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«Une sorte de nazi»: France Inter et l’hiver de l’humour

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À France inter, la blague à connotation raciste de Guillaume Meurice sur le Premier ministre israélien ne lui a valu qu’un « avertissement ». Hier soir, on s’attendait à une explication pour son retour derrière le micro. Il n’en a rien été.


À la faveur d’une actualité sanglante, un soi-disant « humoriste » de France Inter s’est flatté, dimanche 29 octobre, de faire passer Benjamin Netanyahou pour « une sorte de nazi sans prépuce ». Au mépris des victimes du massacre du 7 octobre et de ses dramatiques conséquences de part et d’autre ; accessoirement, au mépris des commentateurs qui, quoique d’opinions divergentes, s’efforcent de peser leurs mots.

Les curieuses explications de Charline

Au bout d’une semaine, Guillaume Meurice s’est vu notifier par la présidence de Radio France un avertissement, lequel sanctionne non pas tant le propos que son refus de le regretter. Il a annoncé qu’il le contesterait en justice. Ce qu’il ne fera pas, sauf à vouloir se renverser le vase de nuit sur la tête. Pour sa défense, Meurice s’est réclamé de « l’esprit Charlie ». Sans toucher le bénéfice escompté. Le rédacteur en chef de Charlie-Hebdo a rétorqué que « l’esprit Charlie n’est pas une poubelle qu’on sort pour y jeter ses cochonneries ».

On s’attendait à une explication pendant l’émission du dimanche 12 novembre. Il n’en a rien été. Son animatrice, Charline Vanhoenacker, commence par déplorer les intimidations et menaces de mort visant leurs personnes et la liberté d’expression. Puis, elle reconnaît le trouble qu’a provoqué le propos chez ses coéquipiers. Certains ont été blessés ou choqués, d’autres ont ri, d’autres encore ont regretté d’avoir ri. Tous ont réfléchi. Tant et si bien, dit-elle, que « nous avons surmonté nos divergences ». Mais pour en conclure quoi ? On aurait voulu savoir, on ne le saura pas !

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Écouter cette émission d’une heure trente en direct, sans public « pour des raisons de sécurité », est un supplice. Atmosphère de cirque, chroniques niaiseuses, rires, tapages et applaudissements forcés : tout est simulacre. Quand c’est au tour de Meurice de prendre la parole, on s’efforce de tendre l’oreille. Celui-ci fait sentir qu’il jouit de la sympathie des uns, ces auditeurs qui lui apportent leur soutien, et qu’il attise la haine des autres qui lui souhaitent de « crever ».

Ce n’est pas l’auteur du propos sujet à polémique qui s’exprime, mais à l’en croire sa première et plus apitoyante victime : Meurice en personne.

À l’occasion de son tour de passe-passe, aussi convenu dans cette atmosphère de cirque qu’un numéro de prestidigitation, il en rajoute une louche. « J’ai conscience d’avoir choqué, dit-il, en comparant un fasciste à un nazi. » En studio, personne ne lui rappelle qu’il a comparé un Juif à un nazi.

Tant qu’à se dérober, autant faire porter le chapeau à d’autres, en l’occurrence ses « bons Juifs » à lui. Politiquement des siens. C’est ainsi qu’il tend le micro au représentant d’un obscur « collectif » nommé Tsedeck, à peine cinq mois d’existence, qui entend lutter contre « le racisme d’État en France » et militer « pour la fin de l’apartheid et de l’occupation en Israël-Palestine ». Ce propos enregistré occupe les deux tiers de sa chronique ; Meurice ne pouvait se défiler plus prestement. 

Il reste à examiner l’étron dont Meurice nie la puanteur. Et son contexte.

Cet incident « de trop » met en cause la conduite d’une radio publique qui prétend au beurre, une information équilibrée, en même temps qu’à l’argent du beurre, le gain d’audience tiré de sa « fabrique de l’humour ».  

Ainsi, c’est sur le boulevard ouvert par le Grand Journal de Canal Plus, modèle de raillerie et d’entre-soi, que la radio publique a lancé sa politique d’info-divertissement. Au motif, expliquait sa directrice, Laurence Bloch, que pour livrer « la chronique d’une époque », il était « indispensable d’avoir une bande d’yeux et d’oreilles très acérés ». Têtes d’affiche : Charline Vanhoenacker et Guillaume Meurice. « Inter est une chaîne qui porte des valeurs progressistes, ajoutait Laurence Bloch (…) qui porte attention à l’autre. » (Propos rapportés par Sandrine Blanchard, Le Monde, 8 janvier 2018). 

Mortelle Adèle

Lasse de l’empire de ses bouffons, la station s’est ressaisie à la rentrée. À l’initiative de sa nouvelle directrice, Adèle Van Reeth, la grille a été remodelée. Priée de renoncer à sa quotidienne, Charline Vanhoenacker a dû se replier sur une émission hebdomadaire, le dimanche de 18h à 20h. À ses côtés, Guillaume Meurice. Interrogé (France-Inter, 19 décembre 2019) par ses collègues sur sa méthode de travail, Meurice se défendait de « taper » sur qui que ce soit. On cible, disait-il, « les failles de raisonnement et de logique dans le discours, mais pas les gens ». On ne voit pas sur quelle « faille de raisonnement » il a choisi de taper en représentant Netanyahou en « une sorte de nazi sans prépuce ».

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Que signifie l’image ? Qu’en somme, Netanyahou est le monstre des monstres : à la fois « une sorte » de Juif qui, accusé d’imiter les nazis, trahit les Juifs, et « une sorte » de nazi qui, étant circoncis, tromperait les nazis.

Ce n’est pas tant le mot « prépuce » que la préposition « sans » qui mérite examen. Meurice aurait pu dire : « une sorte de nazi circoncis ». Non, il a voulu être concret, clinique : « sans prépuce ». Pour indiquer un manque. Et laisser s’ouvrir l’abîme d’une confusion dont l’antisémite le moins éveillé ferait son miel. Corrélée à « nazi », la formule « sans prépuce » est pétrie dans la pâte de l’image-choc.

   1. Meurice s’acharne à une heure critique de l’histoire d’Israël sur un homme qui, contesté par ses compatriotes, n’en demeure pas moins en première ligne en tant que chef d’un gouvernement, hétéroclite et défaillant, mais issu d’un scrutin régulier.

   2. Il n’hésite pas se comporter comme n’importe quel « sniper » des cloaques sociaux en usant de la position qu’il occupe à France Inter. Indirectement mais spectaculairement, il jette le déshonneur sur « la première radio d’actualité généraliste et culturelle ».

   3. Il n’a pas idée de l’origine et de la valeur de la circoncision chez les Juifs. À la suite d’une parole tombée du ciel, elle est depuis le temps d’Abraham le signe de l’Alliance qu’ont acceptée les Hébreux et que, par délégation, chaque génération de parents transmet à ses enfants. C’est un témoignage de gratitude et, par-dessus tout, le sceau d’une relation de confiance qui ne peut être à la portée de « l’hommerie » que par une certaine connivence avec le symbolique.

Ce rappel excitera la raillerie de Meurice. Vrai pitre, faux humoriste.

La différence entre le Messie et le plombier, dit une blague juive, c’est que le Messie, on est sûr qu’il viendra un jour. La différence entre le Meurice d’avant et le Meurice d’après, c’est que, s’agissant de celui-ci, on aurait voulu être sûr qu’il ne reviendra pas.

Hélas, il est venu, il vient, il reviendra. Car voilà une dizaine d’années que Meurice s’est alloué les pleins pouvoirs dus à l’humoriste, et le privilège d’immunité qui va avec, comme Napoléon s’était autocouronné empereur. On peut bien discuter la validité d’une information. En revanche, l’humoriste nous interdit de contester son commentaire. Il va de soi qu’il personnifie la liberté d’expression. Ce serait le stigmatiser. Par la faute d’un contradicteur qui, lui ayant fait l’offense de ne pas rire, ne peut être qu’un imprécateur d’extrême-droite comparable à un nazi.

Dans ces conditions, on se demande où, c’est là son antienne favorite, Charline Vanhoenacker trouve le culot, aujourd’hui encore, d’associer sa conception de l’humour à « une prise de risque » quand le plus grand risque à courir est d’écoper d’un cruel « avertissement ».

Derrière le succès de la Marche, une France désunie

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Antisémitisme: ce renoncement à nommer l’ennemi qui tue, de peur d’irriter des cités d’immigration, dit tout de la pleutrerie qui perdure, selon notre chroniqueur.


C’est une France fictivement unie qui a marché silencieusement, hier, contre l’antisémitisme. Certes, les responsables politiques, qui ouvraient la manifestation, rassemblaient la gauche et la droite de gouvernement. Toutefois, ces « élites » s’égareraient à se croire redevenues fédératrices, au vu du succès apparent de la mobilisation citoyenne (plus de 100 000 personnes à Paris, plus de 80 000 dans 70 autres villes).

Foule majoritairement blanche et âgée

En réalité, ces chiffres sont en deçà des protestations contre la profanation du cimetière juif de Carpentras de 1990, ou contre les attentats islamistes du 13 novembre 2015, il y a tout juste huit ans. La foule de dimanche, majoritairement blanche et plutôt âgée, a pu corriger, par sa dignité muette, la bassesse bavarde des querelles politicardes sur qui devait ou non être là. Reste que ce sont bien les politiques menées depuis quarante ans par ceux qui plastronnaient en tête de cortège, qui ont mis la nation ouverte dans cet état de fragilité extrême. L’absence du chef de l’État a illustré la fracture identitaire qui interdit à Emmanuel Macron de choisir son camp.  Dans une « lettre », publiée dans Le Parisien Dimanche, le président n’a eu de cesse d’appeler à « l’unité des Français », en refusant de qualifier la source islamiste du nouvel antisémitisme : une précaution reprise ce lundi matin sur Europe 1 par Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée et coorganisatrice avec le président du Sénat, Gérard Larcher, du rassemblement. Or, ce renoncement à nommer l’ennemi qui tue, de peur d’irriter des cités d’immigration, dit tout de la pleutrerie qui perdure.

En même temps capitulard

Derrière l’unité de façade d’une classe politique agonisante, qui avait relégué le RN en queue de cortège, se laisse voir ce que j’ai appelé « deux France irréconciliables ». Car, outre l’absence de Macron perdu dans son « en même temps » capitulard, il faut noter celles de l’extrême gauche et des autorités musulmanes, rétives à dénoncer l’islamisme et son terrorisme judéophobe.

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a expliqué « comprendre la réticence des musulmans de France à défiler (…) aux côtés de racistes antimusulmans déclarés et assumés » : un prétexte pour ne pas avoir à porter un regard critique sur des textes sacrés qui, pris à la lettre, appellent à tuer Juifs et mécréants. Pour sa part, l’imam Hassen Chalghoumi, un des rares musulmans à avoir appelé à « venir en force » se joindre à la marche, a du renoncer à son projet après des menaces venues de la Tunisie. Il y avait certes, sous les drapeaux de la Kabylie, mon ami Ferhat Mehenni, président de la Kabylie libre, mais lui et ses amis, qui ont fui une Algérie islamisée, tiennent justement l’islam dans la seule sphère de la laïcité.

Les Français musulmans présents n’ont pas choisi de se faire identifier, sauf une exception que j’ai notée, par des pancartes. Plutôt que la banderole : « La République contre l’antisémitisme », il serait souhaitable de voir apparaître désormais : « La France contre l’islamisme ». Rêvons…

La communauté réduite aux aguets

Depuis cinquante ans, les programmes scolaires, Libération, les historiens atterrants, tous les orphelins des lendemains qui chantent, nostalgiques du plan B, remettent des pièces dans les machines à insurrection, repentance, l’auto-flagellation permanente de l’Occident maléfique. Ils abattent les derniers murs porteurs de la République. Le Graal, c’est la destruction de l’État et de la nation : on y arrive.


« Saül répondit : Je suis dans une grande détresse : les Philistins me font la guerre, et Dieu s’est retiré de moi ; il ne m’a répondu ni par les prophètes ni par des songes. Et je t’ai appelé pour que tu me fasses connaître ce que je dois faire » (I Samuel 28 :15).

Après les barricades de poubelles pour les retraites, les feux de l’amour des cailleras, la guerre de Gaza fracture le pays. Le vent mauvais se lève dans les banlieues. Manifester contre l’antisémitisme donne des sueurs froides aux révolutionnaires. Les masques tombent, les secousses se multiplient, ça sent le soufre… Bientôt Pompéi ? La Montagne Pelée ? Notre histoire nationale ne manque, ni de séquences noires (Guerre de Cent ans, guerres de religions, l’Occupation), ni de politiques médiocres et impuissants. La nouveauté, c’est l’impasse, impair et manque, le sentiment (n’est ce qu’un sentiment ?) d’être dans une nasse, pris en étau entre des fanatiques, partisans du chaos et les imbéciles, hors sol, au pouvoir.

Les insoumis sont à l’Hamas

Rien de nouveau à l’extrême-gauche, éclairée, progressiste, humaniste, pacifiste… Après Lénine, Staline, Trotski, Castro, Mao, Pol Pot, Khomeini, elle comprend et défend le Hamas et ses éventreurs de femmes enceintes. L’Hamascarade et l’aveuglement permanent. Le gauchisme (maladie sénile du communisme) se Dieudonise sur France Inter, ses comiques du service public et leurs blagues hilarantes : Hitler et le prépuce de Netanyahou. Dans Rouge, en 1972, Edwy Plenel (alias de Joseph Krasny) défendait inconditionnellement, Septembre Noir, légitimant l’assassinat de onze athlètes israéliens.

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Les « événements », les « années de braise » : le retour. La « violence légitime » accouche de l’histoire avec une grande H. La raison dialectique, les puissances d’abstraction et de mort fascinaient Sartre. « Abattre un Européen, c’est faire d’une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé : restent un homme mort et un homme libre ». Camus condamne le fanatisme, les terroristes sophistes : « Nous ne sommes pas de ce monde, nous sommes des justes ». En juin 1950, Breton essayait de sauver l’écrivain Záviš Kalandra (résistant, déporté à Ravensbrück, torturé puis pendu par la Sécurité intérieure tchèque). Ignoble, Eluard ironise : « J’ai trop à faire des innocents qui clament leur innocence, pour me préoccuper des coupables qui clament leur culpabilité ». Le poète peaufine son Ode à Staline qui dissipe le malheur : « La confiance est le fruit de son cerveau d’amour ». Finie la liberté sur les cahiers d’écolier. Le Parti et Les Dieux ont soif.

