Accueil Site Page 3038

Vers Vatican III ?

35

On pensait qu’avec la mort de Jean-Paul II, pape cathodique autant que catholique, le Vatican et le destin de l’Eglise catholique apostolique et romaine ne feraient plus les gros titres que de La Croix ou de Radio Notre-Dame. Eh bien on s’est trompé. Mais depuis l’élection de Benoît XVI, la fascination pour le pape s’est muée en méfiance et souvent en défiance. Ce retournement de l’opinion, catholique mais pas seulement, révèle un énorme malentendu : depuis Jean XXIII et le concile Vatican II – et surtout depuis qu’un prélat polonais a été élu au siège de saint Pierre – beaucoup avaient rangé le pape dans le camp des droits de l’homme et s’étaient persuadés que l’Eglise catholique s’était convertie à la religion du Progrès.

Les dernières controverses au sujet de l’évêque négationniste et surtout autour de la question du sida et des préservatifs montrent que ce malentendu repose, en particulier en France, sur une méconnaissance totale de la mission de l’Eglise. Vu de Rome, le combat à mener se trouve en Amérique du Sud, et notamment au Brésil, premier pays catholique du monde avec 125 millions de fidèles. Or, la proportion d’habitants se définissant comme catholiques y est passée de 89 % en 1980 à 74 % en 2000. Dans le même temps, le nombre de Brésiliens se réclamant de l’Eglise évangélique s’est envolé de 7 % à 15 %. Au-delà du Brésil, la « part de marché » des Eglises protestantes s’élève à environ 20 % au Chili et à presque 30 % au Guatemala. En Argentine, 10 % environ de la population revendique son appartenance au mouvement évangélique. En conséquence, les divisions du Vatican qui pouvaient mobiliser 85 % des 350 millions de latino-américains en 2000, ne représentent plus que 70 % de la population.

Les raisons de l’engouement pour les Eglises évangéliques (qui, bien que protestantes n’ont pas grand-chose à voir avec la sévérité calviniste) sont connues : elles proposent une religion pleine d’émotion reposant sur un fort sentiment d’appartenance à une communauté plutôt que sur un dogme ou un contenu intellectuel sophistiqué. Elles parviennent ainsi à séduire des populations laminées par l’éclatement des sociétés sous les coups des crises politiques, économiques et sociales répétées. Le plus frappant est que leur expansion fulgurante n’est nullement entravée – et peut-être même encouragée – par leur conservatisme en matière sociale et morale. Cela n’a pas échappé aux stratèges de Rome.

En Amérique latine, les Eglises évangéliques ont su séduire à la fois les pauvres et les classes moyennes bien mieux que n’avait su le faire « la théologie de la libération », dont les thuriféraires des années 1960 entendaient capter l’enthousiasme populaire suscité par la figure de Che Guevara et l’idée de la Révolution. Dans les années qui ont suivi Vatican II, Rome a même manifesté une certaine bienveillance à l’égard de ces expérimentations, même si une décennie auparavant le mouvement autrement ambitieux des prêtres-ouvriers avait été supprimé par Pie XII, marquant ainsi les limites de la tolérance du Saint-Siège.

Depuis, l’écroulement des régimes socialistes a fait presque disparaître toute initiative catho-marxiste. Aujourd’hui, pour l’Eglise, le danger ne vient pas de la gauche révolutionnaire mais des Eglises évangéliques.

Le personnage de Mgr Claudio Hummes, cardinal d’origine brésilienne, est symptomatique de cette évolution. Prêtre d’une paroisse de la banlieue ouvrière de São Paulo dans les années 1970, il s’était fait connaître par des prises de position hardies, notamment par son soutien à un jeune militant syndicaliste, Luiz Inacio Lula da Silva, l’autorisant même à prononcer des discours dans son église.

Quelque trente ans plus tard, en 2000, on entend de nouveau parler du prélat, promu depuis archevêque de São Paulo par Jean-Paul II. Mais les temps ont changé. Valeriano Paitoni va en faire l’amère expérience. Curé d’Imirim, une paroisse pauvre du nord de Sao Paulo, il a fondé, avec l’aide financière de ses ouailles, trois centres d’hébergement qui accueillent alors 33 séropositifs et malades du sida, dont 22 enfants. Indigné par les tests de dépistage secrètement exigés, selon lui, des candidats au sacerdoce par certains séminaires brésiliens, il a, pour couronner le tout, pris l’habitude de distribuer des préservatifs à ses paroissiens les plus démunis. Mgr Hummes, son supérieur hiérarchique, condamne aussitôt, avec l’aval de l’archevêque de Rio et « en communion avec le Pape et l’Eglise » les idées défendues par le père Valeriano. L’année suivante, Mgr Hummes critique un ministre brésilien qui avait renforcé le plan national d’éducation à la contraception. Fin 2006, Benoît XVI le rappelle à Rome et le nomme préfet de la Congrégation pour le Clergé, chargée notamment de la formation du clergé et de celle des fidèles (catéchisme).

Dans ces conditions et contrairement à ce que j’ai écrit, les choix de Benoît XVI sont peut-être dictés par la tactique politique autant que par la rigueur théologique. Il sait que l’avenir de sa multinationale ne se joue ni sur les rives du Tibre ni sur celles de la Seine mais en Amérique du sud, en Afrique et en Asie face aux nouvelles Eglises. Cette évolution semble avoir été bien comprise à la fois par les chefs de l’Église catholique et par certains croyants, comme on peut le constater par l’essor des charismatiques, sorte de « pentecôtisme catholique » agrémenté d’un fervent culte marial.

Rome peut regagner du terrain en s’appuyant sur ces mouvements mais continue à leur vouer une certaine méfiance. Sa stratégie s’appuie d’une part sur une défense de la morale sexuelle traditionnelle (contre le divorce, la contraception, l’avortement et l’éducation sexuelle à l’école), d’autre part sur celle des privilèges du catholicisme face à la concurrence évangélique. Les prises de position de Benoît XVI sur la contraception et l’avortement ne visent pas à lui gagner la sympathie, de toute façon temporaire, d’intellectuels mécréants, de faiseurs d’opinion parisiens ni même celle des évêques de France. Il a entendu le message venu d’ailleurs : ce que veulent les chrétiens d’Amérique latine, les participants des JMJ et les charismatiques, ce n’est pas une Réforme bis. C’est une Contre Réforme.

Le centrisme et la peinture en deuil

11

René Monory est mort, à l’âge de 86 ans, ce samedi 11 avril. Ce génial touche-à-tout de la vie politique française ne s’est pas contenté d’avoir été garagiste et ministre de l’Education nationale, gourou de Raffarin et président du Sénat, maire de Loudun, ville par laquelle il fut littéralement possédé et créateur du Futuroscope, faux parc de loisirs sur les nouvelles technologie mais vraie ambassade pour les extra-terrestres. René Monory, en effet, a aussi consacré sa vie à la peinture et a été le chef de file secret du courant de la Figuration Narrative. Les amateurs seuls savaient que derrière la bonhomie de ce centriste old school se cachait un artiste dont les toiles bleues et glacées représentent toute l’inhumanité de notre monde à travers des scènes de meurtres, de fusillade ou de femmes nues fumant dans des décors urbains déserts. Il serait heureux, en cette triste occasion, que le Sénat organise une rétrospective René Monory pour honorer le violon d’Ingres d’un de ses plus illustres représentants.

