Un peu partout en France, on déboulonne les statues. Comment se fait-il que, dans la ville de Dijon, la statue de Jean-Philippe Rameau soit toujours debout ? Rameau, le raciste, avec ses Indes Galantes ? Lors de l’affrontement de bandes, tchétchène et ottomane, j’écoutais l’air de La danse dite des Sauvages, longtemps l’indicatif d’une émission de Radio Classique. Je relisais, dans la République des Lettres, le chapitre que Marc Fumaroli consacre à Dijon et au président de Brosses, quand on annonça la mort de l’Académicien. En écrivant cet article, j’entends rendre un hommage modeste à Marc Fumaroli, à travers quelques figures marquantes de cette ville de Dijon qui fut, à tous égards, représentative de la République des Lettres que l’Académicien habita toute sa vie.
À moins d’être un Barbare, Jean-Philippe Rameau, natif de Dijon, est impossible à déboulonner. Persuadé de la convergence entre les sciences et les arts, il fonde sa musique sur les règles rigoureuses de l’harmonie. Le résultat ? Des œuvres – pas seulement les Indes Galantes – surprenantes de jeunesse et d’humour qui respirent le bonheur. Le Président de Brosses, lui, est un juriste, un historien et un mélomane éminents. Fils d’une grande famille parlementaire de Bourgogne, ses amis sont le président Bouhier, Diderot et Voltaire, et surtout Buffon, l’ami intime. Avant leur brouille, Voltaire, « le philosophe papillon », qui mettra des bâtons dans les roues à l’entrée, à l’Académie, de Charles de Brosses, disait de son ami qu’il était « fils de cette ville de Dijon où le mérite de l’esprit semble être un des caractères des citoyens. » C’est de Brosses, en effet, qui rédigera l’article Gamme dans l’Encyclopédie. C’est de Brosses qui, lors de son voyage en Italie, en achetant, de ses deniers, la première édition de la Serva Padrona de Pergolèse, introduira, en France, la musique italienne. C’est également à de Brosses que l’on doit la paternité des noms Polynésie et Australasie. Quant à François Rude, l’auteur du haut-relief, la Marseillaise, placé sous l’Arc de Triomphe, est représenté, dans un jardin de sa ville natale, tenant une petite Marianne dans la main. Espérons qu’il ne lui arrive rien. Dijon, c’est enfin la moutarde qui nous monte au nez en ce moment. Si la moutarde remonte au XVIème siècle et qu’elle n’est pas certifiée d’origine protégée, c’est bien une famille dijonnaise du XVIIIème siècle, les Naigeon, qui lui donna ses lettres de noblesse. On me dit de ne pas oublier le kir dont Dijon s’enorgueillit, du nom du chanoine Kir.
Né à Marseille, Marc Fumaroli, consacre, dans La République des Lettres, un chapitre au président de Brosses, au joyau que sont « Les Lettres familières d’Italie » écrites en 1739, « au style abondant et vivace. » Les modernes Descartes et Fontenelle auraient-ils fait, dans l’esprit de Brosses, le voyage en Italie ? « Leur esprit d’analyse n’avait cure de la mémoire, de la culture littéraire et gratuite. » De Brosses, lui, scientifique et juriste, humaniste et érudit, unit à un savoir immense un charme badin. Fumaroli compare le « je » de ses lettres à celui de Montaigne, « ouvert à l’enthousiasme comme à l’ironie… pour qui la littérature, c’est d’abord cette ruche d’abeilles lettrées où il peut être lui-même heureux, avant de convier son lecteur à partager avec lui son gâteau de miel ». Qui le connaît, à présent, ce grand magistrat et ce polygraphe qui alla, sur les pas de Salluste et enquêta, in situ, sur une ville, enfouie sous les cendres du Vésuve ? Ces lettres italiennes que Marc Fumaroli préfaça, aux éditions André Versaille éditeur, on y apprend mille choses, sous une plume curieuse, vive, ironique : elles ont un charme inégalé que n’ont pas les voyages convenus des contemporains. À notre époque, la scission est consommée entre sciences et littérature : les « sciences humaines » règnent en maître.
La République des Lettres a-t-elle disparu ?
Avec l’Encyclopédie, dit Marc Fumaroli, une ère nouvelle s’ouvrait où « la liberté de ton du président de Brosses et l’esprit d’indépendance n’auraient pas été admises. C’est le temps où tout le monde s’oppose à tout le monde : le roi aux parlements, la cour aux philosophes. De cette République, Voltaire lui-même fait « un parti d’opposition et de combat ». On dirait à présent que tout est politisé. Belle leçon de modernité !
« Et in Arcadia ego. » Marc Fumaroli aura une place à son nom, comme Jacqueline de Romilly en a une, rue de la Montagne Sainte-Geneviève, devant le café, enfin réouvert : « La Méthode ». Mais les commémorations ne consolent pas. A-t-elle disparu, cette société de savants lettrés dont Marc Fumaroli a fait partie ? Non pas « ce petit échiquier parisien », avec ses centaines de romans ou d’essais annuels, mais cette République des Lettres, européenne, cultivée, érudite sans pédanterie, éprise et jalouse de liberté ?
Le grand historien et politologue israélien, Zeev Sternhell, fin connaisseur de l’histoire des idées politiques françaises, et, par ailleurs, co-fondateur du mouvement « La Paix maintenant » vient de mourir. Il avait 85 ans.
À la fois « archisioniste » (au nom de quoi les Juifs n’auraient-ils pas le droit, comme tous les peuples, à l’autodétermination ?), de gauche (mais désenchanté au vu de la déliquescence et des trahisons de celle-ci), totalement laïc (grand admirateur de la laïcité française), et radicalement opposé aux implantations juives en Cisjordanie, Zeev Sternhell fut souvent conspué par la droite israélienne, jusqu’à avoir été victime d’un attentat terroriste perpétré par un Juif américain, mais qui ne le blessa que légèrement.
Un livre très critiqué
Avec son livre Ni droite ni gauche – L’idéologie fasciste en France (Le Seuil, 1983), dans lequel il s’oppose à la vision « sciences-po » qui considère le fascisme comme « un phénomène d’importation étranger », Zeev Sternhell avait fait scandale en France.
Et c’est « grâce » à ce scandale que je suis devenu l’éditeur de son livre.
En effet, trois ans après la parution de Ni droite ni gauche, mon ami Pierre Assouline (qui savait que j’avais publié en « poche » le magnifique Barrès et le nationalisme français du même Sternhell) m’appelle. Il me demande si j’ai lu Ni droite ni gauche. Je lui réponds par l’affirmative. Il me demande ce que j’en pense. Je lui dis que je l’ai trouvé tout à fait stimulant. Serais-je prêt à le publier en version de poche chez Complexe, ma maison d’édition ? Je lui réponds qu’il ne peut en être question puisque Le Seuil possède sa propre collection de poche. « Non, le Seuil ne le rééditera pas », m’affirme Pierre. Il m’explique que la polémique suscitée par le livre dans le milieu de Science-Po et de l’Institut d’Études Politiques (l’IEP) est telle que le Seuil a renoncé à poursuivre sa commercialisation, et que les autres grands éditeurs d’Histoire n’ont pas désiré le rependre. « Zeev sera à Paris la semaine prochaine. Si le bouquin t’intéresse, viens donc dîner à la maison, tu pourras le rencontrer. »
« Les autres grands éditeurs d’Histoire n’ont pas désiré reprendre le livre… » Cette phrase me poursuit quelque temps.
Complexe devait beaucoup à l’IEP et à Sciences-po d’où était parti la controverse. Si la maison avait pris son essor, c’était grâce à la confiance de nombre de leurs enseignants et de leurs chercheurs qui nous avaient offert de publier leurs ouvrages : René Rémond, président de Sciences po à l’époque, Alfred Grosser, Hélène Carrère d’Encausse de l’IEP, sans parler de mes amis Serge Berstein et Pierre Milza directeur de Sciences po, qui fondèrent et dirigèrent la collection « Questions au XXe siècle », fleuron de Complexe, et tant d’autres…
Mais décidé à rencontrer Sternhell, ne fut-ce que pour faire la connaissance d’un historien que j’admirais, je le retrouvai la semaine suivante chez notre Amphitryon de Pierre.
Le courant entre Zeev et moi passa très bien. De manière générale, je n’aime pas beaucoup l’intransigeance, mais chez lui, elle me plut, tant elle me sembla être le fruit d’une incontestable éthique. Je le reverrais plusieurs fois, lors de certains de ses passages à Paris, ou à l’occasion de mes voyages en Israël, et toujours avec même plaisir et le même intérêt.
Querelles d’historiens
Zeev en voulait à Michel Winock, à l’époque éditeur du département d’histoire au Seuil, d’avoir été déloyal avec lui en publiant un article dans Le Débat où il contestait assez radicalement sa thèse. Assouline précise que l’éditeur historien avait affirmé que Sternhell l’avait « libéré de ses obligations envers lui », et pour preuve, avait publié dans une annexe de sa réédition en poche de Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, la lettre de Sternhell du 15 avril 1983 qui en témoignait.
Un éditeur historien a parfaitement le droit de ne pas partager les analyses de certains de ses auteurs et même de les contester publiquement. Cela fait partie du débat. Pour autant, il est bien gênant que l’historien contestataire, usant de son pouvoir discrétionnaire d’éditeur, décide en même temps de ne pas poursuivre l’édition d’un livre qui de surcroît n’est nullement un échec commercial, bien au contraire…
Je m’engage donc à rééditer Ni droite ni gauche dans les meilleurs délais.
Cependant, étant donné que plusieurs historiens lui avaient fait le reproche d’avoir tronqué des citations ou de les avoir sorti de leurs contextes, nous nous mettons d’accord que dans cette réédition, les contextes seraient restitués et les citations complétées. Faut-il préciser que ces précisions n’invalidèrent en rien l’analyse présentée ?
Ce que l’on critiquait surtout, c’était la focalisation de Zeev sur les idées des intellectuels qu’il incriminait, et de ne pas tenir compte des contextes historiques qui pouvaient expliquer bien des positions. Ce n’était pas faux, mais ne pouvait-on pas reprocher à tant d’historiens de souvent négliger les idéologues ? Barrès, Maurras – ou, plus près de nous, Sartre, n’ont-ils pas eu une importance et une responsabilité capitale dans l’engagement de tant de militants ? Et si nous remontons le temps, Robespierre n’a-t-il pas fait état de ce qu’il devait – ou croyait devoir à Rousseau ?
Un livre extraordinaire
Le deuxième blâme concernait la définition du fascisme. Zeev Sternhell privilégiait l’approche idéologique : le fascisme comme nouvelle culture qui bannit tant le libéralisme que le communisme, mais considéré de manière extensive au point d’y inclure des mouvements autoritaires, conservateurs, monarchistes ou globalement antidémocratiques que les historiens français refusaient d’amalgamer sans nuance au fascisme.
Rentré, il me restait à annoncer cette prochaine parution à plusieurs historiens et politologues, conseillers éditoriaux réguliers de Complexe.
Je me souviens qu’Alfred Grosser (parmi d’autres) m’avait demandé si je partageais la thèse de Sternhell. Je lui avais répondu que j’avais déjà publié plusieurs ouvrages d’historiens dont je ne partageais nullement les analyses, et que la question que j’avais l’habitude de me poser était plutôt de savoir si le livre apportait ou non une contribution intéressante au débat. Si c’était le cas, je n’hésitais pas à l’éditer.
Cette réponse n’avait pas convaincu tous mes interlocuteurs, mais aucun ne m’en avait voulu.
En 1990, Le Monde plaçait Ni droite ni gauche dans la liste des « quarante livres pour une décennie ». Aux États-Unis, Saül Friedlander parla de « livre extraordinaire » (The New Republic) et Robert Wohl nota que « peu nombreux sont les livres récents consacrés à l’histoire de l’Europe qui aient provoqué un choc et une controverse comparables » (Journal of Modern History).
En 2000, soit treize ans après la parution de notre première édition de Ni droite ni gauche, Fayard nous rachètera les droits pour une publication en grand format ; douze ans plus tard encore (les éditions Complexe ayant été rachetées par le groupe Vilo, et moi-même ayant quitté la maison), Ni droite ni gauche sera édité chez Gallimard dans sa collection de poche « Folio ».
Alors que la majorité présidentielle essuyait une cuisante défaite aux élections municipales, Brune Poirson s’est emportée à la télévision.
Les élections municipales 2020 sont un échec cuisant pour le parti majoritaire LREM avec une déroute électorale doublée d’un taux de participation historiquement bas, reflétant toute la défiance des électeurs vis-à-vis de la classe politique. Aussi, la performance de Brune Poirson ne va pas arranger l’affaire.
