Accueil Site Page 697

Tout était-il mieux avant?

Selon Alain Finkielkraut, l’expression « Tout était mieux avant » est « frappée de ridicule » et « la nostalgie criminalisée » (Le Club Le Figaro Idées). Pourtant, le passé nous montre souvent que notre société, loin de progresser, a régressé dans un certain nombre de domaines.


Comme ma réaction immédiate me porte à approuver sans nuance ce regret du passé, je voudrais tenter de questionner le plus honnêtement possible ce « tout était mieux avant » pour faire le départ entre une conviction assurée ou un réflexe seulement conservateur.

Il me semble déjà qu’une telle nostalgie, si elle était globale, serait absurde dans la mesure où il est évident que des progrès considérables ont été accomplis dans, par exemple, les domaines scientifique et médical.

De tels progrès, d’ailleurs, qu’ils pourraient faire encourir le risque, par une volonté de recherche dévoyée, d’un transhumanisme, d’une obsession de défier les limites de notre corps et de notre finitude.

Cette évidence rappelée – le temps qui passe est un allié dans l’approfondissement de nos connaissances objectives au sens large -, je n’ai aucun scrupule à déclarer que « c’était mieux avant » dans tous les aspects de la société, l’évolution de l’art, la richesse de la culture, le courage politique – tout ce qui se rapporte à des tendances d’affaiblissement et d’appauvrissement contre lesquelles on a du mal à se battre parce que beaucoup les jugent inéluctables.

Pourtant, même face à ce constat dont la réalité nous affecte chaque jour, dans notre humanité, nos familles et notre condition de citoyens, il me paraît prudent de nous interroger afin de déterminer s’il y a bien en effet une décadence partout où je l’ai ciblée ou si notre perception négative ne résulte pas d’une approche nourrie d’hier et par hier, de notre inaptitude à concevoir que le fil du temps puisse être, même dans ces domaines aux antipodes des enseignements scientifiques et progressistes.

A lire aussi : Bilger, pas fanatique de la notion de parité…

Pour certains, la société a changé et c’est tant mieux. Ce dont nous déplorons la perte, pour eux a été remplacé par d’autres modes, d’autres formes, des transformations ouvrant des perspectives réjouissantes pour le futur. Par exemple, si la culture classique a disparu, si l’écriture et l’oralité sont dégradées, ce n’est pas grave puisque les jeunes gens ont d’autres capacités, d’autres talents et que l’ordinateur et les réseaux sociaux les auraient rendus aussi vifs, voire davantage, que tous ceux enkystés dans une ancienne manière de penser, de sentir, d’écrire et de parler. Dans un ancien monde quand le nouveau serait riche de promesses et le refrain du déclin une facilité paresseuse.

Si je ne méprise aucun de ces arguments, je ne les crois pas exacts. Et j’estime désespérée l’apologie des temps actuels par rapport à des périodes qui justifient implacablement le « c’était mieux avant ».

Prêchant pour ma chapelle, je crains que la relégation des humanités, avec le caractère universel des matières qu’elles abordaient et la culture qui leur était consubstantielle, ait favorisé une réduction de la curiosité et des appétences intellectuelles en donnant une place prédominante aux approches techniques et au pragmatisme. Ce n’est pas soutenir que ces processus ne correspondent pas à un certain type d’intelligence mais constater qu’ils relèvent de spécialités et échappent donc à une plénitude qui constituait le monde ancien comme un modèle.

Pour ma part, dès la première phrase d’un interlocuteur et bien davantage lors d’un échange nourri, il est facile, sans me tromper, de déterminer ce qui l’a formé et qui l’a instruit, si les humanités, les langues anciennes, la philosophie, l’Histoire et la littérature l’ont structuré ou seulement un terreau scientifique spécialisé ayant ses forces et ses avantages mais limité dans son ouverture au monde et son appréhension des autres.

Les humanités, c’est probablement la porte la plus efficace pour accéder à l’humanité. De même que lire Marcel Proust est sûrement l’accès le plus direct à la vie dans ses composantes les plus complexes et aussi les plus simples (contrairement à ce qu’on prétend).

A lire aussi : Luc Ferry : « La loi décline, les droits augmentent ! »

L’argumentation qui suit est délicate mais je soutiens qu’au fil du temps, des vertus essentielles, à force de n’avoir plus été assez mises en œuvre singulièrement et collectivement, ont quasiment disparu et ont conduit des institutions capitales pour notre pays à péricliter.

L’autorité qui a déserté l’État, c’est une faiblesse qui s’est prise pour la norme. La fermeté et la rigueur qui n’ont plus cours à l’école, c’est l’enfance et l’adolescence qui sont blessées et sans doute mal préparées à leur avenir. La culture, l’art, enkystés dans la personnalisation du créateur, c’est l’universel qui est saccagé et le consensus fondamental et exemplaire suscité par les grandes œuvres classiques qui est mis en pièces. La vulgarité, le mépris, la faillite de l’écoute qui pullulent en politique, dans les médias et sur les réseaux sociaux, c’est la superbe intercession de la communication – entre soi et les autres, entre les citoyens, entre ceux qui dirigent et ceux qui sont gouvernés, entre la parole publique et les multiples et parfois contradictoires attentes du peuple – qui est gravement endommagée.

Oui, si tout n’était pas mieux avant, il n’est pas faux de déplorer l’effacement d’un certain nombre d’indiscutables supériorités d’hier par rapport à aujourd’hui.

À une double condition.

Que nous ne soyons pas amers dans notre ton mais persuadés qu’il suffirait d’une authentique audace politique approuvée par la majorité des citoyens (ils n’espèrent que cela !) pour qu’une part exemplaire du passé revienne dans notre présent et soit restaurée. Pour notre plus grand bien.

Le Mur des cons

Price: 18,90 €

48 used & new available from 2,57 €

Un avocat général s'est échappé

Price: 13,50 €

22 used & new available from 2,07 €

Libres propos d'un inclassable

Price: 12,50 €

9 used & new available from 4,96 €

Coupe du Monde : Pourquoi fête-t-on chez certains médias de gauche la victoire du Maroc ?

0

Au terme d’un match riche en rebondissements, le Maroc s’est qualifié pour la suite de la compétition. Une performance sur-plébiscitée par les médias de gauche, immigrationnistes et wokistes. Décryptage.


Mardi 6 décembre 2022, stade Education City à Doha, 20h46. Achraf Hakimi, attaquant phare de la sélection nationale du Maroc, envoie son pays en quart de finale au bout du suspense. Une qualification historique. Après un lourd silence, l’explosion de joie. La bataille royale entre le royaume chérifien et la couronne espagnole prend fin dans une grande cacophonie. Dans le stade, les supporters marocains sont venus nombreux, et donnent de la voix dans une ambiance digne des grands soirs. Partout en France, les Marocains montrent leur euphorie. Il suffit juste de tendre l’oreille. À Paris, les Champs-Élysées sont envahis par des milliers de supporters enjaillés, exhibant le drapeau rouge étoilé dans un tintamarre de klaxons.

Dans les villes de Nice, Lille et Fréjus, mais aussi aux Pays-Bas, des policiers ont été pris pour cible par les supporteurs du Maroc. Ces violences s’inscrivent dans le prolongement des violences à Bruxelles, en marge de la victoire marocaine contre la Belgique le 27 novembre. Une stratégie désormais connue : feux de poubelle, caillassages et affrontements.

Mais ils ne sont pas les seuls à avoir célébré cette historique victoire. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, la jeune rédaction de Brut France, média ouvertement wokiste, s’exalte en direct devant la qualification des « Lions de l’Atlas ». Dans les locaux même du média français, entre drapeaux turc, sénégalais et marocain suspendus sur les armoires, tous, soulagés, se soulèvent, sautent, dans une grande hilarité. Une autre vidéo affiche Rémy Buisine, journaliste vidéo pour Brut, invitant ses troupes : « On va tous sur les champs », est-il écrit alors que les locaux se vident. S’ensuit un petit reportage, de ce dernier, décrivant une ambiance bon enfant, sur les Champs-Élysées. Konbini s’y colle aussi : « Cette panenka [un tir de penalty en pichenette, ici le but de la victoire marocaine, NDLR], c’est le cadeau de Noël qu’on voulait tous », écrit pompeusement cet autre média français de gauche.

Mais pourquoi la rédaction Brut France s’affiche-t-elle en train de célébrer cette victoire du Maroc, aussi historique soit-elle ? Pourquoi ne pas avoir montré ce même enthousiasme pour les victoires toutes aussi historiques du Japon face à l’Espagne et l’Allemagne lors des matchs de groupe ou la qualification de la France en quarts de finale ? Dans le dossier de Causeur du mois de décembre, Philippe d’Iribarne éclaire sur ce penchant du « camp du bien », immigrationniste et wokiste, à mettre en évidence un soutien poussé pour les pays maghrébins. « Pour les tenants de ce courant, l’immigration est d’autant plus bienvenue qu’elle sème plus la perturbation dans la France ‘’franchouillarde‘’ », analyse-t-il. Tout ne peut être que mépris pour la culture française, qui se contente d’être une composante comme les autres de la société multiculturelle. Chez ces médias immigrationnistes, il faut porter le Maroc pour mieux rabaisser la France.

Le sens de l’art

0

New York City 1 est un collage sur toile de bandes jaunes, rouges et bleues formant un quadrillage. Depuis soixante-dix-sept ans, la toile est exposée… à l’envers.

Les amateurs se pressent au Kunstsammlung de Düsseldorf, en Allemagne, pour admirer une rare rétrospective de Piet Mondrian. Parmi les œuvres exposées, New York City 1, un collage sur toile de bandes jaunes, rouges et bleues qui, en se croisant, composent les célèbres quadrillages de l’artiste néerlandais. Seul problème, cette composition de 1941 est… accrochée à l’envers… depuis soixante-dix-sept ans. C’est la commissaire de l’exposition qui s’en est rendu compte : « Sur une photo de 1944, j’ai vu que la toile était dans l’autre sens sur un chevalet. Ça m’a intriguée », a-t-elle déclaré au quotidien Süddeutsche Zeitung. Susanne Meyer-Büser effectue quelques recherches et remarque qu’un an plus tard, la toile, exposée au MOMA de New York, est à l’envers. Selon elle, « l’erreur pourrait provenir du fait que la peinture n’avait pas de signature. Son sens a été déterminé par le nom de l’artiste inscrit au dos du cadre par l’administrateur de la succession », Mondrian étant mort en 1944.

Maintenant qu’on le sait, pourquoi ne pas l’accrocher à l’endroit ? La réponse de Suzanne laisse pantois : « Les rubans adhésifs sont déjà très lâches et ne tiennent qu’à un fil. Si on devait la retourner maintenant, la gravité la tirerait dans une autre direction. Et cette erreur fait désormais partie de l’histoire de l’œuvre. » Si ça fait partie de l’histoire, on peut suggérer aux défenseurs de la planète de se coller, non les mains au cadre, mais les pieds au plafond du musée. Ils ont jusqu’au 12 février pour le faire.

A lire aussi : Attention: art dégénéré !

Commerce extérieur : le grand effondrement

En dépit des boniments du gouvernement, le commerce extérieur, surtout dans le domaine industriel, est aujourd’hui en piteux état. L’histoire que racontent les chiffres officiels est celle d’un déclin inexorable. Tribune de Jean Messiha et Frédéric Amoudru.


La France s’achemine inexorablement vers le pire déficit commercial de son histoire. De 63.3 milliards d’euros[1] en 2018, première année pleine du quinquennat d’Emmanuel Macron, à une estimation de 150 milliards à la fin 2022, la 5ème année pleine de son règne, les compteurs ont explosé et la France s’est mécaniquement appauvrie.

Pour expliquer ces chiffres calamiteux, la macronie a une excuse toute trouvée : la flambée des cours des hydrocarbures et des matières premières. Il est vrai que ces hausses spectaculaires des cours pèsent lourd dans la balance, même si une partie de l’aggravation de notre déficit énergétique est due à la débâcle de notre industrie nucléaire traditionnellement exportatrice d’électricité. Après cinq ans au pouvoir, Emmanuel Macron ne peut pas dire que « cela vient de loin », comme il l’avait fait valoir lors de l’explosion de colère des Gilets jaunes.

S’il paraît difficile de lui reprocher la guerre en Ukraine, véritable catalyseur d’une montée spectaculaire du prix des hydrocarbures, il nous faut aborder une autre composante de ce déficit qui est celui des biens manufacturés. Déficit d’autant plus impressionnant qu’il reflète la santé de notre industrie. Et à en croire les chiffres, elle n’est pas bonne. Prenons les données qui font référence en la matière, à savoir celles fournies par la Direction Générale des Douanes.

