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Il y a erreur sur l’erreur ! Ou comment voir du racisme là où il n’y en a pas

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La faute du 4e arbitre n’est pas celle que l’on croit…


Commençons par les faits : mardi 8 décembre avait lieu un match de football dans le cadre de la Ligue des champions entre le Paris-Saint-Germain et l’Istanbul Basaksehir. Ce match était arbitré par quatre arbitres roumains : un arbitre central, deux arbitres de touche et un quatrième arbitre sur le bord du terrain. Les contacts entre les joueurs en début de rencontre étaient rudes. L’arbitre central siffla plusieurs fautes. Le staff technique de l’équipe turque s’agaça alors de la sévérité de l’arbitre à l’égard de leurs joueurs.

Jugeant l’entraîneur adjoint de l’équipe turque trop véhément, le quatrième arbitre appela l’arbitre de champ à intervenir. Jusqu’ici, rien de plus classique pour un match de football. L’arbitre central est habilité à adresser des avertissements verbaux aux joueurs et au personnel technique sur le bord du terrain, il peut même leur adresser un carton jaune, voire les exclure d’un carton rouge.

Quiproquo autour du mot « negru »

L’objet de la polémique se situe donc uniquement dans les termes employés par le quatrième arbitre pour inciter l’arbitre de champ à intervenir : « C’est le Noir [negru, en roumain] ici. Va voir et identifie-le. Ce gars, le Noir », d’après la traduction de l’Agence France-Presse (AFP).

Des membres de l’équipe technique turque entendirent « negro » au lieu de « negru » et crièrent au racisme. Une enquête est en cours pour déterminer exactement les faits. D’après les rapports de divers journalistes présents sur place, l’arbitre incriminé aurait expliqué qu’il avait dit « negru » en roumain et non pas « negro ». Il aurait alors refusé de s’excuser.

Un genou à terre et le poing levé, les joueurs des deux équipes ont voulu marquer le coup avant le début de la rencontre, au Parc des Princes, le 9 décembre 2020. © Xavier Laine/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22520599_000042
Un genou à terre et le poing levé, les joueurs des deux équipes ont voulu marquer le coup avant le début de la rencontre reprogrammée le lendemain de l’affaire des propos présumés racistes du 4e arbitre, Parc des Princes, le 9 décembre 2020. © Xavier Laine/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22520599_000042

Les joueurs et dirigeants des deux équipes ont été divisés sur la démarche à tenir : reprendre le match avec un autre quatrième arbitre, revenir sur le terrain en se tenant la main en signe de lutte contre le racisme, arrêter définitivement le match… Finalement, c’est cette dernière option qui a prévalu. Depuis, de nombreuses personnalités, proches ou éloignées du monde du football, se félicitent de cet acte fondateur pour la lutte contre le racisme dans le football.

Il se trouve qu’en plus d’être sociologue, je suis fan de football, aussi bien en tant que joueur que spectateur. C’est un monde qui m’est familier. C’est important de le préciser car les commentateurs d’une sphère qui leur est inconnue ont tendance à faire des projections et à ne pas contextualiser ce qu’ils commentent.

L’erreur du quatrième arbitre est une faute professionnelle. Si le quatrième arbitre dit à l’arbitre central « identifie-le », c’est précisément qu’il n’a pas identifié l’entraîneur adjoint de l’équipe turque. Or il ne s’agit pas ici d’une rencontre amateur entre deux équipes de village, mais d’une rencontre professionnelle de premier plan, confiée à des arbitres triés sur le volet : ils sont censés être parmi les meilleurs de leur profession. Par professionnalisme, le quatrième arbitre aurait dû préparer le match (à l’aide d’un trombinoscope par exemple) pour être capable d’identifier tous les acteurs, aussi bien les joueurs titulaires que les remplaçants et les membres de l’encadrement.

Comment désigner quelqu’un dans le feu de l’action ? On peut le pointer du doigt, ce qui n’est pas poli mais efficace. On peut aussi le décrire à partir d’un trait caractéristique visible pour que son interlocuteur l’identifie facilement

A défaut d’identification, le quatrième arbitre désigna l’entraîneur adjoint par sa couleur de peau. Il se trouve que cet adjoint est camerounais et noir. Comment désigner quelqu’un dans le feu de l’action ? On peut le pointer du doigt, ce qui n’est pas poli mais efficace. On peut aussi le décrire à partir d’un trait caractéristique visible pour que son interlocuteur l’identifie facilement. Il faut donc citer un trait caractéristique distinctif par rapport aux autres personnes présentes autour. On peut trouver cela maladroit et regrettable que le quatrième arbitre ait désigné l’entraîneur adjoint en utilisant sa couleur de peau, mais, objectivement, la couleur de peau d’une personne est l’une des premières choses qui saute aux yeux. C’est donc un trait utile pour une communication efficace dans ce type de contexte.

Certains persistent à y voir du racisme

J’ai beau écouter et lire les propos de toutes les personnes qui s’érigent sur leurs grands chevaux depuis ce fameux incident, je ne vois pas où il y aurait du racisme là-dedans. En revanche, la colère sur le coup des personnes dans le stade qui ont cru entendre « negro » est compréhensible. L’immense majorité d’entre elles ignoraient vraisemblablement comment on disait noir en roumain. Mais ils auraient pu se calmer une fois le malentendu linguistique dissipé.

Leur argument pour persister à voir du racisme dans cette affaire est d’affirmer que le quatrième arbitre n’aurait jamais mis en avant la couleur de peau de l’entraîneur adjoint si celui-ci avait été blanc. Tout est une question de distinction. Si l’équipe en question n’était pas turque, mais camerounaise par exemple et que presque tous les membres de l’équipe sur le bord du terrain avaient été noirs, le quatrième arbitre aurait pu désigner l’adjoint comme « blanc » pour que l’arbitre central le repère facilement. De même, qu’il aurait pu dire « le grand », « le roux », « celui aux cheveux longs », etc.

Ce n’est pas forcément agréable d’être désigné et réduit à un seul trait, mais les arbitres parlaient entre eux. Ils ne s’adressaient pas directement à l’entraîneur adjoint. En outre, ce qui aurait réellement pu être offensant, c’eût été d’employer un terme péjoratif : « le nègre », « le crétin », « la tarlouze », etc.

L’essentialisation omniprésente dans le football

S’il y a un domaine où l’essentialisation règne en maître, c’est bien le football. Quand je jouais en club à Boulogne-Billancourt (92), dans les années 1990, mes coéquipiers m’appelaient parfois « le blanc » ou « le Français », voire pour l’un d’entre eux « le riche » car il m’avait demandé la profession de mes parents et en avait déduit que les miens étaient plus riches que les siens. Il était vrai que j’étais quasi le seul blanc de l’équipe. En revanche, je crois que 99 % de mes co-équipiers étaient eux aussi Français.

Quand j’ai joué au foot au Pérou, on m’appelait « le maigrichon » (El Flaquito). D’autres étaient surnommés « le gros » et chacun y voyait des surnoms ; personne ne portait alors plainte pour grossophobie. Le surnom d’un ancien joueur du PSG, Javier Pastore, était « El flaco », ce qui signifie le maigre. Les journalistes français le désignaient parfois ainsi et personne à ma connaissance n’a porté plainte contre ces journalistes pour racisme anti-maigres.

À lire aussi, Franck Crudo : PSG – Istanbul Basaksehir, un match engagé

Il est donc cocasse que ce soit le milieu du football qui s’offusque aujourd’hui qu’une personne en ait désigné une autre par sa couleur de peau dans un contexte très précis. D’autant que dans le monde du football, comme plus généralement dans la culture populaire, ce sont souvent les non-blancs qui désignent les non-blancs par leur couleur de peau ou bien leurs origines. Personnellement, je n’ai jamais appelé un de mes coéquipiers « le renoi » ou « l’arabe » mais eux le faisaient souvent entre eux. De plus, ce qui pourrait passer pour des insultes vu de l’extérieur prenait un tour amical et affectueux. Certains coéquipiers d’origine maghrébine ou d’Afrique noire se lançaient entre eux des « sale arabe ! » pour rigoler ou bien parce que les insultes servaient de ponctuation.

Du racisme dans le foot ?

Mon fils, alors âgé de 5 ans, avait assisté dans les années 2010 à un match amateur auquel je participais. Il avait commencé à compter le nombre d’insultes proférés entre joueurs mais n’avait vite plus eu assez de doigts pour compter. J’avais dû lui expliquer que « fils de p… » était bien évidemment une insulte, mais que, paradoxalement, dans certains contextes et milieux, c’était plus une interjection qu’autre chose : tout dépendait du ton et du degré amical de la relation des gens qui s’envoyaient ces mots doux à la figure.

Il y a du racisme dans le football. Mais sans doute moins que dans la plupart des milieux professionnels qui s’offusquent du racisme dans le football. D’ailleurs, le racisme dans le sport se situe peu sur le terrain, essentiellement dans les tribunes. S’il y avait des matchs à arrêter, ce serait précisément quand des spectateurs jettent des bananes sur le terrain ou poussent des cris de singe. Cela me semble bien plus grave que de désigner une personne non identifiée par sa couleur de peau.

Il me semble qu’il y a suffisamment de racisme dans le monde pour ne pas avoir besoin d’en voir là où il y a une « simple » faute professionnelle. Comment disait Camus déjà ? « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. »

« The Crown », one more time

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La série Netflix sur Elisabeth II continue de remporter tous les suffrages dans une quatrième saison où le sentimental et le politique s’imbriquent plus que jamais.


Depuis 2016, la série Netflix The Crown, qui retrace le règne d’Elisabeth II, a toujours fait l’unanimité : excellents acteurs, précision de la reconstitution historique, finesse de l’analyse politique. La saison 4 rentre dans le « dur », dans la cicatrice encore béante du règne Thatcher et de la romance ratée à la fin tragique de Diana et Charles qui fait scandale.

Trier le vrai du faux ?

La famille royale a même fait pression auprès de notre juke box à séries préféré pour qu’un avertissement soit mis en place : ceci est une fiction romancée et pas un documentaire. Heureusement, la plateforme a refusé. Quel siècle à avertissements ! Et la presse, de Slate à Madame Figaro, de trier le vrai du faux. Elisabeth et Maggie se détestaient-elles vraiment ? Charles aurait-il vraiment émis le souhait de devenir le tampon hygiénique de Camilla ? Andrew était-il le fils préféré de sa majesté ?

Je dirais peu importe, et bien au contraire, tant mieux. La part de fiction (la vie sans la fiction serait invivable) fait ressortir l’essence même de ce second règne élisabéthain. Les Windsor sont rock’n’roll, shakespeariens et pop. Depuis son couronnement le 2 juin 1953, où les familles britanniques fauchées d’Après Guerre se saignèrent aux quatre veines pour faire l’acquisition d’un téléviseur afin de regarder en direct leur Reine revêtir sa couronne, Elisabeth II appartient corps et âme à ses sujets. Ils se la sont appropriée, et pas l’inverse. Les Windsor, comme le dit dans un des épisodes le personnage qui incarne Charles, sont « indispensables et superflus ». Ne le sommes-nous pas tous ?

Maggie, aristo subtilement déjantée

Mais surtout, depuis l’abdication d’Edouard VIII en 1936 qui préféra suivre son influenceuse américaine et divorcée Wallis Simpson que de régner sur ce qui était encore un Empire, les Windsor, qui ont essuyé toutes les tempêtes, furent furieusement des enfants du siècle passé.

Ils n’ont jamais vécu dans une Tour d’Ivoire mais dans l’oeil du cyclone. Swinging London Swinging Windsor. Le décorsetage de l’Empire Britannique dans les 60’s qui de victorien devint beatlesque en quelques semaines n’épargna pas les Royals. Même si Edouard et son américaine avaient déjà donné le ton avant guerre.

Margaret, la sœur cadette d’Elisabeth fut la première enfant terrible de la famille, elle eut la vie sentimentale d’une star hollywoodienne: on lui refusa d’épouser le Capitaine Townsend qui était divorcé, elle se rabattit donc par dépit sur Anthony Armstrong Jones dont elle divorça à son tour en 1978 (le fatum pointe déjà le bout de son nez).

On lui prêta par la suite beaucoup d’amants lors de ses séjours aux îles Moustiques, et on l’imagine faisant la fête avec Mick Jagger qui possédait une maison sur cette île privée de l’archipel des Grenadines. Dans la série, elle est superbement interprétée par Helena Bonham Carter qui fait d’elle une aristo subtilement déjantée, tabagique et alcoolique, mais surtout désabusée et se sentant, au sein de cette famille, plus superflue qu’indispensable. Sans surprises, Charles, autre ovni des Windsor, adorait son Auntie Margaret qui mourut en 2002 d’avoir trop vécu.

Être heureux en amour ? Quelle idée saugrenue !

Car les Windsor ont ce désir saugrenu d’être heureux en amour. Amour qui empoisonne les femmes et les familles royales. Charles s’y employa, et finit par y parvenir au prix de la tragédie que l’on sait. En 1970, il rencontre Camilla Shand, (future Parker Bowles) dont la grand-mère Alice Kepel fut la maîtresse du Prince de Galles Edward à la fin du XIXème siècle. « Instant Karma » dirait John Lennon. Charles tombe à jamais sous le charme de celle que les tabloïds qualifiaient de laide, mais qui à mon sens était aussi sexy que witty (état d’esprit british intraduisible). Il finit par l’épouser en 2005.

Mais Charles, toujours célibataire à 30 ans, dû épouser Diana Spencer. Sans me mettre dans la peau d’une midinette chroniqueuse à Point de vue Images du monde, (quoique), nous pouvons affirmer que cette alliance entre cette jeune fille qui ne voulait que danser et faire du rollers dans les couloirs de Buckingham et cet homme torturé qui ne voulait pas être roi fut désastreuse.

Diana ébréchée

La façon dont le personnage de Diana est traité dans la série ne plaît pas. Rien de plus normal, on ne touche pas aux idoles sans les ébrécher.

À mon sens, Diana fut à la fois une groupie, elle l’aime son Prince, rencontré pour la première fois alors qu’elle virevoltait déjà, en costume d’elfe du « Songe d’une nuit d’été », et elle lui lance force œillades en dessous. Mais la connexion ne se fait pas. De groupie elle devient donc rock star. Lui vole la vedette, cet homme qui ne sera jamais roi devient prince Consort. Elle est acclamée de Sydney à New-York, fait avec sincérité des tournées caritatives, se donne en spectacle dès qu’elle le peut. Car elle n’a jamais voulu que ça. Être dans la lumière. Elle l’est pour l’éternité. « Candle in the wind », écrivit Elton John en 1977 en hommage à Marilyn, en 1997 il offrit et interpréta la chanson pour Diana. Destins similaires.

God save the Queen: le duel avec la Dame de fer!

Et la Reine dans les imbroglio amoureux de cette saison 4 ?

Elle apparaît comme une figure presque tendre face à la Dame de fer, la fille d’épicier. Elle a l’assurance d’une Churchill rose bonbon lorsqu’elle lui donne son avis aux sujets des Malouines ou de l’apartheid en Afrique du Sud. Maggie lance à Elisabeth « Il est hors de question que je négocie avec des chefs de tribus aux tenues excentriques ». Et la Queen de répondre : « Que suis-je ? Sinon un chef de tribus aux tenues excentriques ? ».

L’ère Thatcher est traitée avec justesse, car si selon Winston Churchill, « le socialisme fait souffler un vent glacial », le libéralisme peut faire souffler un vent sibérien pour les plus pauvres. La Reine semblait posséder cette « common decency » qui manquait terriblement à Miss Maggie.

« God save the Queen/the fascist regim » hurlait Johnny Rotten, le chanteur des Sex Pistols sur une péniche le 7 juin 1977, pour le jubilé d’argent d’Elisabeth. Ce geste provocateur et spectaculaire est finalement un formidable hommage. Le terme est ô combien galvaudé, mais que sont les Windsor sinon des punks ultimes ? Et les punks ont maintenant rejoint les membres de la famille royale sur les mugs que l’on vend dans les boutiques de souvenirs pour touristes. This is England.

Du bon usage des statistiques sur l’immigration

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La lecture du livre de Didier Leschi[tooltips content= »Ce grand dérangement : l’immigration en face, publié dans la collection Tract (n° 22) de Gallimard le 19 novembre 2020. »](1)[/tooltips] peut être intéressante, mais la démographe Michèle Tribalat regrette le manque de précision sur certains chiffres. Elle relève ici les approximations problématiques du petit ouvrage.


