adolescence, phase de transformations et de maturation qui se produit sous l’impulsion du phénomène physiologique pubertaire. Enfin, il y a des effets sociaux : bloqué dans son développement physique et psychologique, le jeune se met peu à peu en décalage avec ses pairs, ce qui aggrave encore sa vulnérabilité. Alors qu’elle était censée être réversible à tout moment, la pause devient de fait une « voie à sens unique ». En témoignent les chiffres élevés de prescription d’hormones sexuelles croisées qui font suite aux bloqueurs de puberté (près de 95%).

Pour les hormones sexuelles croisées, prescrites à partir de l’adolescence et potentiellement au très long cours : prise de poids, hépatite, calculs biliaires, alopécie, acné ou sécheresse cutanée, risque cardiovasculaires, HTA, hypercoagulation (phlébite et embolie pulmonaire), agressivité, instabilité thymique, dépression, tumeurs bénignes et malignes ; atrophie vaginale, douleurs utérines, modification irréversible de la voix pour les FtM, atrophie testiculaire et impuissance pour les MtF  et risques cardio-vasculaires accrus ; et bien sûr pour toutes et tous, dysfonctionnement génital et stérilité.

Quant aux interventions chirurgicales, elles s’apparentent à de véritables mutilations qui impliquent, entre autres, la suppression des zones corporelles les plus érogènes. Nous ne parlerons pas ici de la chirurgie « du bas » (castration et reconstruction), interventions lourdes dont les résultats fonctionnels sont peu probants. Dans notre pays, ces interventions ne sont pas pratiquées chez les mineurs et sortent donc de notre sujet. Mais même la chirurgie « du haut » (mastectomie rebaptisée « torsoplastie ») est une amputation qui laisse cicatrices, douleurs, insensibilité et perte de fonction définitives.

Devant une telle liste de risques et d’effets secondaires, comment ne pas juger que chez les enfants et adolescents, le traitement transaffirmatif va à l’encontre des principes de rapport bénéfice/risque et de proportionnalité des soins ? Ce n’est pas que les jeunes présentant une véritable dysphorie de genre ne souffrent pas, de leur corps comme dans leuresprit. Mais l’hormonothérapie les expose à des risques importants pour des bénéfices douteux. Les bénéfices sociaux notamment (réduction de la suicidalité et intégration sociale harmonieuse) sont loin d’être prouvés. D’autre part, le très jeune âge des patients implique que le traitement, et les risques qui vont avec, sera poursuivi pendant très longtemps. Il s’agit en fait d’une médicalisation à vie, transformant un corps sain et autonome en un corps dysfonctionnel et dépendant, un corps que le traitement pathologise… pour toute la vie !

Dans l’indication très particulière de la dysphorie de genre de l’enfant, l’hormonothérapie est prescrite hors Autorisation de mise sur le marché. Les Prudents pensent que ce traitement expérimental ne devrait être envisagé que dans le cadre de protocoles de recherche stricts, avec toutes les précautions d’usage – notamment un diagnostic soigneusement élaboré au fil de nombreuses rencontres avec le patient et sa famille. La prescription d’hormones devrait rester exceptionnelle, envisagée seulement après épuisement de toutes les ressources non médicamenteuses. Le traitement non médicamenteux – pour parler clair, la psychothérapie, thérapie familiale comprise – étant à l’évidence bien moins dangereux que le traitement médicamenteux et chirurgical. Ce d’autant que les études les plus sérieuses montrent que la majorité de ces jeunes présentent des troubles psychiques sous-jacents. D’autre part, l’expérience prouve que la psychothérapie permet souvent aux enfants de passer ce cap difficile et de se réconcilier avec leur sexe de naissance : plus de 70% des cas se résolvent spontanément ou avec l’aide d’une prise en charge purement psychologique, ce qui évite la médicalisation à vie qui attend un grand nombre des jeunes soumis au traitement transaffirmatif.

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Par ailleurs, il faut souligner la fréquence croissante des « détransitions ». De plus en plus de jeunes adultes traités médicalement depuis l’enfance regrettent leur changement de genre. Ils expliquent alors que leur problème n’était pas lié à leur genre, mais à des pathologies psychiques qui n’ont pas été prises en charge correctement. Ces situations commencent à faire l’objet de procès, intentés contre les médecins et institutions accusés d’avoir précipité des transitions médicales voire chirurgicales.

Déjà plusieurs pays (Suède, Finlande, Grande-Bretagne, douze états des USA…), constatant les dangers et les limites de ces médicaments, font demi-tour dans le traitement de la dysphorie de genre de l’enfant et l’adolescent. Abandonnant le Dutch protocol, ils réglementent sévèrement la prescription d’hormones aux mineurs… quand ils ne les interdisent pas complètement, au nom d’un salutaire principe de précaution.

On l’a compris, les lignes ci-dessus ont été écrites du point de vue des Prudents. Des Prudents qui sont aussi des lanceurs d’alerte. Voici ce que nous voulons révéler au public : la prescription d’hormones à des enfants et des adolescents toujours plus nombreux, avant toute prise en charge psychologique approfondie, hors de toute Autorisation de mise sur le marché et de toute mesure, c’est le prochain scandale sanitaire qui plane sur notre pays. C’est une bombe prête à exploser, qui fera bientôt plus de bruit que l’affaire du Médiator !

Or, face à cette situation explosive, que constatent les lanceurs d’alerte, sidérés ? Que la résistance acharnée à leurs conseils de prudence émane d’associations censées représenter et défendre ceux-là même qui font l’objet de leur préoccupation – les personnes transgenres ! Nous sommes accusés de « transphobie », de « haine », de « thérapies de conversion »… Nos interventions dans les médias sont censurées… Nos conférences sont perturbées par des militants agressifs… Ceux parmi nous qui sont médecins sont traînés devant le Conseil de l’Ordre au prétexte de « charlatanisme » et de « désinformation médicale »…

Car en effet, dans l’affaire Médiator, les personnes en surpoids étaient bien « demandeurs » d’un traitement efficace. Certains poussaient pour que le benfluorex bénéficie d’une extension d’Autorisation de mise sur le marché depuis le diabète, son indication d’origine, vers l’obésité et même la simple surcharge pondérale. Comment pouvaient-ils savoir, les malheureux, que ce coupe-faim prétendument miracle était en fait un produit dangereux et même parfois mortel (entre 1000 et 2000 morts en France avant son interdiction en 2009) ?  Cependant, quand les révélations sur la toxicité du médicament ont commencé à percer, ils ne s’en sont pas pris aux lanceurs d’alerte. C’est au laboratoire qui commercialisait le poison qu’ils ont adressé leurs griefs, et à juste raison.

Il en va de la santé de milliers de jeunes en souffrance.

En vérité, les transactivistes qui nous attaquent ne représentent qu’eux-mêmes Par idéologie, ils étouffent la rationalité scientifique et tentent d’empêcher tout débat. Et en définitive, ils sacrifient des enfants fragiles à leur cause intransigeante.

La défense des plus vulnérables exige une vision plus élevée et plus désintéressée. Nous, lanceurs d’alerte sur le scandale de la médicalisation abusive d’enfants et adolescents s’interrogeant sur leur genre, demandons que les pouvoirs publics se saisissent de ce grave sujet.Nous attendons avec impatience le rapport de la Haute Autorité de Santé. Nous serons vigilants sur l’impartialité de ce rapport, que nous espérons libre de toute soumission à des groupes de pression. Il en va de la santé de milliers de jeunes en souffrance.

Norman Mailer, un centenaire par omission

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Norman Mailer, New York, 2003 © AP Photo/Kathy Willens/Sipa

Un des plus grands génies de la littérature américaine aurait eu 100 ans en 2023. Le silence qui entoure cet anniversaire n’a, hélas, rien de surprenant : à travers sa vie et son œuvre, Norman Mailer coche toutes les cases de la culture honnie par le wokisme.