En 2018, le déficit du poste produits manufacturés était de 36,7 milliards d’euros, ce qui indiquait déjà le degré de désindustrialisation atteint par la France. Le chiffre reste à peu près stable en 2019, puis plonge en 2020, à cause du COVID, à 57,5 milliards d’euros. Mais en 2021, tandis que les usines avaient repris leurs activités, nous tombions à 65,7 milliards et en 2022, alors qu’aucune excuse COVID n’est invocable, nous nous acheminons vers le chiffre de 78 milliards d’euros pour 2022 ![2]

On a beau nous expliquer que la France se « réindustrialise » grâce à la politique du président et de son très « techno » ministre de l’économie Bruno Le Maire, les chiffres sont têtus. Qui peut, en effet, croire à cette soi-disant désindustrialisation quand nos échanges industriels (hors énergie) se dégradent à ce point ?

A lire aussi: Métiers en tension : pourquoi l’immigration ?

Quand un pays se réindustrialise vraiment, soit les usines locales satisfont davantage la demande locale et les importations diminuent – c’est ce que l’on appelle « l’import-substitution » – ou bien lesdites usines se spécialisent et exportent fortement comme les industries suisses, allemandes ou du Nord de l’Italie. Dans l’un ou l’autre cas, le déficit de la balance commerciale des produits manufacturés s‘améliore voire devient excédentaire.

En France, cette balance, nous l’aggravons. Et pendant ce temps, l’exécutif et les médias qui lui sont inféodés, comme BFM Business, Les Échos, etc., proclament que les usines poussent comme des champignons dans notre beau pays et qu’enfin nous réindustrialisons ! Toutefois le sujet est suffisamment sérieux pour que l’on creuse le champ des explications.

A cet effet, nous avons analysé les chiffres des 16 secteurs que détaillent les Douanes depuis 2018 à 2022 en annualisant les chiffres des 3 premiers trimestres sur 9 mois.

Prenons d’abord les quelques domaines où nous sommes excédentaires :

  • Nos industries agro-alimentaires poursuivent leur bonhomme de chemin et affichent un excédent stable à environ 6-6,5 milliards d’euros.
  • Les parfums et cosmétiques marchent plutôt bien puisque nous passons de 11,3 milliards d’euros d’excédents à 15 milliards, reflétant le succès à l’export de nos produits de luxe.
  • La pharmacie évolue négativement sur 5 ans avec un excédent qui montait en régime de 4,3 milliards d’euros en 2018 jusqu’à 6 milliards d’euros en 2019. Il baisse ensuite à 2,4 milliards d’euros en 2022 avec la crise COVID et les importations massives qui en ont découlé, l’industrie française étant incapable de suivre.
  • Gros poste : l’aéronautique et le spatial. Essentiellement, Airbus. Voilà l’entreprise qui en quelque sorte fait la pluie et le beau temps de l’industrie nationale et de ses exportations. 27 milliards d’euros d’excédent en 2018, encore mieux en 2019, puis le trou d’air du COVID. Depuis, nous assistons à une lente reprise qui nous laisse à environ 22 milliards d’euros en 2022.Les navires, et en particulier les paquebots de croisière fabriqués aux chantiers de l’Atlantique, sont une fierté nationale. On les exporte pratiquement tous, puisque nous n’avons pratiquement plus de croisiériste français. Excédent variable selon les années et les livraisons, de 1 à 2 milliards d’euros annuels, sauf en 2020 et 2021 avec l’impact du COVID sur les travaux et donc les livraisons. Mais gros rebond en 2022 (+2,7 milliards) où on livre beaucoup. Ce fleuron est malheureusement menacé par la hausse des coûts de l’énergie et le fait que les croisiéristes ont déjà acheté de nombreux navires.

Venons-en maintenant à la litanie des secteurs où nous sommes perdants :

  • Déficitaire depuis des lustres en raison d’une délocalisation ancienne le « textile, habillement et cuir », en négatif de 13 milliards d’euros en 2018, a baissé à près de 11 milliards d’euros en annualisé 2022. Un léger mieux lié au fait que les Français ont un peu réduit leur consommation de fringues comme en témoigne les faillites en série des magasins d’habillement.     
  • Le secteur « bois, papier, carton », pour sa part, voit, lui, son déficit se creuser, passant de 4,8 milliards d’euros à 7,6 milliards, reflétant la poursuite des fermetures des entreprises du secteur en France et dont la faillite de la société Arjo Wiggins fut un symbole.
  • La chimie, positive de près de 1,5 milliards d’euros est passée, 5 ans plus tard, à près de 3 milliards de déficit.
  • Dans les plastiques et caoutchouc, les choses vont de mal en pis puisque l’on passe de -7,2 milliards à -10.2 milliards d’euros. Les importations de plus en plus importantes de pneus bon marché de Chine et d’ailleurs constitue une partie de l’explication.   
  • La métallurgie fait un four, sans mauvais jeu de mots, avec un déficit qui explose de 8,9 milliards à 16,8 milliards d’euros. En cause la hausse des cours de l’acier et des métaux non-ferreux que nous fabriquons de moins en moins.
  • Personne ne s’étonnera que les matériels informatiques constituent un gouffre qui se creuse. Nous en consommons de plus en plus et n’en produisons aucun, d’où un déficit qui passe de 16,5 milliards à plus de 21,6 milliards d’euros en 2022. Les équipements électriques et ménagers, très emblématiques de notre désindustrialisation avec les célèbres faillites de Brandt, Moulinex et plus récemment la fermeture de Whirlpool, entre autres, ne déçoit pas. Le déficit augmente de 7,4 milliards à plus de 10,5 milliards d’euros.

Venons-en au secteur très stratégique des machines dans lequel on retrouve machines-outils, robots industriels mais également les machines agricoles.  Une bérézina qui voit notre déficit plus que doubler de moins de 5 milliards à plus de 11 milliards d’euros.  « C’est une bonne nouvelle », nous dit-on, car cela veut dire que la France modernise son appareil de production. Nous verrons !

Passons au plus scandaleux des scandales industriels français : les véhicules et équipements auto. Les bagnoles et les pièces détachées pour faire simple. Nous avions près de 10 milliards d’euros de déficit en 2018. Il passe à 18,3 milliards en annualisé 2022. Pourtant, nous voyons plein de voitures françaises sur nos routes. Késaco ? C’est simple. Ces soi-disant voitures françaises n’ont de française que la marque. Pire, les bonus écologiques que distribue allégrement notre gouvernement incompétent au nom de la transition climatique profite majoritairement aux petites et moyennes cylindrées qui sont massivement importées. En effet, à part le japonais Toyota et sa Yaris de Valencienne, nos PSA et Renault fabriquent leur modèle d’entrée de gamme ailleurs puis importent en France. Nous subventionnons ainsi les usines slovènes, slovaques, tchèques, espagnoles, turques ou encore marocaines. Nos « progressistes » au pouvoir ont du talent…

A lire aussi: Immigration : un mariage forcé à l’issue fatale

Dans la catégorie autre matériels de transport, qui inclut en particulier les deux roues que nous ne fabriquons plus, nous avons, sans surprise, un déficit de 2 à 3 milliards d’euros chaque année.

Enfin, nous avons le poste autres produits manufacturés, un fourre-tout qui inclut tout ce qui ne rentre pas dans les catégories précédentes. Il pèse plutôt lourd, puisqu’il accuse une perte qui passe de moins de 10,7 milliards d’euros en 2018 à plus de 14 milliards d’euros en 2022.

Ce tableau négatif s’accompagne pourtant d’une floraison d’initiatives :

  • Création des Pôles de compétitivité en 2004 ;
  • Plan d’Investissements d’Avenir en 2010 ;
  • Création du CICE en 2014 ;
  • Relance du Conseil National de l’Industrie en 2017 ;
  • Baisse progressive de l’impôt sur les sociétés à 25% ;
  • Baisse des impôts de production des entreprises de 10 Mds par an (sur un total d’environ 85 Mds)
  • Plan « France Relance » en 2020 qui contient :

– des stratégies d’accélération pour l’innovation dans le cadre du quatrième programme d’investissements d’avenir (PIA4) ;

-des appels à projet pour soutenir les secteurs stratégiques de l’industrie ;

-un soutien à la Transformation numérique des TPE-PME ;

-un plan pour la décarbonation de l’industrie.

  • Suppression définitive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur 2023-2024 soit 9.3 Mds d’euros en deux ans.

Rien n’y fait.

Le très sérieux portail de recherche économique allemand, STATISTA, nous livre le chiffre de la part de l’industrie manufacturière dans le PIB français. Là encore, il nous montre un lent déclin : 10,14% en 2017, puis 9,97% en 2018, 10,01% en 2019, 9,39% en 2020 et enfin 9,18% en 2021.

Il en résulte que tout ce que la propagande gouvernementale répand sur la réindustrialisation en cours c’est du… flan(by) ! Il serait toutefois prétentieux de conclure cette tribune en affirmant que les solutions sont simples. Mais il y a clairement une problématique que ni la droite sarkozienne, ni la gauche hollandienne ni le centre macronien ne sont arrivés à résoudre.

Il y a, en réalité, deux stratégies possibles :

  1. Une forte intervention gouvernementale pour structurer des filières industrielles. Mais le volontarisme ne peut suffire. Il doit s’accompagner de subventions publiques massives ciblées qui se heurteront aux règles européennes ;
  2. Poursuivre, mais de façon beaucoup plus ambitieuse, la baisse des prélèvements obligatoires qui pèsent sur nos industries. Là encore, l’UE ne nous permettra pas de cibler des secteurs en particulier.

C’est pourquoi la baisse des impôts de production timidement entamée par le gouvernement, fait sens, dans la mesure où elle bénéficie structurellement davantage aux usines. Il faut toutefois aller plus loin, car l’écart avec l’Allemagne reste élevé, et mieux cibler géographiquement cette baisse, ce qui est permis, de façon à ce qu’elle se concentre sur les zones où l’industrie est présente ou susceptible de se développer. Cette stratégie est plus efficiente que celle consistant en un arrosage large qui bénéficie au secteur des services dans les métropoles, secteur qui n’en a nul besoin.

Le grand défi reste celui de la conditionnalité. Comment faire en sorte que ces baisses d’impôts se traduisent bien par un surcroît de production plutôt qu’à une hausse des bénéfices et des dividendes ?

Nous reparlerons de la stratégie de réindustrialisation dans une prochaine tribune…


[1] Chiffres incluant les matériels militaires  

[2] En annualisant les chiffres des 3 premiers trimestres, ce que nous ferons pour tous les chiffres qui suivent !

Pour les mélenchonistes, il faut « dénazifier » la France

Hadrien Clouet, député LFI, demande dans une question écrite à la ministre de la Culture de changer les rues ayant des noms de «nazis » ou «collabos».


Dénazifier l’Ukraine ? Poutine en a rêvé ! Dénazifier la France ? Mélenchon et les siens vont le faire.

C’est Hadrien Clouet, un obscur député Insoumis, qui a sonné l’alarme. Dans une question écrite à la ministre de la Culture, il lui demande « d’agir contre les nazis et les collabos ». Il alerte sur le fait que plusieurs d’entre eux ont leur nom sur des plaques de rues.

Ce député ignore manifestement que les noms des rues sont du ressort des municipalités plutôt que des ministères. Mais on ne va pas demander à un parlementaire mélenchoniste de connaitre la loi…

Voyons en détail les raisons de l’indignation d’Hadrien Clouet. Il pointe du doigt le fait que de nombreuses rues, places et artères portent les noms d’Alexis Carrel et de Paul Morand. Carrel, dit-il, voulait exterminer par le gaz « les populations inférieures ». Quant à Paul Morand, toujours selon Hadrien Clouet, « c’était un antisémite acharné ».

A lire aussi: Ne pas tomber dans le « Panot »

Renseignements pris, nous sommes en mesure de vous révéler que le docteur Carrel était un éminent savant récompensé par un prix Nobel de médecine. Il était eugéniste. C’était la mode à l’époque. Carrel prônait l’euthanasie non pas pour les « populations inférieures » mais pour les handicapés. Ces préconisations ne furent pas, heureusement, suivies d’effets. D’ailleurs, depuis les années 90, des rues et des institutions portant son nom sont régulièrement débaptisées. La demande d’Hadrien Clouet n’a rien de très nouveau.

Quant à Paul Morand, c’était un brillantissime écrivain. Il fut ambassadeur de Vichy à Bucarest. Ce qui en dit long sur ses convictions. Mais depuis, il est publié et republié. Faudrait-il brûler ses livres parce qu’il était antisémite ?