La variante moderne des agités du bocal, c’est le wokisme qui éteint les Lumières et l’universel. Au programme : 1984, la vérité alternative, l’hallu finale, « La guerre c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, l’ignorance c’est la force » (Orwell). Les talibans du monde d’après, damnés de l’atterre, écrasent les armées blanches, réécrivent le passé selon leur idée de la vertu avec leurs mensonges. La littérature, les statues sont déboulonnées, recalibrées, retouchées comme les photos officielles au fil des liquidations. Rachel Garrido a pris un carton jaune en voulant purger pépé. La génération Z exige des aveux… Damnatio memoriæ, abolitio nominis. Au feu les livres pernicieux : les blasphémateurs sont lynchés sur les réseaux sociaux.

Intellectuel: un métier en tension

Depuis cinquante ans, les programmes scolaires, Libération, les historiens atterrants, tous les orphelins des lendemains qui chantent, nostalgiques du plan B, remettent des pièces dans les machines à insurrection, repentance, l’auto-flagellation permanente de l’Occident maléfique. Ils abattent les derniers murs porteurs de la République. Après la colonisation, la rente mémorielle des « dé-coloniaux », nouveau fardeau de l’Homme blanc. Le Graal, c’est la destruction de l’Etat et de la nation : on y arrive.

Gardien de la conscience, debout face à l’Histoire, devant les hommes, Dominique de Villepin, porte des « exigences de responsabilité » pour le Moyen-Orient. « La diplomatie, c’est d’être capable, au fond du tunnel, d’imaginer qu’une lumière est possible »… Surtout dans la bande de Gaza. Jacques Attali est raccord pour une solution à deux Etats : « Elle n’a jamais été réaliste, mais c’est la seule possible ». Jacquou le Croquant est cash : « Oui je suis un écoterroriste ; si j’avais 20 ans, je serais encore plus radical ». Toutologue, Philippulus des dystopies, il prévoit le retour vers le futur, la météo de la veille. Ah, si tous les CEO du monde voulaient bien se donner la main !

Pierre Ouzoulias (sénateur communiste des Hauts-de-Seine) fait dans le romain, le grandiose, l’Empyrée pour tous : « La République française doit redevenir savante, en édifiant dans tous ses recoins des lieux de connaissance, propices au rayonnement de nos villages, de nos quartiers populaires et de nos villes… L’université doit être un nouvel horizon d’attente de l’utopie républicaine ». (Le Monde, 7 novembre). Le hic, c’est l’analphabétisation, le fanatisme, les slogans antisémites qui se multiplient avec les campus. Pour tout bagage ils ont 20 ans, deux slogans, trois mots valises : Et moi et moi et moi, pluriel, diversité, rébellion-illusion… L’union étudiante de Cambridge déprogramme l’Oratorio de Haendel, Saül (premier roi d’Israël), en raison de la « situation politique sensible au Proche-Orient ». Quand les arguments s’effritent, les positions se durcissent.

La Farce d’Action Républicaine 

Contre la chienlit, les incendiaires de bibliothèques et mairies, Elisabeth Borne veut « réaffirmer l’autorité ». Captain Marvel dégaine « l’ordre républicain ». Plus fort que les karchers : les FAR (Force d’action républicaine), CIV (Comité interministériel des villes), EPIDE (Établissements pour l’insertion dans l’emploi), les stages de responsabilité parentale, l’amende pour non-respect du couvre-feu qui passe à 750 euros. La peur (républicaine) va changer de camp. SPQR : « Savoir Prêcher les Quintaux de Renoncements ».

A lire aussi, Yvonne Guégan: L’École Alsacienne est-elle vraiment inaccessible? 

La dé-civilisation touche la fine fleur de l’élite française, les épées formées à l’Ecole Alsacienne et Sciences-Po. Gabriel Attal accuse Juan Branco de l’avoir harcelé au collège : une querelle de fille emmenée au cinéma, d’homophobie. Juan Vergès accuse le vengeur masqué d’être ambitieux, d’instrumentaliser ses relations amoureuses pour se propulser au sommet. Tic et Tac, Spirou contre Zantafio…

L’apaisement n’est pas pour demain. Sur TikTok, Instagram, X, des légions de Lotophages, Fifi brin d’osier oligophrènes, règlent leurs comptes dans des pugilats hystériques et dérisoires. Rien ne vaut rien ! C’est mon droit ! Balance ton quoi ! L’âne d’Apulée se frotte à celui de Buridan. L’abêtissement général finira par accoucher de la tyrannie.

« Il faut du théâtre, des rites, des cérémonies d’écriture pour faire exister un État, lui donner forme, en faire une fiction animée […]. On n’a jamais vu, on ne verra jamais, une société vivre et se gouverner sans scénario fondateur, sans narrations totémiques, sans musiques, sans chorégraphies… sans préceptes et sans interdits » (Pierre Legendre, Le Visage de la main, 2018).

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Il faut défiler, même avec les bonimenteurs du Bien

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Je l’avoue, je me sens un peu incommodée de manifester avec tous ces Tartuffes qui n’ont cessé de calomnier leurs contradicteurs. Mais j’irai, et sans pince à linge sur le nez.


Arrêtons de parler de sujets qui font voler les assiettes comme la guerre de Gaza, parce qu’aujourd’hui, c’est la journée de l’unité, c’est le président qui le dit. C’est la journée de l’antisémitisme et on est tous contre. C’est bien le problème. Il y a des salauds qui brisent ce grand moment de concorde en prétendant y participer. Les dirigeants du RN veulent défiler avec les autres. On en est là : le Rassemblement national veut combattre l’antisémitisme. Tout fout le camp !

On a donc assisté toute la semaine à un impayable revival des années 90, presque toute la classe politique tordant le nez à l’idée de défiler avec le parti de Marine Le Pen, dont on sait bien que c’est la même que son père. D’ailleurs si elle l’a viré, c’est pour mieux nous tromper, la fourbe.

C’est à celui qui sera le plus offusqué

Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, partis mardi sur la ligne « pas d’exclusive », conforme à la volonté présidentielle de ne plus combattre « l’extrême droite avec des arguments moraux », tiennent moins de 24 heures. Le lendemain, Olivier Véran ouvre la danse, affirmant le RN n’a pas sa place dans cette marche – et signifiant implicitement que les « insoumis », en revanche, sont les bienvenus. Il vaut mieux avoir tort avec l’extrême gauche que raison avec l’extrême droite.

Dans la foulée, de la macronie aux « insoumis », élus et chefs à plumes font assaut de vocalises sur le thème « Je ne défile pas avec le RN ». Sans oublier le CRIF qui n’a toujours pas compris qu’il n’est pas le parti des juifs et qu’on se fiche de ses consignes de vote. Curieusement, ce chœur de vierges outragées oublie Zemmour, pourtant érigé en diable numéro un pendant la campagne – et qui a naturellement appelé ses troupes à défiler. Y aurait-il des limites au ridicule ?

A lire aussi, du même auteur : N’oublions pas leurs noms

Dans ce brouhaha d’héroïsme de plateau, nul n’entend les sages propos de Serge Klasrsfeld, Pierre-Henri Tavoillot et même, il faut le saluer, de Pierre Moscovici. C’est à celui qui sera le plus offusqué. Le combat contre l’antisémitisme étant un excellent portage pour l’exhibition de vertu, ses actions montent en flèche à la bourse des bonnes causes. Même Mélenchon risque quelques trémolos.

La semaine s’achève en apothéose avec l’interview, dimanche, de Marine Tondelier par Ali Baddou qui, le week-end, fait du France Inter au carré sur France Inter1. Dans un numéro qui ressemble à un sketch de Raymond Devos, la patronne des Verts explique aux deux matinaliers énamourés qu’elle aurait aimé que la marche soit un grand moment d’unité mais que ce n’est pas possible… parce que le RN et Jordan Bardella ont annoncé leur venue. Ce qui brise l’unité c’est que Marine Le Pen se rallie à une cause nationale. Ce qui les enrage le plus, c’est que, sans même en faire des tonnes, l’intéressée refuse le rôle qui lui est assigné par le petit théâtre politique qui donne la même pièce depuis des lustres. N’en déplaise aux estomacs délicats, pour une manifestation comme celle d’aujourd’hui, il n’y a pas d’invitation. C’est comme à un enterrement : qui veut vient. Au lieu de s’agenouiller et de demander pardon, les élus du Rassemblement national défileront comme les autres. Ils ont bien raison.

En conséquence, les amusants résistants qui adorent papoter avec Médine marcheront, précise Tondelier, derrière une banderole dénonçant tous les racismes, métaphore à deux tonnes du cordon sanitaire. « On fait en sorte, avec le reste de la gauche, de garantir un cadre sain », ose-t-elle, sans susciter la moindre réaction des deux endormis. Le RN est une maladie qu’il convient de traiter. Ce que les partis convenables s’emploient à faire depuis quarante ans avec le succès que l’on sait.

Marine Tondelier débattait avec le rappeur Médine, fin août au Havre, malgré le tweet à connotation antisémite adressé à Rachel Kahn quelques jours plus tôt © ISA HARSIN/SIPA

Un aveuglement sidérant

Depuis plusieurs décennies, ils ont, par leurs bêlements immigrationnistes, favorisé l’islamisation de nombreux quartiers et la montée subséquente d’un antisémitisme et d’une homophobie décomplexés.  Et pourtant, j’irai manifester avec eux.

Peut-être qu’au début beaucoup croyaient sincèrement que la bête immonde allait se réveiller en blonde. Après Merah, Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, le 13-novembre et tant de morts du djhadisme sur le sol européen, leur aveuglement sidère. Reconnaître qu’ils se sont trompés serait sans doute douloureux. Nous payons tous le prix de ce déni qui nous a désarmés. Politiquement et intellectuellement.

A relire, Elisabeth Lévy: Gérard Miller, les Juifs et ma boussole morale

Nous ne sondons pas les reins et les cœurs. Si l’antisémitisme d’extrême droite perdure chez des individus, il ne s’affiche pas sur la place publique et ne casse pas la gueule aux gamins porteurs de kippa. Il ne se drape pas dans le drapeau palestinien. Obsédés par l’antisémitisme d’hier, les bonimenteurs du Bien ont refusé de voir celui d’aujourd’hui et insulté ceux qui le voyaient. Comme l’a écrit Eddy Royer dans Causeur, le sage montre l’islamisme et l’idiot regarde l’extrême droite. Pour un plat de lentilles électoral, ils se sont alliés avec le seul parti qui joue ouvertement avec la haine des juifs.

Et toute honte bue, ils continuent à faire leurs chochottes !

Je l’avoue, je me sens un peu incommodée de manifester avec tous ces Tartuffes qui n’ont cessé de calomnier leurs contradicteurs. Mais j’irai, et sans pince à linge sur le nez. Parce qu’il y aura des milliers de mes compatriotes de toutes origines qui refusent de laisser le pays à des petites frappes malfaisantes. 

Reste une question à laquelle le pavé parisien n’apportera pas de réponse. Le président promet de « ramener l’antisémitisme à la seule place qui doit être la sienne : devant les tribunaux et derrière les barreaux ». On aimerait savoir comment il compte le désimplanter des cerveaux.


  1. https://www.youtube.com/watch?v=57RjVCwBJpc ↩︎

Tiens, voilà du Boudard!

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En publiant des chroniques du Grand Alphonse parues entre 1959 et 1999 dans diverses revues, du Monde à Playboy, Le Dilettante nous fait du gringue. Armez-vous absolument de ce recueil pour passer le week-end du 11 novembre !


Pas d’armistice pour Alphonse Boudard (1925-2000) ! On fanfaronne, on argotise, on se fait encore plus mariole qu’à l’accoutumée, mais, à vrai dire, on est tout chose à la lecture de ces chroniques. Un peu K.O. Le cœur en miettes. Revigoré par cette prose chaloupée et, en même temps, seul, désespérément seul depuis que l’enfant des Gobelins a tiré le rideau. Derrière la fesse glandilleuse, au tréfonds des culs-de-basse-fosse, dans l’œil d’une sous-maîtresse, au zinc avec des fraiseurs de l’usine Panhard, à l’hosto les poumons troués, sur une barricade du Boul’mich, devant le nid d’aigle, le jour de l’enterrement de sa maman, encadré par deux cognes ou durant la campagne d’Alsace, le zig nous impressionne. Quand des types de son calibre affichent un tel pedigree, on ne moufte pas. On ne la ramène pas avec nos petits diplômes et nos références littéraires. Alors, par gloriole, par pudeur aussi, on se réfugie derrière la langue drue des Apaches, les vannes de comptoir et l’insolence morveuse des petits gars du XIIIème arrondissement, le vieux Paris lambrissé et l’accordéon qui mélancolise dans l’arrière-salle, les putains qui arpentent le macadam en se déhanchant excessivement, tout ce cirque-là, c’est juste pour masquer notre émotion.

Ça secoue !

Parce qu’avec Alphonse, on a appris l’Histoire de France, des claques et de la Libération de Paris, de Juin 1940 à Pivot, de Marthe Richard à Petiot, de Manouche à Jo Privat, de Villon à la Ferdine, du roi René à la Tour Montlhéry, du Prix Renaudot aux ors de l’Institut, toute la lyre en somme, le défilé des affreux, des embastillés, des souffreteux, des estropiés, des délirants, des névropathes et des libidineux. Tout y passe. Dominique Gaultier, l’âme du Dilettante, a bien raison de parler de « bonheurs inespérés ». Ces bonheurs sont regroupés dans le recueil qui porte le titre prophétique de Merde à l’an 2000.

