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Pub sauvage, Jeux olympiques et urinoirs intelligents: ce que 2017 a apporté à l’humanité (2/2)

Non, rien de rien...


Pub sauvage, Jeux olympiques et urinoirs intelligents: ce que 2017 a apporté à l’humanité (2/2)
Anne Hidalgo, novembre 2017. SIPA. 00833252_000014

L’abécédaire 2017 de François-Xavier Ajavon (2/2)


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P comme Pub

La fin d’année a été marquée par plusieurs initiatives décomplexées visant à nous exposer toujours davantage aux messages publicitaires. D’abord, l’Assemblée nationale a voté en catimini l’autorisation « exceptionnelle » de l’affichage publicitaire sur des monuments et sites classés durant les Jeux olympiques de 2024 (une calamité de niveau international qui, je vous le rappelle, se tiendra à Paris…). Le texte doit être débattu début février au Sénat, en vue d’une adoption au premier semestre 2018. Mais je propose d’aller plus loin… Il faut tapisser les œuvres du Louvre, de Beaubourg et du Musée d’Orsay de stickers publicitaires, faire flotter au-dessus des bâtiments publics des drapeaux géants de sponsors… et comme pour la Ligue 1 de foot – qui s’appelle maintenant Ligue 1 Conforama – il faut accoler au nom de la France celui d’un sponsor majeur des JO, ça donnerait « France Coca-Cola »… et ça, sur une mappemonde, ça aurait de la gueule mes amis ! Parallèlement, la « publicité éphémère de trottoir » a été autorisée dans plusieurs villes hexagonales. Le décret, publié au Journal officiel, autorise une expérimentation à Bordeaux, Lyon et Nantes. Des pochoirs publicitaires envahiront donc rues et trottoirs. La prochaine étape : la pub tatouée directement sur la face des passants… Remarquez, le tatouage publicitaire de visage pourrait représenter l’avenir de l’homme-sandwich, et de nouveaux emplois à l’heure de l’ubérisation…

Q comme Q

En 2017 nous avons aussi perdu l’un des plus ardents défenseurs des léporidés, ces animaux composés de grandes oreilles et d’une petite queue en boule, que nous appelons communément des lièvres ou des lapins, et qu’il ne faut pas confondre avec les oryctéropes du Cap ou le prince Charles d’Angleterre. Ce héros c’est Hugh Hefner, fondateur de la revue de charme Playboy et infatigable arpenteur d’espace médiatique en robe de chambre de soie rouge. Les lapins ont eu chaud, d’ailleurs : le premier logo envisagé représentait un cerf. En 2015, le journal avait claironné bruyamment que la page de la nudité devait se tourner. Que ce n’était pas convenable. Qu’il fallait ménager les annonceurs et le public. Qu’il n’était plus envisageable d’instrumentaliser ainsi le corps de la femme. Bang ! En 2017, devant l’insuccès, les playmates ont fait leur bienheureux retour. Aux dernières nouvelles, Hugh aurait été accueilli au paradis par 70 jeunes-femme, non vierges…

R comme Rock

Il est mort dans l’anonymat, pauvre, loin des Zénith et des Olympia, loin de la gloire, c’était l’un des plus grands rockers de tous les temps… Je veux bien entendu parler de Brian Maurice Holden, alias Vince Taylor. Tout de cuir vêtu, comme un sac à main volé, Vince enflammait la scène rock française des années 1960 à coups de déhanchés scandaleux, de pas de danse nerveux et de chansons électriques. Né en Angleterre, celui qui a inspiré à Bowie le personnage de Ziggy Stardust, qui était donc l’étoile et la cendre, a fait long feu. Après quelques succès discographiques, et quelques salles de concert ravagées par l’hystérie des fans, ce sont d’autres gars qui ont raflé la mise du rock en France. Des chats, parfois sauvages, des chaussettes parfois noires. Et surtout un petit Belge prénommé Jean-Philippe – promis aux plus hautes destinées…

Cette année Johnny est mort. Cela a suscité des remarques désagréables de quelques imbéciles qui ont cru opportun d’accuser le chanteur d’évasion fiscale, cela a suscité surtout une grande vague d’émotion – abondamment relayée par les médias. On a fait des minutes de silence. On envisage de donner le nom du chanteur à des rues, des impasses et des lycées… et combien de petits « Johnny » sont à attendre à l’état civil cette année ? L’hommage national est pour le moins surprenant… Le président de la République a lu un discours. Des ministres ont fait état de leur tristesse. C’est un peu comme si De Gaulle avait rendu hommage à Maurice Chevalier, puis qu’il avait été introduit par Malraux au Panthéon. Les temps changent. Mais dans le cercueil du chanteur il y avait surtout, outre un honnête showman qui interprétait depuis des lustres des chansons un peu fades commandées aux faiseurs de succès du moment, les années 1960 toutes entières, et nos derniers rêves d’Amérique. Il y avait le Far West, John Wayne, les Harley Davidson, le Mississippi, le blues, les chiens loups dans le soleil couchant, les cow-boys et les indiens, tout un folklore qui ne fait plus rêver les enfants… (d’ailleurs, Le Figaro titrait récemment : « Sardou, nouvelle star des cours de récré » et nous apprenait que « les enfants de 4 à 14 ans chantent à tue-tête ses tubes ». Bon.)

U comme Urinoir

La ville de Paris doit constamment maintenir son prestige, face aux autres capitales des grands pays industrialisés du monde. Ce défi colossal, les élus l’ont compris, et leur quotidien est une lutte sans merci pour que le pavillon de Paris flotte haut dans le firmament des villes-mondes (ils disent comme ça). C’est pour cette raison, par exemple, que Mao Peninou, l’adjoint chargé de la propreté à la mairie de Paris, a inauguré en grande pompe une série d’ « urinoirs intelligents » (intelligents, je souligne) autour de la gare de Lyon, dans Pigalle et dans d’autres lieux hautement fréquentés. Comme ces urinoirs sont d’un genre nouveau il ne faut  pas les appeler des pissotières, ce serait insultant, mais des uritrottoirs©. En pratique ce sont des grandes jardinières aux couleurs bariolées, disposées dans l’espace public, dans lesquelles on peut uriner librement, et sans contrainte. L’élu précise que ces uritrottoirs© sont également connectés, pour transmettre en direct à la mairie le niveau de pisse accumulé. Ce sera peut-être là l’une des plus grandes réussites comiques d’Anne Hidalgo, et vraisemblablement son seul apport dans la vaste histoire de l’humanité.

Z comme Zink

Zink. Je ne parle pas ici de ce support universel en métal de la rêverie poétique et du cancer du foie. Je parle de l’universitaire Michel Zink, qui vient d’être élu à l’Académie française. Il ne s’assoit pas dans le fauteuil de Jean d’Ormesson, rassurez-vous. Dans ce monde-là les choses vont lentement. C’est un médiéviste qui s’assoit Quai Conti. Peu après l’arrivée d’Alain de Libéra, autre grand spécialiste du Moyen Âge, au Collège de France. Dans l’indifférence générale, comme il se doit. Ces spécialistes des temps moyenâgeux parviendront-ils à nous faire mieux comprendre notre époque de Néant ? Et sinon, qui au fauteuil de Jean d’Ormesson ?! Kev Adams, Cyril Hanouna, Laurent Joffrin… ou Laurent Joffrin ?!

Et vivement 2020 !



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Il est l’auteur de L’eugénisme de Platon (L’Harmattan, 2002) et a participé à l’écriture du "Dictionnaire Molière" (à paraître - collection Bouquin) ainsi qu’à un ouvrage collectif consacré à Philippe Muray.

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