À la lecture de ce livre, je me suis dit que nous avions des progrès à faire dans l’usage des statistiques. Et que, si un haut fonctionnaire, directeur de l’OFII et donc gestionnaire de la politique de l’immigration et de l’intégration des étrangers pendant leurs cinq premières années de leur séjour, pouvait en user de manière aussi approximative, il n’était peut-être pas inutile de réfléchir aux règles précises que tout utilisateur de données devrait se fixer afin de limiter les erreurs et fausses nouvelles involontaires. Surtout sur un sujet aussi contentieux que celui de l’immigration.

C’est ce qu’aurait certainement dû faire Didier Leschi, compte tenu de sa fonction et de l’ambition de son livre : « présenter les éléments objectifs à partir desquels chacun pourra se faire une opinion éclairée. Ces éléments, ce sont des chiffres, des faits, des règles internationales et des lois nationales […] quiconque en fait fi dès le départ risque de s’égarer ».

On pourrait résumer ces règles impératives à :

  • Nommer correctement, expliquer la fabrication du chiffre si nécessaire ;
  • Dater. Ce qui  oblige à ne pas abuser de formules vagues telles qu’aujourd’hui et ses équivalents ;
  • Sourcer. Qui a fabriqué la donnée ? Sans se contenter de citer quelqu’un qui l’a utilisée.

Leur vertu est de forcer l’utilisateur à vérifier et à ne pas se contenter d’un vague souvenir ou d’un chiffre glané dans la presse. Didier Leschi date très rarement ses informations chiffrées et n’en donne pratiquement jamais la source. Ce qui oblige le lecteur à une recherche souvent difficile. Connaissant le sujet, certaines données m’ont paru étranges.
C’est le cas de cette affirmation: « Parmi les 36 communes de France métropolitaine comptant plus de 10 000 habitants et dont plus de 30% de la population est d’origine étrangère, 33 sont situées en Île-de-France, dont 15 en Seine-Saint-Denis » (p. 28). Pas de date, pas de source.

Je sais que c’est impossible. La population d’origine étrangère, dans la définition française, se compose d’immigrés (nés à l’étranger de nationalité étrangère à la naissance) et de personnes nées en France d’au moins un parent immigré. Pour descendre au niveau communal, il faut se référer aux enquêtes annuelles de recensement qui ne collectent pas les informations nécessaires pour compter les nés en France d’au moins un parent immigré.

Je retrouve la source (Insee-Analyse Île-de-France n° 70 de l’Insee de 2017) portant sur l’année 2013 qui comprend cette phrase presque intégralement. C’est donc la plume de l’Insee qui a dû « fourcher ». Je vérifie, à partir des données sur 2017, qu’en effet ce qui est écrit porte sur les immigrés et non sur deux générations.

Autre affirmation problématique:

«… Force est de reconnaître que la population immigrée est deux fois plus importante que dans les années 1930. Affirmer que rien n’aurait changé depuis que la France a fait appel à des étrangers pour pallier ses faiblesses démographiques ou se reconstruire après les conflits européens ne prend pas assez en compte ce fait incontestable »(p.26). Pas de date, pas de source.

Supposons que l’emploi du présent se réfère à la dernière date pour laquelle on dispose d’une estimation : 2019. Il se trouve que le nombre d’immigrés en France métropolitaine n’est alors pas 2 fois plus important, mais 2,4 fois plus qu’en 1931 et 2,8 fois plus qu’en 1936 (dates des recensements des années 1930).

Une évolution non sourcée, mais surtout non datée:

« Il est un lieu où les contradictions sont les plus sensibles et où on veut le plus les ignorer : Paris. Beaucoup y disent aimer les migrants et ce d’autant plus que, d’année en année, à l’intérieur du périphérique, leur nombre diminue. Il est passé de 30 à 20% sous l’effet de la gentrification » (p. 37). Ce constat est probablement tiré de la lecture de l’Insee-Analyses Île-de-France de 2017[tooltips content= »Mis à jour le 29 juin 2020. »](2)[/tooltips] : « Le poids de Paris dans l’accueil des immigrés franciliens a reculé de 9 points, passant de 30,0% en 1982 à 21% en 2013 ».

Des reprises, non sourcées, non datées et approximatives telles que celles-ci:

« En 1968, seuls 3% des jeunes métropolitains de moins de vingt-quatre ans étaient d’origine extra-européenne, aujourd’hui 17% » et « la jeunesse africaine, hors Maghreb, était quasi inexistante en 1968. Elle représente de nos jours 20% de la jeunesse d’origine étrangère » (p. 27).

Didier Leschi reprend là un passage du texte que j’ai écrit avec Bernard Aubry et mis en ligne sur mon site, dans lequel il a remplacé 2017 par « aujourd’hui » et « de nos jours ». Texte qui précisait bien qu’il s’agissait des moins de 18 ans et non des moins de 24 ans.

Ou encore celle-ci:

« En ajoutant les enfants d’immigrés nés sur le territoire français, près du quart de la population française a un lien avec l’immigration » (p. 26).

« Près du quart » relève de l’anticipation. En effet, si l’on reprend les estimations par l’Insee de la population immigrée et de celle des nés en France d’au moins un parent immigré, la proportion de personnes d’origine étrangère est de 21,4% en 2019.

Didier Leschi a probablement repris ce qu’il a lu dans l’ouverture du livre de François Héran[tooltips content= »Avec l’immigration. Mesurer, débattre, agir, La Découverte, publié en 2017. »](3)[/tooltips] : « un quart de la population est liée à l’immigration sur une ou deux générations ».

L’abus de la formule « aujourd’hui » et la non-datation laissent croire que l’on cite le dernier chiffre connu ou que ce dont on parle évolue tellement peu que la date d’observation ne compte pas.

Un exemple : « 66% des immigrés résident dans une ville ou une agglomération de plus de 100 000 habitants, contre 42% pour les non-immigrés. Au sein de l’Ile-de-France, 17% de la population est immigrée… » (p. 28).

J’ai cru reconnaître la prose inimitable de l’Insee (« non-immigré ») et, en effet, ces données sont tirées d’un Insee Références de 2012 intitulé Immigrés et descendants d’immigrés. Problème, ces données datent de 2008 !

Une des raisons de ces approximations provient probablement d’un désir sincère d’épargner au lecteur, que l’on pressent rétif aux statistiques, une complexité et des précisions qui risquent de l’ennuyer ou de l’effrayer. On a donc alors tendance à simplifier, ce qui conduit souvent à renoncer à l’exactitude, mais aussi à une certaine paresse. C’est ce qui s’est passé avec le « taux de fécondité ». Des démographes se sont beaucoup moqué des non-initiés qui interprétaient la fécondité en pourcentage, alors que des experts de l’Ined et de l’Insee ont eux-mêmes eu recours, sans doute pour mieux se faire comprendre, à l’expression « taux de fécondité » qui suggère justement l’idée de pourcentage, au lieu de parler d’indicateur conjoncturel de fécondité qui s’exprime en nombre d’enfants par femme.

>>> Une version longue de cet article est à retrouver sur le blog de Michèle Tribalat <<<

Le combat entre partisans et adversaires des éoliennes (Vidéo)

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Plongée dans le combat des partisans et des adversaires des éoliennes, au cœur de la Beauce dans le pays de Marcel Proust.


Présentées comme un des outils majeurs de la transition énergétique et comme le moyen de produire de l’électricité renouvelable en émettant très peu de gaz à effet de serre, les éoliennes se sont multipliées depuis plusieurs années sur le territoire français. Mais leur installation se heurte maintenant à des oppositions locales de plus en plus farouches comme d’ailleurs partout en Europe. Au point, qu’un certain nombre de décideurs et de spécialistes de l’énergie considère aujourd’hui que les éoliennes terrestres n’ont presque plus d’avenir.

Le paradoxe avec les éoliennes est que leurs promoteurs tout comme leurs adversaires le font avec des arguments presque identiques. Ce sont des écologistes qui entendent imposer un grand programme d’éoliennes pour lutter contre le réchauffement climatique et les émissions de CO2. Ce sont des défenseurs de l’environnement, de leur environnement, de leur qualité de vie et du patrimoine qui s’opposent à la construction des mêmes éoliennes.

A lire aussi: Proust à l’ombre des éoliennes

Nous avons donc décidé de montrer la réalité de cet affrontement en participant au tournage d’un documentaire ambitieux. Il a été réalisé avec Transitions & Energies dans la Beauce, région propice aux éoliennes, et plus particulièrement autour de la petite ville d’Illiers-Combray.

Elle a pour particularité d’être au cœur de l’œuvre d’un des plus grands écrivains français Marcel Proust. Dans les sept tomes d’A la recherche du temps perdu, Marcel Proust décrit de nombreux lieux, jardins, châteaux, paysages autour et dans Illiers-Combray. Un patrimoine que les opposants aux éoliennes entendent préserver de toute «pollution visuelle».

Voir ci-dessous le film:

Éoliennes : la face cachée de l’écologie

 

Mila renvoyée: « Que nos politiques regardent la situation en face! »

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Le Point vient de révéler que l’établissement militaire qui avait consenti à accueillir Mila en février a décidé de l’exclure. L’ado avait initialement été exfiltrée de son lycée de l’Isère en raison de menaces de mort, suite à des propos sur l’islam. Son père a écrit une lettre, publiée sur le site du journal. Alors qu’aucun élève de son ancien établissement n’aurait jamais été sanctionné, Céline Pina réagit


Cette enfant n’a fait qu’exercer un droit de critique sur une religion. Depuis elle vit un enfer et sa vie est menacée.

Face à cela, les politiques ont choisi de mettre la poussière sous le tapis et les institutions l’abandonnent. On découvre dans cette lettre comment Mila a été traitée dans son internat et on se demande ce que l’on peut attendre d’adultes, militaires ou professeurs qui sacrifient un être humain et l’abandonnent à des fous furieux pour gagner un peu de temps pour eux, sans même se rendre compte qu’ils sont sur la liste des personnes à abattre. Demandez-donc aux soldats en opérations extérieures si les islamistes sont des gens que l’on arrête en leur livrant des otages? Ils ont un projet politique et ils haïssent ce que nous représentons: le choix de la raison pour nous gouverner, l’égalité des droits et les libertés publiques. Ils focalisent sur Mila mais nos vies ne valent rien à leurs yeux.

En sacrifiant Mila, la France ne sauvera personne. Pas un seul d’entre nous. Au contraire, elle fera même monter le niveau de violence: la faiblesse de l’adversaire accentue la prédation et accélère les passages à l’acte, mais surtout elle les installe dans la durée.

Si nos gouvernants et notre président avaient un peu de dignité et de courage, ils auraient commencé par virer la personne qui exerce la charge de proviseur de son lycée. Un adepte du « pas de vague » si on en croit ce courrier. Exclure ce type de personnalité des fonctions dirigeantes voire de l’institution serait un message qui en soit constitue un positionnement de l’institution. Et il faut le faire en invoquant l’incapacité de faire face à ses devoirs et obligations. Cela remettrait les pendules à l’heure chez les carriéristes.

Il est indispensable que nos dirigeants lancent des procédures judiciaires et internes pour sanctionner tous les lycéens qui l’ont menacée de mort, avec enquête sociale sur les enfants et les familles, amendes et suspension des aides sociales à la clé (une piste à creuser dans le cadre de la loi séparatisme), et expulsion ou retrait des titres de séjour de la famille si le lycéen n’est pas Français, comme des sanctions lourdes s’il est inexpulsable.

Et il faut que cela touche les personnes scolarisées dans son lycée et qui ont participé au harcèlement. On n’imagine pas tout ce que les sanctions de proximité changeraient si les gens voyaient à quel point épouser les causes des islamistes posaient des difficultés à leurs adeptes. Là c’est le contraire: ceux qui se sont comportés en nervi des islamistes paradent. La force a gagné contre la loi, les adultes baissent les yeux devant eux, ils ont gagné. Il est temps là aussi de remettre quelques pendules à l’heure.

Mais surtout, si nos politiciens étaient des hommes d’État, alors cette jeune fille serait à l’étranger, dans une école d’art ou en formation artistique, à nos frais. Et s’il faut prendre en charge sa famille aussi, faisons-le et soyons en fiers. S’il faut pour la protéger un temps dissimuler son identité, organisons-nous. La meilleure réponse à la menace islamiste dans cette affaire est de transformer cela en une opportunité pour Mila et sa famille, d’assumer tous les frais car à travers elle nous assumons ce que nous sommes en tant que peuple et nous soutenons une Marianne en herbe.

Certes, « si le gouvernement fait cela, il reconnait qu’il a perdu », ce qui dans le milieu politique sert à justifier l’inaction au nom de la préservation de l’image. Mais que nos politiciens regardent la situation en face, dans cette affaire pour l’instant ils ont perdu. Tout le monde l’a vu et les islamistes ont noté à quel point nos politiques étaient lâches et pour certains, dont Ségolène Royal, prêts à leur céder.

Face à l’islamisme, aujourd’hui, notre gouvernement ne peut pas protéger Mila, pas plus que son peuple. Il n’a pas pu protéger Samuel Paty. C’est un fait. Mais poursuivre sur cette voie n’est pas inéluctable. Pour mettre fin à la logique des assassinats politiques, il faut arrêter avec le « en même temps » et assumer un fait très simple : refuser d’accepter l’islamisation des mœurs au nom de l’accueil d’une population immigrée n’est pas du racisme. Si pour accueillir nous devons sacrifier ce que nous sommes, alors les Français ne l’accepteront pas et c’est tout à fait normal. À ce titre notre problème principal ne sont pas les discriminations mais bel et bien la violence politique. Pour justifier celle-ci, les islamogauchistes évoquent racisme et discriminations, sauf que cela ne se vérifie pas : les actes anti-musulmans sont bien moins nombreux que les violences subies par les juifs et les chrétiens, et le racisme en France existe certes, mais est plutôt résiduel sauf dans les banlieues où monte la haine raciale, mais là aussi elle est cultivée par les mouvements politiques décoloniaux, alliés des islamistes.

Bref le gouvernement n’a pas à s’excuser de protéger son peuple et une enfant du peuple des islamistes. Il n’a pas à compenser un combat légitime en ouvrant une plateforme de dénonciation des discriminations. Laquelle va aussitôt être instrumentalisée contre la République par des mouvements idéologiques qui pourront ainsi attaquer leurs adversaires et faire croire qu’une dénonciation postée par un gugusse sur une plateforme équivaut à une reconnaissance de l’infamie de la personne ainsi dénoncée.

En revanche, si ce gouvernement veut agir pour la République, il peut rétablir la discipline et l’exigence au sein de l’école de la République, afin que les mérites puissent être reconnus et l’ascenseur social remis en route par exemple. Pour cela il va falloir aussi regarder en face l’état d’un corps enseignant loin d’être composé de hussards noirs de la république. À ce titre il faut relire le rapport qui raconte l’attitude de certains collègues de Samuel Paty et la cabale que certains profs ont voulu mener contre lui, il est éclairant sur la pénétration de l’idéologie des islamistes dans les discours, y compris au sein de la salle des profs : respect des religions, accusation de racisme larvé, attention disproportionnée portée à tout scandale fait au nom de l’islam. Et c’est souvent l’antiracisme dévoyé des indigénistes en mode Bouteldja/Obono qui a assuré la livraison et la légitimation de cette propagande dans les facs et les instituts de formation.

Certes exfiltrer Mila est un terrible aveu d’impuissance, mais cette impuissance est une réalité. Même face à la décapitation d’un professeur, une partie de la classe politique fait semblant d’ignorer que la multiplication des assassinats politiques parle des déclinaisons d’un affrontement de civilisations et non d’une accumulation de faits divers sanglants. Nous n’échapperons pas à la violence en mettant la tête dans le sable alors doit-on sacrifier une enfant pour que des politiciens puissent continuer à se palucher l’ego et faire croire qu’ils contrôlent quelque chose ? Quel curieux sens des réalités. La réponse est non. Et c’est un choix politique. Le plus humiliant pour les islamistes serait que leur acharnement se transforme en opportunité pour Mila et se retourne contre leurs petits télégraphistes, qu’ils pourrissent la vie des lycées ou des quartiers.

Al-Sissi / Macron: loi de Dieu, loi des hommes

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Un récent dialogue improvisé entre le président Emmanuel Macron et le Maréchal Al-Sissi, président de l’Égypte, est particulièrement révélateur de ce qui sépare la société française de la tradition musulmane.