A part ça, nous ne pouvons cacher notre étonnement de voir les Insoumis se préoccuper des Juifs. Les aurait-on changés ? Leurs amis islamistes ne vont pas apprécier !

Hadrien Clouet, sur sa lancée se fait poignant. « Que deviennent, s’exclame-t-il, les enfants qui grandissent rue du docteur Carrel? » Et il souligne les tourments indicibles du facteur obligé d’arpenter chaque jour la rue Paul Morand.

Voilà bien un souci qui l’honore. Nous nous permettons de relever qu’il y a en France de multiples rues qui portent les noms de Lénine, de Trotsky, et d’Aragon (qui écrivit un poème à la gloire du Guépéou, la cruelle police stalinienne). Il nous semble qu’ils ont beaucoup plus de morts sur la conscience.

Capitaine abandonné

0

Pas de brassard LGBT lors de la Coupe du monde au Qatar, la FFF et Hugo Lloris respectent les règles du Qatar et ce n’est pas au goût des médias bien-pensants.


Alors que la Coupe du Monde se déroule au Qatar, pays où l’homosexualité est illégale, un brassard arc-en-ciel a été conçu en soutien aux personnes LGBT. Lundi 14 novembre, à la veille du départ des Bleus pour Doha, Hugo Lloris, le capitaine de l’équipe, est interrogé lors d’une conférence de presse au sujet du port de ce brassard. En effet, n’ayant pas reçu l’aval de la FIFA, Noël Le Graët, le président de la FFF, s’était également exprimé à ce sujet dans l’Équipe : « On va en discuter. Mais j’aime autant qu’il [Hugo Lloris] ne le fasse pas. On va jouer dans un pays que l’on doit respecter ». Face au journaliste, qui lui demandait si ce n’est pas « une bonne idée de porter ce brassard pour faire avancer les choses », le gardien a été droit au but : « Sur le sujet, bien sûr, j’ai mon opinion personnelle. Et ça rejoint celle du président Le Graët. Lorsqu’on est en France, lorsqu’on accueille des étrangers, on a souvent envie qu’ils se prêtent à nos règles, qu’ils respectent notre culture, et j’en ferai de même quand j’irai au Qatar. Après, je peux être d’accord ou non avec leurs idées, mais je dois montrer du respect par rapport à ça ». Il n’en fallait pas plus pour déclencher une polémique. Pour réagir à cette dernière, Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des Sports, s’est rendue dans l’émission C à vous, sur France 5, le 18 novembre. L’animatrice, Anne-Élisabeth Lemoine, représentative de la bien-pensance de l’audiovisuel public, a posé une question qui révèle son opinion sur le sujet : « Comment peut-on dire qu’on va respecter la culture d’un pays où l’homosexualité est illégale ? ». Il y a actuellement 69 états qui interdisent l’homosexualité, autant de pays dont la culture n’est pas respectable ? Le Maroc, l’Algérie, Singapour, la Malaisie, la Tanzanie, le Kenya, le Pakistan, la Mauritanie, seront ravis d’apprendre que leur culture n’est pas respectable. Hugo Lloris arbore néanmoins le brassard le plus important… celui de capitaine de l’équipe de France.

A lire aussi: « A l’insu de leur plein gré » : les footballeurs contre la FIFA

Au service de « Ta Majesté »

0

Le meilleur remède contre le wokisme ambiant s’appelle Amicalement vôtre.


Ils n’ont pas réussi à l’interdire. C’est une question d’années, voire de mois. Croyez-moi, ces gens-là combattront le moindre espace de liberté. Ils nettoieront à sec la moindre rigole d’insouciance badine. Ils veulent tuer « nos plus belles années » à coups de sit-ins sauvages et d’outrances verbales. Ils voient des machistes suprémacistes un peu partout, d’affreux virilistes à la piscine du « Palm Beach », des prédateurs carbonés sur l’autoroute des vacances et des viandards au « room service ». Ils ne supportent pas cette décontraction azuréenne assumée, cette déconne débonnaire et ce cortège de dépenses forcément somptuaires qui furent longtemps la marque des civilisations les plus avancées. La farce les dépasse, la fesse les oppresse, l’humour les agresse. Ils voudront bientôt nous faire ravaler jusqu’à nos menus plaisirs télévisuels. Ils traqueront et judiciariseront nos programmes préférés comme ils épurent déjà nos bibliothèques.

Vous pensez, deux grands dadais aux répliques boulevardières portant chemises à jabot et fréquentant les bars des palaces, draguant ouvertement et ne prenant rien au sérieux, sont considérés aujourd’hui comme de dangereux idéologues. Des activistes d’un art de vivre décadent à bannir ! Á jeter dans les fosses de l’Histoire ! Comment les jeunes générations pourraient-elles se reconnaître dans des hommes aussi puérils et superficiels ? Á trop les fréquenter, elles pourraient même avoir envie de leur ressembler. Ces faux vertueux n’aiment ni les playboys d’opérette, ni les voitures de sport, encore moins la prolifération du bikini sur les plages de France. Ils ont peur des cocktails alcoolisés, des peaux qui se collent au contact du sable chaud, des blagues sous la ceinture et de ce dilettantisme souverain que l’on devrait enseigner dans les écoles de la haute fonction publique. Nos comptes seraient mieux gérés et nos dirigeants auraient meilleure allure. Ces puritains-là sont plus sérieux que nos anciens calotins. La honte doit désormais changer de camp. Comment y parvenir ? Comment refluer ce mouvement qui ne comprend rien au second degré et à la beauté du vagabondage amoureux. Une solution existe : revoir les vingt-quatre épisodes de la série Amicalement vôtre. Revenir à la source du mâle. Entrons chèr-e-s ami-e-s en résistance et prenons ces vingt-quatre feuilletons comme un traité de philosophie à l’usage des mauvais coucheurs. Un remède contre les temps sombres qui s’annoncent. Un bras d’honneur à tous les rigoristes verbeux qui encombrent les écrans. Je ne connais pas vadémécum plus limpide et inspirant que Danny Wilde (Tony Curtis) et Lord Brett Sinclair (Roger Moore) se chamaillant sur la composition du « Créole crème ». Faut-il y adjoindre une ou deux olives ? Mystère. Les mixologues n’ont pas tranché la question.

A lire aussi : Marielle, Broca, Belmondo: le beau recueil nostalgique de Thomas Morales

Avec ces deux-là, le cabotinage entre Cannes et Brighton était la règle, la distance avec la réalité prenait une forme d’élévation spirituelle. Ils furent essentiels à notre éducation. Je dois admettre qu’ils surclassaient mes professeurs d’alors dans de nombreux domaines, notamment le choix des vins, le port de la chemise en soie sauvage ou l’emphase comique. Le fait qu’ils roulent en Dino 246 GT et Aston Martin DBS les rendaient encore plus crédibles à mes yeux. Chacun, ses faiblesses. Leur humanisme dénué de toute prétention nous a permis d’aborder les années 1980 avec des valeurs fortes et le sens des priorités. Grâce à leur travail de sape, nous avons été insensibles aux discours victimaires, aux injonctions alimentaires et aux crises identitaires.  Le générique orchestré par John Barry devrait suffire à calmer toutes les polémiques et à convaincre les plus réticents d’entre vous. Sa puissance évocatrice est un bain de jouvence dont l’onde nostalgique n’a pas fini de nous bercer. Au début des années 1970, juste avant les crises pétrolières et la chasse au gaspi, on savait vivre et on savait surtout rire. L’humour était un bien largement partagé dans toutes les couches de la société. On ne partait pas en guerre au premier string ficelle aperçu et on ne s’offusquait pas d’une accélération vigoureuse mais néanmoins mélodieuse sur une route de l’arrière-pays niçois. Les téléspectateurs s’amusaient des joutes oratoires (upgradées par les deux génies du doublage qu’étaient Michel Roux et Claude Bertrand) et des codes esthétiques en vigueur. Le laid n’avait pas sa place dans cette série. Toutes les situations prêtaient à la dérision. Dès le premier épisode, le juge Fulton avait reproché à Brett Sinclair de parler neuf langues qui ne lui servaient seulement qu’à commander à boire au restaurant. Et quand Danny descendit de l’avion, il lança, s’adressant aux jolies hôtesses de l’air, cette formule mémorable : « N’abusez pas trop de votre physique ! ». On ne criait pas à la phallocratie triomphante mais à la répartie brillante. Question d’époque ! 

Amicalement vôtre-L’intégrale [Édition Ultime]: DVD et Blu-ray : Amazon.fr

Un nouveau rôle pour l’Éducation nationale

Lors d’une interview, Pap Ndiaye révèle son souhait pour l’Éducation nationale : combattre certaines idées. En somme, apprendre aux enfants à « bien penser » plutôt qu’à apprendre les fondamentaux scolaires.


La longue interview sur Radio J du ministre de l’Education nationale mériterait d’être commentée dans son ensemble, tant il s’est montré droit dans ses bottes idéologiques, en réponse à des questions généralement d’une grande complaisance de Frédéric Haziza, qui semblait avoir décidé de lui servir la soupe.

Une seule phrase toutefois suffira pour mesurer les intentions de Pap Ndiaye, quant à sa conception de son rôle de ministre. La voici, à propos d’Eric Zemmour : « Il est clair que ce type de personnage dans la vie politique est un poison lent contre lequel il faut mettre les français en garde, et nous avons, nous, du côté de l’Éducation Nationale, notre rôle à jouer ».

Tout est dit, l’Éducation nationale a un nouveau rôle à jouer, il faut le savoir et le souligner. On savait déjà que ce ministre avait donné quatre axes à son action, dans l’ordre : lutte contre les inégalités, savoirs fondamentaux, bien-être de l’élève, question écologique. Dans un autre monde, dans une vie un peu rêvée, on pourrait imaginer que l’acquisition des savoirs fondamentaux soit l’unique et essentielle mission de l’Education nationale, sachant qu’elle a déjà bien du mal à la remplir. Mais non, ce n’est plus qu’une mission parmi d’autres, et même pas la plus importante.

A lire aussi: Ne pas tomber dans le « Panot »

Mais maintenant il faut envisager, apparemment, une cinquième mission : l’Éducation Nationale doit éduquer nos enfants à bien penser. Il faut leur enseigner où se situe le bon, le bien, le vrai. Il faut désigner les méchants et les mal pensants, leur expliquer qu’il y a des choses qui ne se disent pas, et même qui ne se pensent pas, et qu’il existe à droite une frontière au-delà de laquelle commence l’empire du mal.

Remarque : le ministre en question avait déjà dit au début de sa prise de fonction que son combat de toujours consistait et consisterait encore là à se battre contre le « Front National » qu’il appelle ainsi malgré le changement de nom. C’est dire si on ne l’a pas nommé au bon poste ! Il serait éventuellement bon de rappeler ses premiers propos pour démontrer l’obsession du monsieur à l’égard de ce que l’on appelle « l’extrême droite ».

Sortez découverts !

Le port de la kippa en public n’est pas si différent de celui du voile : ils sont tous les deux contraires à l’esprit de la laïcité à la française.


L’autre matin, l’excellent et avenant Cyrille Cohen, directeur du laboratoire d’immunothérapie de l’université Bar-Ilan de Tel-Aviv, était invité à CNews, sur le plateau de Pascal Praud. Ses critiques plus ou moins feutrées de certaines mesures anti-Covid ont sans doute passionné les téléspectateurs et les autres participants – dont la plupart ont été, comme votre servante, enchantés que leurs agacements reçoivent une onction scientifique. Cependant, comme l’a signalé Praud, qui reçoit des messages pendant l’émission, ce qui a fait réagir le public autant que ses explications scientifiques, c’est la kippa qu’il avait sur la tête. Rappelons que ce couvre-chef de forme circulaire est porté par les juifs (les hommes) à la synagogue, mais que les plus pratiquants le conservent en permanence.

Je l’avoue, dès mon arrivée, cette kippa m’a contrariée. Lorsque le sujet s’est invité dans le débat, j’ai fait remarquer au professeur qu’en France, on n’affichait pas ses convictions et pratiques religieuses. Question de savoir-vivre. Certes, la loi n’interdit pas le port de la kippa ou du voile islamique dans l’espace public. Mais quelle que soit la règle, l’esprit de la laïcité commande une certaine discrétion. « Je m’appelle Cohen, tout le monde sait que je suis juif », m’a rétorqué l’intéressé. Oui, et moi je m’appelle Lévy. Un nom, aussi caractéristique soit-il, ne dit strictement rien de la pratique, a fortiori pour un juif dont la définition relève de la filiation – selon la loi hébraïque, est juif quiconque est né d’une mère juive (même ashkénaze[1] !). On peut donc être juif et totalement athée ou mécréant. Au demeurant, personne ne demande à Cyrille Cohen de se cacher. Et il est vrai qu’il est israélien. Mais il se trouvait en France (pays dont il possède probablement la nationalité). Qu’il respecte le shabbat et mange cacher, c’est une affaire strictement privée. Pour autant, cet appel à la retenue ne vaudrait pas pour un imam, un rabbin ou le pape, en tout cas s’ils étaient invités es qualité.