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Quel voyage, mes amis ! J’en suis encore tout secoué. On en prend plein les mirettes, on apprécie d’abord le fond caverneux, la mouise persifleuse, les coups du sort à répétition, la déveine, le biribi des réfractaires, on ne file pas d’un cocktail à une mondanité, d’un colloque soliloquant à une tribune bavarde, on s’arsouille dans des coins pas possibles, on est à terre, comme si tous les clampins du monde se donnaient la main. Jolie farandole du désespoir et de la noirceur humaine. Chez d’autres auteurs moins inspirés et commercialement plus vils, cette spirale de la débâcle tournerait à la victimisation, aux larmes ou à la repentance, voire à la résilience. Boudard ne tend pas la sébile pour se faire aimer des médiocres. Il a entendu assez de balles siffler dans sa carrière marloupine pour ne pas mettre un genou à terre. Il se tient debout. Il a appris à écrire sous le magistère des Pieds Nickelés, la meilleure école d’une narration chaotique et fantastiquement drôle. Plus c’est glauque, plus c’est « sans issue », plus c’est foutu, meilleure est la langue. Car, ne vous y trompez pas, chez ce résistant-marlou ou ce voyou-lettré, ce sensible de première bourre qui vous arrache le cœur dans Mourir d’enfance sans les violons chouineurs, les mots valsent, la phrase gouleyante en appelle une autre qui en appelle une autre, ça cascade, ça ne s’arrêtera plus. Les mots sortent naturellement de son encrier. Ils jaillissent et viennent se nicher dans votre cortex, sans forceps, sans vaseline. Des malfaisants, des jaloux sans talent, ont raillé cette veine populiste-artilleuse, osant le traiter parfois de sous-Céline, dans le genre priapique à l’humour troufion. Ces penseurs à vue basse ont disparu depuis longtemps des bibliothèques, mêmes les bouquinistes n’en veulent plus, alors que les aficionados d’Alphonse, sans presque aucun relais médiatique, dans le silence méphitique de l’Université, portent son flambeau et sa bonne parole.

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Sorte de Cioran hilarant

« Qu’importe si je suis catalogué Béotien, vulgaire plumitif sans profondeur métaphysique » écrit-il, avec un mélange d’orgueil et de lucidité, il dame le pion aux Ulmiens et aux khâgneux vengeurs. Nous, ses disciples, l’élevons en chair, le consacrons Béotien Premier, roi du divertissement, empereur du récit imagé, Rabelais n’est pas loin, une sorte de Cioran hilarant, avec une absence de sérieux qui confine à la gravité. Dans ce recueil, émouvant, didactique, foisonnant, déconnant, mariant la mauvaise foi et une sincérité déchirante, administrant un bras d’honneur à l’attention de tous les pissefroids de l’édition, on retrouve toutes les stèles de son existence : Brassens, Hardellet, Giono, Lino, Carco, Gen Paul, Audiard, Simonin, Cendrars, Marcel Aymé, la Môme, Fallet, Antonin Magne, des considérations sur l’amour tarifé, les geôles françaises, le sanatorium, le cinoche et les juges. Gardons en tête cette maxime digne du Cardinal de Retz : « L’engagement met l’intelligence en sommeil ».    

Merde à l’an 2000 de Alphonse Boudard – Le Dilettante

N’oublions pas leurs noms

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N’oublions pas nos huit otages retenus par les terroristes du Hamas


Toute la France devrait connaître leurs noms et leurs visages. Cela fait trente-six jours que Tamir Adar (38 ans), Yafa Adar (85 ans), Noam Avigdori (12 ans), Erez Kalderon (12 ans), Sahar Kalderon (16 ans), Ofer Kalderon (53 ans), Mia Schem (21 ans), Elia Toledano (27 ans), sont otages du Hamas – cette liste a été établie en croisant les informations parues dans les médias et le recensement effectué par BringThemHomeNow, mis à jour à mesure que l’on identifie des corps.

« Une vie vaut une vie », écrit le président dans sa lettre aux Français – attribuant curieusement ce principe biblique à la Déclaration des Droits de l’Homme. On dirait que la nation ne se sent pas très concernée par le destin de ces compatriotes que l’irruption de brigades de la mort a arrachés à une soirée de fête ou à un dîner familial. Pire, leurs visages sont devenus pour certains abrutis qui confondent la cause palestinienne avec la haine des juifs (et sont en train d’installer durablement cette confusion dans de nombreux esprits) le symbole de « l’oppression israélienne ».

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Ils les arrachent fièrement, pensant, comme l’inénarrable Sophie Pommier, ex-collaboratrice du Quai d’Orsay, accomplir un courageux acte de résistance en outrageant la photo « d’un bébé-otage »[1]. Ils insultent ouvertement certaines victimes et pleurnichent ensuite sur le deux poids-deux mesures dont les Palestiniens seraient victimes.

Tout le monde a le cœur serré pour les victimes de Gaza, les familles forcées de tout quitter, les enfances enfuies dans la peur. Évidemment. Encore faut-il rappeler que ces existences ont été délibérément sacrifiées par les chefs du Hamas exactement comme celles des habitants de Mossoul et Falloujah, par ceux de Daech. Aujourd’hui les dirigeants israéliens, comme hier ceux de la Coalition anti-Daech, considèrent que l’enjeu est vital, autrement dit, qu’ils n’ont pas le choix, en dépit du prix en vies humaines. C’est insupportable et inévitable. Cette équation implacable est la définition d’une tragédie.



[1] Cette expression a été employée par Guillaume Erner dans une excellente humeur du matin. https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-humeur-du-matin-par-guillaume-erner/l-humeur-du-jour-emission-du-vendredi-10-novembre-2023-4764680

À quand une minute de silence pour les punaises de lit?

La rentrée parlementaire a été marquée par la gravité et les fausses urgences : terrorisme, écriture inclusive et punaises de lit ont occupé de longues séances dans l’hémicycle.


Bon, finie la rigolade ! Terminées les journées à arpenter ma bonne terre du Biterrois… Retour à l’Assemblée nationale avec ses longues journées dans l’hémicycle.

Non, non, rien n’a changé

C’est la rentrée. J’ai l’impression de retrouver notre hémicycle dans le même état que deux mois plus tôt. LFI braille toujours autant. Les écolos renouent avec le cirque et ne trouvent rien de mieux qu’arborer, dès la première séance de questions au gouvernement, des tee-shirts siglés contre le réchauffement climatique, strictement interdits par notre règlement intérieur. Et, comble de l’ironie, on apprend que, le matin même, lors de la conférence des présidents, Yaël Braun-Pivet, présidente de notre auguste assemblée, avait remis les choses au clair concernant les chahuts à l’Assemblée avec un impérial « Je ne laisserai plus rien passer. » Ça promet !

49.3 le retour…

Pour finir de nous replonger dans l’ambiance, un petit 49.3 dès le lendemain pour faire passer la loi de programmation des finances publiques 2023-2027. Sans que ça émeuve grand-monde, semble-t-il…

Plein emploi

Ça, vous avez dû en entendre parler. C’était le texte de la rentrée parlementaire : le projet de loi qui remet les bénéficiaires du RSA au boulot. Un dialogue de sourds tant les positions semblent irréconciliables entre ceux qui sont favorables aux quinze heures d’activité demandées aux allocataires du RSA en contrepartie des indemnités versées (les partis de la majorité et la droite) et ceux qui estiment que cette mesure s’apparente à de l’exploitation (la gauche et le RN). Les débats sont difficiles. On passe des heures à pinailler sur un mot – faut-il parler d’emploi ou d’emploi de qualité ? –, mais la palme revient sans conteste à un amendement d’un député du RN qui proposait de « comptabiliser dans la durée hebdomadaire d’activité du demandeur d’emploi les heures consacrées aux devoirs des enfants, aux courses et à l’entretien du foyer. » Si, si…

Minutes de silence

Le 10 octobre dernier, la présidente de l’Assemblée nous a demandé d’observer une minute de silence pour les victimes israéliennes de l’attaque terroriste du Hamas. Puis, une autre le 17 octobre en hommage à Dominique Bernard, professeur tué par un islamiste à Arras. Rien de plus évident pour manifester notre solidarité. Mais je ne peux m’empêcher de remarquer que ces instants censés être des moments d’unité, de concorde, sont en forte augmentation – et régulièrement contestés –ces derniers temps à l’Assemblée nationale : huit depuis le début de l’année. Je pense notamment à celle que l’Assemblée a organisée pour la mort de Nahel –« le petit ange parti trop tôt », dixit le footballeur Kylian Mbappé. Vous avez dit discernement ?

Drame national

Le gouvernement avait déjà dévoilé, en mars 2022, le premier plan interministériel contre les punaises de lit ! Mais ces vilaines petites bêtes ont refait surface lors de la rentrée parlementaire et ont été déclarées ennemi public numéro 1 de la septième puissance économique mondiale ! À quand la minute de silence pour les victimes des punaises de lit ?

Empathie

Annoncés pour 2024, les cours d’empathie ou cours « du respect de soi et de l’autre » devront permettre de lutter, notamment, contre le harcèlement scolaire. C’est la nouvelle mesure annoncée par le ministre de l’Éducation nationale après le suicide d’un adolescent à la rentrée. En quoi vont-ils consister ? Difficile de le dire encore avec précision, mais « ces compétences feront désormais partie officiellement des savoirs fondamentaux de l’école », explique Gabriel Attal. En d’autres temps, on appelait ça des cours de catéchisme…

Terrorisme islamiste

Difficile d’appeler les choses par leur nom. L’attaque odieuse subie par Israël de la part des terroristes du Hamas le 7 octobre dernier aura au moins permis de lever le masque sur la France insoumise et ses amis. À l’Assemblée, la position de Mathilde Panot a provoqué des tollés en ce qu’elle refusait d’utiliser le mot « terroriste » pour qualifier les agissements du Hamas. Pour Danièle Obono, il s’agit ni plus ni moins d’un « mouvement de résistance »… Il faut dire que les députés LFI, rameau d’olivier à la boutonnière, tentaient d’expliquer qu’ils plaidaient pour la paix en mettant en avant la cause palestinienne. Clientélisme, quand tu nous tiens…

À la niche

Une fois par an, chaque groupe politique bénéficie d’une journée pendant laquelle il met à l’ordre du jour les textes de son choix. Le 12 octobre, c’est la niche du Rassemblement national. La journée commence par une proposition de loi pour lutter contre l’endométriose, cette maladie gynécologique qui touche environ une femme sur dix dans le monde. Bérengère Couillard, ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, s’est exprimée ainsi quelques jours avant son examen : « J’ai pour principe politique de refuser toutes les lois qui viennent du RN. »Et d’ajouter q u’elle était même« totalement » favorable à prendre un décret sur le sujet qui pourrait« contrer » la démarche du RN. Bravo ! Applaudissez tous ! Car sachez-le, madame la ministre, pour « contrer » le Rassemblement national, est prête à faire… son travail ! On croit vraiment rêver… ou cauchemarder.

Féminisme

Même journée, même niche, mais cette fois, nous examinons un texte visant à interdire l’écriture inclusive. Les débats traînent en longueur. Mais j’arrive finalement à rire (nerveusement, je l’avoue) en entendant une autre députée écologiste (eh oui, encore eux !) nous avouer à la tribune qu’elle rêve de voir les « hommages » se transformer en « femmages »… Je ne suis pas certaine qu’elle ait bien saisi l’étymologie du mot puisque, initialement, « hommage est un terme féodal qui désignait l’acte par lequel un vassal se déclarait l’homme de son seigneur et s’engageait à le servir, en échange de la protection de celui-ci ». Pour une féministe, ça la fout mal, non ?

Retournement de veste

Je ne résiste pas à une dernière petite méchanceté en rappelant que le parti du président Macron avait lui aussi porté, sous la précédente législature, une proposition de loi visant à… interdire l’écriture inclusive. Mais voilà, pas question de voter pour un texte du RN ! La consigne est donc tombée : il faut maintenant défendre l’écriture inclusive ! Finalement, j’adore la politique !

Macron absent de la manifestation contre l’antisémitisme, une dérobade qui indigne

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Pensant vraisemblablement devoir rester à distance de l’ensauvagement du monde, le président Macron ne participera pas à la grande marche civique contre l’antisémitisme. Il se contente d’écrire une lettre dans Le Parisien Dimanche. Craindrait-il la rue arabe ? Le coup de gueule de Céline Pina.


Qui abandonne les Juifs, abandonne la France. Qui ne fait pas aujourd’hui de la lutte contre l’antisémitisme une priorité de la nation, livre symboliquement une partie de sa population à la vindicte d’une autre partie, fanatisée. Qui abandonne une minorité persécutée parce que ses bourreaux ont pour eux la loi du nombre, est destiné à trahir tous ses engagements. L’histoire révèle les grands hommes et met au grand jour les médiocres. Alors que l’on voit ressurgir les prémisses de ce qui annonça naguère la Shoah et les totalitarismes sanguinaires qui l’ont rendue possible, nos hommes politiques sont soumis à un terrible révélateur. Terrible parce que la majorité des donneurs de leçons bardés de principes qui s’exhibe à longueur de congrès et de meetings s’est vite transformée en une congrégation de lâches prête à sacrifier leurs concitoyens et leurs principes avant même d’y être obligée.

Il a été souvent écrit qu’Emmanuel Macron voulait laisser une trace dans l’histoire. En 40 par exemple on pouvait être de Gaulle ou Pétain. Bien sûr tout le monde se rêve en de Gaulle alors que la plupart finiront en Pétain. Emmanuel Macron, placé face à son moment de vérité, vient de démontrer qu’il n’y avait rien de gaullien en lui. En ne participant pas à la marche contre l’antisémitisme alors que les Juifs de France sont attaqués pour ce qu’ils sont, cet homme a trahi son devoir. Il est devenu indigne de sa fonction.

Terrorisé par l’idée qu’il y aurait une rue arabe en France aussi violente que les foules haineuses que l’on a vues à Berlin ou à Londres et résolu à lui donner des gages, il se montre particulièrement lâche dans un entretien à la BBC où il criminalise Israël et ne dit pas un mot des corridors humanitaires ouverts pour évacuer la population par les hommes de Tsahal. Pas un mot non plus sur les caches du Hamas dans les hôpitaux ni sur le fait que celui-ci tire sur les gazaouis car il ne veut pas que ses boucliers humains s’enfuient. Pourtant qui souhaiteriez-vous avoir comme voisin ? Un terroriste du Hamas ou un soldat de Tsahal ? Poser la question, c’est y répondre. Le premier vit au Moyen-âge et ne rêve que de mort, le second est notre contemporain et se bat pour que son pays puisse continuer à vivre. Le premier tire sur sa population, le second la défend et la protège.