Le récent échange entre les deux hommes d’Etat a permis un face à face entre la loi de Dieu et la loi des hommes. Mais hélas tout le monde semble oublier ce qui devrait pourtant demeurer essentiel: la recherche de ce qui est en soi bon et juste, et qui ne dépend ni de l’arbitraire politique ni de l’arbitraire divin.

Al-Sissi veut révolutionner sa religion

Le régime du Président Al-Sissi mérite bien des critiques, par exemple en ce qui concerne les droits les plus élémentaires des homosexuels ou la brutalité dont il fait preuve vis-à-vis de nombre d’opposants. Realpolitik oblige, il est néanmoins notre allié, bien plus en tout cas que d’autres pays auprès desquels nos gouvernements se compromettent et qui respectent les droits de l’Homme encore moins que l’Égypte moderne. Alors qu’Al-Azhar et son Grand Imam tiennent un discours pétri d’hypocrisie, accusant le monde entier sauf l’islam d’être responsable des crimes commis au nom de l’islam, le Maréchal Al-Sissi a eu il y a déjà 6 ans des paroles d’une grande lucidité :

« Il est inconcevable que la pensée que nous tenons pour sacrée puisse faire de l’entière communauté islamique une source d’anxiété, de danger, de meurtres et de destructions partout dans le monde. Il est inconcevable que cette idéologie… – je ne parle pas de religion mais d’idéologie, le corpus d’idées et de textes que nous avons sacralisés au cours des siècles – soit rendue au point où il est devenu très difficile de la remettre en question. Nous avons atteint un point où cette idéologie est considérée comme hostile par le monde entier. (…) Vous devez vous opposer à l’idéologie actuelle avec fermeté. Permettez-moi de le répéter : nous devons révolutionner notre religion. » Et à l’intention du Grand Imam : « vous portez la responsabilité devant Allah. Le monde entier attend votre parole, car la nation islamique se déchire, se désintègre et s’en va à sa perte, et cela, de nos propres mains… »

Est-il sincère ? Une chose au moins est certaine : si Abdel Fattah Al-Sissi était français, des hordes de sociologues de gauche et tous les médias dits « progressistes » l’accuseraient d’islamophobie !

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Et pourtant. Avec tact et avec clarté, il a exprimé une divergence cruciale entre les fondamentaux de la société française et ceux du monde musulman, fut-il éclairé. Avec Emmanuel Macron, il ont improvisé un échange sur la hiérarchisation de la religion et de la loi humaine. Pour reprendre l’excellente formule d’Eric Zemmour, si la France prétend libérer l’Homme de l’arbitraire des dogmes religieux en donnant la primauté à la loi de l’état, l’islam prétend libérer l’Homme de l’arbitraire des états en donnant la primauté à la loi religieuse (à partir de 10 minutes 30 dans la vidéo). Comment les deux démarches pourraient-elles être compatibles ?

Tout sauf les Frères musulmans!

Il est important de prendre conscience des présupposés implicites des propos des deux chefs d’Etat. Emmanuel Macron invoque, en somme, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à fixer leurs propres lois. Ce faisant, il protège – intellectuellement – la France de toute ingérence, mais en s’y limitant il s’interdit aussi de juger ce qui se fait ailleurs, alors qu’il ne s’en est pas privé à d’autres occasions, y compris pour critiquer l’Égypte. Notons au passage qu’en Égypte, la volonté du peuple avait porté au pouvoir les Frères Musulmans, que le Général Al-Sissi a renversés (et lorsque nous lui reprochons ses méthodes, demandons-nous si nous préférerions réellement l’alternative).

Abdel Fattah Al-Sissi, lui, souligne que les lois des hommes sont arbitraires et changeantes. Mais en déclarant que « si nous reconnaissons que les religions sont célestes et viennent de Dieu, elles sont sacrées et ont la suprématie » il évoque « les religions » en oubliant (peut-être par diplomatie) qu’elles se contredisent les unes les autres, et semble croire que toutes les religions voient les Dieux comme soucieux de s’immiscer dans la sphère politique, ce qui n’est pas le cas. Je pense évidemment à l’Athéna d’Eschyle, dont les seules injonctions politiques sont « que mon peuple ne succombe ni à la tyrannie ni à l’anarchie » et « que chacun vote selon ce que sa conscience lui dit être juste », autrement dit : emparez-vous de votre liberté.

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On pourrait résoudre le dilemme en déclarant que décider si oui ou non une religion est d’origine céleste n’est qu’une décision humaine arbitraire parmi d’autres, mais ce serait passer à côté de l’essentiel.

En termes techniques, le Président Macron et le Président Al-Sissi – Zemmour fait d’ailleurs la même erreur – en restent au face à face entre le droit positif (la loi des hommes) et le droit divin (la loi de Dieu), oubliant le troisième terme qui est le droit naturel (à ne pas confondre avec l’état de nature) : la loi de ce qui est juste en soi, indépendamment de ce qu’en pensent mortels ou immortels.

Une troisième approche

Ce n’est pas le primat de la loi humaine sur la loi divine qui définit l’Occident: c’est la libre recherche du Bien, du Vrai, du Juste, du Beau considérés comme des réalités en soi, indépendantes de tout arbitraire, qu’il s’agisse de l’arbitraire du consensus humain ou de l’arbitraire de la puissance divine. Nous devons évidemment cette approche au miracle grec, et toutes nos philosophies en sont les héritières puisque cette quête est le fondement même de la démarche philosophique, mais aussi de cette autre recherche du « Vrai en soi » qu’est la méthode scientifique expérimentale. Et le christianisme l’a en grande partie intégrée dans sa manière d’articuler foi et raison, comme l’expliquait Benoît XVI dans son célèbre discours de Ratisbonne.

Ainsi dans l’Iliade, le tout premier texte de notre civilisation, Héra et Athéna peuvent-elles rappeler à Zeus qu’en tant que Dieu Suprême Il ne décide pas de ce qui est juste en imposant Ses caprices comme un despote, mais qu’Il est au contraire le garant de la Justice. Ainsi Abraham peut-il dans la Genèse dire à Yahvé qu’il serait indigne de Lui de Se montrer injuste en punissant les innocents avec les coupables : Lui non plus ne décide pas de ce qui est juste, mais accomplit Sa divinité en S’astreignant à n’agir que conformément à la Justice. Ainsi Thomas d’Aquin et le Cardinal Newman affirment-ils comme Kant la primauté de la conscience morale.

« Que chacun vote selon ce que sa conscience lui dit être juste » ordonnait Athéna, et non « que chacun vote selon ses envies ou ses caprices. »

Dans le monde musulman une telle approche est douloureusement minoritaire. Bien plus courante est la position d’Al-Ghazâlî et Ibn Hazm, pour qui « si Allah ordonnait de faire le mal et de croire des mensonges, il faudrait faire le mal et croire des mensonges » affirmation archétypale d’une absolutisation du droit divin. Il faut chercher la défense du droit naturel chez Razi et son rejet du despotisme d’Allah, du côté du platonisme de Sohrawardi, ou chez Al-Kindi et les pratiquants de la Falâsifa. Et c’est bien aux espoirs de la Falâsifa, cette tentative hélas avortée d’introduire dans l’islam sunnite la démarche de la philosophie gréco-latine, que font penser les propos que tenait le Président Al-Sissi en 2014 lorsqu’il dénonçait le refus de remettre en question un corpus idéologique faisant horreur au monde entier.

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Le droit divin ne saurait être une solution : vouloir faire de la religion la référence ultime, c’est accepter les sacrifices humains à la gloire de Moloch et pour abreuver Tezcatlipoca – car si la religion est suprême, il n’existe rien à partir de quoi juger une religion, rien qui permettrait d’accepter certaines religions et d’en rejeter d’autres. Tout choix départageant deux religions ne serait nécessairement qu’arbitraire.

Thémis pour les Grecs. Maât pour les anciens Égyptiens

Et s’ils ne sont qu’arbitraires, les choix humains ne sauraient eux non plus être une solution : pourquoi respecter une loi dont le seul mérite serait de suivre le consensus de l’air du temps, d’être la traduction législative d’une mode aussi capricieuse qu’éphémère ? Pourquoi ne pas donner la même valeur au rétablissement de l’esclavage qu’à son abolition ? C’est tout le discours relativiste de la déconstruction et du multiculturalisme, qui ne sont que des ratiocinations tentant de justifier une lâche démission du sens moral.

Car il y a bien quelque chose qui permet de refuser les sacrifices humains tout en acceptant d’autres pratiques religieuses, de défendre la loi de l’état comme rempart contre l’anarchie – laquelle n’est qu’un autre arbitraire, celui du chaos et de la loi du plus fort – tout en reconnaissant que Jean Moulin et Claus von Stauffenberg ont eu raison de désobéir à la loi de l’Etat.

Thémis pour les Grecs. Maât pour les anciens Égyptiens. Que nous ne pouvons tenter de connaître, dont nous ne pouvons essayer de nous rapprocher, qu’en faisant usage des talents que les Dieux ou l’évolution nous ont donnés : l’intuition, la raison, la conscience morale.

Se plier aux exigences de cette perpétuelle recherche est ce qui distingue une religion digne de ce nom d’une vulgaire superstition, secte, obscurantisme. Mais c’est aussi une exigence citoyenne trop souvent oubliée : l’engagement et l’action politiques ne doivent pas viser une vague conciliation des intérêts particuliers ou communautaires, un équilibre précaire entre des rapports de force et des égoïsmes rivaux, mais – sans les nier – tendre à leur dépassement par la recherche collective du bien commun. Osons les grands mots : une tentative nécessairement imparfaite mais résolue de tendre vers la Justice et l’Harmonie.

Sans cela, nos lois ne seront effectivement qu’un arbitraire parmi d’autres, que les croyants de toutes religions auront de bonnes raisons de regarder avec méfiance, et qu’il sera facile aux fanatiques (et pas seulement aux fanatiques religieux) de dénigrer pour convaincre leurs adeptes de les bafouer.

Le président du Turkménistan a fait ériger une statue géante… de son chien favori


À quand une statue en or de Némo place du Trocadéro ?


Qui a dit qu’islam et canins faisaient mauvais ménage ? Au Turkménistan, pays à très large majorité sunnite où la religion est contrôlée d’une façon soviétique, le président Gurbanguly Berdymukhamedov a fait ériger une statue géante dorée, de six mètres de haut, représentant un « alabaï », son chien favori.

Berger d’Asie centrale et ami des nomades, le canin bombe majestueusement le torse au centre d’Achgabat, la capitale du pays. Le « Protecteur » du Turkménistan s’était déjà offert une statue dorée de lui-même, de 21 mètres de haut, en 2015. Maintenant, son meilleur ami reçoit le même privilège. L’alabaï est un « symbole de réussite et de victoire », a argué son tout-puissant chef d’État, qui s’est déjà fait filmer en train de soulever un long haltère doré et de réparer des voitures. Il y a trois ans, il brandissait fièrement Fidèle par la peau du cou, un alabaï chiot qu’il offrit à Vladimir Poutine pour son 65e anniversaire. L’intéressé sembla sincèrement ému. Et pour cause, il est lui aussi mordu de canins au point d’avoir offert un terrier noir à Hugo Chavez en 2012.

Le chien, animal préféré des hommes avides de pouvoir ?

Le chien apprivoiserait-il les hommes avides de pouvoir ? Le toutou favori de Staline fut un épagneul dénommé Mila, offert par la reine des Pays-Bas. Mais nul besoin de remonter jusque-là : en juin dernier, Emmanuel Macron a dévoilé sur son compte Twitter des clichés de son labrador Némo, « recueilli avec Brigitte en août 2017 », a-t-il précisé. Un possible sujet de conversation pour une hypothétique rencontre avec Gurbanguly Berdymukhamedov. Une statue en or de Némo sur la place du Trocadéro, voilà qui redorerait le blason présidentiel auprès des défenseurs des animaux.

Ces petites têtes qui voient de la discrimination partout

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L’association des journalistes LGBTI a mené son enquête: l’émission de radio Les Grosses têtes est un nid de violeurs racistes homophobes et validistes!


L’association des journalistes LGBTI (AJL) récompense chaque année par des OUT d’or « les journalistes, artistes et personnalités qui contribuent de manière positive à la visibilité des personnes LGBTI. » C’est une association de type gauche diversitaire qui n’hésite jamais à dénoncer les méchants de type Gilles-William Goldnadel, et à regretter l’absence, sur les « plateaux composés exclusivement de blanc.he.s », des femmes « racisées » de type Assa Traoré.

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Son modèle journalistique est le New York Times pour la presse écrite et Loopsider pour les médias d’infos en vidéo, autant dire la crème du journalisme sérieux et audacieux, prêt à traquer et dénoncer toutes les détestables phobies du monde actuel.

Les leçons des journalistes « progressistes » en peau de lapin

Les journalistes d’AJL viennent par conséquent de réaliser une enquête de longue haleine qui ressemble à celle qu’avait réalisée Marine Turchi à propos de l’émission Le masque et la plume dans MédiapartIls ont écouté 24 émissions des Grosses têtes sur RTL et ont fait les comptes : « 159 propos sexistes, 66 déclarations homophobes et transphobes, 51 déclarations et 29 déclarations grossophobes » ont été identifiés. Des remarques sexistes toutes les 11 minutes. 19 séquences discriminantes par émission. Et même 12 propos « classistes » et 7 « validistes », car une association moderne et adepte du vocabulaire diversitaire le plus politiquement correct ne parle plus de luttes des classes mais de « classisme », c’est plus classieux. Ni de discrimination envers les handicapés mais de « validisme », ça fait sérieux. Et, bien sûr, elle écrit ses papiers en écriture dite inclusive, c’est plus mieux.

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Je ne sais pas si on rit beaucoup à l’émission Les grosses têtes que je n’écoute plus depuis longtemps mais que j’ai écoutée en mes jeunes années: Bouvard y dirigeait une troupe de comiques troupiers de niveau supérieur ; Jacques Martin et Jean Yanne y mettaient leur immense culture musicale ou cinématographique au service de la franche rigolade ; Olivier de Kersauson s’y lançait dans des tirades océanographiques d’un lyrisme déluré. On y imitait les accents méditerranéens, chinois ou allemands. On s’y autodénigrait à mort. On y pouffait lorsque Bouvard lançait la question de Madame Véronique Jupon, de Tulle.

Personne n’y entendait un « discours haineux » ou des « propos discriminants ». Et surtout personne ne nous faisait de leçon de morale.

Le bingo de la « culture du viol »

Pour être certain de nous faire la leçon jusqu’au bout, l’AJL a fait appel à une donneuse de leçon auto-assermentée, Mme Valérie Rey-Robert, qui a déjà écrit un livre pour bien expliquer ce qu’est « Une culture du viol à la française », puis un autre pour nous éclairer sur « Le sexisme, une affaire d’hommes ». Le verdict d’icelle est sans appel : « Laurent Ruquier et sa bande cochent toutes les cases du bingo de la culture du viol. » De toute façon, « on baigne dans la culture du viol. » C’est comme « tous ces téléfilms de Noël » dont Mme Rey-Robert constate les « ressorts profondément sexistes, centrés sur les Blancs, centrés sur l’hétérosexualité », ça véhicule « des stéréotypes ».

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Mais revenons à l’émission Les Grosses têtes qui, paraît-il, se moque des gros, des homos, des femmes, des handicapés, et promeut le racisme et le viol en reproduisant « ad nauseam les systèmes de harcèlement les plus classiques », selon l’AJL. L’émission se moque-t-elle également des ignares qui collent à l’actualité la plus bête en ignorant l’histoire? Peut-être pas encore. Nous proposons par exemple à Laurent Ruquier de poser la question suivante à ses acolytes: « Après avoir « retweeté » un message d’Amandine Gay qui remontait les bretelles à Julien Bayou pour son utilisation du mot « lynchage », mot réservé aux Noirs selon elle, quelle est l’essayiste qui a tweeté à son tour: « Les discussions autour du terme « lynchage » me rappellent l’expression « traite de blanches » (phénomène qui n’a jamais existé) mais qui tentait d’établir une équivalence entre les souffrances des noirs et des blancs » ?

Réponse: Mme Valérie Rey-Robert (tweet du 29 novembre), qui ignore apparemment tout de l’histoire des harems et de la traite des esclaves européennes recherchées pour la… blancheur de leur peau, « phénomène » qui a non seulement existé mais qui a été largement décrit par de nombreux historiens, écrivains ou peintres dont Mme Rey-Robert ignore l’existence.