Plus encore qu’une loi, qui ne peut être modifiée que par le vote du Parlement, une règle tacite est sujette à évolution, en fonction des débats qui traversent la société. Il est probable que cette kippa n’aurait pas choqué il y a trente ans, avant que le voile islamique devienne un sujet récurrent de la dispute française, notamment grâce à certaines sœurs Lévy[2]… Certains internautes n’ont pas manqué de faire le rapprochement. « Là on est au comble du fou rire sur #hdpros eux qui râlent à longueur de journée sur les voiles ou les djellabas, hop dès le lundi matin professeur Cyrille Cohen et sa kippa sur la tête sur le plateau », tweete un courageux anonyme qui s’est baptisé « Le Comédien ». Eh bien, en dépit d’une légère aigreur, ce comédien-là n’a pas tort. Dénoncer le voile et accepter la kippa témoigne au minimum d’une incohérence et, aux yeux de pas mal de gens, d’un déplorable deux poids, deux mesures. C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’il y a quelques années, Marine Le Pen avait demandé aux juifs français de renoncer à la kippa dans la rue. Beaucoup l’ont fait, malheureusement pour des raisons de sécurité.

A lire aussi : Elisabeth Lévy: faut-il se voiler pour compatir avec les musulmans?

On me dira que ce n’est pas pareil. En effet, la kippa n’est pas un signe d’infériorité des femmes (ni des hommes). Elle n’est pas l’étendard de nos ennemis, elle n’est pas suspecte de manifester des sentiments antifrançais. On n’a pas vu d’hommes à kippa se réjouir des massacres de Charlie Hebdo ou du Bataclan. Mais en France, beaucoup de jeunes filles musulmanes portent le voile sans avoir la moindre sympathie pour les terroristes ni la moindre détestation pour leur pays. Qu’elles soient instrumentalisées au service d’une cause qui les dépasse, c’est ma conviction, mais cela relève du débat.

Inutile de se raconter des histoires. Il y a une forme de séparatisme juif. Certes, il est pacifique et apolitique. Autrement dit, ce ne sont pas les juifs qui mettent aujourd’hui au défi la cohésion de la société française. N’empêche : ce qui pouvait passer il y a quelques décennies pour un innocent particularisme paraît aujourd’hui problématique à nombre de nos concitoyens. Qu’il y ait parmi eux des gens qui ont un problème avec les juifs ne doit pas nous empêcher d’entendre les autres, ceux qui pensent légitimement qu’une règle n’a de sens que si elle vaut pour tous.

J’ai également été frappée par le silence de mes camarades de plateau – fait suffisamment rare pour être significatif. Peut-être auraient-ils été plus directs avec une femme voilée. Leur retenue témoigne d’une certaine délicatesse qui a partie liée avec l’histoire. Si j’ai été la seule à prendre la parole, c’est sans doute parce que mon patronyme et mon appartenance m’immunisent contre le soupçon d’antisémitisme. Quoi qu’en pensent beaucoup de nos compatriotes musulmans, l’antisémitisme traduit la haine des juifs alors que ce qu’ils appellent islamophobie est la critique de certaines expressions de l’islam. Sauf que ces distinctions subtiles ne peuvent guère avoir cours dans un débat télévisé. Alors, que mes amis de CNews et le professeur Cohen souffrent que je les interpelle gentiment. Nous ne sommes pas menacés par le retour du nazisme. Les juifs ne sont pas des petites choses fragiles et susceptibles incapables de tolérer la moindre remarque. Interdire toute critique ou blague à leur encontre serait, finalement, une forme paradoxale (et inconsciente) d’antisémitisme.


[1]. Je n’ignore pas qu’on s’empaille depuis des lustres sur cette définition, que des gens dont seul le père est juif se définissent comme juifs et que d’autres, de mère juive, ne revendiquent aucune appartenance. Mais ce n’est pas le lieu d’un débat talmudique…

[2] En 2003, Alma et Lila Lévy, filles d’un avocat juif athée et d’une mère kabyle de culture musulmane ont été exclues du lycée d’Aubervilliers pour refus d’ôter leur hidjab.

Espagne : Pedro Sánchez, un président candidat à la postérité

0

L’actuel gouvernement socialiste, à la différence de tous ses prédécesseurs, cherche à se donner une forme de légitimité durable en rouvrant les blessures de la Guerre civile et de l’ère franquiste. Ce faisant, il risque la désintégration de l’Espagne.


Venu rendre hommage à la romancière espagnole Almudena Grandes disparue en novembre 2021, et dont le dernier roman vient d’être publié à titre posthume, le président du gouvernement espagnol Pedro Sánchez (PSOE, Parti Socialiste) en a surtout profité, ce 28 novembre, pour parler de lui et de ce que l’Histoire retiendra de son passage en politique. « L’une des choses pour lesquelles je passerai à la postérité sera d’avoir exhumé un dictateur », a-t-il déclaré devant le parterre du Centre Culturel de l’Athénée (Madrid) qui ne semble pas s’être ému de cette forme particulière d’immodestie consistant à se projeter dans les livres d’histoire à venir, debout devant le portrait d’une romancière décédée avant d’avoir pu achever l’écriture de son dernier ouvrage. Il faut dire que l’assistance, du réalisateur Pedro Almodóvar à l’actrice Ana Belén, était acquise à Pedro Sánchez. Il faut dire aussi que les romans d’Almudena Grandes, très appréciés du grand public, sont autant d’explorations littéraires de la guerre civile espagnole et de la dictature franquiste, la romancière – fervente militante de la récupération de la mémoire historique – ayant toujours dit regretter que l’Espagne soit le seul pays d’Europe où, selon elle, « dans une guerre entre fascistes et démocrates, on ne désigne toujours pas clairement les bons et les mauvais ». Affaire de littérature et non d’histoire, assurément.

La phrase de Pedro Sánchez n’est pas passée inaperçue dans un contexte électrique où, à six mois des prochaines élections municipales (28 mai 2023) et à un an des élections générales, ses adversaires politiques – à commencer par ceux du Partido Popular (PP, droite libéral-conservatrice) et de Vox (classé à l’extrême droite) – n’ont pas hésité à questionner ces curieuses prétentions à un destin historique. Et ils rappellent au candidat à la postérité que la coalition entre le parti socialiste (PSOE) et l’extrême gauche (Unidas Podemos,UP: « Unies nous pouvons »), au pouvoir depuis janvier 2020,  avait accouché de plusieurs lois incendiaires parmi lesquelles : la  Loi trans, la Loi de garantie intégrale de liberté sexuelle (loi dite du consentement explicite, sans lequel tout acte sexuel est potentiellement un viol, plus connue en Espagne sous le nom de « Seul un oui est un oui ») et la Loi de réforme du délit de sédition.

A lire aussi :  Mythe et mythes de la Guerre d’Espagne: les raisons d’une polémique

La Loi trans, portée par la Ministre de l’Égalité, Irene Montero, issue du parti d’extrême gauche, UP, prévoit, entre autres dispositions, que toute personne de plus de 16 ans pourra choisir librement son identité de genre (sans consentement parental ni avis médical ou psychologique préalable), que les mineurs entre 14 et 16 ans auront également ce droit (quoique devant être assistés dans leurs démarches par leurs parents ou tuteurs légaux), comme ceux de moins de 12 ans (qui, eux, devront tout de même obtenir une autorisation judiciaire).

Si la Loi trans n’a pas encore été votée, c’est qu’elle a été retardée par le chaos engendré par la récente Loi du Seul un oui est un oui – de la même ministre de l’Egalité – entrée en vigueur le 7 octobre. Car cette loi, d’avantage conçue comme protectrice des victimes (n’ayant heureusement plus, désormais, à se justifier d’avoir été abusées ou violées), plutôt que punitive (les peines minimales ont été abaissées suite à la décision de gommer la distinction entre « abus » et « viol »), produit l’effet inverse de l’objectif poursuivi initialement. Censée protéger du viol et de toutes les violences sexuelles, la loi se révèle être plus avantageuse pour de nombreux délinquants qui, à la faveur de la disposition de rétroactivité de toute nouvelle législation plus favorable à l’accusé, voient leurs peines sensiblement réduites. Situation ubuesque – si elle n’était pas aussi tragique pour les victimes elles-mêmes – quand on sait que le point de départ de cette loi a été l’exaspération de l’opinion publique en 2018 devant les peines jugées trop clémentes des cinq individus condamnés pour le viol collectif dit de La Manada (La Meute), dont l’un des membres n’a d’ailleurs pas hésité, le 21 novembre, à réclamer une réduction de presque deux années de prison (sur 15) à la faveur de la nouvelle législation…

A lire : Panique et hystérie devant “Les mythes de la guerre d’Espagne, 1936-1939”

Quant à la Proposition de loi de réforme du « délit de sédition » (article 544 du Code Pénal) en « désordres publics aggravés », elle se traduit par un allègement significatif des peines d’emprisonnement (potentiellement divisées par trois pour les leaders de la tentative de sécession de la Catalogne en septembre 2017). Les anti-Sánchez y voient une insupportable compromission avec les indépendantistes de tout poil, de la Gauche républicaine de Catalogne (Esquerra Republicana de Catalunya ou ERC), les indépendantistes catalans, à EH Bildu (Euskal Herria Bildu, « Réunir le Pays basque »), les indépendantistes de la gauche radicale abertzale basque, et un lamentable clientélisme politique de nature à remettre en cause une Constitution qui repose, depuis 1978, sur « l’indissoluble unité de la nation espagnole, patrie commune et indivisible de tous les Espagnols », reconnaissant et garantissant «  le droit à l’autonomie des nationalités et régions qui l’intègrent et la solidarité entre elles toutes » (Article 2). Il n’est pas jusqu’à Felipe González, figure mythique du Parti Socialiste espagnol dont la première victoire aux élections générales remonte à 1982, qui n’ait vivement critiqué la politique du gouvernement de Pedro Sánchez, dans une interview du 2 décembre, considérant la loi du consentement explicite « mal faite », « à rectifier immédiatement ». Il taxe Podemos et ses leaders politiques de « populistes qui donnent des réponses simplistes à des problèmes complexes », et souligne la distinction sémantique entre « sédition » et « désordre public » : le désordre public, c’est occuper une gare, la sédition, c’est se déclarer République indépendante… Reste à savoir si on peut entrer dans l’Histoire pour avoir exhumé un dictateur mort en 1975 quand on n’a pas soi-même vécu sous la censure et la dictature. S’enorgueillir à 50 ans d’un anti-franquisme militant alors que la génération politique issue du franquisme, celle de la Transition démocratique, enfants de vainqueurs et de vaincus, avait réalisé le tour de force de sortir d’un antagonisme historique en réconciliant les Espagnols et en les projetant dans un avenir commun, est la parfaite illustration de ce que l’historien espagnol Santos Juliá nomme le phénomène des « enfants discrets versus petits-enfants vindicatifs ». Peut-on réclamer un destin historique quand on affirme à la fois la nécessité de savoir d’où l’on vient (Cérémonie anniversaire des 40 ans de la première victoire du Parti Socialiste aux élections générales de 1982) tout en réformant l’Education pour ne faire commencer le programme d’histoire du Baccalauréat qu’au 19ème siècle ? Ou quand on dit revendiquer un « passé radieux » et un « héritage de lumière obscurci par la dictature franquiste » quand l’histoire de l’Espagne est tout sauf le combat manichéen de l’ombre contre la lumière ?  En somme, peut-on entrer dans l’Histoire quand on capitalise autant sur la Mémoire ?

Tout était-il mieux avant?

0
Alain Finkielkraut, philosophe, écrivain et académicien. Le 04/09/2017/ IBO/SIPA/00821087_000003

Selon Alain Finkielkraut, l’expression « Tout était mieux avant » est « frappée de ridicule » et « la nostalgie criminalisée » (Le Club Le Figaro Idées). Pourtant, le passé nous montre souvent que notre société, loin de progresser, a régressé dans un certain nombre de domaines.


Comme ma réaction immédiate me porte à approuver sans nuance ce regret du passé, je voudrais tenter de questionner le plus honnêtement possible ce « tout était mieux avant » pour faire le départ entre une conviction assurée ou un réflexe seulement conservateur.

