Attiré par les dithyrambes de la presse et la présence au scénario de Fabrice Caro, notre chroniqueur, qui est resté un grand enfant, s’est procuré le dernier Astérix, l’Iris blanc. Catastrophe et désolation: sa lecture ne laisse rien passer.
À la copie, toujours préférer l’original. Vous n’achèteriez pas une copie de la Joconde exécutée au Louvre par un étudiant en beaux-arts chinois, n’est-ce pas — aussi adroits que soient les artistes chinois dans l’art de la copie… Eh bien, il en est de même ici.
J’avais quelque espoir : Fabcaro, de son vrai nom Fabrice Caro, est un bon scénariste, et un romancier fort drôle, j’avais l’année dernière salué ici son Samouraï. Tout ce qu’il en reste, c’est cet iris dont il tire son titre — et qui est le prénom de l’une de ses filles.
Pourquoi diable un iris ? Le personnage qui en tire sa philosophie, un certain Vicévertus (les auteurs ignorent-ils qu’il n’y a pas d’accent en latin ?) enseigne le développement personnel, la pensée positive et la macrobiotique — alors que l’iris est une fleur louche, dotée d’un rhizome qui a fourni à Deleuze et Guattari, dans Mille plateaux (1980), la métaphore d’un réseau infini, sous-jacent à l’individu, un pas de plus dans la déconstruction du sujet cartésien.
L’intrigue tient donc à cela : un fomenteur de paix frelatée et de douceur molle est envoyé par César dans le village gaulois pour y propager la bonne parole post-moderne. Un postulat séduisant, dont le scénariste ne fait pas grand-chose, sinon inventer à chaque image des sentences supposées dulcifiantes : « Un triomphe sans risque est un triomphe orphelin », assène-t-il à César (le seul personnage que le dessinateur, Didier Conrad, a radicalement raté). Et à Bonemine, qui se languit comme d’habitude au village pendant que son frère fait une belle carrière à Lutèce : « Qu’importe d’être devant si ton âme, elle, reste derrière », dit-il, après l’avoir rassurée : « Tu émanes, tu irradies… »
Tu irradies rose, sans doute. Ah, combien profonde ma nostalgie des jeux de mots superbement foireux de Goscinny ! Rappelez-vous, dans Astérix en Hispanie : « Chaque année les Ibères deviennent plus rudes… » Nous étions écroulés…
Le plus problématique, c’est que ces formules imbéciles sont si près de celles des adeptes de la pensée liquide que le second degré est peu perceptible. Certes, cela crée un léger décalage par rapport au Ier siècle av. JC, mais ça sonne comme une transposition pure des propos actuels des bobos qui ne se déplacent pas sans leur coach de vie et votent Anne Hidalgo.
Alors, vérifiez que vous avez toute la vieille collection des Astérix originaux, ou rachetez-les avant qu’ils ne disparaissent : cela ne m’étonnerait pas que l’on juge rapidement qu’Astérix chez les Goths est assez peu germanophile (Goscinny avait des excuses, trois de ses oncles, juifs ashkénazes comme ses parents, avaient disparu dans les camps de Pithiviers et Auschwitz), et que Falbala offre une vision de la femme qui pue le male gaze, comme on dit chez les crétins qui pensent bien. Déjà que le gros pirate noir, qui parle le latin avec un léger accent occultant les -r- (« O tempo’a, o mo’es ! », dit-il dans Astérix en Corse, citant Cicéron que nous avions traduit en version latine, ce qui accentuait le comique de la formule), fait l’objet de critiques virulentes des wokes de garde…
Notre chroniqueur, expert en langue et cultures françaises, a écouté en son entier le long discours d’Emmanuel Macron célébrant l’ouverture de la Cité Internationale de la Langue française à Villers-Cotterêts, où en 1539 François Ier imposa le français comme langue du droit français. Le moins que l’on puisse dire est que cet exercice un peu scolaire l’a laissé dubitatif — mais pas totalement hostile.
Personne ne saurait m’accuser de servir la soupe au chef de l’État, moi qui dès 2017 ait appelé à voter contre lui. Mais je dois reconnaître que cet ex-apprenti-comédien se débrouille très bien dans ces exercices de parole en public, surtout dans le genre commémoratif. Peu après son entrée en fonction, au mois de juin, il avait réussi à Oradour un beau discours (écrit par Sylvain Fort, qui lui servait alors de nègre de luxe) que j’avais salué en son temps — réserves comprises.
La longue performance de lundi était de la même veine. Le chef de l’État n’a pas manqué d’utiliser la géographie très centrale de la ville de naissance d’Alexandre Dumas, au cœur du Valois, pour saluer par cercles successifs Racine, La Fontaine, Rabelais et Marot (auquel on doit l’infernale règle d’accord du participe conjugué avec avoir avec le COD antéposé), tous liés à la ville ou à François Ier, tous exemples remarquables de l’excellence de la langue française. Il y a rajouté Molière, qui a effectivement joué Tartuffe pour le roi en cette ville en 1664, puis l’abbé Grégoire, qui pendant la Révolution se battit avec persévérance pour imposer une langue nationale : c’est de lui que procède à distance l’article 2 de la Constitution, rajouté en 1992 : « La langue de la République est le français ». Et pas le dialecte informe des banlieues.
Bonne copie
D’où les réflexions d’Emmanuel Macron sur cette langue française qui « bâtit l’unité de la nation » dont « elle est un ciment ». La France, a-t-il ajouté — et cela sentait un peu la bonne copie de première — est un « pays unifié par la langue » : c’est tout le sens de l’ordonnance de 1539. L’édit de François Ier tenait à la fois de la formalisation et de l’uniformisation, dans un royaume alors divisé en de multiples langues régionales, et en féodalités tout aussi diverses. Proclamer l’unité linguistique, c’était forger l’unité du royaume. Richelieu, en fondant un siècle plus tard l’Académie française, n’a pas d’autre projet : le français est la langue du roi, et la parler, c’est reconnaître la primauté royale. Je ne sais quel enseignant de seconde zone a conseillé au jeune Emmanuel de s’appuyer sur un discours historique avant d’arriver à l’essentiel, mais nous avons eu droit au rappel de la fondation de la IIIème République et de l’école de Jules Ferry : « La première mission demandée à nos enseignants, après 1870, c’est la langue française ». On sentait venir le grand écart et le lien entre cette période glorieuse et revancharde de la France et la situation actuelle.
Ça n’a pas manqué. Mais Macron est ce qu’il est — et c’est sans doute pour ça qu’il a raté l’ENS et s’est contenté de l’ENA : après avoir exalté l’uniformisation de la langue, il s’est lancé dans une série de « en même temps » bâtie sur des oppositions un peu faciles. Le français, a-t-il expliqué, est une langue « ductile et rigoureuse, souple et ordonnée — les oxymores manquent pour décrire les contrastes de cette langue qui résiste à toutes les étiquettes ». C’est qu’il fallait introduire les « génies pluriels » de cette langue française qui « nous rassemble dans notre unité et notre diversité ». Une langue « unie mais non pas excluante », « qui cohabite avec nos 72 langues régionales ». Tiens, il les a comptées…
C’était assez donner à la diversité. Le discours a basculé à nouveau, et le président a exhorté les Français à « garder les fondements, et à ne pas céder aux airs du temps ». Et de préciser — avoir l’air un peu grammairien, cela fait bon genre : « Dans cette langue le masculin fait le neutre, on n’a pas besoin d’y rajouter des points au milieu des mots, ou des tirets, ou des choses pour la rendre illisible ».
Bien sûr, c’est tout ce que les imbéciles bien-pensants ont retenu. « Emmanuel Macron s’est permis une critique sévère de la langue inclusive », s’indigne TF1. Et le sénateur socialiste Yan Chantrel de conclure : « C’est un texte inconstitutionnel, rétrograde et réactionnaire, qui s’inscrit dans un courant conservateur de longue date de lutte contre la visibilisation des femmes ». Il y a des gens qui ont voté pour un édile qui utilise des mots comme « visibilisation », et émet des stupidités de ce tonneau ? Cet homme a des collègues qui acceptent de lui serrer la main ? On n’éclate pas de rire à son passage ?
Lubies atterrantes
Soyons sérieux. L’écriture inclusive, qui ne peut pas s’articuler à l’oral (rappelez-vous Boileau : « Ce qui se conçoit, bien s’énonce clairement ») est une lubie de pseudo-grammairiens en quête de notoriété, et les universitaires ou les journalistes qui se plient à ces contraintes artificielles sont des imbéciles. Une femme est auteur, j’admets aussi autrice, mais en aucun cas elle est auteure : où avez-vous pris que le -e- muet était un signe de féminité ? Comme dans bite ou verge ? Où avez-vous pêché l’idée que la féminisation systématique faisait avancer la cause des femmes ? Vous appelez votre avocate « maîtresse », peut-être ? Mais nombre d’universitaires recrutées récemment exigent d’être appelées « maîtresses de conférence ». Et sous-maîtresse de bordel, ça vous chante ?
Quant aux nouveaux pronoms du genre « iel », ils n’existent que pour perdre un peu plus des enfants auxquels on renonce en même temps à apprendre l’orthographe et globalement la grammaire. Plutôt que de faire de jolis discours, Macron pourrait se soucier de révoquer les enseignants qui apprennent l’écriture inclusive à leurs élèves.
Il pourrait aussi se forcer à parler français, en privé. Il aurait pu protester, lorsqu’il lui fut donné de présider l’Union européenne, et refuser le coup d’État linguistique perpétré par Mme Ursula von der Leyen qui a fait de l’anglais la langue de travail unique de la Commission, de la Cour des Comptes et de la Cour de justice européennes. Évidemment, Bruxelles, c’est plus loin que Villers-Cotterêts.
Bien sûr, il faut revenir à Dumas, La Fontaine, Racine, Rabelais et les autres, tous les autres qui ont forgé l’unité de la culture française. Mais cela contrarie tant d’enseignants, persuadés qu’il faut « respecter » toutes les cultures, y compris celle du « Allah akbar ! » La proposition ces jours-ci de créer des cours de culture générale rencontre l’opposition des pédagos les plus convaincus, qui y voient« un concept, très clivant socialement mais très flou ».
Eh non, camarades, il n’y a qu’une culture en France, c’est celle de la bourgeoisie au pouvoir ! Et en refusant de l’apprendre à vos élèves, vous les condamnez au ghetto dans lequel ils sont nés, et où grâce à vous ils mourront. Mais évidemment, vos enfants, eux, sont préservés — et c’est bien l’essentiel, n’est-ce pas…
Éric Cantona, Juliette Binoche, Annie Ernaux, Rokhaya Diallo, Adèle Haenel, Jeanne Balibar, Swann Arlaud, Rohmane Bohringer, Robert Guédiguian et, bien entendu, l’inénarrable Guillaume Meurice, font partie des 93 personnalités ayant signé un « Appel du monde de la culture pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza », paru dans l’Humanité.
Si ces bonnes gens disent « avoir été horrifiées par les massacres du 7 octobre », pas une fois le mot « terroriste » n’est utilisé pour qualifier les actes du Hamas.
Y a-t-il encore une personne étonnée dans l’assistance ?
On a déjà entendu ça quelque part
Au contraire, un relativisme filandreux renvoie dos à dos l’organisation terroriste et l’État d’Israël en insistant toutefois sur les torts supposés de ce dernier : « Nous condamnons tous les crimes de guerre, ceux du Hamas et ceux du gouvernement israélien. [Les pogroms qu’ont subis les Israéliens sont au-delà des crimes de guerre ; ils relèvent de la plus abominable des barbaries, d’un effroyable crime contre l’humanité. Quels sont, en l’occurence, les crimes de guerre du gouvernement israélien ?] Nous pensons que l’oppression et le racisme, sous toutes leurs formes, sont un affront fait à notre humanité commune : il faut y mettre fin. Aujourd’hui, des décennies d’occupation privent les Palestiniens de leurs libertés et de leurs droits fondamentaux. [La bande de Gaza n’est plus « occupée » depuis 2005. Les seuls coupables de la privation de liberté des Palestiniens de Gaza sont les dirigeants du Hamas et leurs terrifiantes milices.] Déplacer des centaines de milliers de personnes de leur foyer – certaines pour la deuxième ou troisième fois – serait une nouvelle injustice catastrophique ; elle nous éloignerait, en prime, de la possibilité d’une paix juste et durable, de la sécurité pour les deux peuples. » [Le Hamas seul est responsable de cet état de fait. De plus, si les civils gazaouis sont avertis par l’armée israélienne des cibles qui vont être visées par ses missiles, le Hamas tente par tous les moyens de les empêcher de partir loin des zones meurtrières afin de les utiliser comme boucliers en espérant retourner l’opinion internationale lorsque, inévitablement, il y aura un grand nombre de victimes parmi eux.] Les signataires réclament la libération des otages et appellent « tout le monde au respect du droit international,qui interdit de porter atteinte aux civils – quel que soit le contexte ». Le Hamas étant et se comportant comme une organisation terroriste, cette dernière injonction ne peut être qu’à destination d’Israël, État démocratique dont on attend qu’il se comporte comme tel, en respectant les lois de la guerre définies par les instances internationales, ce qu’il fait en vérité.