Norman Mailer aurait eu 100 ans le 31 janvier 2023. Norman Mailer, ce nom vous dit quelque chose ? À vous, peut-être, mais pas à la majorité de nos contemporains. Mailer a pourtant connu en son temps une notoriété qui devait autant à son génie littéraire qu’à son art du scandale. Jusqu’à présent, le seul hommage médiatique a eu lieu sur Arte : la diffusion d’un documentaire (allemand) datant de 2021. Sinon, rien. Alors que se passe-t-il ? Est-ce parce qu’il y a trop de came, de femmes, d’alcool, de violence dans la vie et l’œuvre de ce sismographe qui a enregistré toutes les secousses de l’histoire américaine jusqu’à sa mort en 2007 ? L’explication serait courte. Après tout, Norman Mailer, sur le papier, aurait eu de quoi plaire à beaucoup de monde. Il était aussi une icône progressiste des années soixante, un de ces « gauchistes de Park Avenue » dépeints par Tom Wolfe. Pour comprendre les raisons de ce silence, de cette « vaporisation » orwellienne des deux côtés de l’Atlantique, une seule solution s’impose, toujours la même : revenir à l’œuvre.

Le style Mailer

Il faudrait peut-être imaginer, pour commencer, une scène à la Mailer. Disons une jeune femme qui prendrait un bain trop chaud. À côté d’elle, sur la céramique blanche, un verre de whisky. Elle aurait aussi, dans son sang, des molécules anxiolytiques pour dénouer ses muscles. Elle pleurerait un amour perdu. Elle se souviendrait alors des romans de Mailer parce qu’elle aurait bon goût en littérature. Elle relirait Le Parc aux cerfs (1955): « Où donc, en quel cimetière du ciel, reposent les mots d’amour des amants qui ont cessé de s’aimer ? » Et, plus loin, « mais Dieu, qui est le plus vieux des philosophes, me répond en son style sibyllin et désabusé : Regarde plutôt le sexe comme le corps du Temps, et le Temps, comme la naissance de rapports nouveaux. » La jeune femme serait-elle consolée ? Peut-être, même si Mailer n’a rien d’immédiatement consolant, ou alors, il offre une consolation d’une nature supérieure, parce qu’il arrive à nommer très précisément ce qui ne va plus. Le Parc aux cerfs est un roman d’amour qui se passe dans les milieux hollywoodiens en plein maccarthysme. Les « rapports nouveaux » apportés par le Temps sur lesquels Mailer parie, on comprend vite, aujourd’hui, qu’ils sont devenus, hélas, ceux d’un maccarthysme à l’envers, celui de l’idéologie woke qui ne supporte pas plus qu’un sénateur américain des années cinquante une autre vision du monde que la sienne et qui, comme lui, décide d’interdire toute dissidence en annulant ou en réécrivant et l’Histoire et les histoires. McCarthy inventeur de la cancel culture ? C’est évident. Norman Mailer « cancelé » pour son centenaire ? On se rapproche.

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Dès son premier roman, Les Nus et les Morts (1948), sur la guerre du Pacifique à laquelle il a participé, Mailer donne un coup de pied dans le ventre de la littérature ; il n’admet pas qu’elle soit restrictive, qu’elle ne soit que littéraire. Le jeune juif de Brooklyn a failli s’enfermer dans la légende du grand aîné, Hemingway : proclamations de virilité, goût prononcé pour l’alcool et les promenades mélancoliques sur la rive gauche de la Seine…

Mais il avait mieux à faire. Mailer a décidé une fois pour toutes de pratiquer un art du forage : tous ses livres, une petite trentaine traduits en français, sont une plongée dans des obsessions typiquement américaines, le sexe refoulé, puis libéré, puis de nouveau refoulé, la paranoïa généralisée et le Spectacle triomphant, pour reprendre le concept de Debord, c’est-à-dire la disparition de la réalité derrière sa représentation, ce qui amène aujourd’hui à confondre les mots pour dire un acte et l’acte lui-même, et conduit des organisateurs d’un festival de BD à interdire un auteur qu’ils avaient pourtant choisi comme invité d’honneur parce que celui-ci a publié des albums prétendument « pédophiles ». Évidemment, la mondialisation aidant, les obsessions dénoncées par Mailer sont devenues les nôtres : les mythes, comme les modes, franchissent les océans de plus en plus vite, et tout cela gifle désormais l’Europe, cette vieille dame qui croyait que son expérience et son sens de la mesure la mettaient à l’abri.

Un auteur pas vraiment « déconstruit »

L’œuvre de Mailer nous rappelle qu’un grand écrivain est celui qui inflige une blessure narcissique irréparable à son lecteur. Un lecteur, un vrai lecteur, était jusqu’à une date récente celui qui, précisément, désirait cette blessure narcissique et voulait être soumis à un véritable orage de la perception. On imagine sans mal que ce désir est inconcevable, aujourd’hui, pour des gens qui ne peuvent plus lire le mot « gros » dans un livre de Roald Dahl et demandent des avertissements (trigger warning en bon français) sur la quatrième de couverture comme en haut des séries Netflix.

Pourtant, Norman Mailer était à première vue un auteur tout à fait rassurant. Et la multiplicité de ses centres d’intérêt aurait pu lui nuire tant est répandu l’adage qui veut qu’un grand écrivain écrive toujours le même livre. Mais Mailer a parlé de tout : de la guerre, du sport, du cinéma dans Mémoires imaginaires de Marylin (1973), de la conquête de l’espace dans Bivouac sur la Lune (1970), de la peine de mort dans le monumental Chant du bourreau (1979), même si, en racontant l’histoire vraie de Gary Gilmore, un détenu qui réclame et obtient d’être exécuté, il pose le problème sous un angle peu orthodoxe. Mailer a même écrit un roman historique, apparemment grand public, avec La Nuit des temps (1979), qui se passe dans l’Égypte des pharaons. Aucune répugnance non plus à employer les archétypes de la fiction américaine comme le récit de chasse ou le roman noir dans Pourquoi sommes-nous au Vietnam ? (1967) et Les vrais durs ne dansent pas (1984).

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Alors pourquoi une telle onde de choc sur les lecteurs de son temps quand ils découvrent ces romans qui suivent les sentiers balisés de genres littéraires connus ? C’est que Mailer, pour reprendre le titre d’une vieille série américaine, semble parler en permanence « d’au-delà du réel ». Dans nos sociétés climatisées, l’ensemble des pulsions humaines sont occultées et refoulées. Tout va donc s’exprimer de manière souterraine, irrationnelle et, de ce fait, d’autant plus dangereuse.

Le monde contemporain, selon Mailer, est devenu le royaume du secret derrière la fausse transparence démocratique. Le FBI dans Rivages de Barbarie (1951) et la CIA dans l’extraordinaire Harlot et son fantôme(1992) sont une des incarnations de ce secret et les bêtes noires de Mailer comme, d’ailleurs, de son contemporain Philip K. Dick et quelques autres grands de la littérature américaine, Robert Littell, notamment, dans La Compagnie.

Mailer, par quoi commencer ?

À ce titre, Un rêve américain (1965) est un concentré de l’univers mailérien et nous conseillons vivement à qui veut découvrir notre auteur de commencer par celui-ci. Dans les hautes sphères du pouvoir et du show-biz, les personnages et notamment l’avocat Rojack n’ont qu’une solution pour vaincre leurs adversaires : concentrer, le plus souvent inconsciemment, toute l’énergie négative dont ils sont capables pour déclencher suicides et cancers. Ou comment, dans un club de jazz enfumé de Harlem, Mailer-Rojack invente, avec tout de même quelques années d’avance, les maladies psychosomatiques : « Dans le cadavre que je vis, la folie était entrée dans le sang. Les leucocytes gonflaient le foie, la rate, le cœur démesurément grossis. »

On a vu mieux pour être aimé dans les années 2020 où le maître-mot est – déjà – la bienveillance. Pour arranger son cas, Mailer fait de toutes les femmes des Lilith mortifères auxquelles il convient de se brûler pour renaître de ses cendres, comme il l’explique dans Prisonnier du sexe (1971), un livre écrit en réponse à La Politique du mâle de Kate Millett, icône du néo-féminisme. Dans cet essai célèbre, Mailer se retrouve aux côtés de D. H. Lawrence et de Henry Miller comme les pires représentants de la littérature patriarcale hétérosexuelle. On ne parlait pas encore de masculinisme, mais c’était tout comme.