Covid: tout ça pour une poignée de boomers!


La pandémie a créé une nouvelle fracture générationnelle. Peut-on demander aux jeunes de sacrifier leur avenir pour les boomers qui n’ont connu ni la guerre ni la crise, mais profité de la croissance, de l’État providence et de la révolution sexuelle? Surtout quand c’est l’inconscience de ces mêmes boomers qui est responsable de la très mauvaise passe que nous traversons.


Daniel Cohn-Bendit et Alain Juppé ont soufflé tous deux leurs 75 bougies cette année. Dany est né le 4 avril 1945 (à Montauban, bien malgré lui), Alain l’a suivi de peu le 15 août de la même année. Tous les natifs des années d’après-guerre n’ont pas vécu une gloire identique ni une carrière équivalente à celles de nos deux séniors ceintures noires de progressisme. Mais ils ont tous grandi, appris, aimé et travaillé dans des conditions rétrospectivement bénies. Trop jeunes pour être mobilisés par les guerres d’Indochine ou d’Algérie, ils n’ont connu jusqu’en 1973 que croissance à deux chiffres, plein emploi et libération sexuelle. Sur une bande-son qui continue à faire rêver la jeunesse de 2020 – des Beatles au Velvet Underground, des Stones aux Floyd –, ils se sont émancipés des besogneuses pesanteurs de leurs aînés, tout en bâtissant une société prospère. Adossés à celle-ci, ils ont mis en place un État-providence qui a ridiculisé les espoirs les plus fous des marxistes-léninistes : Sécurité sociale, allocations diverses toujours plus munificentes, assurance chômage. Ce que la CGT appelait la « retraite des morts » – car à peine la prenait-on qu’on filait au cimetière – ne fut bientôt qu’un mauvais souvenir tant l’augmentation de l’espérance de vie fut spectaculaire. Ce n’était plus quelques mois de pensions chétives que touchaient des vieillards, mais une rente servie parfois durant plusieurs dizaines d’années, surtout quand, à l’instar des salariés de la RATP, on prend sa retraite (généreuse) à 55 ans et en pleine forme.

Dany et Alain savaient que leurs enfants – s’ils en avaient – disposeraient d’un confort matériel supérieur encore au Frigidaire et à la 4 CV qui les faisaient fantasmer à 15 ans. Les bambins, au reste, grâce à la contraception, ils ont pu commencer à les planifier et non plus à les subir. Cet acquis majeur (en premier chef pour leurs copines) leur a donné la possibilité d’avoir moins de mouflets, plutôt d’ailleurs à 30 ans qu’à 20, voire pas d’enfants du tout (Dany n’en a longtemps pas eu avant d’apprendre, en 2008, qu’il était père d’une fille de 35 ans). Plus le modèle social français se montrait généreux, moins les baby-boomeuses et leurs sœurs cadettes accouchaient. Ce déséquilibre de la pyramide des âges induisait un problème de financement que, de Mitterrand à Hollande, on s’est appliqué à nier, minorer, puis à colmater en s’endettant chaque année plus massivement. Ce fut aussi et surtout l’argument imparable pour justifier l’immigration : les boomers nous demandaient d’adopter des enfants africains de 25 ans, en lieu et place de ceux qu’ils n’avaient pas voulu élever. (« Vous verrez, ils sont une chance » nous ont-ils juré.) Il fallait bien payer les retraites, et quelle différence entre un Tunisien et un Breton de 25 ans ? Vous êtes raciste ?

Lors de la Première Guerre mondiale, la France a accepté la boucherie des tranchées. Elle y sacrifia le quart de ses forces vives

Et puis il y eut bien sûr Mai 68, Dany le Rouge et toute la lyre. L’explosion des droits individuels s’est, au début, confondue avec l’intérêt général (l’égalité entre les hommes et les femmes, la dépénalisation de l’homosexualité, le bannissement du racisme, etc.). Le début des années 1970 figure cet instant pompidolien d’équilibre désormais chimérique entre droits individuels et devoirs collectifs. Jusqu’à ce que la mécanique déraille et mute en droits des minorités, sexuelles, sexuées, religieuses, raciales. D’abord honorées du sceau des droits de l’homme, ces évolutions sociétales se sont progressivement muées en harcèlement tyrannique de la majorité silencieuse et repentante. Ce cocktail juridico-médiatique a constitué le terreau de l’abolition des frontières, du relativisme culturel et des luttes intersectionnelles – ce racisme anti-Blanc subventionné par les impôts des beaufs. Le pacifisme des années peace and love a accouché d’un esprit munichois incarné par les bougies et les nounours avec lesquels, niaiseux, nous pensons faire reculer les islamistes. En 1977, la France expulsait un peu moins de 5 500 étrangers par an pour menace à l’ordre public. En 2019, grâce aux multiples entraves juridiques européennes auxquelles l’intérêt général a été sacrifié, nous n’en avons péniblement expulsé que 383[tooltips content= »Patrick Stefanini, « Le fruit amer du désarmement de l’État », Le Figaro, 19 octobre 2020. »](1)[/tooltips]. La menace étrangère aurait-elle été divisée par 15 entre-temps ? Cela ne constitue pas le sentiment dominant à ma connaissance, ni celui de la famille de Samuel Paty…

Une grand-mère défie le Covid pour jouer avec sa petite-fille, Paris, octobre 2020 © Léo Pierre / Hans Lucas / AFP
Une grand-mère défie le Covid pour jouer avec sa petite-fille, Paris, octobre 2020 © Léo Pierre / Hans Lucas / AFP

Voilà le legs des Dany et Alain, un héritage que l’on a le droit de refuser, tant le passif semble supérieur à l’actif. Les Dany libertaires nous laissent un pays où la censure règne partout et d’abord sur des caricatures. Les Alain, gestionnaires hors pair, nous font cadeau d’une France percluse de dettes. Les deux faillitaires minimisent la guerre civile de basse intensité qui nous oppose au sunnisme radical, un ennemi prêt, lui, au sacrifice et qui dispose d’une cinquième colonne nichée au sein de la plus importante communauté musulmane d’Europe. Une cruelle réalité, également niée pendant trente ans avec fureur, puis minorée et désormais prétendument prise à bras-le-corps par les successeurs de Dany et Alain – aussi crédibles pour assumer cette charge qu’une nonne à la tête d’un club échangiste.

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Affligés d’un état obèse percepteur des impôts les plus élevés du monde, nous constatons avec effarement l’incapacité du Léviathan à assurer ni notre sécurité ni le maintien d’un semblant d’ordre sur l’ensemble du territoire. La Justice française met des années à rendre un jugement, nos prisons sont délabrées. Nos instituteurs, nos médecins, nos infirmières se voient sous-payés. Et, cerise moisie sur ce gâteau avarié, le « meilleur système de santé du monde » a montré son vrai visage à l’occasion de la crise de la Covid. Suradministré, l’hôpital – comme tout le pays – peine à justifier les 11 % du PIB que nous lui consacrons. Quant aux différentes couches administratives égarées dans leurs propres méandres, le terme suranné de pétaudière les décrit avec justesse.

Mais pour nos aimables Dany et Alain, ce n’est pas encore assez. Cette génération déjà coupable d’une criminelle insouciance s’arroge aujourd’hui le droit d’exiger un dernier sacrifice avant de tirer sa révérence. Trois fois rien. Afin de vivre quelques mois ou quelques années de plus – ils ont 75 ans et l’espérance de vie d’un Français est de 79 ans –, ils souhaitent que les actifs, les étudiants et les plus jeunes cessent toute vie sociale, culturelle et affective, bannissent toute fête et fassent des études à demi. Ils acceptent néanmoins – du bout des lèvres – qu’une partie de l’économie continue à tourner, mais au ralenti, à l’unisson de cette demi-vie.

Ce sera, hélas !, sans moi, et pour utilement préciser ma pensée, je leur suggérerais même bien d’aller se faire foutre. Si l’attention que nous portons à la santé des plus fragiles démontre notre humanité, que dire d’un lock-out auto-infligé qui pousse au suicide des étudiants ne trouvant plus de stage ? Quand notre humanité se résume à hypothéquer l’avenir des moins de 30 ans, elle confine au suicide collectif façon secte, commis par les adorateurs d’un éternel présent.

Notre bien-aimé président a déclaré que nous étions en guerre contre la Covid. Il n’existe pas de conflit collectif sans esprit de sacrifice. Lors de la Première Guerre mondiale, la France a accepté l’abjecte boucherie des tranchées. Elle y sacrifia le quart de ses forces vives, ses Apollinaire, ses Péguy. Si tous les Dany et Alain de France souhaitent éviter les 2 % de malchance de mourir du coronavirus, libres à eux de se cloîtrer pour rédiger leurs mémoires (que j’achèterai seulement dans la perspective d’une rupture de stock prolongée de papier toilette). Que ceux de cette génération qui entendent jouir jusqu’au bout de la vie, et je les y encourage, acceptent l’idée qu’ils n’iront pas en réanimation en cas de Covid à complication. Ceci afin de ne pas engorger les hôpitaux et de permettre à de jeunes cancéreux ou diabétiques de poursuivre ou d’entamer leurs traitements. Une guerre pour laquelle se sacrifieraient les anciens dans le but d’épargner l’avenir de leurs enfants et de leurs petits-enfants, voilà sans doute qui aurait enthousiasmé les septuagénaires de 14-18.

Dany et Alain, un peu de courage, merci. Un peu de pudeur aussi. Laissez les plus jeunes essayer de sortir du bourbier dans lequel vous les avez mis, sans exiger qu’ils persistent dans la voie suicidaire que vous leur avez tracée.

De la banque d’investissement au retour du Tsar: l’étrange destin de l’oligarque Konstantin Malofeev

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Un oligarque russe vient de créer un mouvement politique qui milite pour la restauration des Tsars. Vladimir Poutine n’est pas nécessairement contre…


Le 22 novembre, un congrès de la « Société de l’Aigle à deux-têtes », dirigé par Konstantin Malofeev, a eu lieu à Moscou. L’événement a réuni des centaines de délégués des sections régionales de son mouvement, des représentants de l’Union des volontaires du Donbass, de l’Union des guerriers cosaques de Russie et de l’étranger, de l’Union des femmes orthodoxes, ainsi que d’autres associations patriotiques et orthodoxes proches de la mouvance tsariste. Celui qui souffle à l’oreille du président Vladimir Poutine a annoncé la création du mouvement « Tsargrad » qui présentera des candidats aux prochaines élections législatives, soutient le retour de la monarchie et la protection des valeurs traditionnelles russes.

Pour une fédération eurasienne

Entrepreneur à succès qui a noué un solide réseau politique et entouré de nombreuses controverses, Konstantin Malofeev entend désormais s’imposer à la Douma, le parlement russe. Le nom de son parti est loin d’être anodin puisqu’il se réfère aux thèses panslavistes en vigueur et l’équivalent étymologique russe de Constantinople, dont la Russie se considère comme la légitime héritière depuis sa chute en 1453. Le manifeste du parti ne manque pas d’ambition. Son préambule annonce qu’il se considère comme « la plus grande organisation représentant les intérêts des Russes » et a d’ores et déjà des centaines de milliers de membres à son actif, prêts à faire campagne pour la restauration de la monarchie tombée en 1917, victime d’une révolution achevée par les bolchéviques. Son programme reprend les grands crédos du nationalisme russe, la défense de la famille, de la culture russe, de sa diaspora, de ses valeurs religieuses et prône la renaissance de l’empire incluant l’annexion de la Moldavie, la Transnistrie, la Biélorussie au sein d’une fédération eurasienne inspirée des écrits d’Alexandre Douguine, lui-même membre du conseil suprême de Tsargrad. Un mouvement qui saura répondre « aux attaques des occidentaux, de leurs lobbys et de leurs agents présents en Russie » affirme Konstantin Malofeev.

« Nous sommes les enfants de la Victoire ! Nous sommes les bâtisseurs de l’Empire russe du futur »

« Nous sommes les héritiers des grandes victoires des armées russes sur les Khazars, sur la Horde d’Or, sur le Commonwealth [en référence à l’empire britannique-ndlr], sur le Khanat de Crimée, sur le Royaume de Suède, sur la Turquie ottomane, sur l’empire français de Napoléon et sur l’Allemagne fasciste. Nous sommes les enfants de la Victoire ! Nous sommes les bâtisseurs de l’Empire russe du futur » peut-on encore lire sur le manifeste. Le salut de la Russie passera par la restauration de ses Tsars. Une idée actuellement soutenue par un tiers des Russes, dont 46% de sa jeunesse selon un sondage daté de 2017. Très proche de la maison impériale des Romanov dont il assure la promotion médiatique, Konstantin Malofeev précise que « son mouvement rassemble des personnes de tous horizons qui partagent avec lui la conviction que la monarchie autocratique est la seule institution raisonnable, traditionnelle et naturelle pour notre société ».

« Elle a été la période la plus heureuse et la plus brillante de l’histoire du peuple russe. Je considère que c’est le seul refuge sûr pour la Russie. Et pour les croyants, c’est aussi celle qu’il faut soutenir » renchérit l’oligarque qui tente de dessiner plus royalement l’avenir de son pays et qui se prépare d’ores et déjà à l’après Vladimir Poutine, le président russe qui dirige le pays depuis 1999.

Le retour des Romanov

L’idée d’un retour de la monarchie en Russie est loin d’être nouvelle. Évoquée sous la présidence de Boris Eltsine (1992-1999) qui avait songé à faire venir auprès de lui le Grand-duc héritier George Romanov, elle resurgit régulièrement dans un pays qui se réapproprie progressivement son histoire. Les Romanov ont été réhabilités, canonisés et le Tsar Nicolas II, hier décrié comme étant un implacable tyran durant la période communiste, est aujourd’hui une des personnes préférées des Russes. Jouant à la fois sur la nostalgie impériale et soviétique, l’occupant du Kremlin a été plusieurs fois interrogé sur la possibilité d’un retour de la monarchie après son départ. « Officiellement pas sur son agenda » avait répondu Poutine au réalisateur Oliver Stone qui lui posait justement cette question lors d’une interview historique.

Habitués à brouiller les pistes, ses conseillers préfèrent démentir toute idée du genre ou nuancer ses propos. « Le président Vladimir Poutine voit l’émergence de cette idée sans réel optimisme mais reste très ouvert sur le sujet » avait alors expliqué Dimitri Peskov, le porte-parole du gouvernement en 2017, réfutant tout soutien à Konstantin Malofeev et son « initiative personnelle ». Du côté des Romanov, on se tient prêt à un éventuel retour. « Le retour d’un attachement à la foi et la tradition suscite à son tour un intérêt accru pour la monarchie. Je suis convaincu que la monarchie pourrait être à nouveau très utile à la fois en Russie et dans de nombreux autres pays. La monarchie héréditaire offre une continuité – une continuité vivante et résolue – avec le passé et peut servir de véritable arbitre neutre dans la société parce que son pouvoir n’est pas tributaire d’un parti ou d’un groupe politique. La monarchie défend et protège les intérêts de la nation entière dans son ensemble. Si nous parlions de réformes progressives et de changement, je dirais encore une fois que la monarchie est un vecteur de modernité beaucoup plus efficace que les républiques » a déclaré pas plus tard que cet été dernier la Grande duchesse Maria Wladmirovna, actuelle prétendante au trône de Russie et descendante d’Alexandre II. Un Tsar resté célèbre pour avoir aboli le servage. Reste à savoir si les Russes suivront massivement le mouvement de Konstantin Malofeev qui a reçu le soutien de divers députés et sénateurs. À moins que Vladimir Poutine ne finisse par se couronner lui-même comme certains en rêvent ouvertement en Russie.

Il y a erreur sur l’erreur ! Ou comment voir du racisme là où il n’y en a pas

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Pierre Webo avant le match PSG-Istanbul BB, Parc des Princes (Paris), 9 décembre 2020. © Francois Mori/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22520599_000009

La faute du 4e arbitre n’est pas celle que l’on croit…


Commençons par les faits : mardi 8 décembre avait lieu un match de football dans le cadre de la Ligue des champions entre le Paris-Saint-Germain et l’Istanbul Basaksehir. Ce match était arbitré par quatre arbitres roumains : un arbitre central, deux arbitres de touche et un quatrième arbitre sur le bord du terrain. Les contacts entre les joueurs en début de rencontre étaient rudes. L’arbitre central siffla plusieurs fautes. Le staff technique de l’équipe turque s’agaça alors de la sévérité de l’arbitre à l’égard de leurs joueurs.

