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La jizya invisible

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Séparatisme. Quand la peur change de camp


L’idée que la France serait « islamisée » alimente à la fois les fantasmes les plus alarmistes et les dénégations les plus morales.

Pourtant, si l’on délaisse ces réactions réflexes pour adopter une perspective anthropopolitique — celle qui considère les formes profondes d’organisation du lien social —, une réalité moins spectaculaire mais plus décisive apparaît : notre société est déjà partiellement islamisée sur ses marges.

Cette islamisation procède d’un phénomène plus diffus : l’installation de schèmes culturels, hérités de l’histoire islamique, dans les zones où l’État s’est retiré, où le « nous » national se défait, et où se reconstituent, spontanément, des formes anciennes de hiérarchie et de domination.

Domination informelle

Dans cette perspective, la jizya — impôt traditionnel imposé aux non-musulmans dans l’islam pré-moderne — n’est pas seulement un vestige juridique appartenant au passé. Elle est la manifestation d’une structure anthropologique fondamentale: un groupe dominant exige des autres un tribut pour leur permettre d’exister sur son territoire.

Historiquement, la jizya n’était pas un simple impôt financier. C’était un rituel de subordination : un paiement qui signifiait la reconnaissance d’une supériorité politique et spirituelle. Ce qui importe ici n’est pas la théologie, mais la logique du pouvoir: l’idée que la présence des uns est conditionnée par la dette qu’ils doivent aux autres.

Or, dans certains territoires français, où l’État est devenu extérieur, où la police est vécue comme hostile, où le lien civique s’est dissous, ce schème ancien se réinstalle sous une forme inversée : non plus au bénéfice d’un pouvoir religieux, mais d’une contre-société juvénile ; non plus comme loi écrite, mais comme domination informelle ; non plus comme obligation spirituelle, mais comme tribut symbolique ou matériel que la société doit payer pour pouvoir circuler, travailler, vivre.

C’est cette réactivation silencieuse d’une logique pré-moderne — la jizya invisible — que le texte suivant analyse en profondeur.

La jizya invisible : domination inversée et crise du lien civique

Il est frappant de constater à quel point certaines réalités apparemment sans rapport — un impôt religieux médiéval et la délinquance urbaine contemporaine — peuvent, lorsqu’on en dégage la structure, révéler une parenté profonde. La jizya appartient certes au monde historique de l’islam pré-moderne. Mais elle appartient aussi, plus fondamentalement, à une anthropologie du pouvoir : elle exprime la manière dont une collectivité se représente sa supériorité, et la façon dont elle exige des autres un signe tangible de cette supériorité.

Ce qui nous intéresse ici n’est pas l’islam en tant que religion, mais la logique anthropopolitique qui s’attache à la jizya : celle d’une dette instituée, d’un monde divisé entre ceux qui sont chez eux — et qui font payer les autres pour entrer — et ceux qui doivent acquitter le prix de leur présence.

La jizya comme matrice symbolique : le monde structuré par la dette

Dans les sociétés pré-modernes, la dette n’est pas seulement économique : elle est politique, cosmique, moralement structurante. Elle ordonne le monde. La jizya, dans ce registre, institue une hiérarchie visible : un groupe central, légitime, une périphérie tolérée à condition de payer sa dette d’existence. Le paiement n’est pas une transaction : c’est un rituel de reconnaissance d’infériorité.

Ce schème anthropologique ne disparaît jamais totalement. Les croyances s’en vont, les structures demeurent. Il peut se vider de son contenu théologique, mais conserver son efficacité symbolique.

Or ce schème resurgit sous d’autres formes dans la France contemporaine.

Non parce que l’islam réactiverait mécaniquement ses formes anciennes, mais parce que la crise du monde moderne crée un vide où ces structures symboliques, disponibles dans les imaginaires culturels, peuvent se réinstaller.

Fracture d’appartenance : quand la société devient un extérieur

Pour comprendre les comportements délinquants actuels, il faut partir d’un fait massif : une partie de la jeunesse issue de l’immigration ne se pense pas comme appartenant à la communauté politique française. Elle est de fait française, mais ne se vit pas comme telle. Ce désajustement n’est pas seulement socio-économique ; il est anthropologico-politique. L’État n’est pas perçu comme “notre État”, mais comme une puissance lointaine, neutre ou hostile.

La police n’est pas une institution partagée, mais une force d’occupation. Les aides sociales ne sont pas un instrument de solidarité, mais une réparation minimaliste due pour des injustices anciennes. Dans cette configuration, le lien civique — qui suppose réciprocité, appartenance, responsabilité — s’effondre. Et dans cet effondrement, se glisse un rapport de dette inversée.

L’impensé de l’État social : l’aide comme tribut

L’État-providence repose sur une présupposition implicite : l’aidé appartient à la communauté, contribue à la mesure de ses moyens, et la solidarité reçue appelle une solidarité rendue. Or ce présupposé ne tient plus dans certains segments de la population.

L’aide sociale est vécue comme une jizya versée par une société coupable.

Coupable de la colonisation, coupable du racisme, coupable de l’échec scolaire, coupable des discriminations, coupable de l’état du monde — peu importe : l’essentiel n’est pas la factualité, mais la structure du ressentiment.

Cette aide cesse d’être un soutien : elle devient un dû. Et comme tout dû, elle n’appelle ni reconnaissance, ni gratitude, ni engagement. Cette logique explique un paradoxe majeur de l’État moderne : plus il donne, plus il nourrit le ressentiment, dès lors que l’appartenance symbolique n’est pas assurée.

La délinquance comme tribut informel

Dans certains territoires, la criminalité n’est plus seulement une transgression de la loi : elle devient un mode d’organisation du pouvoir. Elle instaure, à l’échelle locale, un système de prélèvement symbolique — parfois matériel — sur ceux qui sont perçus comme étrangers à l’espace social des jeunes dominants.

Le vol, l’intimidation, le racket, les agressions ne relèvent pas seulement du manque, mais de la reconnaissance inversée : c’est à la société de payer. Payer pour le respect. Payer pour avoir le droit de circuler. Payer pour exister dans un territoire qui vous est désormais disputé. C’est une jizya sans nom, sans texte, sans dogme — mais avec une évidence ressentie. C’est l’actualisation brute du schème ancien : « Nous sommes ici, vous êtes tolérés. » J’insiste sur ce point : la démocratie est fragile car elle suppose l’adhésion intérieure à une communauté de semblables.

Quand cette adhésion se défait, ce n’est pas seulement le respect de la loi qui vacille: c’est la possibilité même de faire société. Or nous assistons aujourd’hui à une démutualisation radicale:

• l’État n’est plus une institution commune,

• l’aide n’est plus un outil de solidarité,

• la loi n’est plus un horizon partagé,

• le territoire n’est plus un espace commun.

Dans cette brèche, se réintroduisent des formes anciennes de rapports sociaux, non démocratiques : la hiérarchie, le tribut, la domination symbolique. La modernité ne recule pas devant l’islam: elle recule devant la désappartenance.

La crise du “nous”

Le parallèle entre jizya, délinquance et assistance sociale révèle une vérité plus large : la France ne souffre pas d’un problème religieux, mais d’un problème de communauté politique. Là où l’appartenance se défait, la dette imaginaire renaît. Là où le “nous” disparaît, la société redevient une juxtaposition de groupes — certains exigeant des autres un tribut pour accepter leur présence.

Ce qui se joue aujourd’hui n’est pas un conflit de religions, mais une crise de l’intégration politique, où les formes archaïques du rapport de force trouvent un terrain pour s’actualiser. C’est cette crise que je nous invite à comprendre : l’effondrement du lien civique comme matrice de toutes les déviations présentes — y compris celles que nous croyions reléguées aux marges de l’histoire.

La société malade

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Vengeance au poing

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Hervé Bazin: de Sainte-Anne au restaurant Drouant ?


C’est une œuvre qu’on lisait au collège. Les professeurs raffolaient de Vipère au poing, roman d’Hervé Bazin, et de son héroïne Folcoche, la mère mauvaise. Style sec, assez dur, et surtout un portrait au vitriol de cette femme qui martyrise ses trois enfants, dont le surnommé Brasse-Bouillon, narrateur contant les souffrances corporelles et psychologiques subies. Folcoche n’est pas Médée, elle ne tue pas ses enfants, mais c’est presque pire, elle les fait souffrir dans une vaste demeure provinciale transformée en univers concentrationnaire. C’est sa seule jouissance. Brasse-Bouillon lui résiste. Le garçon a du caractère et du courage. Il ne ressemble en rien à son père, veule et transparent, qui préfère collectionner les mouches plutôt que d’affronter sa déglinguée d’épouse.

A lire aussi: Deux nouveaux Immortels

Succès de librairie

Ce violent roman d’apprentissage plaît à l’Éducation nationale car il montre la bourgeoisie sous un jour peu flatteur, où la moisissure des esprits discrédite une classe sociale jugée corrompue. Le succès de ce roman, publié en 1948, est fulgurant – 5 millions d’exemplaires vendus à ce jour. Folcoche devient Alice Sapritch le temps d’un téléfilm, en 1971 : une femme aux traits peu gracieux et à l’âme noire. L’héroïne d’Hervé Bazin est devenue le parangon de la mère sadique.

L’auteur se nomme en réalité Jean Hervé-Bazin. Il n’est pas tout jeune – né en 1911 – quand Grasset, l’éditeur qui vend des romans comme on vend des savonnettes, décide de publier le manuscrit. Il le rajeunit de quelques années, car c’est le cri de rage d’un jeune homme contre un père dévalorisé et une mère castratrice. Ce premier roman se veut entièrement autobiographique. D’aucuns considèrent qu’il faut attendre que la mère soit morte pour écrire efficacement. Hervé Bazin, lui, écrit pour tuer symboliquement la mère. La littérature a tout à y gagner. Mais Folcoche n’est pas Paule Guilloteaux, la mère de Jean et de ses deux frères. Elle est certes instable, maniaque, peut pincer sa progéniture, lui imposer la disette – ces notables de province ont des problèmes d’argent –, elle enferme tout à clef, même certains membres de sa famille, mais ce n’est pas l’ogresse décrite par son fils. Il a grossi le trait, et pas qu’un peu. Le futur président de l’académie du prix Goncourt, l’écrivain aux romans à gros tirages, le critique craint, bref l’homme qui règnera sans partage sur les lettres françaises, ferraillant contre Alain Robbe-Grillet et la bande du Nouveau Roman, invité perpétuel de l’émission Apostrophes, cet homme-là est un menteur, manipulateur, mythomane. Pire, c’est un faussaire, kleptomane, repris de justice, usurpateur d’identités, amant compulsif, interné psychiatrique. Son itinéraire pourrait se résumer ainsi : de Saint-Anne au restaurant Drouant.

Crime littéraire

Émilie Lanez a enquêté sur ce cas singulier déclaré « psychopathe constitutionnel » par les psys. Elle a retrouvé les témoins, a arpenté les lieux de ce crime littéraire. Elle a consulté les archives de la préfecture de police de Paris. Le dossier Bazin, malgré de nombreuses pièces effacées par l’intéressé lui-même, est consternant. L’auteure révèle une famille dévastée par ce roman. Un roman qui n’est pas autobiographique, là est la faute majeure de Jean Hervé-Bazin. On peut tout inventer – Clara Malraux revendiquait pour l’écrivain d’être mythomane – mais l’ouvrage ne doit pas être estampillé autobiographique. Le livre-enquête de Lanez intitulé Folcoche n’est pas manichéen. Elle parvient à montrer que l’écrivain retors était mu par un irrépressible désir de vengeance contre les Guilloteaux, en particulier Paule, la figure dominatrice. On apprend que ses parents sont partis à Shanghai, les confiant, lui et ses frères, à sa grand-mère puis à sa tante. Jean Hervé-Bazin a souffert d’une sorte d’abandon, d’autant plus qu’il fut trépané à la suite d’une otite mal soignée. Il ne pardonna pas non plus d’être privé de sa part d’héritage. Le succès littéraire lui a permis d’assouvir une vengeance venue de loin. Hervé Bazin, neveu de l’académicien René Bazin, fils de magistrat, petit-fils de sénateur, a assurément vrillé, mais non sans raison. Sa tête de Frankenstein à la drôle de coupe de cheveux couleur jais cachait de profondes cicatrices intérieures. Lorsqu’il apprend que le manuscrit de Vipère au poing est accepté, il déclare à son frère Pierre : « Il faut le dire, j’ai besoin d’un peu de scandale pour hausser la voix et me faire entendre à mon heure, je sais d’avance que la famille va rugir. Aucune importance ! C’est ma petite revanche ! Et je me marre à l’idée de gagner de l’argent pour la première fois sur le dos de ma mère. » L’argent, maître-mot dans cette histoire ? c’est probable. Avec un retournement de situation que je vous laisse découvrir. On n’est plus chez Bazin mais chez Balzac.

A lire aussi: «Le Dernier tango à Paris» ou le scandale permanent

Folcoche, personnage d’encre a-t-elle dévoré Laure Guilloteaux ? On voit cette dernière errer dans une maison en ruine, pouilleuse depuis la mort de son mari. Sa volonté reste cependant intacte quand le pognon est en jeu. Elle ne sombre pas totalement, elle qui calmait ses fils trop turbulents à table en leur piquant le dos des mains avec sa fourchette. Rien n’est simple dans cette histoire, Émilie Lanez le montre avec objectivité. Paule, au fond, n’est plus depuis longtemps, et le triomphe de Folcoche, offrant la notoriété, l’argent et la stabilité à son enfant malade n’est pas pour lui déplaire. Le sacrifice maternel est sans limite. Comme peut l’être l’attitude scandaleuse d’un fils. Il suffit de relire Ma mère de Georges Bataille pour s’en convaincre.

Au soir de sa vie, Paule trouve refuge au domicile de l’écrivain. Bazin, pervers narcissique, l’accueille le visage grave. Il convoque des reporters de Paris-Match pour photographier l’agonisante. Lanez décrit la vieille dame « bouche desséchée entrouverte, derniers cheveux collés sur son crâne, mains crispées ». Bazin prend la pose. L’écrivain est un monstre froid.