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Les choses, maintenant, sont claires. Ne pas parler de Norman Mailer, le « canceler » par omission, est encore le meilleur moyen d’éviter le tribunal des réseaux sociaux, et de faire le dos rond pour ses éditeurs.

Mailer, pourtant, nous apprend à survivre en milieu hostile et à répondre à cette époque timorée et anémiée : par l’excès, le mauvais goût, le délire et une poésie sauvage et précise. La rédemption est à ce prix. Mailer l’avait magnifiquement compris : « J’avais grandi, j’avais survécu, j’étais capable de donner à ces parties de moi-même qui valent mieux que moi, et je pouvais trouver une consolation dans le sentiment que je commençais d’appartenir à ce monde d’orphelins qui est celui des artistes, des créateurs. »

Reste donc à le lire, et le relire, envers et contre tous.

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Le festival de Kahn

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Jean-François Kahn. Photo : Hannah Assouline

Dans son nouvel essai Comment on en est arrivé là (L’Observatoire), le journaliste Jean-François Kahn s’inquiète de la montée des extrêmes. Il pense que l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen conduirait le pays à la guerre civile.


Qu’on ne se méprenne pas ! On l’aime bien, Jean-François Kahn. On l’a connu patron de presse audacieux, courageux, suffisamment iconoclaste et hors mode pour mériter estime et reconnaissance. Et puis il y a chez lui une impressionnante faculté à brasser des idées, à les exposer et les défendre avec une ardeur touchante, communicative, cela en fourbissant une réthorique de vive passion où la gestuelle le dispute au verbe. Ça pétille, ça fuse, ça pétarade, ça flingue. Un vrai festival. Qu’on soit d’accord ou non, qu’importe au fond ! La vivacité d’esprit et la vigueur du plaidoyer ou du réquisitoire – c’est selon – suffisent à notre plaisir.  Or, voilà que, auteur fécond – une autre de ses vertus -, notre homme vient de publier un nouvel essai. Son titre : Comment on en est arrivé là. Sous-titre : « Quand la tentation des extrêmes risque de conduire à la guerre civile ». Le thème de l’ouvrage se trouve clairement résumé dans les envolées des interviews de l’auteur: « Si on continue à jouer aux cons, Marine Le Pen sera élue en 2027. » voilà la prédiction assenée de plateau en plateau. Perspective apocalyptique, on s’en doute, selon notre auteur. Ce qui le dévore d’angoisse ce n’est donc pas tant que la France soit en passe de rivaliser avec la Colombie quant à la prospérité des cartels de la drogue, que des gosses de quinze ou seize ans se fassent fumer à la kalachnikov jusque dans des préfectures ou des chefs-lieux de canton jusqu’alors assez paisibles et plutôt portés sur l’apéro merguez et la célébration annuelle du Beaujolais nouveau. Ce n’est pas non plus que la Mecque du libre esprit à la française – je parle ici de La Sorbonne – renonce à être ce qu’elle a à être au point de reculer de trouille devant le spectre immonde de l’obscurantisme woke. Ce n’est pas davantage que ce soit à des drag queens qu’on aille s’en remettre dans certaines médiathèques pour évoquer devant des enfants de trois à six ans ce qu’est la famille. La famille remasterisée transgenre et à géométrie extrêmement variable, bien entendu. Ce qui effraie notre JFK à nous n’est pas non plus que la  crétinisation de masse conduise à tabasser un bienfaiteur de l’humanité – je tiens en effet les chocolatiers, tous sans exception, pour des bienfaiteurs de l’humanité – au motif qu’il est un peu parent de l’épouse du chef de l’État. Bref, les raisons d’être horrifié ne manquent pas. On peut même dire qu’on nous en invente une nouvelle chaque matin, chaque midi et chaque soir, ou peu s’en faut. La liste en serait interminable. Mais selon l’ouvrage en question, l’horreur suprême serait donc de céder à la tentation des extrêmes et de propulser le RN à la tête de l’État. Il en résulterait, prédit l’auteur, un climat de guerre civile. Il est vrai que ce serait dommage tant est serein et réjouissant celui dans lequel nous plonge jour après jour l’extrême centre actuellement aux affaires.

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Immigration: les bonnes recettes de Vanessa Krycève

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Vanessa Krycève, fondatrice de l'association Le Recho, au micro de France Inter. D.R.

Un débat « apaisé » avec 150 citoyens tirés au sort, un processus « démocratique, apartisan et fiable » avec experts et chercheurs: c’est le merveilleux programme que nous promet Vanessa Krycève pour cette convention citoyenne sur la question migratoire qu’elle appelle de ses vœux. Mais, le profil de cette entrepreneuse engagée incite à la méfiance face à ce qui pourrait être une entourloupe pseudo-démocratique…


En réaction à la loi-immigration portée par Gérald Darmanin, l’idée d’une convention citoyenne sur la migration est apparue dans les médias. Le 27 avril, Le Monde publiait une tribune de quarante associations qui défendait ce projet1. Le même jour, la porte-parole de ce collectif, Vanessa Krycève, était interrogée sur France Inter2. Pour rassembler les partisans de ce projet, un site internet a même été créé3 et une pétition, qui a recueilli plus de 36 000 signatures, a été lancée sur Change.org4. Une rapide consultation du site internet donne un avant-goût de l’orientation idéologique que pourrait avoir cette convention. En effet, parmi les personnalités soutenant le projet on retrouve Cédric Herrou (l’agriculteur pro-migrants) ou Olivier Legrain (un millionnaire qui a créé un fonds de dotation pour financer l’accueil de migrants)5. Du côté associatif, on retrouve, entre autres, deux collectifs ancrés à l’extrême gauche : Utopia 56 et la Ligue des Droits de l’Homme.

Donner un vernis démocratique à des propositions politiques rejetées par les Français

Le désir de la majorité des Français est connu depuis des années concernant la question migratoire : sondages après sondages, enquêtes après enquêtes, second tour du RN après second tour du RN. Mais cette volonté de restriction drastique de l’immigration ne plaît pas à Vanessa Krycève et consorts. L’objectif de ces derniers est d’empêcher le désir majoritaire sur ce sujet de se matérialiser politiquement. Et tout ça au nom de la démocratie ! Mais comment faire ? Comment faire pour donner un vernis démocratique à des propositions politiques rejetées par la majorité des Français ? Comment les duper tout en faisant accroire que la démocratie s’est exprimée ? Bon sang mais c’est bien sûr : une convention citoyenne sur la migration ! Pour s’en convaincre, il suffit d’écouter un peu Vanessa Krycève. Le 27 avril, elle a exposé, dans une vidéo de 20 minutes mis en ligne par le média Blast6, les raisons pour lesquelles une telle convention doit se tenir et la manière dont elle serait organisée.


Vanessa Krycève se présente comme entrepreneur dans le milieu de l’économie sociale et solidaire. Plus précisément elle indique avoir « fondé un projet qui œuvre pour un accueil digne des réfugiés et une entreprise qui accompagne les personnes réfugiées dans l’insertion professionnelle par la cuisine ». Cet élément biographique nous permet de la situer idéologiquement. Une marge d’erreur est toujours possible mais prenons le risque de prétendre qu’elle est plus proche de SOS Méditerranée que de Reconquête. Elle indique qu’elle aimerait voir advenir une « convention citoyenne sur la migration pour qu’il puisse y avoir un débat apaisé et serein sur le sujet migratoire ». Ce que ces gens appellent un débat « apaisé » c’est un débat auquel la droite ne participerait pas, car il est bien connu que c’est la droite qui hystérise le débat et certainement pas la gauche qui hurle à l’incitation à la haine à chaque fois que le mot « expulsion » est prononcé ou que l’expression « grand remplacement » est employée.

Après nous avoir expliqué qu’une convention citoyenne est un « outil démocratique », coordonné par le CESE, qui va permettre à 150 citoyens tirés au sort de débattre, Vanessa Krycève prétend que « la migration est un sujet très peu connu de l’ensemble de la population » et regrette que ce sujet soit « récupéré pour en faire des grandes polémiques ». Sujet « peu connu » dit-elle ? Curieux point de vue, ce sujet est en réalité bien connu de la majorité des citoyens ; il faut dire qu’en 2023 il est difficile de passer à côté. Des millions de Français éprouvent chaque jour ou subissent souvent ce qu’on appelle désormais le vivre-ensemble, et les difficultés qu’il charrie. Ils sont très au fait de cette réalité. 