Deux fois plus d’actes antisémites en un mois qu’en deux ans

Pour ne pas froisser la part de la communauté musulmane dominée par les islamistes qui applaudissent aux crimes du Hamas, Emmanuel Macron a choisi de faire de l’antisémitisme un point de détail. Il n’est pas au rendez-vous de l’histoire alors que l’on a dénombré deux fois plus d’attaques contre les Juifs en un mois qu’en deux ans ! Ultime cynisme. Il se permet de se dérober car dans le fond il pense que les Français ne seront pas non plus au rendez-vous, qu’ils sont prêts à sacrifier leurs compatriotes juifs et qu’ils sont trop idiots pour avoir compris qu’ils sont les suivants au menu.

A lire aussi, du même auteur: Le Hamas, fossoyeur de la Nupes?

La réalité, c’est qu’en France, aujourd’hui, les Juifs doivent se cacher : retirer leurs mezouzas de leur porte, enlever leurs étoiles de David, quitter dans certains endroits les écoles publiques, déménager de certaines villes, les écoles juives doivent être protégées, comme les synagogues, leurs magasins sont tagués et ils voient un parti comme LFI, leader de la gauche, faire de l’antisémitisme décomplexé une martingale électorale.

Être Juif en France est devenu dangereux. Surtout quand symboliquement le président de la République vous abandonne, donnant ainsi le signal que la curée peut se poursuivre. Ceux qui pratiquent la chasse aux juifs et l’intimidation peuvent donc continuer, le pouvoir vient de révéler qu’il a peur et se couche.


Pourquoi ? Parce qu’il a commencé les accommodements déraisonnables avec les islamistes. Premier gage : l’abandon de nos compatriotes juifs à la violence communautariste. Car c’est là que le bât blesse. Si on avait pu accuser l’extrême-droite de persécuter les Juifs, nul doute qu’Emmanuel Macron aurait pris la tête du cortège et nous aurait abreuvés de couplets sur les ventres féconds d’où sortent les bêtes immondes et sur notre amour de la liberté et de l’égalité qui nous a permis de les vaincre.

Seulement voilà, la France est face à un antisémitisme culturel arabo-musulman que l’influence de l’islamisme a décomplexé, libéré et que personne ne s’est soucié de combattre. Voire qui a été alimenté par l’extrême-gauche qui a très vite compris que le levier du vote musulman dans les banlieues était religieux et identitaire. Ce qui signifie qu’en reprenant les éléments de langage des islamistes, on peut faire un carton électoral à peu de frais. Or les islamistes utilisent énormément le conflit israélo-palestinien pour entretenir le ressentiment des jeunes musulmans et cultiver la haine des Juifs et le rejet de l’Occident.

Quand le poids du nombre anéantit toute morale

Les Juifs, eux, représentent moins de 1% de la population, quand la population d’origine arabo-musulmane représente aujourd’hui plus de 20% des naissances et se chiffre en millions. Le rapport de force numérique n’est donc pas en faveur des Juifs et cela, les politiques l’ont compris. Ils ont compris aussi qu’une partie non négligeable de cette population est sous influence des islamistes et a rompu avec notre mode de vie, nos principes et nos lois. Certains vivent ou désirent vivre ici comme ils le feraient sous la charia: ils voilent les femmes, applaudissent aux prêches antisémites, refusent les principes et valeurs occidentales et veulent imposer un mode de vie islamique en Europe. Pour continuer à profiter de la part de l’électorat musulman sous influence islamiste, ils épousent donc leurs représentations, dont un discours pro-palestinien plus axé sur la haine des Juifs que sur la quête de solutions pour les Palestiniens.

Ainsi, quand les Juifs sont les cibles d’une idéologie violente, obscurantiste qui rejette l’égalité en droit des hommes, retire à certains toute dignité humaine, légitime le meurtre, le viol, l’esclavage de ce qui n’est pas eux et hait tout ce que nous représentons en tant que peuple, ils ne la reconnaissent pas. Alors que les islamistes, quelle que soit leur obédience, partagent une vision du monde que n’auraient pas démenti les nazis, ils font semblant de l’ignorer. Les islamistes pourtant ne se cachent pas. La branche Frère Musulman par exemple n’a jamais caché son alliance avec Hitler lors de la Seconde guerre mondiale ni le partage de nombre des idées du IIIème Reich. D’ailleurs le modèle de société qu’ils portent est monstrueux : l’État islamique alias Daech n’en est pas une dérive, mais l’aboutissement logique.

L’heure est grave et le président n’est pas au rendez-vous du courage et de la dignité

Cela, le président le sait. Alors pourquoi ne pas être au rendez-vous du courage ? Peut-être tout simplement parce qu’il n’en a aucun. Peut-être parce que, par intérêt électoral et au nom du poids des musulmans dans la société, il prépare les abandons futurs. D’autres explications peuvent être avancées : la crainte que l’emprise islamiste soit tellement forte que si on ne leur abandonne pas symboliquement les Juifs de France, la banlieue pourrait s’embraser. On a vu aussi avec les sorties de Dominique de Villepin le poids et l’influence du Qatar, allié et financeur des Frères musulmans et du Hamas, qui sait faire profiter de ses largesses les hommes de pouvoir des pays européens. On peut aussi évoquer l’absence de travail sur la question de l’emprise islamiste en France au sein des partis politiques, de la haute fonction publique, de l’université…

A lire aussi, Jeremy Stubbs: Royaume Uni contre islamogauchisme: le choc des mémoires

Un autre point peut être relevé, l’entourage proche de M. Macron vient de la gauche. Or aujourd’hui elle sombre avec LFI dans l’antisémitisme le plus crasse. Quant aux professionnels de l’agitation de la menace fasciste que sont devenus le PS et EELV, non seulement ils ne reconnaissent pas un pogrom et un crime contre l’humanité quand il se commet sous leurs yeux, mais ils sont incapables de défendre sans barguigner les innocents attaqués car ils pensent qu’être trop fermes contre l’antisémitisme leur fera perdre la seule rente électorale qui leur reste.

Une promesse sacrifiée et nos compatriotes juifs abandonnés

Mais si nos compatriotes juifs sont sacrifiés si facilement par des gens qui n’ont que leur intérêt électoral et financier comme boussole morale, vous croyez vraiment qu’ils vous défendront ? Les islamistes ne s’arrêteront pas aux Juifs, c’est notre façon d’être, de penser, de vivre qu’ils haïssent. Notre président vient de montrer qu’il était un Daladier, ce signataire des accords de Munich qui céda tout à Hitler pour éviter la guerre au prix du déshonneur et infligea à son pays, le déshonneur et la guerre selon le bon mot de Churchill.

« Plus jamais ça » était une des plus belles promesses qui aient été faites à l’humanité. Or si on ne peut empêcher que les monstres renaissent, cette phrase signifie que la détermination à les combattre sera telle que le mal ne se propagera plus. Cette promesse vient d’être piétinée par un de ceux qui en étaient garants, notre président. Alors qu’à nouveau l’antisémitisme se déchaine, il choisit sciemment de regarder ailleurs. Après avoir usé jusqu’à la corde le discours de « je suis l’unique garant des valeurs de la République contre le fascisme », il se dérobe quand il s’agit d’agir réellement. Aujourd’hui que le principal marqueur du nazisme, la déshumanisation des Juifs, est de retour, le président se met en scène s’en lavant les mains. Alors certes, comme le rêve Emmanuel Macron, Ponce Pilate est resté dans l’histoire. Mais comme l’archétype de l’irresponsable.

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Profession: Tanguy

Se prendre en main ou tenir celle de ses parents. En Chine, alors que le taux de chômage des 16-25 ans dépassait les 20 % en début d’année, pour certains, le choix est vite vu.


« Enfant à temps plein ». Voilà une profession, ou une position, qui compte de plus en plus d’adeptes en Chine. Un certain nombre de jeunes Chinois, au chômage ou dégoûtés par un emploi harassant, font le choix de retourner vivre chez leurs parents – et à leurs frais. « Des vidéos virales publiées par des influenceurs “enfants à plein temps”, révèlent un style de vie idyllique : ils font la grasse matinée, préparent les repas à la maison, prennent le thé à 17 heures, emmènent leurs parents danser le soir », a constaté un média shanghaïen. Si certains sont rémunérés par leurs parents pour s’acquitter des tâches ménagères ou leur tenir compagnie, beaucoup se contentent de profiter du gîte et du couvert.

A lire aussi : Causeur: Octobre noir. Du Hamas à Arras, l’internationale de la barbarie

Comment en est-on arrivé là ? Le droit à la paresse est-il en train de gagner la Chine ? En réalité, c’est la situation économique du pays qui explique cette recrudescence de Tanguy. Selon le Bureau national des statistiques, le taux de chômage des 16-25 ans dépassait les 20 % en avril et ceux qui ont un emploi sont souvent surmenés par le rythme de travail, de 9 à 21 heures, six jours par semaine, pour beaucoup. En mai, Xi Jinping a appelé les jeunes à « manger de l’amertume » pour les exhorter à faire face aux difficultés. Cependant, une partie de la jeunesse chinoise, loin de ce sens du sacrifice, aspire à travailler moins pour vivre mieux. Les « enfants à temps plein » ont été critiqués sur les réseaux sociaux, des internautes leur demandant de « s’adapter à la société pour devenir une personne de valeur réelle ».

Il est vrai que les limites d’un tel système sont aisément perceptibles. « Si tout le monde reste à la maison, alors si je sors manger, il n’y aura pas de serveurs. Pour la société en général, ce n’est pas si bon », reconnaît Tian, elle-même « enfant à temps plein ». Cette situation ne va pas disparaître de sitôt car, à en croire les experts, le chômage des jeunes risque de s’aggraver alors qu’un nombre record de 11,6 millions de nouveaux diplômés arrivent sur le marché du travail.

Agnès Desarthe et sa mémoire juive

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Dans Le Château des Rentiers, Agnès Desarthe parle à ses lecteurs d’elle-même et de ses racines juives avec une touchante sincérité.


Dans son nouveau livre, Le Château des Rentiers, la romancière Agnès Desarthe a souhaité quitter brièvement la fiction pure, pour en revenir à elle-même de manière très autobiographique. Elle nous livre un récit éclaté de sa vie, insistant sur les origines centre-européennes de sa famille, non loin des rivages de la mer Noire. Ses ancêtres « venaient tous de la même région, écrit-elle. La Bessarabie. Que certains appellent la Moldavie. Et que d’autres associent à la Bucovine. » Agnès Desarthe fait le lien avec ses grands-parents russophones Boris et Tsila Jampolski, « deux Juifs immigrés en France au début des années 1930 ». Tous deux décident, avec leurs amis migrants, de s’installer à Paris dans un même immeuble, rue du Château des Rentiers, dans le 13e arrondissement. C’est ce quartier, cet univers, ce monde presque imaginaire qui aura bercé l’enfance d’Agnès Desarthe, elle qui adorait sa grand-mère, une femme « douce et discrète ».

Une petite communauté juive

Agnès Desarthe se replonge avec une délectation évidente dans l’évocation de cette petite communauté juive, dont elle est issue. « Personne n’était riche. Tout le monde avait souffert. Sur certains poignets, on lisait une série de chiffres tatoués. Je n’ai su que des années plus tard ce que cela signifiait. » Agnès Desarthe se comporte comme une enfant aimante, mais peu curieuse. Elle le regrette aujourd’hui, au moment où elle désirerait en savoir plus : « Si j’avais été sérieuse, j’aurais posé des questions, je me serais intéressée à ces gens, mais je pensais qu’ils étaient là pour toujours, comme mon enfance qui durerait éternellement. » Le temps passe, destructeur, et arrivent les regrets de n’avoir pas été plus redevable aux autres.

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Les aléas de l’histoire, eux aussi, ont apporté leurs bouleversements et leurs drames. La Shoah, bien sûr. La mère d’Agnès Desarthe était « enfant de déporté », c’est-à-dire « enfant cachée ». En 1996, elle a témoigné dans une vidéo de la fondation Spielberg sur ses années de guerre, et l’attente vaine du père, disparu à Auschwitz. Agnès Desarthe remet la main sur l’enregistrement de sa mère, qu’elle n’avait pas regardé jusqu’à présent. Elle prend dès lors la mesure de cet événement historique dans sa propre vie. Ce grand-père qui ne revient pas, l’espérance déçue de sa mère, et finalement la résignation, tout cela forge chez elle, par une sorte d’atavisme, « une patience face au quotidien, un attrait pour l’irrésolu qui, aujourd’hui encore, me fait préférer les questions aux réponses ». Comme une blessure qui ne se referme pas.

Nécessité de la résilience

Au milieu de tous ces malheurs, Agnès Desarthe apprend la nécessité de la résilience. De fait, sa grand-mère, puis sa mère, lui ont inculqué la joie de vivre, la foi en l’avenir. Un projet naît en elle : reconstituer en plein Paris une sorte de « phalanstère », sur le modèle de celui de ses grands-parents, rue du Château des Rentiers, où elle pourrait habiter plus tard avec sa bande d’amis. Pour Agnès Desarthe, la vieillesse est tout sauf un naufrage. D’une manière positive, la vieillesse se définirait même comme une incessante victoire sur la mort. Agnès Desarthe parle d’ailleurs très peu de la mort, comme si c’était une fatalité hors champ. En revanche, le trop-plein de la vie s’affirme pleinement en évacuant la perspective de la finitude, comme renvoyée à un passé révolu : « La mort était ce à quoi ils avaient échappé », écrit-elle de ses grands-parents et de leurs compagnons juifs.

Dans Le Château des Rentiers, Agnès Desarthe a su parler d’elle-même et de ses racines juives avec une touchante sincérité. Au seuil d’une vieillesse qu’elle voudrait heureuse, prenant modèle sur les femmes de sa famille, elle relève la tête crânement, pour ne rien dérober au futur. Optimiste par héritage, moderne par nécessité, elle voudrait préserver la meilleure part de ce qui lui reste à vivre, en bannissant toute perspective funeste. C’est un pari audacieux et sympathique, une manière de repousser la mort aux calendes grecques, à la manière épicurienne.

Agnès Desarthe, Le Château des Rentiers. Éd. De l’Olivier.

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«Une sorte de nazi»: France Inter et l’hiver de l’humour

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Charline Vanhoenacker et Guillaume Meurice, 12 novembre 2023. D.R.