Émilie Lanez, Folcoche, Grasset, 2025. 192 pages.

Folcoche: Le secret de "Vipère au poing". Enquête sur un meurtre littéraire.

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Moll face aux « violences policières »

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Police coupable, forcément coupable…


Paris, 8 décembre 2018. La famille Girard, originaire de Saint-Dizier en Haute-Marne – ville en difficulté économique malgré l’implantation de la BA 113, dotée du chasseur Rafale, fleuron technologique de l’Armée de l’air – se rend à Paris pour participer à une manifestation du mouvement des gilets jaunes. Détendus et calmes, la mère, ses deux fils, sa fille et son compagnon Rémy chantent avec entrain Siffler sur la colline, de Joe Dassin, durant leur trajet vers la capitale. Malheureusement, le fils aîné, Guillaume, 20 ans, est grièvement blessé par un tir de LBD en pleine tête, tandis que Rémy est arrêté puis condamné à trois mois de prison.

A lire aussi: Le jaune de la discorde

Avec cette huitième fiction, Dominik Moll, réalisateur intéressant mais jamais totalement convaincant, décide d’aborder le sujet des violences policières. Il suit l’enquête menée par Stéphanie, commandant de police à l’IGPN[1], interprétée par Léa Drucker, une nouvelle fois juste et remarquable. Servi par une mise en scène sèche et rigoureuse, par des cadres au cordeau, par la belle lumière du chef opérateur Patrick Ghiringhelli et par un montage ingénieux et captivant, le film s’impose comme un polar tendu et nerveux.

Une œuvre politique fragile

C’est également une œuvre politique ambiguë qui aurait pu être précise et nuancée, mais qui se trouve, selon moi, desservie par les biais idéologiques de son réalisateur: la police y est présentée comme violente envers les manifestants et les habitants des banlieues, et comme bénéficiant d’une forme d’impunité en raison du poids de ses syndicats et de la volonté supposée des autorités politiques et judiciaires de minimiser ces faits.

A relire, Elisabeth Lévy: Flics Lives Matter

Les bavures existent et sont parfois reconnues. Des policiers sont incarcérés, et l’affaire Nahel en est une illustration, même si elle demeure très controversée. Mais la police peine également à assurer la sécurité, l’ordre et le calme républicains, notamment faute de soutien suffisant.

La faiblesse d’un récit   

Dommage que la belle facture cinématographique de Dossier 137 soit affaiblie par quelques phrases appuyées visant la police, les élites économiques ou les autorités. La faiblesse du film tient surtout à une scène peu crédible, véritable coup de force scénaristique : la présence, derrière une fenêtre du troisième étage d’un grand palace, d’une femme de chambre noire qui a filmé la scène et permet d’étayer l’accusation…

Le coup de force scénaristique a toujours pour fonction de servir une démonstration. Pourtant, la force et la subtilité d’un récit, la multiplicité des points de vue et une mise en scène attentive à révéler le réel devraient suffire. Dommage : il semble difficile pour Dominik Moll de passer du statut de réalisateur à celui de cinéaste.

1h55. Sortie en salles le mercredi 19 novembre 2025


[1] IGPN : Inspection générale de la Police nationale. Service du ministère de l’Intérieur chargé de contrôler l’action des policiers, d’enquêter sur les manquements éventuels et de veiller au respect de la déontologie.

Camille Étienne ou le non-sens écolo

Les révolutionnaires du climat passent leur temps à tordre les études scientifiques pour les transformer en arguments d’autorité


Fête de L’Humanité, septembre 2025. Camille Étienne participe à une table ronde, intitulée « Reculs environnementaux : comment lutter ? » où elle déclare : « Ce qu’on fait [nous les activistes], c’est uniquement de dire “on écoute la science”, on écoute l’alerte unanime des meilleurs scientifiques mondiaux qui nous disent “nous sommes en train de sortir d’une zone de sûreté pour l’humanité”. » La jeune militante fait alors référence à une étude du Stockholm Resilience Center, publiée en 2009, qui a établi neuf limites planétaires, comme le changement climatique, l’acidification des océans, le cycle de l’azote et du phosphore, ou la perte de biodiversité… Poursuivant sur sa lancée, elle s’exclame : « On en a déjà dépassé six. Cela devrait suffire à créer un soulèvement ! » Voilà donc une étude scientifique transformée en bréviaire de la rébellion. On ne rappellera jamais assez à quel point cette foi placée dans un papier scientifique trahit l’esprit même de la science. D’abord, Camille Étienne oublie qu’une étude scientifique est, par définition, discutable. Celle-ci l’est à plus d’un titre. Pour ne prendre qu’un seul exemple, l’une des « limites » concerne la pollution chimique. Les auteurs de l’étude décrètent qu’elle est franchie dès lors que l’innocuité d’une nouvelle substance synthétique n’a pas été démontrée. Comme ce travail n’a pas été fait pour toutes les substances inventées par les chimistes, ils concluent que la limite est dépassée, depuis longtemps. Mais c’est absurde ! Ce n’est pas parce que cette innocuité n’a pas été formellement démontrée que l’humanité est en danger. Ensuite, même si ce travail était irréprochable, il n’aurait aucune portée prescriptive. La science cherche à dire ce qui est, non ce qu’il faut faire. L’idée qu’une étude scientifique puisse à elle seule justifier un soulèvement populaire – contre quoi, d’ailleurs ? – relève donc du non-sens. Malheureusement, Camille Étienne, qui ne comprend pas grand-chose à la science, s’en sert comme alibi pour ses aspirations révolutionnaires.

Dépenses publiques: le crépuscule des magiciens

Après quarante ans d’addiction à la dépense publique, la France est incapable de se serrer la ceinture. Le débat budgétaire ne reposant que sur l’argent et la pensée magiques, les sources d’économies proposées sont dérisoires et les hausses d’impôts inévitables. Tel est l’héritage d’une extrême gauche nommée PS.


En mettant en cause le tropisme français pour la dette, les déficits et donc la dépense publique irraisonnée, François Bayrou a déchiré pendant quelques jours le voile impudique de notre irresponsabilité collective. Panique chez les chamanes en charge de notre culture économique, le pot aux roses (socialistes) menaçant d’être découvert, il était nécessaire d’en remettre un coup sur le druidisme financier et les fantasmes comptables qui guident nos responsables politiques, médiatiques ou syndicaux depuis quatre décennies.

Harry Potter à Bercy

Pour ces sorciers, nos déficits n’ont bien sûr rien à voir avec le niveau de nos dépenses – jamais à la hauteur des véritables besoins d’une population victime, à les entendre, d’une austérité ultra-libérale – mais tout avec le niveau, anémique, des recettes, grevées des fameux « cadeaux aux riches ». Et que je te sors la taxe Zucman de mon chapeau (ça change de l’antienne du retour de l’ISF), mais ça ravit toujours le même public : ceux qui ne seront pas concernés ou n’ont jamais créé une entreprise. Un bon impôt est en effet celui payé par les autres. Faire remarquer aux adorateurs du percepteur les différents records d’inspiration soviétique que ce pays affiche – 57 % du PIB consacré aux dépenses publiques ; un taux de prélèvement obligatoire himalayesque (43 %) ; 10 % des plus riches qui paient 75 % de l’impôt sur le revenu – vous vaudra d’être souffleté à coups d’amulettes. Préparez-vous à voir votre poupée vaudou transpercée de multiples aiguilles s’il vous prenait l’idée saugrenue de vous assurer que les « zucmanolâtres » savent distinguer revenus du patrimoine – Éric Coquerel, LFiste et président de la commission des Finances à l’Assemblée, lui, ne le sait pas. C’est un peu comme si votre garagiste ignorait la différence entre un pneu et une boîte de vitesses, mais c’est aussi une bonne illustration de l’incurie globale. C’est à la hache que la figurine à votre effigie sera nuitamment coupée en deux, si vous vous aventuriez à souligner que les inégalités en France figurent dans la moyenne basse de l’Union européenne et qu’elles n’ont pas beaucoup évolué depuis 2017. Elles sont stables pour les revenus et ont enregistré une hausse modérée en termes de patrimoine, une augmentation massivement liée à celle de l’immobilier, elle-même corrélée à la politique de taux d’intérêt très faible… inconsciemment plébiscitée par tous les Français, puisque ces taux bas nous ont permis d’accumuler déficits et dettes bon marché. Alors certes, que certaines optimisations fiscales à base de mystérieuses holdings (ça sonne un peu comme hold-up) puissent être reconsidérées, pourquoi pas. Espérer en retirer plus d’un milliard par an, alors que nous sommes face à un déficit récurrent de 170 milliards, c’est nommer Harry Potter à Bercy. Une pensée magique dans laquelle on confond millions et milliards allègrement. Pourquoi ? Parce qu’on s’en fout.

A lire aussi, Jean-Jacques Netter: Le mur des comptes

Autre cible démagogique du vaudouisme franchouillard, les rémunérations des élus et autres ministres seraient exorbitantes. « On n’a qu’à commencer par faire des économies, là. Non, mais c’est un peu vrai ? » Édith Cresson, jadis célèbre pour la brièveté de ses responsabilités de Premier ministre — un bail emphytéotique désormais aux yeux des Attal, Barnier, Bayrou, Lecornu –, Édith, donc, ne se vit retirer son chauffeur qu’en 2016, soit vingt-quatre ans après sa sortie de Matignon. On peut en faire des gorges chaudes sur les réseaux sociaux, le nouveau zinc depuis la disparition des bistros, mais penser trouver là des sources d’économies significatives ressemble à une échappatoire désespérée. Nos ministres et nos députés sont plutôt moins bien rémunérés qu’ailleurs et le coût global de notre démocratie (présidence de la République, Assemblée, Sénat, tous élus locaux confondus) s’élève à 3 milliards d’euros, sur un total de dépenses publiques supérieur à 1 700 milliards : 0,2 %. O.K. ? Une baisse de moitié découragerait définitivement tout candidat un peu cortiqué à des responsabilités électorales, sans rien régler à nos déficits.

Économies sur l’immigration: pas de miracle

Les étrangers et leur protection sociale – choquante lorsque non assise sur des contributions ou supérieure à celle des citoyens français – recèlent une piste plus sérieuse d’économies, pourtant âprement non débattue (10 milliards ? plus ?). Mais elle ne constitue en rien une baguette magique qui permettrait d’épargner aux Français des efforts significatifs. À commencer par ces satanées retraites auxquelles la France consacre la bagatelle de 22 % de ressources supplémentaires qu’ailleurs – 14,5 % du PIB chez nous, 11,9 % chez nos voisins, soit une différence de 75 milliards (!). Non, le système de retraite par répartition n’est pas sauvable, ni à 62, ni à 64, ni même sans doute à 68 ans (et encore moins à 60 !). Au demeurant, les Français le savent parfaitement, puisqu’ils ont un taux d’épargne quatre fois plus élevé qu’aux États-Unis et supérieur à l’ensemble des pays comparables. Ils votent donc, en secret, pour la capitalisation tout en exigeant le renflouement du Titanic de la répartition, dont l’équation démographique est mathématiquement intenable : trop de vieux, qui vivent trop longtemps sans avoir fait assez d’enfants. Au secours Harry Potter !

Rétive à se serrer la ceinture après quarante ans d’addiction à la dépense publique, la France se raconte à elle-même des billevesées. Concluons par l’une des meilleures blagues du paysage politico-médiatique : non, le Parti socialiste français n’est pas un parti « social-démocrate ». Cherchez ailleurs en Europe ou dans le monde un mouvement prônant la taxation frénétique de toute réussite, la hausse infinie des prélèvements obligatoires, l’extension sans limites de l’intervention de l’État, l’ignorance de tout péril migratoire ou sécuritaire – vous ne trouverez que des mouvements classés à l’extrême gauche. Justice fiscale ! Pour le PS, comme pour toute la gauche, il n’y a qu’en matière de fiscalité que la justice s’apparente à une matraque. Tout en ayant perdu la moitié des élections, c’est pourtant lui qui nous aura gouverné – et tapé fort – de 1981 à 2025 inclus. Si ça, c’est pas de la vraie magie…

Lutte contre le narcotrafic: cherchez l’erreur

Un oubli stupéfiant


À les entendre, on va voir ce qu’on va voir. Les caïds, les papes et les sous papes du commerce de ces armes de destruction massive que sont la cocaïne, l’héroïne, le crack, j’en passe et des meilleurs, n’étant pas du tout spécialiste de la chose. Et puis quand bien même, avant d’en avoir terminé avec une liste qui se voudrait exhaustive, des éprouvettes de ces alchimistes de la mort seraient sortis trois ou quatre nouveaux dérivés d’opiacés jusqu’alors inconnus sur le marché. Car, s’il y a bien un domaine où on n’arrête pas le progrès, où l’innovation est reine, c’est bien celui-ci.

On ne compte plus les morts, on ne compte plus les zombies décérébrés à force de came, les morts au champ d’horreur du trafic et des règlements de compte. Pas plus qu’on ne parvient vraiment à compter les milliards que cela rapporte. Le budget de certains Etats de la planète font, paraît-il, très pâle figure en comparaison. On en est là. Des milliards, de quoi acheter les consciences, corrompre tout ce qu’il y a de corruptible parmi le genre humain. C’est-à-dire à peu près tout le monde…

Mais voilà bien que ces jours-ci, les sommités de l’État consentent à sortir de leur torpeur et, comme je vous le disais en commençant, jurent-elles leurs grands dieux : « On va voir ce qu’on va voir ». Voilà  ce qu’elles nous annoncent, bravaches, menaçantes, terribles. Juré-craché, voilà qu’elles partent en croisade comme jamais contre les trafiquants, gros ou moins gros, les dealers blanchis sous le harnais ou encore en couche culotte, les consommateurs des bas-fonds comme des beaux quartiers, des bordels clandestins comme des ministères (mais si, mais si…) Bref toute la chaîne est dans le collimateur. On ne rigole plus ! Jusqu’alors la croisade contre la poudre à sniffer n’a été que de la poudre aux yeux, mais ces temps-là sont résolus. Puisqu’on vous le dit ! La France se mobilise, l’Europe entière se mobilise. La guerre est déclarée.