Balisage idéologique 

Pour illustrer les « grandes polémiques » dont parle Madame Krycève, plusieurs extraits vidéos ont été choisis, tous en rapport avec l’affaire Lola, fillette française de 12 ans tuée à Paris par une Algérienne sous OQTF en octobre dernier. On y entend des responsables politiques de droite, comme Eric Zemmour, incriminer la politique migratoire du gouvernement comme responsable du drame… En parlant de « grandes polémiques » Madame Krycève et d’autres cherchent à disqualifier l’utilisation politique de faits, notamment de faits divers, dont ils regrettent la médiatisation. La mécanique est bien huilée. Dans un premier temps on cache le réel dérangeant, et lorsque, ce qui est le cas de temps en temps, ce réel dérangeant bénéficie d’une exposition médiatique, on s’emploie à le relativiser ou le minimiser. « Une convention citoyenne serait un bon moyen de faire de l’éducation populaire » avance Mme Krycève. On y arrive enfin. La volonté de ces militants se fait jour petit à petit. La convention citoyenne ne sera rien d’autre qu’un camp de rééducation, dans lequel les citoyens tirés au sort seront abreuvés d’un prêchi-prêcha immigrationniste qu’ils devront apprendre par cœur et recracher sans faute. Vanessa Krycève déclare ensuite que les participants seront accompagnés et éclairés par « des experts, des historiens, des sociologues, des démographes, des associations, des ONG, des personnes elles- mêmes issues d’un parcours migratoire, des patrons d’entreprises ». Tout semble déjà prévu pour baliser idéologiquement cette convention. Tous les chantres de l’immigration, bien dissimulés derrière leur titre d’experts, seront présents pour enseigner la bonne parole. L’historien viendra expliquer que l’immigration a toujours existé et qu’il est inutile de s’y opposer. Le sociologue discourra sur la montée de l’extrême droite en France et en Europe. Le démographe, Hervé Le Bras ou un autre Lyssenko probablement, prétendra que le grand remplacement est un fantasme et qu’il n’y a pas plus d’immigration aujourd’hui que sous Henri IV. L’idéologie des ONG et associations, comme Utopia 56 ou la LDH qui soutiennent la convention, est notoire; il n’est pas nécessaire de s’y attarder. Et enfin, les patrons d’entreprises, comme Thierry Marx7, viendront expliquer qu’ils manquent de main d’œuvre et qu’il faut vite régulariser des milliers de sans-papiers !

Vanessa Krycève a le culot de nous présenter cette convention citoyenne de rêve comme un « processus apartisan et fiable », tout en évoquant les « gardes fous et lignes rouges qu’on doit poser ». Il ne faudrait surtout pas que ça dérape. Il ne faudrait surtout pas que les participants deviennent incontrôlables à l’instar d’un fleuve qui sortirait de son lit. Au contraire, il faut les endormir ces braves gens. Ce qui explique les « lignes rouges », élément indispensable tel un cordon sanitaire pour empêcher toute idée nauséabonde d’émerger. Le peuple français se retrouve une nouvelle fois pris en étau entre d’un côté un gouvernement, qui à travers un énième projet de loi sur l’immigration (le 22e en 30 ans) lui fait miroiter une baisse de l’immigration qui n’adviendra jamais et de l’autre des associations, comme celles derrière cette idée de convention, qui s’opposent au souhait de la majorité en militant pour que la France accueille toujours plus d’étrangers.

Si vous n’êtes toujours pas convaincus par l’idée que ces gens de gauche tentent de mettre sur pied une entourloupe d’apparence démocratique sur le sujet de l’immigration, entourloupe qui porte le nom de convention citoyenne, voici un petit florilège des meilleures pensées de Vanessa Krycève :

« L’appel d’air est un fantasme »
« L’appel d’air est une aussi grosse fantaisie que le grand remplacement »
« La migration est un fait, comme le réchauffement climatique est un fait »
« La France qui historiquement est une terre d’accueil recule progressivement et accueille de moins en moins »
« Un référendum sur l’immigration c’est une idée d’extrême droite »

Apartisan et fiable, on vous dit !


1 « Une convention citoyenne sur la migration et l’intégration nous paraît pertinente » (lemonde.fr)

2 Vanessa Krycève : « Il est temps d’avoir un débat citoyen éclairé sur la question » de l’immigration

– YouTube

3 Pour Un débat Apaisé (pourundebatapaise.com)

4 Pétition · Immigration : donnons enfin la parole aux citoyens ! · Change.org

5 Qui est Olivier Legrain, le millionnaire qui met sa fortune au service des migrants ? (sudouest.fr) Fonds de dotation | RIACE France

6 FACE À LA HAINE ET AU FANTASME : UNE CONVENTION CITOYENNE SURL’IMMIGRATION – YouTube

7 “Arrêtons l’hypocrisie sur l’immigration” – Thierry Marx – C à Vous – 16/12/2022 – YouTube

Villerupt: on a tous droit à une 140ème chance de tuer?

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Samedi dernier, à Villerupt, une fusillade a fait cinq blessés dont trois grièvement, sur fond de trafic de stupéfiants. L’auteur présumé des faits, Abdelkrim B, issu d’une famille de cinq enfants dont quatre sont connus pour des affaires de vols, de violences et de trafics, a déjà été impliqué dans près de 140 affaires judiciaires, condamné des dizaines de fois pour violences aggravées, vols aggravés, détention de stupéfiants, etc, et sortait de prison depuis à peine un mois. Cas d’école de l’effondrement de la chaîne pénale française.


Le maire (PCF) de Villerupt a beau parler d’un manque d’effectifs policiers dans sa commune, ce n’est pas le sujet. Le suspect a déjà été condamné à de très nombreuses reprises, ce qui veut dire qu’à de très nombreuses reprises la police a enquêté, l’a arrêté, et l’a conduit devant le tribunal avec assez de preuves pour qu’il soit condamné. Autrement dit la police a fait son travail, et même si son action est sans doute perfectible, les chiffres sont parlants : la police a très bien fait son travail. Le maillon faible de la chaîne pénale est ailleurs.

Condamné à plus de trente peines, récemment sorti de prison où « depuis qu’il a seize ans il ne fait que des allers-retours ». De toute évidence, les sanctions infligées à ce multirécidiviste ne l’ont pas dissuadé de persister dans ses activités délinquantes, et surtout, alors que sa détermination à vivre de trafics et de violence était bien connue, ne l’ont pas mis hors d’état de nuire. Là est le fiasco.

Faut-il en accuser l’institution judiciaire et les magistrats ? Oui, en partie. Le noyautage de la magistrature par des militants d’extrême-gauche qui se croient propriétaires du pouvoir judiciaire, alors qu’ils n’en sont que délégataires, et l’utilisent au profit de leur idéologie et certainement pas pour le bien commun, est connu depuis longtemps. Et la complaisance de la majorité des magistrats envers ces activistes, pour ne pas parler d’une atmosphère de sympathie envers leur idéologie, est évidente. Hervé Lehman, ancien juge d’instruction, y a consacré un excellent livre : « Soyez partiaux ! Itinéraire de la gauche judiciaire ». Mais on aurait tort de s’arrêter là.

Car enfin ! Qui crée les lois qu’instrumentalisent les « petits juges rouges » ? Qui laisse ces magistrats disciples d’Oswald Baudot trahir leur mission au nom de la « culture de l’excuse » et de leur militantisme ? Qui ne cesse de mettre des bâtons dans les roues de ceux parmi les magistrats qui se soucient sincèrement de la sécurité des innocents au lieu d’être obsédés par les droits des seuls coupables ? Les élus. Le Parlement. Les gouvernements qui se succèdent depuis des décennies. Par idéologie, on veut éviter l’emprisonnement. Par idéologie, mais aussi par intérêt, on empile les lois et chaque « simplification » voit le formalisme pénal devenir toujours plus chronophage, aboutissant à l’engorgement des services d’enquête. Aujourd’hui, la principale utilité du Code de Procédure Pénale est d’empêcher l’application du Code Pénal !