Il me semble déjà qu’une telle nostalgie, si elle était globale, serait absurde dans la mesure où il est évident que des progrès considérables ont été accomplis dans, par exemple, les domaines scientifique et médical.

De tels progrès, d’ailleurs, qu’ils pourraient faire encourir le risque, par une volonté de recherche dévoyée, d’un transhumanisme, d’une obsession de défier les limites de notre corps et de notre finitude.

Cette évidence rappelée – le temps qui passe est un allié dans l’approfondissement de nos connaissances objectives au sens large -, je n’ai aucun scrupule à déclarer que « c’était mieux avant » dans tous les aspects de la société, l’évolution de l’art, la richesse de la culture, le courage politique – tout ce qui se rapporte à des tendances d’affaiblissement et d’appauvrissement contre lesquelles on a du mal à se battre parce que beaucoup les jugent inéluctables.

Pourtant, même face à ce constat dont la réalité nous affecte chaque jour, dans notre humanité, nos familles et notre condition de citoyens, il me paraît prudent de nous interroger afin de déterminer s’il y a bien en effet une décadence partout où je l’ai ciblée ou si notre perception négative ne résulte pas d’une approche nourrie d’hier et par hier, de notre inaptitude à concevoir que le fil du temps puisse être, même dans ces domaines aux antipodes des enseignements scientifiques et progressistes.

A lire aussi : Bilger, pas fanatique de la notion de parité…

Pour certains, la société a changé et c’est tant mieux. Ce dont nous déplorons la perte, pour eux a été remplacé par d’autres modes, d’autres formes, des transformations ouvrant des perspectives réjouissantes pour le futur. Par exemple, si la culture classique a disparu, si l’écriture et l’oralité sont dégradées, ce n’est pas grave puisque les jeunes gens ont d’autres capacités, d’autres talents et que l’ordinateur et les réseaux sociaux les auraient rendus aussi vifs, voire davantage, que tous ceux enkystés dans une ancienne manière de penser, de sentir, d’écrire et de parler. Dans un ancien monde quand le nouveau serait riche de promesses et le refrain du déclin une facilité paresseuse.

Si je ne méprise aucun de ces arguments, je ne les crois pas exacts. Et j’estime désespérée l’apologie des temps actuels par rapport à des périodes qui justifient implacablement le « c’était mieux avant ».

Prêchant pour ma chapelle, je crains que la relégation des humanités, avec le caractère universel des matières qu’elles abordaient et la culture qui leur était consubstantielle, ait favorisé une réduction de la curiosité et des appétences intellectuelles en donnant une place prédominante aux approches techniques et au pragmatisme. Ce n’est pas soutenir que ces processus ne correspondent pas à un certain type d’intelligence mais constater qu’ils relèvent de spécialités et échappent donc à une plénitude qui constituait le monde ancien comme un modèle.

Pour ma part, dès la première phrase d’un interlocuteur et bien davantage lors d’un échange nourri, il est facile, sans me tromper, de déterminer ce qui l’a formé et qui l’a instruit, si les humanités, les langues anciennes, la philosophie, l’Histoire et la littérature l’ont structuré ou seulement un terreau scientifique spécialisé ayant ses forces et ses avantages mais limité dans son ouverture au monde et son appréhension des autres.

Les humanités, c’est probablement la porte la plus efficace pour accéder à l’humanité. De même que lire Marcel Proust est sûrement l’accès le plus direct à la vie dans ses composantes les plus complexes et aussi les plus simples (contrairement à ce qu’on prétend).

A lire aussi : Luc Ferry : « La loi décline, les droits augmentent ! »

L’argumentation qui suit est délicate mais je soutiens qu’au fil du temps, des vertus essentielles, à force de n’avoir plus été assez mises en œuvre singulièrement et collectivement, ont quasiment disparu et ont conduit des institutions capitales pour notre pays à péricliter.

L’autorité qui a déserté l’État, c’est une faiblesse qui s’est prise pour la norme. La fermeté et la rigueur qui n’ont plus cours à l’école, c’est l’enfance et l’adolescence qui sont blessées et sans doute mal préparées à leur avenir. La culture, l’art, enkystés dans la personnalisation du créateur, c’est l’universel qui est saccagé et le consensus fondamental et exemplaire suscité par les grandes œuvres classiques qui est mis en pièces. La vulgarité, le mépris, la faillite de l’écoute qui pullulent en politique, dans les médias et sur les réseaux sociaux, c’est la superbe intercession de la communication – entre soi et les autres, entre les citoyens, entre ceux qui dirigent et ceux qui sont gouvernés, entre la parole publique et les multiples et parfois contradictoires attentes du peuple – qui est gravement endommagée.

Oui, si tout n’était pas mieux avant, il n’est pas faux de déplorer l’effacement d’un certain nombre d’indiscutables supériorités d’hier par rapport à aujourd’hui.

À une double condition.

Que nous ne soyons pas amers dans notre ton mais persuadés qu’il suffirait d’une authentique audace politique approuvée par la majorité des citoyens (ils n’espèrent que cela !) pour qu’une part exemplaire du passé revienne dans notre présent et soit restaurée. Pour notre plus grand bien.

Le Mur des cons

Price: 18,90 €

48 used & new available from 2,57 €

Un avocat général s'est échappé

Price: 13,50 €

22 used & new available from 2,07 €

Libres propos d'un inclassable

Price: 12,50 €

9 used & new available from 4,96 €

Coupe du Monde : Pourquoi fête-t-on chez certains médias de gauche la victoire du Maroc ?

0
Les supporters marocains fêtent la victoire du Maroc face à l’Espagne à Strasbourg. Philemon Henry / SIPA // 01096429_000006

Au terme d’un match riche en rebondissements, le Maroc s’est qualifié pour la suite de la compétition. Une performance sur-plébiscitée par les médias de gauche, immigrationnistes et wokistes. Décryptage.


Mardi 6 décembre 2022, stade Education City à Doha, 20h46. Achraf Hakimi, attaquant phare de la sélection nationale du Maroc, envoie son pays en quart de finale au bout du suspense. Une qualification historique. Après un lourd silence, l’explosion de joie. La bataille royale entre le royaume chérifien et la couronne espagnole prend fin dans une grande cacophonie. Dans le stade, les supporters marocains sont venus nombreux, et donnent de la voix dans une ambiance digne des grands soirs. Partout en France, les Marocains montrent leur euphorie. Il suffit juste de tendre l’oreille. À Paris, les Champs-Élysées sont envahis par des milliers de supporters enjaillés, exhibant le drapeau rouge étoilé dans un tintamarre de klaxons.

Dans les villes de Nice, Lille et Fréjus, mais aussi aux Pays-Bas, des policiers ont été pris pour cible par les supporteurs du Maroc. Ces violences s’inscrivent dans le prolongement des violences à Bruxelles, en marge de la victoire marocaine contre la Belgique le 27 novembre. Une stratégie désormais connue : feux de poubelle, caillassages et affrontements.

Mais ils ne sont pas les seuls à avoir célébré cette historique victoire. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, la jeune rédaction de Brut France, média ouvertement wokiste, s’exalte en direct devant la qualification des « Lions de l’Atlas ». Dans les locaux même du média français, entre drapeaux turc, sénégalais et marocain suspendus sur les armoires, tous, soulagés, se soulèvent, sautent, dans une grande hilarité. Une autre vidéo affiche Rémy Buisine, journaliste vidéo pour Brut, invitant ses troupes : « On va tous sur les champs », est-il écrit alors que les locaux se vident. S’ensuit un petit reportage, de ce dernier, décrivant une ambiance bon enfant, sur les Champs-Élysées. Konbini s’y colle aussi : « Cette panenka [un tir de penalty en pichenette, ici le but de la victoire marocaine, NDLR], c’est le cadeau de Noël qu’on voulait tous », écrit pompeusement cet autre média français de gauche.

Mais pourquoi la rédaction Brut France s’affiche-t-elle en train de célébrer cette victoire du Maroc, aussi historique soit-elle ? Pourquoi ne pas avoir montré ce même enthousiasme pour les victoires toutes aussi historiques du Japon face à l’Espagne et l’Allemagne lors des matchs de groupe ou la qualification de la France en quarts de finale ? Dans le dossier de Causeur du mois de décembre, Philippe d’Iribarne éclaire sur ce penchant du « camp du bien », immigrationniste et wokiste, à mettre en évidence un soutien poussé pour les pays maghrébins. « Pour les tenants de ce courant, l’immigration est d’autant plus bienvenue qu’elle sème plus la perturbation dans la France ‘’franchouillarde‘’ », analyse-t-il. Tout ne peut être que mépris pour la culture française, qui se contente d’être une composante comme les autres de la société multiculturelle. Chez ces médias immigrationnistes, il faut porter le Maroc pour mieux rabaisser la France.

Le sens de l’art

0
D.R.

New York City 1 est un collage sur toile de bandes jaunes, rouges et bleues formant un quadrillage. Depuis soixante-dix-sept ans, la toile est exposée… à l’envers.

Les amateurs se pressent au Kunstsammlung de Düsseldorf, en Allemagne, pour admirer une rare rétrospective de Piet Mondrian. Parmi les œuvres exposées, New York City 1, un collage sur toile de bandes jaunes, rouges et bleues qui, en se croisant, composent les célèbres quadrillages de l’artiste néerlandais. Seul problème, cette composition de 1941 est… accrochée à l’envers… depuis soixante-dix-sept ans. C’est la commissaire de l’exposition qui s’en est rendu compte : « Sur une photo de 1944, j’ai vu que la toile était dans l’autre sens sur un chevalet. Ça m’a intriguée », a-t-elle déclaré au quotidien Süddeutsche Zeitung. Susanne Meyer-Büser effectue quelques recherches et remarque qu’un an plus tard, la toile, exposée au MOMA de New York, est à l’envers. Selon elle, « l’erreur pourrait provenir du fait que la peinture n’avait pas de signature. Son sens a été déterminé par le nom de l’artiste inscrit au dos du cadre par l’administrateur de la succession », Mondrian étant mort en 1944.

Maintenant qu’on le sait, pourquoi ne pas l’accrocher à l’endroit ? La réponse de Suzanne laisse pantois : « Les rubans adhésifs sont déjà très lâches et ne tiennent qu’à un fil. Si on devait la retourner maintenant, la gravité la tirerait dans une autre direction. Et cette erreur fait désormais partie de l’histoire de l’œuvre. » Si ça fait partie de l’histoire, on peut suggérer aux défenseurs de la planète de se coller, non les mains au cadre, mais les pieds au plafond du musée. Ils ont jusqu’au 12 février pour le faire.

A lire aussi : Attention: art dégénéré !

Commerce extérieur : le grand effondrement

1

En dépit des boniments du gouvernement, le commerce extérieur, surtout dans le domaine industriel, est aujourd’hui en piteux état. L’histoire que racontent les chiffres officiels est celle d’un déclin inexorable. Tribune de Jean Messiha et Frédéric Amoudru.


La France s’achemine inexorablement vers le pire déficit commercial de son histoire. De 63.3 milliards d’euros[1] en 2018, première année pleine du quinquennat d’Emmanuel Macron, à une estimation de 150 milliards à la fin 2022, la 5ème année pleine de son règne, les compteurs ont explosé et la France s’est mécaniquement appauvrie.

Pour expliquer ces chiffres calamiteux, la macronie a une excuse toute trouvée : la flambée des cours des hydrocarbures et des matières premières. Il est vrai que ces hausses spectaculaires des cours pèsent lourd dans la balance, même si une partie de l’aggravation de notre déficit énergétique est due à la débâcle de notre industrie nucléaire traditionnellement exportatrice d’électricité. Après cinq ans au pouvoir, Emmanuel Macron ne peut pas dire que « cela vient de loin », comme il l’avait fait valoir lors de l’explosion de colère des Gilets jaunes.

S’il paraît difficile de lui reprocher la guerre en Ukraine, véritable catalyseur d’une montée spectaculaire du prix des hydrocarbures, il nous faut aborder une autre composante de ce déficit qui est celui des biens manufacturés. Déficit d’autant plus impressionnant qu’il reflète la santé de notre industrie. Et à en croire les chiffres, elle n’est pas bonne. Prenons les données qui font référence en la matière, à savoir celles fournies par la Direction Générale des Douanes.