Invitée sur CNEWS pour commenter les résultats de l’élection dimanche 28 juin, un débat musclé s’engage entre la Secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire et le député RN Sébastien Chenu. Brune Poirson tente alors de reprendre la parole et lâche : « En fait, j’aurais dû venir avec une paire de couilles et la poser sur la table. Comme ça, peut-être que j’aurais eu le droit de parler ! »
Subtilité
On se rappelle des déclarations de Gilles Le Gendre qui nous expliquait, en 2018 : « Deuxième erreur, dont nous portons tous la responsabilité – moi y compris, je ne me pose pas en censeur : c’est le fait d’avoir probablement été trop intelligents, trop subtils… ». Le chef de file des députés LREM pourra donc féliciter la Secrétaire d’Etat de ne pas avoir usé de trop de subtilité. C’est bien le moins.
Mais quelle mouche a donc piqué Poirson ? Il faut dire qu’elle n’avait pas grand-chose à dire. Et quoi qu’elle dise, on aurait de toute façon vite oublié ses propos. Avec sa « paire de couilles », elle pourrait rester dans les annales. Madame Poirson, de par sa fonction à l’écologie, est à la pointe sur la question du recyclage et de la gestion des déchets, et tient à le faire savoir en étalant son langage ordurier.
Laurence Ferrari recadre la péroreuse
Le véritable problème est que Brune Poirson a des difficultés à prendre la parole sur le plateau de télévision. Alors elle opte pour la solution de facilité: la victimisation. C’est parce qu’elle est une femme qu’on ne la laisse pas parler. Il fallait y penser : il faut être sévèrement burné pour avoir le droit de s’exprimer. Sauf que le féminisme victimaire ne marche pas à tous les coups. Même Laurence Ferrari est excédée : « Non, mais arrêtez de me faire le coup de la femme qui ne peut pas parler… C’est bon ! »
Brune Poirson démontre que l’on peut avoir à la fois un look BCBG et jurer comme un charretier. C’est sans doute ça le « en même temps » macronien. On en vient à regretter que Jean-Marie Bigard ne se lance pas vraiment en politique. Face à Brune Poirson, il aurait relevé le niveau.
Suite à sa lourde condamnation, le couple Fillon a décidé de faire appel. Le Tribunal correctionnel est-il qualifié pour juger de l’emploi des fonds attribués à un parlementaire ? Les explications de Maître Stanislas François.
L’indépendance de la Justice signifie deux choses. D’une part, qu’elle le soit réellement, d’autre part, qu’elle montre les apparences de cette indépendance, en somme, qu’elle ne laisse pas prise au soupçon.
Alors, en 2017, on pouvait légitimement s’insurger qu’une affaire judiciaire survienne en pleine période électorale et que fût opportunément mis en examen, deux jours avant dépôt des candidatures à la présidence de la République, l’un des protagonistes de l’élection.
Aujourd’hui en 2020, nous ne pouvons que saluer la sagesse du Tribunal correctionnel d’avoir attendu le lendemain des élections municipales pour rendre son verdict afin que l’affaire Fillon ne parasite pas de nouveau le débat électoral.
Le Tribunal correctionnel aura donc suivi les réquisitions du Parquet : cinq ans de prison dont trois avec sursis, 375 000 euros d’amende et 10 ans d’inéligibilité pour François Fillon. 3 ans avec sursis 375 000 euros d’amende pour Pénélope Fillon, son épouse et ancienne assistante parlementaire.
On ne pourra pas reprocher au juge d’avoir rendu une décision politique. Assurément elle ne l’est pas, quand bien même elle a nécessairement des retentissements politiques, parce que le mis en cause, François Fillon est une personnalité publique et parce que les faits reprochés (l’emploi de son épouse) mettent en cause le fonctionnement d’une institution politique, l’Assemblée nationale.
Pour autant, la décision rendue en droit n’est pas évidente et elle amène deux interrogations. La première sur la qualification retenue par le juge, celle de détournement de fonds publics et, la seconde, sur le caractère intrusif de l’appréciation des faits qui met nécessairement en jeu les limites du principe de la séparation des pouvoirs.
Sur le détournement de fonds publics
Au sens de l’article R. 432-15 du code pénal, un détournement de fonds publics correspond à la situation dans laquelle « une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, un comptable public ou l’un de ses subordonnés » détruit, détourne ou soustrait un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés qui lui ont été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission.
À l’inverse d’autres dispositions du code pénal, par exemple celles sur la prise illégale d’intérêt, l’article R. 432-15 ne renvoie pas à la définition de « personnes investies d’un mandat électif public » et la qualification de « personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public » est en principe réservée aux personnes qui exercent sous l’autorité du pouvoir exécutif. Ainsi, l’application du délit de détournement de fonds publics à un parlementaire pouvait poser question.
Ce n’est que par une décision du 27 juin 2018 que la Cour de cassation a tranché ce point, reconnaissant qu’un député, parce qu’il avait pour rôle d’exercer une fonction ou d’accomplir des actes dont la finalité était de satisfaire à un intérêt public, pouvait être considéré comme « personne chargée d’une mission de service public » et donc, se rendre coupable de détournement de fonds publics. On pourra alors toujours regretter l’empressement incroyable qui fut celui du Parquet en 2017 qui décida, en pleine période électorale, de poursuivre l’un des protagonistes principaux sur le fondement d’une infraction dont l’application à un parlementaire n’aura été précisée qu’un an plus tard.
Sur la séparation des pouvoirs
Et quand bien même le parlementaire est effectivement concerné par la qualification de détournement de fonds publics, peut-on vraiment considérer que des fonds publics ont été détournés ? Les fonds publics en cause sont ceux versés par l’Assemblée nationale à un parlementaire pour l’emploi d’un de ses collaborateurs. Et ils ont effectivement été versés par le parlementaire à l’emploi d’une collaboratrice, son épouse. Au-delà des soupçons légitimes de népotisme que l’emploi d’une personne de sa famille impliquent, se poser la question de l’existence d’un détournement, c’est réfléchir à ce que doit être, en principe, l’emploi de ces fonds, versés par l’Assemblée nationale à un parlementaire pour l’emploi d’un collaborateur.
Chaque parlementaire dispose d’un crédit. Le parlementaire conclut avec son collaborateur un contrat de droit privé dans lequel le parlementaire définit librement l’organisation du travail et les tâches dévolues à son collaborateur. Aucun texte ne précise ni l’organisation ni le contenu de l’emploi de collaborateur parlementaire, celui-ci peut correspondre ainsi à différentes réalités : rédiger des discours, gérer un agenda, tenir des permanences, rédiger des notes, brumiser les jambes de son député, participer à des événements etc.
Être collaborateur parlementaire, c’est donc exercer une activité politique associée à un mandat électif. Ainsi, reprocher à Madame Fillon de n’avoir rien fait, rechercher si l’emploi de collaborateur était ou non fictif, c’est donc nécessairement se poser la question de ce qu’est un emploi de collaborateur. Le fait qu’un juge se pose cette question renvoie au principe de la séparation des pouvoirs, c’est-à-dire l’immixtion du pouvoir judiciaire dans le pouvoir législatif. Ce principe de séparation des pouvoirs implique par exemple en France l’existence même du juge administratif. C’est le Conseil d’État qui juge le pouvoir exécutif et non l’autorité judiciaire.
En principe, le contrôle des activités professionnelles incompatibles avec le mandat parlementaire appartient au bureau de l’Assemblée nationale et seul le pouvoir législatif lui-même est compétent pour apprécier et évaluer le travail d’un collaborateur parlementaire. Ce n’est pas le travail du juge.
En 2019, la Cour de Justice de l’Union européenne avait demandé à Marine Le Pen de procéder au remboursement de 300 000 euros pour avoir rémunéré des cadres du Front national avec des fonds destinés à l’emploi de collaborateurs parlementaires. Si la Justice s’est ainsi prononcée, c’est parce qu’elle avait été saisie par le Parlement européen qui, lui-même, avait reconnu l’irrégularité de l’emploi des fonds publics. Rien de comparable donc dans l’affaire Fillon où l’Assemblée nationale n’a jamais bronché pour l’emploi des fonds versés à Madame Fillon. Au risque de heurter le principe de séparation des pouvoirs, le Tribunal correctionnel s’est livré à cet exercice.
Les époux Fillon ont donc interjeté appel, alléguant notamment la méconnaissance de ce principe.
Des liens apparaissent entre le collectif « Palestine Vaincra » et l’organisation terroriste FPLP. Jusqu’à quand laissera-t-on faire? Une manifestation est prévue à Toulouse, le 1er juillet prochain.
Quelques semaines après qu’Oliver Varhelyi – Commissaire européen à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage – se soit engagé à faire la lumière sur les financements des ONG pro-palestiniennes affiliées à des groupes terroristes et, le cas échéant, à y mettre un terme, l’UE annulait, le 12 juin dernier, une subvention d’1.7 millions d’euros à l’ONG palestinienne BADIL laquelle refusait de signer la clause « anti-terreur » de l’UE.
Peu avant, le 10 juin, la société de paiement en ligne PayPal fermait le compte du « Collectif Palestine Vaincra », une organisation française pro-BDS. Bien que le soutien à BDS soit à lui seul une raison suffisante de s’en éloigner compte tenu de l’antisémitisme que traine cette nébuleuse, c’est en raison de ses liens avec l’organisation terroriste FPLP, que le « Collectif Palestine Vaincra » s’est vu fermer son compte PayPal.
D’inquiétantes relations
Des relations qui n’étonneront personne puisque ce collectif « Palestine Vaincra » est la continuation du groupuscule « Coup pour Coup 31 », auto-dissous en mars 2019, lequel s’était déjà distingué par son soutien sans faille au FPLP en faisant le panégyrique du terroriste Wadie Haddad, en célébrant les 50 ans de l’organisation terroriste ou en se rendant au Liban à l’invitation de cette dernière.
Lorsque la convergence des luttes inclut les groupes terroristes, il faut espérer que l’émotion ne dépasse pas cette fois les règles juridiques
Tout récemment, l’étroitesse des relations entre ce collectif et le FPLP a été révélée par leur communication croisée sur leurs sites internet respectifs. Ainsi le FPLP apparaît sur le site internet du collectif comme l’un de ses partenaires aux côtés d’autres organisations palestiniennes elles-mêmes liées ou affiliées au groupe terroriste (l’UAWC, Addameer, l’UHWC) et plus inquiétant encore peut-être, le FPLP fait lui-même la promotion du collectif « Palestine Vaincra » sur son propre site internet et relaie les informations sur les manifestations organisées à Toulouse, notamment le 1er juillet prochain comme en témoignent les photos ci-dessous.
Captures d’écran
Sans surprise, ce collectif soutient la libération de Georges Ibrahim Abdallah (FPLP, FARL) condamné à perpétuité pour complicité d’assassinats, et Ahmed Saadat (chef du FPLP) condamné à trente années de prison, et appelle à libérer « toute la Palestine de la mer au Jourdain », ce qui est une litote pour appeler à la destruction de l’État d’Israël.
La mince frontière entre antisionisme et antisémitisme
Voilà une illustration de plus de la perméabilité entre des organisations pro-palestiniennes et des groupes terroristes qui n’ont jamais renoncé à la destruction de l’État d’Israël ni à la haine des Juifs. Pour mémoire, c’est le FPLP, avec des membres de la bande à Baader, qui, en 1976, a détourné vers Entebbe, le vol Tel Aviv-Paris d’Air France. Pendant cette prise d’otages, le FPLP a séparé les otages juifs, et non seulement les Israéliens, des autres passagers. C’est au FPLP-OS qu’est attribué l’attentat de la synagogue de la rue Copernic le 3 octobre 1980. C’est encore le FPLP qui a revendiqué un attentat dans une synagogue à Jérusalem en 2014. Lorsque l’on cible des Juifs pour atteindre Israël, preuve est faite que l’antisionisme et l’antisémitisme se confondent.
Qu’on ne se méprenne pas, ce mouvement de boycott des produits israéliens ne souhaite pas la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël mais bien à la place de l’État hébreu.
Son objectif est un État prétendument binational dont la population palestinienne, démographiquement plus performante, aura tôt fait d’absorber la population juive faisant disparaître – de facto et de jure – le seul État Juif de la planète.
Indignation sélective
Ce mouvement ne lutte pas pour les Palestiniens mais contre Israël. On ne voit pas de manifestations contre le jumelage de Aix-en-Provence et Baalbek au Liban alors que les Palestiniens y sont largement discriminés ou contre celui de Dunkerque et Gaza alors que le Hamas y torture ses opposants politiques et jette les homosexuels du haut des toits. On n’a pas souvenir de manifestation contre le régime d’Assad et contre Daesh quand les palestiniens de Yarmouk étaient décimés pendant la guerre civile. Pas plus pour dénoncer l’assassinat sous la torture de 617 Palestiniens dont 34 femmes par le régime syrien depuis 2011. Si ces morts palestiniens ne soulèvent pas d’indignation c’est parce qu’Israël n’est pas concerné.