Jugeant l’entraîneur adjoint de l’équipe turque trop véhément, le quatrième arbitre appela l’arbitre de champ à intervenir. Jusqu’ici, rien de plus classique pour un match de football. L’arbitre central est habilité à adresser des avertissements verbaux aux joueurs et au personnel technique sur le bord du terrain, il peut même leur adresser un carton jaune, voire les exclure d’un carton rouge.

Quiproquo autour du mot « negru »

L’objet de la polémique se situe donc uniquement dans les termes employés par le quatrième arbitre pour inciter l’arbitre de champ à intervenir : « C’est le Noir [negru, en roumain] ici. Va voir et identifie-le. Ce gars, le Noir », d’après la traduction de l’Agence France-Presse (AFP).

Des membres de l’équipe technique turque entendirent « negro » au lieu de « negru » et crièrent au racisme. Une enquête est en cours pour déterminer exactement les faits. D’après les rapports de divers journalistes présents sur place, l’arbitre incriminé aurait expliqué qu’il avait dit « negru » en roumain et non pas « negro ». Il aurait alors refusé de s’excuser.

Un genou à terre et le poing levé, les joueurs des deux équipes ont voulu marquer le coup avant le début de la rencontre, au Parc des Princes, le 9 décembre 2020. © Xavier Laine/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22520599_000042
Un genou à terre et le poing levé, les joueurs des deux équipes ont voulu marquer le coup avant le début de la rencontre reprogrammée le lendemain de l’affaire des propos présumés racistes du 4e arbitre, Parc des Princes, le 9 décembre 2020. © Xavier Laine/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22520599_000042

Les joueurs et dirigeants des deux équipes ont été divisés sur la démarche à tenir : reprendre le match avec un autre quatrième arbitre, revenir sur le terrain en se tenant la main en signe de lutte contre le racisme, arrêter définitivement le match… Finalement, c’est cette dernière option qui a prévalu. Depuis, de nombreuses personnalités, proches ou éloignées du monde du football, se félicitent de cet acte fondateur pour la lutte contre le racisme dans le football.

Il se trouve qu’en plus d’être sociologue, je suis fan de football, aussi bien en tant que joueur que spectateur. C’est un monde qui m’est familier. C’est important de le préciser car les commentateurs d’une sphère qui leur est inconnue ont tendance à faire des projections et à ne pas contextualiser ce qu’ils commentent.

L’erreur du quatrième arbitre est une faute professionnelle. Si le quatrième arbitre dit à l’arbitre central « identifie-le », c’est précisément qu’il n’a pas identifié l’entraîneur adjoint de l’équipe turque. Or il ne s’agit pas ici d’une rencontre amateur entre deux équipes de village, mais d’une rencontre professionnelle de premier plan, confiée à des arbitres triés sur le volet : ils sont censés être parmi les meilleurs de leur profession. Par professionnalisme, le quatrième arbitre aurait dû préparer le match (à l’aide d’un trombinoscope par exemple) pour être capable d’identifier tous les acteurs, aussi bien les joueurs titulaires que les remplaçants et les membres de l’encadrement.

Comment désigner quelqu’un dans le feu de l’action ? On peut le pointer du doigt, ce qui n’est pas poli mais efficace. On peut aussi le décrire à partir d’un trait caractéristique visible pour que son interlocuteur l’identifie facilement

A défaut d’identification, le quatrième arbitre désigna l’entraîneur adjoint par sa couleur de peau. Il se trouve que cet adjoint est camerounais et noir. Comment désigner quelqu’un dans le feu de l’action ? On peut le pointer du doigt, ce qui n’est pas poli mais efficace. On peut aussi le décrire à partir d’un trait caractéristique visible pour que son interlocuteur l’identifie facilement. Il faut donc citer un trait caractéristique distinctif par rapport aux autres personnes présentes autour. On peut trouver cela maladroit et regrettable que le quatrième arbitre ait désigné l’entraîneur adjoint en utilisant sa couleur de peau, mais, objectivement, la couleur de peau d’une personne est l’une des premières choses qui saute aux yeux. C’est donc un trait utile pour une communication efficace dans ce type de contexte.

Certains persistent à y voir du racisme

J’ai beau écouter et lire les propos de toutes les personnes qui s’érigent sur leurs grands chevaux depuis ce fameux incident, je ne vois pas où il y aurait du racisme là-dedans. En revanche, la colère sur le coup des personnes dans le stade qui ont cru entendre « negro » est compréhensible. L’immense majorité d’entre elles ignoraient vraisemblablement comment on disait noir en roumain. Mais ils auraient pu se calmer une fois le malentendu linguistique dissipé.

Leur argument pour persister à voir du racisme dans cette affaire est d’affirmer que le quatrième arbitre n’aurait jamais mis en avant la couleur de peau de l’entraîneur adjoint si celui-ci avait été blanc. Tout est une question de distinction. Si l’équipe en question n’était pas turque, mais camerounaise par exemple et que presque tous les membres de l’équipe sur le bord du terrain avaient été noirs, le quatrième arbitre aurait pu désigner l’adjoint comme « blanc » pour que l’arbitre central le repère facilement. De même, qu’il aurait pu dire « le grand », « le roux », « celui aux cheveux longs », etc.

Ce n’est pas forcément agréable d’être désigné et réduit à un seul trait, mais les arbitres parlaient entre eux. Ils ne s’adressaient pas directement à l’entraîneur adjoint. En outre, ce qui aurait réellement pu être offensant, c’eût été d’employer un terme péjoratif : « le nègre », « le crétin », « la tarlouze », etc.

L’essentialisation omniprésente dans le football

S’il y a un domaine où l’essentialisation règne en maître, c’est bien le football. Quand je jouais en club à Boulogne-Billancourt (92), dans les années 1990, mes coéquipiers m’appelaient parfois « le blanc » ou « le Français », voire pour l’un d’entre eux « le riche » car il m’avait demandé la profession de mes parents et en avait déduit que les miens étaient plus riches que les siens. Il était vrai que j’étais quasi le seul blanc de l’équipe. En revanche, je crois que 99 % de mes co-équipiers étaient eux aussi Français.

Quand j’ai joué au foot au Pérou, on m’appelait « le maigrichon » (El Flaquito). D’autres étaient surnommés « le gros » et chacun y voyait des surnoms ; personne ne portait alors plainte pour grossophobie. Le surnom d’un ancien joueur du PSG, Javier Pastore, était « El flaco », ce qui signifie le maigre. Les journalistes français le désignaient parfois ainsi et personne à ma connaissance n’a porté plainte contre ces journalistes pour racisme anti-maigres.

À lire aussi, Franck Crudo : PSG – Istanbul Basaksehir, un match engagé

Il est donc cocasse que ce soit le milieu du football qui s’offusque aujourd’hui qu’une personne en ait désigné une autre par sa couleur de peau dans un contexte très précis. D’autant que dans le monde du football, comme plus généralement dans la culture populaire, ce sont souvent les non-blancs qui désignent les non-blancs par leur couleur de peau ou bien leurs origines. Personnellement, je n’ai jamais appelé un de mes coéquipiers « le renoi » ou « l’arabe » mais eux le faisaient souvent entre eux. De plus, ce qui pourrait passer pour des insultes vu de l’extérieur prenait un tour amical et affectueux. Certains coéquipiers d’origine maghrébine ou d’Afrique noire se lançaient entre eux des « sale arabe ! » pour rigoler ou bien parce que les insultes servaient de ponctuation.

Du racisme dans le foot ?

Mon fils, alors âgé de 5 ans, avait assisté dans les années 2010 à un match amateur auquel je participais. Il avait commencé à compter le nombre d’insultes proférés entre joueurs mais n’avait vite plus eu assez de doigts pour compter. J’avais dû lui expliquer que « fils de p… » était bien évidemment une insulte, mais que, paradoxalement, dans certains contextes et milieux, c’était plus une interjection qu’autre chose : tout dépendait du ton et du degré amical de la relation des gens qui s’envoyaient ces mots doux à la figure.

Il y a du racisme dans le football. Mais sans doute moins que dans la plupart des milieux professionnels qui s’offusquent du racisme dans le football. D’ailleurs, le racisme dans le sport se situe peu sur le terrain, essentiellement dans les tribunes. S’il y avait des matchs à arrêter, ce serait précisément quand des spectateurs jettent des bananes sur le terrain ou poussent des cris de singe. Cela me semble bien plus grave que de désigner une personne non identifiée par sa couleur de peau.

Il me semble qu’il y a suffisamment de racisme dans le monde pour ne pas avoir besoin d’en voir là où il y a une « simple » faute professionnelle. Comment disait Camus déjà ? « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. »

« The Crown », one more time

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Gillian Anderson. © Netflix

La série Netflix sur Elisabeth II continue de remporter tous les suffrages dans une quatrième saison où le sentimental et le politique s’imbriquent plus que jamais.


Depuis 2016, la série Netflix The Crown, qui retrace le règne d’Elisabeth II, a toujours fait l’unanimité : excellents acteurs, précision de la reconstitution historique, finesse de l’analyse politique. La saison 4 rentre dans le « dur », dans la cicatrice encore béante du règne Thatcher et de la romance ratée à la fin tragique de Diana et Charles qui fait scandale.

Trier le vrai du faux ?

La famille royale a même fait pression auprès de notre juke box à séries préféré pour qu’un avertissement soit mis en place : ceci est une fiction romancée et pas un documentaire. Heureusement, la plateforme a refusé. Quel siècle à avertissements ! Et la presse, de Slate à Madame Figaro, de trier le vrai du faux. Elisabeth et Maggie se détestaient-elles vraiment ? Charles aurait-il vraiment émis le souhait de devenir le tampon hygiénique de Camilla ? Andrew était-il le fils préféré de sa majesté ?

Je dirais peu importe, et bien au contraire, tant mieux. La part de fiction (la vie sans la fiction serait invivable) fait ressortir l’essence même de ce second règne élisabéthain. Les Windsor sont rock’n’roll, shakespeariens et pop. Depuis son couronnement le 2 juin 1953, où les familles britanniques fauchées d’Après Guerre se saignèrent aux quatre veines pour faire l’acquisition d’un téléviseur afin de regarder en direct leur Reine revêtir sa couronne, Elisabeth II appartient corps et âme à ses sujets. Ils se la sont appropriée, et pas l’inverse. Les Windsor, comme le dit dans un des épisodes le personnage qui incarne Charles, sont « indispensables et superflus ». Ne le sommes-nous pas tous ?

Maggie, aristo subtilement déjantée

Mais surtout, depuis l’abdication d’Edouard VIII en 1936 qui préféra suivre son influenceuse américaine et divorcée Wallis Simpson que de régner sur ce qui était encore un Empire, les Windsor, qui ont essuyé toutes les tempêtes, furent furieusement des enfants du siècle passé.

Ils n’ont jamais vécu dans une Tour d’Ivoire mais dans l’oeil du cyclone. Swinging London Swinging Windsor. Le décorsetage de l’Empire Britannique dans les 60’s qui de victorien devint beatlesque en quelques semaines n’épargna pas les Royals. Même si Edouard et son américaine avaient déjà donné le ton avant guerre.

Margaret, la sœur cadette d’Elisabeth fut la première enfant terrible de la famille, elle eut la vie sentimentale d’une star hollywoodienne: on lui refusa d’épouser le Capitaine Townsend qui était divorcé, elle se rabattit donc par dépit sur Anthony Armstrong Jones dont elle divorça à son tour en 1978 (le fatum pointe déjà le bout de son nez).

On lui prêta par la suite beaucoup d’amants lors de ses séjours aux îles Moustiques, et on l’imagine faisant la fête avec Mick Jagger qui possédait une maison sur cette île privée de l’archipel des Grenadines. Dans la série, elle est superbement interprétée par Helena Bonham Carter qui fait d’elle une aristo subtilement déjantée, tabagique et alcoolique, mais surtout désabusée et se sentant, au sein de cette famille, plus superflue qu’indispensable. Sans surprises, Charles, autre ovni des Windsor, adorait son Auntie Margaret qui mourut en 2002 d’avoir trop vécu.

Être heureux en amour ? Quelle idée saugrenue !

Car les Windsor ont ce désir saugrenu d’être heureux en amour. Amour qui empoisonne les femmes et les familles royales. Charles s’y employa, et finit par y parvenir au prix de la tragédie que l’on sait. En 1970, il rencontre Camilla Shand, (future Parker Bowles) dont la grand-mère Alice Kepel fut la maîtresse du Prince de Galles Edward à la fin du XIXème siècle. « Instant Karma » dirait John Lennon. Charles tombe à jamais sous le charme de celle que les tabloïds qualifiaient de laide, mais qui à mon sens était aussi sexy que witty (état d’esprit british intraduisible). Il finit par l’épouser en 2005.

Mais Charles, toujours célibataire à 30 ans, dû épouser Diana Spencer. Sans me mettre dans la peau d’une midinette chroniqueuse à Point de vue Images du monde, (quoique), nous pouvons affirmer que cette alliance entre cette jeune fille qui ne voulait que danser et faire du rollers dans les couloirs de Buckingham et cet homme torturé qui ne voulait pas être roi fut désastreuse.

Diana ébréchée

La façon dont le personnage de Diana est traité dans la série ne plaît pas. Rien de plus normal, on ne touche pas aux idoles sans les ébrécher.

À mon sens, Diana fut à la fois une groupie, elle l’aime son Prince, rencontré pour la première fois alors qu’elle virevoltait déjà, en costume d’elfe du « Songe d’une nuit d’été », et elle lui lance force œillades en dessous. Mais la connexion ne se fait pas. De groupie elle devient donc rock star. Lui vole la vedette, cet homme qui ne sera jamais roi devient prince Consort. Elle est acclamée de Sydney à New-York, fait avec sincérité des tournées caritatives, se donne en spectacle dès qu’elle le peut. Car elle n’a jamais voulu que ça. Être dans la lumière. Elle l’est pour l’éternité. « Candle in the wind », écrivit Elton John en 1977 en hommage à Marilyn, en 1997 il offrit et interpréta la chanson pour Diana. Destins similaires.

God save the Queen: le duel avec la Dame de fer!

Et la Reine dans les imbroglio amoureux de cette saison 4 ?

Elle apparaît comme une figure presque tendre face à la Dame de fer, la fille d’épicier. Elle a l’assurance d’une Churchill rose bonbon lorsqu’elle lui donne son avis aux sujets des Malouines ou de l’apartheid en Afrique du Sud. Maggie lance à Elisabeth « Il est hors de question que je négocie avec des chefs de tribus aux tenues excentriques ». Et la Queen de répondre : « Que suis-je ? Sinon un chef de tribus aux tenues excentriques ? ».

L’ère Thatcher est traitée avec justesse, car si selon Winston Churchill, « le socialisme fait souffler un vent glacial », le libéralisme peut faire souffler un vent sibérien pour les plus pauvres. La Reine semblait posséder cette « common decency » qui manquait terriblement à Miss Maggie.

« God save the Queen/the fascist regim » hurlait Johnny Rotten, le chanteur des Sex Pistols sur une péniche le 7 juin 1977, pour le jubilé d’argent d’Elisabeth. Ce geste provocateur et spectaculaire est finalement un formidable hommage. Le terme est ô combien galvaudé, mais que sont les Windsor sinon des punks ultimes ? Et les punks ont maintenant rejoint les membres de la famille royale sur les mugs que l’on vend dans les boutiques de souvenirs pour touristes. This is England.

Du bon usage des statistiques sur l’immigration

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Michèle Tribalat. ©IBO/SIPA / 00617451_000003

La lecture du livre de Didier Leschi[tooltips content= »Ce grand dérangement : l’immigration en face, publié dans la collection Tract (n° 22) de Gallimard le 19 novembre 2020. »](1)[/tooltips] peut être intéressante, mais la démographe Michèle Tribalat regrette le manque de précision sur certains chiffres. Elle relève ici les approximations problématiques du petit ouvrage.


À la lecture de ce livre, je me suis dit que nous avions des progrès à faire dans l’usage des statistiques. Et que, si un haut fonctionnaire, directeur de l’OFII et donc gestionnaire de la politique de l’immigration et de l’intégration des étrangers pendant leurs cinq premières années de leur séjour, pouvait en user de manière aussi approximative, il n’était peut-être pas inutile de réfléchir aux règles précises que tout utilisateur de données devrait se fixer afin de limiter les erreurs et fausses nouvelles involontaires. Surtout sur un sujet aussi contentieux que celui de l’immigration.