À France inter, la blague à connotation raciste de Guillaume Meurice sur le Premier ministre israélien ne lui a valu qu’un « avertissement ». Hier soir, on s’attendait à une explication pour son retour derrière le micro. Il n’en a rien été.


À la faveur d’une actualité sanglante, un soi-disant « humoriste » de France Inter s’est flatté, dimanche 29 octobre, de faire passer Benjamin Netanyahou pour « une sorte de nazi sans prépuce ». Au mépris des victimes du massacre du 7 octobre et de ses dramatiques conséquences de part et d’autre ; accessoirement, au mépris des commentateurs qui, quoique d’opinions divergentes, s’efforcent de peser leurs mots.

Les curieuses explications de Charline

Au bout d’une semaine, Guillaume Meurice s’est vu notifier par la présidence de Radio France un avertissement, lequel sanctionne non pas tant le propos que son refus de le regretter. Il a annoncé qu’il le contesterait en justice. Ce qu’il ne fera pas, sauf à vouloir se renverser le vase de nuit sur la tête. Pour sa défense, Meurice s’est réclamé de « l’esprit Charlie ». Sans toucher le bénéfice escompté. Le rédacteur en chef de Charlie-Hebdo a rétorqué que « l’esprit Charlie n’est pas une poubelle qu’on sort pour y jeter ses cochonneries ».

On s’attendait à une explication pendant l’émission du dimanche 12 novembre. Il n’en a rien été. Son animatrice, Charline Vanhoenacker, commence par déplorer les intimidations et menaces de mort visant leurs personnes et la liberté d’expression. Puis, elle reconnaît le trouble qu’a provoqué le propos chez ses coéquipiers. Certains ont été blessés ou choqués, d’autres ont ri, d’autres encore ont regretté d’avoir ri. Tous ont réfléchi. Tant et si bien, dit-elle, que « nous avons surmonté nos divergences ». Mais pour en conclure quoi ? On aurait voulu savoir, on ne le saura pas !

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Écouter cette émission d’une heure trente en direct, sans public « pour des raisons de sécurité », est un supplice. Atmosphère de cirque, chroniques niaiseuses, rires, tapages et applaudissements forcés : tout est simulacre. Quand c’est au tour de Meurice de prendre la parole, on s’efforce de tendre l’oreille. Celui-ci fait sentir qu’il jouit de la sympathie des uns, ces auditeurs qui lui apportent leur soutien, et qu’il attise la haine des autres qui lui souhaitent de « crever ».

Ce n’est pas l’auteur du propos sujet à polémique qui s’exprime, mais à l’en croire sa première et plus apitoyante victime : Meurice en personne.

À l’occasion de son tour de passe-passe, aussi convenu dans cette atmosphère de cirque qu’un numéro de prestidigitation, il en rajoute une louche. « J’ai conscience d’avoir choqué, dit-il, en comparant un fasciste à un nazi. » En studio, personne ne lui rappelle qu’il a comparé un Juif à un nazi.

Tant qu’à se dérober, autant faire porter le chapeau à d’autres, en l’occurrence ses « bons Juifs » à lui. Politiquement des siens. C’est ainsi qu’il tend le micro au représentant d’un obscur « collectif » nommé Tsedeck, à peine cinq mois d’existence, qui entend lutter contre « le racisme d’État en France » et militer « pour la fin de l’apartheid et de l’occupation en Israël-Palestine ». Ce propos enregistré occupe les deux tiers de sa chronique ; Meurice ne pouvait se défiler plus prestement. 

Il reste à examiner l’étron dont Meurice nie la puanteur. Et son contexte.

Cet incident « de trop » met en cause la conduite d’une radio publique qui prétend au beurre, une information équilibrée, en même temps qu’à l’argent du beurre, le gain d’audience tiré de sa « fabrique de l’humour ».  

Ainsi, c’est sur le boulevard ouvert par le Grand Journal de Canal Plus, modèle de raillerie et d’entre-soi, que la radio publique a lancé sa politique d’info-divertissement. Au motif, expliquait sa directrice, Laurence Bloch, que pour livrer « la chronique d’une époque », il était « indispensable d’avoir une bande d’yeux et d’oreilles très acérés ». Têtes d’affiche : Charline Vanhoenacker et Guillaume Meurice. « Inter est une chaîne qui porte des valeurs progressistes, ajoutait Laurence Bloch (…) qui porte attention à l’autre. » (Propos rapportés par Sandrine Blanchard, Le Monde, 8 janvier 2018). 

Mortelle Adèle

Lasse de l’empire de ses bouffons, la station s’est ressaisie à la rentrée. À l’initiative de sa nouvelle directrice, Adèle Van Reeth, la grille a été remodelée. Priée de renoncer à sa quotidienne, Charline Vanhoenacker a dû se replier sur une émission hebdomadaire, le dimanche de 18h à 20h. À ses côtés, Guillaume Meurice. Interrogé (France-Inter, 19 décembre 2019) par ses collègues sur sa méthode de travail, Meurice se défendait de « taper » sur qui que ce soit. On cible, disait-il, « les failles de raisonnement et de logique dans le discours, mais pas les gens ». On ne voit pas sur quelle « faille de raisonnement » il a choisi de taper en représentant Netanyahou en « une sorte de nazi sans prépuce ».

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Que signifie l’image ? Qu’en somme, Netanyahou est le monstre des monstres : à la fois « une sorte » de Juif qui, accusé d’imiter les nazis, trahit les Juifs, et « une sorte » de nazi qui, étant circoncis, tromperait les nazis.

Ce n’est pas tant le mot « prépuce » que la préposition « sans » qui mérite examen. Meurice aurait pu dire : « une sorte de nazi circoncis ». Non, il a voulu être concret, clinique : « sans prépuce ». Pour indiquer un manque. Et laisser s’ouvrir l’abîme d’une confusion dont l’antisémite le moins éveillé ferait son miel. Corrélée à « nazi », la formule « sans prépuce » est pétrie dans la pâte de l’image-choc.

   1. Meurice s’acharne à une heure critique de l’histoire d’Israël sur un homme qui, contesté par ses compatriotes, n’en demeure pas moins en première ligne en tant que chef d’un gouvernement, hétéroclite et défaillant, mais issu d’un scrutin régulier.

   2. Il n’hésite pas se comporter comme n’importe quel « sniper » des cloaques sociaux en usant de la position qu’il occupe à France Inter. Indirectement mais spectaculairement, il jette le déshonneur sur « la première radio d’actualité généraliste et culturelle ».

   3. Il n’a pas idée de l’origine et de la valeur de la circoncision chez les Juifs. À la suite d’une parole tombée du ciel, elle est depuis le temps d’Abraham le signe de l’Alliance qu’ont acceptée les Hébreux et que, par délégation, chaque génération de parents transmet à ses enfants. C’est un témoignage de gratitude et, par-dessus tout, le sceau d’une relation de confiance qui ne peut être à la portée de « l’hommerie » que par une certaine connivence avec le symbolique.

Ce rappel excitera la raillerie de Meurice. Vrai pitre, faux humoriste.

La différence entre le Messie et le plombier, dit une blague juive, c’est que le Messie, on est sûr qu’il viendra un jour. La différence entre le Meurice d’avant et le Meurice d’après, c’est que, s’agissant de celui-ci, on aurait voulu être sûr qu’il ne reviendra pas.

Hélas, il est venu, il vient, il reviendra. Car voilà une dizaine d’années que Meurice s’est alloué les pleins pouvoirs dus à l’humoriste, et le privilège d’immunité qui va avec, comme Napoléon s’était autocouronné empereur. On peut bien discuter la validité d’une information. En revanche, l’humoriste nous interdit de contester son commentaire. Il va de soi qu’il personnifie la liberté d’expression. Ce serait le stigmatiser. Par la faute d’un contradicteur qui, lui ayant fait l’offense de ne pas rire, ne peut être qu’un imprécateur d’extrême-droite comparable à un nazi.

Dans ces conditions, on se demande où, c’est là son antienne favorite, Charline Vanhoenacker trouve le culot, aujourd’hui encore, d’associer sa conception de l’humour à « une prise de risque » quand le plus grand risque à courir est d’écoper d’un cruel « avertissement ».

Derrière le succès de la Marche, une France désunie

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La présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, commémorations du 13 novembre, Paris © Stephane Lemouton-POOL/SIPA

Antisémitisme: ce renoncement à nommer l’ennemi qui tue, de peur d’irriter des cités d’immigration, dit tout de la pleutrerie qui perdure, selon notre chroniqueur.


C’est une France fictivement unie qui a marché silencieusement, hier, contre l’antisémitisme. Certes, les responsables politiques, qui ouvraient la manifestation, rassemblaient la gauche et la droite de gouvernement. Toutefois, ces « élites » s’égareraient à se croire redevenues fédératrices, au vu du succès apparent de la mobilisation citoyenne (plus de 100 000 personnes à Paris, plus de 80 000 dans 70 autres villes).

Foule majoritairement blanche et âgée

En réalité, ces chiffres sont en deçà des protestations contre la profanation du cimetière juif de Carpentras de 1990, ou contre les attentats islamistes du 13 novembre 2015, il y a tout juste huit ans. La foule de dimanche, majoritairement blanche et plutôt âgée, a pu corriger, par sa dignité muette, la bassesse bavarde des querelles politicardes sur qui devait ou non être là. Reste que ce sont bien les politiques menées depuis quarante ans par ceux qui plastronnaient en tête de cortège, qui ont mis la nation ouverte dans cet état de fragilité extrême. L’absence du chef de l’État a illustré la fracture identitaire qui interdit à Emmanuel Macron de choisir son camp.  Dans une « lettre », publiée dans Le Parisien Dimanche, le président n’a eu de cesse d’appeler à « l’unité des Français », en refusant de qualifier la source islamiste du nouvel antisémitisme : une précaution reprise ce lundi matin sur Europe 1 par Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée et coorganisatrice avec le président du Sénat, Gérard Larcher, du rassemblement. Or, ce renoncement à nommer l’ennemi qui tue, de peur d’irriter des cités d’immigration, dit tout de la pleutrerie qui perdure.

En même temps capitulard

Derrière l’unité de façade d’une classe politique agonisante, qui avait relégué le RN en queue de cortège, se laisse voir ce que j’ai appelé « deux France irréconciliables ». Car, outre l’absence de Macron perdu dans son « en même temps » capitulard, il faut noter celles de l’extrême gauche et des autorités musulmanes, rétives à dénoncer l’islamisme et son terrorisme judéophobe.

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a expliqué « comprendre la réticence des musulmans de France à défiler (…) aux côtés de racistes antimusulmans déclarés et assumés » : un prétexte pour ne pas avoir à porter un regard critique sur des textes sacrés qui, pris à la lettre, appellent à tuer Juifs et mécréants. Pour sa part, l’imam Hassen Chalghoumi, un des rares musulmans à avoir appelé à « venir en force » se joindre à la marche, a du renoncer à son projet après des menaces venues de la Tunisie. Il y avait certes, sous les drapeaux de la Kabylie, mon ami Ferhat Mehenni, président de la Kabylie libre, mais lui et ses amis, qui ont fui une Algérie islamisée, tiennent justement l’islam dans la seule sphère de la laïcité.

Les Français musulmans présents n’ont pas choisi de se faire identifier, sauf une exception que j’ai notée, par des pancartes. Plutôt que la banderole : « La République contre l’antisémitisme », il serait souhaitable de voir apparaître désormais : « La France contre l’islamisme ». Rêvons…

La communauté réduite aux aguets

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Toulouse, 11 novembre 2023 © FRED SCHEIBER/SIPA

Depuis cinquante ans, les programmes scolaires, Libération, les historiens atterrants, tous les orphelins des lendemains qui chantent, nostalgiques du plan B, remettent des pièces dans les machines à insurrection, repentance, l’auto-flagellation permanente de l’Occident maléfique. Ils abattent les derniers murs porteurs de la République. Le Graal, c’est la destruction de l’État et de la nation : on y arrive.


« Saül répondit : Je suis dans une grande détresse : les Philistins me font la guerre, et Dieu s’est retiré de moi ; il ne m’a répondu ni par les prophètes ni par des songes. Et je t’ai appelé pour que tu me fasses connaître ce que je dois faire » (I Samuel 28 :15).

Après les barricades de poubelles pour les retraites, les feux de l’amour des cailleras, la guerre de Gaza fracture le pays. Le vent mauvais se lève dans les banlieues. Manifester contre l’antisémitisme donne des sueurs froides aux révolutionnaires. Les masques tombent, les secousses se multiplient, ça sent le soufre… Bientôt Pompéi ? La Montagne Pelée ? Notre histoire nationale ne manque, ni de séquences noires (Guerre de Cent ans, guerres de religions, l’Occupation), ni de politiques médiocres et impuissants. La nouveauté, c’est l’impasse, impair et manque, le sentiment (n’est ce qu’un sentiment ?) d’être dans une nasse, pris en étau entre des fanatiques, partisans du chaos et les imbéciles, hors sol, au pouvoir.

Les insoumis sont à l’Hamas

Rien de nouveau à l’extrême-gauche, éclairée, progressiste, humaniste, pacifiste… Après Lénine, Staline, Trotski, Castro, Mao, Pol Pot, Khomeini, elle comprend et défend le Hamas et ses éventreurs de femmes enceintes. L’Hamascarade et l’aveuglement permanent. Le gauchisme (maladie sénile du communisme) se Dieudonise sur France Inter, ses comiques du service public et leurs blagues hilarantes : Hitler et le prépuce de Netanyahou. Dans Rouge, en 1972, Edwy Plenel (alias de Joseph Krasny) défendait inconditionnellement, Septembre Noir, légitimant l’assassinat de onze athlètes israéliens.

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Les « événements », les « années de braise » : le retour. La « violence légitime » accouche de l’histoire avec une grande H. La raison dialectique, les puissances d’abstraction et de mort fascinaient Sartre. « Abattre un Européen, c’est faire d’une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé : restent un homme mort et un homme libre ». Camus condamne le fanatisme, les terroristes sophistes : « Nous ne sommes pas de ce monde, nous sommes des justes ». En juin 1950, Breton essayait de sauver l’écrivain Záviš Kalandra (résistant, déporté à Ravensbrück, torturé puis pendu par la Sécurité intérieure tchèque). Ignoble, Eluard ironise : « J’ai trop à faire des innocents qui clament leur innocence, pour me préoccuper des coupables qui clament leur culpabilité ». Le poète peaufine son Ode à Staline qui dissipe le malheur : « La confiance est le fruit de son cerveau d’amour ». Finie la liberté sur les cahiers d’écolier. Le Parti et Les Dieux ont soif.