Cet appel « pour la paix et la dignité pour tous les peuples » ne saurait faire oublier les sentiments de certains signataires vis-à-vis d’Israël. La mélenchoniste Annie Ernaux n’a jamais manqué de montrer sa détestation de l’État hébreu : appel au boycott de la saison culturelle France-Israël, à celui du Concours Eurovision de la chanson devant se dérouler à Tel Aviv, soutien au BDS (Boycott, désinvestissement et sanctions) visant spécifiquement Israël, etc. Idem pour Adèle Haenel qui milite maintenant dans un mouvement trotskyste, Révolution permanente, émanation du NPA ouvertement antisioniste, pour ne pas dire pire. On ne présente plus Rokhaya Diallo, antiraciste à la mode racialiste américaine, décolonialiste, toujours prompte à taper sur la France – comme Bertrand Badie, elle regrette que, au soir des attentats du 7 octobre, la Tour Eiffel n’ait été illuminée que par les couleurs du drapeau israélien et « sans mention des victimes palestiniennes […] dont les droits fondamentaux sont foulés au pied depuis des décennies », écrit-elle dans The Guardian, où elle ajoute : « L’accent mondial soudain mis sur le conflit israélo-palestinien depuis l’extrême violence du 7 octobre expose un autre type de violence: celle du silence et de l’invisibilité de l’oppression quotidienne à laquelle sont confrontés les civils palestiniens. Pendant des années, les organisations de défense des droits de l’homme ont décrit la bande de Gaza assiégée comme “une prison en plein air” ; son peuple, victime d’un “apartheid” ». Le géo-politicien en herbe Éric Cantona est de gauche et avoue avoir voté pour Hollande en 2012. En 2015, devant des lecteurs du Parisien, le King se disait prêt à accueillir un migrant chez lui en espérant que tous les Français fassent de même. « On va faire des guerres pour des raisons économiques, ensuite des gens fuient leur pays parce qu’on a foutu le bordel, et on n’est même pas capables de les recevoir chez nous », argumentait-il avec cette finesse analytique qui le caractérise. Le 17 octobre dernier, il tweete en zieutant sur la copie de Rokhaya Diallo : « “Palestine libre” signifie mettre fin à la mise en cage de 2,3 millions de Palestiniens se trouvant dans la plus grande prison en plein air du monde, dont la moitié sont des enfants. “Palestine libre” signifie mettre fin à l’apartheid imposé par le gouvernement israélien. “Palestine libre” signifie donner aux Palestiniens le contrôle des infrastructures sur leur terre. » Sur France Inter, Guillaume Meurice, toujours aussi inspiré, demande « à celles et ceux qui veulent t’obliger à choisir un camp pour t’enfermer dedans, d’aller se faire cuire le cul ! » – sachant que lui a choisi le sien depuis belle lurette. Quant à Juliette Binoche… disons simplement, pour ne pas être excessivement cruel, que la bisounourserie universelle et la moraline en tube ont trouvé leur égérie : « J’ai de la compassion pour les deux côtés parce qu’il y a de l’humain des deux côtés. La revanche, ce n’est pas la bonne solution. Où est la solution ? C’est au fond du cœur de chacun. Se dire qu’il y a un retournement possible. Dans nos pensées, dans nos paroles, il faut être le plus aimant possible. Et patient en espérant le meilleur », déclare-t-elle sur BFMTV en poussant moult soupirs pleurnichards.
Dans la foulée de cet appel paru dans ses colonnes, et après avoir déjà consacré de nombreux articles à la « cause palestinienne », le quotidien communiste a publié, jeudi 26 octobre, une Une bien débectante. Sur un fond sombre – un ciel noir, orageux dans lequel planent de menaçants avions ou drones – Yaël Braun-Pivet, Meyer Habib, Manuel Valls, Eric Ciotti et Jordan Bardella sont représentés entourés de ruines d’immeubles détruits par les bombes. Le titre, en gros : « Les inconditionnels de Netanyahou ». Le sous-titre : « Des personnalités françaises font bloc derrière Tel-Aviv en justifiant tout, y compris les crimes de guerre à Gaza au nom du “droit à se défendre”. » Sur CNews, dans l’émission Punchline, Éric Naulleau a dit son écœurement à la vue de cette Une de L’Humanité faisant « penser à Rivarol, journal d’extrême droite négationniste et antisémite » – le même Rivarol qui, dernièrement, a salué le « courage » d’un Jean-Luc Mélenchon refusant de « s’aligner inconditionnellement sur l’entité sioniste » – et Céline Pina a souligné à juste titre l’hypocrisie d’un parti communiste disant rompre avec Mélenchon tout en s’appropriant la même imagerie idéologique anti-israélienne frisant parfois l’antisémitisme.
Manifestations polémiques
Les masques tombent. Il faut dire qu’ils ne tenaient plus qu’à un fil. L’islamo-gauchisme teinté d’un antisionisme exacerbé cachant mal quelques relents antisémites continue d’envahir les rangs de la gauche et de l’extrême gauche. Tandis que les actes antisémites se multiplient en France, des élus de la République se pavanent dans les manifestations de soutien à la « cause palestinienne » soutenant en vérité le Hamas. Voyant cela, un grand nombre de jeunes Français de confession musulmane se sentent confortés dans leur préférence pour la charia contre les lois de la République. Ils se moquent de leurs grand-pères comme des kouffars – ils rangent naturellement dans cette dernière catégorie les idiots utiles à leur cause, les mélenchonistes et les écologistes qui subiront finalement le sort commun aux dhimmis.
Beaucoup de ces musulmans issus de l’immigration ancienne ou nouvelle ignorent l’histoire complexe du Proche-Orient – la « cause palestinienne » ne sert depuis longtemps qu’à agglomérer une haine antisémite enkystée dans le monde musulman, un ressentiment post-colonial savamment alimenté par des pays comme l’Algérie et une détestation de certaines mœurs occidentales. Nos artistes pétitionnaires, si soucieux du sort des Palestiniens en particulier et des migrants en général, ignorent qu’eux aussi sont qualifiés d’idiots utiles par les islamistes, salafistes et Frères musulmans qui œuvrent pour la disparition de l’État d’Israël et pour la déstabilisation et l’islamisation de l’Europe qu’ils considèrent être le ventre mou de l’Occident. Ces donneurs de leçons de morale n’ont toujours pas compris à qui ni à quoi ils ont affaire. Malheureusement, lorsqu’ils le comprendront, il sera trop tard – pour les éclairer sur le possible avenir qui les et nous attend, peut-être pouvons-nous leur conseiller de lire le roman de Michel Houellebecq, Soumission, et, tant qu’ils y seront, de jeter un œil sur celui de Jean Raspail, Le Camp des saints.
Figure de proue du nationalisme français, l’auteur des Déracinés était une autorité intellectuelle et sociale considérable, ce qui est un peu oublié aujourd’hui
La biographie de Maurice Barrès (1862-1923) que propose Emmanuel Godo fait partie de ces ouvrages imposants qui réclament de se couper du monde et de prendre quelques jours de congés pour en apprécier la subtilité. Au bout de 600 pages, le biographe et poète restitue l’importance de l’écrivain lorrain dans l’histoire littéraire française.
Prince (déchu) de la jeunesse
Pour se faire une idée de cette importance, il faut relire ce qu’en disait Aragon, en 1965 : « Et, au-delà des enthousiasmes de ma jeunesse (…), dans la mesure exacte où il faut prendre parti pour ou contre, quand on vient à avoir à choisir entre le roman politique ou la haine du roman politique, entre la reconnaissance de la vérité nationale et sa négation pure et simple, entre, non pas le matérialisme mécaniste et le matérialisme dialectique, mais le matérialisme quel qu’il soit et la condamnation théologique du matérialisme, et caetera, eh bien, oui, décidément, en ce sens, je me considère comme barrésien ». Et aussi Léopold Sédar Senghor : « J’avais beaucoup subi l’influence de Barrès. C’est curieux, Barrès m’a fait connaître et aimer la France, mais en même temps, il a renforcé en moi le sentiment de la négritude, en mettant l’accent sur la race, du moins la nation ». L’œuvre du Lorrain trônait en bonne place dans la bibliothèque de la Boisserie, à Colombey-les-deux-Eglises. Et pourtant, alors que les cent ans de sa mort se profile (il est décédé le 4 décembre 1923), l’écrivain a désormais mauvaise presse. Point d’adaptations du Roman de l’énergie nationale par le cinéma français ou la télévision soviétique, contrairement à la Comédie humaine.
L’écrivain Aurélien Bellanger, un peu vache, indiquait, sur la chaîne Youtube du Figaro1, en février 2023 : « Tous les écrivains, en 1900, ont été renversés par Barrès, qui ont trouvé Barrès immense, et quand on lit Barrès aujourd’hui, je ne dis pas que ça nous tombe des mains mais on a du mal à comprendre comment autant de gens aussi intelligents ont été bouleversés par Barrès ».
Roueries de jeune lion
Emmanuel Godo revient sur la construction de l’écrivain, en commençant par sa jeunesse lorraine, marquée par la défaite de 1870. Les années au collège, près de Nancy, sont austères et solitaires. Très jeune, le Lorrain exerce une fascination sur sa génération. À vingt-six ans, il publie Sous l’œil des Barbares et se fait élire député. Il est déjà le prince de la jeunesse. « M. Maurice Barrès a plus d’une fois fait froncer le sourcil aux personnes graves. Mais il a exercé sur beaucoup de jeunes gens une sorte de fascination. Il ne faut pas s’en étonner. Cet esprit si troublé, si malade, si perverti et gâté, comme nous l’avons dit, par ce que les théologiens appellent la malice, n’est certes ni sans grâce ni sans richesse. Il a présenté artistement une réelle détresse morale. Et cela lui a gagné des sympathies dans la jeunesse, cela lui a valu une sorte d’admiration tendre et mouillée », écrit Anatole France. Le plaisir aristocratique de déplaire n’est pas très loin.
En 1904, Barrès revient sur ses jeunes années : « Ceux qui ne connurent jamais l’ivresse de déplaire ne peuvent imaginer les divines satisfactions de ma vingt-cinquième année : j’ai scandalisé. Des gens se mettaient à cause de mes livres en fureur. Leur sottise me crevait de bonheur ».
Emmanuel Godo nuance quand même l’image d’un Barrès pitre de la jeunesse : « les anecdotiers et les biographes sans vision littéraire seront intarissables sur les frasques, les causticités de dandy, les roueries de jeune lion, mais ne verront pas que derrière cette théâtralité s’accomplit un travail sur soi qui est tout sauf cynique ».
Égaré en politique ?
Barrès entre aussi jeune dans l’arène politique qu’il est entré dans l’arène littéraire. À Nancy, il se fait élire député à gauche, ce qui n’est guère contradictoire à cette époque avec de premiers accents antisémites, répandus chez certains anciens communards. Siégeant à l’extrême gauche au Palais Bourbon, ça ne l’empêche pas, selon ses mots, d’être très à son aise « avec les vieux messieurs royalistes intransigeants qui croient à l’ordre fondé sur la tradition ». On peut se demander s’il ne s’est pas fourvoyé en politique, associant son nom pour toujours à l’effervescence boulangiste (mouvement venu pour une bonne part des rangs de la gauche de l’époque) puis, plus gênant encore, à la fièvre de l’antidreyfusisme. Il y a en effet un décalage entre le raffinement de l’œuvre littéraire et les mots d’ordre du parti boulangiste, « Dissolution, révision, constituante », qui rappellent un peu les revendications des gilets jaunes concernant le référendum d’initiative citoyenne.
En politique, Barrès s’inquiète alors de choses concrètes et fait partie des députés qui déposent un projet de loi (refusé) visant à instaurer une caisse de retraite pour les travailleurs. Emmanuel Godo ne veut pas voir en Maurice Barrès un écrivain égaré en politique ; pour lui, cet engagement a favorisé la création littéraire: à Boulanger, « Barrès sait ce qu’il doit : non seulement un premier engagement politique, mais plus profondément ce qu’il nomme la socialisation de son âme, c’est-à-dire la prise de conscience que l’écriture et l’action, la réflexion et l’engagement, le souci de soi et le sens de la collectivité peuvent s’articuler, se nourrir mutuellement ». Le garnement n’est jamais très loin malgré tout : « On est en droit de considérer que Barrès procède à l’une des lectures les plus justes de son engagement boulangiste lorsqu’il écrit tout simplement, en 1923, dans les notes préparatoires de ses Mémoires : »Comme je me suis amusé ! Il y avait bien de la fantaisie, de l’allégresse de jeunesse, l’idée d’embêter le pion, le philosophe, les grandes personnes » ».
De Jules Soury à Abraham Bloch
Et puis, il y a évidemment la question de l’antisémitisme. En pleine affaire Dreyfus, Barrès lâche : « Je n’ai pas besoin qu’on me dise pourquoi Dreyfus a trahi. En psychologie, il me suffit de savoir qu’il est capable de trahir et il me suffit de savoir qu’il a trahi. L’intervalle est rempli. Que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race ». Zeev Sternhell a voulu voir l’influence des cours de Jules Soury, que Barrès suit à l’Ecole pratique des hautes études, dans la constitution de la pensée nationaliste de l’écrivain lorrain, laquelle serait à l’origine des fascismes nés ici et là en Europe quelques décennies plus tard. Sorte de génie fou de la fin du XIXème siècle, mélangeant « méthode et extravagance », Soury, « une de ces créatures bizarres comme la science et l’intelligence en produisent souvent », n’est pas épargné par un fort antisémitisme. Pourtant, la bizarrerie de Soury n’échappe pas à Barrès. Emmanuel Godo relativise l’influence du savant sur l’écrivain.
Dans l’antisémitisme, Barrès vit surtout une grande passion en mesure de « transcende[r] les classes sociales ». Pendant la crise dreyfusienne, ses liens avec Léon Blum se distendent. C’est l’époque aussi où Barrès passe du rang de prince de la jeunesse à celle de figure tutélaire un peu pesante contre laquelle les nouveaux jeunes gens se construisent. Et pourtant, toujours pendant l’Affaire, Barrès voit aussi dans le camp d’en face (les dreyfusards) des forces qui mériteront d’être combinées aux siens lors d’un combat plus grand. En 1902, il écrit : « Eh ! je le sais qu’il faudrait incorporer dreyfusisme et antidreyfusisme dans un type supérieur ; qu’il faudrait sauver ce qu’il y a de chevaleresque français chez le dreyfusien de bonne foi ; qu’il faudrait systématiser cette double tendance, et puis coordonner, s’il est possible, ces éléments d’abord contradictoires dans un idéal commun ».
Le combat plus grand, il arriva : ce fut la Grande Guerre.
C’est dans Les diverses familles spirituelles de la France que l’on retrouve l’hommage à Abraham Bloch, l’aumônier israélite tué par un obus après avoir tendu un crucifix à un soldat mourant, et à la volonté d’appartenance des Juifs à la France manifestée durant toute la guerre.
A lire: « Maurice Barrès. Le grand inconnu. 1862-1923 » (Tallandier, 2023)
Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique, Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. « J’aime qu’on me contredise ! » pourrait être sa devise.