Quelle tartufferie ! Jusqu’à quand ces gens continueront-ils à se foutre de notre gueule sur des sujets aussi graves que celui-là !

La guerre au narcotrafic, prétendent-ils ? Ah oui, quelle guerre ?…

Peut-être conviendrait-il de commencer par le commencement. S’en prendre aux pays producteurs en exigeant qu’ils éradiquent de leurs territoires jusqu’à la moindre production de ce genre, cela en préalable à toute discussion diplomatique ou commerciale. On les connaît, ces pays de cocagne mortelle. Pour une bonne part, ils sont à chercher en Amérique du Sud. Parmi les premiers pays producteurs de la planète ne trouve-t-on pas en effet, le Pérou, la Colombie, la Bolivie, le Guyana, le Brésil…

Au cas où vous auriez du mal à retenir cette liste, pas de souci. Vous n’aurez qu’à vous reporter à celle des pays devant lesquels l’Europe – notre belle et grande Europe – s’empresse de dérouler le très juteux tapis rouge de la grande foire libre-échangiste, le Mercosur. Vous y retrouverez les mêmes noms, les mêmes pays…

Comme dirait l’autre, cherchez l’erreur.

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Un J. D. Vance bien de chez nous

Alexandre Avril est maire de Salbris depuis 2020. À la tête de cette commune du Loir-et-Cher de 5000 âmes, ce trentenaire intello, ex-LR rallié à Éric Ciotti, embellit l’espace public, sécurise la vie de ses administrés et défend un esprit vieille France. Pour les progressistes de la capitale, c’est la signature d’un dangereux néoréactionnaire.


À mi-chemin entre Lamotte-Beuvron et Vierzon, Salbris, deux minutes d’arrêt. À peine sorti du TER, une vision enchanteresse accroche le regard. Comme échappé d’un songe péguyste, une immense nef païenne en bois flambant neuve a été construite devant la gare. Dessiné par le maire de la ville en personne, c’est le nouveau marché municipal, arborant blasons et poutres apparentes pour mieux ressusciter les halles couvertes que rasaient les maires – fameux « bâtisseurs » – des Trente Glorieuses.

Alexandre Avril intrigue

Jadis cité industrielle, Salbris, 5 000 habitants, a connu la gloire des usines Matra et des missiles. Elle est à présent l’un de ces appendices excentrés du Bassin parisien, où se réfugie une classe moyenne qui ne se sent plus tout à fait chez elle dans les banlieues proches de la capitale. Une commune que le sociologue Jérôme Fourquet et le romancier Nicolas Mathieu auraient dû inventer si elle n’avait pas existé. Elle passionne les Rouletabille de la presse politique parisienne. Monsieur le maire, Alexandre Avril, intrigue.

La une de Libé en mars dernier, des enquêtes accablantes dans L’Humanité et dans Mediapart : les médias de gauche dépeignent l’édile en dangereux symbole du vent mauvais néoréactionnaire qui souffle sur la France. Il faut dire que le jeune homme de 33 ans porte la veste en tweed comme personne et qu’il commente régulièrement l’actualité sur Europe 1 et CNews.

Alexandre Avril a conquis la mairie de Salbris en 2020, lors d’un scrutin où la plupart de ses pairs ont été reconduits au bénéfice du confinement et de l’abstention. Ancien cadre LR aujourd’hui vice-président du parti d’Éric Ciotti, il siège avec le RN au conseil régional et brille par ses méthodes bardelliennes de communication numérique, qui conjuguent stories Instagram à la chaîne et expressions de grand-mère du genre « Par Toutatis le ciel nous est tombé sur la tête ».

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Comment les Salbrissiens jugent-ils son activisme ? Réponses pêchées dans un café situé face à l’hôtel de ville, où la déco vous plonge en pleines fifties – cuisine familiale, nappes à carreaux, néons d’anthologie… Jean-Yves, tenancier mi-nostalgique mi-dévot de l’établissement baptisé « Saint Yves », ouvre le procès en canonisation du maire. « Alexandre a redressé les comptes de la mairie et fait sortir des projets des cartons », assure-t-il. Deux clients habitués abondent : « Il met des pots de fleurs et des caméras et des policiers municipaux, qui protègent nos maisons quand on part en vacances », notamment des « bandes de jeunes venus de Paris ».

Bien sûr tout le monde n’est pas d’accord. Autour du zinc, d’autres administrés décrivent un maire « trop autoritaire », qui fait « de la com non-stop avec des jardinières partout » et se focalise sur le centre-ville au détriment des « quartiers extérieurs ». Tous lui reconnaissent cependant son dynamisme. « Qu’on l’aime ou pas, résume un habitué, il fait des trucs. »

Redressement productif

Parmi les « trucs » réalisés par Alexandre Avril : l’implantation récente d’une usine alimentaire innovante. Le concept est original. Ici on prépare des produits de boucherie à partir de venaisons achetées aux équipages de la région. « L’essentiel des animaux chassés dans notre pays sont jetés et 90 % du gibier consommé est importé, c’est une aberration qu’il faut corriger », explique le maire, qui a joué les entremetteurs pour aider la start-up L’Atelier du Loup à lever 5 millions d’euros, notamment auprès de diverses grandes fortunes possédant des propriétés dans le coin.

Cependant, si Alexandre Avril inquiète tant dans les rédactions progressistes parisiennes, ce n’est pas à cause de ses ambitions de redressement productif dans le Loir-et-Cher. C’est l’intellectuel brillant qui fait peur. Issu d’un milieu simple, il a réussi le concours de la Rue d’Ulm, décroché un diplôme de droit à la Sorbonne, fait HEC et rédigé une thèse sur les correspondances entre Nietzsche et René Girard. Pire encore, il aimerait faire souffler sur son terroir l’esprit des hauteurs, façon colline de Sion en Lorraine.

À la guerre culturelle comme à la guerre, on le retrouve un soir d’été dans un manoir de brique rouge, un de ces châteaux bourgeois dont les ploutocrates du xixe couvraient solennellement leurs terrains de chasse et bords lacustres. Un internat catholique y est désormais installé, premier-né des académies Saint-Louis, ces « Eton à la française » financés en partie par le richissime Pierre-Édouard Stérin. Accueillant depuis la rentrée une soixantaine de collégiens, on y dispense une éducation pré-soixante-huitarde non mixte, avec du latin, de l’aviron sur le gigantesque plan d’eau et des cours de théâtre dans une grange transformée en splendide salle de spectacle. Un lieu de « formation pour une nouvelle élite réactionnaire » fulmine Libération.

Rien de terrifiant sur place pourtant. Le directeur, ancien cadre de l’enseignement privé sous contrat, plusieurs années de métier, passionné d’instruction et de pédagogie nous fait visiter l’amphithéâtre, discute de l’oralité dans les cursus scolaires et des options à la mode dans certains lycées parisiens. Comme la combine politique paraît loin !

Puy du Fou du pauvre

À Salbris, le clou du spectacle est un spectacle intitulé « Salera ». Une reconstitution de la guerre des Gaules lancée par le maire en 2023, avec chars, gladiateurs, druides tatoués, jeux pour enfants et marchés d’artisans dont on sort le sac rempli de savons celtiques et d’hydromel IPA local. Qu’importe que les mauvaises langues de Libération y voient, avec leur habituelle pointe de racisme social, « un Puy du Fou du pauvre », l’édition 2025 a fait le plein avec un mélange baroque d’autochtones solognots fumeurs de Gitane et de résidents secondaires en pantalons rose saumon.

Résumons. Des origines modestes, des études hors norme, une parfaite maîtrise des réseaux sociaux, quelques milliardaires dans son carnet d’adresses, une proximité assumée avec la religion catholique et un certain talent pour réenchanter sa province désindustrialisée : Alexandre Avril a quelque chose d’un J. D. Vance à la française, ressemblance physique en prime. Pour l’instant les jardinières, l’usine de gibier, l’internat élitiste, le festival historique populaire. Et demain ? Ad Augusta per angusta. Selon Le Nouvel Obs, Pierre-Édouard Stérin envisage de pousser sa candidature aux élections présidentielles de… 2032.

En finir avec la gauche radicale dans nos mairies

Lyon, Grenoble, Bordeaux, Poitiers… À quelques mois des prochaines élections municipales, il est temps de dresser le bilan calamiteux des majorités d’extrême gauche qui sévissent depuis cinq ans — ou parfois beaucoup plus comme à Nantes— , dans nos grandes villes.


Les élections municipales de 2020, qui ont connu une participation historiquement faible en raison de la pandémie de Covid, ont vu la victoire surprise de la gauche et de ses alliés d’extrême gauche dans un grand nombre de grandes villes françaises, dont Grenoble, Poitiers, Annecy, Bordeaux, Marseille, Strasbourg, et tant d’autres.

À Nantes, où le PS tient la ville depuis près de quarante ans, la maire Johanna Rolland, numéro 2 d’un PS en perte de vitesse, n’a pas hésité à s’allier avec le pire de la gauche radicale pour sauver son siège. Les Nantaises et les Nantais paient cette trahison au prix fort avec notamment une insécurité endémique, une circulation impossible, des commerces en difficulté croissante, et une dette colossale de la ville. La situation est si grave que la ville est devenue le symbole national du fiasco de la gauche radicale : « nous ne voulons pas devenir comme Nantes », entend-on partout dans l’hexagone. Mais la maire de Nantes n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Son projet pour la prochaine mandature ? Faire de Nantes « une ville refuge des exilés (OQTF welcome), quelle que soit leur situation administrative (appel clair à ne pas respecter la loi)».    

Bilans catastrophiques

À quelques mois des prochaines élections municipales, l’heure est au bilan de ces majorités d’extrême gauche qui sévissent depuis cinq ans, hostiles aux valeurs républicaines les plus élémentaires jadis partagées par la gauche. A Bordeaux, ville calme et florissante depuis des décennies sous la gouvernance de Chaban puis de Juppé, il aura suffi d’un seul mandat du maire EELV Pierre Hurmic (et de ses alliés anti-laïcité, anti-flic, anti-capitaliste, anti-voiture, mais pro Hamas et pro wokisme…) pour voir exploser les liquidations judiciaires des commerces du centre-ville. Plus 40% en un an, comme l’a souligné récemment la CCI de la Gironde ! L’impossibilité de circuler et de se garer dans la ville, combinée à l’explosion des atteintes aux personnes et aux biens, a transformé Bordeaux la paisible en zone de non-droit, à l’image de Nantes et Grenoble, comme le soulignait encore la CCI locale.

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Partout où l’extrême gauche sévit, le bilan de ces majorités clientélistes et peu ou prou le même : catastrophique. Les habitants se sentent abandonnés, les commerçants méprisés, les incivilités sont devenues monnaie courante, et pire que tout, les femmes ne se sentent plus en sécurité quand elles marchent dans les rues. Dans une séquence hallucinante d’un récent Conseil municipal de Bordeaux, Thomas Cazenave, élu d’opposition centriste, s’est vu qualifié de « trumpiste » par le maire écologiste. Son crime ? Avoir souligné l’insécurité délirante qui règne dans la ville, et demandé le rétablissement de l’éclairage public la nuit, ainsi que le doublement des effectifs de la police municipale. Ces mesures de bon sens, destinées à protéger les habitants d’individus dangereux, sont aujourd’hui qualifiées de « politiques d’extrême droite » par les idéologues de la gauche radicale. Confrontée aux conséquences désastreuses de son angélisme et de son communautarisme, la gauche radicale ne connaît qu’une réponse : traiter de « trumpiste » ou de « facho » ceux qui se soucient de la sécurité de leurs concitoyens. Partout en France, ces attaques nauséabondes, qui ne correspondent à aucune réalité, sont subies au quotidien par les élus d’opposition qui osent s’attaquer à la démagogie de l’extrême gauche, et à son sentiment de supériorité morale. Les Français ne sont pas dupes, et ils le feront savoir dans les urnes en mars prochain.  

Il est temps d’en finir partout en France avec cette gauche radicale municipale, qui a renoncé à la sécurité et au bien-être de ses administrés pour celui de ses propres intérêts. Leur unique ambition : rester en place coûte que coûte, quitte à s’allier avec les antirépublicains les plus infréquentables.

Cadres de vie : la dégringolade

Comme nous le faisons à Nantes, il est urgent que tous les candidats aux municipales qui aiment la France et ses valeurs, qui aiment leur ville, qui refusent l’insécurité et le clientélisme, s’unissent dès le premier tour pour mettre fin au déclassement sans fin des villes de France tombées entre les mains de l’extrême gauche. À titre d’exemple, dans le classement des « villes où il fait bon vivre », Nantes était 2e ville française en 2014 (date de l’élection de Johanna Rolland). Elle est désormais 47e en 2025, plus célèbre pour son centre-ville coupe-gorge que pour son attractivité. Lyon déjà mal en point avec la 56e place en 2020, date de l’élection de l’écologiste Grégory Doucet, est désormais 79e en 2025… Il ne s’agit plus de déclassement mais d’effondrement.

La victoire est possible dans toutes ces villes abîmées par la gauche radicale à condition de proposer un programme alternatif puissant, rationnel et rassembleur. Une élection municipale n’est pas une affaire d’étiquette politique, et n’a donc rien à voir avec des législatives ou une élection présidentielle. L’élection d’un maire est celle d’un habitant parmi les habitants, amoureux de sa ville, qui n’a d’autre objectif que la quiétude et la prospérité de ses habitants. Un bon maire n’est pas l’homme d’un clan ou d’une communauté, mais un élu au service de tous, travaillant sept jours sur sept, toujours à portée d’engueulade de ses administrés. Comme le dit souvent David Lisnard, Président de l’Association des Maires de France et Maire de Cannes, « être maire, c’est le plus beau des mandats ». Le plus difficile et exigeant aussi.

Empêcher la gauche radicale de poursuivre son travail de destruction rapide et méthodique de nos grandes villes est une urgence existentielle pour la France. Quelques mesures de bon sens, qui ne sont par définition ni de gauche ni de droite, mais qui sont réclamés par la majorité de nos concitoyens, doivent être au cœur de nos programmes.