En laissant ces manifestations se dérouler dans l’espace public, c’est aussi le FPLP – un groupe pourtant placé sur la liste officielle des organisations terroristes de l’UE – que l’État laisse manifester et s’ancrer un peu plus dans la vie associative française. En soutenant le collectif « Palestine Vaincra » ou la fondation Secours Rouge Toulouse qui s’inscrit dans « un mouvement unique anticapitaliste, anti-impérialiste, antifasciste, visant à renverser ce système d’exploitation et d’oppression », le FPLP déploie son soft power en France depuis plus d’un an sans que cela ne semble émouvoir le gouvernement.
Lorsque la convergence des luttes inclut les groupes terroristes, il faut espérer que l’émotion ne dépasse pas cette fois les règles juridiques.
Engagé dans une folle course aux entrées, le château de Versailles ploie depuis des années sous le poids du nihilisme touristique. Il aura fallu l’irruption d’un virus pour que ce joyau soit rendu aux Versaillais.
Pendant le confinement, les moments de grâce se sont multipliés au pied du château de Versailles. En haut de la rue des Réservoirs, entre le théâtre inauguré en 1777 par la sulfureuse Mademoiselle Montansier, et qui porte à présent son nom, et la chapelle royale recouverte d’une bâche en trompe-l’œil car en restauration, les riverains ont pu assister à des bagarres de chats au bon milieu de la chaussée, ouvrir grand les fenêtres – pour ceux qui, vivant au rez-de-chaussée, sont privés de ce plaisir en temps normal – et, enfin, écouter le silence, seulement interrompu par les trilles et trémolos des oiseaux. On a observé des biches aux alentours de la pièce d’eau des Suisses. La terminaison en cul-de-sac du boulevard de la Reine, d’habitude investie pas des Parisiens et pique-niqueurs venus des banlieues, a pris l’allure d’un terrain de jeu où on distinguait nettement les familles en train d’abuser gentiment de l’autorisation de sortie d’une heure. Face au Trianon Palace, les enfants jouaient au foot comme dans un village. Charlotte, 50 ans, Versaillaise de souche, verse une larme. Il y a vingt ans, rappelle-t-elle, le bosquet de la Reine était réservé aux Versaillais, qui aimaient y emmener leurs enfants. Le projet de l’ouverture de cette partie du parc du château aux touristes avait même provoqué des manifestations – restées sans effet. Désormais, comme tout le monde, les Versaillais doivent payer pour y accéder. Et si, jusque dans les années 1990, il était difficile, faute d’établissements, de se restaurer à Versailles, le provincialisme contribuait à préserver cet entre-soi dont personne ne semble se plaindre ici et que l’on retrouve provisoirement à l’abri de frontières fermées.
Ce qui a mis fin à cette douce quiétude, c’est évidemment le tourisme. L’afflux ininterrompu observé ces dernières décennies inspire des cris d’exaspération aux habitants. « Versailles aux Versaillais ! » Si 80 % des visiteurs sont de nationalité étrangère, ce sont les Chinois débarqués de leurs autocars (premier contingent national avec 11 % des entrées en 2015) qui aimantent la colère des autochtones. Seraient-ils victimes de préjugés ?
Le château de Versailles a dépassé la barre des 8 millions de visiteurs en 2018
Aristote distinguait entre le pléthos et le démos : d’un côté, une masse grégaire, inculte, sinon bestiale, et de l’autre, l’agrégat des consciences unies dans l’amour de la liberté et de l’ordre. Les Versaillais, qui se fient à ce qu’ils observent au quotidien plutôt qu’aux études de marché, éprouvent au quotidien cette antique distinction. En effet, selon Atout France (Agence de développement touristique de la France), un touriste chinois moyen affiche un profil socioprofessionnel élevé ; il est jeune, citadin, généreux dans les dépenses de luxe, mais aussi très soucieux de découvrir le patrimoine culturel français. Cela n’adoucit guère les jugements des riverains. « Quel bonheur de ne plus les voir improviser les toilettes devant ma fenêtre ! » lâche Charlotte, irritée. Son voisin grogne contre les boutiques de produits détaxés dont les habitants ne profitent pas, tout en étant obligés de supporter les attroupements bruyants de la clientèle chinoise, friande de nos parfums et valises à roulettes haut de gamme : « Regardez, tout est écrit en chinois ! Ma foi, on se croirait à Canton ! » On est loin de la grande passion chinoise pour la France, avec son romantisme – certes, stéréotypé par ce que Walter Lippmann appelait « des images dans les têtes » –, sa richesse artistique et sa gastronomie. D’ailleurs, on ne croise presque jamais ces Chinois dans les commerces et les restaurants de la ville, sauf dans ceux qui leur sont réservés. Cependant, ils ne sont pas les seuls à snober, faute de temps et d’informations, la ville, ses marchés, ses épiceries fines – et ne parlons pas des musées. Selon les chiffres avancés par la mairie en 2013, à peine 8 % des touristes flânaient dans le quartier Saint-Louis et 5 % dans celui de Notre-Dame. « On voit de plus en plus d’étrangers, mais ce sont des touristes individuels, pas les Chinois qui ont trois jours pour visiter toute l’Europe. Alors, ceux-là ne nous manquent pas », ironise Alain, traiteur installé dans les halles du marché Notre-Dame.
Tous ceux qui vivent à proximité des sites hyper fréquentés de France partagent le sentiment de dépossession de leur territoire qu’éprouvent les Versaillais, et que la géographe Maïe Gérardot décrit comme « une situation dans laquelle le rythme du touriste est dominant, organisant et structurant le lieu, transformant son esprit et excluant les autres rythmes ». Quiconque a essayé de traverser la magnifique place d’Armes, devant le château, transformée en gigantesque parking pendant la haute saison, ou tenté de prendre le RER entre Versailles-Château-Rive gauche et Paris pendant les heures de fermeture du château (quand les trains sont rares) s’en souvient longtemps.
Or, s’il désole les habitants, le succès phénoménal de « l’entreprise de saccage festif », heureuse formule de Philippe Muray pour décrire le tourisme de masse, est considéré par les administrateurs du château comme une éclatante victoire qu’il convient de prolonger et d’intensifier sans relâche. Toute leur énergie est dirigée vers un seul objectif, faire progresser la fréquentation, déjà très excessive : le château de Versailles a dépassé pour la première fois la barre des 8 millions de visiteurs en 2018, dans la droite ligne d’une année touristique record pour les monuments franciliens, qui ont vu passer 50 millions de visiteurs. Catherine Pégard, reconduite à la présidence du château, a été chaudement félicitée pour le redressement de la billetterie après la chute due aux attentats de 2015.
Cependant, on a quelques raisons d’espérer que le coronavirus et les mesures sanitaires qu’il impose mettent un terme provisoire à la folle course aux entrées dans laquelle sont engagés les grands musées et sites français, tous rêvant d’égaler le Louvre et ses 10 millions d’amateurs de selfies devant LaJoconde.
Aude de Kerros, critique d’art et auteur de Art contemporain, manipulation et géopolitique : chronique d’une domination économique et culturelle (Eyrolles, 2019), table audacieusement sur la fin de l’utopie du global. « Personne ne voyagera plus, si c’est pour voir ce qu’on trouve partout », nous assure-t-elle. La tonitruante opération de séduction du public, lancée sous la présidence de Jean-Jacques Aillagon (2007 à 2011) et qui consiste à « sortir Versailles du cliché » en l’ouvrant notamment aux artistes contemporains les plus controversés pour ne citer que Jeff Koons, pourrait tourner court. Qui voudra passer plusieurs heures dans un avion, plus cher, plus compliqué à prendre, pour se retrouver face à des produits douteux du marché globish de l’art contemporain, qui rompent l’harmonie atemporelle qu’on vient en principe chercher dans des lieux tels que l’ancienne demeure des rois de France ? La digitalisation des collections, bien entamée avant la pandémie et accélérée pendant le confinement quasi planétaire, retiendra probablement un bon nombre de précautionneux devant leurs écrans. Une initiative comme « Mai au musée », lancée par Arte en partenariat avec le musée du Louvre, le musée d’Orsay, le Grand Palais et le château de Versailles, et mettant en libre accès pendant un mois les documentaires sur les plus belles expositions et les pièces exceptionnelles de ces sites, ne satisfait pas notre besoin de « voir », mais redonne aux plus sensibles le goût d’approcher les œuvres autrement que par le prisme d’une foule.
Quels que soient les efforts des administrateurs du Château pour faire revenir le chaland après la réouverture le 6 juin, les circonstances resteront encore un moment favorables à la baisse de fréquentation. De plus, les nouveaux circuits de visite aménagés en fonction des exigences sanitaires, de sorte à éviter les croisements des flux, promettent de mettre fin à des aberrations, dont les 40 000 visiteurs quotidiens dans la seule chambre du roi restent le symbole.
« Avec le château de Versailles, c’est un peu le même problème qu’avec la vaisselle de Sèvres : si vous ne vous en servez pas, un jour vous vous apercevez qu’on vous l’a volée. Si, au contraire, vous en faites un usage fréquent, vous courez le risque de la casser », philosophe Olivier de Rohan-Chabot, président de la Fondation pour la sauvegarde de l’art français et président d’honneur de la prestigieuse Société des amis de Versailles. Soucieux d’éviter la casse face au nihilisme touristique omniprésent, certains sites ont d’ores et déjà résolu le problème – après la fermeture d’une dizaine de tombeaux de la nécropole de Louxor aux visiteurs en 2011, le public a été de nouveau admis à pénétrer jusqu’au cœur du caveau qui héberge désormais… une réplique de la tombe de Toutankhamon. Sans recourir à des moyens aussi extrêmes, il serait judicieux, selon Rohan-Chabot, d’inciter les touristes à porter leur attention sur les salles de l’Empire ou de la Restauration, habituellement désertes. En attendant, les protections en plexiglas empêchent les amateurs de souvenirs gratuits de repartir avec un bout de mosaïque de bois arraché à l’aide d’un trousseau de clés. Et, à défaut d’une gestion plus raisonnable qui limiterait drastiquement le nombre de visiteurs, on peut encore compter pour quelque temps sur les vertus dissuasives du virus pour garder les cars de touristes loin de Versailles.
Quatre ans après son rachat par Frank McCourt, l’Olympique de Marseille (OM) tourne toujours à petit régime. Une situation qui pourrait changer alors que se profile un nouveau plan de rachat par un fond provenant d’Arabie Saoudite ou d’un émirat. Le football français est aussi un terrain de jeu géopolitique pour des puissances étrangères.
Une fois n’est pas coutume, l’Olympique de Marseille serait de nouveau sur le point d’être racheté par un mystérieux investisseur. Pour ceux qui n’auraient pas suivi l’affaire, il s’agit là de la deuxième opération de ce genre en moins de cinq ans, dans la mesure où le club phocéen avait tout d’abord été acquis par l’homme d’affaires américain Frank McCourt en 2016.
L’espoir renaît
Les supporters marseillais s’étaient alors pris à rêver. Leur club allait être en mesure de concurrencer un Paris Saint-Germain qui rafle tout sur la scène nationale et n’a pas perdu un seul classico depuis son rachat par les Qataris en 2011. Mais également avoir de nouveau une chance de revenir sur le devant de la scène européenne.
Malheureusement pour eux, le rêve a tourné court : non seulement les sommes investies durant ces quatre dernières années prêtent à sourire vis-à-vis des objectifs affichés, mais le recrutement n’a jamais été à la hauteur, ainsi, l’opération a été un échec aussi bien sportif que financier, et Frank McCourt pourrait donc être tenté de chercher une porte de sortie.
Heureusement pour lui, l’OM semble être au cœur d’une seconde tentative de rachat qui lui permettrait enfin de se donner les moyens de ses ambitions, dans laquelle l’ancienne figure du Top 14 Mourad Boudjellal jouerait un rôle clé.
Si l’identité des nouveaux actionnaires n’a pour l’heure pas encore filtré, l’ex-dirigeant toulonnais a récemment affirmé que ceux-ci étaient originaires du Moyen-Orient, que leurs fonds sont aussi bien étatiques que privés et proviennent de ressources naturelles telles que le pétrole. Sur RMC, l’homme d’affaires a déclaré la semaine dernière être « porteur d’une offre pour le club de l’OM, venant de fonds du Moyen-Orient, étatiques et privés, et qui proviennent du pétrole, de l’eau, de l’énergie, et qui sont portés par un homme d’affaire franco-tunisien… »
Il est donc fort probable que les investisseurs en question soient originaires d’Arabie Saoudite ou d’un quelconque Émirat, en d’autres termes : un rival du Qatar, dont les motivations reposeraient davantage sur une volonté de concurrencer les Qataris dans un de leurs domaines de prédilection, plutôt qu’un réel intérêt pour le football.