La mort a une odeur. Le 7 octobre, lors de l’attaque terroriste du Hamas, elle a eu celle d’un pogrom. Le 7 octobre, sur la terre de l’État d’Israël qui a été fondé pour que cela n’arrive plus, des juifs ont été éliminés en tant que juifs. Je n’ai pas mis beaucoup d’ardeur à discuter ce qui relève du « terrorisme » ou d’un « crime de guerre ». Des civils ont été tués, ce qui constitue un « crime de guerre », mais le Hamas n’est pas l’armée régulière des Palestiniens. Le Hamas est même l’ennemi de la cause palestinienne.
Des « résistants » ? Ma famille compte un fusillé, lors d’une opération de parachutage d’armes dans le sud de la Gironde, et un déporté : deux frères unis dans un même combat pour la patrie et la liberté. Ils n’ont jamais agi comme le Hamas…
Est-il acceptable de comparer les événements du 7 octobre avec les crimes du nazisme ? La même odeur ? Il suffit de lire les témoignages des personnes chargées de la reconnaissance des corps à la morgue de Shura pour prendre la dimension des exactions commises. Et d’écouter leur silence. L’indicible.
Ceux qui, à gauche – une partie de la France insoumise – tergiversent pour qualifier les crimes du Hamas, n’ont pas quitté le« champ républicain », mais celui de notre humanité commune. Par naïveté ?
L’imam de Bordeaux, Tareq Oubrou, rappelle que « s’attaquer à des civils est un acte terroriste contraire au droit international, mais aussi au droit canonique islamique.[…] Le Hamas, ce n’est ni la Palestine, ni les musulmans, ni même, d’ailleurs, les Arabes ! » Il dit la même chose que l’archevêque d’Alger, monseigneur Vasco, qui observe que« la violence du Hamas est sans excuse mais n’est pas sans cause ».
Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale de l’ONU vote la résolution 181, qui partage la Palestine du mandat britannique en deux États, un juif et un arabe.
Depuis, l’État palestinien n’a jamais vu le jour.L’espérance des accords d’Oslo de 1993 a été déchirée par l’alliance entre le Likoud de Benjamin Netanyahou et l’extrême droite israélienne, et parle Hamas dont le premier objectif est la destruction de l’État d’Israël. Netanyahou a joué le Hamas contre l’Autorité palestinienne. Israël est une grande démocratie, et à n’en pas douter, la future commission d’enquête sera intraitable envers l’actuel Premier ministre. Depuis les accords d’Abraham, on dirait que la question palestinienne est évacuée, sortie des radars politiques et diplomatiques, tout comme la solution à deux États.Les dirigeants arabes ont participé à cette opération lamentable. Depuis, la colonisation illégale et brutale de la Cisjordanie a été relancée pour rendre impraticable la création territoriale d’un État palestinien. Depuis, la France n’a plus été celle de de Gaulle, de Giscard, de Mitterrand et de Chirac.
Pour Jaurès, « il ne faut avoir aucun regret pour le passé, aucun remord pour le présent, et une confiance inébranlable pour l’avenir ».Le Proche-Orient peut aujourd’hui s’embraser. Mais quel autre chemin que celui d’une nouvelle espérance ? Il y a des Rabin en Israël et des Arafat en Palestine, ainsi que dans les prisons israéliennes. Il y a des forces vives pour un avenir commun entre la Méditerranée et le Jourdain : qu’elles s’avancent dans la nuit actuelle.
Le 7 octobre, le Hamas s’est livré à une bacchanale nazie version islamiste. Mais après ce crime contre l’humanité, on n’a pas vu l’humanité unie se dresser contre les meurtriers. Que faire alors quand l’internationale djihadiste, du Hamas à Arras, met sous tension les sociétés ouvertes ? Dans son introduction à notre dossier spécial, Elisabeth Lévy est sans ambages : « L’urgence, pour nous, est de mener le combat idéologique. Contre les islamistes et peut-être plus encore contre leurs alliés insoumis et extrême-gauchistes ». Selon l’analyse de Gil Mihaely, l’offensive sanguinaire du Hamas a révélé les failles de l’armée et du renseignement israéliens. Son onde de choc secoue la société israélienne et bouscule les équilibres fragiles de la région. Toute perspective de sortie de crise suppose au préalable un changement politique en Israël. Gilles Kepel, à qui l’on doit les concepts de « mouvements islamistes », d’« islamo-gauchisme » et de « djihadisme d’atmosphère », raconte à Élisabeth Lévy et Jean-Baptiste Roques comment il a été poussé à la retraite au moment où les phénomènes qu’il décrit depuis quarante ans redoublent de gravité. Pour l’historien Georges Bensoussan, qui se confie à Gil Mihaely, la guerre menée par le Hamas contre Israël représente, par sa dimension islamique et djihadiste, l’offensive de tous ceux qui haïssent l’Occident, et les juifs. Cet antisémitisme mondialisé est un marqueur dans la guerre, froide celle-ci, qui oppose la Chine et la Russie au bloc libéral. L’anthropologue Fadila Maaroufi, dont les propos ont été recueillis par Céline Pina, déplore l’ambiguïté d’une grande partie de la population arabo-musulmane de France. Elle l’explique par l’islamisme d’atmosphère dans lequel beaucoup vivent. Si, pour le sociologue Tarik Yildiz, les crimes du Hamas n’ont pas suscité d’explosions de joie dans nos banlieues, c’est parce que la négation a remplacé la justification : la rumeur d’images manipulées par Israël s’est vite répandue. Pierre Vermeren dresse le contraste entre un Occident occidental multiculturel, ouvert à la « diversité », et des pays musulmans qui imposent par la force l’homogénéisation ethnoreligieuse de leur société. Driss Ghali regrette que l’attaque du Hamas sur Israël ait donné un coup d’arrêt à la normalisation des relations entre Israël et le Maroc, mais croit encore à la possibilité du rapprochement.
Notre numéro de novembre est disponible aujourd’hui sur le site, et demain mercredi chez votre marchand de journaux !
L’ancien préfet Michel Aubouin témoigne de la manière dont le terrorisme profite de cette mécanique incontrôlable qui permet à la majorité des migrants clandestins de demeurer sur notre sol. Se montrant incapable de dénoncer le terrorisme du Hamas, Jean-Luc Mélenchon place ses alliés dans une situation intenable. Céline Pina se demande si le Hamas ne sera pas le fossoyeur de la Nupes. Si Cyril Bennasar pleure sur les victimes du Hamas, qui rappellent toutes les victimes juives de l’histoire, il pleure aussi du bonheur d’être juif à l’époque de l’Armée de défense d’Israël, d’« être juif au temps de TSAHAL ».
Dans son édito du mois, Elisabeth Lévy s’interroge sur le choix de Thomas Jolly pour mettre en scène les cérémonies d’ouverture et de fermeture des JO, lui qui croit que Shakespeare et Britney Spears sa valent. Pendant la guerre des civilisations actuelle, Festivus (le nom donné par Philippe Muray au spécimen humain de l’âge post-historique) continue ses saccages. Dans sa chronique, Olivier Dartigolles explique pourquoi le Hamas est l’ennemi, non seulement d’Israël et de l’Occident, mais aussi de la cause palestinienne. Dans la sienne, Ivan Rioufol souligne les mensonges et les lâchetés de tous nos dirigeants depuis 20 ans devant tout ce qui menace notre civilisation. Pour Paul Rafin, le pape François souhaite convertir l’Église à la foi progressiste. Il envisage de bénir des couples LGBTQ+, divorcés ou polygames, et de reconnaître le mariage des prêtres, l’ordination des femmes… Au risque de diviser une communauté en perte de fidèles. L’intelligence artificielle signe-t-elle la fin de l’intelligence humaine ? Pas pour tout le monde, selon le philosophe Olivier Rey. En Occident, la population tend à se diviser en deux groupes inégaux : ceux qui savent penser sans IA, et les autres… Gabriel Attal veut lutter contre le harcèlement à l’école par des « cours d’empathie ». Mais Françoise Bonardel explique que l’empathie est un apprentissage culturel, une vertu dont la transmission revient davantage aux parents.
Côté culture,Yannis Ezziadi se penche sur Le Consentement (l’adaptation cinématographique du livre de Vanessa Springora) où Jean-Paul Rouve campe un grossier prédateur sexuel à mi-chemin entre Nosferatu et Hannibal Lecter. L’acteur n’a rien compris à Gabriel Matzneff et il en est fier. Un ratage exemplaire ! Georgia Ray a visité deux expositions parisiennes prêchant l’habituel discours culpabilisateur envers les Européens et l’art occidental. Pour trouver mieux, elle a dû aller à Milan ! Jonathan Siksou a lu le livre de Didier Rykner, Notre-Dame. Une affaire d’État, qui démontre que si nos politiques n’étaient pas si négligents et incompétents, le drame de l’incendie de la cathédrale aurait pu être évité. Pour ceux qui en ont marre de taper sur un clavier et qui trouvent qu’écrire demeure un acte à part méritant ce qu’il y a de plus précieux, Emmanuel Tresmontant a pris de chemin de Plume & Bille, où les résistants trouveront des stylos exceptionnels. Envie d’aller au cinéma au mois de novembre ? Jean Chauvet vous recommande le film d’un octogénaire, Marco Bellocchio, et la rétrospective des 11 longs-métrages d’un disparu, Sacha Guitry. En revanche, il faut éviter le film d’une jeune, La Tresse de Laetitia Colombani, empreint d’une bienveillance et d’un hyperféminisme niaiseux à souhait. Décidément, la jeunesse est un naufrage !
Quoi de vraiment neuf et de définitivement admirable sur les écrans de novembre ? Bellocchio et Guitry ! Un octogénaire et un disparu ! La jeunesse se charge, elle, de faire des films de vieux en arpentant les terres de la bienveillance et de l’hyperféminisme niaiseux à souhait. Heureusement, le cinéma en a vu d’autres…
Bellocchio, toujours
L’Enlèvement, de Marco Bellocchio Sortie le 1er novembre
À 83 ans passés, le fringant cinéaste italien Marco Bellocchio prouve si besoin était qu’il demeure le maestro incontestable du cinéma transalpin. Dernier représentant du 7e art d’avant Berlusconi, c’est-à-dire d’avant la catastrophe, il illumine le cinéma d’aujourd’hui avec des films d’une ampleur absolue. Il nous avait laissés avec Le Traître, cet incroyable portrait d’un mafieux repenti, sorte d’opéra noir sidérant et d’une totale maîtrise scénaristique et stylistique. En mai dernier, il est revenu bredouille de Cannes avec son nouveau film, L’Enlèvement. Énième et désolante preuve qu’il ne faut pas confier à un jury composé de professionnels du cinéma qui ne vont jamais au… cinéma le reste de l’année, la tâche délicate de repérer les pépites dans une série de propositions plus ou moins inspirées. L’essentiel est heureusement ailleurs : le film du maestro Bellocchio sort sur les écrans français et chacun pourra en apprécier l’ambition.
L’histoire (vraie) que nous raconte le cinéaste se déroule en 1858 dans le quartier juif de Bologne, alors encore sous domination papale. Une nuit, une escouade de soldats pontificaux débarque sans prévenir au domicile de l’honorable famille Mortara. Ils sont venus prendre Edgardo, leur fils de 7 ans qui, bébé, aurait été baptisé en secret par sa nourrice. Or, la loi de l’Église est indiscutable : cet enfant doit recevoir une éducation catholique. Les parents du petit garçon, soutenus par l’opinion publique de l’Italie libérale et par la communauté juive internationale, vont tout tenter pour récupérer leur fils. Rapidement, l’affaire prend une tournure politique brûlante. Alors qu’il connaît une perte d’influence, Pie IX refuse catégoriquement de faire machine arrière. Cette histoire est d’autant plus fascinante qu’Edgardo, littéralement rééduqué par les prêtres pour extirper sa culture juive de naissance, restera fidèle à l’Église apostolique et romaine ; jusqu’à devenir prêtre lui-même, dans une incroyable conformité à cette vie redessinée, et jusqu’à tenter de convertir sa propre famille qui n’a pas voulu renier la religion juive ! Comme s’il était atteint d’une sorte de syndrome de Stockholm avant la lettre, il ne renoncera jamais à ce « deuxième père » que le pape est devenu pour lui. De même, il ne se résoudra jamais au fait que sa mère reste juive jusqu’à la mort. Incroyable destinée qu’aucun scénariste de fiction n’aurait pu imaginer tant elle est complexe, paradoxale, brutale et source d’interrogations.
Bellocchio dépeint avec infiniment de finesse et de précision cette Italie du « pape-roi » qui, en train de perdre la partie politique, essaie un dernier coup de poker avec cet enlèvement scandaleux : réponse ultraviolente et désespérée d’un pouvoir tentant de résister à son effondrement programmé. Le cinéaste excelle une fois encore dans la reconstitution du passé national, comme il l’avait fait avec Vincere.
Il convient d’ajouter que sort au même moment sur les écrans son dernier documentaire, Marx peut attendre, réalisé en 2021. Une nouvelle contribution, ici très intime, au portrait de l’Italie des années de plomb que ne cesse de peaufiner Bellocchio au sein de sa filmographie. Ce nouvel opus accompagne le magnifique long métrage de cinéma Buongiorno, notte et de la fabuleuse série télé découverte l’an passé sur Arte, Esterno notte, tous deux centrés sur le décryptage de l’enlèvement et de l’assassinat d’Aldo Moro. Décidément, ce brillant octogénaire sert mieux que quiconque le 7e art !
Guitry, sans cesse
Donne-moi tes yeux (1943) Les Acacias
Le Génie Guitry Sortie le 1er novembre
Le Génie Guitry : le slogan n’est pas volé ! Il plane sur les onze films du cinéaste surdoué que fut Sacha Guitry qui ressortent en salles. Onze films dont Le Roman d’un tricheur, Faisons un rêve et La Poison, pour ne citer qu’eux. Dans un texte rédigé pour l’occasion, Nicolas Pariser, auteur, entre autres, du délicieux Alice et le Maire, écrit fort judicieusement : « À une époque, la nôtre, où les scénarios (et notamment ceux des séries) sont architecturés de manière si technique, si rigide, le cinéma de Sacha Guitry est une véritable cure de jouvence, un antidote au formatage des scénarios en béton écrits avant tout pour convaincre les commissions de financement et les chaînes de télévision. » C’est en effet sa liberté de ton, de mouvement et sa maestria qui font du cinéma de Guitry un trésor national qu’il convient de préserver. Du plaisir à l’état pur qu’il faut découvrir ou redécouvrir sur grand écran. C’est le moment.