Il est temps d’en finir avec l’aveuglement de la gauche qui refuse de voir l’ensauvagement de la société. Nos concitoyens réclament pour eux et pour leurs enfants plus de sécurité, et une présence policière visible. Il est urgent d’augmenter les effectifs de la police municipale, d’armer ces policiers, et de doter nos villes de système de vidéosurveillance à la hauteur. Ce que refuse de faire la gauche, refusant même des CRA (centre de rétention administrative) pour les délinquants, souvent multirécidivistes, qui n’ont rien à faire sur notre territoire. En finir avec l’angélisme nécessite également de couper les vivres aux délinquants. L’argent public n’a pas à subventionner ceux qui détruisent la société : priver d’allocations et de logements sociaux les grands délinquants et dealers condamnés est une urgente nécessité.    

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Sur le plan économique, il n’est plus possible de poursuivre des politiques pseudo-écolo qui coûtent une fortune, étranglent les commerces de nos centres-villes en grevant le financement des urgences véritables. Les ZFE, ces « zones de fortes exclusions », qui empêchent les pauvres de circuler en voiture, doivent être abrogées ou adaptées aux citoyens les plus modestes. Il est possible de concilier mobilité douce et liberté de circuler.

Autre mesure de bon sens, un maire qui aime la République, — et qu’est-ce qu’une ville si ce n’est une petite république ? —, ne peut pas accepter de financer des associations antirépublicaines avec l’argent public. Un seul exemple, la maire de Nantes, une semaine après le pogrom du 7-Octobre en Israël, faisait voter une subvention à « France Palestine », une association islamogauchiste qui voit le Hamas comme des « militants de la paix ». Ce genre de subventions, dont on pourrait donner des milliers exemples à travers le pays, payés par les impôts des Français, ne doivent plus exister.

Christelle Morançais, en pointe dans la bataille culturelle

Sur le plan culturel, il est temps d’en finir avec la propagande aux frais du contribuable. Les budgets municipaux dédiés à l’art, aux artistes et aux établissements culturels, ne sont pas des chèques en échange de bulletin de votes. Défendons une culture de la liberté et du pluralisme, loin des oukases du tribunal de la bien-pensance. On ne fait pas de l’art avec des bons sentiments. Pas de culture forte et puissante sans liberté d’expression, sans liberté de ton ! Pas d’art dérangeant et révolutionnaire possible quand les corbeaux de la cancel culture et du wokisme reposent sur les épaules des créateurs, surveillant leur moindre écart. Un nouveau souffle culturel est nécessaire pour libérer la culture de l’emprise politique. Christelle Morançais, présidente du Conseil Régional des pays de la Loire, a eu raison d’annoncer la fin des subventions régionales automatiques à la culture, évoquant « le monopole intouchable d’associations très politisées, qui vivent d’argent public ».     

Il est temps, par ailleurs, d’investir massivement dans l’éducation et l’avenir de nos enfants via l’école et le périscolaire. Nous en finirons avec le délire du wokisme municipal, qui se moque de l’état lamentable de certains établissements scolaires, mais n’hésite pas par exemple à supprimer un terrain de foot dans une cour de récré, au motif que ce serait un sport « sexiste ».

Toutes ces mesures simples et de bon sens sont attendues, nous en sommes persuadés, par une large majorité de Français. Il est temps d’en finir avec l’extrême gauche, synonyme d’insécurité, de déclin économique et de propagande wokiste permanente. Nos villes et leurs habitants valent la peine qu’on se batte pour eux.

Un colloque qui a eu lieu ailleurs…

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L’annulation au Collège de France du colloque « La Palestine et l’Europe » émeut les amoureux de la liberté d’expression. Pour les adversaires les plus résolus d’Israël c’est carrément la liberté académique qui aurait été assassinée (!). Mais l’évènement a finalement eu lieu ailleurs, et tous ses intervenants douteux ont pu dérouler leur rhétorique antisioniste et se victimiser.


Le 9 novembre, l’administrateur du Collège de France, Thomas Römer, a annulé un colloque sur la Palestine et l’Europe qui devait avoir lieu quelques jours plus tard, en rappelant, entre autres, qu’un débat scientifique doit assurer une pluralité d’analyses et de perspectives. Il y a eu après cette annulation des communiqués de protestation qui auraient impliqué plusieurs milliers de chercheurs. On ne savait pas qu’il y avait en France autant de spécialistes universitaires sur le sujet… 

La foire aux experts

Disons les choses simplement, la partialité absolue du colloque crevait les yeux et le nombre de protestations ne change rien à cette réalité. Tout indique que ce colloque visait à promouvoir un narratif anti-israélien, dans le cadre d’une stratégie communicationnelle élaborée. L’organisme coorganisateur était le Centre arabe de recherches et d’études politiques, le Carep, financé par le Doha Institute for Graduate Studies, fondé par Azmi Bushara, ancien député arabe à la Knesset, démis pour espionnage en faveur du Hezbollah et proche de l’émir du Qatar. C’est d’ailleurs ce centre, qui se prétend évidemment neutre et scientifique et qui est situé – ça ne s’invente pas ! – rue Raymond Aron à Paris, qui a hébergé le colloque qui y a eu lieu après l’annulation.

Pour optimiser un message, le poids symbolique de son lieu d’émission et le prestige de celui qui l’incarne sont d’une importance capitale. Pour le lieu, rien de mieux que le Collège de France, sommet de l’excellence académique. Quant au porteur du colloque, on a soudainement entendu dans les médias que le Professeur Henry Laurens, titulaire de la chaire « Histoire contemporaine du monde arabe » du Collège de France et peu connu jusque-là dans le public, était la référence absolue sur le conflit israélo-palestinien.

Dans la fabrique de l’opinion, c’est Edward Bernays, double neveu de Sigmund Freud, qui, il y a cent ans, a montré l’importance de la parole des supposés experts, tels ces médecins qui poussaient alors les femmes à fumer parce que, entre autres, cela calmait les nerfs et permettait de maigrir. À l’époque du Covid, le délire de l’hydroxychloroquine a été porté par l’assertion absurde que le Professeur Raoult était unanimement reconnu comme le meilleur virologue du monde.

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Henry Laurens, un spécialiste du monde arabe qui ne connait pas le monde juif et ne veut pas le connaitre n’a invité à son colloque aucun historien ou politiste neutre ou un peu favorable à Israël. Dans ses livres une minutieuse documentation passe dans le lit de Procuste d’un filtre explicatif unique: Israël est la créature coloniale de l’Occident et rien d’autre ne compte. Interrogé le 23 octobre 2023, le Professeur Laurens qualifie l’accusation d’antisémitisme d’arme politique, souligne que les Palestiniens ont le droit de se défendre et avertit que le soutien de l’Occident à Israël va lui valoir dans le monde un ressentiment justifié. Quinze jours après les massacres du 7-Octobre qu’il juge implicitement comme une péripétie, il n’a aucun mot sur les victimes. S’il admet le terme d’atrocités pour les désigner, c’est toujours pour le mettre en regard d’un terrorisme israélien qualifié de structurel. En somme, Henry Laurens, c’est un Jean-Luc Mélenchon qui aurait obtenu une chaire au Collège de France. Denis Charbit, qui n’est pas un ultra-sioniste fanatique, démonte au scalpel sa rhétorique, aussi simpliste que biaisée.

Le mot colonial est un de ces termes figés qui servent à disqualifier l’adversaire en lui imposant une marque d’infamie qui ferme le débat. Mais que dire du mot génocide? Il était omniprésent dans l’intervention de Francesca Albanese, rapporteur des Droits de l’Homme aux Nations Unies, une des «guest stars» du colloque, dont les titres prestigieux  servent à promouvoir un narratif si odieusement anti-israélien qu’il a souvent été qualifié d’antisémite. Elle n’a pas droit à utiliser le terme de génocide sur lequel la Cour Internationale de Justice ne s’est pas encore prononcée, mais exploitant le prestige de sa fonction à l’ONU, elle le fait continuellement cherchant ainsi à flétrir Israël d’une étiquette ignominieuse qui a l’avantage supplémentaire de gommer la Shoah.

On trouve la même haine chez une autre vedette de ce colloque, Josep Borrell, ancien Haut-Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères. Au micro de France Culture il reprend sans réserve les chiffres de mortalité à Gaza fournis par le fameux, mensonger et d’ailleurs inexistant Ministère de la Santé du Hamas. Il reproche à son interlocuteur de ne pas être capable de saisir un massacre d’une telle ampleur et quand celui-ci, le journaliste Guillaume Erner, lui rétorque poliment qu’il vient d’une famille qui a payé son tribut à la Shoah, Borrell s’emporte contre cette allusion à un passé dont il dit qu’il est révolu et politiquement manipulé. C’est d’ailleurs un des thèmes du colloque.

Malaise

Ceux qui à juste titre ont tiré la sonnette d’alarme, la LICRA entre autres, étaient mal à l’aise avec l’idée d’interdire un colloque universitaire, et de fait celui-ci n’a pas été interdit, il a été déplacé. Bien entendu, les protestations ont porté sur la sacro-sainte liberté d’expression, particulièrement importante dans le monde de la Science. Voilà qu’on en était revenu aux temps de Galilée et de l’Inquisition.

Il ne faut pas être naïf. Il y a eu des pseudo-colloques scientifiques en Allemagne nazie sur les théories raciales, il y en a eu en Union Soviétique pour soutenir les thèses de Lyssenko. Pour qu’il y ait science, il faut qu’il y ait débat et discussion sur les désaccords, ce que ne proposait aucunement le colloque de M. Laurens.

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L’accusation que l’on essaie de restreindre la liberté n’est pas toujours un sursaut moral, c’est parfois un moyen d’inverser la charge morale. Comme tel, c’est un efficace outil de communication politique.

Certains de ceux qui ont protesté contre l’annulation n’avaient en même temps pas de mots assez durs pour fustiger la moindre présence ou manifestation pouvant être considérée comme pro-israélienne ou pas suffisamment anti-israélienne, dans les universités, les salles de concert ou les terrains de sport.

Ils n’ont rien inventé. Pas de liberté pour les ennemis de la liberté, c’était déjà la devise de Saint Just, le théoricien de la Terreur révolutionnaire. Comme lui, certains des partisans de ce colloque s’arrogent le droit de définir eux-mêmes ce qu’est la liberté acceptable. Quant aux autres, ils prennent plaisir à rester dans le confortable mirage de l’illusion et de l’aveuglement.

Je suis un film noir

Philippe-Henri Rambaud recense avec esprit et légèreté un pan glorieux de notre patrimoine: le polar ! Des classiques du noir et blanc aux productions récentes, voici 100 Films policiers français à voir absolument.


Quelle régalade ! Une sélection érudite sans œillères, populaire et finaude. À compulser à la nuit tombée sous des draps chauds. Une large vue d’esprit qui ne cantonne pas le policier à sa veine névrotique ou psychologique, qui ne fait pas seulement la part belle aux réalisateurs choyés par la critique. Les 100 Films policiers français à voir absolument, doivent absolument prendre place dans votre bibliothèque entre Les Nouveaux Mystères de Paris de Léo Malet et l’intégrale d’A.D.G. L’auteur de cette somme digeste et détaillée s’appelle Philippe-Henri Rambaud. Il est le créateur du site filmpolicier.fr. Cet expert en GAV (garde à vue) et filature, au savoir livresque, connaît ses classiques mais ne se borne pas à une période précise. Même s’il reconnaît que « l’âge d’or » se situe dans les années 1950, 1960 et 1970, sa compilation court de la casbah de Pépé le Moko (1937) au chalet de Justine Triet (Anatomie d’une chute, 2023).

Comment a-t-il pu choisir arbitrairement dans des milliers de bobines ? Il fallait avant tout définir le sujet sans le phagocyter. « Pour simplifier, disons que le crime est la condition sine qua non du film policier », avance-t-il dans son introduction. Sa raison d’être. « Sans crime, pas de film policier », finit-il par trancher. Ils sont tous là, les primés, les ténébreux, les braqueurs du box-office, les godelureaux et même ce farceur de Claude Chabrol avec son Inspecteur Lavardin. Il y a les attendus, ceux qui ont la carte des cinéphiles agenouillés : Melville et son Stetson sortant de son studio de la rue Jenner, Clouzot et sa « bonne humeur » légendaire sur le plateau ou encore Corneau et sa Série noire en bandoulière. Les classiques du noir et blanc (Duvivier, Becker, Dassin, etc.), qui ont une parenté avec Les Confessions d’un enfant de La Chapelle d’Albert Simonin, font office de murs porteurs.

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Et puis, il y a ceux qui ont ressuscité le genre à partir des années 2000, les Cédric Jimenez, Olivier Marchal et Jean-François Richet avec leur goût pour l’action débridée et la violence scénarisée. Philippe-Henri Rambaud réussit parfaitement ce grand écart (pourtant casse-gueule sur le papier) des Tontons au Samouraï par une mise en fiche au style alerte. Les anecdotes ne sentent pas la naphtaline et l’analyse a le sérieux d’un amateur véritablement passionné.

Il y a aussi des surprises qui réjouissent les réfractaires de mon espèce. La présence du Corps de mon ennemi de Verneuil, adapté du roman de Félicien Marceau, œuvre majeure pour comprendre la mécanique de la revanche sociale. Flic ou Voyou de Lautner se distingue par l’écharpe blanche de Belmondo et son célèbre : « Vous direz à Monsieur Achille qu’elles ont très bon genre. » Sans oublier le tutélaire Tendre poulet de Philippe de Broca où la commissaire Tanquerelle mène l’enquête avec le professeur Lemercier. Même Le Grand Pardon d’Alexandre Arcady et Les Spécialistes de Patrice Leconte ont droit à leur chapitre. C’est un carton plein !

Les 100 Films policiers français à voir absolument, Philippe-Henri Rambaud, Mareuil, 2025. 366 pages

La jizya invisible

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Saint Denis, novembre 2020 © Michel Setboun/SIPA

Séparatisme. Quand la peur change de camp


L’idée que la France serait « islamisée » alimente à la fois les fantasmes les plus alarmistes et les dénégations les plus morales.

