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Villerupt: on a tous droit à une 140ème chance de tuer?

Justice, le maillon faible


Villerupt: on a tous droit à une 140ème chance de tuer?
Prix de la drogue, près des lieux de la fusillade, Villerupt (54), 14 mai 2023 © Sébastien BOZON / AFP

Samedi dernier, à Villerupt, une fusillade a fait cinq blessés dont trois grièvement, sur fond de trafic de stupéfiants. L’auteur présumé des faits, Abdelkrim B, issu d’une famille de cinq enfants dont quatre sont connus pour des affaires de vols, de violences et de trafics, a déjà été impliqué dans près de 140 affaires judiciaires, condamné des dizaines de fois pour violences aggravées, vols aggravés, détention de stupéfiants, etc, et sortait de prison depuis à peine un mois. Cas d’école de l’effondrement de la chaîne pénale française.


Le maire (PCF) de Villerupt a beau parler d’un manque d’effectifs policiers dans sa commune, ce n’est pas le sujet. Le suspect a déjà été condamné à de très nombreuses reprises, ce qui veut dire qu’à de très nombreuses reprises la police a enquêté, l’a arrêté, et l’a conduit devant le tribunal avec assez de preuves pour qu’il soit condamné. Autrement dit la police a fait son travail, et même si son action est sans doute perfectible, les chiffres sont parlants : la police a très bien fait son travail. Le maillon faible de la chaîne pénale est ailleurs.

Condamné à plus de trente peines, récemment sorti de prison où « depuis qu’il a seize ans il ne fait que des allers-retours ». De toute évidence, les sanctions infligées à ce multirécidiviste ne l’ont pas dissuadé de persister dans ses activités délinquantes, et surtout, alors que sa détermination à vivre de trafics et de violence était bien connue, ne l’ont pas mis hors d’état de nuire. Là est le fiasco.

Faut-il en accuser l’institution judiciaire et les magistrats ? Oui, en partie. Le noyautage de la magistrature par des militants d’extrême-gauche qui se croient propriétaires du pouvoir judiciaire, alors qu’ils n’en sont que délégataires, et l’utilisent au profit de leur idéologie et certainement pas pour le bien commun, est connu depuis longtemps. Et la complaisance de la majorité des magistrats envers ces activistes, pour ne pas parler d’une atmosphère de sympathie envers leur idéologie, est évidente. Hervé Lehman, ancien juge d’instruction, y a consacré un excellent livre : « Soyez partiaux ! Itinéraire de la gauche judiciaire ». Mais on aurait tort de s’arrêter là.

Car enfin ! Qui crée les lois qu’instrumentalisent les « petits juges rouges » ? Qui laisse ces magistrats disciples d’Oswald Baudot trahir leur mission au nom de la « culture de l’excuse » et de leur militantisme ? Qui ne cesse de mettre des bâtons dans les roues de ceux parmi les magistrats qui se soucient sincèrement de la sécurité des innocents au lieu d’être obsédés par les droits des seuls coupables ? Les élus. Le Parlement. Les gouvernements qui se succèdent depuis des décennies. Par idéologie, on veut éviter l’emprisonnement. Par idéologie, mais aussi par intérêt, on empile les lois et chaque « simplification » voit le formalisme pénal devenir toujours plus chronophage, aboutissant à l’engorgement des services d’enquête. Aujourd’hui, la principale utilité du Code de Procédure Pénale est d’empêcher l’application du Code Pénal !

Le maire de Villerupt interpelle le ministre de l’Intérieur alors qu’il devrait s’en prendre au garde des Sceaux – et à tous ses prédécesseurs. LREM/Renaissance n’est pas responsable des décennies qui ont précédé son arrivée au pouvoir – mais est pleinement coupable de n’avoir rien fait depuis six ans pour remédier à la déliquescence de l’institution judiciaire.

Les solutions existent et sont connues. Au lieu de prêter l’oreille aux auteurs du « mur des cons », tout garde des Sceaux devrait commencer par lire Thibault de Montbrial, Maurice Cusson, Hugues Lagrange, Maurice Berger, les études de l’Institut pour la Justice qui tous parlent de la nécessité absolue de sanctions dissuasives (donc douloureuses pour le délinquant), systématiques, rapides et certaines – alors qu’aujourd’hui, d’un tribunal à l’autre, d’un juge à l’autre, les écarts constatés relèvent d’avantage de l’arbitraire aléatoire que d’une quelconque idée de justice. Rétablir les peines planchers, garantir l’exécution effective des peines prononcées, rendre à l’emprisonnement toute sa place et construire des prisons….

Tout garde des Sceaux devrait aussi lire les synthèses de l’Observatoire de l’Immigration et de la Démographie, n’en déplaise à ces médias qui se gardent bien d’évoquer le nom d’Abdelkrim B mais insistent sur le fait qu’il est né à Villerupt…. Tous les immigrés ne sont évidemment pas délinquants, et tous les délinquants ne sont évidemment pas immigrés ni issus de l’immigration, mais la surdélinquance de certaines immigrations (on ne parle clairement pas ici de nos concitoyens d’origine Vietnamienne….) est un élément central du problème et doit, impérativement, être prise en compte au plan politique. A Villerupt, et plus encore à Fameck où a été retrouvée la voiture du tireur, l’extrême violence de type mafieux, les règlements de compte claniques et le « halal way of life » avancent main dans la main.