Concernant l’hyperféminisme niaiseux à souhait, retrouvez notre critique de La Tresse, de Laetitia Colombani, en salles le 29 novembre, P77 de votre magazine, en kiosques demain mercredi, et dès à présent dans le kiosque numérique. Ou plus tard dans le mois, sur le site Causeur.fr
Alors que les sénateurs votaient hier une loi pour encadrer la détestable « écriture inclusive », le président Macron a fait mine d’exalter notre langue en inaugurant la Cité internationale de la langue française…
Le château s’appelait Mon Plaisir. Il est situé dans l’Aisne. François Ier y venait souvent. C’était un rendez-vous de chasse. C’est là qu’il signa, en 1539, l’Ordonnance de Villers-Cotterêts, premier texte politique toujours en vigueur, qui fonde l’unité du royaume sur la langue française. De ce château tombé en ruines, Macron décida de faire le fleuron de son règne, en le restaurant. Ce « rêve fou » qui coûta 210 millions d’euros, cette « utopie devenue réalité par la force de la volonté », s’appelle donc désormais la Cité internationale de la langue française. Le président Macron l’inaugura hier.
Le président attendu sur l’écriture inclusive
Ne boudons pas notre plaisir à l’écoute d’un discours qui rappela que notre langue est le ciment de notre nation et caractérisa son génie. Attendu sur l’écriture inclusive, le président la « tacla » comme dirent aussitôt les médias, tout en rappelant la nécessité des fondamentaux, de la dictée et de l’apprentissage de l’orthographe, de la grammaire et de la syntaxe. Nul doute que le nouveau ministre de l’Education nationale, Gabriel Attal, très attentif, en fera son miel toutes fleurs. De cela on ne peut que féliciter l’orateur même si le problème de l’inclusive qui gangrène notre langue ne se contentera pas de la remarque du prince sur le caractère non discriminant du genre grammatical : ce serait oublier la circulaire Blanquer et la déclaration d’Edouard Philippe restées, en leur temps, sans effet. Alors que la solution pourtant en est simple : faire appliquer l’ordonnance !
Le discours développa ensuite les lieux communs de la francophonie d’une langue ouverte sur la vocation « à se répandre » dans le temps et l’espace, capable de relever les défis linguistiques de la modernité, en particulier ceux posés par l’IA. C’est là que Macron dégaina une autre ordonnance, celle de Montpellier, faite toute exprès pour notre temps, en 1537, par François Ier ! (Le lecteur ira voir). Tout était donc pour le mieux dans le meilleur des mondes français et francophone possible, dans ce lieu d’exception qui accueillerait les professeurs, les écoliers, les artistes, les traducteurs et qui ne manquerait pas d’attirer le monde entier en devenant « un lieu où on penserait les mots » : un lieu d’attractions et de rencontres. Enfilant des perles, Macron tenait les auditeurs sous son charme tout en rappelant aux crispés que le français n’était pas une langue repliée sur elle-même mais une langue qui n’hésite pas à prendre son bien dans les autres langues, même à leur « voler » des mots. Non pas hégémonique mais destinée à vivre avec les autres avec, pour horizon, le métissage cher à Erik Orsenna. Et Emmanuel Macron d’élargir son rêve devenu réalité, grâce aux traductions d’un Balzac en arabe, pour le bonheur de lecteurs inconnus. Nous étions revenus au bon vieux temps de Senghor. Une époque où notre langue était aimée, libre, vivace, féconde, et la francophonie respectée et encouragée. Une époque où l’anglais ne colonisait pas notre espace public et nos institutions, en violation constante de la loi Toubon. Une époque où le président d’une puissance non anglophone ne s’exprimait pas, à l’étranger, régulièrement en anglais.
Une longue liste de forfaitures
Sur le site CERMF, dirigé par Ilyes Zouari, auteur d’un dictionnaire de la francophonie, on peut lire un article prouvant, en douze points, l’hostilité inédite des autorités françaises vis-à-vis de la francophonie, depuis 20071 : l’anglicisation planifiée de la langue, sa soumission à l’atlantisme et aux européistes. Que ce soit les titres uniquement en anglais, One Ocean Sumnit (Brest, février 2022) et le Forum de Paris sur la paix (novembre 2022) où fut interdit l’usage du français, ou encore le site gouvernemental Make our Planet great again (2017) avec interdiction du site en français, la création d’un Parquet et d’une Cour des compte européens en anglais, la correspondance, en anglais, entre le gouvernement français et l’UE, l’usage croissant de l’anglais en Afrique francophone sans traduction française… Citer toutes ces forfaitures serait trop long.
Face à ces réalités accablantes, le discours du président Macron a été entendu par certains comme un « tombeau littéraire ». Ou bien un Requiem. Une pavane pour une infante défunte. Laissons plutôt le dernier mot à un Académicien devenu— quel bonheur !— bien frondeur, qui, dans le Figaro Vox du 30 octobre, a qualifié Macron de « Tartuffe de la langue française à Villers-Cotterêts-City »2. Pour mémoire, rappelons que c’est en ce château que Molière fit représenter son Tartuffe pour la première fois.
Félicitations à la police nationale, parvenue à maitriser la femme qui inquiétait les usagers des transports en commun!
Les chaines d’information en continu, déjà sur le qui-vive compte tenu de l’actualité internationale, ont vite affiché leurs bandeaux spéciaux.
À Paris, un incident grave vient de se produire ce matin, au cours duquel la police a ouvert le feu sur une femme intégralement voilée, rapporte l’AFP. La femme, qui proférait des menaces et des « Allahou Akbar » dans un train du RER C – ce cri de paix bien connu, selon certains politiciens d’extrême gauche – a été grièvement blessée et conduite à l’hôpital. Selon les autorités, l’islamiste a refusé de se conformer aux ordres des policiers et est allée jusqu’à menacer de se faire exploser ! Un policier lui a répondu en tirant un coup de feu, causant des blessures graves. Le pronostic vital de la femme serait en jeu. Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, a confirmé que la femme portait un voile intégral islamiste, ce qui est interdit depuis 2010, a dit que les policiers étaient munis de caméras, lesquelles seront utiles à l’enquête, et que la femme avait déjà été condamnée par le passé pour des propos tenus à l’encontre de la force Sentinelle.
L’incident a commencé lorsque des passagers ont alerté la police, signalant la présence d’une femme portant un voile et proférant des menaces à bord d’un train du RER C circulant dans le Val-de-Marne. Les forces de l’ordre ont réussi à l’isoler, à la station Bibliothèque François-Mitterrand, qui a été rapidement évacuée. Malgré les injonctions des policiers, la femme a persisté dans ses menaces, ce qui a conduit à l’utilisation de la force.
🔴 Les faits se sont déroulés à la station Bibliothèque François Mitterrand, ce mardi matin. L’alerte est venue d’un usager d’une rame de transport qui a signalé le comportement d’une femme qui proférait des menaces, précise une source policière. → https://t.co/NeUcPBPtyFpic.twitter.com/HLZ8UQTM2t
Deux enquêtes ont été ouvertes pour faire la lumière sur cet incident. La première enquête, menée par la police judiciaire parisienne, concerne des accusations d’apologie du terrorisme, de menaces de mort et d’actes d’intimidation envers les représentants de l’autorité publique. La seconde enquête, confiée à l’inspection générale de la police nationale, examinera le recours à l’arme à feu par le policier, conformément à la procédure standard dans de tels cas.
L’incident survient alors que le conflit entre Israël et le Hamas a des répercussions inquiétantes dans le monde entier (voir notre numéro en vente ce jour), et dans un contexte de fortes tensions communautaristes. Suite à l’attentat islamiste contre le professeur d’Arras, Dominique Bernard, la France a décidé d’élever le niveau de son plan Vigipirate à son seuil le plus élevé : «urgence attentat», sur tout le territoire national. Sur CNews, notre contributrice Céline Pina affirmait, à midi : « Les policiers ont bien fait de tirer (…), mais on sent monter une atmosphère d’absence de concorde civile, d’envie d’en découdre… »
Les réactions politiques seront regardées de près par nombre d’observateurs.
Samedi, la députée Caroline Yadan (Renaissance) était rue Copernic, à Paris, pour écouter les doléances des Français juifs, une communauté très inquiète. Liliane Messika est allée écouter.
Caroline Yadan est un spécimen rare. La députée du XVIIIe arrondissement n’a pas besoin de transitionner chimiquement ou chirurgicalement pour être un homme, un vrai : elle dit ce qu’elle voit et elle fait ce qu’elle dit.
Premier voyage parlementaire dans le pays martyr
Le 15 octobre 2023, une semaine après la série de pogromes infligée par le Hamas à des civils juifs dans l’État juif, un groupe de parlementaires français s’est rendu sur place pour témoigner sa solidarité aux victimes et affirmer son soutien à la seule démocratie du Moyen-Orient. Ils partirent à dix, dont Manuel Valls et Caroline Yadan et revinrent bouleversés. Et déterminés à faire savoir, contre les vents et les marées de la désinformation islamo-gauchiste. Ce voyage ? Caroline Yadan l’a décrit comme « une nécessité pour dire notre douleur au monde, mais aussi et surtout pour signifier à nos amis israéliens et au peuple juif, que nous avons fait le choix de la civilisation face à la barbarie, de la démocratie face au terrorisme, de l’humanité face à l’animalité, de la lumière face à l’obscurantisme ».
La députée a rendu compte de son voyage dans un « journal de bord » tenu heure par heure, dès le décollage. Elle y décrit sans fioriture les « 327 corps de femmes, hommes, enfants, vieillards, bébés, [qui] n’ont pas encore été identifiés car carbonisés, découpés en morceaux, fracassés à la hache, guillotinés. Des enfants retrouvés brûlés vifs enlacés, des femmes enceintes éventrées, des veilles femmes violées puis décapitées.[1]»
Journal de bord de la délégation parlementaire en Israël
Jour 2 – Tel Aviv 16h15 Etat-major de l’armée Nous sommes reçus par un colonel de réserve. Il n’arrive pas à comprendre ce qu’il s’est passé, son esprit n’admet pas l’horreur des atrocités, les massacres, tout demeure… pic.twitter.com/xeTw0repCz
Y avait-il besoin du témoignage de quelques députés français alors que 800 journalistes sont déjà basés à Jérusalem ? « Nous sommes députés », explique Yadan, « nous représentons la France. Nous sommes reçus comme tels et pouvons parler à des responsables. Nous pouvons agir ». Le Quai d’Orsay les avait prévenus avant leur départ : le moment n’était pas opportun, ils allaient courir du danger dans un environnement instable… Tout pour démotiver des ronds-de-cuir, rien pour ralentir des acteurs volontaristes de la société.
Samedi 28 octobre 2023, Madame Yadan est venue parler à quelques Français juifs. Causeur était là, au milieu de gens au cœur brisé par les supplices qu’endurent toujours leurs sept millions de frères et sœurs israéliens et inquiets pour leurs enfants ici, en France : en 2022, 436 faits antisémites avaient été recensés[2]. Entre le 7 et le 28 octobre 2023, plus de 800 actes avaient déjà été commis[3].
Que faire ?
Au moment des questions-réponses, « que faire » était sur toutes les lèvres. Que faire pour protéger les enfants, qui se font agresser à l’école ? Que faire pour les empêcher de culpabiliser quand les « copains » les accusent d’avoir « volé la terre des Palestiniens » ?
Que faire pour faire comprendre à nos concitoyens qu’Israël est un rempart contre une barbarie qui nous menace et nous a déjà endeuillés, à Toulouse (2012)[4], à Paris trois fois en 2015 : Charlie, l’Hyper Cacher et le Bataclan ; à Magnanville en 2016[5], à Nice sur la Promenade des Anglais en 2016, à St Etienne du Rouvray la même année[6], à Marseille (2017)[7], à Trèbes (2018) [8], au marché de Noël de Strasbourg en 2018, à la Préfecture de police de Paris en 2019[9], à Villejuif[10], à Romans sur Isère[11] et à Conflans Ste Honorine[12] en 2020, à Rambouillet en 2021[13], à Arras, cette année…
Des pistes
Caroline Yadan est députée avant tout, avocate de formation et légaliste de constitution. Les réponses qu’elle apporte aux inquiétudes de ses interlocuteurs sont cachères, halal et républicaines. La première, évidemment, est « adressez-vous à votre député : il vous représente et il est votre intermédiaire vis-à-vis de l’État. »
« Impossible ! » L’exclamation a jailli, alors que le vieux monsieur n’avait même pas demandé la parole. « Impossible : j’habite chez Mathilde Panot ! » Rire nerveux de l’assistance. Puis prise de conscience : dans la patrie des droits de l’Homme, aujourd’hui en 2023, un citoyen juif ne peut pas demander d’aide à son député.
« Alors, il faut parler au maire, ou au député d’une autre circonscription », reprend Caroline Yadan, qui enchaîne sur la proposition de loi qu’elle veut porter à l’Assemblée sur la protection des enfants palestiniens contre l’incitation à l’antisémitisme. Ils en sont imprégnés dès le CP, à travers les manuels scolaires financés par l’Union européenne. « On leur apprend à compter les cercueils des combattants martyrs et les balles nécessaires pour tuer les Juifs. Jamais on ne pourra parler de paix tant qu’on leur enseignera la guerre et la haine ! »
Le conflit ne crée pas l’antisémitisme, il lui sert de prétexte
Même en France, les enfants entendent les mantras sur l’apartheid, la colonisation ou le génocide contre les Palestiniens. Pour contrer ces accusations, il n’y a que les faits. Malheureusement, ils sont impuissants, quand les jeunes ont déjà été abreuvés à la désinformation : dans le pays accusé d’apartheid, les victimes ont eu un parti au gouvernement jusqu’en novembre 2022. Dans le pays que les Juifs d’aujourd’hui sont accusés de coloniser, toutes les fouilles archéologiques mettent à jour les vestiges de leurs ancêtres. Dans le pays accusé de génocide, le nombre des « génocidés » a été mulitplié par plus de dix depuis que leur « génocideur » est aux manettes. « IL-FAUT-LE-FAIRE-SA-VOIR ! », scande Caroline Yadan sous les applaudissements.