C’est ce qu’aurait certainement dû faire Didier Leschi, compte tenu de sa fonction et de l’ambition de son livre : « présenter les éléments objectifs à partir desquels chacun pourra se faire une opinion éclairée. Ces éléments, ce sont des chiffres, des faits, des règles internationales et des lois nationales […] quiconque en fait fi dès le départ risque de s’égarer ».

On pourrait résumer ces règles impératives à :

  • Nommer correctement, expliquer la fabrication du chiffre si nécessaire ;
  • Dater. Ce qui  oblige à ne pas abuser de formules vagues telles qu’aujourd’hui et ses équivalents ;
  • Sourcer. Qui a fabriqué la donnée ? Sans se contenter de citer quelqu’un qui l’a utilisée.

Leur vertu est de forcer l’utilisateur à vérifier et à ne pas se contenter d’un vague souvenir ou d’un chiffre glané dans la presse. Didier Leschi date très rarement ses informations chiffrées et n’en donne pratiquement jamais la source. Ce qui oblige le lecteur à une recherche souvent difficile. Connaissant le sujet, certaines données m’ont paru étranges.
C’est le cas de cette affirmation: « Parmi les 36 communes de France métropolitaine comptant plus de 10 000 habitants et dont plus de 30% de la population est d’origine étrangère, 33 sont situées en Île-de-France, dont 15 en Seine-Saint-Denis » (p. 28). Pas de date, pas de source.

Je sais que c’est impossible. La population d’origine étrangère, dans la définition française, se compose d’immigrés (nés à l’étranger de nationalité étrangère à la naissance) et de personnes nées en France d’au moins un parent immigré. Pour descendre au niveau communal, il faut se référer aux enquêtes annuelles de recensement qui ne collectent pas les informations nécessaires pour compter les nés en France d’au moins un parent immigré.

Je retrouve la source (Insee-Analyse Île-de-France n° 70 de l’Insee de 2017) portant sur l’année 2013 qui comprend cette phrase presque intégralement. C’est donc la plume de l’Insee qui a dû « fourcher ». Je vérifie, à partir des données sur 2017, qu’en effet ce qui est écrit porte sur les immigrés et non sur deux générations.

Autre affirmation problématique:

«… Force est de reconnaître que la population immigrée est deux fois plus importante que dans les années 1930. Affirmer que rien n’aurait changé depuis que la France a fait appel à des étrangers pour pallier ses faiblesses démographiques ou se reconstruire après les conflits européens ne prend pas assez en compte ce fait incontestable »(p.26). Pas de date, pas de source.

Supposons que l’emploi du présent se réfère à la dernière date pour laquelle on dispose d’une estimation : 2019. Il se trouve que le nombre d’immigrés en France métropolitaine n’est alors pas 2 fois plus important, mais 2,4 fois plus qu’en 1931 et 2,8 fois plus qu’en 1936 (dates des recensements des années 1930).

Une évolution non sourcée, mais surtout non datée:

« Il est un lieu où les contradictions sont les plus sensibles et où on veut le plus les ignorer : Paris. Beaucoup y disent aimer les migrants et ce d’autant plus que, d’année en année, à l’intérieur du périphérique, leur nombre diminue. Il est passé de 30 à 20% sous l’effet de la gentrification » (p. 37). Ce constat est probablement tiré de la lecture de l’Insee-Analyses Île-de-France de 2017[tooltips content= »Mis à jour le 29 juin 2020. »](2)[/tooltips] : « Le poids de Paris dans l’accueil des immigrés franciliens a reculé de 9 points, passant de 30,0% en 1982 à 21% en 2013 ».

Des reprises, non sourcées, non datées et approximatives telles que celles-ci:

« En 1968, seuls 3% des jeunes métropolitains de moins de vingt-quatre ans étaient d’origine extra-européenne, aujourd’hui 17% » et « la jeunesse africaine, hors Maghreb, était quasi inexistante en 1968. Elle représente de nos jours 20% de la jeunesse d’origine étrangère » (p. 27).

Didier Leschi reprend là un passage du texte que j’ai écrit avec Bernard Aubry et mis en ligne sur mon site, dans lequel il a remplacé 2017 par « aujourd’hui » et « de nos jours ». Texte qui précisait bien qu’il s’agissait des moins de 18 ans et non des moins de 24 ans.

Ou encore celle-ci:

« En ajoutant les enfants d’immigrés nés sur le territoire français, près du quart de la population française a un lien avec l’immigration » (p. 26).

« Près du quart » relève de l’anticipation. En effet, si l’on reprend les estimations par l’Insee de la population immigrée et de celle des nés en France d’au moins un parent immigré, la proportion de personnes d’origine étrangère est de 21,4% en 2019.

Didier Leschi a probablement repris ce qu’il a lu dans l’ouverture du livre de François Héran[tooltips content= »Avec l’immigration. Mesurer, débattre, agir, La Découverte, publié en 2017. »](3)[/tooltips] : « un quart de la population est liée à l’immigration sur une ou deux générations ».

L’abus de la formule « aujourd’hui » et la non-datation laissent croire que l’on cite le dernier chiffre connu ou que ce dont on parle évolue tellement peu que la date d’observation ne compte pas.

Un exemple : « 66% des immigrés résident dans une ville ou une agglomération de plus de 100 000 habitants, contre 42% pour les non-immigrés. Au sein de l’Ile-de-France, 17% de la population est immigrée… » (p. 28).

J’ai cru reconnaître la prose inimitable de l’Insee (« non-immigré ») et, en effet, ces données sont tirées d’un Insee Références de 2012 intitulé Immigrés et descendants d’immigrés. Problème, ces données datent de 2008 !

Une des raisons de ces approximations provient probablement d’un désir sincère d’épargner au lecteur, que l’on pressent rétif aux statistiques, une complexité et des précisions qui risquent de l’ennuyer ou de l’effrayer. On a donc alors tendance à simplifier, ce qui conduit souvent à renoncer à l’exactitude, mais aussi à une certaine paresse. C’est ce qui s’est passé avec le « taux de fécondité ». Des démographes se sont beaucoup moqué des non-initiés qui interprétaient la fécondité en pourcentage, alors que des experts de l’Ined et de l’Insee ont eux-mêmes eu recours, sans doute pour mieux se faire comprendre, à l’expression « taux de fécondité » qui suggère justement l’idée de pourcentage, au lieu de parler d’indicateur conjoncturel de fécondité qui s’exprime en nombre d’enfants par femme.

>>> Une version longue de cet article est à retrouver sur le blog de Michèle Tribalat <<<

Le combat entre partisans et adversaires des éoliennes (Vidéo)

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Plongée dans le combat des partisans et des adversaires des éoliennes, au cœur de la Beauce dans le pays de Marcel Proust.


Présentées comme un des outils majeurs de la transition énergétique et comme le moyen de produire de l’électricité renouvelable en émettant très peu de gaz à effet de serre, les éoliennes se sont multipliées depuis plusieurs années sur le territoire français. Mais leur installation se heurte maintenant à des oppositions locales de plus en plus farouches comme d’ailleurs partout en Europe. Au point, qu’un certain nombre de décideurs et de spécialistes de l’énergie considère aujourd’hui que les éoliennes terrestres n’ont presque plus d’avenir.

Le paradoxe avec les éoliennes est que leurs promoteurs tout comme leurs adversaires le font avec des arguments presque identiques. Ce sont des écologistes qui entendent imposer un grand programme d’éoliennes pour lutter contre le réchauffement climatique et les émissions de CO2. Ce sont des défenseurs de l’environnement, de leur environnement, de leur qualité de vie et du patrimoine qui s’opposent à la construction des mêmes éoliennes.

A lire aussi: Proust à l’ombre des éoliennes

Nous avons donc décidé de montrer la réalité de cet affrontement en participant au tournage d’un documentaire ambitieux. Il a été réalisé avec Transitions & Energies dans la Beauce, région propice aux éoliennes, et plus particulièrement autour de la petite ville d’Illiers-Combray.

Elle a pour particularité d’être au cœur de l’œuvre d’un des plus grands écrivains français Marcel Proust. Dans les sept tomes d’A la recherche du temps perdu, Marcel Proust décrit de nombreux lieux, jardins, châteaux, paysages autour et dans Illiers-Combray. Un patrimoine que les opposants aux éoliennes entendent préserver de toute «pollution visuelle».

Voir ci-dessous le film:

Éoliennes : la face cachée de l’écologie

 

Mila renvoyée: « Que nos politiques regardent la situation en face! »

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Mila. Image: capture d'écran twitter / Quotidien / TMC

Le Point vient de révéler que l’établissement militaire qui avait consenti à accueillir Mila en février a décidé de l’exclure. L’ado avait initialement été exfiltrée de son lycée de l’Isère en raison de menaces de mort, suite à des propos sur l’islam. Son père a écrit une lettre, publiée sur le site du journal. Alors qu’aucun élève de son ancien établissement n’aurait jamais été sanctionné, Céline Pina réagit


Cette enfant n’a fait qu’exercer un droit de critique sur une religion. Depuis elle vit un enfer et sa vie est menacée.

Face à cela, les politiques ont choisi de mettre la poussière sous le tapis et les institutions l’abandonnent. On découvre dans cette lettre comment Mila a été traitée dans son internat et on se demande ce que l’on peut attendre d’adultes, militaires ou professeurs qui sacrifient un être humain et l’abandonnent à des fous furieux pour gagner un peu de temps pour eux, sans même se rendre compte qu’ils sont sur la liste des personnes à abattre. Demandez-donc aux soldats en opérations extérieures si les islamistes sont des gens que l’on arrête en leur livrant des otages? Ils ont un projet politique et ils haïssent ce que nous représentons: le choix de la raison pour nous gouverner, l’égalité des droits et les libertés publiques. Ils focalisent sur Mila mais nos vies ne valent rien à leurs yeux.

En sacrifiant Mila, la France ne sauvera personne. Pas un seul d’entre nous. Au contraire, elle fera même monter le niveau de violence: la faiblesse de l’adversaire accentue la prédation et accélère les passages à l’acte, mais surtout elle les installe dans la durée.

Si nos gouvernants et notre président avaient un peu de dignité et de courage, ils auraient commencé par virer la personne qui exerce la charge de proviseur de son lycée. Un adepte du « pas de vague » si on en croit ce courrier. Exclure ce type de personnalité des fonctions dirigeantes voire de l’institution serait un message qui en soit constitue un positionnement de l’institution. Et il faut le faire en invoquant l’incapacité de faire face à ses devoirs et obligations. Cela remettrait les pendules à l’heure chez les carriéristes.

Il est indispensable que nos dirigeants lancent des procédures judiciaires et internes pour sanctionner tous les lycéens qui l’ont menacée de mort, avec enquête sociale sur les enfants et les familles, amendes et suspension des aides sociales à la clé (une piste à creuser dans le cadre de la loi séparatisme), et expulsion ou retrait des titres de séjour de la famille si le lycéen n’est pas Français, comme des sanctions lourdes s’il est inexpulsable.

Et il faut que cela touche les personnes scolarisées dans son lycée et qui ont participé au harcèlement. On n’imagine pas tout ce que les sanctions de proximité changeraient si les gens voyaient à quel point épouser les causes des islamistes posaient des difficultés à leurs adeptes. Là c’est le contraire: ceux qui se sont comportés en nervi des islamistes paradent. La force a gagné contre la loi, les adultes baissent les yeux devant eux, ils ont gagné. Il est temps là aussi de remettre quelques pendules à l’heure.

Mais surtout, si nos politiciens étaient des hommes d’État, alors cette jeune fille serait à l’étranger, dans une école d’art ou en formation artistique, à nos frais. Et s’il faut prendre en charge sa famille aussi, faisons-le et soyons en fiers. S’il faut pour la protéger un temps dissimuler son identité, organisons-nous. La meilleure réponse à la menace islamiste dans cette affaire est de transformer cela en une opportunité pour Mila et sa famille, d’assumer tous les frais car à travers elle nous assumons ce que nous sommes en tant que peuple et nous soutenons une Marianne en herbe.

Certes, « si le gouvernement fait cela, il reconnait qu’il a perdu », ce qui dans le milieu politique sert à justifier l’inaction au nom de la préservation de l’image. Mais que nos politiciens regardent la situation en face, dans cette affaire pour l’instant ils ont perdu. Tout le monde l’a vu et les islamistes ont noté à quel point nos politiques étaient lâches et pour certains, dont Ségolène Royal, prêts à leur céder.

Face à l’islamisme, aujourd’hui, notre gouvernement ne peut pas protéger Mila, pas plus que son peuple. Il n’a pas pu protéger Samuel Paty. C’est un fait. Mais poursuivre sur cette voie n’est pas inéluctable. Pour mettre fin à la logique des assassinats politiques, il faut arrêter avec le « en même temps » et assumer un fait très simple : refuser d’accepter l’islamisation des mœurs au nom de l’accueil d’une population immigrée n’est pas du racisme. Si pour accueillir nous devons sacrifier ce que nous sommes, alors les Français ne l’accepteront pas et c’est tout à fait normal. À ce titre notre problème principal ne sont pas les discriminations mais bel et bien la violence politique. Pour justifier celle-ci, les islamogauchistes évoquent racisme et discriminations, sauf que cela ne se vérifie pas : les actes anti-musulmans sont bien moins nombreux que les violences subies par les juifs et les chrétiens, et le racisme en France existe certes, mais est plutôt résiduel sauf dans les banlieues où monte la haine raciale, mais là aussi elle est cultivée par les mouvements politiques décoloniaux, alliés des islamistes.

Bref le gouvernement n’a pas à s’excuser de protéger son peuple et une enfant du peuple des islamistes. Il n’a pas à compenser un combat légitime en ouvrant une plateforme de dénonciation des discriminations. Laquelle va aussitôt être instrumentalisée contre la République par des mouvements idéologiques qui pourront ainsi attaquer leurs adversaires et faire croire qu’une dénonciation postée par un gugusse sur une plateforme équivaut à une reconnaissance de l’infamie de la personne ainsi dénoncée.

En revanche, si ce gouvernement veut agir pour la République, il peut rétablir la discipline et l’exigence au sein de l’école de la République, afin que les mérites puissent être reconnus et l’ascenseur social remis en route par exemple. Pour cela il va falloir aussi regarder en face l’état d’un corps enseignant loin d’être composé de hussards noirs de la république. À ce titre il faut relire le rapport qui raconte l’attitude de certains collègues de Samuel Paty et la cabale que certains profs ont voulu mener contre lui, il est éclairant sur la pénétration de l’idéologie des islamistes dans les discours, y compris au sein de la salle des profs : respect des religions, accusation de racisme larvé, attention disproportionnée portée à tout scandale fait au nom de l’islam. Et c’est souvent l’antiracisme dévoyé des indigénistes en mode Bouteldja/Obono qui a assuré la livraison et la légitimation de cette propagande dans les facs et les instituts de formation.

Certes exfiltrer Mila est un terrible aveu d’impuissance, mais cette impuissance est une réalité. Même face à la décapitation d’un professeur, une partie de la classe politique fait semblant d’ignorer que la multiplication des assassinats politiques parle des déclinaisons d’un affrontement de civilisations et non d’une accumulation de faits divers sanglants. Nous n’échapperons pas à la violence en mettant la tête dans le sable alors doit-on sacrifier une enfant pour que des politiciens puissent continuer à se palucher l’ego et faire croire qu’ils contrôlent quelque chose ? Quel curieux sens des réalités. La réponse est non. Et c’est un choix politique. Le plus humiliant pour les islamistes serait que leur acharnement se transforme en opportunité pour Mila et se retourne contre leurs petits télégraphistes, qu’ils pourrissent la vie des lycées ou des quartiers.

Al-Sissi / Macron: loi de Dieu, loi des hommes

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Emmanuel MACRON a recu le président égyptien Abdel Fattah AL-SISSI à l'Élysée le 7 décembre 2020 © NICOLAS MESSYASZ/SIPA Numéro de reportage: 00994426_000023

Un récent dialogue improvisé entre le président Emmanuel Macron et le Maréchal Al-Sissi, président de l’Égypte, est particulièrement révélateur de ce qui sépare la société française de la tradition musulmane.