Pourtant, si l’on délaisse ces réactions réflexes pour adopter une perspective anthropopolitique — celle qui considère les formes profondes d’organisation du lien social —, une réalité moins spectaculaire mais plus décisive apparaît : notre société est déjà partiellement islamisée sur ses marges.

Cette islamisation procède d’un phénomène plus diffus : l’installation de schèmes culturels, hérités de l’histoire islamique, dans les zones où l’État s’est retiré, où le « nous » national se défait, et où se reconstituent, spontanément, des formes anciennes de hiérarchie et de domination.

Domination informelle

Dans cette perspective, la jizya — impôt traditionnel imposé aux non-musulmans dans l’islam pré-moderne — n’est pas seulement un vestige juridique appartenant au passé. Elle est la manifestation d’une structure anthropologique fondamentale: un groupe dominant exige des autres un tribut pour leur permettre d’exister sur son territoire.

Historiquement, la jizya n’était pas un simple impôt financier. C’était un rituel de subordination : un paiement qui signifiait la reconnaissance d’une supériorité politique et spirituelle. Ce qui importe ici n’est pas la théologie, mais la logique du pouvoir: l’idée que la présence des uns est conditionnée par la dette qu’ils doivent aux autres.

Or, dans certains territoires français, où l’État est devenu extérieur, où la police est vécue comme hostile, où le lien civique s’est dissous, ce schème ancien se réinstalle sous une forme inversée : non plus au bénéfice d’un pouvoir religieux, mais d’une contre-société juvénile ; non plus comme loi écrite, mais comme domination informelle ; non plus comme obligation spirituelle, mais comme tribut symbolique ou matériel que la société doit payer pour pouvoir circuler, travailler, vivre.

C’est cette réactivation silencieuse d’une logique pré-moderne — la jizya invisible — que le texte suivant analyse en profondeur.

La jizya invisible : domination inversée et crise du lien civique

Il est frappant de constater à quel point certaines réalités apparemment sans rapport — un impôt religieux médiéval et la délinquance urbaine contemporaine — peuvent, lorsqu’on en dégage la structure, révéler une parenté profonde. La jizya appartient certes au monde historique de l’islam pré-moderne. Mais elle appartient aussi, plus fondamentalement, à une anthropologie du pouvoir : elle exprime la manière dont une collectivité se représente sa supériorité, et la façon dont elle exige des autres un signe tangible de cette supériorité.

Ce qui nous intéresse ici n’est pas l’islam en tant que religion, mais la logique anthropopolitique qui s’attache à la jizya : celle d’une dette instituée, d’un monde divisé entre ceux qui sont chez eux — et qui font payer les autres pour entrer — et ceux qui doivent acquitter le prix de leur présence.

La jizya comme matrice symbolique : le monde structuré par la dette

Dans les sociétés pré-modernes, la dette n’est pas seulement économique : elle est politique, cosmique, moralement structurante. Elle ordonne le monde. La jizya, dans ce registre, institue une hiérarchie visible : un groupe central, légitime, une périphérie tolérée à condition de payer sa dette d’existence. Le paiement n’est pas une transaction : c’est un rituel de reconnaissance d’infériorité.

Ce schème anthropologique ne disparaît jamais totalement. Les croyances s’en vont, les structures demeurent. Il peut se vider de son contenu théologique, mais conserver son efficacité symbolique.

Or ce schème resurgit sous d’autres formes dans la France contemporaine.

Non parce que l’islam réactiverait mécaniquement ses formes anciennes, mais parce que la crise du monde moderne crée un vide où ces structures symboliques, disponibles dans les imaginaires culturels, peuvent se réinstaller.

Fracture d’appartenance : quand la société devient un extérieur

Pour comprendre les comportements délinquants actuels, il faut partir d’un fait massif : une partie de la jeunesse issue de l’immigration ne se pense pas comme appartenant à la communauté politique française. Elle est de fait française, mais ne se vit pas comme telle. Ce désajustement n’est pas seulement socio-économique ; il est anthropologico-politique. L’État n’est pas perçu comme “notre État”, mais comme une puissance lointaine, neutre ou hostile.

La police n’est pas une institution partagée, mais une force d’occupation. Les aides sociales ne sont pas un instrument de solidarité, mais une réparation minimaliste due pour des injustices anciennes. Dans cette configuration, le lien civique — qui suppose réciprocité, appartenance, responsabilité — s’effondre. Et dans cet effondrement, se glisse un rapport de dette inversée.

L’impensé de l’État social : l’aide comme tribut

L’État-providence repose sur une présupposition implicite : l’aidé appartient à la communauté, contribue à la mesure de ses moyens, et la solidarité reçue appelle une solidarité rendue. Or ce présupposé ne tient plus dans certains segments de la population.

L’aide sociale est vécue comme une jizya versée par une société coupable.

Coupable de la colonisation, coupable du racisme, coupable de l’échec scolaire, coupable des discriminations, coupable de l’état du monde — peu importe : l’essentiel n’est pas la factualité, mais la structure du ressentiment.

Cette aide cesse d’être un soutien : elle devient un dû. Et comme tout dû, elle n’appelle ni reconnaissance, ni gratitude, ni engagement. Cette logique explique un paradoxe majeur de l’État moderne : plus il donne, plus il nourrit le ressentiment, dès lors que l’appartenance symbolique n’est pas assurée.

La délinquance comme tribut informel

Dans certains territoires, la criminalité n’est plus seulement une transgression de la loi : elle devient un mode d’organisation du pouvoir. Elle instaure, à l’échelle locale, un système de prélèvement symbolique — parfois matériel — sur ceux qui sont perçus comme étrangers à l’espace social des jeunes dominants.

Le vol, l’intimidation, le racket, les agressions ne relèvent pas seulement du manque, mais de la reconnaissance inversée : c’est à la société de payer. Payer pour le respect. Payer pour avoir le droit de circuler. Payer pour exister dans un territoire qui vous est désormais disputé. C’est une jizya sans nom, sans texte, sans dogme — mais avec une évidence ressentie. C’est l’actualisation brute du schème ancien : « Nous sommes ici, vous êtes tolérés. » J’insiste sur ce point : la démocratie est fragile car elle suppose l’adhésion intérieure à une communauté de semblables.

Quand cette adhésion se défait, ce n’est pas seulement le respect de la loi qui vacille: c’est la possibilité même de faire société. Or nous assistons aujourd’hui à une démutualisation radicale:

• l’État n’est plus une institution commune,

• l’aide n’est plus un outil de solidarité,

• la loi n’est plus un horizon partagé,

• le territoire n’est plus un espace commun.

Dans cette brèche, se réintroduisent des formes anciennes de rapports sociaux, non démocratiques : la hiérarchie, le tribut, la domination symbolique. La modernité ne recule pas devant l’islam: elle recule devant la désappartenance.

La crise du “nous”

Le parallèle entre jizya, délinquance et assistance sociale révèle une vérité plus large : la France ne souffre pas d’un problème religieux, mais d’un problème de communauté politique. Là où l’appartenance se défait, la dette imaginaire renaît. Là où le “nous” disparaît, la société redevient une juxtaposition de groupes — certains exigeant des autres un tribut pour accepter leur présence.

Ce qui se joue aujourd’hui n’est pas un conflit de religions, mais une crise de l’intégration politique, où les formes archaïques du rapport de force trouvent un terrain pour s’actualiser. C’est cette crise que je nous invite à comprendre : l’effondrement du lien civique comme matrice de toutes les déviations présentes — y compris celles que nous croyions reléguées aux marges de l’histoire.

La société malade

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Vengeance au poing

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La journaliste Émilie Lanez © JF PAGA

Hervé Bazin: de Sainte-Anne au restaurant Drouant ?


C’est une œuvre qu’on lisait au collège. Les professeurs raffolaient de Vipère au poing, roman d’Hervé Bazin, et de son héroïne Folcoche, la mère mauvaise. Style sec, assez dur, et surtout un portrait au vitriol de cette femme qui martyrise ses trois enfants, dont le surnommé Brasse-Bouillon, narrateur contant les souffrances corporelles et psychologiques subies. Folcoche n’est pas Médée, elle ne tue pas ses enfants, mais c’est presque pire, elle les fait souffrir dans une vaste demeure provinciale transformée en univers concentrationnaire. C’est sa seule jouissance. Brasse-Bouillon lui résiste. Le garçon a du caractère et du courage. Il ne ressemble en rien à son père, veule et transparent, qui préfère collectionner les mouches plutôt que d’affronter sa déglinguée d’épouse.

A lire aussi: Deux nouveaux Immortels

Succès de librairie

Ce violent roman d’apprentissage plaît à l’Éducation nationale car il montre la bourgeoisie sous un jour peu flatteur, où la moisissure des esprits discrédite une classe sociale jugée corrompue. Le succès de ce roman, publié en 1948, est fulgurant – 5 millions d’exemplaires vendus à ce jour. Folcoche devient Alice Sapritch le temps d’un téléfilm, en 1971 : une femme aux traits peu gracieux et à l’âme noire. L’héroïne d’Hervé Bazin est devenue le parangon de la mère sadique.

L’auteur se nomme en réalité Jean Hervé-Bazin. Il n’est pas tout jeune – né en 1911 – quand Grasset, l’éditeur qui vend des romans comme on vend des savonnettes, décide de publier le manuscrit. Il le rajeunit de quelques années, car c’est le cri de rage d’un jeune homme contre un père dévalorisé et une mère castratrice. Ce premier roman se veut entièrement autobiographique. D’aucuns considèrent qu’il faut attendre que la mère soit morte pour écrire efficacement. Hervé Bazin, lui, écrit pour tuer symboliquement la mère. La littérature a tout à y gagner. Mais Folcoche n’est pas Paule Guilloteaux, la mère de Jean et de ses deux frères. Elle est certes instable, maniaque, peut pincer sa progéniture, lui imposer la disette – ces notables de province ont des problèmes d’argent –, elle enferme tout à clef, même certains membres de sa famille, mais ce n’est pas l’ogresse décrite par son fils. Il a grossi le trait, et pas qu’un peu. Le futur président de l’académie du prix Goncourt, l’écrivain aux romans à gros tirages, le critique craint, bref l’homme qui règnera sans partage sur les lettres françaises, ferraillant contre Alain Robbe-Grillet et la bande du Nouveau Roman, invité perpétuel de l’émission Apostrophes, cet homme-là est un menteur, manipulateur, mythomane. Pire, c’est un faussaire, kleptomane, repris de justice, usurpateur d’identités, amant compulsif, interné psychiatrique. Son itinéraire pourrait se résumer ainsi : de Saint-Anne au restaurant Drouant.

Crime littéraire

Émilie Lanez a enquêté sur ce cas singulier déclaré « psychopathe constitutionnel » par les psys. Elle a retrouvé les témoins, a arpenté les lieux de ce crime littéraire. Elle a consulté les archives de la préfecture de police de Paris. Le dossier Bazin, malgré de nombreuses pièces effacées par l’intéressé lui-même, est consternant. L’auteure révèle une famille dévastée par ce roman. Un roman qui n’est pas autobiographique, là est la faute majeure de Jean Hervé-Bazin. On peut tout inventer – Clara Malraux revendiquait pour l’écrivain d’être mythomane – mais l’ouvrage ne doit pas être estampillé autobiographique. Le livre-enquête de Lanez intitulé Folcoche n’est pas manichéen. Elle parvient à montrer que l’écrivain retors était mu par un irrépressible désir de vengeance contre les Guilloteaux, en particulier Paule, la figure dominatrice. On apprend que ses parents sont partis à Shanghai, les confiant, lui et ses frères, à sa grand-mère puis à sa tante. Jean Hervé-Bazin a souffert d’une sorte d’abandon, d’autant plus qu’il fut trépané à la suite d’une otite mal soignée. Il ne pardonna pas non plus d’être privé de sa part d’héritage. Le succès littéraire lui a permis d’assouvir une vengeance venue de loin. Hervé Bazin, neveu de l’académicien René Bazin, fils de magistrat, petit-fils de sénateur, a assurément vrillé, mais non sans raison. Sa tête de Frankenstein à la drôle de coupe de cheveux couleur jais cachait de profondes cicatrices intérieures. Lorsqu’il apprend que le manuscrit de Vipère au poing est accepté, il déclare à son frère Pierre : « Il faut le dire, j’ai besoin d’un peu de scandale pour hausser la voix et me faire entendre à mon heure, je sais d’avance que la famille va rugir. Aucune importance ! C’est ma petite revanche ! Et je me marre à l’idée de gagner de l’argent pour la première fois sur le dos de ma mère. » L’argent, maître-mot dans cette histoire ? c’est probable. Avec un retournement de situation que je vous laisse découvrir. On n’est plus chez Bazin mais chez Balzac.

A lire aussi: «Le Dernier tango à Paris» ou le scandale permanent

Folcoche, personnage d’encre a-t-elle dévoré Laure Guilloteaux ? On voit cette dernière errer dans une maison en ruine, pouilleuse depuis la mort de son mari. Sa volonté reste cependant intacte quand le pognon est en jeu. Elle ne sombre pas totalement, elle qui calmait ses fils trop turbulents à table en leur piquant le dos des mains avec sa fourchette. Rien n’est simple dans cette histoire, Émilie Lanez le montre avec objectivité. Paule, au fond, n’est plus depuis longtemps, et le triomphe de Folcoche, offrant la notoriété, l’argent et la stabilité à son enfant malade n’est pas pour lui déplaire. Le sacrifice maternel est sans limite. Comme peut l’être l’attitude scandaleuse d’un fils. Il suffit de relire Ma mère de Georges Bataille pour s’en convaincre.

Au soir de sa vie, Paule trouve refuge au domicile de l’écrivain. Bazin, pervers narcissique, l’accueille le visage grave. Il convoque des reporters de Paris-Match pour photographier l’agonisante. Lanez décrit la vieille dame « bouche desséchée entrouverte, derniers cheveux collés sur son crâne, mains crispées ». Bazin prend la pose. L’écrivain est un monstre froid.

Émilie Lanez, Folcoche, Grasset, 2025. 192 pages.

Folcoche: Le secret de "Vipère au poing". Enquête sur un meurtre littéraire.