Le championnat de France a longtemps été dénigré pour son manque de compétitivité. À l’avenir, les rencontres PSG / OM pourraient changer la donne. Les amateurs de ballon rond peuvent s’en réjouir. De leur côté, les observateurs de géopolitique redoublent d’inquiétude quant à la prédation, sur nos clubs tricolores, de pays à l’influence parfois hostile.
Et maintenant, les «antiracistes» veulent abolir la «justice des Blancs» !
Le déboulonnage de statues est manifestement devenu le nouveau hobby de nos antiracistes racistes, plus que jamais décidés à nous imposer leur vision anachronique, revancharde et mauvaise perdante de l’histoire. Signe de leur inculture mélangée à leur haine de tout ce qui est « blanc », à San Francisco aux États-Unis, des exaltés ont même réussi à vandaliser un buste de Cervantès, qui fut lui-même cinq ans esclave à Alger. L’iconoclasme antiraciste atteint des sommets de violence gratuite et d’aveuglement.
On sait dorénavant que cette nouvelle génération de militants appartient à la culture « woke », to wake signifiant en anglais « se réveiller ». Véritables petits bouddhas sociaux, ces personnes se seraient éveillées à l’emprise d’un phénomène discret et invisible mais aussi puissant que le diable : le racisme systémique. On ne nous demande plus de condamner les actes de racisme ordinaire qui perdurent encore ici et là (aux États-Unis, ça ne fait aucun doute), mais de découvrir et conjurer le caractère profondément xénophobe de la société sous toutes ses facettes. Même les plus radicaux des antiracistes « blancs » seraient en fait inconsciemment racistes. À mi-chemin entre l’ésotérisme de pacotille et le combat politique, l’antiracisme raciste est une révélation.
Les antiracistes savent quelque chose que vous ne savez pas
L’une des premières sphères qui est pointée du doigt est le système de justice des pays occidentaux qui ne serait au fond que le bras armé et juridique de « l’ordre blanc ». Il ne s’agit pas seulement de revoir les façons de faire des corps de police appelés à intervenir dans les quartiers difficiles, mais de repenser l’intégralité du fonctionnement de nos sociétés.
Le multiculturalisme ne se contente plus d’instaurer une sorte d’apartheid juridique – une justice parallèle –, il nous demande dorénavant d’innocenter des criminels au nom du progrès social. À quand une amnistie pour tous les criminels « racisés » ?
Au Canada, une récente intervention de Jagmeet Singh, le chef du Nouveau parti démocratique (NPD), une formation de gauche, est révélatrice de cet appel à la clémence face à la « justice des Blancs ». Le 9 juin dernier, M. Singh s’est dit opposé à l’instauration de mesures visant à débusquer les fraudeurs dans le système d’octroi des aides financières accordées aux Canadiens ayant perdu leur emploi en raison du Covid-19. La raison invoquée par le chef néo-démocrate : les mesures auraient pour effet de viser une trop grande proportion de gens « racisés ». Il serait quand même injuste que des gens finissent en prison pour des actes criminels qu’ils ont commis !
Au Québec en 2003, un avocat avait déjà tenté d’expliquer le proxénétisme de son client en plaidant que ses origines haïtiennes l’avaient poussé « à s’entourer de prostituées ». Heureusement, le juge n’avait pas tenu compte de son plaidoyer aux accents racistes. Mais les antiracistes ont inventé quelque chose d’encore plus fort. Il ne s’agit plus de jouer la carte du relativisme culturel pour excuser les écarts de conduite des personnes incarnant une certaine altérité, mais de les déresponsabiliser de leurs actes pour les imputer à la poursuite d’un mal difficile à identifier. Il faut espérer que les systèmes de justice occidentaux, dans leur ensemble, ne se laissent pas corrompre par cette vision du monde.
L’Occident au banc des accusés
Privées des privilèges dont jouissent naturellement les « Blancs », les personnes de couleur seraient incitées à commettre des crimes dans un monde faussement méritocratique où les origines ethniques comptent davantage que le curriculum vitae. On comprend évidemment que la pauvreté favorise partout la criminalité et la violence, mais la justice en tant que telle n’a pas pour vocation de se substituer à la sociologie. Ici, le coupable du crime n’est plus la personne qui l’a commis de son plein gré, mais la société dite coloniale. C’est l’Occident qui est appelé au banc des accusés. Les enfants des ex-colonies seraient des marionnettes dont les fils sont tirés par le grand méchant loup « euro-descendant ».
Dans plusieurs villes américaines, la création de « zones libres de police » durant les récentes manifestations antiracistes incarne cette volonté de se soustraire à la « justice des Blancs ». On reconnaît bien sûr l’influence de Michel Foucault dans cet appel à la déconstruction de la justice universelle et de l’univers pénal et carcéral. Dans les pages du journal québécois Le Devoir, une jeune intellectuelle à la mode écrivait qu’il fallait même penser à mettre fin à la « carcéralité » en raison de la surreprésentation des Amérindiens dans les prisons canadiennes. « La punition comme simulacre de justice et l’effacement des populations dites indésirables sont gravés dans la pierre de l’institution carcérale », tranchait Mme Aurélie Lanctôt le 12 juin, toujours du haut de ses privilèges pâles.
Si les prisons ne conviennent pas aux personnes « racisées », pourquoi ne pas les abolir, se demandent nos grands éveillés ? Dans la même logique, si l’Occident incommode les gens discriminés, pourquoi ne pas penser à le détruire ?
Ces municipales sont la confirmation du retour du clivage gauche / droite, de la fragmentation sociale de la population et d’un désaveu de plus en plus grand à l’égard de la vie politique. Si LREM est le grand perdant de cette séquence électorale, il est en revanche difficile d’en trouver des vainqueurs…
La vague verte est en demi-teinte. Avec près de 60% d’abstention, il est difficile de savoir si les élections de ces maires correspondent à une volonté réelle des électeurs. C’est une victoire classique de la gauche, où le Parti socialiste a été remplacé par les écologistes. Au cours de son histoire, la gauche a toujours été mangée par les plus progressistes : Ferry par les radicaux, les radicaux par les socialistes, les communistes par les socialistes et aujourd’hui les socialistes par les écologistes. C’est le propre du mouvement progressiste que d’aller toujours plus loin dans la déconstruction et la radicalisation. Ce n’est pas tant une percée des Verts qu’une reconfiguration magistrale de la gauche, dont EELV devient la force principale et le PS une des forces supplétives. Cet état des choses a été acté par Olivier Faure qui a annoncé que son parti se rangerait derrière un candidat écologiste en 2022. Le mouvement progressiste est donc toujours vivant et a muté. Les Verts ont gagné en s’alliant avec les autres partis de gauche et dans des villes qui ont toujours été à gauche : Strasbourg, Poitiers, Lyon, où l’alliance conduite par Collomb s’est divisée. Ces victoires témoignent d’un retour à la normale de la vie politique avec la résurgence du clivage gauche / droite.
Les bobos introuvables
Il est facile d’imputer la victoire aux « bobos » terme employé depuis les années Delanoë, mais dont la réalité sociologique est difficile à cerner. Si l’on désigne par là des urbains célibataires et CSP+, c’est une cause nécessaire mais non suffisante de la victoire de la gauche. Les écolos-gauchistes ont gagné grâce à des alliances, c’est-à-dire en allant au-delà de cette seule catégorie sociale, qui est somme toute assez réduite. Dans de nombreuses villes, l’alliance non dite s’est faite avec les islamistes. Une fois la mairie tenue, ils pourront redistribuer les aides sociales vers ces associations militantes. Là aussi, rien que de très normal : c’est ce qu’a toujours fait la gauche dans les villes qu’elle a gérées.
Depuis les municipales de 2001, la droite est convaincue qu’elle ne peut plus gagner les villes or rien n’est plus faux, et ces municipales le confirment encore. Outre le bon score de Rachida Dati, qui a relégué LREM aux oubliettes et qui a conservé tous ses arrondissements, nombreuses sont les grandes villes à avoir voté à droite. Avec près de 240 000 habitants, le 15e arrondissement est autant peuplé que Bordeaux, et Agnès Evren y a largement gagné. Le 16e et le 17e ont plus de 160 000 habitants, et ce sont des bastions de droite. À cela s’ajoute Limoges, conservé par la droite, Angers, Saint-Étienne, Nice, Metz, etc., et, en Île-de-France, des villes comme Vincennes, Courbevoie, Boulogne, Argenteuil, Aubervilliers qui demeurent dirigées par la droite ; des communes dont la population oscille entre 50 000 et plus de 100 000 habitants.
La victoire de Jospin
Si la gauche a pu conserver ou emporter des métropoles, c’est que la population y a changé. Sous l’effet des prix de l’immobilier élevés et d’une insécurité culturelle et physique grandissante, nombreuses sont les familles à quitter ces villes, remplacées par d’autres populations. Les périphéries qui étaient à gauche (Levallois, Achères, Argenteuil, etc.) sont ainsi devenues des bastions de droite et les centres métropolitains qui étaient à droite des bastions de gauche. Le transfert de population a logiquement entrainé une modification électorale. C’est la victoire tactique de Lionel Jospin.
En mettant en place la loi SRU (solidarité et renouvellement urbain) qui oblige les communes à avoir 20% de logements sociaux (un taux monté à 25% sous François Hollande), il s’assurait ainsi une rente électorale massive dans de nombreuses villes. La faute de la droite est de ne pas avoir abrogé cette loi durant les dix années où elle fut au pouvoir. Non content de faire en sorte qu’un logement sur quatre soit « social » elle a provoqué une forte hausse des prix de l’immobilier, selon une loi très classique en économie qui fait que l’encadrement et la réquisition entrainent toujours une pénurie, une hausse des prix et une baisse de la qualité. Cette augmentation des prix a accentué le départ des classes moyennes vers les communes périphériques. Et l’arrivée de populations plus sensibles aux sirènes progressistes.
La reconfiguration des villes
Ces victoires des écologistes vont accélérer un phénomène géographique déjà en cours : les départ des centres-villes, le développement des périphéries. Entreprises et commerces sont de plus en plus nombreux à quitter des centres-villes devenus chers, insalubres et dangereux. Les manifestations régulières des mouvements progressistes, accompagnées de leur cortège de destruction de vitrines, comme à Nantes ou à Rennes, font partir les entrepreneurs.
Il n’est qu’à voir le centre-ville de Grenoble, aujourd’hui une des villes de France où la criminalité est la plus forte, pour voir ce que devient une ville gérée par les écologistes.
Tristement, les départs renforcent la folie progressiste, puisque la population qui s’en va ne vote pas pour elle. Ces élections sont donc à la fois un aboutissement et une nouvelle étape dans la reconfiguration politique et géographique de l’urbanisme en France.
Il n’y a qu’un problème sérieux : la surpopulation. Il est systématiquement esquivé par les écologistes. Au lieu de quoi, ils nous demandent de trier nos déchets, de ne plus rouler en diesel et de circuler à bicyclette. Quelle aimable plaisanterie ! Ils devraient au contraire se réjouir que des virus déciment la planète, supprimer les allocations familiales, se réjouir quand des enfants meurent de faim et renoncer à soigner les vieux. Au lieu de cela, ils entretiennent le mythe d’une planète verte, souriante, pacifique et bienveillante à l’égard de tous. Ils n’ont sans doute jamais lu des livres pour adultes : l’infantilisation est leur horizon ultime. Le plus saugrenu est que tous les partis politiques se prétendent, eux aussi, écologistes dans une sorte de course à la crétinisation générale. L’oncle Bens en rit encore.
La nature dont les écologistes n’ont jamais admis qu’elle est notre principal ennemi, se défend fort bien. Elle produit des catastrophes naturelles, envoie des virus et quand une relaxation démographique s’impose, guerres et famines se succèdent. S’il y avait deux mesures à prendre, ce serait de limiter les naissances et de favoriser le suicide des humains qui encombrent la planète sans y tirer le moindre plaisir. Vivre n’est pas une aventure glorieuse, mais vouloir sauver la planète est une aberration.
Chacun sait qu’on ne fait pas une bonne littérature avec de bons sentiments. Peut-être serait-il temps de comprendre que la pire des politiques est celle qui veut instaurer le meilleur des mondes possible. L’humanité est une vieille machine délabrée qui produit des déchets en série. Peut-être le moment est-il venu d’y mettre un terme. Ou tout au moins de comprendre qu’il faut pleurer les hommes à leur naissance et non à leur mort. Et d’en tirer une conclusion moins niaiseuse que celle des écologistes.