Pétain chez les maos

25

Avoir vingt ans en 1973. La lose. La Révolution, la Grande, la Seule, la Vraie, est passée depuis six ans déjà. De Gaulle repose à Colombey. On ne court plus les rues en criant des slogans impossibles, ils ont tous été dits et proférés. A peine ose-t-on battre le pavé parisien pour scander de timides « Pompidou, des sous ! »

C’est le drame de Jean-Marie Laclavetine, qui publie Nous voilà chez Gallimard, maison où il sévit tantôt comme éditeur, tantôt comme écrivain. Il serait né trois ans plus tôt qu’il aurait été en âge de la faire, cette Révolution. Et, quarante ans après, il nous aurait barbés à sortir un fort volume relatant ses souvenirs et ses exploits, à l’instar de tous les anciens soixante-huitards qui, dans un ultime sursaut, se sont mis en tête l’an passé de porter un coup fatal à l’édition française en publiant leurs Mémoires.

Ne sont-elles pas drôles, ces années 1970 ? On est sexuellement libéré, donc on baise. On fait tourner pétards, sticks et buvards. On se larzacquise, on se maoïse, on s’occidentaliste athlétiquement. On se donne l’impression d’être ensemble, mais on ne forme plus déjà qu’une communauté désœuvrée : le nous, celui de la révolution et du romantisme politique, s’est déjà délité.

En publiant Nous voilà, Jean-Marie Laclavetine sait faire plaisir aux lecteurs pressés et aux critiques qui se gardent bien de fréquenter la littérature en dehors de la lecture assidue des quatrièmes de couverture : tout est dans le titre. Deux mots, Nous voilà, que les nostalgiques de la francisque trouveront agréables à leurs oreilles, puisqu’ils leur rappelleront le refrain de Maréchal, nous voilà, chanson écrite en 1941 sur la musique de La Fleur au guidon qui faisait partie en 1937 du répertoire de Fredo Gardoni, inoubliable chanteur de la caravane du Tour de France. Ils n’auront pas tort, car Laclavetine nous raconte une histoire – peut-être n’est-elle qu’un prétexte –, celle de la promenade posthume du maréchal Pétain, dont il fait naviguer clandestinement le cercueil trente ans durant.

Le 20 février 1973 tombe, en effet, l’incroyable nouvelle : le cercueil du maréchal Pétain a disparu de sa sépulture. La police enquête et suit la trace des auteurs de cet enlèvement, avant de retrouver le cercueil baladeur dans un garage de la banlieue parisienne. On est bien peu de choses. La bière rejoint aussitôt son caveau de l’île d’Yeu. Fin de l’histoire ? Pas tout à fait. Rebondissement et sens du rocambolesque : Pétain se prend à fréquenter post mortem l’intelligentsia trotskyste et maoïste parisienne. La France moisie et l’anti-France enfin réunie inconsciemment autour d’une bière : c’est Philippe Sollers qui devrait être content.

Qu’on y prenne garde : Nous voilà n’est pas Nous voici. La langue française a quelques subtilités : dans Nous voilà, le nous est déjà loin. Il est parti se promener au large du moi, de l’égo et du je. Lorsque le sentiment collectif – qu’il soit procuré par le parti, la nation ou l’humanité – s’absente, toute grande entreprise est impossible : la révolution, nationale ou prolétarienne, prend des airs d’opérette.

Jean-Marie Laclavetine aurait pu – il ne l’a pas fait ou si peu – écrire un roman à clef. Et l’on aurait poliment gloussé en contemplant la carrière des ex-leaders de 1968, libertaires autrefois, libéraux aujourd’hui. On aurait plaisanté sur Henri Weber, passé de la LCR à un mariage très show-bizz au Cirque d’Hiver[1. On se souviendra que l’inénarrable Gérard Miller (starlette du petit écran) disait que ceux qui n’étaient pas invités à cette fête n’existaient pas socialement.]. On aurait décelé chez l’un ou l’autre personnage une inclination particulière à trahir ses idéaux et à ne maintenir avec constance que son infidélité. Mais Nous voilà échappe à ces contingences-là, pour aller à l’essentiel : la fin du politique, c’est-à-dire l’histoire d’une communauté qui, en trente ans, est devenue, à droite comme à gauche, non seulement désœuvrée mais aussi inavouable.

Une épopée contemporaine ? Oui. Le roman de Laclavetine a tout de l’épopée classique, long poème qui embrasse tout un peuple pour célébrer ses exploits historiques ou mythiques, comme on le dit chez Mme de Romilly. Sauf que les exploits historiques depuis 1970, faut les chercher. Toute épopée est désormais navrante. Tolstoï est inaccessible. Les personnages réels empruntent plus au général Boum, celui de la Grande Duchesse de Geroldstein, qu’au maréchal Koutouzov, le héros de Guerre et Paix. Il ne reste plus rien d’autre qu’un ennui si profond qu’il ne tue plus personne. Lorsque les grands chemins de l’histoire sont désertés, restent les petits chemins et la littérature : « J’ai peur de la rencontre avec le passé qui revient : le petit chemin des années perdues, envahi, d’herbes et de poussière, enfoui sous les ronces, où était-ce déjà, vers quoi menait-il, ce caminito, il y avait des chants, on riait, je crois me souvenir qu’on s’aimait, que s’est-il passé ? »

Nous voilà

Price: 18,80 €

34 used & new available from 2,00 €

Benoît XVI est incorrigible

19

Les prises de position de l’Eglise catholique ont défrayé la chronique au cours des dernières semaines. Au lieu de se refaire une santé médiatique et de partir en quête de buzz plus favorables, le pape Benoît XVI s’apprêterait, selon des sources bien informées, à récidiver dès ce soir en se livrant à de nouvelles déclarations fracassantes. Bon nombre de rédactions sont sur le qui-vive, et les papiers sont déjà sur le marbre. Cette fois, c’est la bonne : si le pape Ratzinger persiste, il est viré ! Osera-t-il donc contredire la Faculté en affirmant que le Christ est ressuscité ? Contactée, l’ambassade d’Italie en France se refuse à tout commentaire, indiquant seulement que Silvio Berlusconi accorde toute sa confiance au Signor Pilato, qui n’a jamais failli dans l’exercice de ses missions.