Attiré par les dithyrambes de la presse et la présence au scénario de Fabrice Caro, notre chroniqueur, qui est resté un grand enfant, s’est procuré le dernier Astérix, l’Iris blanc. Catastrophe et désolation: sa lecture ne laisse rien passer.
À la copie, toujours préférer l’original. Vous n’achèteriez pas une copie de la Joconde exécutée au Louvre par un étudiant en beaux-arts chinois, n’est-ce pas — aussi adroits que soient les artistes chinois dans l’art de la copie… Eh bien, il en est de même ici.
J’avais quelque espoir : Fabcaro, de son vrai nom Fabrice Caro, est un bon scénariste, et un romancier fort drôle, j’avais l’année dernière salué ici son Samouraï. Tout ce qu’il en reste, c’est cet iris dont il tire son titre — et qui est le prénom de l’une de ses filles.
Pourquoi diable un iris ? Le personnage qui en tire sa philosophie, un certain Vicévertus (les auteurs ignorent-ils qu’il n’y a pas d’accent en latin ?) enseigne le développement personnel, la pensée positive et la macrobiotique — alors que l’iris est une fleur louche, dotée d’un rhizome qui a fourni à Deleuze et Guattari, dans Mille plateaux (1980), la métaphore d’un réseau infini, sous-jacent à l’individu, un pas de plus dans la déconstruction du sujet cartésien.
L’intrigue tient donc à cela : un fomenteur de paix frelatée et de douceur molle est envoyé par César dans le village gaulois pour y propager la bonne parole post-moderne. Un postulat séduisant, dont le scénariste ne fait pas grand-chose, sinon inventer à chaque image des sentences supposées dulcifiantes : « Un triomphe sans risque est un triomphe orphelin », assène-t-il à César (le seul personnage que le dessinateur, Didier Conrad, a radicalement raté). Et à Bonemine, qui se languit comme d’habitude au village pendant que son frère fait une belle carrière à Lutèce : « Qu’importe d’être devant si ton âme, elle, reste derrière », dit-il, après l’avoir rassurée : « Tu émanes, tu irradies… »
Tu irradies rose, sans doute. Ah, combien profonde ma nostalgie des jeux de mots superbement foireux de Goscinny ! Rappelez-vous, dans Astérix en Hispanie : « Chaque année les Ibères deviennent plus rudes… » Nous étions écroulés…
Le plus problématique, c’est que ces formules imbéciles sont si près de celles des adeptes de la pensée liquide que le second degré est peu perceptible. Certes, cela crée un léger décalage par rapport au Ier siècle av. JC, mais ça sonne comme une transposition pure des propos actuels des bobos qui ne se déplacent pas sans leur coach de vie et votent Anne Hidalgo.
Alors, vérifiez que vous avez toute la vieille collection des Astérix originaux, ou rachetez-les avant qu’ils ne disparaissent : cela ne m’étonnerait pas que l’on juge rapidement qu’Astérix chez les Goths est assez peu germanophile (Goscinny avait des excuses, trois de ses oncles, juifs ashkénazes comme ses parents, avaient disparu dans les camps de Pithiviers et Auschwitz), et que Falbala offre une vision de la femme qui pue le male gaze, comme on dit chez les crétins qui pensent bien. Déjà que le gros pirate noir, qui parle le latin avec un léger accent occultant les -r- (« O tempo’a, o mo’es ! », dit-il dans Astérix en Corse, citant Cicéron que nous avions traduit en version latine, ce qui accentuait le comique de la formule), fait l’objet de critiques virulentes des wokes de garde…
Notre chroniqueur, expert en langue et cultures françaises, a écouté en son entier le long discours d’Emmanuel Macron célébrant l’ouverture de la Cité Internationale de la Langue française à Villers-Cotterêts, où en 1539 François Ier imposa le français comme langue du droit français. Le moins que l’on puisse dire est que cet exercice un peu scolaire l’a laissé dubitatif — mais pas totalement hostile.
Personne ne saurait m’accuser de servir la soupe au chef de l’État, moi qui dès 2017 ait appelé à voter contre lui. Mais je dois reconnaître que cet ex-apprenti-comédien se débrouille très bien dans ces exercices de parole en public, surtout dans le genre commémoratif. Peu après son entrée en fonction, au mois de juin, il avait réussi à Oradour un beau discours (écrit par Sylvain Fort, qui lui servait alors de nègre de luxe) que j’avais salué en son temps — réserves comprises.
La longue performance de lundi était de la même veine. Le chef de l’État n’a pas manqué d’utiliser la géographie très centrale de la ville de naissance d’Alexandre Dumas, au cœur du Valois, pour saluer par cercles successifs Racine, La Fontaine, Rabelais et Marot (auquel on doit l’infernale règle d’accord du participe conjugué avec avoir avec le COD antéposé), tous liés à la ville ou à François Ier, tous exemples remarquables de l’excellence de la langue française. Il y a rajouté Molière, qui a effectivement joué Tartuffe pour le roi en cette ville en 1664, puis l’abbé Grégoire, qui pendant la Révolution se battit avec persévérance pour imposer une langue nationale : c’est de lui que procède à distance l’article 2 de la Constitution, rajouté en 1992 : « La langue de la République est le français ». Et pas le dialecte informe des banlieues.
Bonne copie
D’où les réflexions d’Emmanuel Macron sur cette langue française qui « bâtit l’unité de la nation » dont « elle est un ciment ». La France, a-t-il ajouté — et cela sentait un peu la bonne copie de première — est un « pays unifié par la langue » : c’est tout le sens de l’ordonnance de 1539. L’édit de François Ier tenait à la fois de la formalisation et de l’uniformisation, dans un royaume alors divisé en de multiples langues régionales, et en féodalités tout aussi diverses. Proclamer l’unité linguistique, c’était forger l’unité du royaume. Richelieu, en fondant un siècle plus tard l’Académie française, n’a pas d’autre projet : le français est la langue du roi, et la parler, c’est reconnaître la primauté royale. Je ne sais quel enseignant de seconde zone a conseillé au jeune Emmanuel de s’appuyer sur un discours historique avant d’arriver à l’essentiel, mais nous avons eu droit au rappel de la fondation de la IIIème République et de l’école de Jules Ferry : « La première mission demandée à nos enseignants, après 1870, c’est la langue française ». On sentait venir le grand écart et le lien entre cette période glorieuse et revancharde de la France et la situation actuelle.
Ça n’a pas manqué. Mais Macron est ce qu’il est — et c’est sans doute pour ça qu’il a raté l’ENS et s’est contenté de l’ENA : après avoir exalté l’uniformisation de la langue, il s’est lancé dans une série de « en même temps » bâtie sur des oppositions un peu faciles. Le français, a-t-il expliqué, est une langue « ductile et rigoureuse, souple et ordonnée — les oxymores manquent pour décrire les contrastes de cette langue qui résiste à toutes les étiquettes ». C’est qu’il fallait introduire les « génies pluriels » de cette langue française qui « nous rassemble dans notre unité et notre diversité ». Une langue « unie mais non pas excluante », « qui cohabite avec nos 72 langues régionales ». Tiens, il les a comptées…
C’était assez donner à la diversité. Le discours a basculé à nouveau, et le président a exhorté les Français à « garder les fondements, et à ne pas céder aux airs du temps ». Et de préciser — avoir l’air un peu grammairien, cela fait bon genre : « Dans cette langue le masculin fait le neutre, on n’a pas besoin d’y rajouter des points au milieu des mots, ou des tirets, ou des choses pour la rendre illisible ».
Bien sûr, c’est tout ce que les imbéciles bien-pensants ont retenu. « Emmanuel Macron s’est permis une critique sévère de la langue inclusive », s’indigne TF1. Et le sénateur socialiste Yan Chantrel de conclure : « C’est un texte inconstitutionnel, rétrograde et réactionnaire, qui s’inscrit dans un courant conservateur de longue date de lutte contre la visibilisation des femmes ». Il y a des gens qui ont voté pour un édile qui utilise des mots comme « visibilisation », et émet des stupidités de ce tonneau ? Cet homme a des collègues qui acceptent de lui serrer la main ? On n’éclate pas de rire à son passage ?
Lubies atterrantes
Soyons sérieux. L’écriture inclusive, qui ne peut pas s’articuler à l’oral (rappelez-vous Boileau : « Ce qui se conçoit, bien s’énonce clairement ») est une lubie de pseudo-grammairiens en quête de notoriété, et les universitaires ou les journalistes qui se plient à ces contraintes artificielles sont des imbéciles. Une femme est auteur, j’admets aussi autrice, mais en aucun cas elle est auteure : où avez-vous pris que le -e- muet était un signe de féminité ? Comme dans bite ou verge ? Où avez-vous pêché l’idée que la féminisation systématique faisait avancer la cause des femmes ? Vous appelez votre avocate « maîtresse », peut-être ? Mais nombre d’universitaires recrutées récemment exigent d’être appelées « maîtresses de conférence ». Et sous-maîtresse de bordel, ça vous chante ?
Quant aux nouveaux pronoms du genre « iel », ils n’existent que pour perdre un peu plus des enfants auxquels on renonce en même temps à apprendre l’orthographe et globalement la grammaire. Plutôt que de faire de jolis discours, Macron pourrait se soucier de révoquer les enseignants qui apprennent l’écriture inclusive à leurs élèves.
Il pourrait aussi se forcer à parler français, en privé. Il aurait pu protester, lorsqu’il lui fut donné de présider l’Union européenne, et refuser le coup d’État linguistique perpétré par Mme Ursula von der Leyen qui a fait de l’anglais la langue de travail unique de la Commission, de la Cour des Comptes et de la Cour de justice européennes. Évidemment, Bruxelles, c’est plus loin que Villers-Cotterêts.
Bien sûr, il faut revenir à Dumas, La Fontaine, Racine, Rabelais et les autres, tous les autres qui ont forgé l’unité de la culture française. Mais cela contrarie tant d’enseignants, persuadés qu’il faut « respecter » toutes les cultures, y compris celle du « Allah akbar ! » La proposition ces jours-ci de créer des cours de culture générale rencontre l’opposition des pédagos les plus convaincus, qui y voient« un concept, très clivant socialement mais très flou ».
Eh non, camarades, il n’y a qu’une culture en France, c’est celle de la bourgeoisie au pouvoir ! Et en refusant de l’apprendre à vos élèves, vous les condamnez au ghetto dans lequel ils sont nés, et où grâce à vous ils mourront. Mais évidemment, vos enfants, eux, sont préservés — et c’est bien l’essentiel, n’est-ce pas…
Éric Cantona, Juliette Binoche, Annie Ernaux, Rokhaya Diallo, Adèle Haenel, Jeanne Balibar, Swann Arlaud, Rohmane Bohringer, Robert Guédiguian et, bien entendu, l’inénarrable Guillaume Meurice, font partie des 93 personnalités ayant signé un « Appel du monde de la culture pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza », paru dans l’Humanité.
Si ces bonnes gens disent « avoir été horrifiées par les massacres du 7 octobre », pas une fois le mot « terroriste » n’est utilisé pour qualifier les actes du Hamas.
Y a-t-il encore une personne étonnée dans l’assistance ?
On a déjà entendu ça quelque part
Au contraire, un relativisme filandreux renvoie dos à dos l’organisation terroriste et l’État d’Israël en insistant toutefois sur les torts supposés de ce dernier : « Nous condamnons tous les crimes de guerre, ceux du Hamas et ceux du gouvernement israélien. [Les pogroms qu’ont subis les Israéliens sont au-delà des crimes de guerre ; ils relèvent de la plus abominable des barbaries, d’un effroyable crime contre l’humanité. Quels sont, en l’occurence, les crimes de guerre du gouvernement israélien ?] Nous pensons que l’oppression et le racisme, sous toutes leurs formes, sont un affront fait à notre humanité commune : il faut y mettre fin. Aujourd’hui, des décennies d’occupation privent les Palestiniens de leurs libertés et de leurs droits fondamentaux. [La bande de Gaza n’est plus « occupée » depuis 2005. Les seuls coupables de la privation de liberté des Palestiniens de Gaza sont les dirigeants du Hamas et leurs terrifiantes milices.] Déplacer des centaines de milliers de personnes de leur foyer – certaines pour la deuxième ou troisième fois – serait une nouvelle injustice catastrophique ; elle nous éloignerait, en prime, de la possibilité d’une paix juste et durable, de la sécurité pour les deux peuples. » [Le Hamas seul est responsable de cet état de fait. De plus, si les civils gazaouis sont avertis par l’armée israélienne des cibles qui vont être visées par ses missiles, le Hamas tente par tous les moyens de les empêcher de partir loin des zones meurtrières afin de les utiliser comme boucliers en espérant retourner l’opinion internationale lorsque, inévitablement, il y aura un grand nombre de victimes parmi eux.] Les signataires réclament la libération des otages et appellent « tout le monde au respect du droit international,qui interdit de porter atteinte aux civils – quel que soit le contexte ». Le Hamas étant et se comportant comme une organisation terroriste, cette dernière injonction ne peut être qu’à destination d’Israël, État démocratique dont on attend qu’il se comporte comme tel, en respectant les lois de la guerre définies par les instances internationales, ce qu’il fait en vérité.