Mais hélas ! Le macronisme n’a de cesse de faire méthodiquement le contraire de ce qu’il faudrait, au point que l’on pourrait presque croire l’ensauvagement voulu…. Après tout, un peuple habitué à raser les murs et baisser la tête devant la racaille aura bien du mal à trouver la force de dire « non » à ceux qui le privent petit à petit de sa souveraineté. Ibn Khaldoun (que même les bénéficiaires du Fonds Marianne auront du mal à accuser de « complotisme ») a tout dit à ce sujet il y a des siècles, le lecteur en trouvera ici un résumé que j’espère ludique, et pourra s’il souhaite l’approfondir se référer aux remarquables études de Gabriel Martinez-Gros.

Les magistrats sont responsables de la manière dont ils appliquent les lois, et dont certains d’entre eux l’instrumentalisent impunément, responsables de ne pas assez dénoncer cette instrumentalisation et les évolutions législatives qu’ils savent néfastes, mais ils ne font pas les lois. Quand celles-ci accordent plus de prix aux droits des coupables qu’à ceux des victimes, quand elles encouragent sans cesse les remises de peine, imposent des justifications interminables à toute décision qui pourrait faciliter l’enquête sous prétexte de garantir les « libertés » des suspects, ce sont nos élus les responsables. Face à cette procédure pénale décidément toujours faite pour protéger les criminels, il y a une solution non pas simpliste mais simple : revenir au Code de Procédure Pénale des années 90.

Avant l’introduction massive de la procédure accusatoire anglo-saxonne dans notre procédure traditionnellement inquisitoire, c’est-à-dire soucieuse avant tout de vérité objective, ce qui explique que les enquêteurs, le Parquet et les juges d’instruction instruisent « à charge et à décharge », là où le droit anglo-saxon vise à arbitrer entre des intérêts rivaux. Un exemple : DSK, reconnu coupable de viol (je ne me prononcerai pas sur l’effectivité de sa culpabilité, n’ayant pas les éléments pour juger), n’a pas été incarcéré puisqu’un arrangement financier a été trouvé avec sa victime. Pour la tradition anglo-saxonne, basée sur l’ancien wergeld, le « prix du sang » que le clan du coupable verse au clan de la victime, pour cette procédure accusatoire que l’UE voudrait imposer partout, tout va bien. Pour notre droit imprégné de tradition romaine et centré sur l’intérêt général, cela revient pour un homme fortuné à pouvoir s’acheter un « permis de violer », et c’est intolérable.

Et ne laissons pas la gauche pousser ses habituels cris d’orfraie en invoquant le « retour des heures les plus sombres ». La France des années 90, avant la loi Guigou de juin 2000 et la création du Juge des Libertés et de la Détention, n’avait rien d’un état policier. Même dans les années 80 nous étions un état de droit, où il ne faisait pas moins bon vivre qu’aujourd’hui, au contraire.

Dans l’urgence, et vu l’état catastrophique de la réponse pénale actuelle il y a urgence, la seule mesure réaliste et raisonnable est d’identifier un tournant (la loi Guigou n’est qu’une possibilité parmi d’autres) et de reprendre à l’identique le Code de Procédure Pénale tel qu’il était juste avant ce tournant. Puis de briser l’hégémonie culturelle de la « doctrine Baudot », en particulier à l’ENM, et de soutenir fermement ceux parmi les magistrats qui sont réellement au service du bien commun et de la sécurité de tous. Ensuite, et seulement ensuite, calmement, d’examiner à nouveaux frais toutes les évolutions législatives ultérieures au tournant identifié, au regard de leurs conséquences désormais connues grâce au recul des années, en débattre, de choisir celles qu’il serait bon de garder, et bien sûr de proposer d’autres innovations si nécessaire. Mais des innovations pragmatiques et non idéologiques, des innovations dont l’objectif serait non plus de donner des armes aux criminels pour se défendre des forces de l’ordre, mais tout au contraire de donner des armes aux forces de l’ordre pour défendre les honnêtes gens contre les criminels – et de rappeler à la magistrature que son rôle est d’appliquer les lois, et non de les instrumentaliser pour « corriger » ce qui lui déplaît dans la société. Tout l’inverse de ce que proclamait Oswald Baudot, en somme.

Et la responsabilité de cette remise en ordre, la responsabilité la plus lourde et la plus cruciale, est celle des politiques.




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Haut fonctionnaire, polytechnicien. Sécurité, anti-terrorisme, sciences des religions. Dernière publicatrion : "Refuser l'arbitraire: Qu'avons-nous encore à défendre ? Et sommes-nous prêts à ce que nos enfants livrent bataille pour le défendre ?" (FYP éditions, 2023)

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