Balle pour tous

3

Le 9 février dernier, le maire de Béziers, Raymond Couderc, recevait une enveloppe kraft contenant une lettre d’insultes et une balle de calibre 38. Deux semaines plus tard, Jacques Blanc, Michèle Alliot-Marie, Rachida Dati, Alain Juppé, Christine Albanel, Frédéric Lefebvre, Christian Vanneste et Nicolas Sarkozy recevaient le même pli pas très discret. Jeudi, Christian Vanneste réceptionnait un nouveau courrier et l’Elysée annonçait l’arrivée d’un petit colis contenant deux autres balles… Bref, tout le gratin de l’UMP avait reçu sa lettre de menace. Tous, sauf un : Jean-François Copé !… Or, ce vendredi, c’est Pâques avant l’heure : la ville de Meaux dont il est le maire vient d’annoncer qu’une lettre d’insultes accompagnée d’une balle vient d’être réceptionnée ce matin ! Félicitations à l’heureux élu.

Cachez-nous donc ce bus que nous ne saurions voir

Surtout, regardons ailleurs. La vidéo d’une agression sauvage survenue dans un bus en plein Paris est diffusée sur internet. Scandale. Mais pas à cause de la brutalité et de la gratuité de ce tabassage, ni en raison de l’acharnement des agresseurs et de la terreur des passagers. Ce qui soulève le cœur des belles âmes, ce n’est pas ce qu’on voit, c’est qu’on le voie. Le premier coupable, c’est donc le flic ou l’employé de la RATP qui a pris la lourde responsabilité de faire fuiter ces images à l’extérieur[1. Mutatis mutandis, ça me rappelle la fureur de l’Autorité palestinienne contre les journalistes italiens qui avaient « sorti » les images du lynchage de deux soldats israéliens et les excuses penaudes de la presse italienne de Jérusalem.]. Et le second le site internet qui, rompant avec l’omerta assez largement respectée par les médias, a décidé de porter ces images à la connaissance du public. D’ailleurs, coup de chance : il s’agit de François Desouche, site identitaire ou d’extrême droite, chacun choisira son lexique.

Imaginons une vidéo montrant une lapidation au Pakistan, une exécution sommaire dans une improbable capitale africaine ou le tabassage raciste de prévenus dans un commissariat parisien. Ou encore des brutalités policières contre de pacifiques manifestants altermondialistes. « Les images qui suivent peuvent heurter la sensibilité », murmurerait une présentatrice de JT avec une nuance de gravité dans l’œil. On encenserait ceux qui ont réalisé ces images au péril de leur vie ou de leur carrière pour alerter nos consciences. On rappellerait peut-être la grandeur du plus vieux, pardon du plus beau, métier du monde. On chanterait les vertus d’internet qui nous montre ce qu’on veut nous cacher.

Bien entendu, rien de tel ne s’est passé dans le cas de la « vidéo de surveillance » de la RATP. Sa diffusion par François Desouche suscite d’abord dans les médias respectables un certain malaise ou une fin de non-recevoir. On ne mange pas de ce pain-là. Des journalistes capables d’être les gogos de n’importe quel bobard, se découvrant soudain fort pointilleux sur la qualité de leurs sources documentaires et de leurs sources tout court, examinent le film sous toutes ses coutures. Des déontologues sourcilleux qui recopient sans états d’âme les PV d’instruction ou d’interrogatoire que leur refilent aimablement juges et policiers, froncent les narines. « Qui a intérêt à faire sortir cette histoire ? », se demande-t-on avec des airs entendus. Soucieuse, sans doute, de se montrer médias-friendly, la Préfecture de police saisit l’IGS « pour connaître l’origine de la fuite qui avait permis à cette vidéo, filmée par la caméra de surveillance d’un bus, de sortir sur Internet ». Durant quelques heures, on place même en garde à vue un policier, membre du Service régional de la police des transports. L’intéressé ayant été mis hors de cause, « les investigations se poursuivent donc pour trouver le responsable », promet la PP dans un communiqué. On est soulagé de savoir que tous les moyens sont mobilisés pour retrouver cet odieux délinquant.

L’authenticité du document paraissant indiscutable, les vigilants, retrouvant leurs vieux réflexes, orientent les soupçons sur le messager, le désormais fameux site François Desouche que l’on ne doit citer qu’en se bouchant le nez. Qu’une information ait transité par ce dernier repaire de la bête immonde devrait suffire à la rendre impropre à la consommation – pas cachère si j’ose dire. Les vertueux s’alarment : n’y a-t-il pas là une manipulation politique venu de là où on pense ? Méfiance.

Autant avouer mon crime, il m’arrive de consulter ce site. On y trouve, en plus d’une indigeste propagande, des informations censurées – ou ignorées – ailleurs. Celles-ci sont à l’évidence sélectionnées dans l’unique perspective de démontrer les dangers de l’immigration. Il est vrai que l’apologie de la France multiculturelle est infiniment plus sympathique que la nostalgie d’une France blanche, largement fantasmée au demeurant, qui rassemble les contributeurs de Desouche. Il est clair que nombre d’entre eux flirtent et plus si affinités avec le racisme. On peut ne pas aimer – certains diront qu’on doit. Faut-il aller plus loin encore et se rendre sourd et aveugle à tout ce qui vient d’un si détestable environnement ? Il est assez plaisant de voir les plus pompeux adorateurs du culte de l’Information se comporter comme des propagandistes de bas étage. Le réel nous déplaît, changeons-le. Une vieille rengaine.

Au-delà des modalités de sa diffusion, décrétées douteuses et fermez le ban, il faut croire qu’il y a quelque chose dans cette vidéo qu’on ne veut pas voir. Ces images durant lesquelles on voit trois ou quatre jeunes gens s’acharner sur un autre et le rouer de coup alors qu’il est pratiquement à terre ont de quoi heurter certaines sensibilités – et même toutes les sensibilités. Il n’est pas sûr, cependant, que la retenue des médias dans cette affaire s’explique par le louable souci de ménager la nôtre.

Il faut en effet le proclamer haut et fort, ce film donne une image négative de la réalité. La Halde et tous ses disciples qui somment publicitaires, cinéastes et gens de télévision de s’employer à donner une image positive de tel ou tel groupe injustement traité par l’histoire et la société, devraient d’ailleurs émettre sous peu une protestation bien sentie. Enfin, plutôt que d’image négative, peut-être serait-il plus indiqué de parler d’image non-conforme – un manifestant molesté par la police, c’est aussi une image négative mais elle ne gêne personne.

Ce qui déplaît, dans la scène de l’agression dans l’autobus de nuit, c’est son casting : les agresseurs étaient « issus de l’immigration » et la victime blanche. Bien entendu, ces faits établis ne suffisent aucunement à conclure à l’agression raciste mais ils ne permettent pas non plus de décréter qu’elle n’avait rien de raciste. Imaginons que les agresseurs aient été blancs et la victime noire ou arabe. On aurait sans doute, pour sa plus grande joie d’ailleurs, évoqué le spectre de Le Pen et dénoncé une ratonnade. On aurait peut-être eu raison de le faire – et peut-être pas.