Un peu partout en France, on déboulonne les statues. Comment se fait-il que, dans la ville de Dijon, la statue de Jean-Philippe Rameau soit toujours debout ? Rameau, le raciste, avec ses Indes Galantes ? Lors de l’affrontement de bandes, tchétchène et ottomane, j’écoutais l’air de La danse dite des Sauvages, longtemps l’indicatif d’une émission de Radio Classique. Je relisais, dans la République des Lettres, le chapitre que Marc Fumaroli consacre à Dijon et au président de Brosses, quand on annonça la mort de l’Académicien. En écrivant cet article, j’entends rendre un hommage modeste à Marc Fumaroli, à travers quelques figures marquantes de cette ville de Dijon qui fut, à tous égards, représentative de la République des Lettres que l’Académicien habita toute sa vie.
À moins d’être un Barbare, Jean-Philippe Rameau, natif de Dijon, est impossible à déboulonner. Persuadé de la convergence entre les sciences et les arts, il fonde sa musique sur les règles rigoureuses de l’harmonie. Le résultat ? Des œuvres – pas seulement les Indes Galantes – surprenantes de jeunesse et d’humour qui respirent le bonheur. Le Président de Brosses, lui, est un juriste, un historien et un mélomane éminents. Fils d’une grande famille parlementaire de Bourgogne, ses amis sont le président Bouhier, Diderot et Voltaire, et surtout Buffon, l’ami intime. Avant leur brouille, Voltaire, « le philosophe papillon », qui mettra des bâtons dans les roues à l’entrée, à l’Académie, de Charles de Brosses, disait de son ami qu’il était « fils de cette ville de Dijon où le mérite de l’esprit semble être un des caractères des citoyens. » C’est de Brosses, en effet, qui rédigera l’article Gamme dans l’Encyclopédie. C’est de Brosses qui, lors de son voyage en Italie, en achetant, de ses deniers, la première édition de la Serva Padrona de Pergolèse, introduira, en France, la musique italienne. C’est également à de Brosses que l’on doit la paternité des noms Polynésie et Australasie. Quant à François Rude, l’auteur du haut-relief, la Marseillaise, placé sous l’Arc de Triomphe, est représenté, dans un jardin de sa ville natale, tenant une petite Marianne dans la main. Espérons qu’il ne lui arrive rien. Dijon, c’est enfin la moutarde qui nous monte au nez en ce moment. Si la moutarde remonte au XVIème siècle et qu’elle n’est pas certifiée d’origine protégée, c’est bien une famille dijonnaise du XVIIIème siècle, les Naigeon, qui lui donna ses lettres de noblesse. On me dit de ne pas oublier le kir dont Dijon s’enorgueillit, du nom du chanoine Kir.
Né à Marseille, Marc Fumaroli, consacre, dans La République des Lettres, un chapitre au président de Brosses, au joyau que sont « Les Lettres familières d’Italie » écrites en 1739, « au style abondant et vivace. » Les modernes Descartes et Fontenelle auraient-ils fait, dans l’esprit de Brosses, le voyage en Italie ? « Leur esprit d’analyse n’avait cure de la mémoire, de la culture littéraire et gratuite. » De Brosses, lui, scientifique et juriste, humaniste et érudit, unit à un savoir immense un charme badin. Fumaroli compare le « je » de ses lettres à celui de Montaigne, « ouvert à l’enthousiasme comme à l’ironie… pour qui la littérature, c’est d’abord cette ruche d’abeilles lettrées où il peut être lui-même heureux, avant de convier son lecteur à partager avec lui son gâteau de miel ». Qui le connaît, à présent, ce grand magistrat et ce polygraphe qui alla, sur les pas de Salluste et enquêta, in situ, sur une ville, enfouie sous les cendres du Vésuve ? Ces lettres italiennes que Marc Fumaroli préfaça, aux éditions André Versaille éditeur, on y apprend mille choses, sous une plume curieuse, vive, ironique : elles ont un charme inégalé que n’ont pas les voyages convenus des contemporains. À notre époque, la scission est consommée entre sciences et littérature : les « sciences humaines » règnent en maître.
La République des Lettres a-t-elle disparu ?
Avec l’Encyclopédie, dit Marc Fumaroli, une ère nouvelle s’ouvrait où « la liberté de ton du président de Brosses et l’esprit d’indépendance n’auraient pas été admises. C’est le temps où tout le monde s’oppose à tout le monde : le roi aux parlements, la cour aux philosophes. De cette République, Voltaire lui-même fait « un parti d’opposition et de combat ». On dirait à présent que tout est politisé. Belle leçon de modernité !
« Et in Arcadia ego. » Marc Fumaroli aura une place à son nom, comme Jacqueline de Romilly en a une, rue de la Montagne Sainte-Geneviève, devant le café, enfin réouvert : « La Méthode ». Mais les commémorations ne consolent pas. A-t-elle disparu, cette société de savants lettrés dont Marc Fumaroli a fait partie ? Non pas « ce petit échiquier parisien », avec ses centaines de romans ou d’essais annuels, mais cette République des Lettres, européenne, cultivée, érudite sans pédanterie, éprise et jalouse de liberté ?
Zeev STERNHELL en 2010 Photographe: Hannah Assouline
Le grand historien et politologue israélien, Zeev Sternhell, fin connaisseur de l’histoire des idées politiques françaises, et, par ailleurs, co-fondateur du mouvement « La Paix maintenant » vient de mourir. Il avait 85 ans.
À la fois « archisioniste » (au nom de quoi les Juifs n’auraient-ils pas le droit, comme tous les peuples, à l’autodétermination ?), de gauche (mais désenchanté au vu de la déliquescence et des trahisons de celle-ci), totalement laïc (grand admirateur de la laïcité française), et radicalement opposé aux implantations juives en Cisjordanie, Zeev Sternhell fut souvent conspué par la droite israélienne, jusqu’à avoir été victime d’un attentat terroriste perpétré par un Juif américain, mais qui ne le blessa que légèrement.
Un livre très critiqué
Avec son livre Ni droite ni gauche – L’idéologie fasciste en France (Le Seuil, 1983), dans lequel il s’oppose à la vision « sciences-po » qui considère le fascisme comme « un phénomène d’importation étranger », Zeev Sternhell avait fait scandale en France.
Et c’est « grâce » à ce scandale que je suis devenu l’éditeur de son livre.
En effet, trois ans après la parution de Ni droite ni gauche, mon ami Pierre Assouline (qui savait que j’avais publié en « poche » le magnifique Barrès et le nationalisme français du même Sternhell) m’appelle. Il me demande si j’ai lu Ni droite ni gauche. Je lui réponds par l’affirmative. Il me demande ce que j’en pense. Je lui dis que je l’ai trouvé tout à fait stimulant. Serais-je prêt à le publier en version de poche chez Complexe, ma maison d’édition ? Je lui réponds qu’il ne peut en être question puisque Le Seuil possède sa propre collection de poche. « Non, le Seuil ne le rééditera pas », m’affirme Pierre. Il m’explique que la polémique suscitée par le livre dans le milieu de Science-Po et de l’Institut d’Études Politiques (l’IEP) est telle que le Seuil a renoncé à poursuivre sa commercialisation, et que les autres grands éditeurs d’Histoire n’ont pas désiré le rependre. « Zeev sera à Paris la semaine prochaine. Si le bouquin t’intéresse, viens donc dîner à la maison, tu pourras le rencontrer. »
« Les autres grands éditeurs d’Histoire n’ont pas désiré reprendre le livre… » Cette phrase me poursuit quelque temps.
Complexe devait beaucoup à l’IEP et à Sciences-po d’où était parti la controverse. Si la maison avait pris son essor, c’était grâce à la confiance de nombre de leurs enseignants et de leurs chercheurs qui nous avaient offert de publier leurs ouvrages : René Rémond, président de Sciences po à l’époque, Alfred Grosser, Hélène Carrère d’Encausse de l’IEP, sans parler de mes amis Serge Berstein et Pierre Milza directeur de Sciences po, qui fondèrent et dirigèrent la collection « Questions au XXe siècle », fleuron de Complexe, et tant d’autres…
Mais décidé à rencontrer Sternhell, ne fut-ce que pour faire la connaissance d’un historien que j’admirais, je le retrouvai la semaine suivante chez notre Amphitryon de Pierre.
Le courant entre Zeev et moi passa très bien. De manière générale, je n’aime pas beaucoup l’intransigeance, mais chez lui, elle me plut, tant elle me sembla être le fruit d’une incontestable éthique. Je le reverrais plusieurs fois, lors de certains de ses passages à Paris, ou à l’occasion de mes voyages en Israël, et toujours avec même plaisir et le même intérêt.
Querelles d’historiens
Zeev en voulait à Michel Winock, à l’époque éditeur du département d’histoire au Seuil, d’avoir été déloyal avec lui en publiant un article dans Le Débat où il contestait assez radicalement sa thèse. Assouline précise que l’éditeur historien avait affirmé que Sternhell l’avait « libéré de ses obligations envers lui », et pour preuve, avait publié dans une annexe de sa réédition en poche de Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, la lettre de Sternhell du 15 avril 1983 qui en témoignait.
Un éditeur historien a parfaitement le droit de ne pas partager les analyses de certains de ses auteurs et même de les contester publiquement. Cela fait partie du débat. Pour autant, il est bien gênant que l’historien contestataire, usant de son pouvoir discrétionnaire d’éditeur, décide en même temps de ne pas poursuivre l’édition d’un livre qui de surcroît n’est nullement un échec commercial, bien au contraire…
Je m’engage donc à rééditer Ni droite ni gauche dans les meilleurs délais.
Cependant, étant donné que plusieurs historiens lui avaient fait le reproche d’avoir tronqué des citations ou de les avoir sorti de leurs contextes, nous nous mettons d’accord que dans cette réédition, les contextes seraient restitués et les citations complétées. Faut-il préciser que ces précisions n’invalidèrent en rien l’analyse présentée ?
Ce que l’on critiquait surtout, c’était la focalisation de Zeev sur les idées des intellectuels qu’il incriminait, et de ne pas tenir compte des contextes historiques qui pouvaient expliquer bien des positions. Ce n’était pas faux, mais ne pouvait-on pas reprocher à tant d’historiens de souvent négliger les idéologues ? Barrès, Maurras – ou, plus près de nous, Sartre, n’ont-ils pas eu une importance et une responsabilité capitale dans l’engagement de tant de militants ? Et si nous remontons le temps, Robespierre n’a-t-il pas fait état de ce qu’il devait – ou croyait devoir à Rousseau ?
Un livre extraordinaire
Le deuxième blâme concernait la définition du fascisme. Zeev Sternhell privilégiait l’approche idéologique : le fascisme comme nouvelle culture qui bannit tant le libéralisme que le communisme, mais considéré de manière extensive au point d’y inclure des mouvements autoritaires, conservateurs, monarchistes ou globalement antidémocratiques que les historiens français refusaient d’amalgamer sans nuance au fascisme.
Rentré, il me restait à annoncer cette prochaine parution à plusieurs historiens et politologues, conseillers éditoriaux réguliers de Complexe.
Je me souviens qu’Alfred Grosser (parmi d’autres) m’avait demandé si je partageais la thèse de Sternhell. Je lui avais répondu que j’avais déjà publié plusieurs ouvrages d’historiens dont je ne partageais nullement les analyses, et que la question que j’avais l’habitude de me poser était plutôt de savoir si le livre apportait ou non une contribution intéressante au débat. Si c’était le cas, je n’hésitais pas à l’éditer.
Cette réponse n’avait pas convaincu tous mes interlocuteurs, mais aucun ne m’en avait voulu.
En 1990, Le Monde plaçait Ni droite ni gauche dans la liste des « quarante livres pour une décennie ». Aux États-Unis, Saül Friedlander parla de « livre extraordinaire » (The New Republic) et Robert Wohl nota que « peu nombreux sont les livres récents consacrés à l’histoire de l’Europe qui aient provoqué un choc et une controverse comparables » (Journal of Modern History).
En 2000, soit treize ans après la parution de notre première édition de Ni droite ni gauche, Fayard nous rachètera les droits pour une publication en grand format ; douze ans plus tard encore (les éditions Complexe ayant été rachetées par le groupe Vilo, et moi-même ayant quitté la maison), Ni droite ni gauche sera édité chez Gallimard dans sa collection de poche « Folio ».
Alors que la majorité présidentielle essuyait une cuisante défaite aux élections municipales, Brune Poirson s’est emportée à la télévision.
Les élections municipales 2020 sont un échec cuisant pour le parti majoritaire LREM avec une déroute électorale doublée d’un taux de participation historiquement bas, reflétant toute la défiance des électeurs vis-à-vis de la classe politique. Aussi, la performance de Brune Poirson ne va pas arranger l’affaire.