Cet appel « pour la paix et la dignité pour tous les peuples » ne saurait faire oublier les sentiments de certains signataires vis-à-vis d’Israël. La mélenchoniste Annie Ernaux n’a jamais manqué de montrer sa détestation de l’État hébreu : appel au boycott de la saison culturelle France-Israël, à celui du Concours Eurovision de la chanson devant se dérouler à Tel Aviv, soutien au BDS (Boycott, désinvestissement et sanctions) visant spécifiquement Israël, etc. Idem pour Adèle Haenel qui milite maintenant dans un mouvement trotskyste, Révolution permanente, émanation du NPA ouvertement antisioniste, pour ne pas dire pire. On ne présente plus Rokhaya Diallo, antiraciste à la mode racialiste américaine, décolonialiste, toujours prompte à taper sur la France – comme Bertrand Badie, elle regrette que, au soir des attentats du 7 octobre, la Tour Eiffel n’ait été illuminée que par les couleurs du drapeau israélien et « sans mention des victimes palestiniennes […] dont les droits fondamentaux sont foulés au pied depuis des décennies », écrit-elle dans The Guardian, où elle ajoute : « L’accent mondial soudain mis sur le conflit israélo-palestinien depuis l’extrême violence du 7 octobre expose un autre type de violence: celle du silence et de l’invisibilité de l’oppression quotidienne à laquelle sont confrontés les civils palestiniens. Pendant des années, les organisations de défense des droits de l’homme ont décrit la bande de Gaza assiégée comme “une prison en plein air” ; son peuple, victime d’un “apartheid” ». Le géo-politicien en herbe Éric Cantona est de gauche et avoue avoir voté pour Hollande en 2012. En 2015, devant des lecteurs du Parisien, le King se disait prêt à accueillir un migrant chez lui en espérant que tous les Français fassent de même. « On va faire des guerres pour des raisons économiques, ensuite des gens fuient leur pays parce qu’on a foutu le bordel, et on n’est même pas capables de les recevoir chez nous », argumentait-il avec cette finesse analytique qui le caractérise. Le 17 octobre dernier, il tweete en zieutant sur la copie de Rokhaya Diallo : « “Palestine libre” signifie mettre fin à la mise en cage de 2,3 millions de Palestiniens se trouvant dans la plus grande prison en plein air du monde, dont la moitié sont des enfants. “Palestine libre” signifie mettre fin à l’apartheid imposé par le gouvernement israélien. “Palestine libre” signifie donner aux Palestiniens le contrôle des infrastructures sur leur terre. » Sur France Inter, Guillaume Meurice, toujours aussi inspiré, demande « à celles et ceux qui veulent t’obliger à choisir un camp pour t’enfermer dedans, d’aller se faire cuire le cul ! » – sachant que lui a choisi le sien depuis belle lurette. Quant à Juliette Binoche… disons simplement, pour ne pas être excessivement cruel, que la bisounourserie universelle et la moraline en tube ont trouvé leur égérie : « J’ai de la compassion pour les deux côtés parce qu’il y a de l’humain des deux côtés. La revanche, ce n’est pas la bonne solution. Où est la solution ? C’est au fond du cœur de chacun. Se dire qu’il y a un retournement possible. Dans nos pensées, dans nos paroles, il faut être le plus aimant possible. Et patient en espérant le meilleur », déclare-t-elle sur BFMTV en poussant moult soupirs pleurnichards.
Dans la foulée de cet appel paru dans ses colonnes, et après avoir déjà consacré de nombreux articles à la « cause palestinienne », le quotidien communiste a publié, jeudi 26 octobre, une Une bien débectante. Sur un fond sombre – un ciel noir, orageux dans lequel planent de menaçants avions ou drones – Yaël Braun-Pivet, Meyer Habib, Manuel Valls, Eric Ciotti et Jordan Bardella sont représentés entourés de ruines d’immeubles détruits par les bombes. Le titre, en gros : « Les inconditionnels de Netanyahou ». Le sous-titre : « Des personnalités françaises font bloc derrière Tel-Aviv en justifiant tout, y compris les crimes de guerre à Gaza au nom du “droit à se défendre”. » Sur CNews, dans l’émission Punchline, Éric Naulleau a dit son écœurement à la vue de cette Une de L’Humanité faisant « penser à Rivarol, journal d’extrême droite négationniste et antisémite » – le même Rivarol qui, dernièrement, a salué le « courage » d’un Jean-Luc Mélenchon refusant de « s’aligner inconditionnellement sur l’entité sioniste » – et Céline Pina a souligné à juste titre l’hypocrisie d’un parti communiste disant rompre avec Mélenchon tout en s’appropriant la même imagerie idéologique anti-israélienne frisant parfois l’antisémitisme.
Manifestations polémiques
Les masques tombent. Il faut dire qu’ils ne tenaient plus qu’à un fil. L’islamo-gauchisme teinté d’un antisionisme exacerbé cachant mal quelques relents antisémites continue d’envahir les rangs de la gauche et de l’extrême gauche. Tandis que les actes antisémites se multiplient en France, des élus de la République se pavanent dans les manifestations de soutien à la « cause palestinienne » soutenant en vérité le Hamas. Voyant cela, un grand nombre de jeunes Français de confession musulmane se sentent confortés dans leur préférence pour la charia contre les lois de la République. Ils se moquent de leurs grand-pères comme des kouffars – ils rangent naturellement dans cette dernière catégorie les idiots utiles à leur cause, les mélenchonistes et les écologistes qui subiront finalement le sort commun aux dhimmis.
Beaucoup de ces musulmans issus de l’immigration ancienne ou nouvelle ignorent l’histoire complexe du Proche-Orient – la « cause palestinienne » ne sert depuis longtemps qu’à agglomérer une haine antisémite enkystée dans le monde musulman, un ressentiment post-colonial savamment alimenté par des pays comme l’Algérie et une détestation de certaines mœurs occidentales. Nos artistes pétitionnaires, si soucieux du sort des Palestiniens en particulier et des migrants en général, ignorent qu’eux aussi sont qualifiés d’idiots utiles par les islamistes, salafistes et Frères musulmans qui œuvrent pour la disparition de l’État d’Israël et pour la déstabilisation et l’islamisation de l’Europe qu’ils considèrent être le ventre mou de l’Occident. Ces donneurs de leçons de morale n’ont toujours pas compris à qui ni à quoi ils ont affaire. Malheureusement, lorsqu’ils le comprendront, il sera trop tard – pour les éclairer sur le possible avenir qui les et nous attend, peut-être pouvons-nous leur conseiller de lire le roman de Michel Houellebecq, Soumission, et, tant qu’ils y seront, de jeter un œil sur celui de Jean Raspail, Le Camp des saints.
Figure de proue du nationalisme français, l’auteur des Déracinés était une autorité intellectuelle et sociale considérable, ce qui est un peu oublié aujourd’hui
La biographie de Maurice Barrès (1862-1923) que propose Emmanuel Godo fait partie de ces ouvrages imposants qui réclament de se couper du monde et de prendre quelques jours de congés pour en apprécier la subtilité. Au bout de 600 pages, le biographe et poète restitue l’importance de l’écrivain lorrain dans l’histoire littéraire française.
Prince (déchu) de la jeunesse
Pour se faire une idée de cette importance, il faut relire ce qu’en disait Aragon, en 1965 : « Et, au-delà des enthousiasmes de ma jeunesse (…), dans la mesure exacte où il faut prendre parti pour ou contre, quand on vient à avoir à choisir entre le roman politique ou la haine du roman politique, entre la reconnaissance de la vérité nationale et sa négation pure et simple, entre, non pas le matérialisme mécaniste et le matérialisme dialectique, mais le matérialisme quel qu’il soit et la condamnation théologique du matérialisme, et caetera, eh bien, oui, décidément, en ce sens, je me considère comme barrésien ». Et aussi Léopold Sédar Senghor : « J’avais beaucoup subi l’influence de Barrès. C’est curieux, Barrès m’a fait connaître et aimer la France, mais en même temps, il a renforcé en moi le sentiment de la négritude, en mettant l’accent sur la race, du moins la nation ». L’œuvre du Lorrain trônait en bonne place dans la bibliothèque de la Boisserie, à Colombey-les-deux-Eglises. Et pourtant, alors que les cent ans de sa mort se profile (il est décédé le 4 décembre 1923), l’écrivain a désormais mauvaise presse. Point d’adaptations du Roman de l’énergie nationale par le cinéma français ou la télévision soviétique, contrairement à la Comédie humaine.
L’écrivain Aurélien Bellanger, un peu vache, indiquait, sur la chaîne Youtube du Figaro1, en février 2023 : « Tous les écrivains, en 1900, ont été renversés par Barrès, qui ont trouvé Barrès immense, et quand on lit Barrès aujourd’hui, je ne dis pas que ça nous tombe des mains mais on a du mal à comprendre comment autant de gens aussi intelligents ont été bouleversés par Barrès ».
Roueries de jeune lion
Emmanuel Godo revient sur la construction de l’écrivain, en commençant par sa jeunesse lorraine, marquée par la défaite de 1870. Les années au collège, près de Nancy, sont austères et solitaires. Très jeune, le Lorrain exerce une fascination sur sa génération. À vingt-six ans, il publie Sous l’œil des Barbares et se fait élire député. Il est déjà le prince de la jeunesse. « M. Maurice Barrès a plus d’une fois fait froncer le sourcil aux personnes graves. Mais il a exercé sur beaucoup de jeunes gens une sorte de fascination. Il ne faut pas s’en étonner. Cet esprit si troublé, si malade, si perverti et gâté, comme nous l’avons dit, par ce que les théologiens appellent la malice, n’est certes ni sans grâce ni sans richesse. Il a présenté artistement une réelle détresse morale. Et cela lui a gagné des sympathies dans la jeunesse, cela lui a valu une sorte d’admiration tendre et mouillée », écrit Anatole France. Le plaisir aristocratique de déplaire n’est pas très loin.
En 1904, Barrès revient sur ses jeunes années : « Ceux qui ne connurent jamais l’ivresse de déplaire ne peuvent imaginer les divines satisfactions de ma vingt-cinquième année : j’ai scandalisé. Des gens se mettaient à cause de mes livres en fureur. Leur sottise me crevait de bonheur ».
Emmanuel Godo nuance quand même l’image d’un Barrès pitre de la jeunesse : « les anecdotiers et les biographes sans vision littéraire seront intarissables sur les frasques, les causticités de dandy, les roueries de jeune lion, mais ne verront pas que derrière cette théâtralité s’accomplit un travail sur soi qui est tout sauf cynique ».
Égaré en politique ?
Barrès entre aussi jeune dans l’arène politique qu’il est entré dans l’arène littéraire. À Nancy, il se fait élire député à gauche, ce qui n’est guère contradictoire à cette époque avec de premiers accents antisémites, répandus chez certains anciens communards. Siégeant à l’extrême gauche au Palais Bourbon, ça ne l’empêche pas, selon ses mots, d’être très à son aise « avec les vieux messieurs royalistes intransigeants qui croient à l’ordre fondé sur la tradition ». On peut se demander s’il ne s’est pas fourvoyé en politique, associant son nom pour toujours à l’effervescence boulangiste (mouvement venu pour une bonne part des rangs de la gauche de l’époque) puis, plus gênant encore, à la fièvre de l’antidreyfusisme. Il y a en effet un décalage entre le raffinement de l’œuvre littéraire et les mots d’ordre du parti boulangiste, « Dissolution, révision, constituante », qui rappellent un peu les revendications des gilets jaunes concernant le référendum d’initiative citoyenne.
En politique, Barrès s’inquiète alors de choses concrètes et fait partie des députés qui déposent un projet de loi (refusé) visant à instaurer une caisse de retraite pour les travailleurs. Emmanuel Godo ne veut pas voir en Maurice Barrès un écrivain égaré en politique ; pour lui, cet engagement a favorisé la création littéraire: à Boulanger, « Barrès sait ce qu’il doit : non seulement un premier engagement politique, mais plus profondément ce qu’il nomme la socialisation de son âme, c’est-à-dire la prise de conscience que l’écriture et l’action, la réflexion et l’engagement, le souci de soi et le sens de la collectivité peuvent s’articuler, se nourrir mutuellement ». Le garnement n’est jamais très loin malgré tout : « On est en droit de considérer que Barrès procède à l’une des lectures les plus justes de son engagement boulangiste lorsqu’il écrit tout simplement, en 1923, dans les notes préparatoires de ses Mémoires : »Comme je me suis amusé ! Il y avait bien de la fantaisie, de l’allégresse de jeunesse, l’idée d’embêter le pion, le philosophe, les grandes personnes » ».
De Jules Soury à Abraham Bloch
Et puis, il y a évidemment la question de l’antisémitisme. En pleine affaire Dreyfus, Barrès lâche : « Je n’ai pas besoin qu’on me dise pourquoi Dreyfus a trahi. En psychologie, il me suffit de savoir qu’il est capable de trahir et il me suffit de savoir qu’il a trahi. L’intervalle est rempli. Que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race ». Zeev Sternhell a voulu voir l’influence des cours de Jules Soury, que Barrès suit à l’Ecole pratique des hautes études, dans la constitution de la pensée nationaliste de l’écrivain lorrain, laquelle serait à l’origine des fascismes nés ici et là en Europe quelques décennies plus tard. Sorte de génie fou de la fin du XIXème siècle, mélangeant « méthode et extravagance », Soury, « une de ces créatures bizarres comme la science et l’intelligence en produisent souvent », n’est pas épargné par un fort antisémitisme. Pourtant, la bizarrerie de Soury n’échappe pas à Barrès. Emmanuel Godo relativise l’influence du savant sur l’écrivain.
Dans l’antisémitisme, Barrès vit surtout une grande passion en mesure de « transcende[r] les classes sociales ». Pendant la crise dreyfusienne, ses liens avec Léon Blum se distendent. C’est l’époque aussi où Barrès passe du rang de prince de la jeunesse à celle de figure tutélaire un peu pesante contre laquelle les nouveaux jeunes gens se construisent. Et pourtant, toujours pendant l’Affaire, Barrès voit aussi dans le camp d’en face (les dreyfusards) des forces qui mériteront d’être combinées aux siens lors d’un combat plus grand. En 1902, il écrit : « Eh ! je le sais qu’il faudrait incorporer dreyfusisme et antidreyfusisme dans un type supérieur ; qu’il faudrait sauver ce qu’il y a de chevaleresque français chez le dreyfusien de bonne foi ; qu’il faudrait systématiser cette double tendance, et puis coordonner, s’il est possible, ces éléments d’abord contradictoires dans un idéal commun ».
Le combat plus grand, il arriva : ce fut la Grande Guerre.
C’est dans Les diverses familles spirituelles de la France que l’on retrouve l’hommage à Abraham Bloch, l’aumônier israélite tué par un obus après avoir tendu un crucifix à un soldat mourant, et à la volonté d’appartenance des Juifs à la France manifestée durant toute la guerre.
A lire: « Maurice Barrès. Le grand inconnu. 1862-1923 » (Tallandier, 2023)
Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique, Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. « J’aime qu’on me contredise ! » pourrait être sa devise.