Le maire de Villerupt interpelle le ministre de l’Intérieur alors qu’il devrait s’en prendre au garde des Sceaux – et à tous ses prédécesseurs. LREM/Renaissance n’est pas responsable des décennies qui ont précédé son arrivée au pouvoir – mais est pleinement coupable de n’avoir rien fait depuis six ans pour remédier à la déliquescence de l’institution judiciaire.

Les solutions existent et sont connues. Au lieu de prêter l’oreille aux auteurs du « mur des cons », tout garde des Sceaux devrait commencer par lire Thibault de Montbrial, Maurice Cusson, Hugues Lagrange, Maurice Berger, les études de l’Institut pour la Justice qui tous parlent de la nécessité absolue de sanctions dissuasives (donc douloureuses pour le délinquant), systématiques, rapides et certaines – alors qu’aujourd’hui, d’un tribunal à l’autre, d’un juge à l’autre, les écarts constatés relèvent d’avantage de l’arbitraire aléatoire que d’une quelconque idée de justice. Rétablir les peines planchers, garantir l’exécution effective des peines prononcées, rendre à l’emprisonnement toute sa place et construire des prisons….

Tout garde des Sceaux devrait aussi lire les synthèses de l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie, n’en déplaise à ces médias qui se gardent bien d’évoquer le nom d’Abdelkrim B mais insistent sur le fait qu’il est né à Villerupt…. Tous les immigrés ne sont évidemment pas délinquants, et tous les délinquants ne sont évidemment pas immigrés ni issus de l’immigration, mais la surdélinquance de certaines immigrations (on ne parle clairement pas ici de nos concitoyens d’origine Vietnamienne….) est un élément central du problème et doit, impérativement, être prise en compte au plan politique. A Villerupt, et plus encore à Fameck où a été retrouvée la voiture du tireur, l’extrême violence de type mafieux, les règlements de compte claniques et le « halal way of life » avancent main dans la main.

Mais hélas ! Le macronisme n’a de cesse de faire méthodiquement le contraire de ce qu’il faudrait, au point que l’on pourrait presque croire l’ensauvagement voulu…. Après tout, un peuple habitué à raser les murs et baisser la tête devant la racaille aura bien du mal à trouver la force de dire « non » à ceux qui le privent petit à petit de sa souveraineté. Ibn Khaldoun (que même les bénéficiaires du Fonds Marianne auront du mal à accuser de « complotisme ») a tout dit à ce sujet il y a des siècles, le lecteur en trouvera ici un résumé que j’espère ludique, et pourra s’il souhaite l’approfondir se référer aux remarquables études de Gabriel Martinez-Gros.

Les magistrats sont responsables de la manière dont ils appliquent les lois, et dont certains d’entre eux l’instrumentalisent impunément, responsables de ne pas assez dénoncer cette instrumentalisation et les évolutions législatives qu’ils savent néfastes, mais ils ne font pas les lois. Quand celles-ci accordent plus de prix aux droits des coupables qu’à ceux des victimes, quand elles encouragent sans cesse les remises de peine, imposent des justifications interminables à toute décision qui pourrait faciliter l’enquête sous prétexte de garantir les « libertés » des suspects, ce sont nos élus les responsables. Face à cette procédure pénale décidément toujours faite pour protéger les criminels, il y a une solution non pas simpliste mais simple : revenir au Code de Procédure Pénale des années 90.

Avant l’introduction massive de la procédure accusatoire anglo-saxonne dans notre procédure traditionnellement inquisitoire, c’est-à-dire soucieuse avant tout de vérité objective, ce qui explique que les enquêteurs, le Parquet et les juges d’instruction instruisent « à charge et à décharge », là où le droit anglo-saxon vise à arbitrer entre des intérêts rivaux. Un exemple : DSK, reconnu coupable de viol (je ne me prononcerai pas sur l’effectivité de sa culpabilité, n’ayant pas les éléments pour juger), n’a pas été incarcéré puisqu’un arrangement financier a été trouvé avec sa victime. Pour la tradition anglo-saxonne, basée sur l’ancien wergeld, le « prix du sang » que le clan du coupable verse au clan de la victime, pour cette procédure accusatoire que l’UE voudrait imposer partout, tout va bien. Pour notre droit imprégné de tradition romaine et centré sur l’intérêt général, cela revient pour un homme fortuné à pouvoir s’acheter un « permis de violer », et c’est intolérable.

Et ne laissons pas la gauche pousser ses habituels cris d’orfraie en invoquant le « retour des heures les plus sombres ». La France des années 90, avant la loi Guigou de juin 2000 et la création du Juge des Libertés et de la Détention, n’avait rien d’un état policier. Même dans les années 80 nous étions un état de droit, où il ne faisait pas moins bon vivre qu’aujourd’hui, au contraire.

Dans l’urgence, et vu l’état catastrophique de la réponse pénale actuelle il y a urgence, la seule mesure réaliste et raisonnable est d’identifier un tournant (la loi Guigou n’est qu’une possibilité parmi d’autres) et de reprendre à l’identique le Code de Procédure Pénale tel qu’il était juste avant ce tournant. Puis de briser l’hégémonie culturelle de la « doctrine Baudot », en particulier à l’ENM, et de soutenir fermement ceux parmi les magistrats qui sont réellement au service du bien commun et de la sécurité de tous. Ensuite, et seulement ensuite, calmement, d’examiner à nouveaux frais toutes les évolutions législatives ultérieures au tournant identifié, au regard de leurs conséquences désormais connues grâce au recul des années, en débattre, de choisir celles qu’il serait bon de garder, et bien sûr de proposer d’autres innovations si nécessaire. Mais des innovations pragmatiques et non idéologiques, des innovations dont l’objectif serait non plus de donner des armes aux criminels pour se défendre des forces de l’ordre, mais tout au contraire de donner des armes aux forces de l’ordre pour défendre les honnêtes gens contre les criminels – et de rappeler à la magistrature que son rôle est d’appliquer les lois, et non de les instrumentaliser pour « corriger » ce qui lui déplaît dans la société. Tout l’inverse de ce que proclamait Oswald Baudot, en somme.

Et la responsabilité de cette remise en ordre, la responsabilité la plus lourde et la plus cruciale, est celle des politiques.

Antifas: une passion française?

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Rennes, le 15 avril 2023. © Justin PICAUD/Sipa

En France, les antifas bénéficient d’un régime de faveur. Soutenus par la presse bien-pensante et couvés par les intellos nostalgiques de leurs années Mao, ces guérilleros luttent ouvertement contre l’autorité : l’État et sa police. S’appuyant autant sur la violence que sur la communication, ils livrent une guerre psychologique.


En France, pays centralisé à la gouvernance verticale et à l’esprit cartésien, on a du mal à comprendre les antifas, organisation anonyme, sans structure hiérarchique et sans manifeste politique explicite. Ces nouveaux révolutionnaires représentent une rupture par rapport au dirigisme robespierriste ou léniniste des extrémistes de gauche du passé. La France est néanmoins devenue une terre d’élection pour les antifas qui ont su marier les traditions anticapitalistes autochtones et des influences absorbées de l’étranger. Les origines de ces groupuscules se trouvent dans les bandes de « chasseurs de skinheads » des années 1980 et 1990. Plus structurés après 2000, ils importent des aspects de l’antifascisme allemand, notamment le logo antifa, combinant les drapeaux rouge et noir, et la tactique du black bloc. Ce terme désigne, non une organisation, mais un certain comportement dans les manifestations : port de vêtements noirs et de cagoules qui cachent l’identité des acteurs, manœuvres coordonnées qui maximisent l’efficacité d’actions violentes. Cette tactique a fait ses preuves au cours des protestations altermondialistes au sommet de l’OMC à Seattle en 1999, ainsi qu’au sommet du G8 à Gênes en 2001. Le premier groupe français à s’appeler antifa est l’Action antifasciste Paris-Banlieue (AFA P-B), créé entre 2007 et 2009. C’est à partir de la contestation de la loi Travail en 2016 que les groupuscules hexagonaux perfectionnent leur capacité à exploiter les grandes manifestations pour se mettre en avant et affronter les forces de l’ordre, notamment en se constituant en cortège de tête des défilés. À la différence des « casseurs », qui sont des opportunistes attirés par le pillage, les antifas dégradent les façades des entreprises et des banques en tant que symboles du capitalisme. À partir des 2017, les antifas américains apportent à leurs collègues français la doctrine wokiste et leur offrent l’exemple d’un réseau géographique à très grande échelle, d’une série de violences spectaculaires dirigées contre les institutions étatiques et de la campagne la plus développée pour couper le budget des forces de l’ordre. Derrière le désordre apparent des actions entreprises par les différents groupuscules antifas en France, il existe un projet commun. Plus inquiétant encore, ils ne sont pas marginalisés, mais font partie de tout un écosystème dédié à ce projet[1].