Invitée sur CNEWS pour commenter les résultats de l’élection dimanche 28 juin, un débat musclé s’engage entre la Secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire et le député RN Sébastien Chenu. Brune Poirson tente alors de reprendre la parole et lâche : « En fait, j’aurais dû venir avec une paire de couilles et la poser sur la table. Comme ça, peut-être que j’aurais eu le droit de parler ! »
Subtilité
On se rappelle des déclarations de Gilles Le Gendre qui nous expliquait, en 2018 : « Deuxième erreur, dont nous portons tous la responsabilité – moi y compris, je ne me pose pas en censeur : c’est le fait d’avoir probablement été trop intelligents, trop subtils… ». Le chef de file des députés LREM pourra donc féliciter la Secrétaire d’Etat de ne pas avoir usé de trop de subtilité. C’est bien le moins.
Mais quelle mouche a donc piqué Poirson ? Il faut dire qu’elle n’avait pas grand-chose à dire. Et quoi qu’elle dise, on aurait de toute façon vite oublié ses propos. Avec sa « paire de couilles », elle pourrait rester dans les annales. Madame Poirson, de par sa fonction à l’écologie, est à la pointe sur la question du recyclage et de la gestion des déchets, et tient à le faire savoir en étalant son langage ordurier.
Laurence Ferrari recadre la péroreuse
Le véritable problème est que Brune Poirson a des difficultés à prendre la parole sur le plateau de télévision. Alors elle opte pour la solution de facilité: la victimisation. C’est parce qu’elle est une femme qu’on ne la laisse pas parler. Il fallait y penser : il faut être sévèrement burné pour avoir le droit de s’exprimer. Sauf que le féminisme victimaire ne marche pas à tous les coups. Même Laurence Ferrari est excédée : « Non, mais arrêtez de me faire le coup de la femme qui ne peut pas parler… C’est bon ! »
Brune Poirson démontre que l’on peut avoir à la fois un look BCBG et jurer comme un charretier. C’est sans doute ça le « en même temps » macronien. On en vient à regretter que Jean-Marie Bigard ne se lance pas vraiment en politique. Face à Brune Poirson, il aurait relevé le niveau.
Suite à sa lourde condamnation, le couple Fillon a décidé de faire appel. Le Tribunal correctionnel est-il qualifié pour juger de l’emploi des fonds attribués à un parlementaire ? Les explications de Maître Stanislas François.
L’indépendance de la Justice signifie deux choses. D’une part, qu’elle le soit réellement, d’autre part, qu’elle montre les apparences de cette indépendance, en somme, qu’elle ne laisse pas prise au soupçon.
Alors, en 2017, on pouvait légitimement s’insurger qu’une affaire judiciaire survienne en pleine période électorale et que fût opportunément mis en examen, deux jours avant dépôt des candidatures à la présidence de la République, l’un des protagonistes de l’élection.
Aujourd’hui en 2020, nous ne pouvons que saluer la sagesse du Tribunal correctionnel d’avoir attendu le lendemain des élections municipales pour rendre son verdict afin que l’affaire Fillon ne parasite pas de nouveau le débat électoral.
Le Tribunal correctionnel aura donc suivi les réquisitions du Parquet : cinq ans de prison dont trois avec sursis, 375 000 euros d’amende et 10 ans d’inéligibilité pour François Fillon. 3 ans avec sursis 375 000 euros d’amende pour Pénélope Fillon, son épouse et ancienne assistante parlementaire.
On ne pourra pas reprocher au juge d’avoir rendu une décision politique. Assurément elle ne l’est pas, quand bien même elle a nécessairement des retentissements politiques, parce que le mis en cause, François Fillon est une personnalité publique et parce que les faits reprochés (l’emploi de son épouse) mettent en cause le fonctionnement d’une institution politique, l’Assemblée nationale.
Pour autant, la décision rendue en droit n’est pas évidente et elle amène deux interrogations. La première sur la qualification retenue par le juge, celle de détournement de fonds publics et, la seconde, sur le caractère intrusif de l’appréciation des faits qui met nécessairement en jeu les limites du principe de la séparation des pouvoirs.
Sur le détournement de fonds publics
Au sens de l’article R. 432-15 du code pénal, un détournement de fonds publics correspond à la situation dans laquelle « une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, un comptable public ou l’un de ses subordonnés » détruit, détourne ou soustrait un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés qui lui ont été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission.
À l’inverse d’autres dispositions du code pénal, par exemple celles sur la prise illégale d’intérêt, l’article R. 432-15 ne renvoie pas à la définition de « personnes investies d’un mandat électif public » et la qualification de « personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public » est en principe réservée aux personnes qui exercent sous l’autorité du pouvoir exécutif. Ainsi, l’application du délit de détournement de fonds publics à un parlementaire pouvait poser question.
Ce n’est que par une décision du 27 juin 2018 que la Cour de cassation a tranché ce point, reconnaissant qu’un député, parce qu’il avait pour rôle d’exercer une fonction ou d’accomplir des actes dont la finalité était de satisfaire à un intérêt public, pouvait être considéré comme « personne chargée d’une mission de service public » et donc, se rendre coupable de détournement de fonds publics. On pourra alors toujours regretter l’empressement incroyable qui fut celui du Parquet en 2017 qui décida, en pleine période électorale, de poursuivre l’un des protagonistes principaux sur le fondement d’une infraction dont l’application à un parlementaire n’aura été précisée qu’un an plus tard.
Sur la séparation des pouvoirs
Et quand bien même le parlementaire est effectivement concerné par la qualification de détournement de fonds publics, peut-on vraiment considérer que des fonds publics ont été détournés ? Les fonds publics en cause sont ceux versés par l’Assemblée nationale à un parlementaire pour l’emploi d’un de ses collaborateurs. Et ils ont effectivement été versés par le parlementaire à l’emploi d’une collaboratrice, son épouse. Au-delà des soupçons légitimes de népotisme que l’emploi d’une personne de sa famille impliquent, se poser la question de l’existence d’un détournement, c’est réfléchir à ce que doit être, en principe, l’emploi de ces fonds, versés par l’Assemblée nationale à un parlementaire pour l’emploi d’un collaborateur.
Chaque parlementaire dispose d’un crédit. Le parlementaire conclut avec son collaborateur un contrat de droit privé dans lequel le parlementaire définit librement l’organisation du travail et les tâches dévolues à son collaborateur. Aucun texte ne précise ni l’organisation ni le contenu de l’emploi de collaborateur parlementaire, celui-ci peut correspondre ainsi à différentes réalités : rédiger des discours, gérer un agenda, tenir des permanences, rédiger des notes, brumiser les jambes de son député, participer à des événements etc.
Être collaborateur parlementaire, c’est donc exercer une activité politique associée à un mandat électif. Ainsi, reprocher à Madame Fillon de n’avoir rien fait, rechercher si l’emploi de collaborateur était ou non fictif, c’est donc nécessairement se poser la question de ce qu’est un emploi de collaborateur. Le fait qu’un juge se pose cette question renvoie au principe de la séparation des pouvoirs, c’est-à-dire l’immixtion du pouvoir judiciaire dans le pouvoir législatif. Ce principe de séparation des pouvoirs implique par exemple en France l’existence même du juge administratif. C’est le Conseil d’État qui juge le pouvoir exécutif et non l’autorité judiciaire.
En principe, le contrôle des activités professionnelles incompatibles avec le mandat parlementaire appartient au bureau de l’Assemblée nationale et seul le pouvoir législatif lui-même est compétent pour apprécier et évaluer le travail d’un collaborateur parlementaire. Ce n’est pas le travail du juge.
En 2019, la Cour de Justice de l’Union européenne avait demandé à Marine Le Pen de procéder au remboursement de 300 000 euros pour avoir rémunéré des cadres du Front national avec des fonds destinés à l’emploi de collaborateurs parlementaires. Si la Justice s’est ainsi prononcée, c’est parce qu’elle avait été saisie par le Parlement européen qui, lui-même, avait reconnu l’irrégularité de l’emploi des fonds publics. Rien de comparable donc dans l’affaire Fillon où l’Assemblée nationale n’a jamais bronché pour l’emploi des fonds versés à Madame Fillon. Au risque de heurter le principe de séparation des pouvoirs, le Tribunal correctionnel s’est livré à cet exercice.
Les époux Fillon ont donc interjeté appel, alléguant notamment la méconnaissance de ce principe.
Des liens apparaissent entre le collectif « Palestine Vaincra » et l’organisation terroriste FPLP. Jusqu’à quand laissera-t-on faire? Une manifestation est prévue à Toulouse, le 1er juillet prochain.
Quelques semaines après qu’Oliver Varhelyi – Commissaire européen à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage – se soit engagé à faire la lumière sur les financements des ONG pro-palestiniennes affiliées à des groupes terroristes et, le cas échéant, à y mettre un terme, l’UE annulait, le 12 juin dernier, une subvention d’1.7 millions d’euros à l’ONG palestinienne BADIL laquelle refusait de signer la clause « anti-terreur » de l’UE.
Peu avant, le 10 juin, la société de paiement en ligne PayPal fermait le compte du « Collectif Palestine Vaincra », une organisation française pro-BDS. Bien que le soutien à BDS soit à lui seul une raison suffisante de s’en éloigner compte tenu de l’antisémitisme que traine cette nébuleuse, c’est en raison de ses liens avec l’organisation terroriste FPLP, que le « Collectif Palestine Vaincra » s’est vu fermer son compte PayPal.
D’inquiétantes relations
Des relations qui n’étonneront personne puisque ce collectif « Palestine Vaincra » est la continuation du groupuscule « Coup pour Coup 31 », auto-dissous en mars 2019, lequel s’était déjà distingué par son soutien sans faille au FPLP en faisant le panégyrique du terroriste Wadie Haddad, en célébrant les 50 ans de l’organisation terroriste ou en se rendant au Liban à l’invitation de cette dernière.
Lorsque la convergence des luttes inclut les groupes terroristes, il faut espérer que l’émotion ne dépasse pas cette fois les règles juridiques
Tout récemment, l’étroitesse des relations entre ce collectif et le FPLP a été révélée par leur communication croisée sur leurs sites internet respectifs. Ainsi le FPLP apparaît sur le site internet du collectif comme l’un de ses partenaires aux côtés d’autres organisations palestiniennes elles-mêmes liées ou affiliées au groupe terroriste (l’UAWC, Addameer, l’UHWC) et plus inquiétant encore peut-être, le FPLP fait lui-même la promotion du collectif « Palestine Vaincra » sur son propre site internet et relaie les informations sur les manifestations organisées à Toulouse, notamment le 1er juillet prochain comme en témoignent les photos ci-dessous.
Captures d’écran
Sans surprise, ce collectif soutient la libération de Georges Ibrahim Abdallah (FPLP, FARL) condamné à perpétuité pour complicité d’assassinats, et Ahmed Saadat (chef du FPLP) condamné à trente années de prison, et appelle à libérer « toute la Palestine de la mer au Jourdain », ce qui est une litote pour appeler à la destruction de l’État d’Israël.
La mince frontière entre antisionisme et antisémitisme
Voilà une illustration de plus de la perméabilité entre des organisations pro-palestiniennes et des groupes terroristes qui n’ont jamais renoncé à la destruction de l’État d’Israël ni à la haine des Juifs. Pour mémoire, c’est le FPLP, avec des membres de la bande à Baader, qui, en 1976, a détourné vers Entebbe, le vol Tel Aviv-Paris d’Air France. Pendant cette prise d’otages, le FPLP a séparé les otages juifs, et non seulement les Israéliens, des autres passagers. C’est au FPLP-OS qu’est attribué l’attentat de la synagogue de la rue Copernic le 3 octobre 1980. C’est encore le FPLP qui a revendiqué un attentat dans une synagogue à Jérusalem en 2014. Lorsque l’on cible des Juifs pour atteindre Israël, preuve est faite que l’antisionisme et l’antisémitisme se confondent.
Qu’on ne se méprenne pas, ce mouvement de boycott des produits israéliens ne souhaite pas la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël mais bien à la place de l’État hébreu.
Son objectif est un État prétendument binational dont la population palestinienne, démographiquement plus performante, aura tôt fait d’absorber la population juive faisant disparaître – de facto et de jure – le seul État Juif de la planète.
Indignation sélective
Ce mouvement ne lutte pas pour les Palestiniens mais contre Israël. On ne voit pas de manifestations contre le jumelage de Aix-en-Provence et Baalbek au Liban alors que les Palestiniens y sont largement discriminés ou contre celui de Dunkerque et Gaza alors que le Hamas y torture ses opposants politiques et jette les homosexuels du haut des toits. On n’a pas souvenir de manifestation contre le régime d’Assad et contre Daesh quand les palestiniens de Yarmouk étaient décimés pendant la guerre civile. Pas plus pour dénoncer l’assassinat sous la torture de 617 Palestiniens dont 34 femmes par le régime syrien depuis 2011. Si ces morts palestiniens ne soulèvent pas d’indignation c’est parce qu’Israël n’est pas concerné.