La variante moderne des agités du bocal, c’est le wokisme qui éteint les Lumières et l’universel. Au programme : 1984, la vérité alternative, l’hallu finale, « La guerre c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, l’ignorance c’est la force » (Orwell). Les talibans du monde d’après, damnés de l’atterre, écrasent les armées blanches, réécrivent le passé selon leur idée de la vertu avec leurs mensonges. La littérature, les statues sont déboulonnées, recalibrées, retouchées comme les photos officielles au fil des liquidations. Rachel Garrido a pris un carton jaune en voulant purger pépé. La génération Z exige des aveux… Damnatio memoriæ, abolitio nominis. Au feu les livres pernicieux : les blasphémateurs sont lynchés sur les réseaux sociaux.

Intellectuel: un métier en tension

Depuis cinquante ans, les programmes scolaires, Libération, les historiens atterrants, tous les orphelins des lendemains qui chantent, nostalgiques du plan B, remettent des pièces dans les machines à insurrection, repentance, l’auto-flagellation permanente de l’Occident maléfique. Ils abattent les derniers murs porteurs de la République. Après la colonisation, la rente mémorielle des « dé-coloniaux », nouveau fardeau de l’Homme blanc. Le Graal, c’est la destruction de l’Etat et de la nation : on y arrive.

Gardien de la conscience, debout face à l’Histoire, devant les hommes, Dominique de Villepin, porte des « exigences de responsabilité » pour le Moyen-Orient. « La diplomatie, c’est d’être capable, au fond du tunnel, d’imaginer qu’une lumière est possible »… Surtout dans la bande de Gaza. Jacques Attali est raccord pour une solution à deux Etats : « Elle n’a jamais été réaliste, mais c’est la seule possible ». Jacquou le Croquant est cash : « Oui je suis un écoterroriste ; si j’avais 20 ans, je serais encore plus radical ». Toutologue, Philippulus des dystopies, il prévoit le retour vers le futur, la météo de la veille. Ah, si tous les CEO du monde voulaient bien se donner la main !

Pierre Ouzoulias (sénateur communiste des Hauts-de-Seine) fait dans le romain, le grandiose, l’Empyrée pour tous : « La République française doit redevenir savante, en édifiant dans tous ses recoins des lieux de connaissance, propices au rayonnement de nos villages, de nos quartiers populaires et de nos villes… L’université doit être un nouvel horizon d’attente de l’utopie républicaine ». (Le Monde, 7 novembre). Le hic, c’est l’analphabétisation, le fanatisme, les slogans antisémites qui se multiplient avec les campus. Pour tout bagage ils ont 20 ans, deux slogans, trois mots valises : Et moi et moi et moi, pluriel, diversité, rébellion-illusion… L’union étudiante de Cambridge déprogramme l’Oratorio de Haendel, Saül (premier roi d’Israël), en raison de la « situation politique sensible au Proche-Orient ». Quand les arguments s’effritent, les positions se durcissent.

La Farce d’Action Républicaine 

Contre la chienlit, les incendiaires de bibliothèques et mairies, Elisabeth Borne veut « réaffirmer l’autorité ». Captain Marvel dégaine « l’ordre républicain ». Plus fort que les karchers : les FAR (Force d’action républicaine), CIV (Comité interministériel des villes), EPIDE (Établissements pour l’insertion dans l’emploi), les stages de responsabilité parentale, l’amende pour non-respect du couvre-feu qui passe à 750 euros. La peur (républicaine) va changer de camp. SPQR : « Savoir Prêcher les Quintaux de Renoncements ».

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La dé-civilisation touche la fine fleur de l’élite française, les épées formées à l’Ecole Alsacienne et Sciences-Po. Gabriel Attal accuse Juan Branco de l’avoir harcelé au collège : une querelle de fille emmenée au cinéma, d’homophobie. Juan Vergès accuse le vengeur masqué d’être ambitieux, d’instrumentaliser ses relations amoureuses pour se propulser au sommet. Tic et Tac, Spirou contre Zantafio…

L’apaisement n’est pas pour demain. Sur TikTok, Instagram, X, des légions de Lotophages, Fifi brin d’osier oligophrènes, règlent leurs comptes dans des pugilats hystériques et dérisoires. Rien ne vaut rien ! C’est mon droit ! Balance ton quoi ! L’âne d’Apulée se frotte à celui de Buridan. L’abêtissement général finira par accoucher de la tyrannie.

« Il faut du théâtre, des rites, des cérémonies d’écriture pour faire exister un État, lui donner forme, en faire une fiction animée […]. On n’a jamais vu, on ne verra jamais, une société vivre et se gouverner sans scénario fondateur, sans narrations totémiques, sans musiques, sans chorégraphies… sans préceptes et sans interdits » (Pierre Legendre, Le Visage de la main, 2018).

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Il faut défiler, même avec les bonimenteurs du Bien

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Paris, 11 novembre 2023 © MUSTAFA SEVGI/SIPA

Je l’avoue, je me sens un peu incommodée de manifester avec tous ces Tartuffes qui n’ont cessé de calomnier leurs contradicteurs. Mais j’irai, et sans pince à linge sur le nez.


Arrêtons de parler de sujets qui font voler les assiettes comme la guerre de Gaza, parce qu’aujourd’hui, c’est la journée de l’unité, c’est le président qui le dit. C’est la journée de l’antisémitisme et on est tous contre. C’est bien le problème. Il y a des salauds qui brisent ce grand moment de concorde en prétendant y participer. Les dirigeants du RN veulent défiler avec les autres. On en est là : le Rassemblement national veut combattre l’antisémitisme. Tout fout le camp !

On a donc assisté toute la semaine à un impayable revival des années 90, presque toute la classe politique tordant le nez à l’idée de défiler avec le parti de Marine Le Pen, dont on sait bien que c’est la même que son père. D’ailleurs si elle l’a viré, c’est pour mieux nous tromper, la fourbe.

C’est à celui qui sera le plus offusqué

Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, partis mardi sur la ligne « pas d’exclusive », conforme à la volonté présidentielle de ne plus combattre « l’extrême droite avec des arguments moraux », tiennent moins de 24 heures. Le lendemain, Olivier Véran ouvre la danse, affirmant le RN n’a pas sa place dans cette marche – et signifiant implicitement que les « insoumis », en revanche, sont les bienvenus. Il vaut mieux avoir tort avec l’extrême gauche que raison avec l’extrême droite.

Dans la foulée, de la macronie aux « insoumis », élus et chefs à plumes font assaut de vocalises sur le thème « Je ne défile pas avec le RN ». Sans oublier le CRIF qui n’a toujours pas compris qu’il n’est pas le parti des juifs et qu’on se fiche de ses consignes de vote. Curieusement, ce chœur de vierges outragées oublie Zemmour, pourtant érigé en diable numéro un pendant la campagne – et qui a naturellement appelé ses troupes à défiler. Y aurait-il des limites au ridicule ?

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Dans ce brouhaha d’héroïsme de plateau, nul n’entend les sages propos de Serge Klasrsfeld, Pierre-Henri Tavoillot et même, il faut le saluer, de Pierre Moscovici. C’est à celui qui sera le plus offusqué. Le combat contre l’antisémitisme étant un excellent portage pour l’exhibition de vertu, ses actions montent en flèche à la bourse des bonnes causes. Même Mélenchon risque quelques trémolos.

La semaine s’achève en apothéose avec l’interview, dimanche, de Marine Tondelier par Ali Baddou qui, le week-end, fait du France Inter au carré sur France Inter1. Dans un numéro qui ressemble à un sketch de Raymond Devos, la patronne des Verts explique aux deux matinaliers énamourés qu’elle aurait aimé que la marche soit un grand moment d’unité mais que ce n’est pas possible… parce que le RN et Jordan Bardella ont annoncé leur venue. Ce qui brise l’unité c’est que Marine Le Pen se rallie à une cause nationale. Ce qui les enrage le plus, c’est que, sans même en faire des tonnes, l’intéressée refuse le rôle qui lui est assigné par le petit théâtre politique qui donne la même pièce depuis des lustres. N’en déplaise aux estomacs délicats, pour une manifestation comme celle d’aujourd’hui, il n’y a pas d’invitation. C’est comme à un enterrement : qui veut vient. Au lieu de s’agenouiller et de demander pardon, les élus du Rassemblement national défileront comme les autres. Ils ont bien raison.

En conséquence, les amusants résistants qui adorent papoter avec Médine marcheront, précise Tondelier, derrière une banderole dénonçant tous les racismes, métaphore à deux tonnes du cordon sanitaire. « On fait en sorte, avec le reste de la gauche, de garantir un cadre sain », ose-t-elle, sans susciter la moindre réaction des deux endormis. Le RN est une maladie qu’il convient de traiter. Ce que les partis convenables s’emploient à faire depuis quarante ans avec le succès que l’on sait.

Marine Tondelier débattait avec le rappeur Médine, fin août au Havre, malgré le tweet à connotation antisémite adressé à Rachel Kahn quelques jours plus tôt © ISA HARSIN/SIPA

Un aveuglement sidérant

Depuis plusieurs décennies, ils ont, par leurs bêlements immigrationnistes, favorisé l’islamisation de nombreux quartiers et la montée subséquente d’un antisémitisme et d’une homophobie décomplexés.  Et pourtant, j’irai manifester avec eux.

Peut-être qu’au début beaucoup croyaient sincèrement que la bête immonde allait se réveiller en blonde. Après Merah, Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, le 13-novembre et tant de morts du djhadisme sur le sol européen, leur aveuglement sidère. Reconnaître qu’ils se sont trompés serait sans doute douloureux. Nous payons tous le prix de ce déni qui nous a désarmés. Politiquement et intellectuellement.

A relire, Elisabeth Lévy: Gérard Miller, les Juifs et ma boussole morale

Nous ne sondons pas les reins et les cœurs. Si l’antisémitisme d’extrême droite perdure chez des individus, il ne s’affiche pas sur la place publique et ne casse pas la gueule aux gamins porteurs de kippa. Il ne se drape pas dans le drapeau palestinien. Obsédés par l’antisémitisme d’hier, les bonimenteurs du Bien ont refusé de voir celui d’aujourd’hui et insulté ceux qui le voyaient. Comme l’a écrit Eddy Royer dans Causeur, le sage montre l’islamisme et l’idiot regarde l’extrême droite. Pour un plat de lentilles électoral, ils se sont alliés avec le seul parti qui joue ouvertement avec la haine des juifs.

Et toute honte bue, ils continuent à faire leurs chochottes !

Je l’avoue, je me sens un peu incommodée de manifester avec tous ces Tartuffes qui n’ont cessé de calomnier leurs contradicteurs. Mais j’irai, et sans pince à linge sur le nez. Parce qu’il y aura des milliers de mes compatriotes de toutes origines qui refusent de laisser le pays à des petites frappes malfaisantes. 

Reste une question à laquelle le pavé parisien n’apportera pas de réponse. Le président promet de « ramener l’antisémitisme à la seule place qui doit être la sienne : devant les tribunaux et derrière les barreaux ». On aimerait savoir comment il compte le désimplanter des cerveaux.


  1. https://www.youtube.com/watch?v=57RjVCwBJpc ↩︎

Tiens, voilà du Boudard!

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L'écrivain français Alphonse Boudard (1925-2000) © Le Dilettante Editions Couverture : Camille Cazaubon

En publiant des chroniques du Grand Alphonse parues entre 1959 et 1999 dans diverses revues, du Monde à Playboy, Le Dilettante nous fait du gringue. Armez-vous absolument de ce recueil pour passer le week-end du 11 novembre !


Pas d’armistice pour Alphonse Boudard (1925-2000) ! On fanfaronne, on argotise, on se fait encore plus mariole qu’à l’accoutumée, mais, à vrai dire, on est tout chose à la lecture de ces chroniques. Un peu K.O. Le cœur en miettes. Revigoré par cette prose chaloupée et, en même temps, seul, désespérément seul depuis que l’enfant des Gobelins a tiré le rideau. Derrière la fesse glandilleuse, au tréfonds des culs-de-basse-fosse, dans l’œil d’une sous-maîtresse, au zinc avec des fraiseurs de l’usine Panhard, à l’hosto les poumons troués, sur une barricade du Boul’mich, devant le nid d’aigle, le jour de l’enterrement de sa maman, encadré par deux cognes ou durant la campagne d’Alsace, le zig nous impressionne. Quand des types de son calibre affichent un tel pedigree, on ne moufte pas. On ne la ramène pas avec nos petits diplômes et nos références littéraires. Alors, par gloriole, par pudeur aussi, on se réfugie derrière la langue drue des Apaches, les vannes de comptoir et l’insolence morveuse des petits gars du XIIIème arrondissement, le vieux Paris lambrissé et l’accordéon qui mélancolise dans l’arrière-salle, les putains qui arpentent le macadam en se déhanchant excessivement, tout ce cirque-là, c’est juste pour masquer notre émotion.

Ça secoue !

Parce qu’avec Alphonse, on a appris l’Histoire de France, des claques et de la Libération de Paris, de Juin 1940 à Pivot, de Marthe Richard à Petiot, de Manouche à Jo Privat, de Villon à la Ferdine, du roi René à la Tour Montlhéry, du Prix Renaudot aux ors de l’Institut, toute la lyre en somme, le défilé des affreux, des embastillés, des souffreteux, des estropiés, des délirants, des névropathes et des libidineux. Tout y passe. Dominique Gaultier, l’âme du Dilettante, a bien raison de parler de « bonheurs inespérés ». Ces bonheurs sont regroupés dans le recueil qui porte le titre prophétique de Merde à l’an 2000.