En 2018, le déficit du poste produits manufacturés était de 36,7 milliards d’euros, ce qui indiquait déjà le degré de désindustrialisation atteint par la France. Le chiffre reste à peu près stable en 2019, puis plonge en 2020, à cause du COVID, à 57,5 milliards d’euros. Mais en 2021, tandis que les usines avaient repris leurs activités, nous tombions à 65,7 milliards et en 2022, alors qu’aucune excuse COVID n’est invocable, nous nous acheminons vers le chiffre de 78 milliards d’euros pour 2022 ![2]

On a beau nous expliquer que la France se « réindustrialise » grâce à la politique du président et de son très « techno » ministre de l’économie Bruno Le Maire, les chiffres sont têtus. Qui peut, en effet, croire à cette soi-disant désindustrialisation quand nos échanges industriels (hors énergie) se dégradent à ce point ?

A lire aussi: Métiers en tension : pourquoi l’immigration ?

Quand un pays se réindustrialise vraiment, soit les usines locales satisfont davantage la demande locale et les importations diminuent – c’est ce que l’on appelle « l’import-substitution » – ou bien lesdites usines se spécialisent et exportent fortement comme les industries suisses, allemandes ou du Nord de l’Italie. Dans l’un ou l’autre cas, le déficit de la balance commerciale des produits manufacturés s‘améliore voire devient excédentaire.

En France, cette balance, nous l’aggravons. Et pendant ce temps, l’exécutif et les médias qui lui sont inféodés, comme BFM Business, Les Échos, etc., proclament que les usines poussent comme des champignons dans notre beau pays et qu’enfin nous réindustrialisons ! Toutefois le sujet est suffisamment sérieux pour que l’on creuse le champ des explications.

A cet effet, nous avons analysé les chiffres des 16 secteurs que détaillent les Douanes depuis 2018 à 2022 en annualisant les chiffres des 3 premiers trimestres sur 9 mois.

Prenons d’abord les quelques domaines où nous sommes excédentaires :

  • Nos industries agro-alimentaires poursuivent leur bonhomme de chemin et affichent un excédent stable à environ 6-6,5 milliards d’euros.
  • Les parfums et cosmétiques marchent plutôt bien puisque nous passons de 11,3 milliards d’euros d’excédents à 15 milliards, reflétant le succès à l’export de nos produits de luxe.
  • La pharmacie évolue négativement sur 5 ans avec un excédent qui montait en régime de 4,3 milliards d’euros en 2018 jusqu’à 6 milliards d’euros en 2019. Il baisse ensuite à 2,4 milliards d’euros en 2022 avec la crise COVID et les importations massives qui en ont découlé, l’industrie française étant incapable de suivre.
  • Gros poste : l’aéronautique et le spatial. Essentiellement, Airbus. Voilà l’entreprise qui en quelque sorte fait la pluie et le beau temps de l’industrie nationale et de ses exportations. 27 milliards d’euros d’excédent en 2018, encore mieux en 2019, puis le trou d’air du COVID. Depuis, nous assistons à une lente reprise qui nous laisse à environ 22 milliards d’euros en 2022.Les navires, et en particulier les paquebots de croisière fabriqués aux chantiers de l’Atlantique, sont une fierté nationale. On les exporte pratiquement tous, puisque nous n’avons pratiquement plus de croisiériste français. Excédent variable selon les années et les livraisons, de 1 à 2 milliards d’euros annuels, sauf en 2020 et 2021 avec l’impact du COVID sur les travaux et donc les livraisons. Mais gros rebond en 2022 (+2,7 milliards) où on livre beaucoup. Ce fleuron est malheureusement menacé par la hausse des coûts de l’énergie et le fait que les croisiéristes ont déjà acheté de nombreux navires.

Venons-en maintenant à la litanie des secteurs où nous sommes perdants :

  • Déficitaire depuis des lustres en raison d’une délocalisation ancienne le « textile, habillement et cuir », en négatif de 13 milliards d’euros en 2018, a baissé à près de 11 milliards d’euros en annualisé 2022. Un léger mieux lié au fait que les Français ont un peu réduit leur consommation de fringues comme en témoigne les faillites en série des magasins d’habillement.     
  • Le secteur « bois, papier, carton », pour sa part, voit, lui, son déficit se creuser, passant de 4,8 milliards d’euros à 7,6 milliards, reflétant la poursuite des fermetures des entreprises du secteur en France et dont la faillite de la société Arjo Wiggins fut un symbole.
  • La chimie, positive de près de 1,5 milliards d’euros est passée, 5 ans plus tard, à près de 3 milliards de déficit.
  • Dans les plastiques et caoutchouc, les choses vont de mal en pis puisque l’on passe de -7,2 milliards à -10.2 milliards d’euros. Les importations de plus en plus importantes de pneus bon marché de Chine et d’ailleurs constitue une partie de l’explication.   
  • La métallurgie fait un four, sans mauvais jeu de mots, avec un déficit qui explose de 8,9 milliards à 16,8 milliards d’euros. En cause la hausse des cours de l’acier et des métaux non-ferreux que nous fabriquons de moins en moins.
  • Personne ne s’étonnera que les matériels informatiques constituent un gouffre qui se creuse. Nous en consommons de plus en plus et n’en produisons aucun, d’où un déficit qui passe de 16,5 milliards à plus de 21,6 milliards d’euros en 2022. Les équipements électriques et ménagers, très emblématiques de notre désindustrialisation avec les célèbres faillites de Brandt, Moulinex et plus récemment la fermeture de Whirlpool, entre autres, ne déçoit pas. Le déficit augmente de 7,4 milliards à plus de 10,5 milliards d’euros.

Venons-en au secteur très stratégique des machines dans lequel on retrouve machines-outils, robots industriels mais également les machines agricoles.  Une bérézina qui voit notre déficit plus que doubler de moins de 5 milliards à plus de 11 milliards d’euros.  « C’est une bonne nouvelle », nous dit-on, car cela veut dire que la France modernise son appareil de production. Nous verrons !

Passons au plus scandaleux des scandales industriels français : les véhicules et équipements auto. Les bagnoles et les pièces détachées pour faire simple. Nous avions près de 10 milliards d’euros de déficit en 2018. Il passe à 18,3 milliards en annualisé 2022. Pourtant, nous voyons plein de voitures françaises sur nos routes. Késaco ? C’est simple. Ces soi-disant voitures françaises n’ont de française que la marque. Pire, les bonus écologiques que distribue allégrement notre gouvernement incompétent au nom de la transition climatique profite majoritairement aux petites et moyennes cylindrées qui sont massivement importées. En effet, à part le japonais Toyota et sa Yaris de Valencienne, nos PSA et Renault fabriquent leur modèle d’entrée de gamme ailleurs puis importent en France. Nous subventionnons ainsi les usines slovènes, slovaques, tchèques, espagnoles, turques ou encore marocaines. Nos « progressistes » au pouvoir ont du talent…

A lire aussi: Immigration : un mariage forcé à l’issue fatale

Dans la catégorie autre matériels de transport, qui inclut en particulier les deux roues que nous ne fabriquons plus, nous avons, sans surprise, un déficit de 2 à 3 milliards d’euros chaque année.

Enfin, nous avons le poste autres produits manufacturés, un fourre-tout qui inclut tout ce qui ne rentre pas dans les catégories précédentes. Il pèse plutôt lourd, puisqu’il accuse une perte qui passe de moins de 10,7 milliards d’euros en 2018 à plus de 14 milliards d’euros en 2022.

Ce tableau négatif s’accompagne pourtant d’une floraison d’initiatives :

  • Création des Pôles de compétitivité en 2004 ;
  • Plan d’Investissements d’Avenir en 2010 ;
  • Création du CICE en 2014 ;
  • Relance du Conseil National de l’Industrie en 2017 ;
  • Baisse progressive de l’impôt sur les sociétés à 25% ;
  • Baisse des impôts de production des entreprises de 10 Mds par an (sur un total d’environ 85 Mds)
  • Plan « France Relance » en 2020 qui contient :

– des stratégies d’accélération pour l’innovation dans le cadre du quatrième programme d’investissements d’avenir (PIA4) ;

-des appels à projet pour soutenir les secteurs stratégiques de l’industrie ;

-un soutien à la Transformation numérique des TPE-PME ;

-un plan pour la décarbonation de l’industrie.

  • Suppression définitive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur 2023-2024 soit 9.3 Mds d’euros en deux ans.

Rien n’y fait.

Le très sérieux portail de recherche économique allemand, STATISTA, nous livre le chiffre de la part de l’industrie manufacturière dans le PIB français. Là encore, il nous montre un lent déclin : 10,14% en 2017, puis 9,97% en 2018, 10,01% en 2019, 9,39% en 2020 et enfin 9,18% en 2021.

Il en résulte que tout ce que la propagande gouvernementale répand sur la réindustrialisation en cours c’est du… flan(by) ! Il serait toutefois prétentieux de conclure cette tribune en affirmant que les solutions sont simples. Mais il y a clairement une problématique que ni la droite sarkozienne, ni la gauche hollandienne ni le centre macronien ne sont arrivés à résoudre.

Il y a, en réalité, deux stratégies possibles :

  1. Une forte intervention gouvernementale pour structurer des filières industrielles. Mais le volontarisme ne peut suffire. Il doit s’accompagner de subventions publiques massives ciblées qui se heurteront aux règles européennes ;
  2. Poursuivre, mais de façon beaucoup plus ambitieuse, la baisse des prélèvements obligatoires qui pèsent sur nos industries. Là encore, l’UE ne nous permettra pas de cibler des secteurs en particulier.

C’est pourquoi la baisse des impôts de production timidement entamée par le gouvernement, fait sens, dans la mesure où elle bénéficie structurellement davantage aux usines. Il faut toutefois aller plus loin, car l’écart avec l’Allemagne reste élevé, et mieux cibler géographiquement cette baisse, ce qui est permis, de façon à ce qu’elle se concentre sur les zones où l’industrie est présente ou susceptible de se développer. Cette stratégie est plus efficiente que celle consistant en un arrosage large qui bénéficie au secteur des services dans les métropoles, secteur qui n’en a nul besoin.

Le grand défi reste celui de la conditionnalité. Comment faire en sorte que ces baisses d’impôts se traduisent bien par un surcroît de production plutôt qu’à une hausse des bénéfices et des dividendes ?

Nous reparlerons de la stratégie de réindustrialisation dans une prochaine tribune…


[1] Chiffres incluant les matériels militaires  

[2] En annualisant les chiffres des 3 premiers trimestres, ce que nous ferons pour tous les chiffres qui suivent !

Pour les mélenchonistes, il faut « dénazifier » la France

0
Hadrien Clouet, le 22/11/22 / PHOTO: Juliette Avot/SIPA / 01095360_000030

Hadrien Clouet, député LFI, demande dans une question écrite à la ministre de la Culture de changer les rues ayant des noms de «nazis » ou «collabos».


Dénazifier l’Ukraine ? Poutine en a rêvé ! Dénazifier la France ? Mélenchon et les siens vont le faire.

C’est Hadrien Clouet, un obscur député Insoumis, qui a sonné l’alarme. Dans une question écrite à la ministre de la Culture, il lui demande « d’agir contre les nazis et les collabos ». Il alerte sur le fait que plusieurs d’entre eux ont leur nom sur des plaques de rues.

Ce député ignore manifestement que les noms des rues sont du ressort des municipalités plutôt que des ministères. Mais on ne va pas demander à un parlementaire mélenchoniste de connaitre la loi…

Voyons en détail les raisons de l’indignation d’Hadrien Clouet. Il pointe du doigt le fait que de nombreuses rues, places et artères portent les noms d’Alexis Carrel et de Paul Morand. Carrel, dit-il, voulait exterminer par le gaz « les populations inférieures ». Quant à Paul Morand, toujours selon Hadrien Clouet, « c’était un antisémite acharné ».

A lire aussi: Ne pas tomber dans le « Panot »

Renseignements pris, nous sommes en mesure de vous révéler que le docteur Carrel était un éminent savant récompensé par un prix Nobel de médecine. Il était eugéniste. C’était la mode à l’époque. Carrel prônait l’euthanasie non pas pour les « populations inférieures » mais pour les handicapés. Ces préconisations ne furent pas, heureusement, suivies d’effets. D’ailleurs, depuis les années 90, des rues et des institutions portant son nom sont régulièrement débaptisées. La demande d’Hadrien Clouet n’a rien de très nouveau.

Quant à Paul Morand, c’était un brillantissime écrivain. Il fut ambassadeur de Vichy à Bucarest. Ce qui en dit long sur ses convictions. Mais depuis, il est publié et republié. Faudrait-il brûler ses livres parce qu’il était antisémite ?

A part ça, nous ne pouvons cacher notre étonnement de voir les Insoumis se préoccuper des Juifs. Les aurait-on changés ? Leurs amis islamistes ne vont pas apprécier !