On me dira que le combat contre le racisme vaut bien quelques petits arrangements avec la vérité. Admettons. Aussi bien intentionnée soit-elle, cette tactique de l’aveuglement appliquée avec constance et avec le succès que l’on sait par la gauche dans la lutte contre le Front national, n’a strictement aucune chance de faire reculer le racisme. C’est même tout le contraire. C’est en planquant sous le tapis la délinquance ou le racisme quand les coupables sont des Français noirs ou arabes – au motif inavoué qu’eux-mêmes victimes de racisme –, qu’on jette la suspicion sur tous. Trois petites frappes qui s’acharnent sur un homme à terre ne représentent rien ni personne d’autre que trois petites frappes. Au lieu de détourner les yeux ou de leur tenir le langage de l’angélisme, il serait temps de leur parler le seul qu’ils comprennent, celui de la force. Sans distinction de race ou de religion.

Libérez Barabbas !

Le serviteur se tient en retrait. Un geste et il apportera à son maître une coupe pleine d’eau. Sale métier que de servir un homme aussi à cheval sur l’hygiène. On ne le retiendrait pas qu’il passerait ses journées en ablutions multiples, apportant plus de soins à ses mains qu’à sa procurature, rendant par trois fois à Esculape ce qu’exige César. Ça tarde à venir. Il éructe, moitié grec, moitié latin, et ponctue ses phrases des trois mots qu’il connaît d’araméen. Parler peuple, lui ressembler et faire ce qu’il réclame, voilà la politique. Ça n’en finit pas. Il fait venir sa femme. Elle chante, vous savez ? Le peuple s’impatiente. On n’est pas monté de la ville basse pour mater Claudia. Ce qu’on veut, c’est la peau de Joshua. Lequel ? Pilate en a deux sous la main. L’un est surnommé bar ’abb’a, l’autre se dit lui-même bar ’abb’a. C’est à n’y rien comprendre. Et personne n’y comprend rien. Va pour Joshua donc, qu’on le crucifie et qu’on libère Joshua ! De l’eau, vite.

Jusqu’à Origène et son Commentaire sur Matthieu, dans lequel il juge indécent d’attribuer à un impie un nom aussi saint, de nombreux manuscrits du récit de la Passion faisaient mention du prénom de Barabbas : Jésus. Ajoutez à cela qu’en araméen – langue supposée de rédaction de l’évangile de Matthieu –, bar’abb’a signifie « le fils du père », la confusion grandit. Et Pilate répète sa question : « Voulez-vous que je libère Jésus le Messie ou Jésus le Fils du Père ? » (Matthieu 27,17.) Pourquoi autant de similitudes entre deux hommes que la tradition nous présente, depuis le IIIe siècle, comme absolument dissemblables ? Serait-ce là un complot ourdi par l’Eglise, une vérité passée sous silence ? Les choses sont plus simples, c’est-à-dire beaucoup plus complexes.

Une hypothèse. Barrabas n’est pas le nom d’un personnage historique, mais une figure rhétorique : l’allégorie d’une idée théologique. Quand les évangiles synoptiques insistent sur la messianité de Jésus, le quatrième évangile, celui de Jean, insiste sur la divinité du Christ. L’idée de « Jésus messie d’Israël » est recevable par les juifs du Ier siècle ; celle de « Jésus fils du Père » coince en revanche aux entournures. Elle est même inacceptable : un peu rigolards, ils regardent les empereurs romains se prétendre fils de Vénus ou de Mars, mais pour ce qui est du Dieu d’Israël, e finita la comedia ! Comment pourrait-Il, Lui dont le nom est imprononçable, avoir un fils ? C’est proprement inconcevable et inadmissible.

Ce bar’abb’a que Luc, Matthieu et Marc nous font passer pour un « fameux brigand » n’est pas un personnage, mais le johannisme lui-même, c’est-à-dire l’idée que le Christ dépasse sa propre messianité pour n’être plus que fils de Dieu. C’est une hypothèse d’autant plus vraisemblable que l’exégèse nous apprend que, dans l’évangile de Jean, l’épisode de Barabbas est une pièce visiblement rapportée et que le texte original n’en fait nullement mention.

Dès lors, Barrabas ne serait donc que l’un des innombrables motifs de débats et de discussions qui animent l’Eglise des premiers siècles et que les évangiles ont recueillis au long du temps en strates imbriquées. Une borne témoin rappelant que l’idée de divinité du Christ n’était pas du tout évidente pour les premiers chrétiens (à l’exception des gnostiques, qui ne font pas la fine bouche quand il s’agit de rompre avec la référence vétérotestamentaire) et qu’il aura fallu attendre le concile de Nicée pour réconcilier ceux qui, à l’instar des trois premiers évangélistes, insistent sur la messianité du Christ et ceux qui, avec Jean, mettent en avant sa divinité. Mais ce n’est là qu’une hypothèse : l’exégèse nous apprend qu’un texte ne se laisse jamais enfermer dans l’univocité. Aucun commentaire, fût-il délivré par Gérard Mordillat en personne, n’épuise le sens ni le séquestre : l’infinitude du texte, c’est ce que le christianisme a reçu en partage du judaïsme.

Historiquement, rien n’atteste qu’on élargissait chaque année un criminel au moment de Pessa’h[1. Ni le Talmud ni le Midrasch, qui surabondent pourtant en détails historiques sur Pessa’h, n’évoquent nulle part cette coutume.]. Rien sinon les évangiles, qui nous disent que c’était une coutume. Ce qui confirme le statut essentiellement symbolique de Barabbas. Mais, dans le récit de la Passion, il n’est pas un simple figurant polémique ni une pauvre allégorie. Il est le premier homme, celui qui bénéficie en avant-première du sacrifice du Christ. Il n’est pas le parangon du juif déicide, mais la figure du chrétien lui-même, c’est-à-dire du pécheur qui reçoit le pardon parce qu’un autre a été sacrifié à sa place.

Barabbas permet également d’introduire dans le récit de la Passion la référence au rite du bouc émissaire décrit au chapitre 16 du Lévitique : Aaron choisit deux boucs semblables. L’un est immolé, l’autre est envoyé dans le désert. La différence – René Girard l’a mise en évidence, après que Nietzsche avait décelé combien elle inversait les valeurs de la civilisation antique – est que, contrairement à ce qui se passe dans la mythologie grecque, la victime est innocente. Et c’est pour cette innocence même qu’elle est condamnée à mort. Barabbas vient rappeler l’innocence de la victime, soulignant, par contraste, l’iniquité du jugement.