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Quel voyage, mes amis ! J’en suis encore tout secoué. On en prend plein les mirettes, on apprécie d’abord le fond caverneux, la mouise persifleuse, les coups du sort à répétition, la déveine, le biribi des réfractaires, on ne file pas d’un cocktail à une mondanité, d’un colloque soliloquant à une tribune bavarde, on s’arsouille dans des coins pas possibles, on est à terre, comme si tous les clampins du monde se donnaient la main. Jolie farandole du désespoir et de la noirceur humaine. Chez d’autres auteurs moins inspirés et commercialement plus vils, cette spirale de la débâcle tournerait à la victimisation, aux larmes ou à la repentance, voire à la résilience. Boudard ne tend pas la sébile pour se faire aimer des médiocres. Il a entendu assez de balles siffler dans sa carrière marloupine pour ne pas mettre un genou à terre. Il se tient debout. Il a appris à écrire sous le magistère des Pieds Nickelés, la meilleure école d’une narration chaotique et fantastiquement drôle. Plus c’est glauque, plus c’est « sans issue », plus c’est foutu, meilleure est la langue. Car, ne vous y trompez pas, chez ce résistant-marlou ou ce voyou-lettré, ce sensible de première bourre qui vous arrache le cœur dans Mourir d’enfance sans les violons chouineurs, les mots valsent, la phrase gouleyante en appelle une autre qui en appelle une autre, ça cascade, ça ne s’arrêtera plus. Les mots sortent naturellement de son encrier. Ils jaillissent et viennent se nicher dans votre cortex, sans forceps, sans vaseline. Des malfaisants, des jaloux sans talent, ont raillé cette veine populiste-artilleuse, osant le traiter parfois de sous-Céline, dans le genre priapique à l’humour troufion. Ces penseurs à vue basse ont disparu depuis longtemps des bibliothèques, mêmes les bouquinistes n’en veulent plus, alors que les aficionados d’Alphonse, sans presque aucun relais médiatique, dans le silence méphitique de l’Université, portent son flambeau et sa bonne parole.

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Sorte de Cioran hilarant

« Qu’importe si je suis catalogué Béotien, vulgaire plumitif sans profondeur métaphysique » écrit-il, avec un mélange d’orgueil et de lucidité, il dame le pion aux Ulmiens et aux khâgneux vengeurs. Nous, ses disciples, l’élevons en chair, le consacrons Béotien Premier, roi du divertissement, empereur du récit imagé, Rabelais n’est pas loin, une sorte de Cioran hilarant, avec une absence de sérieux qui confine à la gravité. Dans ce recueil, émouvant, didactique, foisonnant, déconnant, mariant la mauvaise foi et une sincérité déchirante, administrant un bras d’honneur à l’attention de tous les pissefroids de l’édition, on retrouve toutes les stèles de son existence : Brassens, Hardellet, Giono, Lino, Carco, Gen Paul, Audiard, Simonin, Cendrars, Marcel Aymé, la Môme, Fallet, Antonin Magne, des considérations sur l’amour tarifé, les geôles françaises, le sanatorium, le cinoche et les juges. Gardons en tête cette maxime digne du Cardinal de Retz : « L’engagement met l’intelligence en sommeil ».    

Merde à l’an 2000 de Alphonse Boudard – Le Dilettante

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N’oublions pas leurs noms

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N’oublions pas nos huit otages retenus par les terroristes du Hamas


Toute la France devrait connaître leurs noms et leurs visages. Cela fait trente-six jours que Tamir Adar (38 ans), Yafa Adar (85 ans), Noam Avigdori (12 ans), Erez Kalderon (12 ans), Sahar Kalderon (16 ans), Ofer Kalderon (53 ans), Mia Schem (21 ans), Elia Toledano (27 ans), sont otages du Hamas – cette liste a été établie en croisant les informations parues dans les médias et le recensement effectué par BringThemHomeNow, mis à jour à mesure que l’on identifie des corps.

« Une vie vaut une vie », écrit le président dans sa lettre aux Français – attribuant curieusement ce principe biblique à la Déclaration des Droits de l’Homme. On dirait que la nation ne se sent pas très concernée par le destin de ces compatriotes que l’irruption de brigades de la mort a arrachés à une soirée de fête ou à un dîner familial. Pire, leurs visages sont devenus pour certains abrutis qui confondent la cause palestinienne avec la haine des juifs (et sont en train d’installer durablement cette confusion dans de nombreux esprits) le symbole de « l’oppression israélienne ».

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Ils les arrachent fièrement, pensant, comme l’inénarrable Sophie Pommier, ex-collaboratrice du Quai d’Orsay, accomplir un courageux acte de résistance en outrageant la photo « d’un bébé-otage »[1]. Ils insultent ouvertement certaines victimes et pleurnichent ensuite sur le deux poids-deux mesures dont les Palestiniens seraient victimes.

Tout le monde a le cœur serré pour les victimes de Gaza, les familles forcées de tout quitter, les enfances enfuies dans la peur. Évidemment. Encore faut-il rappeler que ces existences ont été délibérément sacrifiées par les chefs du Hamas exactement comme celles des habitants de Mossoul et Falloujah, par ceux de Daech. Aujourd’hui les dirigeants israéliens, comme hier ceux de la Coalition anti-Daech, considèrent que l’enjeu est vital, autrement dit, qu’ils n’ont pas le choix, en dépit du prix en vies humaines. C’est insupportable et inévitable. Cette équation implacable est la définition d’une tragédie.



[1] Cette expression a été employée par Guillaume Erner dans une excellente humeur du matin. https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-humeur-du-matin-par-guillaume-erner/l-humeur-du-jour-emission-du-vendredi-10-novembre-2023-4764680

À quand une minute de silence pour les punaises de lit?

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D.R.

La rentrée parlementaire a été marquée par la gravité et les fausses urgences : terrorisme, écriture inclusive et punaises de lit ont occupé de longues séances dans l’hémicycle.


Bon, finie la rigolade ! Terminées les journées à arpenter ma bonne terre du Biterrois… Retour à l’Assemblée nationale avec ses longues journées dans l’hémicycle.

Non, non, rien n’a changé

C’est la rentrée. J’ai l’impression de retrouver notre hémicycle dans le même état que deux mois plus tôt. LFI braille toujours autant. Les écolos renouent avec le cirque et ne trouvent rien de mieux qu’arborer, dès la première séance de questions au gouvernement, des tee-shirts siglés contre le réchauffement climatique, strictement interdits par notre règlement intérieur. Et, comble de l’ironie, on apprend que, le matin même, lors de la conférence des présidents, Yaël Braun-Pivet, présidente de notre auguste assemblée, avait remis les choses au clair concernant les chahuts à l’Assemblée avec un impérial « Je ne laisserai plus rien passer. » Ça promet !

49.3 le retour…

Pour finir de nous replonger dans l’ambiance, un petit 49.3 dès le lendemain pour faire passer la loi de programmation des finances publiques 2023-2027. Sans que ça émeuve grand-monde, semble-t-il…

Plein emploi

Ça, vous avez dû en entendre parler. C’était le texte de la rentrée parlementaire : le projet de loi qui remet les bénéficiaires du RSA au boulot. Un dialogue de sourds tant les positions semblent irréconciliables entre ceux qui sont favorables aux quinze heures d’activité demandées aux allocataires du RSA en contrepartie des indemnités versées (les partis de la majorité et la droite) et ceux qui estiment que cette mesure s’apparente à de l’exploitation (la gauche et le RN). Les débats sont difficiles. On passe des heures à pinailler sur un mot – faut-il parler d’emploi ou d’emploi de qualité ? –, mais la palme revient sans conteste à un amendement d’un député du RN qui proposait de « comptabiliser dans la durée hebdomadaire d’activité du demandeur d’emploi les heures consacrées aux devoirs des enfants, aux courses et à l’entretien du foyer. » Si, si…

Minutes de silence

Le 10 octobre dernier, la présidente de l’Assemblée nous a demandé d’observer une minute de silence pour les victimes israéliennes de l’attaque terroriste du Hamas. Puis, une autre le 17 octobre en hommage à Dominique Bernard, professeur tué par un islamiste à Arras. Rien de plus évident pour manifester notre solidarité. Mais je ne peux m’empêcher de remarquer que ces instants censés être des moments d’unité, de concorde, sont en forte augmentation – et régulièrement contestés –ces derniers temps à l’Assemblée nationale : huit depuis le début de l’année. Je pense notamment à celle que l’Assemblée a organisée pour la mort de Nahel –« le petit ange parti trop tôt », dixit le footballeur Kylian Mbappé. Vous avez dit discernement ?

Drame national

Le gouvernement avait déjà dévoilé, en mars 2022, le premier plan interministériel contre les punaises de lit ! Mais ces vilaines petites bêtes ont refait surface lors de la rentrée parlementaire et ont été déclarées ennemi public numéro 1 de la septième puissance économique mondiale ! À quand la minute de silence pour les victimes des punaises de lit ?

Empathie

Annoncés pour 2024, les cours d’empathie ou cours « du respect de soi et de l’autre » devront permettre de lutter, notamment, contre le harcèlement scolaire. C’est la nouvelle mesure annoncée par le ministre de l’Éducation nationale après le suicide d’un adolescent à la rentrée. En quoi vont-ils consister ? Difficile de le dire encore avec précision, mais « ces compétences feront désormais partie officiellement des savoirs fondamentaux de l’école », explique Gabriel Attal. En d’autres temps, on appelait ça des cours de catéchisme…

Terrorisme islamiste

Difficile d’appeler les choses par leur nom. L’attaque odieuse subie par Israël de la part des terroristes du Hamas le 7 octobre dernier aura au moins permis de lever le masque sur la France insoumise et ses amis. À l’Assemblée, la position de Mathilde Panot a provoqué des tollés en ce qu’elle refusait d’utiliser le mot « terroriste » pour qualifier les agissements du Hamas. Pour Danièle Obono, il s’agit ni plus ni moins d’un « mouvement de résistance »… Il faut dire que les députés LFI, rameau d’olivier à la boutonnière, tentaient d’expliquer qu’ils plaidaient pour la paix en mettant en avant la cause palestinienne. Clientélisme, quand tu nous tiens…

À la niche

Une fois par an, chaque groupe politique bénéficie d’une journée pendant laquelle il met à l’ordre du jour les textes de son choix. Le 12 octobre, c’est la niche du Rassemblement national. La journée commence par une proposition de loi pour lutter contre l’endométriose, cette maladie gynécologique qui touche environ une femme sur dix dans le monde. Bérengère Couillard, ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, s’est exprimée ainsi quelques jours avant son examen : « J’ai pour principe politique de refuser toutes les lois qui viennent du RN. »Et d’ajouter q u’elle était même« totalement » favorable à prendre un décret sur le sujet qui pourrait« contrer » la démarche du RN. Bravo ! Applaudissez tous ! Car sachez-le, madame la ministre, pour « contrer » le Rassemblement national, est prête à faire… son travail ! On croit vraiment rêver… ou cauchemarder.

Féminisme

Même journée, même niche, mais cette fois, nous examinons un texte visant à interdire l’écriture inclusive. Les débats traînent en longueur. Mais j’arrive finalement à rire (nerveusement, je l’avoue) en entendant une autre députée écologiste (eh oui, encore eux !) nous avouer à la tribune qu’elle rêve de voir les « hommages » se transformer en « femmages »… Je ne suis pas certaine qu’elle ait bien saisi l’étymologie du mot puisque, initialement, « hommage est un terme féodal qui désignait l’acte par lequel un vassal se déclarait l’homme de son seigneur et s’engageait à le servir, en échange de la protection de celui-ci ». Pour une féministe, ça la fout mal, non ?

Retournement de veste

Je ne résiste pas à une dernière petite méchanceté en rappelant que le parti du président Macron avait lui aussi porté, sous la précédente législature, une proposition de loi visant à… interdire l’écriture inclusive. Mais voilà, pas question de voter pour un texte du RN ! La consigne est donc tombée : il faut maintenant défendre l’écriture inclusive ! Finalement, j’adore la politique !

Macron absent de la manifestation contre l’antisémitisme, une dérobade qui indigne

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Paris, 11 novembre 2023 © Stephane Lemouton / POOL/SIPA

Pensant vraisemblablement devoir rester à distance de l’ensauvagement du monde, le président Macron ne participera pas à la grande marche civique contre l’antisémitisme. Il se contente d’écrire une lettre dans Le Parisien Dimanche. Craindrait-il la rue arabe ? Le coup de gueule de Céline Pina.


Qui abandonne les Juifs, abandonne la France. Qui ne fait pas aujourd’hui de la lutte contre l’antisémitisme une priorité de la nation, livre symboliquement une partie de sa population à la vindicte d’une autre partie, fanatisée. Qui abandonne une minorité persécutée parce que ses bourreaux ont pour eux la loi du nombre, est destiné à trahir tous ses engagements. L’histoire révèle les grands hommes et met au grand jour les médiocres. Alors que l’on voit ressurgir les prémisses de ce qui annonça naguère la Shoah et les totalitarismes sanguinaires qui l’ont rendue possible, nos hommes politiques sont soumis à un terrible révélateur. Terrible parce que la majorité des donneurs de leçons bardés de principes qui s’exhibe à longueur de congrès et de meetings s’est vite transformée en une congrégation de lâches prête à sacrifier leurs concitoyens et leurs principes avant même d’y être obligée.

Il a été souvent écrit qu’Emmanuel Macron voulait laisser une trace dans l’histoire. En 40 par exemple on pouvait être de Gaulle ou Pétain. Bien sûr tout le monde se rêve en de Gaulle alors que la plupart finiront en Pétain. Emmanuel Macron, placé face à son moment de vérité, vient de démontrer qu’il n’y avait rien de gaullien en lui. En ne participant pas à la marche contre l’antisémitisme alors que les Juifs de France sont attaqués pour ce qu’ils sont, cet homme a trahi son devoir. Il est devenu indigne de sa fonction.

Terrorisé par l’idée qu’il y aurait une rue arabe en France aussi violente que les foules haineuses que l’on a vues à Berlin ou à Londres et résolu à lui donner des gages, il se montre particulièrement lâche dans un entretien à la BBC où il criminalise Israël et ne dit pas un mot des corridors humanitaires ouverts pour évacuer la population par les hommes de Tsahal. Pas un mot non plus sur les caches du Hamas dans les hôpitaux ni sur le fait que celui-ci tire sur les gazaouis car il ne veut pas que ses boucliers humains s’enfuient. Pourtant qui souhaiteriez-vous avoir comme voisin ? Un terroriste du Hamas ou un soldat de Tsahal ? Poser la question, c’est y répondre. Le premier vit au Moyen-âge et ne rêve que de mort, le second est notre contemporain et se bat pour que son pays puisse continuer à vivre. Le premier tire sur sa population, le second la défend et la protège.