Le récent échange entre les deux hommes d’Etat a permis un face à face entre la loi de Dieu et la loi des hommes. Mais hélas tout le monde semble oublier ce qui devrait pourtant demeurer essentiel: la recherche de ce qui est en soi bon et juste, et qui ne dépend ni de l’arbitraire politique ni de l’arbitraire divin.

Al-Sissi veut révolutionner sa religion

Le régime du Président Al-Sissi mérite bien des critiques, par exemple en ce qui concerne les droits les plus élémentaires des homosexuels ou la brutalité dont il fait preuve vis-à-vis de nombre d’opposants. Realpolitik oblige, il est néanmoins notre allié, bien plus en tout cas que d’autres pays auprès desquels nos gouvernements se compromettent et qui respectent les droits de l’Homme encore moins que l’Égypte moderne. Alors qu’Al-Azhar et son Grand Imam tiennent un discours pétri d’hypocrisie, accusant le monde entier sauf l’islam d’être responsable des crimes commis au nom de l’islam, le Maréchal Al-Sissi a eu il y a déjà 6 ans des paroles d’une grande lucidité :

« Il est inconcevable que la pensée que nous tenons pour sacrée puisse faire de l’entière communauté islamique une source d’anxiété, de danger, de meurtres et de destructions partout dans le monde. Il est inconcevable que cette idéologie… – je ne parle pas de religion mais d’idéologie, le corpus d’idées et de textes que nous avons sacralisés au cours des siècles – soit rendue au point où il est devenu très difficile de la remettre en question. Nous avons atteint un point où cette idéologie est considérée comme hostile par le monde entier. (…) Vous devez vous opposer à l’idéologie actuelle avec fermeté. Permettez-moi de le répéter : nous devons révolutionner notre religion. » Et à l’intention du Grand Imam : « vous portez la responsabilité devant Allah. Le monde entier attend votre parole, car la nation islamique se déchire, se désintègre et s’en va à sa perte, et cela, de nos propres mains… »

Est-il sincère ? Une chose au moins est certaine : si Abdel Fattah Al-Sissi était français, des hordes de sociologues de gauche et tous les médias dits « progressistes » l’accuseraient d’islamophobie !

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Et pourtant. Avec tact et avec clarté, il a exprimé une divergence cruciale entre les fondamentaux de la société française et ceux du monde musulman, fut-il éclairé. Avec Emmanuel Macron, il ont improvisé un échange sur la hiérarchisation de la religion et de la loi humaine. Pour reprendre l’excellente formule d’Eric Zemmour, si la France prétend libérer l’Homme de l’arbitraire des dogmes religieux en donnant la primauté à la loi de l’état, l’islam prétend libérer l’Homme de l’arbitraire des états en donnant la primauté à la loi religieuse (à partir de 10 minutes 30 dans la vidéo). Comment les deux démarches pourraient-elles être compatibles ?

Tout sauf les Frères musulmans!

Il est important de prendre conscience des présupposés implicites des propos des deux chefs d’Etat. Emmanuel Macron invoque, en somme, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à fixer leurs propres lois. Ce faisant, il protège – intellectuellement – la France de toute ingérence, mais en s’y limitant il s’interdit aussi de juger ce qui se fait ailleurs, alors qu’il ne s’en est pas privé à d’autres occasions, y compris pour critiquer l’Égypte. Notons au passage qu’en Égypte, la volonté du peuple avait porté au pouvoir les Frères Musulmans, que le Général Al-Sissi a renversés (et lorsque nous lui reprochons ses méthodes, demandons-nous si nous préférerions réellement l’alternative).

Abdel Fattah Al-Sissi, lui, souligne que les lois des hommes sont arbitraires et changeantes. Mais en déclarant que « si nous reconnaissons que les religions sont célestes et viennent de Dieu, elles sont sacrées et ont la suprématie » il évoque « les religions » en oubliant (peut-être par diplomatie) qu’elles se contredisent les unes les autres, et semble croire que toutes les religions voient les Dieux comme soucieux de s’immiscer dans la sphère politique, ce qui n’est pas le cas. Je pense évidemment à l’Athéna d’Eschyle, dont les seules injonctions politiques sont « que mon peuple ne succombe ni à la tyrannie ni à l’anarchie » et « que chacun vote selon ce que sa conscience lui dit être juste », autrement dit : emparez-vous de votre liberté.

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On pourrait résoudre le dilemme en déclarant que décider si oui ou non une religion est d’origine céleste n’est qu’une décision humaine arbitraire parmi d’autres, mais ce serait passer à côté de l’essentiel.

En termes techniques, le Président Macron et le Président Al-Sissi – Zemmour fait d’ailleurs la même erreur – en restent au face à face entre le droit positif (la loi des hommes) et le droit divin (la loi de Dieu), oubliant le troisième terme qui est le droit naturel (à ne pas confondre avec l’état de nature) : la loi de ce qui est juste en soi, indépendamment de ce qu’en pensent mortels ou immortels.

Une troisième approche

Ce n’est pas le primat de la loi humaine sur la loi divine qui définit l’Occident: c’est la libre recherche du Bien, du Vrai, du Juste, du Beau considérés comme des réalités en soi, indépendantes de tout arbitraire, qu’il s’agisse de l’arbitraire du consensus humain ou de l’arbitraire de la puissance divine. Nous devons évidemment cette approche au miracle grec, et toutes nos philosophies en sont les héritières puisque cette quête est le fondement même de la démarche philosophique, mais aussi de cette autre recherche du « Vrai en soi » qu’est la méthode scientifique expérimentale. Et le christianisme l’a en grande partie intégrée dans sa manière d’articuler foi et raison, comme l’expliquait Benoît XVI dans son célèbre discours de Ratisbonne.

Ainsi dans l’Iliade, le tout premier texte de notre civilisation, Héra et Athéna peuvent-elles rappeler à Zeus qu’en tant que Dieu Suprême Il ne décide pas de ce qui est juste en imposant Ses caprices comme un despote, mais qu’Il est au contraire le garant de la Justice. Ainsi Abraham peut-il dans la Genèse dire à Yahvé qu’il serait indigne de Lui de Se montrer injuste en punissant les innocents avec les coupables : Lui non plus ne décide pas de ce qui est juste, mais accomplit Sa divinité en S’astreignant à n’agir que conformément à la Justice. Ainsi Thomas d’Aquin et le Cardinal Newman affirment-ils comme Kant la primauté de la conscience morale.

« Que chacun vote selon ce que sa conscience lui dit être juste » ordonnait Athéna, et non « que chacun vote selon ses envies ou ses caprices. »

Dans le monde musulman une telle approche est douloureusement minoritaire. Bien plus courante est la position d’Al-Ghazâlî et Ibn Hazm, pour qui « si Allah ordonnait de faire le mal et de croire des mensonges, il faudrait faire le mal et croire des mensonges » affirmation archétypale d’une absolutisation du droit divin. Il faut chercher la défense du droit naturel chez Razi et son rejet du despotisme d’Allah, du côté du platonisme de Sohrawardi, ou chez Al-Kindi et les pratiquants de la Falâsifa. Et c’est bien aux espoirs de la Falâsifa, cette tentative hélas avortée d’introduire dans l’islam sunnite la démarche de la philosophie gréco-latine, que font penser les propos que tenait le Président Al-Sissi en 2014 lorsqu’il dénonçait le refus de remettre en question un corpus idéologique faisant horreur au monde entier.

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Le droit divin ne saurait être une solution : vouloir faire de la religion la référence ultime, c’est accepter les sacrifices humains à la gloire de Moloch et pour abreuver Tezcatlipoca – car si la religion est suprême, il n’existe rien à partir de quoi juger une religion, rien qui permettrait d’accepter certaines religions et d’en rejeter d’autres. Tout choix départageant deux religions ne serait nécessairement qu’arbitraire.

Thémis pour les Grecs. Maât pour les anciens Égyptiens

Et s’ils ne sont qu’arbitraires, les choix humains ne sauraient eux non plus être une solution : pourquoi respecter une loi dont le seul mérite serait de suivre le consensus de l’air du temps, d’être la traduction législative d’une mode aussi capricieuse qu’éphémère ? Pourquoi ne pas donner la même valeur au rétablissement de l’esclavage qu’à son abolition ? C’est tout le discours relativiste de la déconstruction et du multiculturalisme, qui ne sont que des ratiocinations tentant de justifier une lâche démission du sens moral.

Car il y a bien quelque chose qui permet de refuser les sacrifices humains tout en acceptant d’autres pratiques religieuses, de défendre la loi de l’état comme rempart contre l’anarchie – laquelle n’est qu’un autre arbitraire, celui du chaos et de la loi du plus fort – tout en reconnaissant que Jean Moulin et Claus von Stauffenberg ont eu raison de désobéir à la loi de l’Etat.

Thémis pour les Grecs. Maât pour les anciens Égyptiens. Que nous ne pouvons tenter de connaître, dont nous ne pouvons essayer de nous rapprocher, qu’en faisant usage des talents que les Dieux ou l’évolution nous ont donnés : l’intuition, la raison, la conscience morale.

Se plier aux exigences de cette perpétuelle recherche est ce qui distingue une religion digne de ce nom d’une vulgaire superstition, secte, obscurantisme. Mais c’est aussi une exigence citoyenne trop souvent oubliée : l’engagement et l’action politiques ne doivent pas viser une vague conciliation des intérêts particuliers ou communautaires, un équilibre précaire entre des rapports de force et des égoïsmes rivaux, mais – sans les nier – tendre à leur dépassement par la recherche collective du bien commun. Osons les grands mots : une tentative nécessairement imparfaite mais résolue de tendre vers la Justice et l’Harmonie.

Sans cela, nos lois ne seront effectivement qu’un arbitraire parmi d’autres, que les croyants de toutes religions auront de bonnes raisons de regarder avec méfiance, et qu’il sera facile aux fanatiques (et pas seulement aux fanatiques religieux) de dénigrer pour convaincre leurs adeptes de les bafouer.

Le président du Turkménistan a fait ériger une statue géante… de son chien favori

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La statue dorée représentant le chien du président turkmène, Gurbanguly Berdymukhamedov, au centre d'Achgabat, la capitale du Turkménistan © D.R.

À quand une statue en or de Némo place du Trocadéro ?


Qui a dit qu’islam et canins faisaient mauvais ménage ? Au Turkménistan, pays à très large majorité sunnite où la religion est contrôlée d’une façon soviétique, le président Gurbanguly Berdymukhamedov a fait ériger une statue géante dorée, de six mètres de haut, représentant un « alabaï », son chien favori.

Berger d’Asie centrale et ami des nomades, le canin bombe majestueusement le torse au centre d’Achgabat, la capitale du pays. Le « Protecteur » du Turkménistan s’était déjà offert une statue dorée de lui-même, de 21 mètres de haut, en 2015. Maintenant, son meilleur ami reçoit le même privilège. L’alabaï est un « symbole de réussite et de victoire », a argué son tout-puissant chef d’État, qui s’est déjà fait filmer en train de soulever un long haltère doré et de réparer des voitures. Il y a trois ans, il brandissait fièrement Fidèle par la peau du cou, un alabaï chiot qu’il offrit à Vladimir Poutine pour son 65e anniversaire. L’intéressé sembla sincèrement ému. Et pour cause, il est lui aussi mordu de canins au point d’avoir offert un terrier noir à Hugo Chavez en 2012.

Le chien, animal préféré des hommes avides de pouvoir ?

Le chien apprivoiserait-il les hommes avides de pouvoir ? Le toutou favori de Staline fut un épagneul dénommé Mila, offert par la reine des Pays-Bas. Mais nul besoin de remonter jusque-là : en juin dernier, Emmanuel Macron a dévoilé sur son compte Twitter des clichés de son labrador Némo, « recueilli avec Brigitte en août 2017 », a-t-il précisé. Un possible sujet de conversation pour une hypothétique rencontre avec Gurbanguly Berdymukhamedov. Une statue en or de Némo sur la place du Trocadéro, voilà qui redorerait le blason présidentiel auprès des défenseurs des animaux.

Ces petites têtes qui voient de la discrimination partout

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Et encore, c'était pire avant ! Evelyne Leclerc, Thierry Roland, Philippe Castelli, Carlos, Guy Montagne, Philippe Bouvard, Amanda Lear, Francis Perrin, Isabelle Mergault aux "Grosses têtes", en 1996 © SUREAU/TF1/SIPA Numéro de reportage: TF135001210_000007

L’association des journalistes LGBTI a mené son enquête: l’émission de radio Les Grosses têtes est un nid de violeurs racistes homophobes et validistes!


L’association des journalistes LGBTI (AJL) récompense chaque année par des OUT d’or « les journalistes, artistes et personnalités qui contribuent de manière positive à la visibilité des personnes LGBTI. » C’est une association de type gauche diversitaire qui n’hésite jamais à dénoncer les méchants de type Gilles-William Goldnadel, et à regretter l’absence, sur les « plateaux composés exclusivement de blanc.he.s », des femmes « racisées » de type Assa Traoré.

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Son modèle journalistique est le New York Times pour la presse écrite et Loopsider pour les médias d’infos en vidéo, autant dire la crème du journalisme sérieux et audacieux, prêt à traquer et dénoncer toutes les détestables phobies du monde actuel.

Les leçons des journalistes « progressistes » en peau de lapin

Les journalistes d’AJL viennent par conséquent de réaliser une enquête de longue haleine qui ressemble à celle qu’avait réalisée Marine Turchi à propos de l’émission Le masque et la plume dans MédiapartIls ont écouté 24 émissions des Grosses têtes sur RTL et ont fait les comptes : « 159 propos sexistes, 66 déclarations homophobes et transphobes, 51 déclarations et 29 déclarations grossophobes » ont été identifiés. Des remarques sexistes toutes les 11 minutes. 19 séquences discriminantes par émission. Et même 12 propos « classistes » et 7 « validistes », car une association moderne et adepte du vocabulaire diversitaire le plus politiquement correct ne parle plus de luttes des classes mais de « classisme », c’est plus classieux. Ni de discrimination envers les handicapés mais de « validisme », ça fait sérieux. Et, bien sûr, elle écrit ses papiers en écriture dite inclusive, c’est plus mieux.

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Je ne sais pas si on rit beaucoup à l’émission Les grosses têtes que je n’écoute plus depuis longtemps mais que j’ai écoutée en mes jeunes années: Bouvard y dirigeait une troupe de comiques troupiers de niveau supérieur ; Jacques Martin et Jean Yanne y mettaient leur immense culture musicale ou cinématographique au service de la franche rigolade ; Olivier de Kersauson s’y lançait dans des tirades océanographiques d’un lyrisme déluré. On y imitait les accents méditerranéens, chinois ou allemands. On s’y autodénigrait à mort. On y pouffait lorsque Bouvard lançait la question de Madame Véronique Jupon, de Tulle.

Personne n’y entendait un « discours haineux » ou des « propos discriminants ». Et surtout personne ne nous faisait de leçon de morale.

Le bingo de la « culture du viol »

Pour être certain de nous faire la leçon jusqu’au bout, l’AJL a fait appel à une donneuse de leçon auto-assermentée, Mme Valérie Rey-Robert, qui a déjà écrit un livre pour bien expliquer ce qu’est « Une culture du viol à la française », puis un autre pour nous éclairer sur « Le sexisme, une affaire d’hommes ». Le verdict d’icelle est sans appel : « Laurent Ruquier et sa bande cochent toutes les cases du bingo de la culture du viol. » De toute façon, « on baigne dans la culture du viol. » C’est comme « tous ces téléfilms de Noël » dont Mme Rey-Robert constate les « ressorts profondément sexistes, centrés sur les Blancs, centrés sur l’hétérosexualité », ça véhicule « des stéréotypes ».

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Mais revenons à l’émission Les Grosses têtes qui, paraît-il, se moque des gros, des homos, des femmes, des handicapés, et promeut le racisme et le viol en reproduisant « ad nauseam les systèmes de harcèlement les plus classiques », selon l’AJL. L’émission se moque-t-elle également des ignares qui collent à l’actualité la plus bête en ignorant l’histoire? Peut-être pas encore. Nous proposons par exemple à Laurent Ruquier de poser la question suivante à ses acolytes: « Après avoir « retweeté » un message d’Amandine Gay qui remontait les bretelles à Julien Bayou pour son utilisation du mot « lynchage », mot réservé aux Noirs selon elle, quelle est l’essayiste qui a tweeté à son tour: « Les discussions autour du terme « lynchage » me rappellent l’expression « traite de blanches » (phénomène qui n’a jamais existé) mais qui tentait d’établir une équivalence entre les souffrances des noirs et des blancs » ?