La troisième fonction que remplit Barabbas nous est rapportée par Marc qui le présente comme « un rebelle et un meurtrier ». Là encore, historiquement, la procurature de Ponce Pilate se distingue par le calme civil en Judée : il faudra attendre vingt ans pour que la paix cède le pas à un climat d’émeutes et de révoltes anti-romaines, avant de culminer en 66 à Massada et de s’achever en 70 par la destruction du Temple. Marc ment-il ? Non. Lorsqu’il écrit sa haggadah dans la Rome des années 65, transcrivant ce que Pierre lui a rapporté pendant leurs longues années de collaboration, l’évangéliste a les yeux braqués sur la Judée et les événements qui s’y déroulent. Il a de la sympathie pour ces juifs entrés en rébellion contre l’Empire. Il les connaît et les a fréquentés avec Pierre, en Judée puis à Rome. Le message qu’il leur adresse est simple : tout n’est pas politique. Ou plutôt : la royauté que vous promet le Christ n’est pas de ce monde.

Chez Marc, la figure des deux Jésus bar’abb’a illustre deux messianismes distincts : l’un prend les armes pour affranchir Israël de son occupant romain, l’autre poursuit des visées qui ne sont pas de ce monde. En mettant en scène l’un et l’autre Jésus, Marc nous met en garde contre tous les petits Mordillat que l’humanité enfantera jusqu’aux temps derniers : la politique et le messianisme font deux, quand bien même la politique prend des allures messianiques. La première veut la rébellion ici et maintenant. Elle complote, exécute, assassine, sans nécessairement avoir recours à la perspective de lendemains qui chantent et de surlendemains qui dansent. Quand elle en a, ses mains sont rouges de sang. Quant au messianisme, dont la nature est proprement eschatologique, il tient un discours sur les fins ultimes, sans pour autant les précipiter ni les devancer. Il nous parle en somme d’une insurrection qui vient et n’a pas fini d’advenir dans les cœurs humains.

Simone Weil notait : « Un ancien exemple de décision démocratique : la demande populaire de libérer Barabbas, et de crucifier Jésus. » Et tout ça, sans démocratie participative ni jurys citoyens.

Vite, de l’eau. Pilate n’attend pas.

Boycott d’Israël : des avocats exécutés sans jugement !

63

C’est le talentueux Sylvain Lapoix de Marianne2 qui nous l’apprend, les militants pro-Hamas de la banlieue nord ont trouvé un moyen radical de combattre l’envahisseur sioniste sans trop s’éloigner de chez eux. Comme le montre la vidéo jointe à cet article punchy, et que diffuse largement, mais pas exactement aux mêmes fins, le site de la liste EuroPalestine. Qu’y voit-on ? Des militants vêtus de T-shirts verts (on pense que la couleur n’a pas été choisie au hasard), siglés Boycott Israël, vont dans le magasin Carrefour le plus proche de chez eux et détruisent tous les produits originaires de l’ »Entité » honnie. Leur vindicte se porte plus particulièrement sur les légumes, pourtant verts eux aussi, ainsi que sur les fruits, tous accusés de pousser sur « la Terre volée au Palestiniens, grâce à l’eau volée aux Palestiniens ». Pendant que les boycotteurs détruisent en toute impunité les oranges, poivrons, avocats et autres végétaux impies, on voit aussi leur chef spirituel, si j’ose dire, accuser au mégaphone les hypermarchés Carrefour de dissimuler volontairement aux clients l’origine israélienne des produits frais. Du coup, on se demande comment font nos Europalestiniens pour reconnaître les légumes sionistes. Au faciès ?

On a sa carte ou on ne l’a pas

75

Tout n’est pas à jeter par la fenêtre dans le XXIe siècle. Le monde d’après le Mur réserve parfois de bonnes surprises, une fois qu’on a chassé de son esprit les spectres d’Angot, des frères Dardenne ou de Gad Elmaleh. Par exemple, j’aime bien certains mots de ce temps. Ou plus précisément le sens que prennent certains mots de ce temps.

Parfois parce qu’ils sont bien utiles. Quand vous lisez ou entendez quelqu’un utilisant l’adjectif lisible dans son acception moderne, du style : « Le gouvernement devrait rendre plus lisible sa position sur le RMI des couples homosexuels à Mayotte », vous savez que vous avez très probablement affaire à un crétin[1. J’ai banni de mon vocabulaire l’expression crétin des Alpes par crainte de voir Luc Rosenzweig m’envoyer en représailles depuis son shtetl chamoniard un de ses scuds-maison dont on se relève pas. Luc, il n’y a que des gens biens dans les Alpes, et je n’ai jamais prétendu, moi, que le peuple savoyard n’existait pas…].

Un avatar sémantique dont je fais mes délices est avoir sa carte. Au siècle passé, cela signifiait une seule chose : être membre du Parti. Le parti signifiant lui-même – toujours à l’époque – le Parti communiste. Quand tous les communistes en furent partis[2. V’la que je me fâche aussi avec Jérôme Leroy. Mais bon, j’avais ma carte avant lui…], l’expression avoir sa carte muta brutalement en moins d’une génération, donnant raison aux regrettés Jean-Baptiste Lamarck et Trofim Lyssenko. Au XXIe siècle, avoir sa carte signifie avoir le ticket, en clair être socialement et médiatiquement inattaquable, ou a minima être protégé des médisances par un préjugé favorable en kevlar. À ne pas confondre avec bankable, un mot un rien abject mais énonçant assez crûment l’équation postmoderne qui rapporte la surface sociale non plus à l’épaisseur du compte en banque, façon Patron-à-cigare, mais à la solvabilité médiatique, façon Premier pouvoir. Claire Chazal est bankable, tout ce qu’elle fait intéresse la France d’en bas, Le Clézio a sa carte, tout ce qu’il fait subjugue l’intelligentsia[3. Il faut s’appeler au moins Clint Eastwood ou Barack Obama pour bénéficier consubstantiellement de ces deux onctions à la fois.]. Si Claire Chazal présente depuis cinq ans, dans l’indifférence générale, une émission intelloïde (intitulée : « Je/nous de Claire », on ne rit pas) sur la chaine gaie Pink TV, c’est sans doute parce que quelqu’un lui a fait miroiter qu’elle pourrait un jour avoir sa carte à la force du poignet. C’est pas gentil.

Jean-Marie Bigard n’est pas prêt d’avoir sa carte. Quand il fait un spectacle, on est certes plus ou moins obligé d’en parler mais à cause de son public de prols blanchâtres et de son soutien à Sarko, on a largement le droit d’en dire du mal. Et même un peu l’obligation, depuis sa malheureuse saillie sur le 11 septembre chez Ruquier, dont Bigard entendra parler toute sa vie, qu’il traînera toujours au bout de la queue, gravée qu’elle est, en lettres de feu sur sa fiche Wikipédia : « Le 5 septembre 2008, lors d’une intervention sur l’antenne d’Europe 1, l’humoriste défend la thèse du complot intérieur à propos des attentats du 11 septembre 2001. Ses déclarations, ont déclenché une vive polémique, et une condamnation des principaux médias. Quelques jours plus tard, par communiqué de presse, il s’excuse : « Je demande pardon à tout le monde pour les propos que j’ai tenus vendredi dernier pendant l’émission de Laurent Ruquier sur Europe 1. Je ne parlerai plus jamais des événements du 11 septembre. Je n’émettrai plus jamais de doutes. J’ai été traité de révisionniste, ce que je ne suis évidemment pas. » »

Dario Fo, lui, a sa carte. Metteur en scène d’avant-garde, anarchiste militant, prix Nobel de Littérature en 1997, ça vous pose un homme. L’une de ses pièces, Faut pas payer, a été diffusée sur France 5. Un thème d’actu puisqu’il s’agit d’une évocation de la vie chère et des premières tentatives d’autoréduction dans les magasins pratiquées par les autonomes italiens des seventies[4. Et que tentent péniblement de rejouer pour les 20 heures de 2009 les troupes du NPA, avec un rendu qui n’est pas sans rappeler celui des StarAcadémiciens reprenant Léo Ferré.]. Faut-il le préciser, la diffusion de la pièce a été saluée par un chœur spontané de louanges, comme l’avait été sa création aux Amandiers en 2005.