Deux fois plus d’actes antisémites en un mois qu’en deux ans

Pour ne pas froisser la part de la communauté musulmane dominée par les islamistes qui applaudissent aux crimes du Hamas, Emmanuel Macron a choisi de faire de l’antisémitisme un point de détail. Il n’est pas au rendez-vous de l’histoire alors que l’on a dénombré deux fois plus d’attaques contre les Juifs en un mois qu’en deux ans ! Ultime cynisme. Il se permet de se dérober car dans le fond il pense que les Français ne seront pas non plus au rendez-vous, qu’ils sont prêts à sacrifier leurs compatriotes juifs et qu’ils sont trop idiots pour avoir compris qu’ils sont les suivants au menu.

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La réalité, c’est qu’en France, aujourd’hui, les Juifs doivent se cacher : retirer leurs mezouzas de leur porte, enlever leurs étoiles de David, quitter dans certains endroits les écoles publiques, déménager de certaines villes, les écoles juives doivent être protégées, comme les synagogues, leurs magasins sont tagués et ils voient un parti comme LFI, leader de la gauche, faire de l’antisémitisme décomplexé une martingale électorale.

Être Juif en France est devenu dangereux. Surtout quand symboliquement le président de la République vous abandonne, donnant ainsi le signal que la curée peut se poursuivre. Ceux qui pratiquent la chasse aux juifs et l’intimidation peuvent donc continuer, le pouvoir vient de révéler qu’il a peur et se couche.


Pourquoi ? Parce qu’il a commencé les accommodements déraisonnables avec les islamistes. Premier gage : l’abandon de nos compatriotes juifs à la violence communautariste. Car c’est là que le bât blesse. Si on avait pu accuser l’extrême-droite de persécuter les Juifs, nul doute qu’Emmanuel Macron aurait pris la tête du cortège et nous aurait abreuvés de couplets sur les ventres féconds d’où sortent les bêtes immondes et sur notre amour de la liberté et de l’égalité qui nous a permis de les vaincre.

Seulement voilà, la France est face à un antisémitisme culturel arabo-musulman que l’influence de l’islamisme a décomplexé, libéré et que personne ne s’est soucié de combattre. Voire qui a été alimenté par l’extrême-gauche qui a très vite compris que le levier du vote musulman dans les banlieues était religieux et identitaire. Ce qui signifie qu’en reprenant les éléments de langage des islamistes, on peut faire un carton électoral à peu de frais. Or les islamistes utilisent énormément le conflit israélo-palestinien pour entretenir le ressentiment des jeunes musulmans et cultiver la haine des Juifs et le rejet de l’Occident.

Quand le poids du nombre anéantit toute morale

Les Juifs, eux, représentent moins de 1% de la population, quand la population d’origine arabo-musulmane représente aujourd’hui plus de 20% des naissances et se chiffre en millions. Le rapport de force numérique n’est donc pas en faveur des Juifs et cela, les politiques l’ont compris. Ils ont compris aussi qu’une partie non négligeable de cette population est sous influence des islamistes et a rompu avec notre mode de vie, nos principes et nos lois. Certains vivent ou désirent vivre ici comme ils le feraient sous la charia: ils voilent les femmes, applaudissent aux prêches antisémites, refusent les principes et valeurs occidentales et veulent imposer un mode de vie islamique en Europe. Pour continuer à profiter de la part de l’électorat musulman sous influence islamiste, ils épousent donc leurs représentations, dont un discours pro-palestinien plus axé sur la haine des Juifs que sur la quête de solutions pour les Palestiniens.

Ainsi, quand les Juifs sont les cibles d’une idéologie violente, obscurantiste qui rejette l’égalité en droit des hommes, retire à certains toute dignité humaine, légitime le meurtre, le viol, l’esclavage de ce qui n’est pas eux et hait tout ce que nous représentons en tant que peuple, ils ne la reconnaissent pas. Alors que les islamistes, quelle que soit leur obédience, partagent une vision du monde que n’auraient pas démenti les nazis, ils font semblant de l’ignorer. Les islamistes pourtant ne se cachent pas. La branche Frère Musulman par exemple n’a jamais caché son alliance avec Hitler lors de la Seconde guerre mondiale ni le partage de nombre des idées du IIIème Reich. D’ailleurs le modèle de société qu’ils portent est monstrueux : l’État islamique alias Daech n’en est pas une dérive, mais l’aboutissement logique.

L’heure est grave et le président n’est pas au rendez-vous du courage et de la dignité

Cela, le président le sait. Alors pourquoi ne pas être au rendez-vous du courage ? Peut-être tout simplement parce qu’il n’en a aucun. Peut-être parce que, par intérêt électoral et au nom du poids des musulmans dans la société, il prépare les abandons futurs. D’autres explications peuvent être avancées : la crainte que l’emprise islamiste soit tellement forte que si on ne leur abandonne pas symboliquement les Juifs de France, la banlieue pourrait s’embraser. On a vu aussi avec les sorties de Dominique de Villepin le poids et l’influence du Qatar, allié et financeur des Frères musulmans et du Hamas, qui sait faire profiter de ses largesses les hommes de pouvoir des pays européens. On peut aussi évoquer l’absence de travail sur la question de l’emprise islamiste en France au sein des partis politiques, de la haute fonction publique, de l’université…

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Un autre point peut être relevé, l’entourage proche de M. Macron vient de la gauche. Or aujourd’hui elle sombre avec LFI dans l’antisémitisme le plus crasse. Quant aux professionnels de l’agitation de la menace fasciste que sont devenus le PS et EELV, non seulement ils ne reconnaissent pas un pogrom et un crime contre l’humanité quand il se commet sous leurs yeux, mais ils sont incapables de défendre sans barguigner les innocents attaqués car ils pensent qu’être trop fermes contre l’antisémitisme leur fera perdre la seule rente électorale qui leur reste.

Une promesse sacrifiée et nos compatriotes juifs abandonnés

Mais si nos compatriotes juifs sont sacrifiés si facilement par des gens qui n’ont que leur intérêt électoral et financier comme boussole morale, vous croyez vraiment qu’ils vous défendront ? Les islamistes ne s’arrêteront pas aux Juifs, c’est notre façon d’être, de penser, de vivre qu’ils haïssent. Notre président vient de montrer qu’il était un Daladier, ce signataire des accords de Munich qui céda tout à Hitler pour éviter la guerre au prix du déshonneur et infligea à son pays, le déshonneur et la guerre selon le bon mot de Churchill.

« Plus jamais ça » était une des plus belles promesses qui aient été faites à l’humanité. Or si on ne peut empêcher que les monstres renaissent, cette phrase signifie que la détermination à les combattre sera telle que le mal ne se propagera plus. Cette promesse vient d’être piétinée par un de ceux qui en étaient garants, notre président. Alors qu’à nouveau l’antisémitisme se déchaine, il choisit sciemment de regarder ailleurs. Après avoir usé jusqu’à la corde le discours de « je suis l’unique garant des valeurs de la République contre le fascisme », il se dérobe quand il s’agit d’agir réellement. Aujourd’hui que le principal marqueur du nazisme, la déshumanisation des Juifs, est de retour, le président se met en scène s’en lavant les mains. Alors certes, comme le rêve Emmanuel Macron, Ponce Pilate est resté dans l’histoire. Mais comme l’archétype de l’irresponsable.

Silence coupable

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Profession: Tanguy

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D.R

Se prendre en main ou tenir celle de ses parents. En Chine, alors que le taux de chômage des 16-25 ans dépassait les 20 % en début d’année, pour certains, le choix est vite vu.


« Enfant à temps plein ». Voilà une profession, ou une position, qui compte de plus en plus d’adeptes en Chine. Un certain nombre de jeunes Chinois, au chômage ou dégoûtés par un emploi harassant, font le choix de retourner vivre chez leurs parents – et à leurs frais. « Des vidéos virales publiées par des influenceurs “enfants à plein temps”, révèlent un style de vie idyllique : ils font la grasse matinée, préparent les repas à la maison, prennent le thé à 17 heures, emmènent leurs parents danser le soir », a constaté un média shanghaïen. Si certains sont rémunérés par leurs parents pour s’acquitter des tâches ménagères ou leur tenir compagnie, beaucoup se contentent de profiter du gîte et du couvert.

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Comment en est-on arrivé là ? Le droit à la paresse est-il en train de gagner la Chine ? En réalité, c’est la situation économique du pays qui explique cette recrudescence de Tanguy. Selon le Bureau national des statistiques, le taux de chômage des 16-25 ans dépassait les 20 % en avril et ceux qui ont un emploi sont souvent surmenés par le rythme de travail, de 9 à 21 heures, six jours par semaine, pour beaucoup. En mai, Xi Jinping a appelé les jeunes à « manger de l’amertume » pour les exhorter à faire face aux difficultés. Cependant, une partie de la jeunesse chinoise, loin de ce sens du sacrifice, aspire à travailler moins pour vivre mieux. Les « enfants à temps plein » ont été critiqués sur les réseaux sociaux, des internautes leur demandant de « s’adapter à la société pour devenir une personne de valeur réelle ».

Il est vrai que les limites d’un tel système sont aisément perceptibles. « Si tout le monde reste à la maison, alors si je sors manger, il n’y aura pas de serveurs. Pour la société en général, ce n’est pas si bon », reconnaît Tian, elle-même « enfant à temps plein ». Cette situation ne va pas disparaître de sitôt car, à en croire les experts, le chômage des jeunes risque de s’aggraver alors qu’un nombre record de 11,6 millions de nouveaux diplômés arrivent sur le marché du travail.

Agnès Desarthe et sa mémoire juive

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L'écrivaine française Agnès Desarthe photographiée en 2009 © Kazam Media / Rex Featu/REX/SIPA

Dans Le Château des Rentiers, Agnès Desarthe parle à ses lecteurs d’elle-même et de ses racines juives avec une touchante sincérité.


Dans son nouveau livre, Le Château des Rentiers, la romancière Agnès Desarthe a souhaité quitter brièvement la fiction pure, pour en revenir à elle-même de manière très autobiographique. Elle nous livre un récit éclaté de sa vie, insistant sur les origines centre-européennes de sa famille, non loin des rivages de la mer Noire. Ses ancêtres « venaient tous de la même région, écrit-elle. La Bessarabie. Que certains appellent la Moldavie. Et que d’autres associent à la Bucovine. » Agnès Desarthe fait le lien avec ses grands-parents russophones Boris et Tsila Jampolski, « deux Juifs immigrés en France au début des années 1930 ». Tous deux décident, avec leurs amis migrants, de s’installer à Paris dans un même immeuble, rue du Château des Rentiers, dans le 13e arrondissement. C’est ce quartier, cet univers, ce monde presque imaginaire qui aura bercé l’enfance d’Agnès Desarthe, elle qui adorait sa grand-mère, une femme « douce et discrète ».

Une petite communauté juive

Agnès Desarthe se replonge avec une délectation évidente dans l’évocation de cette petite communauté juive, dont elle est issue. « Personne n’était riche. Tout le monde avait souffert. Sur certains poignets, on lisait une série de chiffres tatoués. Je n’ai su que des années plus tard ce que cela signifiait. » Agnès Desarthe se comporte comme une enfant aimante, mais peu curieuse. Elle le regrette aujourd’hui, au moment où elle désirerait en savoir plus : « Si j’avais été sérieuse, j’aurais posé des questions, je me serais intéressée à ces gens, mais je pensais qu’ils étaient là pour toujours, comme mon enfance qui durerait éternellement. » Le temps passe, destructeur, et arrivent les regrets de n’avoir pas été plus redevable aux autres.

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Les aléas de l’histoire, eux aussi, ont apporté leurs bouleversements et leurs drames. La Shoah, bien sûr. La mère d’Agnès Desarthe était « enfant de déporté », c’est-à-dire « enfant cachée ». En 1996, elle a témoigné dans une vidéo de la fondation Spielberg sur ses années de guerre, et l’attente vaine du père, disparu à Auschwitz. Agnès Desarthe remet la main sur l’enregistrement de sa mère, qu’elle n’avait pas regardé jusqu’à présent. Elle prend dès lors la mesure de cet événement historique dans sa propre vie. Ce grand-père qui ne revient pas, l’espérance déçue de sa mère, et finalement la résignation, tout cela forge chez elle, par une sorte d’atavisme, « une patience face au quotidien, un attrait pour l’irrésolu qui, aujourd’hui encore, me fait préférer les questions aux réponses ». Comme une blessure qui ne se referme pas.

Nécessité de la résilience

Au milieu de tous ces malheurs, Agnès Desarthe apprend la nécessité de la résilience. De fait, sa grand-mère, puis sa mère, lui ont inculqué la joie de vivre, la foi en l’avenir. Un projet naît en elle : reconstituer en plein Paris une sorte de « phalanstère », sur le modèle de celui de ses grands-parents, rue du Château des Rentiers, où elle pourrait habiter plus tard avec sa bande d’amis. Pour Agnès Desarthe, la vieillesse est tout sauf un naufrage. D’une manière positive, la vieillesse se définirait même comme une incessante victoire sur la mort. Agnès Desarthe parle d’ailleurs très peu de la mort, comme si c’était une fatalité hors champ. En revanche, le trop-plein de la vie s’affirme pleinement en évacuant la perspective de la finitude, comme renvoyée à un passé révolu : « La mort était ce à quoi ils avaient échappé », écrit-elle de ses grands-parents et de leurs compagnons juifs.

Dans Le Château des Rentiers, Agnès Desarthe a su parler d’elle-même et de ses racines juives avec une touchante sincérité. Au seuil d’une vieillesse qu’elle voudrait heureuse, prenant modèle sur les femmes de sa famille, elle relève la tête crânement, pour ne rien dérober au futur. Optimiste par héritage, moderne par nécessité, elle voudrait préserver la meilleure part de ce qui lui reste à vivre, en bannissant toute perspective funeste. C’est un pari audacieux et sympathique, une manière de repousser la mort aux calendes grecques, à la manière épicurienne.

Agnès Desarthe, Le Château des Rentiers. Éd. De l’Olivier.

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