Réponse: Mme Valérie Rey-Robert (tweet du 29 novembre), qui ignore apparemment tout de l’histoire des harems et de la traite des esclaves européennes recherchées pour la… blancheur de leur peau, « phénomène » qui a non seulement existé mais qui a été largement décrit par de nombreux historiens, écrivains ou peintres dont Mme Rey-Robert ignore l’existence.

Covid: tout ça pour une poignée de boomers!

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Le Conseil constitutionnel étudie la saisine sur la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, Paris, 11 mai 2020. Au premier plan : Alain Juppé © JOEL SAGET / AFP

La pandémie a créé une nouvelle fracture générationnelle. Peut-on demander aux jeunes de sacrifier leur avenir pour les boomers qui n’ont connu ni la guerre ni la crise, mais profité de la croissance, de l’État providence et de la révolution sexuelle? Surtout quand c’est l’inconscience de ces mêmes boomers qui est responsable de la très mauvaise passe que nous traversons.


Daniel Cohn-Bendit et Alain Juppé ont soufflé tous deux leurs 75 bougies cette année. Dany est né le 4 avril 1945 (à Montauban, bien malgré lui), Alain l’a suivi de peu le 15 août de la même année. Tous les natifs des années d’après-guerre n’ont pas vécu une gloire identique ni une carrière équivalente à celles de nos deux séniors ceintures noires de progressisme. Mais ils ont tous grandi, appris, aimé et travaillé dans des conditions rétrospectivement bénies. Trop jeunes pour être mobilisés par les guerres d’Indochine ou d’Algérie, ils n’ont connu jusqu’en 1973 que croissance à deux chiffres, plein emploi et libération sexuelle. Sur une bande-son qui continue à faire rêver la jeunesse de 2020 – des Beatles au Velvet Underground, des Stones aux Floyd –, ils se sont émancipés des besogneuses pesanteurs de leurs aînés, tout en bâtissant une société prospère. Adossés à celle-ci, ils ont mis en place un État-providence qui a ridiculisé les espoirs les plus fous des marxistes-léninistes : Sécurité sociale, allocations diverses toujours plus munificentes, assurance chômage. Ce que la CGT appelait la « retraite des morts » – car à peine la prenait-on qu’on filait au cimetière – ne fut bientôt qu’un mauvais souvenir tant l’augmentation de l’espérance de vie fut spectaculaire. Ce n’était plus quelques mois de pensions chétives que touchaient des vieillards, mais une rente servie parfois durant plusieurs dizaines d’années, surtout quand, à l’instar des salariés de la RATP, on prend sa retraite (généreuse) à 55 ans et en pleine forme.

Dany et Alain savaient que leurs enfants – s’ils en avaient – disposeraient d’un confort matériel supérieur encore au Frigidaire et à la 4 CV qui les faisaient fantasmer à 15 ans. Les bambins, au reste, grâce à la contraception, ils ont pu commencer à les planifier et non plus à les subir. Cet acquis majeur (en premier chef pour leurs copines) leur a donné la possibilité d’avoir moins de mouflets, plutôt d’ailleurs à 30 ans qu’à 20, voire pas d’enfants du tout (Dany n’en a longtemps pas eu avant d’apprendre, en 2008, qu’il était père d’une fille de 35 ans). Plus le modèle social français se montrait généreux, moins les baby-boomeuses et leurs sœurs cadettes accouchaient. Ce déséquilibre de la pyramide des âges induisait un problème de financement que, de Mitterrand à Hollande, on s’est appliqué à nier, minorer, puis à colmater en s’endettant chaque année plus massivement. Ce fut aussi et surtout l’argument imparable pour justifier l’immigration : les boomers nous demandaient d’adopter des enfants africains de 25 ans, en lieu et place de ceux qu’ils n’avaient pas voulu élever. (« Vous verrez, ils sont une chance » nous ont-ils juré.) Il fallait bien payer les retraites, et quelle différence entre un Tunisien et un Breton de 25 ans ? Vous êtes raciste ?

Lors de la Première Guerre mondiale, la France a accepté la boucherie des tranchées. Elle y sacrifia le quart de ses forces vives

Et puis il y eut bien sûr Mai 68, Dany le Rouge et toute la lyre. L’explosion des droits individuels s’est, au début, confondue avec l’intérêt général (l’égalité entre les hommes et les femmes, la dépénalisation de l’homosexualité, le bannissement du racisme, etc.). Le début des années 1970 figure cet instant pompidolien d’équilibre désormais chimérique entre droits individuels et devoirs collectifs. Jusqu’à ce que la mécanique déraille et mute en droits des minorités, sexuelles, sexuées, religieuses, raciales. D’abord honorées du sceau des droits de l’homme, ces évolutions sociétales se sont progressivement muées en harcèlement tyrannique de la majorité silencieuse et repentante. Ce cocktail juridico-médiatique a constitué le terreau de l’abolition des frontières, du relativisme culturel et des luttes intersectionnelles – ce racisme anti-Blanc subventionné par les impôts des beaufs. Le pacifisme des années peace and love a accouché d’un esprit munichois incarné par les bougies et les nounours avec lesquels, niaiseux, nous pensons faire reculer les islamistes. En 1977, la France expulsait un peu moins de 5 500 étrangers par an pour menace à l’ordre public. En 2019, grâce aux multiples entraves juridiques européennes auxquelles l’intérêt général a été sacrifié, nous n’en avons péniblement expulsé que 383[tooltips content= »Patrick Stefanini, « Le fruit amer du désarmement de l’État », Le Figaro, 19 octobre 2020. »](1)[/tooltips]. La menace étrangère aurait-elle été divisée par 15 entre-temps ? Cela ne constitue pas le sentiment dominant à ma connaissance, ni celui de la famille de Samuel Paty…

Une grand-mère défie le Covid pour jouer avec sa petite-fille, Paris, octobre 2020 © Léo Pierre / Hans Lucas / AFP
Une grand-mère défie le Covid pour jouer avec sa petite-fille, Paris, octobre 2020 © Léo Pierre / Hans Lucas / AFP

Voilà le legs des Dany et Alain, un héritage que l’on a le droit de refuser, tant le passif semble supérieur à l’actif. Les Dany libertaires nous laissent un pays où la censure règne partout et d’abord sur des caricatures. Les Alain, gestionnaires hors pair, nous font cadeau d’une France percluse de dettes. Les deux faillitaires minimisent la guerre civile de basse intensité qui nous oppose au sunnisme radical, un ennemi prêt, lui, au sacrifice et qui dispose d’une cinquième colonne nichée au sein de la plus importante communauté musulmane d’Europe. Une cruelle réalité, également niée pendant trente ans avec fureur, puis minorée et désormais prétendument prise à bras-le-corps par les successeurs de Dany et Alain – aussi crédibles pour assumer cette charge qu’une nonne à la tête d’un club échangiste.

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Affligés d’un état obèse percepteur des impôts les plus élevés du monde, nous constatons avec effarement l’incapacité du Léviathan à assurer ni notre sécurité ni le maintien d’un semblant d’ordre sur l’ensemble du territoire. La Justice française met des années à rendre un jugement, nos prisons sont délabrées. Nos instituteurs, nos médecins, nos infirmières se voient sous-payés. Et, cerise moisie sur ce gâteau avarié, le « meilleur système de santé du monde » a montré son vrai visage à l’occasion de la crise de la Covid. Suradministré, l’hôpital – comme tout le pays – peine à justifier les 11 % du PIB que nous lui consacrons. Quant aux différentes couches administratives égarées dans leurs propres méandres, le terme suranné de pétaudière les décrit avec justesse.

Mais pour nos aimables Dany et Alain, ce n’est pas encore assez. Cette génération déjà coupable d’une criminelle insouciance s’arroge aujourd’hui le droit d’exiger un dernier sacrifice avant de tirer sa révérence. Trois fois rien. Afin de vivre quelques mois ou quelques années de plus – ils ont 75 ans et l’espérance de vie d’un Français est de 79 ans –, ils souhaitent que les actifs, les étudiants et les plus jeunes cessent toute vie sociale, culturelle et affective, bannissent toute fête et fassent des études à demi. Ils acceptent néanmoins – du bout des lèvres – qu’une partie de l’économie continue à tourner, mais au ralenti, à l’unisson de cette demi-vie.

Ce sera, hélas !, sans moi, et pour utilement préciser ma pensée, je leur suggérerais même bien d’aller se faire foutre. Si l’attention que nous portons à la santé des plus fragiles démontre notre humanité, que dire d’un lock-out auto-infligé qui pousse au suicide des étudiants ne trouvant plus de stage ? Quand notre humanité se résume à hypothéquer l’avenir des moins de 30 ans, elle confine au suicide collectif façon secte, commis par les adorateurs d’un éternel présent.

Notre bien-aimé président a déclaré que nous étions en guerre contre la Covid. Il n’existe pas de conflit collectif sans esprit de sacrifice. Lors de la Première Guerre mondiale, la France a accepté l’abjecte boucherie des tranchées. Elle y sacrifia le quart de ses forces vives, ses Apollinaire, ses Péguy. Si tous les Dany et Alain de France souhaitent éviter les 2 % de malchance de mourir du coronavirus, libres à eux de se cloîtrer pour rédiger leurs mémoires (que j’achèterai seulement dans la perspective d’une rupture de stock prolongée de papier toilette). Que ceux de cette génération qui entendent jouir jusqu’au bout de la vie, et je les y encourage, acceptent l’idée qu’ils n’iront pas en réanimation en cas de Covid à complication. Ceci afin de ne pas engorger les hôpitaux et de permettre à de jeunes cancéreux ou diabétiques de poursuivre ou d’entamer leurs traitements. Une guerre pour laquelle se sacrifieraient les anciens dans le but d’épargner l’avenir de leurs enfants et de leurs petits-enfants, voilà sans doute qui aurait enthousiasmé les septuagénaires de 14-18.

Dany et Alain, un peu de courage, merci. Un peu de pudeur aussi. Laissez les plus jeunes essayer de sortir du bourbier dans lequel vous les avez mis, sans exiger qu’ils persistent dans la voie suicidaire que vous leur avez tracée.

De la banque d’investissement au retour du Tsar: l’étrange destin de l’oligarque Konstantin Malofeev

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L'oligarche Konstantin Malofeev, au Safe Internet Forum, Moscou, 22 avril 2019. © Kommersant/SIPA

Un oligarque russe vient de créer un mouvement politique qui milite pour la restauration des Tsars. Vladimir Poutine n’est pas nécessairement contre…


Le 22 novembre, un congrès de la « Société de l’Aigle à deux-têtes », dirigé par Konstantin Malofeev, a eu lieu à Moscou. L’événement a réuni des centaines de délégués des sections régionales de son mouvement, des représentants de l’Union des volontaires du Donbass, de l’Union des guerriers cosaques de Russie et de l’étranger, de l’Union des femmes orthodoxes, ainsi que d’autres associations patriotiques et orthodoxes proches de la mouvance tsariste. Celui qui souffle à l’oreille du président Vladimir Poutine a annoncé la création du mouvement « Tsargrad » qui présentera des candidats aux prochaines élections législatives, soutient le retour de la monarchie et la protection des valeurs traditionnelles russes.

Pour une fédération eurasienne

Entrepreneur à succès qui a noué un solide réseau politique et entouré de nombreuses controverses, Konstantin Malofeev entend désormais s’imposer à la Douma, le parlement russe. Le nom de son parti est loin d’être anodin puisqu’il se réfère aux thèses panslavistes en vigueur et l’équivalent étymologique russe de Constantinople, dont la Russie se considère comme la légitime héritière depuis sa chute en 1453. Le manifeste du parti ne manque pas d’ambition. Son préambule annonce qu’il se considère comme « la plus grande organisation représentant les intérêts des Russes » et a d’ores et déjà des centaines de milliers de membres à son actif, prêts à faire campagne pour la restauration de la monarchie tombée en 1917, victime d’une révolution achevée par les bolchéviques. Son programme reprend les grands crédos du nationalisme russe, la défense de la famille, de la culture russe, de sa diaspora, de ses valeurs religieuses et prône la renaissance de l’empire incluant l’annexion de la Moldavie, la Transnistrie, la Biélorussie au sein d’une fédération eurasienne inspirée des écrits d’Alexandre Douguine, lui-même membre du conseil suprême de Tsargrad. Un mouvement qui saura répondre « aux attaques des occidentaux, de leurs lobbys et de leurs agents présents en Russie » affirme Konstantin Malofeev.

« Nous sommes les enfants de la Victoire ! Nous sommes les bâtisseurs de l’Empire russe du futur »

« Nous sommes les héritiers des grandes victoires des armées russes sur les Khazars, sur la Horde d’Or, sur le Commonwealth [en référence à l’empire britannique-ndlr], sur le Khanat de Crimée, sur le Royaume de Suède, sur la Turquie ottomane, sur l’empire français de Napoléon et sur l’Allemagne fasciste. Nous sommes les enfants de la Victoire ! Nous sommes les bâtisseurs de l’Empire russe du futur » peut-on encore lire sur le manifeste. Le salut de la Russie passera par la restauration de ses Tsars. Une idée actuellement soutenue par un tiers des Russes, dont 46% de sa jeunesse selon un sondage daté de 2017. Très proche de la maison impériale des Romanov dont il assure la promotion médiatique, Konstantin Malofeev précise que « son mouvement rassemble des personnes de tous horizons qui partagent avec lui la conviction que la monarchie autocratique est la seule institution raisonnable, traditionnelle et naturelle pour notre société ».

« Elle a été la période la plus heureuse et la plus brillante de l’histoire du peuple russe. Je considère que c’est le seul refuge sûr pour la Russie. Et pour les croyants, c’est aussi celle qu’il faut soutenir » renchérit l’oligarque qui tente de dessiner plus royalement l’avenir de son pays et qui se prépare d’ores et déjà à l’après Vladimir Poutine, le président russe qui dirige le pays depuis 1999.

Le retour des Romanov

L’idée d’un retour de la monarchie en Russie est loin d’être nouvelle. Évoquée sous la présidence de Boris Eltsine (1992-1999) qui avait songé à faire venir auprès de lui le Grand-duc héritier George Romanov, elle resurgit régulièrement dans un pays qui se réapproprie progressivement son histoire. Les Romanov ont été réhabilités, canonisés et le Tsar Nicolas II, hier décrié comme étant un implacable tyran durant la période communiste, est aujourd’hui une des personnes préférées des Russes. Jouant à la fois sur la nostalgie impériale et soviétique, l’occupant du Kremlin a été plusieurs fois interrogé sur la possibilité d’un retour de la monarchie après son départ. « Officiellement pas sur son agenda » avait répondu Poutine au réalisateur Oliver Stone qui lui posait justement cette question lors d’une interview historique.

Habitués à brouiller les pistes, ses conseillers préfèrent démentir toute idée du genre ou nuancer ses propos. « Le président Vladimir Poutine voit l’émergence de cette idée sans réel optimisme mais reste très ouvert sur le sujet » avait alors expliqué Dimitri Peskov, le porte-parole du gouvernement en 2017, réfutant tout soutien à Konstantin Malofeev et son « initiative personnelle ». Du côté des Romanov, on se tient prêt à un éventuel retour. « Le retour d’un attachement à la foi et la tradition suscite à son tour un intérêt accru pour la monarchie. Je suis convaincu que la monarchie pourrait être à nouveau très utile à la fois en Russie et dans de nombreux autres pays. La monarchie héréditaire offre une continuité – une continuité vivante et résolue – avec le passé et peut servir de véritable arbitre neutre dans la société parce que son pouvoir n’est pas tributaire d’un parti ou d’un groupe politique. La monarchie défend et protège les intérêts de la nation entière dans son ensemble. Si nous parlions de réformes progressives et de changement, je dirais encore une fois que la monarchie est un vecteur de modernité beaucoup plus efficace que les républiques » a déclaré pas plus tard que cet été dernier la Grande duchesse Maria Wladmirovna, actuelle prétendante au trône de Russie et descendante d’Alexandre II. Un Tsar resté célèbre pour avoir aboli le servage. Reste à savoir si les Russes suivront massivement le mouvement de Konstantin Malofeev qui a reçu le soutien de divers députés et sénateurs. À moins que Vladimir Poutine ne finisse par se couronner lui-même comme certains en rêvent ouvertement en Russie.