Une indiscipline disciplinée

Le principe d’organisation des antifas ne passe pas par l’adhésion formelle. Il n’y a pas d’encartés, mais des « bandes de potes » ou des groupements « affinitaires ». Les affinités en question sont suffisamment fortes pour inspirer une loyauté et une compréhension mutuelles hors du commun. Un site antifa, La Horde, affiche une liste de 62 groupes implantés dans les villes principales de France. Le nombre des militants semble en progression constante : de 1 500 en 2019, il passe à 2 500 en 2021. Pour certains événements, leurs rangs peuvent être gonflés par des renforts venus de l’étranger. Les antifas sont plutôt jeunes : la moyenne d’âge serait de 29 ans. Pour la plupart, ils sont blancs et 75 % sont des hommes. Ils recrutent parmi les lycéens et les étudiants, mais ne seraient pas tous des « fils de bourge ».

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Cette structure informelle reflète un changement radical par rapport à leurs ancêtres des années 1970-1990 qui s’organisaient de manière militaire pour réaliser assassinats et enlèvements, braquages de banques et attentats à la bombe. Ce changement a été codifié en France par la revue anonyme Tiqqun, dont deux numéros ont été publiés en 1999 et 2001. Un texte, dont un des auteurs serait Julien Coupat, le suspect principal dans l’affaire dite de Tarnac, préconise de remplacer la guerre contre le pouvoir actuel par « une guérilla diffuse ». Citant l’exemple des black blocs de Gênes, il recommande de confondre les autorités, toujours à la recherche de la main d’une seule organisation centralisée derrière un petit nombre d’actions criminelles de haute intensité, en les confrontant à « une multiplicité de foyers comme autant de failles dans la totalité capitaliste ». Le même auteur serait derrière le livre  L’insurrection qui vient, publié par un « Comité invisible » en 2007, qui précise : « Les Organisations sont un obstacle au fait de s’organiser. » Entre les deux textes, l’arrivée des plateformes en ligne a donné aux nouveaux réseaux ultra-gauchistes une efficacité inédite avec deux avantages à la clé. D’abord, ils paraissent comme une hydre à cent têtes : inutile de dissoudre un groupe, un autre le remplacera. Ensuite, il y a la force d’une entente tacite. Andy Ngo, le spécialiste américain des antifas, m’a expliqué que, en 2022, après la décision de la Cour suprême renversant Roe v. Wade, les antifas ont lancé une vague de terreur à travers les États-Unis, ciblant les organisations opposées à l’avortement, dont les bâtiments ont été incendiés, vandalisés ou tagués avec des menaces. Pour ce faire, il a suffi que les réseaux publient leurs noms et adresses sans autre consigne. Gilles Kepel a forgé le concept de « djihadisme d’atmosphère » : on pourrait parler ici d’« antifascisme d’atmosphère ». Pendant la période des protestations contre la loi sur les retraites, les antifas ont relayé sur leurs comptes Twitter des « flyers » au format identique annonçant des rendez-vous à tel endroit, à telle date. Par exemple, Antifa Lyon a annoncé : « RDV 13 avril 13h30 place Lyautey ». Bilan : 400 individus particulièrement violents dans le cortège des manifestants, cinq interpellations, trois manifestants et 12 policiers blessés. Les mêmes réseaux partagent des appels à témoins contre la police et des appels à dons pour payer les frais d’avocat des antifas arrêtés. En mars, une revue communiste, Contretemps, a déploré l’absence de coordination dans les efforts pour contrecarrer la loi sur les retraites. Normal : les antifas ont un tout autre objectif.

Stop the cops !

L’idéologie qui inspire ces réseaux est nébuleuse. Ils sont pour l’immigration, l’écologie, la Palestine, et contre le capitalisme, le racisme, l’islamophobie et le sexisme. S’ils combattent le fascisme, ce n’est pas seulement celui de l’extrême droite, car toute la société actuelle est fasciste à leurs yeux. Plus concrètement, les antifas entretiennent un culte de la violence maîtrisée et ciblée. Ils justifient ce culte par la nécessité de répondre à trois formes de violence préexistantes : celle de l’extrême droite, celle de la police et celle – dite « sociale » – inhérente à tout le système capitaliste. Se battre contre leurs homologues néonazis permet de s’aguerrir et renforcer l’esprit de corps, mais c’est surtout un alibi pour leur agressivité. Se battre contre la violence diffuse dans la société est très ambitieux : vandaliser quelques enseignes commerciales ne fera pas tomber le capitalisme.

Affrontement entre des black blocs et les forces de l’ordre durant une manifestation contre la réforme des retraites à Rennes, le 28 mars 2023. © Justin PICAUD/SIPA

Reste la police. La communication publique des antifas ne porte que sur leurs coups de force contre l’extrême droite mais leur vrai ennemi, ce sont les forces de l’ordre. Car ces dernières représentent le seul obstacle à une violence plus généralisée dirigée pas les antifas contre les autres institutions de la société. Sous sa forme idéale, le but des antifas est l’abolition de la police, mais de manière plus réaliste il s’agit de la démoraliser et de la discréditer dans l’opinion publique. Plus la sphère de l’action des forces de l’ordre sera limitée (par exemple par l’abolition de la BRAV-M), plus celle des révolutionnaires sera grande. Les antifas refusent l’idée que la police détient le monopole légitime de la violence : ils voudraient que ce monopole leur appartienne.

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S’ils se plaignent des « violences policières », leur vrai but n’est pas de les combattre, mais de les provoquer. Quand ils caillassent les forces de l’ordre, il s’agit de les décourager et de les énerver. Si la police riposte de manière musclée, et que des manifestants pacifiques sont atteints, les antifas et leurs alliés peuvent crier à la violence policière. Les manifestants blessés ou arrêtés deviennent autant de preuves de l’illégitimité des forces de l’ordre. Des images choquantes de CRS enveloppés par les flammes d’un cocktail Molotov démentissent la notion de l’invincibilité de la police, mais les antifas ne cherchent pas à tuer des policiers, car cela en ferait des martyrs dans l’opinion publique. Plutôt qu’une guerre tout court, c’est une guerre psychologique et de communication. (Voir leur manifeste « Abolir la première milice fasciste »).

L’écosystème antifa

Afin de gagner la bataille de l’opinion, les antifas disposent d’importants relais parmi les journalistes, les juristes, les ONG, les cinéastes, les éditeurs et les chercheurs. Les forces de l’ordre sont ainsi prises en tenaille entre les guérilleros qui les provoquent dans la rue et les intellos qui les condamnent sur la place publique. La formule « violences policières » est martelée sans relâche par la presse bien-pensante, de Libé à La Croix. Lors des manifestations, des antifas tweetent des noms d’avocats et les numéros de téléphone de « legal teams » prêtes à défendre des manifestants arrêtés. Le Syndicat des avocats de France et le Syndicat de la magistrature, très ancrés à gauche, jouent un rôle important dans les campagnes de censure des violences policières. Des ONG comme Amnesty International et des organismes supranationaux comme le Conseil de l’Europe ou l’ONU ont critiqué les méthodes des autorités françaises. Un site web, violencespolicières.fr, prétend recenser tous les cas. Que les intentions ici soient bonnes ou mauvaises, peu d’importance est accordée à la campagne de provocation et aux violences dont les forces de l’ordre sont l’objet.