Vous ne voyez pas le rapport avec Bigard. C’est que Dario Fo s’est beaucoup plus investi que le plus papistes de nos comiques-troupiers (voire le seul) dans la relecture complotiste du 11 septembre. Il a multiplié les déclarations hostiles à la thèse couramment admise de l’attentat islamiste et répété à l’envi que les Services américains étaient dans la combine.

Dario Fo est l’un des trois narrateurs du film italien Zero : enquête sur le 11 septembre. Un film dont nous laisserons un de ses metteurs en scène, Franco Fracassi, résumer la problématique : « Ben Laden a-t-il profité des attentats du 11 Septembre ? Peut-être… mais il n’est certainement pas le seul ! D’autres personnes ont largement profité de ces attentats, celles-là mêmes qui, ensuite, se sont revendiquées comme victimes de ce crime… » Un film qui, dans la foulée de Thierry Meyssan, affirme notamment qu’aucun avion ne s’est écrasé sur le Pentagone. Comprenons-nous bien : c’est le droit le plus absolu des uns et des autres de communier dans le délire paranoïaque et le conspirationnisme à front bas. Reste à comprendre pourquoi la vision bien à lui qu’a Dario Fo des Twin Towers ne suscite pas la moindre indignation. Or contrairement à l’infortuné Bigard qui a proféré une ânerie une fois en passant et s’en est de surcroît repenti, notre anarchiste ne cesse de répéter ses théories et son propre blog nous apprend qu’il n’hésite pas à en assurer lui-même la promo lors de projections-débats. Mais c’est la jurisprudence Ken Loach qui prévaut. Silence radio. Pas un seul mot sur cette affaire qui compte tant pour lui dans la notice Wikipédia de Dario Fo. Ses admirateurs le protègent de lui-même. Telle la femme de César, le Nobel altermondialiste est structurellement insoupçonnable. Dario Fo a sa carte. Quand on n’est pas n’importe qui, on peut dire n’importe quoi !

Epaulard ? C’est assez !

16

Deux nouvelles pour le prix d’une : Causeur a des lecteurs au Modem. Et aussi dans le Val de Marne ! A preuve, ce mail que nous recevons d’une responsable bayrouyste du 9/4, restitué, déontologie oblige, dans sa poétique intégralité : « Pourriez-vous vérifier l’identité de ce Monsieur nommé André Epaulard, qui a récemment écrit 2 billets sur votre site Causeur.fr ? Ce Monsieur André Epaulard n’est pas connu du MoDem, n’est pas adhérent et inconnu de la direction du MoDem. Il semble même qu’il n’existe pas. André Epaulard est un personnage de roman Nada, mis en film en 1973 par Chabrol, qui traite de politique apparemment sur le même sujet (alliance communiste-fasciste). Le CULET, Comité pour une littérature éthique, dont il se proclame président, ne paraît pas exister non plus, en tout cas aucune trace sur internet. Ce doit être une supercherie, une farce ou une manipulation. Merci au site causeur.fr de vérifier préalablement ses sources. »

Vers Vatican III ?

35

On pensait qu’avec la mort de Jean-Paul II, pape cathodique autant que catholique, le Vatican et le destin de l’Eglise catholique apostolique et romaine ne feraient plus les gros titres que de La Croix ou de Radio Notre-Dame. Eh bien on s’est trompé. Mais depuis l’élection de Benoît XVI, la fascination pour le pape s’est muée en méfiance et souvent en défiance. Ce retournement de l’opinion, catholique mais pas seulement, révèle un énorme malentendu : depuis Jean XXIII et le concile Vatican II – et surtout depuis qu’un prélat polonais a été élu au siège de saint Pierre – beaucoup avaient rangé le pape dans le camp des droits de l’homme et s’étaient persuadés que l’Eglise catholique s’était convertie à la religion du Progrès.

Les dernières controverses au sujet de l’évêque négationniste et surtout autour de la question du sida et des préservatifs montrent que ce malentendu repose, en particulier en France, sur une méconnaissance totale de la mission de l’Eglise. Vu de Rome, le combat à mener se trouve en Amérique du Sud, et notamment au Brésil, premier pays catholique du monde avec 125 millions de fidèles. Or, la proportion d’habitants se définissant comme catholiques y est passée de 89 % en 1980 à 74 % en 2000. Dans le même temps, le nombre de Brésiliens se réclamant de l’Eglise évangélique s’est envolé de 7 % à 15 %. Au-delà du Brésil, la « part de marché » des Eglises protestantes s’élève à environ 20 % au Chili et à presque 30 % au Guatemala. En Argentine, 10 % environ de la population revendique son appartenance au mouvement évangélique. En conséquence, les divisions du Vatican qui pouvaient mobiliser 85 % des 350 millions de latino-américains en 2000, ne représentent plus que 70 % de la population.

Les raisons de l’engouement pour les Eglises évangéliques (qui, bien que protestantes n’ont pas grand-chose à voir avec la sévérité calviniste) sont connues : elles proposent une religion pleine d’émotion reposant sur un fort sentiment d’appartenance à une communauté plutôt que sur un dogme ou un contenu intellectuel sophistiqué. Elles parviennent ainsi à séduire des populations laminées par l’éclatement des sociétés sous les coups des crises politiques, économiques et sociales répétées. Le plus frappant est que leur expansion fulgurante n’est nullement entravée – et peut-être même encouragée – par leur conservatisme en matière sociale et morale. Cela n’a pas échappé aux stratèges de Rome.

En Amérique latine, les Eglises évangéliques ont su séduire à la fois les pauvres et les classes moyennes bien mieux que n’avait su le faire « la théologie de la libération », dont les thuriféraires des années 1960 entendaient capter l’enthousiasme populaire suscité par la figure de Che Guevara et l’idée de la Révolution. Dans les années qui ont suivi Vatican II, Rome a même manifesté une certaine bienveillance à l’égard de ces expérimentations, même si une décennie auparavant le mouvement autrement ambitieux des prêtres-ouvriers avait été supprimé par Pie XII, marquant ainsi les limites de la tolérance du Saint-Siège.