La mort a une odeur. Le 7 octobre, lors de l’attaque terroriste du Hamas, elle a eu celle d’un pogrom. Le 7 octobre, sur la terre de l’État d’Israël qui a été fondé pour que cela n’arrive plus, des juifs ont été éliminés en tant que juifs. Je n’ai pas mis beaucoup d’ardeur à discuter ce qui relève du « terrorisme » ou d’un « crime de guerre ». Des civils ont été tués, ce qui constitue un « crime de guerre », mais le Hamas n’est pas l’armée régulière des Palestiniens. Le Hamas est même l’ennemi de la cause palestinienne.
Des « résistants » ? Ma famille compte un fusillé, lors d’une opération de parachutage d’armes dans le sud de la Gironde, et un déporté : deux frères unis dans un même combat pour la patrie et la liberté. Ils n’ont jamais agi comme le Hamas…
Est-il acceptable de comparer les événements du 7 octobre avec les crimes du nazisme ? La même odeur ? Il suffit de lire les témoignages des personnes chargées de la reconnaissance des corps à la morgue de Shura pour prendre la dimension des exactions commises. Et d’écouter leur silence. L’indicible.
Ceux qui, à gauche – une partie de la France insoumise – tergiversent pour qualifier les crimes du Hamas, n’ont pas quitté le« champ républicain », mais celui de notre humanité commune. Par naïveté ?
L’imam de Bordeaux, Tareq Oubrou, rappelle que « s’attaquer à des civils est un acte terroriste contraire au droit international, mais aussi au droit canonique islamique.[…] Le Hamas, ce n’est ni la Palestine, ni les musulmans, ni même, d’ailleurs, les Arabes ! » Il dit la même chose que l’archevêque d’Alger, monseigneur Vasco, qui observe que« la violence du Hamas est sans excuse mais n’est pas sans cause ».
Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale de l’ONU vote la résolution 181, qui partage la Palestine du mandat britannique en deux États, un juif et un arabe.
Depuis, l’État palestinien n’a jamais vu le jour.L’espérance des accords d’Oslo de 1993 a été déchirée par l’alliance entre le Likoud de Benjamin Netanyahou et l’extrême droite israélienne, et parle Hamas dont le premier objectif est la destruction de l’État d’Israël. Netanyahou a joué le Hamas contre l’Autorité palestinienne. Israël est une grande démocratie, et à n’en pas douter, la future commission d’enquête sera intraitable envers l’actuel Premier ministre. Depuis les accords d’Abraham, on dirait que la question palestinienne est évacuée, sortie des radars politiques et diplomatiques, tout comme la solution à deux États.Les dirigeants arabes ont participé à cette opération lamentable. Depuis, la colonisation illégale et brutale de la Cisjordanie a été relancée pour rendre impraticable la création territoriale d’un État palestinien. Depuis, la France n’a plus été celle de de Gaulle, de Giscard, de Mitterrand et de Chirac.
Pour Jaurès, « il ne faut avoir aucun regret pour le passé, aucun remord pour le présent, et une confiance inébranlable pour l’avenir ».Le Proche-Orient peut aujourd’hui s’embraser. Mais quel autre chemin que celui d’une nouvelle espérance ? Il y a des Rabin en Israël et des Arafat en Palestine, ainsi que dans les prisons israéliennes. Il y a des forces vives pour un avenir commun entre la Méditerranée et le Jourdain : qu’elles s’avancent dans la nuit actuelle.
Le 7 octobre, le Hamas s’est livré à une bacchanale nazie version islamiste. Mais après ce crime contre l’humanité, on n’a pas vu l’humanité unie se dresser contre les meurtriers. Que faire alors quand l’internationale djihadiste, du Hamas à Arras, met sous tension les sociétés ouvertes ? Dans son introduction à notre dossier spécial, Elisabeth Lévy est sans ambages : « L’urgence, pour nous, est de mener le combat idéologique. Contre les islamistes et peut-être plus encore contre leurs alliés insoumis et extrême-gauchistes ». Selon l’analyse de Gil Mihaely, l’offensive sanguinaire du Hamas a révélé les failles de l’armée et du renseignement israéliens. Son onde de choc secoue la société israélienne et bouscule les équilibres fragiles de la région. Toute perspective de sortie de crise suppose au préalable un changement politique en Israël. Gilles Kepel, à qui l’on doit les concepts de « mouvements islamistes », d’« islamo-gauchisme » et de « djihadisme d’atmosphère », raconte à Élisabeth Lévy et Jean-Baptiste Roques comment il a été poussé à la retraite au moment où les phénomènes qu’il décrit depuis quarante ans redoublent de gravité. Pour l’historien Georges Bensoussan, qui se confie à Gil Mihaely, la guerre menée par le Hamas contre Israël représente, par sa dimension islamique et djihadiste, l’offensive de tous ceux qui haïssent l’Occident, et les juifs. Cet antisémitisme mondialisé est un marqueur dans la guerre, froide celle-ci, qui oppose la Chine et la Russie au bloc libéral. L’anthropologue Fadila Maaroufi, dont les propos ont été recueillis par Céline Pina, déplore l’ambiguïté d’une grande partie de la population arabo-musulmane de France. Elle l’explique par l’islamisme d’atmosphère dans lequel beaucoup vivent. Si, pour le sociologue Tarik Yildiz, les crimes du Hamas n’ont pas suscité d’explosions de joie dans nos banlieues, c’est parce que la négation a remplacé la justification : la rumeur d’images manipulées par Israël s’est vite répandue. Pierre Vermeren dresse le contraste entre un Occident occidental multiculturel, ouvert à la « diversité », et des pays musulmans qui imposent par la force l’homogénéisation ethnoreligieuse de leur société. Driss Ghali regrette que l’attaque du Hamas sur Israël ait donné un coup d’arrêt à la normalisation des relations entre Israël et le Maroc, mais croit encore à la possibilité du rapprochement.
Notre numéro de novembre est disponible aujourd’hui sur le site, et demain mercredi chez votre marchand de journaux !
L’ancien préfet Michel Aubouin témoigne de la manière dont le terrorisme profite de cette mécanique incontrôlable qui permet à la majorité des migrants clandestins de demeurer sur notre sol. Se montrant incapable de dénoncer le terrorisme du Hamas, Jean-Luc Mélenchon place ses alliés dans une situation intenable. Céline Pina se demande si le Hamas ne sera pas le fossoyeur de la Nupes. Si Cyril Bennasar pleure sur les victimes du Hamas, qui rappellent toutes les victimes juives de l’histoire, il pleure aussi du bonheur d’être juif à l’époque de l’Armée de défense d’Israël, d’« être juif au temps de TSAHAL ».
Dans son édito du mois, Elisabeth Lévy s’interroge sur le choix de Thomas Jolly pour mettre en scène les cérémonies d’ouverture et de fermeture des JO, lui qui croit que Shakespeare et Britney Spears sa valent. Pendant la guerre des civilisations actuelle, Festivus (le nom donné par Philippe Muray au spécimen humain de l’âge post-historique) continue ses saccages. Dans sa chronique, Olivier Dartigolles explique pourquoi le Hamas est l’ennemi, non seulement d’Israël et de l’Occident, mais aussi de la cause palestinienne. Dans la sienne, Ivan Rioufol souligne les mensonges et les lâchetés de tous nos dirigeants depuis 20 ans devant tout ce qui menace notre civilisation. Pour Paul Rafin, le pape François souhaite convertir l’Église à la foi progressiste. Il envisage de bénir des couples LGBTQ+, divorcés ou polygames, et de reconnaître le mariage des prêtres, l’ordination des femmes… Au risque de diviser une communauté en perte de fidèles. L’intelligence artificielle signe-t-elle la fin de l’intelligence humaine ? Pas pour tout le monde, selon le philosophe Olivier Rey. En Occident, la population tend à se diviser en deux groupes inégaux : ceux qui savent penser sans IA, et les autres… Gabriel Attal veut lutter contre le harcèlement à l’école par des « cours d’empathie ». Mais Françoise Bonardel explique que l’empathie est un apprentissage culturel, une vertu dont la transmission revient davantage aux parents.
Côté culture,Yannis Ezziadi se penche sur Le Consentement (l’adaptation cinématographique du livre de Vanessa Springora) où Jean-Paul Rouve campe un grossier prédateur sexuel à mi-chemin entre Nosferatu et Hannibal Lecter. L’acteur n’a rien compris à Gabriel Matzneff et il en est fier. Un ratage exemplaire ! Georgia Ray a visité deux expositions parisiennes prêchant l’habituel discours culpabilisateur envers les Européens et l’art occidental. Pour trouver mieux, elle a dû aller à Milan ! Jonathan Siksou a lu le livre de Didier Rykner, Notre-Dame. Une affaire d’État, qui démontre que si nos politiques n’étaient pas si négligents et incompétents, le drame de l’incendie de la cathédrale aurait pu être évité. Pour ceux qui en ont marre de taper sur un clavier et qui trouvent qu’écrire demeure un acte à part méritant ce qu’il y a de plus précieux, Emmanuel Tresmontant a pris de chemin de Plume & Bille, où les résistants trouveront des stylos exceptionnels. Envie d’aller au cinéma au mois de novembre ? Jean Chauvet vous recommande le film d’un octogénaire, Marco Bellocchio, et la rétrospective des 11 longs-métrages d’un disparu, Sacha Guitry. En revanche, il faut éviter le film d’une jeune, La Tresse de Laetitia Colombani, empreint d’une bienveillance et d’un hyperféminisme niaiseux à souhait. Décidément, la jeunesse est un naufrage !
Quoi de vraiment neuf et de définitivement admirable sur les écrans de novembre ? Bellocchio et Guitry ! Un octogénaire et un disparu ! La jeunesse se charge, elle, de faire des films de vieux en arpentant les terres de la bienveillance et de l’hyperféminisme niaiseux à souhait. Heureusement, le cinéma en a vu d’autres…
Bellocchio, toujours
L’Enlèvement, de Marco Bellocchio Sortie le 1er novembre
À 83 ans passés, le fringant cinéaste italien Marco Bellocchio prouve si besoin était qu’il demeure le maestro incontestable du cinéma transalpin. Dernier représentant du 7e art d’avant Berlusconi, c’est-à-dire d’avant la catastrophe, il illumine le cinéma d’aujourd’hui avec des films d’une ampleur absolue. Il nous avait laissés avec Le Traître, cet incroyable portrait d’un mafieux repenti, sorte d’opéra noir sidérant et d’une totale maîtrise scénaristique et stylistique. En mai dernier, il est revenu bredouille de Cannes avec son nouveau film, L’Enlèvement. Énième et désolante preuve qu’il ne faut pas confier à un jury composé de professionnels du cinéma qui ne vont jamais au… cinéma le reste de l’année, la tâche délicate de repérer les pépites dans une série de propositions plus ou moins inspirées. L’essentiel est heureusement ailleurs : le film du maestro Bellocchio sort sur les écrans français et chacun pourra en apprécier l’ambition.
L’histoire (vraie) que nous raconte le cinéaste se déroule en 1858 dans le quartier juif de Bologne, alors encore sous domination papale. Une nuit, une escouade de soldats pontificaux débarque sans prévenir au domicile de l’honorable famille Mortara. Ils sont venus prendre Edgardo, leur fils de 7 ans qui, bébé, aurait été baptisé en secret par sa nourrice. Or, la loi de l’Église est indiscutable : cet enfant doit recevoir une éducation catholique. Les parents du petit garçon, soutenus par l’opinion publique de l’Italie libérale et par la communauté juive internationale, vont tout tenter pour récupérer leur fils. Rapidement, l’affaire prend une tournure politique brûlante. Alors qu’il connaît une perte d’influence, Pie IX refuse catégoriquement de faire machine arrière. Cette histoire est d’autant plus fascinante qu’Edgardo, littéralement rééduqué par les prêtres pour extirper sa culture juive de naissance, restera fidèle à l’Église apostolique et romaine ; jusqu’à devenir prêtre lui-même, dans une incroyable conformité à cette vie redessinée, et jusqu’à tenter de convertir sa propre famille qui n’a pas voulu renier la religion juive ! Comme s’il était atteint d’une sorte de syndrome de Stockholm avant la lettre, il ne renoncera jamais à ce « deuxième père » que le pape est devenu pour lui. De même, il ne se résoudra jamais au fait que sa mère reste juive jusqu’à la mort. Incroyable destinée qu’aucun scénariste de fiction n’aurait pu imaginer tant elle est complexe, paradoxale, brutale et source d’interrogations.
Bellocchio dépeint avec infiniment de finesse et de précision cette Italie du « pape-roi » qui, en train de perdre la partie politique, essaie un dernier coup de poker avec cet enlèvement scandaleux : réponse ultraviolente et désespérée d’un pouvoir tentant de résister à son effondrement programmé. Le cinéaste excelle une fois encore dans la reconstitution du passé national, comme il l’avait fait avec Vincere.
Il convient d’ajouter que sort au même moment sur les écrans son dernier documentaire, Marx peut attendre, réalisé en 2021. Une nouvelle contribution, ici très intime, au portrait de l’Italie des années de plomb que ne cesse de peaufiner Bellocchio au sein de sa filmographie. Ce nouvel opus accompagne le magnifique long métrage de cinéma Buongiorno, notte et de la fabuleuse série télé découverte l’an passé sur Arte, Esterno notte, tous deux centrés sur le décryptage de l’enlèvement et de l’assassinat d’Aldo Moro. Décidément, ce brillant octogénaire sert mieux que quiconque le 7e art !
Guitry, sans cesse
Donne-moi tes yeux (1943) Les Acacias
Le Génie Guitry Sortie le 1er novembre
Le Génie Guitry : le slogan n’est pas volé ! Il plane sur les onze films du cinéaste surdoué que fut Sacha Guitry qui ressortent en salles. Onze films dont Le Roman d’un tricheur, Faisons un rêve et La Poison, pour ne citer qu’eux. Dans un texte rédigé pour l’occasion, Nicolas Pariser, auteur, entre autres, du délicieux Alice et le Maire, écrit fort judicieusement : « À une époque, la nôtre, où les scénarios (et notamment ceux des séries) sont architecturés de manière si technique, si rigide, le cinéma de Sacha Guitry est une véritable cure de jouvence, un antidote au formatage des scénarios en béton écrits avant tout pour convaincre les commissions de financement et les chaînes de télévision. » C’est en effet sa liberté de ton, de mouvement et sa maestria qui font du cinéma de Guitry un trésor national qu’il convient de préserver. Du plaisir à l’état pur qu’il faut découvrir ou redécouvrir sur grand écran. C’est le moment.