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Moll face aux « violences policières »

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© Fanny Degouville / Haut et court

Police coupable, forcément coupable…


Paris, 8 décembre 2018. La famille Girard, originaire de Saint-Dizier en Haute-Marne – ville en difficulté économique malgré l’implantation de la BA 113, dotée du chasseur Rafale, fleuron technologique de l’Armée de l’air – se rend à Paris pour participer à une manifestation du mouvement des gilets jaunes. Détendus et calmes, la mère, ses deux fils, sa fille et son compagnon Rémy chantent avec entrain Siffler sur la colline, de Joe Dassin, durant leur trajet vers la capitale. Malheureusement, le fils aîné, Guillaume, 20 ans, est grièvement blessé par un tir de LBD en pleine tête, tandis que Rémy est arrêté puis condamné à trois mois de prison.

A lire aussi: Le jaune de la discorde

Avec cette huitième fiction, Dominik Moll, réalisateur intéressant mais jamais totalement convaincant, décide d’aborder le sujet des violences policières. Il suit l’enquête menée par Stéphanie, commandant de police à l’IGPN[1], interprétée par Léa Drucker, une nouvelle fois juste et remarquable. Servi par une mise en scène sèche et rigoureuse, par des cadres au cordeau, par la belle lumière du chef opérateur Patrick Ghiringhelli et par un montage ingénieux et captivant, le film s’impose comme un polar tendu et nerveux.

Une œuvre politique fragile

C’est également une œuvre politique ambiguë qui aurait pu être précise et nuancée, mais qui se trouve, selon moi, desservie par les biais idéologiques de son réalisateur: la police y est présentée comme violente envers les manifestants et les habitants des banlieues, et comme bénéficiant d’une forme d’impunité en raison du poids de ses syndicats et de la volonté supposée des autorités politiques et judiciaires de minimiser ces faits.

A relire, Elisabeth Lévy: Flics Lives Matter

Les bavures existent et sont parfois reconnues. Des policiers sont incarcérés, et l’affaire Nahel en est une illustration, même si elle demeure très controversée. Mais la police peine également à assurer la sécurité, l’ordre et le calme républicains, notamment faute de soutien suffisant.

La faiblesse d’un récit   

Dommage que la belle facture cinématographique de Dossier 137 soit affaiblie par quelques phrases appuyées visant la police, les élites économiques ou les autorités. La faiblesse du film tient surtout à une scène peu crédible, véritable coup de force scénaristique : la présence, derrière une fenêtre du troisième étage d’un grand palace, d’une femme de chambre noire qui a filmé la scène et permet d’étayer l’accusation…

Le coup de force scénaristique a toujours pour fonction de servir une démonstration. Pourtant, la force et la subtilité d’un récit, la multiplicité des points de vue et une mise en scène attentive à révéler le réel devraient suffire. Dommage : il semble difficile pour Dominik Moll de passer du statut de réalisateur à celui de cinéaste.

1h55. Sortie en salles le mercredi 19 novembre 2025


[1] IGPN : Inspection générale de la Police nationale. Service du ministère de l’Intérieur chargé de contrôler l’action des policiers, d’enquêter sur les manquements éventuels et de veiller au respect de la déontologie.

Camille Étienne ou le non-sens écolo

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DR.

Les révolutionnaires du climat passent leur temps à tordre les études scientifiques pour les transformer en arguments d’autorité


Fête de L’Humanité, septembre 2025. Camille Étienne participe à une table ronde, intitulée « Reculs environnementaux : comment lutter ? » où elle déclare : « Ce qu’on fait [nous les activistes], c’est uniquement de dire “on écoute la science”, on écoute l’alerte unanime des meilleurs scientifiques mondiaux qui nous disent “nous sommes en train de sortir d’une zone de sûreté pour l’humanité”. » La jeune militante fait alors référence à une étude du Stockholm Resilience Center, publiée en 2009, qui a établi neuf limites planétaires, comme le changement climatique, l’acidification des océans, le cycle de l’azote et du phosphore, ou la perte de biodiversité… Poursuivant sur sa lancée, elle s’exclame : « On en a déjà dépassé six. Cela devrait suffire à créer un soulèvement ! » Voilà donc une étude scientifique transformée en bréviaire de la rébellion. On ne rappellera jamais assez à quel point cette foi placée dans un papier scientifique trahit l’esprit même de la science. D’abord, Camille Étienne oublie qu’une étude scientifique est, par définition, discutable. Celle-ci l’est à plus d’un titre. Pour ne prendre qu’un seul exemple, l’une des « limites » concerne la pollution chimique. Les auteurs de l’étude décrètent qu’elle est franchie dès lors que l’innocuité d’une nouvelle substance synthétique n’a pas été démontrée. Comme ce travail n’a pas été fait pour toutes les substances inventées par les chimistes, ils concluent que la limite est dépassée, depuis longtemps. Mais c’est absurde ! Ce n’est pas parce que cette innocuité n’a pas été formellement démontrée que l’humanité est en danger. Ensuite, même si ce travail était irréprochable, il n’aurait aucune portée prescriptive. La science cherche à dire ce qui est, non ce qu’il faut faire. L’idée qu’une étude scientifique puisse à elle seule justifier un soulèvement populaire – contre quoi, d’ailleurs ? – relève donc du non-sens. Malheureusement, Camille Étienne, qui ne comprend pas grand-chose à la science, s’en sert comme alibi pour ses aspirations révolutionnaires.

Dépenses publiques: le crépuscule des magiciens

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OpenAI / Causeur.

Après quarante ans d’addiction à la dépense publique, la France est incapable de se serrer la ceinture. Le débat budgétaire ne reposant que sur l’argent et la pensée magiques, les sources d’économies proposées sont dérisoires et les hausses d’impôts inévitables. Tel est l’héritage d’une extrême gauche nommée PS.


En mettant en cause le tropisme français pour la dette, les déficits et donc la dépense publique irraisonnée, François Bayrou a déchiré pendant quelques jours le voile impudique de notre irresponsabilité collective. Panique chez les chamanes en charge de notre culture économique, le pot aux roses (socialistes) menaçant d’être découvert, il était nécessaire d’en remettre un coup sur le druidisme financier et les fantasmes comptables qui guident nos responsables politiques, médiatiques ou syndicaux depuis quatre décennies.

Harry Potter à Bercy

Pour ces sorciers, nos déficits n’ont bien sûr rien à voir avec le niveau de nos dépenses – jamais à la hauteur des véritables besoins d’une population victime, à les entendre, d’une austérité ultra-libérale – mais tout avec le niveau, anémique, des recettes, grevées des fameux « cadeaux aux riches ». Et que je te sors la taxe Zucman de mon chapeau (ça change de l’antienne du retour de l’ISF), mais ça ravit toujours le même public : ceux qui ne seront pas concernés ou n’ont jamais créé une entreprise. Un bon impôt est en effet celui payé par les autres. Faire remarquer aux adorateurs du percepteur les différents records d’inspiration soviétique que ce pays affiche – 57 % du PIB consacré aux dépenses publiques ; un taux de prélèvement obligatoire himalayesque (43 %) ; 10 % des plus riches qui paient 75 % de l’impôt sur le revenu – vous vaudra d’être souffleté à coups d’amulettes. Préparez-vous à voir votre poupée vaudou transpercée de multiples aiguilles s’il vous prenait l’idée saugrenue de vous assurer que les « zucmanolâtres » savent distinguer revenus du patrimoine – Éric Coquerel, LFiste et président de la commission des Finances à l’Assemblée, lui, ne le sait pas. C’est un peu comme si votre garagiste ignorait la différence entre un pneu et une boîte de vitesses, mais c’est aussi une bonne illustration de l’incurie globale. C’est à la hache que la figurine à votre effigie sera nuitamment coupée en deux, si vous vous aventuriez à souligner que les inégalités en France figurent dans la moyenne basse de l’Union européenne et qu’elles n’ont pas beaucoup évolué depuis 2017. Elles sont stables pour les revenus et ont enregistré une hausse modérée en termes de patrimoine, une augmentation massivement liée à celle de l’immobilier, elle-même corrélée à la politique de taux d’intérêt très faible… inconsciemment plébiscitée par tous les Français, puisque ces taux bas nous ont permis d’accumuler déficits et dettes bon marché. Alors certes, que certaines optimisations fiscales à base de mystérieuses holdings (ça sonne un peu comme hold-up) puissent être reconsidérées, pourquoi pas. Espérer en retirer plus d’un milliard par an, alors que nous sommes face à un déficit récurrent de 170 milliards, c’est nommer Harry Potter à Bercy. Une pensée magique dans laquelle on confond millions et milliards allègrement. Pourquoi ? Parce qu’on s’en fout.

A lire aussi, Jean-Jacques Netter: Le mur des comptes

Autre cible démagogique du vaudouisme franchouillard, les rémunérations des élus et autres ministres seraient exorbitantes. « On n’a qu’à commencer par faire des économies, là. Non, mais c’est un peu vrai ? » Édith Cresson, jadis célèbre pour la brièveté de ses responsabilités de Premier ministre — un bail emphytéotique désormais aux yeux des Attal, Barnier, Bayrou, Lecornu –, Édith, donc, ne se vit retirer son chauffeur qu’en 2016, soit vingt-quatre ans après sa sortie de Matignon. On peut en faire des gorges chaudes sur les réseaux sociaux, le nouveau zinc depuis la disparition des bistros, mais penser trouver là des sources d’économies significatives ressemble à une échappatoire désespérée. Nos ministres et nos députés sont plutôt moins bien rémunérés qu’ailleurs et le coût global de notre démocratie (présidence de la République, Assemblée, Sénat, tous élus locaux confondus) s’élève à 3 milliards d’euros, sur un total de dépenses publiques supérieur à 1 700 milliards : 0,2 %. O.K. ? Une baisse de moitié découragerait définitivement tout candidat un peu cortiqué à des responsabilités électorales, sans rien régler à nos déficits.

Économies sur l’immigration: pas de miracle

Les étrangers et leur protection sociale – choquante lorsque non assise sur des contributions ou supérieure à celle des citoyens français – recèlent une piste plus sérieuse d’économies, pourtant âprement non débattue (10 milliards ? plus ?). Mais elle ne constitue en rien une baguette magique qui permettrait d’épargner aux Français des efforts significatifs. À commencer par ces satanées retraites auxquelles la France consacre la bagatelle de 22 % de ressources supplémentaires qu’ailleurs – 14,5 % du PIB chez nous, 11,9 % chez nos voisins, soit une différence de 75 milliards (!). Non, le système de retraite par répartition n’est pas sauvable, ni à 62, ni à 64, ni même sans doute à 68 ans (et encore moins à 60 !). Au demeurant, les Français le savent parfaitement, puisqu’ils ont un taux d’épargne quatre fois plus élevé qu’aux États-Unis et supérieur à l’ensemble des pays comparables. Ils votent donc, en secret, pour la capitalisation tout en exigeant le renflouement du Titanic de la répartition, dont l’équation démographique est mathématiquement intenable : trop de vieux, qui vivent trop longtemps sans avoir fait assez d’enfants. Au secours Harry Potter !

Rétive à se serrer la ceinture après quarante ans d’addiction à la dépense publique, la France se raconte à elle-même des billevesées. Concluons par l’une des meilleures blagues du paysage politico-médiatique : non, le Parti socialiste français n’est pas un parti « social-démocrate ». Cherchez ailleurs en Europe ou dans le monde un mouvement prônant la taxation frénétique de toute réussite, la hausse infinie des prélèvements obligatoires, l’extension sans limites de l’intervention de l’État, l’ignorance de tout péril migratoire ou sécuritaire – vous ne trouverez que des mouvements classés à l’extrême gauche. Justice fiscale ! Pour le PS, comme pour toute la gauche, il n’y a qu’en matière de fiscalité que la justice s’apparente à une matraque. Tout en ayant perdu la moitié des élections, c’est pourtant lui qui nous aura gouverné – et tapé fort – de 1981 à 2025 inclus. Si ça, c’est pas de la vraie magie…

Lutte contre le narcotrafic: cherchez l’erreur

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Gérald Darmanin et Laurent Nunez à Marseille, hier © Frederic Munsch/SIPA

Un oubli stupéfiant


À les entendre, on va voir ce qu’on va voir. Les caïds, les papes et les sous papes du commerce de ces armes de destruction massive que sont la cocaïne, l’héroïne, le crack, j’en passe et des meilleurs, n’étant pas du tout spécialiste de la chose. Et puis quand bien même, avant d’en avoir terminé avec une liste qui se voudrait exhaustive, des éprouvettes de ces alchimistes de la mort seraient sortis trois ou quatre nouveaux dérivés d’opiacés jusqu’alors inconnus sur le marché. Car, s’il y a bien un domaine où on n’arrête pas le progrès, où l’innovation est reine, c’est bien celui-ci.

On ne compte plus les morts, on ne compte plus les zombies décérébrés à force de came, les morts au champ d’horreur du trafic et des règlements de compte. Pas plus qu’on ne parvient vraiment à compter les milliards que cela rapporte. Le budget de certains Etats de la planète font, paraît-il, très pâle figure en comparaison. On en est là. Des milliards, de quoi acheter les consciences, corrompre tout ce qu’il y a de corruptible parmi le genre humain. C’est-à-dire à peu près tout le monde…

Mais voilà bien que ces jours-ci, les sommités de l’État consentent à sortir de leur torpeur et, comme je vous le disais en commençant, jurent-elles leurs grands dieux : « On va voir ce qu’on va voir ». Voilà  ce qu’elles nous annoncent, bravaches, menaçantes, terribles. Juré-craché, voilà qu’elles partent en croisade comme jamais contre les trafiquants, gros ou moins gros, les dealers blanchis sous le harnais ou encore en couche culotte, les consommateurs des bas-fonds comme des beaux quartiers, des bordels clandestins comme des ministères (mais si, mais si…) Bref toute la chaîne est dans le collimateur. On ne rigole plus ! Jusqu’alors la croisade contre la poudre à sniffer n’a été que de la poudre aux yeux, mais ces temps-là sont résolus. Puisqu’on vous le dit ! La France se mobilise, l’Europe entière se mobilise. La guerre est déclarée.