En laissant ces manifestations se dérouler dans l’espace public, c’est aussi le FPLP – un groupe pourtant placé sur la liste officielle des organisations terroristes de l’UE – que l’État laisse manifester et s’ancrer un peu plus dans la vie associative française. En soutenant le collectif « Palestine Vaincra » ou la fondation Secours Rouge Toulouse qui s’inscrit dans « un mouvement unique anticapitaliste, anti-impérialiste, antifasciste, visant à renverser ce système d’exploitation et d’oppression », le FPLP déploie son soft power en France depuis plus d’un an sans que cela ne semble émouvoir le gouvernement.
Lorsque la convergence des luttes inclut les groupes terroristes, il faut espérer que l’émotion ne dépasse pas cette fois les règles juridiques.
Engagé dans une folle course aux entrées, le château de Versailles ploie depuis des années sous le poids du nihilisme touristique. Il aura fallu l’irruption d’un virus pour que ce joyau soit rendu aux Versaillais.
Pendant le confinement, les moments de grâce se sont multipliés au pied du château de Versailles. En haut de la rue des Réservoirs, entre le théâtre inauguré en 1777 par la sulfureuse Mademoiselle Montansier, et qui porte à présent son nom, et la chapelle royale recouverte d’une bâche en trompe-l’œil car en restauration, les riverains ont pu assister à des bagarres de chats au bon milieu de la chaussée, ouvrir grand les fenêtres – pour ceux qui, vivant au rez-de-chaussée, sont privés de ce plaisir en temps normal – et, enfin, écouter le silence, seulement interrompu par les trilles et trémolos des oiseaux. On a observé des biches aux alentours de la pièce d’eau des Suisses. La terminaison en cul-de-sac du boulevard de la Reine, d’habitude investie pas des Parisiens et pique-niqueurs venus des banlieues, a pris l’allure d’un terrain de jeu où on distinguait nettement les familles en train d’abuser gentiment de l’autorisation de sortie d’une heure. Face au Trianon Palace, les enfants jouaient au foot comme dans un village. Charlotte, 50 ans, Versaillaise de souche, verse une larme. Il y a vingt ans, rappelle-t-elle, le bosquet de la Reine était réservé aux Versaillais, qui aimaient y emmener leurs enfants. Le projet de l’ouverture de cette partie du parc du château aux touristes avait même provoqué des manifestations – restées sans effet. Désormais, comme tout le monde, les Versaillais doivent payer pour y accéder. Et si, jusque dans les années 1990, il était difficile, faute d’établissements, de se restaurer à Versailles, le provincialisme contribuait à préserver cet entre-soi dont personne ne semble se plaindre ici et que l’on retrouve provisoirement à l’abri de frontières fermées.
Ce qui a mis fin à cette douce quiétude, c’est évidemment le tourisme. L’afflux ininterrompu observé ces dernières décennies inspire des cris d’exaspération aux habitants. « Versailles aux Versaillais ! » Si 80 % des visiteurs sont de nationalité étrangère, ce sont les Chinois débarqués de leurs autocars (premier contingent national avec 11 % des entrées en 2015) qui aimantent la colère des autochtones. Seraient-ils victimes de préjugés ?
Le château de Versailles a dépassé la barre des 8 millions de visiteurs en 2018
Aristote distinguait entre le pléthos et le démos : d’un côté, une masse grégaire, inculte, sinon bestiale, et de l’autre, l’agrégat des consciences unies dans l’amour de la liberté et de l’ordre. Les Versaillais, qui se fient à ce qu’ils observent au quotidien plutôt qu’aux études de marché, éprouvent au quotidien cette antique distinction. En effet, selon Atout France (Agence de développement touristique de la France), un touriste chinois moyen affiche un profil socioprofessionnel élevé ; il est jeune, citadin, généreux dans les dépenses de luxe, mais aussi très soucieux de découvrir le patrimoine culturel français. Cela n’adoucit guère les jugements des riverains. « Quel bonheur de ne plus les voir improviser les toilettes devant ma fenêtre ! » lâche Charlotte, irritée. Son voisin grogne contre les boutiques de produits détaxés dont les habitants ne profitent pas, tout en étant obligés de supporter les attroupements bruyants de la clientèle chinoise, friande de nos parfums et valises à roulettes haut de gamme : « Regardez, tout est écrit en chinois ! Ma foi, on se croirait à Canton ! » On est loin de la grande passion chinoise pour la France, avec son romantisme – certes, stéréotypé par ce que Walter Lippmann appelait « des images dans les têtes » –, sa richesse artistique et sa gastronomie. D’ailleurs, on ne croise presque jamais ces Chinois dans les commerces et les restaurants de la ville, sauf dans ceux qui leur sont réservés. Cependant, ils ne sont pas les seuls à snober, faute de temps et d’informations, la ville, ses marchés, ses épiceries fines – et ne parlons pas des musées. Selon les chiffres avancés par la mairie en 2013, à peine 8 % des touristes flânaient dans le quartier Saint-Louis et 5 % dans celui de Notre-Dame. « On voit de plus en plus d’étrangers, mais ce sont des touristes individuels, pas les Chinois qui ont trois jours pour visiter toute l’Europe. Alors, ceux-là ne nous manquent pas », ironise Alain, traiteur installé dans les halles du marché Notre-Dame.
Tous ceux qui vivent à proximité des sites hyper fréquentés de France partagent le sentiment de dépossession de leur territoire qu’éprouvent les Versaillais, et que la géographe Maïe Gérardot décrit comme « une situation dans laquelle le rythme du touriste est dominant, organisant et structurant le lieu, transformant son esprit et excluant les autres rythmes ». Quiconque a essayé de traverser la magnifique place d’Armes, devant le château, transformée en gigantesque parking pendant la haute saison, ou tenté de prendre le RER entre Versailles-Château-Rive gauche et Paris pendant les heures de fermeture du château (quand les trains sont rares) s’en souvient longtemps.
Or, s’il désole les habitants, le succès phénoménal de « l’entreprise de saccage festif », heureuse formule de Philippe Muray pour décrire le tourisme de masse, est considéré par les administrateurs du château comme une éclatante victoire qu’il convient de prolonger et d’intensifier sans relâche. Toute leur énergie est dirigée vers un seul objectif, faire progresser la fréquentation, déjà très excessive : le château de Versailles a dépassé pour la première fois la barre des 8 millions de visiteurs en 2018, dans la droite ligne d’une année touristique record pour les monuments franciliens, qui ont vu passer 50 millions de visiteurs. Catherine Pégard, reconduite à la présidence du château, a été chaudement félicitée pour le redressement de la billetterie après la chute due aux attentats de 2015.
Cependant, on a quelques raisons d’espérer que le coronavirus et les mesures sanitaires qu’il impose mettent un terme provisoire à la folle course aux entrées dans laquelle sont engagés les grands musées et sites français, tous rêvant d’égaler le Louvre et ses 10 millions d’amateurs de selfies devant LaJoconde.
Aude de Kerros, critique d’art et auteur de Art contemporain, manipulation et géopolitique : chronique d’une domination économique et culturelle (Eyrolles, 2019), table audacieusement sur la fin de l’utopie du global. « Personne ne voyagera plus, si c’est pour voir ce qu’on trouve partout », nous assure-t-elle. La tonitruante opération de séduction du public, lancée sous la présidence de Jean-Jacques Aillagon (2007 à 2011) et qui consiste à « sortir Versailles du cliché » en l’ouvrant notamment aux artistes contemporains les plus controversés pour ne citer que Jeff Koons, pourrait tourner court. Qui voudra passer plusieurs heures dans un avion, plus cher, plus compliqué à prendre, pour se retrouver face à des produits douteux du marché globish de l’art contemporain, qui rompent l’harmonie atemporelle qu’on vient en principe chercher dans des lieux tels que l’ancienne demeure des rois de France ? La digitalisation des collections, bien entamée avant la pandémie et accélérée pendant le confinement quasi planétaire, retiendra probablement un bon nombre de précautionneux devant leurs écrans. Une initiative comme « Mai au musée », lancée par Arte en partenariat avec le musée du Louvre, le musée d’Orsay, le Grand Palais et le château de Versailles, et mettant en libre accès pendant un mois les documentaires sur les plus belles expositions et les pièces exceptionnelles de ces sites, ne satisfait pas notre besoin de « voir », mais redonne aux plus sensibles le goût d’approcher les œuvres autrement que par le prisme d’une foule.
Quels que soient les efforts des administrateurs du Château pour faire revenir le chaland après la réouverture le 6 juin, les circonstances resteront encore un moment favorables à la baisse de fréquentation. De plus, les nouveaux circuits de visite aménagés en fonction des exigences sanitaires, de sorte à éviter les croisements des flux, promettent de mettre fin à des aberrations, dont les 40 000 visiteurs quotidiens dans la seule chambre du roi restent le symbole.
« Avec le château de Versailles, c’est un peu le même problème qu’avec la vaisselle de Sèvres : si vous ne vous en servez pas, un jour vous vous apercevez qu’on vous l’a volée. Si, au contraire, vous en faites un usage fréquent, vous courez le risque de la casser », philosophe Olivier de Rohan-Chabot, président de la Fondation pour la sauvegarde de l’art français et président d’honneur de la prestigieuse Société des amis de Versailles. Soucieux d’éviter la casse face au nihilisme touristique omniprésent, certains sites ont d’ores et déjà résolu le problème – après la fermeture d’une dizaine de tombeaux de la nécropole de Louxor aux visiteurs en 2011, le public a été de nouveau admis à pénétrer jusqu’au cœur du caveau qui héberge désormais… une réplique de la tombe de Toutankhamon. Sans recourir à des moyens aussi extrêmes, il serait judicieux, selon Rohan-Chabot, d’inciter les touristes à porter leur attention sur les salles de l’Empire ou de la Restauration, habituellement désertes. En attendant, les protections en plexiglas empêchent les amateurs de souvenirs gratuits de repartir avec un bout de mosaïque de bois arraché à l’aide d’un trousseau de clés. Et, à défaut d’une gestion plus raisonnable qui limiterait drastiquement le nombre de visiteurs, on peut encore compter pour quelque temps sur les vertus dissuasives du virus pour garder les cars de touristes loin de Versailles.
Quatre ans après son rachat par Frank McCourt, l’Olympique de Marseille (OM) tourne toujours à petit régime. Une situation qui pourrait changer alors que se profile un nouveau plan de rachat par un fond provenant d’Arabie Saoudite ou d’un émirat. Le football français est aussi un terrain de jeu géopolitique pour des puissances étrangères.
Une fois n’est pas coutume, l’Olympique de Marseille serait de nouveau sur le point d’être racheté par un mystérieux investisseur. Pour ceux qui n’auraient pas suivi l’affaire, il s’agit là de la deuxième opération de ce genre en moins de cinq ans, dans la mesure où le club phocéen avait tout d’abord été acquis par l’homme d’affaires américain Frank McCourt en 2016.
L’espoir renaît
Les supporters marseillais s’étaient alors pris à rêver. Leur club allait être en mesure de concurrencer un Paris Saint-Germain qui rafle tout sur la scène nationale et n’a pas perdu un seul classico depuis son rachat par les Qataris en 2011. Mais également avoir de nouveau une chance de revenir sur le devant de la scène européenne.
Malheureusement pour eux, le rêve a tourné court : non seulement les sommes investies durant ces quatre dernières années prêtent à sourire vis-à-vis des objectifs affichés, mais le recrutement n’a jamais été à la hauteur, ainsi, l’opération a été un échec aussi bien sportif que financier, et Frank McCourt pourrait donc être tenté de chercher une porte de sortie.
Heureusement pour lui, l’OM semble être au cœur d’une seconde tentative de rachat qui lui permettrait enfin de se donner les moyens de ses ambitions, dans laquelle l’ancienne figure du Top 14 Mourad Boudjellal jouerait un rôle clé.
Si l’identité des nouveaux actionnaires n’a pour l’heure pas encore filtré, l’ex-dirigeant toulonnais a récemment affirmé que ceux-ci étaient originaires du Moyen-Orient, que leurs fonds sont aussi bien étatiques que privés et proviennent de ressources naturelles telles que le pétrole. Sur RMC, l’homme d’affaires a déclaré la semaine dernière être « porteur d’une offre pour le club de l’OM, venant de fonds du Moyen-Orient, étatiques et privés, et qui proviennent du pétrole, de l’eau, de l’énergie, et qui sont portés par un homme d’affaire franco-tunisien… »
Il est donc fort probable que les investisseurs en question soient originaires d’Arabie Saoudite ou d’un quelconque Émirat, en d’autres termes : un rival du Qatar, dont les motivations reposeraient davantage sur une volonté de concurrencer les Qataris dans un de leurs domaines de prédilection, plutôt qu’un réel intérêt pour le football.