Concernant l’hyperféminisme niaiseux à souhait, retrouvez notre critique de La Tresse, de Laetitia Colombani, en salles le 29 novembre, P77 de votre magazine, en kiosques demain mercredi, et dès à présent dans le kiosque numérique. Ou plus tard dans le mois, sur le site Causeur.fr
Alors que les sénateurs votaient hier une loi pour encadrer la détestable « écriture inclusive », le président Macron a fait mine d’exalter notre langue en inaugurant la Cité internationale de la langue française…
Le château s’appelait Mon Plaisir. Il est situé dans l’Aisne. François Ier y venait souvent. C’était un rendez-vous de chasse. C’est là qu’il signa, en 1539, l’Ordonnance de Villers-Cotterêts, premier texte politique toujours en vigueur, qui fonde l’unité du royaume sur la langue française. De ce château tombé en ruines, Macron décida de faire le fleuron de son règne, en le restaurant. Ce « rêve fou » qui coûta 210 millions d’euros, cette « utopie devenue réalité par la force de la volonté », s’appelle donc désormais la Cité internationale de la langue française. Le président Macron l’inaugura hier.
Le président attendu sur l’écriture inclusive
Ne boudons pas notre plaisir à l’écoute d’un discours qui rappela que notre langue est le ciment de notre nation et caractérisa son génie. Attendu sur l’écriture inclusive, le président la « tacla » comme dirent aussitôt les médias, tout en rappelant la nécessité des fondamentaux, de la dictée et de l’apprentissage de l’orthographe, de la grammaire et de la syntaxe. Nul doute que le nouveau ministre de l’Education nationale, Gabriel Attal, très attentif, en fera son miel toutes fleurs. De cela on ne peut que féliciter l’orateur même si le problème de l’inclusive qui gangrène notre langue ne se contentera pas de la remarque du prince sur le caractère non discriminant du genre grammatical : ce serait oublier la circulaire Blanquer et la déclaration d’Edouard Philippe restées, en leur temps, sans effet. Alors que la solution pourtant en est simple : faire appliquer l’ordonnance !
Le discours développa ensuite les lieux communs de la francophonie d’une langue ouverte sur la vocation « à se répandre » dans le temps et l’espace, capable de relever les défis linguistiques de la modernité, en particulier ceux posés par l’IA. C’est là que Macron dégaina une autre ordonnance, celle de Montpellier, faite toute exprès pour notre temps, en 1537, par François Ier ! (Le lecteur ira voir). Tout était donc pour le mieux dans le meilleur des mondes français et francophone possible, dans ce lieu d’exception qui accueillerait les professeurs, les écoliers, les artistes, les traducteurs et qui ne manquerait pas d’attirer le monde entier en devenant « un lieu où on penserait les mots » : un lieu d’attractions et de rencontres. Enfilant des perles, Macron tenait les auditeurs sous son charme tout en rappelant aux crispés que le français n’était pas une langue repliée sur elle-même mais une langue qui n’hésite pas à prendre son bien dans les autres langues, même à leur « voler » des mots. Non pas hégémonique mais destinée à vivre avec les autres avec, pour horizon, le métissage cher à Erik Orsenna. Et Emmanuel Macron d’élargir son rêve devenu réalité, grâce aux traductions d’un Balzac en arabe, pour le bonheur de lecteurs inconnus. Nous étions revenus au bon vieux temps de Senghor. Une époque où notre langue était aimée, libre, vivace, féconde, et la francophonie respectée et encouragée. Une époque où l’anglais ne colonisait pas notre espace public et nos institutions, en violation constante de la loi Toubon. Une époque où le président d’une puissance non anglophone ne s’exprimait pas, à l’étranger, régulièrement en anglais.
Une longue liste de forfaitures
Sur le site CERMF, dirigé par Ilyes Zouari, auteur d’un dictionnaire de la francophonie, on peut lire un article prouvant, en douze points, l’hostilité inédite des autorités françaises vis-à-vis de la francophonie, depuis 20071 : l’anglicisation planifiée de la langue, sa soumission à l’atlantisme et aux européistes. Que ce soit les titres uniquement en anglais, One Ocean Sumnit (Brest, février 2022) et le Forum de Paris sur la paix (novembre 2022) où fut interdit l’usage du français, ou encore le site gouvernemental Make our Planet great again (2017) avec interdiction du site en français, la création d’un Parquet et d’une Cour des compte européens en anglais, la correspondance, en anglais, entre le gouvernement français et l’UE, l’usage croissant de l’anglais en Afrique francophone sans traduction française… Citer toutes ces forfaitures serait trop long.
Face à ces réalités accablantes, le discours du président Macron a été entendu par certains comme un « tombeau littéraire ». Ou bien un Requiem. Une pavane pour une infante défunte. Laissons plutôt le dernier mot à un Académicien devenu— quel bonheur !— bien frondeur, qui, dans le Figaro Vox du 30 octobre, a qualifié Macron de « Tartuffe de la langue française à Villers-Cotterêts-City »2. Pour mémoire, rappelons que c’est en ce château que Molière fit représenter son Tartuffe pour la première fois.
Félicitations à la police nationale, parvenue à maitriser la femme qui inquiétait les usagers des transports en commun!
Les chaines d’information en continu, déjà sur le qui-vive compte tenu de l’actualité internationale, ont vite affiché leurs bandeaux spéciaux.
À Paris, un incident grave vient de se produire ce matin, au cours duquel la police a ouvert le feu sur une femme intégralement voilée, rapporte l’AFP. La femme, qui proférait des menaces et des « Allahou Akbar » dans un train du RER C – ce cri de paix bien connu, selon certains politiciens d’extrême gauche – a été grièvement blessée et conduite à l’hôpital. Selon les autorités, l’islamiste a refusé de se conformer aux ordres des policiers et est allée jusqu’à menacer de se faire exploser ! Un policier lui a répondu en tirant un coup de feu, causant des blessures graves. Le pronostic vital de la femme serait en jeu. Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, a confirmé que la femme portait un voile intégral islamiste, ce qui est interdit depuis 2010, a dit que les policiers étaient munis de caméras, lesquelles seront utiles à l’enquête, et que la femme avait déjà été condamnée par le passé pour des propos tenus à l’encontre de la force Sentinelle.
L’incident a commencé lorsque des passagers ont alerté la police, signalant la présence d’une femme portant un voile et proférant des menaces à bord d’un train du RER C circulant dans le Val-de-Marne. Les forces de l’ordre ont réussi à l’isoler, à la station Bibliothèque François-Mitterrand, qui a été rapidement évacuée. Malgré les injonctions des policiers, la femme a persisté dans ses menaces, ce qui a conduit à l’utilisation de la force.
🔴 Les faits se sont déroulés à la station Bibliothèque François Mitterrand, ce mardi matin. L’alerte est venue d’un usager d’une rame de transport qui a signalé le comportement d’une femme qui proférait des menaces, précise une source policière. → https://t.co/NeUcPBPtyFpic.twitter.com/HLZ8UQTM2t
Deux enquêtes ont été ouvertes pour faire la lumière sur cet incident. La première enquête, menée par la police judiciaire parisienne, concerne des accusations d’apologie du terrorisme, de menaces de mort et d’actes d’intimidation envers les représentants de l’autorité publique. La seconde enquête, confiée à l’inspection générale de la police nationale, examinera le recours à l’arme à feu par le policier, conformément à la procédure standard dans de tels cas.
L’incident survient alors que le conflit entre Israël et le Hamas a des répercussions inquiétantes dans le monde entier (voir notre numéro en vente ce jour), et dans un contexte de fortes tensions communautaristes. Suite à l’attentat islamiste contre le professeur d’Arras, Dominique Bernard, la France a décidé d’élever le niveau de son plan Vigipirate à son seuil le plus élevé : «urgence attentat», sur tout le territoire national. Sur CNews, notre contributrice Céline Pina affirmait, à midi : « Les policiers ont bien fait de tirer (…), mais on sent monter une atmosphère d’absence de concorde civile, d’envie d’en découdre… »
Les réactions politiques seront regardées de près par nombre d’observateurs.
Caroline Yadan, ici photogrpahiée dans le 17e arrondissement, est députée de la 3e circonscription de Paris. D.R.
Samedi, la députée Caroline Yadan (Renaissance) était rue Copernic, à Paris, pour écouter les doléances des Français juifs, une communauté très inquiète. Liliane Messika est allée écouter.
Caroline Yadan est un spécimen rare. La députée du XVIIIe arrondissement n’a pas besoin de transitionner chimiquement ou chirurgicalement pour être un homme, un vrai : elle dit ce qu’elle voit et elle fait ce qu’elle dit.
Premier voyage parlementaire dans le pays martyr
Le 15 octobre 2023, une semaine après la série de pogromes infligée par le Hamas à des civils juifs dans l’État juif, un groupe de parlementaires français s’est rendu sur place pour témoigner sa solidarité aux victimes et affirmer son soutien à la seule démocratie du Moyen-Orient. Ils partirent à dix, dont Manuel Valls et Caroline Yadan et revinrent bouleversés. Et déterminés à faire savoir, contre les vents et les marées de la désinformation islamo-gauchiste. Ce voyage ? Caroline Yadan l’a décrit comme « une nécessité pour dire notre douleur au monde, mais aussi et surtout pour signifier à nos amis israéliens et au peuple juif, que nous avons fait le choix de la civilisation face à la barbarie, de la démocratie face au terrorisme, de l’humanité face à l’animalité, de la lumière face à l’obscurantisme ».
La députée a rendu compte de son voyage dans un « journal de bord » tenu heure par heure, dès le décollage. Elle y décrit sans fioriture les « 327 corps de femmes, hommes, enfants, vieillards, bébés, [qui] n’ont pas encore été identifiés car carbonisés, découpés en morceaux, fracassés à la hache, guillotinés. Des enfants retrouvés brûlés vifs enlacés, des femmes enceintes éventrées, des veilles femmes violées puis décapitées.[1]»
Journal de bord de la délégation parlementaire en Israël
Jour 2 – Tel Aviv 16h15 Etat-major de l’armée Nous sommes reçus par un colonel de réserve. Il n’arrive pas à comprendre ce qu’il s’est passé, son esprit n’admet pas l’horreur des atrocités, les massacres, tout demeure… pic.twitter.com/xeTw0repCz
Y avait-il besoin du témoignage de quelques députés français alors que 800 journalistes sont déjà basés à Jérusalem ? « Nous sommes députés », explique Yadan, « nous représentons la France. Nous sommes reçus comme tels et pouvons parler à des responsables. Nous pouvons agir ». Le Quai d’Orsay les avait prévenus avant leur départ : le moment n’était pas opportun, ils allaient courir du danger dans un environnement instable… Tout pour démotiver des ronds-de-cuir, rien pour ralentir des acteurs volontaristes de la société.
Samedi 28 octobre 2023, Madame Yadan est venue parler à quelques Français juifs. Causeur était là, au milieu de gens au cœur brisé par les supplices qu’endurent toujours leurs sept millions de frères et sœurs israéliens et inquiets pour leurs enfants ici, en France : en 2022, 436 faits antisémites avaient été recensés[2]. Entre le 7 et le 28 octobre 2023, plus de 800 actes avaient déjà été commis[3].
Que faire ?
Au moment des questions-réponses, « que faire » était sur toutes les lèvres. Que faire pour protéger les enfants, qui se font agresser à l’école ? Que faire pour les empêcher de culpabiliser quand les « copains » les accusent d’avoir « volé la terre des Palestiniens » ?
Que faire pour faire comprendre à nos concitoyens qu’Israël est un rempart contre une barbarie qui nous menace et nous a déjà endeuillés, à Toulouse (2012)[4], à Paris trois fois en 2015 : Charlie, l’Hyper Cacher et le Bataclan ; à Magnanville en 2016[5], à Nice sur la Promenade des Anglais en 2016, à St Etienne du Rouvray la même année[6], à Marseille (2017)[7], à Trèbes (2018) [8], au marché de Noël de Strasbourg en 2018, à la Préfecture de police de Paris en 2019[9], à Villejuif[10], à Romans sur Isère[11] et à Conflans Ste Honorine[12] en 2020, à Rambouillet en 2021[13], à Arras, cette année…
Des pistes
Caroline Yadan est députée avant tout, avocate de formation et légaliste de constitution. Les réponses qu’elle apporte aux inquiétudes de ses interlocuteurs sont cachères, halal et républicaines. La première, évidemment, est « adressez-vous à votre député : il vous représente et il est votre intermédiaire vis-à-vis de l’État. »
« Impossible ! » L’exclamation a jailli, alors que le vieux monsieur n’avait même pas demandé la parole. « Impossible : j’habite chez Mathilde Panot ! » Rire nerveux de l’assistance. Puis prise de conscience : dans la patrie des droits de l’Homme, aujourd’hui en 2023, un citoyen juif ne peut pas demander d’aide à son député.
« Alors, il faut parler au maire, ou au député d’une autre circonscription », reprend Caroline Yadan, qui enchaîne sur la proposition de loi qu’elle veut porter à l’Assemblée sur la protection des enfants palestiniens contre l’incitation à l’antisémitisme. Ils en sont imprégnés dès le CP, à travers les manuels scolaires financés par l’Union européenne. « On leur apprend à compter les cercueils des combattants martyrs et les balles nécessaires pour tuer les Juifs. Jamais on ne pourra parler de paix tant qu’on leur enseignera la guerre et la haine ! »
Le conflit ne crée pas l’antisémitisme, il lui sert de prétexte
Même en France, les enfants entendent les mantras sur l’apartheid, la colonisation ou le génocide contre les Palestiniens. Pour contrer ces accusations, il n’y a que les faits. Malheureusement, ils sont impuissants, quand les jeunes ont déjà été abreuvés à la désinformation : dans le pays accusé d’apartheid, les victimes ont eu un parti au gouvernement jusqu’en novembre 2022. Dans le pays que les Juifs d’aujourd’hui sont accusés de coloniser, toutes les fouilles archéologiques mettent à jour les vestiges de leurs ancêtres. Dans le pays accusé de génocide, le nombre des « génocidés » a été mulitplié par plus de dix depuis que leur « génocideur » est aux manettes. « IL-FAUT-LE-FAIRE-SA-VOIR ! », scande Caroline Yadan sous les applaudissements.