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En même temps, un flot de livres récents se sont donné pour mission de justifier la violence révolutionnaire et l’abolition de la police. Les éditions Libre ont publié en français deux titres de l’anarchiste américain Peter Gelderloos :  Comment la non-violence protège l’État et L’Échec de la non-violence. L’ouvrage collectif Défaire la police, paru aux éditions Divergences, commence par un éloge du slogan antifa « All cops are bastards » (« Tous les flics sont des salauds »), souvent abrégé en « ACAB » ou réduit au code numérique 1312. La Fabrique, maison d’édition très en vue fondée en 1998 par le militant de gauche Éric Hazan, a édité non seulement les textes de Tiqqun et du Comité invisible, mais aussi une série de volumes comme La Domination policière de Mathieu Rigouste ou Que fait la police ? Et comment s’en passer de Paul Rocher. Un volume collectif, Police, contient un essai de David Dufresne, le réalisateur d’un film sur les violences policières, Un pays qui se tient sage, sorti en 2020, et un autre d’Antonin Bernanos, un ancien de l’AFA P-B, condamné pour son rôle dans l’incendie d’une voiture de police et l’agression d’un policier au quai de Valmy en 2016. Les chercheurs font aussi preuve de zèle : un Collectif des universitaires contre les violences policières a publié une tribune signée par 300 personnes sur le site du Club de Mediapart le 4 mai 2019. Une mention spéciale doit être réservée à la Française Gwenola Ricordeau, spécialiste de justice criminelle à l’université d’État de Californie à Chico. Elle vient de publier un recueil d’essais, pour la plupart traduits de l’américain, sous le titre significatif de 1312 raisons d’abolir la police. Son compte Twitter relaie les posts des antifas français, fait l’apologie de la « violence politique » et approuve un montage vidéo de scènes où la police est mise en échec ou agressée.

Pour boucler la boucle, les comptes antifas célèbrent la parution de son livre. C’est ainsi que la société française doit faire face, d’un côté, à une forme spécifique de terrorisme dirigée contre les forces de l’ordre et, de l’autre, à une campagne de propagande pour désarmer ces mêmes forces. Il faudra une sacrée grenade de désencerclement pour sortir de cette situation.

Montage retweeté le 10 avril 2023 par Gwénola Ricordeau.

[1] Parmi les sources de cet article : Andy Ngo, entretien du 10 avril 2023 ; Sébastien Bourdon, Une vie de lutte plutôt qu’une minute de silence : enquête sur les antifas (Seuil, 2023) ; Isabelle Sommier, « Les nouveaux habits noirs de l’anticapitalisme », Sciences humaines, n° 315 (2019/6) ; et les comptes Twitter de nombreux groupes antifas français.

Jean-Luc et la chocolaterie

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Juste après l’intervention télévisée d’Emmanuel Macron lundi soir sur TF1, Jean-Baptiste Trogneux, l’un des petits neveux de Brigitte Macron, a été passé à tabac à Amiens, en marge d’une “casserolade”. Il souffrirait depuis de cotes cassées, d’un hématome et de doigts foulés ! Cette attaque détestable est dénoncée depuis 24 heures par l’ensemble de la classe politique. Huit personnes ont été arrêtées, trois d’entre elles seront présentées à la justice en comparution immédiate aujourd’hui. « Il a été confronté à la brutalité, à la violence et à la bêtise », a commenté le chef de l’Etat depuis l’Islande. Dans quelle mesure la radicalité et la violence des discours de l’extrême gauche peuvent-elles être tenues pour responsables de pareilles agressions?


Après l’agression de Jean-Baptiste Trogneux, certains accusent les « Insoumis » et leurs discours incendiaires.

Une condamnation unanime

Rappelons d’abord, quand même, que la condamnation est unanime. Chez les Insoumis, elle a été très claire pour François Ruffin (« on ne défend pas la démocratie en attaquant un chocolatier » a-t-il tweeté), et beaucoup plus entortillée chez Jean-Luc Mélenchon – disons allant beaucoup moins de soi.

Certains, comme l’avocat Thibault de Montbrial estiment que LFI a une responsabilité. C’est la thématique bien connue de la libération de la parole, généralement employée pour accuser MM. Zemmour ou Finkielkraut des crimes d’extrême droite comme ceux de Breivik.

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Chez beaucoup d’ « Insoumis », il y a en effet un appétit d’échafauds, de têtes sur des piques, un petit vent robespierriste. Mais pardon, s’agissant d’Emmanuel Macron, tout le monde a participé à la démolition (de l’extrême droite à l’extrême gauche, sans oublier nos médias qui s’attendrissent presque sur les « casserolades » ces derniers temps). Lundi soir, la casserolade a mal tourné. Dans tout cet arc politique, c’est la personne d’Emmanuel Macron et pas sa politique qui est érigée en explication universelle de nos malheurs. On ne parle plus du président de la République comme quelqu’un qui se tromperait ou ferait une mauvaise politique, mais comme un être malfaisant, un affameur cynique et cruel d’un peuple vierge de tout mal.


Ces propos virulents peuvent-ils pour autant être tenus pour responsables d’une agression?

C’est une question aussi intéressante qu’elle est indébrouillable. Les mots affectent le réel, c’est même leur vocation première, mais il est en même temps presque impossible d’assigner un acte à un propos – on le voit d’ailleurs dans l’affaire Samuel Paty.

Comment des citoyens se pensent-ils autorisés à tabasser un jeune homme ? Voilà une autre question qu’il faut en revanche se poser. L’explication est à mon sens peut-être moins chez l’émetteur des propos incendiaires que dans le cerveau des récepteurs. Dans ce problème, il y a une dimension un peu oubliée dont il nous faut de nouveau faire état : la baisse du niveau intellectuel dans la société. Dans le débat politique ou parlementaire, la violence est métaphorique, elle est symbolique. Même le plus bolcho des « Insoumis » ne rêve pas de guillotiner des patrons place de la Concorde. Enfin, j’imagine… Mais ce qui peut transformer la violence verbale en agression physique c’est l’incapacité à accéder à ce niveau symbolique, l’incapacité à verbaliser et à conceptualiser. On entre alors dans le règne de l’émotion brute et de la pulsion. Quand on n’a pas de mots, on cogne. De plus, on considère de nos jours que la colère a toujours raison.

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Ce passage à tabac gratuit, sans « pourquoi ? », est finalement un instantané de l’époque. Tout d’abord, les agresseurs s’y sont mis à huit contre un, cette lâcheté assumée est une scène de barbarie désormais fréquente – voire ordinaire. Si la civilisation, c’est le renoncement à la violence et le choix du langage comme moyen de résolution des conflits (le logos), nous sommes effectivement embarqués dans un processus de décivilisation (un sondage récent nous apprenait que 15 % des Français estimaient la violence comme un moyen légitime de régler ses problèmes). À tout cela, nous ne voyons pas de remède à court terme.

Cependant, la pire erreur serait de croire qu’on va éliminer la violence en corsetant le langage. Que les attaques personnelles et les invectives soient sanctionnées, qu’on ne résigne pas à ce que cela devienne de nouveaux réflexes dans nos rapports, oui. Mais attention à ne pas trop restreindre les bornes du convenable. Le débat public n’est pas une soirée de gala.


Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy du lundi au jeudi dans la matinale, après le journal de 8 heures.

Idéologie trans: même l’École alsacienne n’est pas épargnée!

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D.R.

Il n’est pas certain que notre ministre de l’Éducation nationale laisse ses enfants à l’École alsacienne, non parce qu’il voudrait montrer l’exemple en termes de «mixité sociale», mais parce qu’il a peut-être appris, comme nous, que l’idéologie transgenre est parvenue à distiller son poison dans cet établissement élitiste qu’on aurait pu croire épargné par cette folie…


Il y a quelques semaines, les élèves de 4e de ce noble établissement ont en effet été conviés à une réunion présentée à leurs parents comme une « invitation à la tolérance » alors qu’elle était en réalité une séance d’information très orientée sur la transidentité. C’est en lisant l’article de Clémence de Longraye sur le site de Boulevard Voltaire que nous l’avons appris. Cette séance de deux heures de bourrage de crâne était obligatoire.