Le championnat de France a longtemps été dénigré pour son manque de compétitivité. À l’avenir, les rencontres PSG / OM pourraient changer la donne. Les amateurs de ballon rond peuvent s’en réjouir. De leur côté, les observateurs de géopolitique redoublent d’inquiétude quant à la prédation, sur nos clubs tricolores, de pays à l’influence parfois hostile.
Et maintenant, les «antiracistes» veulent abolir la «justice des Blancs» !
Le déboulonnage de statues est manifestement devenu le nouveau hobby de nos antiracistes racistes, plus que jamais décidés à nous imposer leur vision anachronique, revancharde et mauvaise perdante de l’histoire. Signe de leur inculture mélangée à leur haine de tout ce qui est « blanc », à San Francisco aux États-Unis, des exaltés ont même réussi à vandaliser un buste de Cervantès, qui fut lui-même cinq ans esclave à Alger. L’iconoclasme antiraciste atteint des sommets de violence gratuite et d’aveuglement.
On sait dorénavant que cette nouvelle génération de militants appartient à la culture « woke », to wake signifiant en anglais « se réveiller ». Véritables petits bouddhas sociaux, ces personnes se seraient éveillées à l’emprise d’un phénomène discret et invisible mais aussi puissant que le diable : le racisme systémique. On ne nous demande plus de condamner les actes de racisme ordinaire qui perdurent encore ici et là (aux États-Unis, ça ne fait aucun doute), mais de découvrir et conjurer le caractère profondément xénophobe de la société sous toutes ses facettes. Même les plus radicaux des antiracistes « blancs » seraient en fait inconsciemment racistes. À mi-chemin entre l’ésotérisme de pacotille et le combat politique, l’antiracisme raciste est une révélation.
Les antiracistes savent quelque chose que vous ne savez pas
L’une des premières sphères qui est pointée du doigt est le système de justice des pays occidentaux qui ne serait au fond que le bras armé et juridique de « l’ordre blanc ». Il ne s’agit pas seulement de revoir les façons de faire des corps de police appelés à intervenir dans les quartiers difficiles, mais de repenser l’intégralité du fonctionnement de nos sociétés.
Le multiculturalisme ne se contente plus d’instaurer une sorte d’apartheid juridique – une justice parallèle –, il nous demande dorénavant d’innocenter des criminels au nom du progrès social. À quand une amnistie pour tous les criminels « racisés » ?
Au Canada, une récente intervention de Jagmeet Singh, le chef du Nouveau parti démocratique (NPD), une formation de gauche, est révélatrice de cet appel à la clémence face à la « justice des Blancs ». Le 9 juin dernier, M. Singh s’est dit opposé à l’instauration de mesures visant à débusquer les fraudeurs dans le système d’octroi des aides financières accordées aux Canadiens ayant perdu leur emploi en raison du Covid-19. La raison invoquée par le chef néo-démocrate : les mesures auraient pour effet de viser une trop grande proportion de gens « racisés ». Il serait quand même injuste que des gens finissent en prison pour des actes criminels qu’ils ont commis !
Au Québec en 2003, un avocat avait déjà tenté d’expliquer le proxénétisme de son client en plaidant que ses origines haïtiennes l’avaient poussé « à s’entourer de prostituées ». Heureusement, le juge n’avait pas tenu compte de son plaidoyer aux accents racistes. Mais les antiracistes ont inventé quelque chose d’encore plus fort. Il ne s’agit plus de jouer la carte du relativisme culturel pour excuser les écarts de conduite des personnes incarnant une certaine altérité, mais de les déresponsabiliser de leurs actes pour les imputer à la poursuite d’un mal difficile à identifier. Il faut espérer que les systèmes de justice occidentaux, dans leur ensemble, ne se laissent pas corrompre par cette vision du monde.
L’Occident au banc des accusés
Privées des privilèges dont jouissent naturellement les « Blancs », les personnes de couleur seraient incitées à commettre des crimes dans un monde faussement méritocratique où les origines ethniques comptent davantage que le curriculum vitae. On comprend évidemment que la pauvreté favorise partout la criminalité et la violence, mais la justice en tant que telle n’a pas pour vocation de se substituer à la sociologie. Ici, le coupable du crime n’est plus la personne qui l’a commis de son plein gré, mais la société dite coloniale. C’est l’Occident qui est appelé au banc des accusés. Les enfants des ex-colonies seraient des marionnettes dont les fils sont tirés par le grand méchant loup « euro-descendant ».
Dans plusieurs villes américaines, la création de « zones libres de police » durant les récentes manifestations antiracistes incarne cette volonté de se soustraire à la « justice des Blancs ». On reconnaît bien sûr l’influence de Michel Foucault dans cet appel à la déconstruction de la justice universelle et de l’univers pénal et carcéral. Dans les pages du journal québécois Le Devoir, une jeune intellectuelle à la mode écrivait qu’il fallait même penser à mettre fin à la « carcéralité » en raison de la surreprésentation des Amérindiens dans les prisons canadiennes. « La punition comme simulacre de justice et l’effacement des populations dites indésirables sont gravés dans la pierre de l’institution carcérale », tranchait Mme Aurélie Lanctôt le 12 juin, toujours du haut de ses privilèges pâles.
Si les prisons ne conviennent pas aux personnes « racisées », pourquoi ne pas les abolir, se demandent nos grands éveillés ? Dans la même logique, si l’Occident incommode les gens discriminés, pourquoi ne pas penser à le détruire ?
Ces municipales sont la confirmation du retour du clivage gauche / droite, de la fragmentation sociale de la population et d’un désaveu de plus en plus grand à l’égard de la vie politique. Si LREM est le grand perdant de cette séquence électorale, il est en revanche difficile d’en trouver des vainqueurs…
La vague verte est en demi-teinte. Avec près de 60% d’abstention, il est difficile de savoir si les élections de ces maires correspondent à une volonté réelle des électeurs. C’est une victoire classique de la gauche, où le Parti socialiste a été remplacé par les écologistes. Au cours de son histoire, la gauche a toujours été mangée par les plus progressistes : Ferry par les radicaux, les radicaux par les socialistes, les communistes par les socialistes et aujourd’hui les socialistes par les écologistes. C’est le propre du mouvement progressiste que d’aller toujours plus loin dans la déconstruction et la radicalisation. Ce n’est pas tant une percée des Verts qu’une reconfiguration magistrale de la gauche, dont EELV devient la force principale et le PS une des forces supplétives. Cet état des choses a été acté par Olivier Faure qui a annoncé que son parti se rangerait derrière un candidat écologiste en 2022. Le mouvement progressiste est donc toujours vivant et a muté. Les Verts ont gagné en s’alliant avec les autres partis de gauche et dans des villes qui ont toujours été à gauche : Strasbourg, Poitiers, Lyon, où l’alliance conduite par Collomb s’est divisée. Ces victoires témoignent d’un retour à la normale de la vie politique avec la résurgence du clivage gauche / droite.
Les bobos introuvables
Il est facile d’imputer la victoire aux « bobos » terme employé depuis les années Delanoë, mais dont la réalité sociologique est difficile à cerner. Si l’on désigne par là des urbains célibataires et CSP+, c’est une cause nécessaire mais non suffisante de la victoire de la gauche. Les écolos-gauchistes ont gagné grâce à des alliances, c’est-à-dire en allant au-delà de cette seule catégorie sociale, qui est somme toute assez réduite. Dans de nombreuses villes, l’alliance non dite s’est faite avec les islamistes. Une fois la mairie tenue, ils pourront redistribuer les aides sociales vers ces associations militantes. Là aussi, rien que de très normal : c’est ce qu’a toujours fait la gauche dans les villes qu’elle a gérées.
Depuis les municipales de 2001, la droite est convaincue qu’elle ne peut plus gagner les villes or rien n’est plus faux, et ces municipales le confirment encore. Outre le bon score de Rachida Dati, qui a relégué LREM aux oubliettes et qui a conservé tous ses arrondissements, nombreuses sont les grandes villes à avoir voté à droite. Avec près de 240 000 habitants, le 15e arrondissement est autant peuplé que Bordeaux, et Agnès Evren y a largement gagné. Le 16e et le 17e ont plus de 160 000 habitants, et ce sont des bastions de droite. À cela s’ajoute Limoges, conservé par la droite, Angers, Saint-Étienne, Nice, Metz, etc., et, en Île-de-France, des villes comme Vincennes, Courbevoie, Boulogne, Argenteuil, Aubervilliers qui demeurent dirigées par la droite ; des communes dont la population oscille entre 50 000 et plus de 100 000 habitants.
La victoire de Jospin
Si la gauche a pu conserver ou emporter des métropoles, c’est que la population y a changé. Sous l’effet des prix de l’immobilier élevés et d’une insécurité culturelle et physique grandissante, nombreuses sont les familles à quitter ces villes, remplacées par d’autres populations. Les périphéries qui étaient à gauche (Levallois, Achères, Argenteuil, etc.) sont ainsi devenues des bastions de droite et les centres métropolitains qui étaient à droite des bastions de gauche. Le transfert de population a logiquement entrainé une modification électorale. C’est la victoire tactique de Lionel Jospin.
En mettant en place la loi SRU (solidarité et renouvellement urbain) qui oblige les communes à avoir 20% de logements sociaux (un taux monté à 25% sous François Hollande), il s’assurait ainsi une rente électorale massive dans de nombreuses villes. La faute de la droite est de ne pas avoir abrogé cette loi durant les dix années où elle fut au pouvoir. Non content de faire en sorte qu’un logement sur quatre soit « social » elle a provoqué une forte hausse des prix de l’immobilier, selon une loi très classique en économie qui fait que l’encadrement et la réquisition entrainent toujours une pénurie, une hausse des prix et une baisse de la qualité. Cette augmentation des prix a accentué le départ des classes moyennes vers les communes périphériques. Et l’arrivée de populations plus sensibles aux sirènes progressistes.
La reconfiguration des villes
Ces victoires des écologistes vont accélérer un phénomène géographique déjà en cours : les départ des centres-villes, le développement des périphéries. Entreprises et commerces sont de plus en plus nombreux à quitter des centres-villes devenus chers, insalubres et dangereux. Les manifestations régulières des mouvements progressistes, accompagnées de leur cortège de destruction de vitrines, comme à Nantes ou à Rennes, font partir les entrepreneurs.
Il n’est qu’à voir le centre-ville de Grenoble, aujourd’hui une des villes de France où la criminalité est la plus forte, pour voir ce que devient une ville gérée par les écologistes.
Tristement, les départs renforcent la folie progressiste, puisque la population qui s’en va ne vote pas pour elle. Ces élections sont donc à la fois un aboutissement et une nouvelle étape dans la reconfiguration politique et géographique de l’urbanisme en France.
Il n’y a qu’un problème sérieux : la surpopulation. Il est systématiquement esquivé par les écologistes. Au lieu de quoi, ils nous demandent de trier nos déchets, de ne plus rouler en diesel et de circuler à bicyclette. Quelle aimable plaisanterie ! Ils devraient au contraire se réjouir que des virus déciment la planète, supprimer les allocations familiales, se réjouir quand des enfants meurent de faim et renoncer à soigner les vieux. Au lieu de cela, ils entretiennent le mythe d’une planète verte, souriante, pacifique et bienveillante à l’égard de tous. Ils n’ont sans doute jamais lu des livres pour adultes : l’infantilisation est leur horizon ultime. Le plus saugrenu est que tous les partis politiques se prétendent, eux aussi, écologistes dans une sorte de course à la crétinisation générale. L’oncle Bens en rit encore.
La nature dont les écologistes n’ont jamais admis qu’elle est notre principal ennemi, se défend fort bien. Elle produit des catastrophes naturelles, envoie des virus et quand une relaxation démographique s’impose, guerres et famines se succèdent. S’il y avait deux mesures à prendre, ce serait de limiter les naissances et de favoriser le suicide des humains qui encombrent la planète sans y tirer le moindre plaisir. Vivre n’est pas une aventure glorieuse, mais vouloir sauver la planète est une aberration.
Chacun sait qu’on ne fait pas une bonne littérature avec de bons sentiments. Peut-être serait-il temps de comprendre que la pire des politiques est celle qui veut instaurer le meilleur des mondes possible. L’humanité est une vieille machine délabrée qui produit des déchets en série. Peut-être le moment est-il venu d’y mettre un terme. Ou tout au moins de comprendre qu’il faut pleurer les hommes à leur naissance et non à leur mort. Et d’en tirer une conclusion moins niaiseuse que celle des écologistes.