Hadrien Clouet, sur sa lancée se fait poignant. « Que deviennent, s’exclame-t-il, les enfants qui grandissent rue du docteur Carrel? » Et il souligne les tourments indicibles du facteur obligé d’arpenter chaque jour la rue Paul Morand.

Voilà bien un souci qui l’honore. Nous nous permettons de relever qu’il y a en France de multiples rues qui portent les noms de Lénine, de Trotsky, et d’Aragon (qui écrivit un poème à la gloire du Guépéou, la cruelle police stalinienne). Il nous semble qu’ils ont beaucoup plus de morts sur la conscience.

Capitaine abandonné

0
Hugo Lloris, le 21/11/22 / PHOTO: José Mendez/EFE/SIPA / 01094824_000006

Pas de brassard LGBT lors de la Coupe du monde au Qatar, la FFF et Hugo Lloris respectent les règles du Qatar et ce n’est pas au goût des médias bien-pensants.


Alors que la Coupe du Monde se déroule au Qatar, pays où l’homosexualité est illégale, un brassard arc-en-ciel a été conçu en soutien aux personnes LGBT. Lundi 14 novembre, à la veille du départ des Bleus pour Doha, Hugo Lloris, le capitaine de l’équipe, est interrogé lors d’une conférence de presse au sujet du port de ce brassard. En effet, n’ayant pas reçu l’aval de la FIFA, Noël Le Graët, le président de la FFF, s’était également exprimé à ce sujet dans l’Équipe : « On va en discuter. Mais j’aime autant qu’il [Hugo Lloris] ne le fasse pas. On va jouer dans un pays que l’on doit respecter ». Face au journaliste, qui lui demandait si ce n’est pas « une bonne idée de porter ce brassard pour faire avancer les choses », le gardien a été droit au but : « Sur le sujet, bien sûr, j’ai mon opinion personnelle. Et ça rejoint celle du président Le Graët. Lorsqu’on est en France, lorsqu’on accueille des étrangers, on a souvent envie qu’ils se prêtent à nos règles, qu’ils respectent notre culture, et j’en ferai de même quand j’irai au Qatar. Après, je peux être d’accord ou non avec leurs idées, mais je dois montrer du respect par rapport à ça ». Il n’en fallait pas plus pour déclencher une polémique. Pour réagir à cette dernière, Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des Sports, s’est rendue dans l’émission C à vous, sur France 5, le 18 novembre. L’animatrice, Anne-Élisabeth Lemoine, représentative de la bien-pensance de l’audiovisuel public, a posé une question qui révèle son opinion sur le sujet : « Comment peut-on dire qu’on va respecter la culture d’un pays où l’homosexualité est illégale ? ». Il y a actuellement 69 états qui interdisent l’homosexualité, autant de pays dont la culture n’est pas respectable ? Le Maroc, l’Algérie, Singapour, la Malaisie, la Tanzanie, le Kenya, le Pakistan, la Mauritanie, seront ravis d’apprendre que leur culture n’est pas respectable. Hugo Lloris arbore néanmoins le brassard le plus important… celui de capitaine de l’équipe de France.

A lire aussi: « A l’insu de leur plein gré » : les footballeurs contre la FIFA

Au service de « Ta Majesté »

0
Tony Curtis et Roger Moore, principaux acteurs du feuilleton "Amicalement Vôtre"./UNIVERSAL PHOTO/SIPA/ 00517368_000004

Le meilleur remède contre le wokisme ambiant s’appelle Amicalement vôtre.


Ils n’ont pas réussi à l’interdire. C’est une question d’années, voire de mois. Croyez-moi, ces gens-là combattront le moindre espace de liberté. Ils nettoieront à sec la moindre rigole d’insouciance badine. Ils veulent tuer « nos plus belles années » à coups de sit-ins sauvages et d’outrances verbales. Ils voient des machistes suprémacistes un peu partout, d’affreux virilistes à la piscine du « Palm Beach », des prédateurs carbonés sur l’autoroute des vacances et des viandards au « room service ». Ils ne supportent pas cette décontraction azuréenne assumée, cette déconne débonnaire et ce cortège de dépenses forcément somptuaires qui furent longtemps la marque des civilisations les plus avancées. La farce les dépasse, la fesse les oppresse, l’humour les agresse. Ils voudront bientôt nous faire ravaler jusqu’à nos menus plaisirs télévisuels. Ils traqueront et judiciariseront nos programmes préférés comme ils épurent déjà nos bibliothèques.

Vous pensez, deux grands dadais aux répliques boulevardières portant chemises à jabot et fréquentant les bars des palaces, draguant ouvertement et ne prenant rien au sérieux, sont considérés aujourd’hui comme de dangereux idéologues. Des activistes d’un art de vivre décadent à bannir ! Á jeter dans les fosses de l’Histoire ! Comment les jeunes générations pourraient-elles se reconnaître dans des hommes aussi puérils et superficiels ? Á trop les fréquenter, elles pourraient même avoir envie de leur ressembler. Ces faux vertueux n’aiment ni les playboys d’opérette, ni les voitures de sport, encore moins la prolifération du bikini sur les plages de France. Ils ont peur des cocktails alcoolisés, des peaux qui se collent au contact du sable chaud, des blagues sous la ceinture et de ce dilettantisme souverain que l’on devrait enseigner dans les écoles de la haute fonction publique. Nos comptes seraient mieux gérés et nos dirigeants auraient meilleure allure. Ces puritains-là sont plus sérieux que nos anciens calotins. La honte doit désormais changer de camp. Comment y parvenir ? Comment refluer ce mouvement qui ne comprend rien au second degré et à la beauté du vagabondage amoureux. Une solution existe : revoir les vingt-quatre épisodes de la série Amicalement vôtre. Revenir à la source du mâle. Entrons chèr-e-s ami-e-s en résistance et prenons ces vingt-quatre feuilletons comme un traité de philosophie à l’usage des mauvais coucheurs. Un remède contre les temps sombres qui s’annoncent. Un bras d’honneur à tous les rigoristes verbeux qui encombrent les écrans. Je ne connais pas vadémécum plus limpide et inspirant que Danny Wilde (Tony Curtis) et Lord Brett Sinclair (Roger Moore) se chamaillant sur la composition du « Créole crème ». Faut-il y adjoindre une ou deux olives ? Mystère. Les mixologues n’ont pas tranché la question.

A lire aussi : Marielle, Broca, Belmondo: le beau recueil nostalgique de Thomas Morales

Avec ces deux-là, le cabotinage entre Cannes et Brighton était la règle, la distance avec la réalité prenait une forme d’élévation spirituelle. Ils furent essentiels à notre éducation. Je dois admettre qu’ils surclassaient mes professeurs d’alors dans de nombreux domaines, notamment le choix des vins, le port de la chemise en soie sauvage ou l’emphase comique. Le fait qu’ils roulent en Dino 246 GT et Aston Martin DBS les rendaient encore plus crédibles à mes yeux. Chacun, ses faiblesses. Leur humanisme dénué de toute prétention nous a permis d’aborder les années 1980 avec des valeurs fortes et le sens des priorités. Grâce à leur travail de sape, nous avons été insensibles aux discours victimaires, aux injonctions alimentaires et aux crises identitaires.  Le générique orchestré par John Barry devrait suffire à calmer toutes les polémiques et à convaincre les plus réticents d’entre vous. Sa puissance évocatrice est un bain de jouvence dont l’onde nostalgique n’a pas fini de nous bercer. Au début des années 1970, juste avant les crises pétrolières et la chasse au gaspi, on savait vivre et on savait surtout rire. L’humour était un bien largement partagé dans toutes les couches de la société. On ne partait pas en guerre au premier string ficelle aperçu et on ne s’offusquait pas d’une accélération vigoureuse mais néanmoins mélodieuse sur une route de l’arrière-pays niçois. Les téléspectateurs s’amusaient des joutes oratoires (upgradées par les deux génies du doublage qu’étaient Michel Roux et Claude Bertrand) et des codes esthétiques en vigueur. Le laid n’avait pas sa place dans cette série. Toutes les situations prêtaient à la dérision. Dès le premier épisode, le juge Fulton avait reproché à Brett Sinclair de parler neuf langues qui ne lui servaient seulement qu’à commander à boire au restaurant. Et quand Danny descendit de l’avion, il lança, s’adressant aux jolies hôtesses de l’air, cette formule mémorable : « N’abusez pas trop de votre physique ! ». On ne criait pas à la phallocratie triomphante mais à la répartie brillante. Question d’époque ! 

Amicalement vôtre - L'Intégrale de la série

Price: 79,90 €

13 used & new available from 35,99 €

Amicalement vôtre-L’intégrale [Édition Ultime]: DVD et Blu-ray : Amazon.fr

Un nouveau rôle pour l’Éducation nationale

0
Pap Ndiaye, le 01/12/22 / PHOTO: Jacques Witt/SIPA / 01095928_000011

Lors d’une interview, Pap Ndiaye révèle son souhait pour l’Éducation nationale : combattre certaines idées. En somme, apprendre aux enfants à « bien penser » plutôt qu’à apprendre les fondamentaux scolaires.


La longue interview sur Radio J du ministre de l’Education nationale mériterait d’être commentée dans son ensemble, tant il s’est montré droit dans ses bottes idéologiques, en réponse à des questions généralement d’une grande complaisance de Frédéric Haziza, qui semblait avoir décidé de lui servir la soupe.

Une seule phrase toutefois suffira pour mesurer les intentions de Pap Ndiaye, quant à sa conception de son rôle de ministre. La voici, à propos d’Eric Zemmour : « Il est clair que ce type de personnage dans la vie politique est un poison lent contre lequel il faut mettre les français en garde, et nous avons, nous, du côté de l’Éducation Nationale, notre rôle à jouer ».

Tout est dit, l’Éducation nationale a un nouveau rôle à jouer, il faut le savoir et le souligner. On savait déjà que ce ministre avait donné quatre axes à son action, dans l’ordre : lutte contre les inégalités, savoirs fondamentaux, bien-être de l’élève, question écologique. Dans un autre monde, dans une vie un peu rêvée, on pourrait imaginer que l’acquisition des savoirs fondamentaux soit l’unique et essentielle mission de l’Education nationale, sachant qu’elle a déjà bien du mal à la remplir. Mais non, ce n’est plus qu’une mission parmi d’autres, et même pas la plus importante.

A lire aussi: Ne pas tomber dans le « Panot »

Mais maintenant il faut envisager, apparemment, une cinquième mission : l’Éducation Nationale doit éduquer nos enfants à bien penser. Il faut leur enseigner où se situe le bon, le bien, le vrai. Il faut désigner les méchants et les mal pensants, leur expliquer qu’il y a des choses qui ne se disent pas, et même qui ne se pensent pas, et qu’il existe à droite une frontière au-delà de laquelle commence l’empire du mal.

Remarque : le ministre en question avait déjà dit au début de sa prise de fonction que son combat de toujours consistait et consisterait encore là à se battre contre le « Front National » qu’il appelle ainsi malgré le changement de nom. C’est dire si on ne l’a pas nommé au bon poste ! Il serait éventuellement bon de rappeler ses premiers propos pour démontrer l’obsession du monsieur à l’égard de ce que l’on appelle « l’extrême droite ».

Sortez découverts !

0
Un homme portant une kippa lors d’une manifestation contre l’antisémitisme à Cologne, le 25 avril 2018 Henning Kaiser/AP/SIPA AP22194220_000008

Le port de la kippa en public n’est pas si différent de celui du voile : ils sont tous les deux contraires à l’esprit de la laïcité à la française.


L’autre matin, l’excellent et avenant Cyrille Cohen, directeur du laboratoire d’immunothérapie de l’université Bar-Ilan de Tel-Aviv, était invité à CNews, sur le plateau de Pascal Praud. Ses critiques plus ou moins feutrées de certaines mesures anti-Covid ont sans doute passionné les téléspectateurs et les autres participants – dont la plupart ont été, comme votre servante, enchantés que leurs agacements reçoivent une onction scientifique. Cependant, comme l’a signalé Praud, qui reçoit des messages pendant l’émission, ce qui a fait réagir le public autant que ses explications scientifiques, c’est la kippa qu’il avait sur la tête. Rappelons que ce couvre-chef de forme circulaire est porté par les juifs (les hommes) à la synagogue, mais que les plus pratiquants le conservent en permanence.