Depuis, l’écroulement des régimes socialistes a fait presque disparaître toute initiative catho-marxiste. Aujourd’hui, pour l’Eglise, le danger ne vient pas de la gauche révolutionnaire mais des Eglises évangéliques.

Le personnage de Mgr Claudio Hummes, cardinal d’origine brésilienne, est symptomatique de cette évolution. Prêtre d’une paroisse de la banlieue ouvrière de São Paulo dans les années 1970, il s’était fait connaître par des prises de position hardies, notamment par son soutien à un jeune militant syndicaliste, Luiz Inacio Lula da Silva, l’autorisant même à prononcer des discours dans son église.

Quelque trente ans plus tard, en 2000, on entend de nouveau parler du prélat, promu depuis archevêque de São Paulo par Jean-Paul II. Mais les temps ont changé. Valeriano Paitoni va en faire l’amère expérience. Curé d’Imirim, une paroisse pauvre du nord de Sao Paulo, il a fondé, avec l’aide financière de ses ouailles, trois centres d’hébergement qui accueillent alors 33 séropositifs et malades du sida, dont 22 enfants. Indigné par les tests de dépistage secrètement exigés, selon lui, des candidats au sacerdoce par certains séminaires brésiliens, il a, pour couronner le tout, pris l’habitude de distribuer des préservatifs à ses paroissiens les plus démunis. Mgr Hummes, son supérieur hiérarchique, condamne aussitôt, avec l’aval de l’archevêque de Rio et « en communion avec le Pape et l’Eglise » les idées défendues par le père Valeriano. L’année suivante, Mgr Hummes critique un ministre brésilien qui avait renforcé le plan national d’éducation à la contraception. Fin 2006, Benoît XVI le rappelle à Rome et le nomme préfet de la Congrégation pour le Clergé, chargée notamment de la formation du clergé et de celle des fidèles (catéchisme).

Dans ces conditions et contrairement à ce que j’ai écrit, les choix de Benoît XVI sont peut-être dictés par la tactique politique autant que par la rigueur théologique. Il sait que l’avenir de sa multinationale ne se joue ni sur les rives du Tibre ni sur celles de la Seine mais en Amérique du sud, en Afrique et en Asie face aux nouvelles Eglises. Cette évolution semble avoir été bien comprise à la fois par les chefs de l’Église catholique et par certains croyants, comme on peut le constater par l’essor des charismatiques, sorte de « pentecôtisme catholique » agrémenté d’un fervent culte marial.

Rome peut regagner du terrain en s’appuyant sur ces mouvements mais continue à leur vouer une certaine méfiance. Sa stratégie s’appuie d’une part sur une défense de la morale sexuelle traditionnelle (contre le divorce, la contraception, l’avortement et l’éducation sexuelle à l’école), d’autre part sur celle des privilèges du catholicisme face à la concurrence évangélique. Les prises de position de Benoît XVI sur la contraception et l’avortement ne visent pas à lui gagner la sympathie, de toute façon temporaire, d’intellectuels mécréants, de faiseurs d’opinion parisiens ni même celle des évêques de France. Il a entendu le message venu d’ailleurs : ce que veulent les chrétiens d’Amérique latine, les participants des JMJ et les charismatiques, ce n’est pas une Réforme bis. C’est une Contre Réforme.

Le centrisme et la peinture en deuil

11

René Monory est mort, à l’âge de 86 ans, ce samedi 11 avril. Ce génial touche-à-tout de la vie politique française ne s’est pas contenté d’avoir été garagiste et ministre de l’Education nationale, gourou de Raffarin et président du Sénat, maire de Loudun, ville par laquelle il fut littéralement possédé et créateur du Futuroscope, faux parc de loisirs sur les nouvelles technologie mais vraie ambassade pour les extra-terrestres. René Monory, en effet, a aussi consacré sa vie à la peinture et a été le chef de file secret du courant de la Figuration Narrative. Les amateurs seuls savaient que derrière la bonhomie de ce centriste old school se cachait un artiste dont les toiles bleues et glacées représentent toute l’inhumanité de notre monde à travers des scènes de meurtres, de fusillade ou de femmes nues fumant dans des décors urbains déserts. Il serait heureux, en cette triste occasion, que le Sénat organise une rétrospective René Monory pour honorer le violon d’Ingres d’un de ses plus illustres représentants.

Pétain chez les maos

25

Avoir vingt ans en 1973. La lose. La Révolution, la Grande, la Seule, la Vraie, est passée depuis six ans déjà. De Gaulle repose à Colombey. On ne court plus les rues en criant des slogans impossibles, ils ont tous été dits et proférés. A peine ose-t-on battre le pavé parisien pour scander de timides « Pompidou, des sous ! »

C’est le drame de Jean-Marie Laclavetine, qui publie Nous voilà chez Gallimard, maison où il sévit tantôt comme éditeur, tantôt comme écrivain. Il serait né trois ans plus tôt qu’il aurait été en âge de la faire, cette Révolution. Et, quarante ans après, il nous aurait barbés à sortir un fort volume relatant ses souvenirs et ses exploits, à l’instar de tous les anciens soixante-huitards qui, dans un ultime sursaut, se sont mis en tête l’an passé de porter un coup fatal à l’édition française en publiant leurs Mémoires.

Ne sont-elles pas drôles, ces années 1970 ? On est sexuellement libéré, donc on baise. On fait tourner pétards, sticks et buvards. On se larzacquise, on se maoïse, on s’occidentaliste athlétiquement. On se donne l’impression d’être ensemble, mais on ne forme plus déjà qu’une communauté désœuvrée : le nous, celui de la révolution et du romantisme politique, s’est déjà délité.

En publiant Nous voilà, Jean-Marie Laclavetine sait faire plaisir aux lecteurs pressés et aux critiques qui se gardent bien de fréquenter la littérature en dehors de la lecture assidue des quatrièmes de couverture : tout est dans le titre. Deux mots, Nous voilà, que les nostalgiques de la francisque trouveront agréables à leurs oreilles, puisqu’ils leur rappelleront le refrain de Maréchal, nous voilà, chanson écrite en 1941 sur la musique de La Fleur au guidon qui faisait partie en 1937 du répertoire de Fredo Gardoni, inoubliable chanteur de la caravane du Tour de France. Ils n’auront pas tort, car Laclavetine nous raconte une histoire – peut-être n’est-elle qu’un prétexte –, celle de la promenade posthume du maréchal Pétain, dont il fait naviguer clandestinement le cercueil trente ans durant.

Le 20 février 1973 tombe, en effet, l’incroyable nouvelle : le cercueil du maréchal Pétain a disparu de sa sépulture. La police enquête et suit la trace des auteurs de cet enlèvement, avant de retrouver le cercueil baladeur dans un garage de la banlieue parisienne. On est bien peu de choses. La bière rejoint aussitôt son caveau de l’île d’Yeu. Fin de l’histoire ? Pas tout à fait. Rebondissement et sens du rocambolesque : Pétain se prend à fréquenter post mortem l’intelligentsia trotskyste et maoïste parisienne. La France moisie et l’anti-France enfin réunie inconsciemment autour d’une bière : c’est Philippe Sollers qui devrait être content.