Quelle tartufferie ! Jusqu’à quand ces gens continueront-ils à se foutre de notre gueule sur des sujets aussi graves que celui-là !

La guerre au narcotrafic, prétendent-ils ? Ah oui, quelle guerre ?…

Peut-être conviendrait-il de commencer par le commencement. S’en prendre aux pays producteurs en exigeant qu’ils éradiquent de leurs territoires jusqu’à la moindre production de ce genre, cela en préalable à toute discussion diplomatique ou commerciale. On les connaît, ces pays de cocagne mortelle. Pour une bonne part, ils sont à chercher en Amérique du Sud. Parmi les premiers pays producteurs de la planète ne trouve-t-on pas en effet, le Pérou, la Colombie, la Bolivie, le Guyana, le Brésil…

Au cas où vous auriez du mal à retenir cette liste, pas de souci. Vous n’aurez qu’à vous reporter à celle des pays devant lesquels l’Europe – notre belle et grande Europe – s’empresse de dérouler le très juteux tapis rouge de la grande foire libre-échangiste, le Mercosur. Vous y retrouverez les mêmes noms, les mêmes pays…

Comme dirait l’autre, cherchez l’erreur.

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Un J. D. Vance bien de chez nous

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Alexandre Avril. Wikimedia.

Alexandre Avril est maire de Salbris depuis 2020. À la tête de cette commune du Loir-et-Cher de 5000 âmes, ce trentenaire intello, ex-LR rallié à Éric Ciotti, embellit l’espace public, sécurise la vie de ses administrés et défend un esprit vieille France. Pour les progressistes de la capitale, c’est la signature d’un dangereux néoréactionnaire.


À mi-chemin entre Lamotte-Beuvron et Vierzon, Salbris, deux minutes d’arrêt. À peine sorti du TER, une vision enchanteresse accroche le regard. Comme échappé d’un songe péguyste, une immense nef païenne en bois flambant neuve a été construite devant la gare. Dessiné par le maire de la ville en personne, c’est le nouveau marché municipal, arborant blasons et poutres apparentes pour mieux ressusciter les halles couvertes que rasaient les maires – fameux « bâtisseurs » – des Trente Glorieuses.

Alexandre Avril intrigue

Jadis cité industrielle, Salbris, 5 000 habitants, a connu la gloire des usines Matra et des missiles. Elle est à présent l’un de ces appendices excentrés du Bassin parisien, où se réfugie une classe moyenne qui ne se sent plus tout à fait chez elle dans les banlieues proches de la capitale. Une commune que le sociologue Jérôme Fourquet et le romancier Nicolas Mathieu auraient dû inventer si elle n’avait pas existé. Elle passionne les Rouletabille de la presse politique parisienne. Monsieur le maire, Alexandre Avril, intrigue.

La une de Libé en mars dernier, des enquêtes accablantes dans L’Humanité et dans Mediapart : les médias de gauche dépeignent l’édile en dangereux symbole du vent mauvais néoréactionnaire qui souffle sur la France. Il faut dire que le jeune homme de 33 ans porte la veste en tweed comme personne et qu’il commente régulièrement l’actualité sur Europe 1 et CNews.

Alexandre Avril a conquis la mairie de Salbris en 2020, lors d’un scrutin où la plupart de ses pairs ont été reconduits au bénéfice du confinement et de l’abstention. Ancien cadre LR aujourd’hui vice-président du parti d’Éric Ciotti, il siège avec le RN au conseil régional et brille par ses méthodes bardelliennes de communication numérique, qui conjuguent stories Instagram à la chaîne et expressions de grand-mère du genre « Par Toutatis le ciel nous est tombé sur la tête ».

A lire aussi: L’union, combien de divisions?

Comment les Salbrissiens jugent-ils son activisme ? Réponses pêchées dans un café situé face à l’hôtel de ville, où la déco vous plonge en pleines fifties – cuisine familiale, nappes à carreaux, néons d’anthologie… Jean-Yves, tenancier mi-nostalgique mi-dévot de l’établissement baptisé « Saint Yves », ouvre le procès en canonisation du maire. « Alexandre a redressé les comptes de la mairie et fait sortir des projets des cartons », assure-t-il. Deux clients habitués abondent : « Il met des pots de fleurs et des caméras et des policiers municipaux, qui protègent nos maisons quand on part en vacances », notamment des « bandes de jeunes venus de Paris ».

Bien sûr tout le monde n’est pas d’accord. Autour du zinc, d’autres administrés décrivent un maire « trop autoritaire », qui fait « de la com non-stop avec des jardinières partout » et se focalise sur le centre-ville au détriment des « quartiers extérieurs ». Tous lui reconnaissent cependant son dynamisme. « Qu’on l’aime ou pas, résume un habitué, il fait des trucs. »

Redressement productif

Parmi les « trucs » réalisés par Alexandre Avril : l’implantation récente d’une usine alimentaire innovante. Le concept est original. Ici on prépare des produits de boucherie à partir de venaisons achetées aux équipages de la région. « L’essentiel des animaux chassés dans notre pays sont jetés et 90 % du gibier consommé est importé, c’est une aberration qu’il faut corriger », explique le maire, qui a joué les entremetteurs pour aider la start-up L’Atelier du Loup à lever 5 millions d’euros, notamment auprès de diverses grandes fortunes possédant des propriétés dans le coin.

Cependant, si Alexandre Avril inquiète tant dans les rédactions progressistes parisiennes, ce n’est pas à cause de ses ambitions de redressement productif dans le Loir-et-Cher. C’est l’intellectuel brillant qui fait peur. Issu d’un milieu simple, il a réussi le concours de la Rue d’Ulm, décroché un diplôme de droit à la Sorbonne, fait HEC et rédigé une thèse sur les correspondances entre Nietzsche et René Girard. Pire encore, il aimerait faire souffler sur son terroir l’esprit des hauteurs, façon colline de Sion en Lorraine.

À la guerre culturelle comme à la guerre, on le retrouve un soir d’été dans un manoir de brique rouge, un de ces châteaux bourgeois dont les ploutocrates du xixe couvraient solennellement leurs terrains de chasse et bords lacustres. Un internat catholique y est désormais installé, premier-né des académies Saint-Louis, ces « Eton à la française » financés en partie par le richissime Pierre-Édouard Stérin. Accueillant depuis la rentrée une soixantaine de collégiens, on y dispense une éducation pré-soixante-huitarde non mixte, avec du latin, de l’aviron sur le gigantesque plan d’eau et des cours de théâtre dans une grange transformée en splendide salle de spectacle. Un lieu de « formation pour une nouvelle élite réactionnaire » fulmine Libération.

Rien de terrifiant sur place pourtant. Le directeur, ancien cadre de l’enseignement privé sous contrat, plusieurs années de métier, passionné d’instruction et de pédagogie nous fait visiter l’amphithéâtre, discute de l’oralité dans les cursus scolaires et des options à la mode dans certains lycées parisiens. Comme la combine politique paraît loin !

Puy du Fou du pauvre

À Salbris, le clou du spectacle est un spectacle intitulé « Salera ». Une reconstitution de la guerre des Gaules lancée par le maire en 2023, avec chars, gladiateurs, druides tatoués, jeux pour enfants et marchés d’artisans dont on sort le sac rempli de savons celtiques et d’hydromel IPA local. Qu’importe que les mauvaises langues de Libération y voient, avec leur habituelle pointe de racisme social, « un Puy du Fou du pauvre », l’édition 2025 a fait le plein avec un mélange baroque d’autochtones solognots fumeurs de Gitane et de résidents secondaires en pantalons rose saumon.

Résumons. Des origines modestes, des études hors norme, une parfaite maîtrise des réseaux sociaux, quelques milliardaires dans son carnet d’adresses, une proximité assumée avec la religion catholique et un certain talent pour réenchanter sa province désindustrialisée : Alexandre Avril a quelque chose d’un J. D. Vance à la française, ressemblance physique en prime. Pour l’instant les jardinières, l’usine de gibier, l’internat élitiste, le festival historique populaire. Et demain ? Ad Augusta per angusta. Selon Le Nouvel Obs, Pierre-Édouard Stérin envisage de pousser sa candidature aux élections présidentielles de… 2032.

En finir avec la gauche radicale dans nos mairies

La maire socialiste de Nantes Johanna Rolland, image d'archive © SEBASTIEN SALOM-GOMIS/SIPA

Lyon, Grenoble, Bordeaux, Poitiers… À quelques mois des prochaines élections municipales, il est temps de dresser le bilan calamiteux des majorités d’extrême gauche qui sévissent depuis cinq ans — ou parfois beaucoup plus comme à Nantes— , dans nos grandes villes.


Les élections municipales de 2020, qui ont connu une participation historiquement faible en raison de la pandémie de Covid, ont vu la victoire surprise de la gauche et de ses alliés d’extrême gauche dans un grand nombre de grandes villes françaises, dont Grenoble, Poitiers, Annecy, Bordeaux, Marseille, Strasbourg, et tant d’autres.

À Nantes, où le PS tient la ville depuis près de quarante ans, la maire Johanna Rolland, numéro 2 d’un PS en perte de vitesse, n’a pas hésité à s’allier avec le pire de la gauche radicale pour sauver son siège. Les Nantaises et les Nantais paient cette trahison au prix fort avec notamment une insécurité endémique, une circulation impossible, des commerces en difficulté croissante, et une dette colossale de la ville. La situation est si grave que la ville est devenue le symbole national du fiasco de la gauche radicale : « nous ne voulons pas devenir comme Nantes », entend-on partout dans l’hexagone. Mais la maire de Nantes n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Son projet pour la prochaine mandature ? Faire de Nantes « une ville refuge des exilés (OQTF welcome), quelle que soit leur situation administrative (appel clair à ne pas respecter la loi)».    

Bilans catastrophiques

À quelques mois des prochaines élections municipales, l’heure est au bilan de ces majorités d’extrême gauche qui sévissent depuis cinq ans, hostiles aux valeurs républicaines les plus élémentaires jadis partagées par la gauche. A Bordeaux, ville calme et florissante depuis des décennies sous la gouvernance de Chaban puis de Juppé, il aura suffi d’un seul mandat du maire EELV Pierre Hurmic (et de ses alliés anti-laïcité, anti-flic, anti-capitaliste, anti-voiture, mais pro Hamas et pro wokisme…) pour voir exploser les liquidations judiciaires des commerces du centre-ville. Plus 40% en un an, comme l’a souligné récemment la CCI de la Gironde ! L’impossibilité de circuler et de se garer dans la ville, combinée à l’explosion des atteintes aux personnes et aux biens, a transformé Bordeaux la paisible en zone de non-droit, à l’image de Nantes et Grenoble, comme le soulignait encore la CCI locale.

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Partout où l’extrême gauche sévit, le bilan de ces majorités clientélistes et peu ou prou le même : catastrophique. Les habitants se sentent abandonnés, les commerçants méprisés, les incivilités sont devenues monnaie courante, et pire que tout, les femmes ne se sentent plus en sécurité quand elles marchent dans les rues. Dans une séquence hallucinante d’un récent Conseil municipal de Bordeaux, Thomas Cazenave, élu d’opposition centriste, s’est vu qualifié de « trumpiste » par le maire écologiste. Son crime ? Avoir souligné l’insécurité délirante qui règne dans la ville, et demandé le rétablissement de l’éclairage public la nuit, ainsi que le doublement des effectifs de la police municipale. Ces mesures de bon sens, destinées à protéger les habitants d’individus dangereux, sont aujourd’hui qualifiées de « politiques d’extrême droite » par les idéologues de la gauche radicale. Confrontée aux conséquences désastreuses de son angélisme et de son communautarisme, la gauche radicale ne connaît qu’une réponse : traiter de « trumpiste » ou de « facho » ceux qui se soucient de la sécurité de leurs concitoyens. Partout en France, ces attaques nauséabondes, qui ne correspondent à aucune réalité, sont subies au quotidien par les élus d’opposition qui osent s’attaquer à la démagogie de l’extrême gauche, et à son sentiment de supériorité morale. Les Français ne sont pas dupes, et ils le feront savoir dans les urnes en mars prochain.  

Il est temps d’en finir partout en France avec cette gauche radicale municipale, qui a renoncé à la sécurité et au bien-être de ses administrés pour celui de ses propres intérêts. Leur unique ambition : rester en place coûte que coûte, quitte à s’allier avec les antirépublicains les plus infréquentables.

Cadres de vie : la dégringolade

Comme nous le faisons à Nantes, il est urgent que tous les candidats aux municipales qui aiment la France et ses valeurs, qui aiment leur ville, qui refusent l’insécurité et le clientélisme, s’unissent dès le premier tour pour mettre fin au déclassement sans fin des villes de France tombées entre les mains de l’extrême gauche. À titre d’exemple, dans le classement des « villes où il fait bon vivre », Nantes était 2e ville française en 2014 (date de l’élection de Johanna Rolland). Elle est désormais 47e en 2025, plus célèbre pour son centre-ville coupe-gorge que pour son attractivité. Lyon déjà mal en point avec la 56e place en 2020, date de l’élection de l’écologiste Grégory Doucet, est désormais 79e en 2025… Il ne s’agit plus de déclassement mais d’effondrement.

La victoire est possible dans toutes ces villes abîmées par la gauche radicale à condition de proposer un programme alternatif puissant, rationnel et rassembleur. Une élection municipale n’est pas une affaire d’étiquette politique, et n’a donc rien à voir avec des législatives ou une élection présidentielle. L’élection d’un maire est celle d’un habitant parmi les habitants, amoureux de sa ville, qui n’a d’autre objectif que la quiétude et la prospérité de ses habitants. Un bon maire n’est pas l’homme d’un clan ou d’une communauté, mais un élu au service de tous, travaillant sept jours sur sept, toujours à portée d’engueulade de ses administrés. Comme le dit souvent David Lisnard, Président de l’Association des Maires de France et Maire de Cannes, « être maire, c’est le plus beau des mandats ». Le plus difficile et exigeant aussi.