L’association contre les violences sexuelles et sexistes HandsAway devait y prêcher la bonne parole. Selon une pratique qui n’a l’air de déranger personne mais qui pose quand même la question de savoir devant quelle association « partenaire » vont finalement se retrouver les élèves, HandsAway a confié à l’association OUTrans le soin d’animer ces deux heures d’information. Sur son site, OUTrans est fière d’annoncer qu’elle a été récemment consultée par l’Éducation nationale pour proposer des mesures dans le cadre du plan de lutte contre les LGBTphobies 2023-2026. Au milieu d’une très longue liste de revendications, l’association propose, naturellement, d’ « augmenter et sécuriser les financements associatifs LGBT », puis de « former les décideur.es politiques (ministres, cabinets, parlementaires) et la haute administration aux transidentités par/avec les asso trans », de « former par/avec les asso trans les délégué.es du Défenseur des droits sur les enjeux trans », de « créer un plan de formation national sur les transidentités par/avec les asso trans ». L’association réclame par ailleurs que soit « révisée/précisée la circulaire de 2021 pour les personnes trans en réaffirmant que la reconnaissance de l’identité de genre n’est pas soumise à l’autorité parentale » et que soit « supprimée l’obligation des toilettes séparées filles/garçons dans les constructions scolaires ». Dans la rubrique « formations », le déroulement d’une réunion est clairement décrit: présentation de l’association, lexique pour « que chacun.e utilise les termes à éviter et ceux à privilégier », présentation des « parcours de transition (sociale, légale et médicale) ». Le prosélytisme se substitue largement au combat contre la transphobie qui n’est qu’un prétexte. Cette association incite chaque élève non pas seulement à être « tolérant » envers les trans mais à entamer lui-même s’il le désire une transition et à « façonner son corps et son identité comme iel l’entend, c’est-à-dire avec ou sans modifications corporelles ». Des élèves de l’École alsacienne disent avoir subi une pression menaçante de la part des animatrices lors de cette réunion : « Quand on a dit qu’on ne voulait pas d’hommes trans dans les toilettes de filles, on s’est fait traiter de transphobes. » Cette réunion est apparue clairement à certains comme une session de recrutement: « On avait vraiment l’impression qu’elles voulaient nous pousser à devenir trans, que c’était super cool de faire une transition. »

Aucun recul

Cette propagande n’est pas nouvelle mais prend, année après année, une place de plus en plus importante dans les établissements scolaires, qu’ils soient publics, privés ou réputés pour leur élitisme. Sous couvert de lutter contre l’homophobie et la transphobie, l’Éducation nationale invite, à travers différents documents officiels, « à porter une attention particulière aux élèves transgenres ou qui s’interrogent sur leur identité de genre », et ne prend aucun recul sur le phénomène idéologique et propagandiste inhérent à la théorie du genre, entérinant ainsi, de facto, cette idéologie. Le ministère qui aurait dû se méfier de cette idéologie qui cible d’abord les très jeunes gens en cours de construction physique et mentale, a finalement capitulé – les associations les plus prosélytes considèrent à juste titre avoir gagné cette première bataille. La seconde, en cours de déploiement, est déjà bien avancée : présence de plus en plus fréquente dans les écoles (si possible dès l’école primaire), endoctrinement dans les lieux de formation (académie, INSPE, ENS, etc.), pressions auprès des maisons d’éditions pour inclure dans les manuels scolaires des notions sur le genre, sans compter le soutien d’associations pro-trans (Planning familial), de syndicats enseignants (Sud éducation) ou d’associations de parents d’élèves (FCPE). La circulaire Blanquer de 2021 intitulée « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » reste d’actualité. Elle autorise toutes les revendications des élèves endoctrinés en matière de changement de genre, de prénom, etc. Si « les enseignants ont le devoir d’accompagner les jeunes et de faire preuve à leur endroit de la plus grande bienveillance, de leur laisser la possibilité d’explorer une variété de cheminements sans les stigmatiser ou les enfermer dans l’une ou l’autre voie », les parents pourront en revanche être écartés de ce processus : « Si l’élève fait seul la démarche d’aborder la question de son identité de genre auprès d’un personnel de l’établissement, une communication avec les représentants légaux ne doit se faire qu’avec l’accord explicite de l’élève. » La France imitera-t-elle bientôt l’Écosse – le SNP (parti indépendantiste écossais) envisage, dans le cadre d’une enquête scolaire menée dans 59 écoles, de demander aux enfants de sept ans s’ils sont « homme, femme, non-binaire, transgenre ou autre », tandis que les Verts proposent que les enfants puissent changer de sexe dès l’âge de huit ans – , ou l’Espagne, où le changement de sexe au registre civil à partir de l’âge de 16 ans et sans le consentement des parents est possible, et où les écoles peuvent maintenant dénoncer aux services sociaux les parents refusant que leurs enfants changent de sexe ? Nous n’en sommes pas encore là, mais les associations pro-trans, profitant du soutien des mouvements politiques d’extrême gauche et des médias wokistes (la radio publique, Télérama et Libération en tête), ainsi que de la complicité de l’Éducation nationale, ne désespèrent pas d’obtenir un jour de tels résultats.

Les ratés suédois et britanniques devraient alerter Pap Ndiaye

Les psychiatres et les pédopsychiatres tirent la sonnette d’alarme: nombre d’enfants et d’adolescents souffrant de troubles psychiques trop rapidement rangés dans la catégorie « dysphorie de genre » échappent à une prise en charge sérieuse. D’autres, ne souffrant de rien d’autre que des tiraillements hormonaux, émotifs et affectifs liés à l’adolescence, mais ayant subi la propagande trans à travers les réseaux sociaux et l’école, se laissent entraîner dans un processus de « transition » conduisant le plus souvent à une catastrophe psychique et, parfois, physique – troubles mentaux, médicalisation à vie, chirurgie amputatrice, etc. La Suède et le Royaume-Uni savent ce que leur laxisme face au phénomène trans a coûté à des centaines de leurs adolescents et ont décidé de contrôler très fermement les structures médicales ainsi que les associations propageant l’idéologie trans. Il est temps, en France, d’ouvrir les yeux et de prendre des décisions radicales.

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Il n’y a pas 36 solutions pour empêcher l’idéologie du genre d’empoisonner l’esprit  des enfants. Il faut frapper fort : aucune association distillant ce poison ne devrait pouvoir entrer dans les écoles ; aucun manuel scolaire mentionnant un principe, un document ou une thèse relevant de l’idéologie du genre ne devrait pouvoir être proposé aux enseignants ; aucune sortie scolaire prévoyant la rencontre d’élèves et de « drag-queens » ne devrait être autorisée.

Discours délirants

Les associations LGBT n’ont rien à faire dans les établissements scolaires : la lutte contre les « LGBTphobies » n’est souvent qu’un prétexte pour véhiculer les notions idéologiques sur le genre et, de plus en plus, tenir des discours délirants sur le « patriarcat », la « masculinité toxique» et « l’hétéronormativité » ou faire la publicité pour la PMA et la GPA. Les cours sur « la sexualité » doivent reposer sur des données scientifiques et biologiques et sur rien d’autre – en aucun cas ils ne doivent être dispensés par des associations comme le Planning familial ou par du personnel parascolaire. Bref, l’école doit redevenir un véritable lieu d’instruction et non cette garderie sociale dans laquelle les sujets annexes au projet sociétal des « minorités » et des progressistes wokes supplantent la transmission des connaissances.

Pap Ndiaye affirmait il y a quelque mois que les mesures prises par son ministère n’ont « rien à voir avec la théorie du genre ». Pourtant, la théorie du genre a fait son nid dans l’école, d’une manière ou d’une autre. Dans une école élitiste que nous pouvions croire à l’abri de ce genre de mésaventures, l’École alsacienne, les militants d’une association radicale et prosélyte ont pu diffuser l’idéologie trans. Qu’en pense M. Pap Ndiaye, dont les enfants sont inscrits dans ladite école ? Était-il au courant de la tenue de cette « réunion d’information » sur la transidentité ? Accepte-t-il que ses enfants subissent cette propagande ? Plus globalement, est-il prêt à endosser la co-responsabilité des conséquences de la propagation de l’idéologie trans à l’école et du « premier grand scandale médical et éthique du XXIe siècle [1] » annoncé ?


[1] Caroline Eliacheff et Céline Masson, La fabrique de l’enfant-transgenre, Éditions de L’Observatoire.