Je l’avoue, dès mon arrivée, cette kippa m’a contrariée. Lorsque le sujet s’est invité dans le débat, j’ai fait remarquer au professeur qu’en France, on n’affichait pas ses convictions et pratiques religieuses. Question de savoir-vivre. Certes, la loi n’interdit pas le port de la kippa ou du voile islamique dans l’espace public. Mais quelle que soit la règle, l’esprit de la laïcité commande une certaine discrétion. « Je m’appelle Cohen, tout le monde sait que je suis juif », m’a rétorqué l’intéressé. Oui, et moi je m’appelle Lévy. Un nom, aussi caractéristique soit-il, ne dit strictement rien de la pratique, a fortiori pour un juif dont la définition relève de la filiation – selon la loi hébraïque, est juif quiconque est né d’une mère juive (même ashkénaze[1] !). On peut donc être juif et totalement athée ou mécréant. Au demeurant, personne ne demande à Cyrille Cohen de se cacher. Et il est vrai qu’il est israélien. Mais il se trouvait en France (pays dont il possède probablement la nationalité). Qu’il respecte le shabbat et mange cacher, c’est une affaire strictement privée. Pour autant, cet appel à la retenue ne vaudrait pas pour un imam, un rabbin ou le pape, en tout cas s’ils étaient invités es qualité.

Plus encore qu’une loi, qui ne peut être modifiée que par le vote du Parlement, une règle tacite est sujette à évolution, en fonction des débats qui traversent la société. Il est probable que cette kippa n’aurait pas choqué il y a trente ans, avant que le voile islamique devienne un sujet récurrent de la dispute française, notamment grâce à certaines sœurs Lévy[2]… Certains internautes n’ont pas manqué de faire le rapprochement. « Là on est au comble du fou rire sur #hdpros eux qui râlent à longueur de journée sur les voiles ou les djellabas, hop dès le lundi matin professeur Cyrille Cohen et sa kippa sur la tête sur le plateau », tweete un courageux anonyme qui s’est baptisé « Le Comédien ». Eh bien, en dépit d’une légère aigreur, ce comédien-là n’a pas tort. Dénoncer le voile et accepter la kippa témoigne au minimum d’une incohérence et, aux yeux de pas mal de gens, d’un déplorable deux poids, deux mesures. C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’il y a quelques années, Marine Le Pen avait demandé aux juifs français de renoncer à la kippa dans la rue. Beaucoup l’ont fait, malheureusement pour des raisons de sécurité.

A lire aussi : Elisabeth Lévy: faut-il se voiler pour compatir avec les musulmans?

On me dira que ce n’est pas pareil. En effet, la kippa n’est pas un signe d’infériorité des femmes (ni des hommes). Elle n’est pas l’étendard de nos ennemis, elle n’est pas suspecte de manifester des sentiments antifrançais. On n’a pas vu d’hommes à kippa se réjouir des massacres de Charlie Hebdo ou du Bataclan. Mais en France, beaucoup de jeunes filles musulmanes portent le voile sans avoir la moindre sympathie pour les terroristes ni la moindre détestation pour leur pays. Qu’elles soient instrumentalisées au service d’une cause qui les dépasse, c’est ma conviction, mais cela relève du débat.

Inutile de se raconter des histoires. Il y a une forme de séparatisme juif. Certes, il est pacifique et apolitique. Autrement dit, ce ne sont pas les juifs qui mettent aujourd’hui au défi la cohésion de la société française. N’empêche : ce qui pouvait passer il y a quelques décennies pour un innocent particularisme paraît aujourd’hui problématique à nombre de nos concitoyens. Qu’il y ait parmi eux des gens qui ont un problème avec les juifs ne doit pas nous empêcher d’entendre les autres, ceux qui pensent légitimement qu’une règle n’a de sens que si elle vaut pour tous.

J’ai également été frappée par le silence de mes camarades de plateau – fait suffisamment rare pour être significatif. Peut-être auraient-ils été plus directs avec une femme voilée. Leur retenue témoigne d’une certaine délicatesse qui a partie liée avec l’histoire. Si j’ai été la seule à prendre la parole, c’est sans doute parce que mon patronyme et mon appartenance m’immunisent contre le soupçon d’antisémitisme. Quoi qu’en pensent beaucoup de nos compatriotes musulmans, l’antisémitisme traduit la haine des juifs alors que ce qu’ils appellent islamophobie est la critique de certaines expressions de l’islam. Sauf que ces distinctions subtiles ne peuvent guère avoir cours dans un débat télévisé. Alors, que mes amis de CNews et le professeur Cohen souffrent que je les interpelle gentiment. Nous ne sommes pas menacés par le retour du nazisme. Les juifs ne sont pas des petites choses fragiles et susceptibles incapables de tolérer la moindre remarque. Interdire toute critique ou blague à leur encontre serait, finalement, une forme paradoxale (et inconsciente) d’antisémitisme.


[1]. Je n’ignore pas qu’on s’empaille depuis des lustres sur cette définition, que des gens dont seul le père est juif se définissent comme juifs et que d’autres, de mère juive, ne revendiquent aucune appartenance. Mais ce n’est pas le lieu d’un débat talmudique…

[2] En 2003, Alma et Lila Lévy, filles d’un avocat juif athée et d’une mère kabyle de culture musulmane ont été exclues du lycée d’Aubervilliers pour refus d’ôter leur hidjab.

Espagne : Pedro Sánchez, un président candidat à la postérité

0
Le président espagnol, Pedro Sánchez, à l'occasion du G20. Novembre 2022. /Dita Alangkara/AP/SIPA/AP22740628_000196

L’actuel gouvernement socialiste, à la différence de tous ses prédécesseurs, cherche à se donner une forme de légitimité durable en rouvrant les blessures de la Guerre civile et de l’ère franquiste. Ce faisant, il risque la désintégration de l’Espagne.


Venu rendre hommage à la romancière espagnole Almudena Grandes disparue en novembre 2021, et dont le dernier roman vient d’être publié à titre posthume, le président du gouvernement espagnol Pedro Sánchez (PSOE, Parti Socialiste) en a surtout profité, ce 28 novembre, pour parler de lui et de ce que l’Histoire retiendra de son passage en politique. « L’une des choses pour lesquelles je passerai à la postérité sera d’avoir exhumé un dictateur », a-t-il déclaré devant le parterre du Centre Culturel de l’Athénée (Madrid) qui ne semble pas s’être ému de cette forme particulière d’immodestie consistant à se projeter dans les livres d’histoire à venir, debout devant le portrait d’une romancière décédée avant d’avoir pu achever l’écriture de son dernier ouvrage. Il faut dire que l’assistance, du réalisateur Pedro Almodóvar à l’actrice Ana Belén, était acquise à Pedro Sánchez. Il faut dire aussi que les romans d’Almudena Grandes, très appréciés du grand public, sont autant d’explorations littéraires de la guerre civile espagnole et de la dictature franquiste, la romancière – fervente militante de la récupération de la mémoire historique – ayant toujours dit regretter que l’Espagne soit le seul pays d’Europe où, selon elle, « dans une guerre entre fascistes et démocrates, on ne désigne toujours pas clairement les bons et les mauvais ». Affaire de littérature et non d’histoire, assurément.

La phrase de Pedro Sánchez n’est pas passée inaperçue dans un contexte électrique où, à six mois des prochaines élections municipales (28 mai 2023) et à un an des élections générales, ses adversaires politiques – à commencer par ceux du Partido Popular (PP, droite libéral-conservatrice) et de Vox (classé à l’extrême droite) – n’ont pas hésité à questionner ces curieuses prétentions à un destin historique. Et ils rappellent au candidat à la postérité que la coalition entre le parti socialiste (PSOE) et l’extrême gauche (Unidas Podemos,UP: « Unies nous pouvons »), au pouvoir depuis janvier 2020,  avait accouché de plusieurs lois incendiaires parmi lesquelles : la  Loi trans, la Loi de garantie intégrale de liberté sexuelle (loi dite du consentement explicite, sans lequel tout acte sexuel est potentiellement un viol, plus connue en Espagne sous le nom de « Seul un oui est un oui ») et la Loi de réforme du délit de sédition.

A lire aussi :  Mythe et mythes de la Guerre d’Espagne: les raisons d’une polémique

La Loi trans, portée par la Ministre de l’Égalité, Irene Montero, issue du parti d’extrême gauche, UP, prévoit, entre autres dispositions, que toute personne de plus de 16 ans pourra choisir librement son identité de genre (sans consentement parental ni avis médical ou psychologique préalable), que les mineurs entre 14 et 16 ans auront également ce droit (quoique devant être assistés dans leurs démarches par leurs parents ou tuteurs légaux), comme ceux de moins de 12 ans (qui, eux, devront tout de même obtenir une autorisation judiciaire).

Si la Loi trans n’a pas encore été votée, c’est qu’elle a été retardée par le chaos engendré par la récente Loi du Seul un oui est un oui – de la même ministre de l’Egalité – entrée en vigueur le 7 octobre. Car cette loi, d’avantage conçue comme protectrice des victimes (n’ayant heureusement plus, désormais, à se justifier d’avoir été abusées ou violées), plutôt que punitive (les peines minimales ont été abaissées suite à la décision de gommer la distinction entre « abus » et « viol »), produit l’effet inverse de l’objectif poursuivi initialement. Censée protéger du viol et de toutes les violences sexuelles, la loi se révèle être plus avantageuse pour de nombreux délinquants qui, à la faveur de la disposition de rétroactivité de toute nouvelle législation plus favorable à l’accusé, voient leurs peines sensiblement réduites. Situation ubuesque – si elle n’était pas aussi tragique pour les victimes elles-mêmes – quand on sait que le point de départ de cette loi a été l’exaspération de l’opinion publique en 2018 devant les peines jugées trop clémentes des cinq individus condamnés pour le viol collectif dit de La Manada (La Meute), dont l’un des membres n’a d’ailleurs pas hésité, le 21 novembre, à réclamer une réduction de presque deux années de prison (sur 15) à la faveur de la nouvelle législation…

A lire : Panique et hystérie devant “Les mythes de la guerre d’Espagne, 1936-1939”

Quant à la Proposition de loi de réforme du « délit de sédition » (article 544 du Code Pénal) en « désordres publics aggravés », elle se traduit par un allègement significatif des peines d’emprisonnement (potentiellement divisées par trois pour les leaders de la tentative de sécession de la Catalogne en septembre 2017). Les anti-Sánchez y voient une insupportable compromission avec les indépendantistes de tout poil, de la Gauche républicaine de Catalogne (Esquerra Republicana de Catalunya ou ERC), les indépendantistes catalans, à EH Bildu (Euskal Herria Bildu, « Réunir le Pays basque »), les indépendantistes de la gauche radicale abertzale basque, et un lamentable clientélisme politique de nature à remettre en cause une Constitution qui repose, depuis 1978, sur « l’indissoluble unité de la nation espagnole, patrie commune et indivisible de tous les Espagnols », reconnaissant et garantissant «  le droit à l’autonomie des nationalités et régions qui l’intègrent et la solidarité entre elles toutes » (Article 2). Il n’est pas jusqu’à Felipe González, figure mythique du Parti Socialiste espagnol dont la première victoire aux élections générales remonte à 1982, qui n’ait vivement critiqué la politique du gouvernement de Pedro Sánchez, dans une interview du 2 décembre, considérant la loi du consentement explicite « mal faite », « à rectifier immédiatement ». Il taxe Podemos et ses leaders politiques de « populistes qui donnent des réponses simplistes à des problèmes complexes », et souligne la distinction sémantique entre « sédition » et « désordre public » : le désordre public, c’est occuper une gare, la sédition, c’est se déclarer République indépendante… Reste à savoir si on peut entrer dans l’Histoire pour avoir exhumé un dictateur mort en 1975 quand on n’a pas soi-même vécu sous la censure et la dictature. S’enorgueillir à 50 ans d’un anti-franquisme militant alors que la génération politique issue du franquisme, celle de la Transition démocratique, enfants de vainqueurs et de vaincus, avait réalisé le tour de force de sortir d’un antagonisme historique en réconciliant les Espagnols et en les projetant dans un avenir commun, est la parfaite illustration de ce que l’historien espagnol Santos Juliá nomme le phénomène des « enfants discrets versus petits-enfants vindicatifs ». Peut-on réclamer un destin historique quand on affirme à la fois la nécessité de savoir d’où l’on vient (Cérémonie anniversaire des 40 ans de la première victoire du Parti Socialiste aux élections générales de 1982) tout en réformant l’Education pour ne faire commencer le programme d’histoire du Baccalauréat qu’au 19ème siècle ? Ou quand on dit revendiquer un « passé radieux » et un « héritage de lumière obscurci par la dictature franquiste » quand l’histoire de l’Espagne est tout sauf le combat manichéen de l’ombre contre la lumière ?  En somme, peut-on entrer dans l’Histoire quand on capitalise autant sur la Mémoire ?