Empêcher la gauche radicale de poursuivre son travail de destruction rapide et méthodique de nos grandes villes est une urgence existentielle pour la France. Quelques mesures de bon sens, qui ne sont par définition ni de gauche ni de droite, mais qui sont réclamés par la majorité de nos concitoyens, doivent être au cœur de nos programmes.

Il est temps d’en finir avec l’aveuglement de la gauche qui refuse de voir l’ensauvagement de la société. Nos concitoyens réclament pour eux et pour leurs enfants plus de sécurité, et une présence policière visible. Il est urgent d’augmenter les effectifs de la police municipale, d’armer ces policiers, et de doter nos villes de système de vidéosurveillance à la hauteur. Ce que refuse de faire la gauche, refusant même des CRA (centre de rétention administrative) pour les délinquants, souvent multirécidivistes, qui n’ont rien à faire sur notre territoire. En finir avec l’angélisme nécessite également de couper les vivres aux délinquants. L’argent public n’a pas à subventionner ceux qui détruisent la société : priver d’allocations et de logements sociaux les grands délinquants et dealers condamnés est une urgente nécessité.    

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Sur le plan économique, il n’est plus possible de poursuivre des politiques pseudo-écolo qui coûtent une fortune, étranglent les commerces de nos centres-villes en grevant le financement des urgences véritables. Les ZFE, ces « zones de fortes exclusions », qui empêchent les pauvres de circuler en voiture, doivent être abrogées ou adaptées aux citoyens les plus modestes. Il est possible de concilier mobilité douce et liberté de circuler.

Autre mesure de bon sens, un maire qui aime la République, — et qu’est-ce qu’une ville si ce n’est une petite république ? —, ne peut pas accepter de financer des associations antirépublicaines avec l’argent public. Un seul exemple, la maire de Nantes, une semaine après le pogrom du 7-Octobre en Israël, faisait voter une subvention à « France Palestine », une association islamogauchiste qui voit le Hamas comme des « militants de la paix ». Ce genre de subventions, dont on pourrait donner des milliers exemples à travers le pays, payés par les impôts des Français, ne doivent plus exister.

Christelle Morançais, en pointe dans la bataille culturelle

Sur le plan culturel, il est temps d’en finir avec la propagande aux frais du contribuable. Les budgets municipaux dédiés à l’art, aux artistes et aux établissements culturels, ne sont pas des chèques en échange de bulletin de votes. Défendons une culture de la liberté et du pluralisme, loin des oukases du tribunal de la bien-pensance. On ne fait pas de l’art avec des bons sentiments. Pas de culture forte et puissante sans liberté d’expression, sans liberté de ton ! Pas d’art dérangeant et révolutionnaire possible quand les corbeaux de la cancel culture et du wokisme reposent sur les épaules des créateurs, surveillant leur moindre écart. Un nouveau souffle culturel est nécessaire pour libérer la culture de l’emprise politique. Christelle Morançais, présidente du Conseil Régional des pays de la Loire, a eu raison d’annoncer la fin des subventions régionales automatiques à la culture, évoquant « le monopole intouchable d’associations très politisées, qui vivent d’argent public ».     

Il est temps, par ailleurs, d’investir massivement dans l’éducation et l’avenir de nos enfants via l’école et le périscolaire. Nous en finirons avec le délire du wokisme municipal, qui se moque de l’état lamentable de certains établissements scolaires, mais n’hésite pas par exemple à supprimer un terrain de foot dans une cour de récré, au motif que ce serait un sport « sexiste ».

Toutes ces mesures simples et de bon sens sont attendues, nous en sommes persuadés, par une large majorité de Français. Il est temps d’en finir avec l’extrême gauche, synonyme d’insécurité, de déclin économique et de propagande wokiste permanente. Nos villes et leurs habitants valent la peine qu’on se batte pour eux.

Un colloque qui a eu lieu ailleurs…

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L’annulation au Collège de France du colloque « La Palestine et l’Europe » émeut les amoureux de la liberté d’expression. Pour les adversaires les plus résolus d’Israël c’est carrément la liberté académique qui aurait été assassinée (!). Mais l’évènement a finalement eu lieu ailleurs, et tous ses intervenants douteux ont pu dérouler leur rhétorique antisioniste et se victimiser.


Le 9 novembre, l’administrateur du Collège de France, Thomas Römer, a annulé un colloque sur la Palestine et l’Europe qui devait avoir lieu quelques jours plus tard, en rappelant, entre autres, qu’un débat scientifique doit assurer une pluralité d’analyses et de perspectives. Il y a eu après cette annulation des communiqués de protestation qui auraient impliqué plusieurs milliers de chercheurs. On ne savait pas qu’il y avait en France autant de spécialistes universitaires sur le sujet… 

La foire aux experts

Disons les choses simplement, la partialité absolue du colloque crevait les yeux et le nombre de protestations ne change rien à cette réalité. Tout indique que ce colloque visait à promouvoir un narratif anti-israélien, dans le cadre d’une stratégie communicationnelle élaborée. L’organisme coorganisateur était le Centre arabe de recherches et d’études politiques, le Carep, financé par le Doha Institute for Graduate Studies, fondé par Azmi Bushara, ancien député arabe à la Knesset, démis pour espionnage en faveur du Hezbollah et proche de l’émir du Qatar. C’est d’ailleurs ce centre, qui se prétend évidemment neutre et scientifique et qui est situé – ça ne s’invente pas ! – rue Raymond Aron à Paris, qui a hébergé le colloque qui y a eu lieu après l’annulation.

Pour optimiser un message, le poids symbolique de son lieu d’émission et le prestige de celui qui l’incarne sont d’une importance capitale. Pour le lieu, rien de mieux que le Collège de France, sommet de l’excellence académique. Quant au porteur du colloque, on a soudainement entendu dans les médias que le Professeur Henry Laurens, titulaire de la chaire « Histoire contemporaine du monde arabe » du Collège de France et peu connu jusque-là dans le public, était la référence absolue sur le conflit israélo-palestinien.

Dans la fabrique de l’opinion, c’est Edward Bernays, double neveu de Sigmund Freud, qui, il y a cent ans, a montré l’importance de la parole des supposés experts, tels ces médecins qui poussaient alors les femmes à fumer parce que, entre autres, cela calmait les nerfs et permettait de maigrir. À l’époque du Covid, le délire de l’hydroxychloroquine a été porté par l’assertion absurde que le Professeur Raoult était unanimement reconnu comme le meilleur virologue du monde.

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Henry Laurens, un spécialiste du monde arabe qui ne connait pas le monde juif et ne veut pas le connaitre n’a invité à son colloque aucun historien ou politiste neutre ou un peu favorable à Israël. Dans ses livres une minutieuse documentation passe dans le lit de Procuste d’un filtre explicatif unique: Israël est la créature coloniale de l’Occident et rien d’autre ne compte. Interrogé le 23 octobre 2023, le Professeur Laurens qualifie l’accusation d’antisémitisme d’arme politique, souligne que les Palestiniens ont le droit de se défendre et avertit que le soutien de l’Occident à Israël va lui valoir dans le monde un ressentiment justifié. Quinze jours après les massacres du 7-Octobre qu’il juge implicitement comme une péripétie, il n’a aucun mot sur les victimes. S’il admet le terme d’atrocités pour les désigner, c’est toujours pour le mettre en regard d’un terrorisme israélien qualifié de structurel. En somme, Henry Laurens, c’est un Jean-Luc Mélenchon qui aurait obtenu une chaire au Collège de France. Denis Charbit, qui n’est pas un ultra-sioniste fanatique, démonte au scalpel sa rhétorique, aussi simpliste que biaisée.

Le mot colonial est un de ces termes figés qui servent à disqualifier l’adversaire en lui imposant une marque d’infamie qui ferme le débat. Mais que dire du mot génocide? Il était omniprésent dans l’intervention de Francesca Albanese, rapporteur des Droits de l’Homme aux Nations Unies, une des «guest stars» du colloque, dont les titres prestigieux  servent à promouvoir un narratif si odieusement anti-israélien qu’il a souvent été qualifié d’antisémite. Elle n’a pas droit à utiliser le terme de génocide sur lequel la Cour Internationale de Justice ne s’est pas encore prononcée, mais exploitant le prestige de sa fonction à l’ONU, elle le fait continuellement cherchant ainsi à flétrir Israël d’une étiquette ignominieuse qui a l’avantage supplémentaire de gommer la Shoah.

On trouve la même haine chez une autre vedette de ce colloque, Josep Borrell, ancien Haut-Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères. Au micro de France Culture il reprend sans réserve les chiffres de mortalité à Gaza fournis par le fameux, mensonger et d’ailleurs inexistant Ministère de la Santé du Hamas. Il reproche à son interlocuteur de ne pas être capable de saisir un massacre d’une telle ampleur et quand celui-ci, le journaliste Guillaume Erner, lui rétorque poliment qu’il vient d’une famille qui a payé son tribut à la Shoah, Borrell s’emporte contre cette allusion à un passé dont il dit qu’il est révolu et politiquement manipulé. C’est d’ailleurs un des thèmes du colloque.

Malaise

Ceux qui à juste titre ont tiré la sonnette d’alarme, la LICRA entre autres, étaient mal à l’aise avec l’idée d’interdire un colloque universitaire, et de fait celui-ci n’a pas été interdit, il a été déplacé. Bien entendu, les protestations ont porté sur la sacro-sainte liberté d’expression, particulièrement importante dans le monde de la Science. Voilà qu’on en était revenu aux temps de Galilée et de l’Inquisition.

Il ne faut pas être naïf. Il y a eu des pseudo-colloques scientifiques en Allemagne nazie sur les théories raciales, il y en a eu en Union Soviétique pour soutenir les thèses de Lyssenko. Pour qu’il y ait science, il faut qu’il y ait débat et discussion sur les désaccords, ce que ne proposait aucunement le colloque de M. Laurens.

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L’accusation que l’on essaie de restreindre la liberté n’est pas toujours un sursaut moral, c’est parfois un moyen d’inverser la charge morale. Comme tel, c’est un efficace outil de communication politique.

Certains de ceux qui ont protesté contre l’annulation n’avaient en même temps pas de mots assez durs pour fustiger la moindre présence ou manifestation pouvant être considérée comme pro-israélienne ou pas suffisamment anti-israélienne, dans les universités, les salles de concert ou les terrains de sport.

Ils n’ont rien inventé. Pas de liberté pour les ennemis de la liberté, c’était déjà la devise de Saint Just, le théoricien de la Terreur révolutionnaire. Comme lui, certains des partisans de ce colloque s’arrogent le droit de définir eux-mêmes ce qu’est la liberté acceptable. Quant aux autres, ils prennent plaisir à rester dans le confortable mirage de l’illusion et de l’aveuglement.

Je suis un film noir

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Belmondo dans Flic ou Voyou de Georges Lautner, 1978. DR.

Philippe-Henri Rambaud recense avec esprit et légèreté un pan glorieux de notre patrimoine: le polar ! Des classiques du noir et blanc aux productions récentes, voici 100 Films policiers français à voir absolument.


Quelle régalade ! Une sélection érudite sans œillères, populaire et finaude. À compulser à la nuit tombée sous des draps chauds. Une large vue d’esprit qui ne cantonne pas le policier à sa veine névrotique ou psychologique, qui ne fait pas seulement la part belle aux réalisateurs choyés par la critique. Les 100 Films policiers français à voir absolument, doivent absolument prendre place dans votre bibliothèque entre Les Nouveaux Mystères de Paris de Léo Malet et l’intégrale d’A.D.G. L’auteur de cette somme digeste et détaillée s’appelle Philippe-Henri Rambaud. Il est le créateur du site filmpolicier.fr. Cet expert en GAV (garde à vue) et filature, au savoir livresque, connaît ses classiques mais ne se borne pas à une période précise. Même s’il reconnaît que « l’âge d’or » se situe dans les années 1950, 1960 et 1970, sa compilation court de la casbah de Pépé le Moko (1937) au chalet de Justine Triet (Anatomie d’une chute, 2023).

Comment a-t-il pu choisir arbitrairement dans des milliers de bobines ? Il fallait avant tout définir le sujet sans le phagocyter. « Pour simplifier, disons que le crime est la condition sine qua non du film policier », avance-t-il dans son introduction. Sa raison d’être. « Sans crime, pas de film policier », finit-il par trancher. Ils sont tous là, les primés, les ténébreux, les braqueurs du box-office, les godelureaux et même ce farceur de Claude Chabrol avec son Inspecteur Lavardin. Il y a les attendus, ceux qui ont la carte des cinéphiles agenouillés : Melville et son Stetson sortant de son studio de la rue Jenner, Clouzot et sa « bonne humeur » légendaire sur le plateau ou encore Corneau et sa Série noire en bandoulière. Les classiques du noir et blanc (Duvivier, Becker, Dassin, etc.), qui ont une parenté avec Les Confessions d’un enfant de La Chapelle d’Albert Simonin, font office de murs porteurs.

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Et puis, il y a ceux qui ont ressuscité le genre à partir des années 2000, les Cédric Jimenez, Olivier Marchal et Jean-François Richet avec leur goût pour l’action débridée et la violence scénarisée. Philippe-Henri Rambaud réussit parfaitement ce grand écart (pourtant casse-gueule sur le papier) des Tontons au Samouraï par une mise en fiche au style alerte. Les anecdotes ne sentent pas la naphtaline et l’analyse a le sérieux d’un amateur véritablement passionné.

Il y a aussi des surprises qui réjouissent les réfractaires de mon espèce. La présence du Corps de mon ennemi de Verneuil, adapté du roman de Félicien Marceau, œuvre majeure pour comprendre la mécanique de la revanche sociale. Flic ou Voyou de Lautner se distingue par l’écharpe blanche de Belmondo et son célèbre : « Vous direz à Monsieur Achille qu’elles ont très bon genre. » Sans oublier le tutélaire Tendre poulet de Philippe de Broca où la commissaire Tanquerelle mène l’enquête avec le professeur Lemercier. Même Le Grand Pardon d’Alexandre Arcady et Les Spécialistes de Patrice Leconte ont droit à leur chapitre. C’est un carton plein !

Les 100 Films policiers français à voir absolument, Philippe-Henri Rambaud, Mareuil, 2025. 366 pages