Qu’on y prenne garde : Nous voilà n’est pas Nous voici. La langue française a quelques subtilités : dans Nous voilà, le nous est déjà loin. Il est parti se promener au large du moi, de l’égo et du je. Lorsque le sentiment collectif – qu’il soit procuré par le parti, la nation ou l’humanité – s’absente, toute grande entreprise est impossible : la révolution, nationale ou prolétarienne, prend des airs d’opérette.

Jean-Marie Laclavetine aurait pu – il ne l’a pas fait ou si peu – écrire un roman à clef. Et l’on aurait poliment gloussé en contemplant la carrière des ex-leaders de 1968, libertaires autrefois, libéraux aujourd’hui. On aurait plaisanté sur Henri Weber, passé de la LCR à un mariage très show-bizz au Cirque d’Hiver[1. On se souviendra que l’inénarrable Gérard Miller (starlette du petit écran) disait que ceux qui n’étaient pas invités à cette fête n’existaient pas socialement.]. On aurait décelé chez l’un ou l’autre personnage une inclination particulière à trahir ses idéaux et à ne maintenir avec constance que son infidélité. Mais Nous voilà échappe à ces contingences-là, pour aller à l’essentiel : la fin du politique, c’est-à-dire l’histoire d’une communauté qui, en trente ans, est devenue, à droite comme à gauche, non seulement désœuvrée mais aussi inavouable.

Une épopée contemporaine ? Oui. Le roman de Laclavetine a tout de l’épopée classique, long poème qui embrasse tout un peuple pour célébrer ses exploits historiques ou mythiques, comme on le dit chez Mme de Romilly. Sauf que les exploits historiques depuis 1970, faut les chercher. Toute épopée est désormais navrante. Tolstoï est inaccessible. Les personnages réels empruntent plus au général Boum, celui de la Grande Duchesse de Geroldstein, qu’au maréchal Koutouzov, le héros de Guerre et Paix. Il ne reste plus rien d’autre qu’un ennui si profond qu’il ne tue plus personne. Lorsque les grands chemins de l’histoire sont désertés, restent les petits chemins et la littérature : « J’ai peur de la rencontre avec le passé qui revient : le petit chemin des années perdues, envahi, d’herbes et de poussière, enfoui sous les ronces, où était-ce déjà, vers quoi menait-il, ce caminito, il y avait des chants, on riait, je crois me souvenir qu’on s’aimait, que s’est-il passé ? »

Nous voilà

Price: 18,80 €

34 used & new available from 2,00 €

Benoît XVI est incorrigible

19

Les prises de position de l’Eglise catholique ont défrayé la chronique au cours des dernières semaines. Au lieu de se refaire une santé médiatique et de partir en quête de buzz plus favorables, le pape Benoît XVI s’apprêterait, selon des sources bien informées, à récidiver dès ce soir en se livrant à de nouvelles déclarations fracassantes. Bon nombre de rédactions sont sur le qui-vive, et les papiers sont déjà sur le marbre. Cette fois, c’est la bonne : si le pape Ratzinger persiste, il est viré ! Osera-t-il donc contredire la Faculté en affirmant que le Christ est ressuscité ? Contactée, l’ambassade d’Italie en France se refuse à tout commentaire, indiquant seulement que Silvio Berlusconi accorde toute sa confiance au Signor Pilato, qui n’a jamais failli dans l’exercice de ses missions.

Balle pour tous

3

Le 9 février dernier, le maire de Béziers, Raymond Couderc, recevait une enveloppe kraft contenant une lettre d’insultes et une balle de calibre 38. Deux semaines plus tard, Jacques Blanc, Michèle Alliot-Marie, Rachida Dati, Alain Juppé, Christine Albanel, Frédéric Lefebvre, Christian Vanneste et Nicolas Sarkozy recevaient le même pli pas très discret. Jeudi, Christian Vanneste réceptionnait un nouveau courrier et l’Elysée annonçait l’arrivée d’un petit colis contenant deux autres balles… Bref, tout le gratin de l’UMP avait reçu sa lettre de menace. Tous, sauf un : Jean-François Copé !… Or, ce vendredi, c’est Pâques avant l’heure : la ville de Meaux dont il est le maire vient d’annoncer qu’une lettre d’insultes accompagnée d’une balle vient d’être réceptionnée ce matin ! Félicitations à l’heureux élu.

Cachez-nous donc ce bus que nous ne saurions voir

527

Surtout, regardons ailleurs. La vidéo d’une agression sauvage survenue dans un bus en plein Paris est diffusée sur internet. Scandale. Mais pas à cause de la brutalité et de la gratuité de ce tabassage, ni en raison de l’acharnement des agresseurs et de la terreur des passagers. Ce qui soulève le cœur des belles âmes, ce n’est pas ce qu’on voit, c’est qu’on le voie. Le premier coupable, c’est donc le flic ou l’employé de la RATP qui a pris la lourde responsabilité de faire fuiter ces images à l’extérieur[1. Mutatis mutandis, ça me rappelle la fureur de l’Autorité palestinienne contre les journalistes italiens qui avaient « sorti » les images du lynchage de deux soldats israéliens et les excuses penaudes de la presse italienne de Jérusalem.]. Et le second le site internet qui, rompant avec l’omerta assez largement respectée par les médias, a décidé de porter ces images à la connaissance du public. D’ailleurs, coup de chance : il s’agit de François Desouche, site identitaire ou d’extrême droite, chacun choisira son lexique.

Imaginons une vidéo montrant une lapidation au Pakistan, une exécution sommaire dans une improbable capitale africaine ou le tabassage raciste de prévenus dans un commissariat parisien. Ou encore des brutalités policières contre de pacifiques manifestants altermondialistes. « Les images qui suivent peuvent heurter la sensibilité », murmurerait une présentatrice de JT avec une nuance de gravité dans l’œil. On encenserait ceux qui ont réalisé ces images au péril de leur vie ou de leur carrière pour alerter nos consciences. On rappellerait peut-être la grandeur du plus vieux, pardon du plus beau, métier du monde. On chanterait les vertus d’internet qui nous montre ce qu’on veut nous cacher.

Bien entendu, rien de tel ne s’est passé dans le cas de la « vidéo de surveillance » de la RATP. Sa diffusion par François Desouche suscite d’abord dans les médias respectables un certain malaise ou une fin de non-recevoir. On ne mange pas de ce pain-là. Des journalistes capables d’être les gogos de n’importe quel bobard, se découvrant soudain fort pointilleux sur la qualité de leurs sources documentaires et de leurs sources tout court, examinent le film sous toutes ses coutures. Des déontologues sourcilleux qui recopient sans états d’âme les PV d’instruction ou d’interrogatoire que leur refilent aimablement juges et policiers, froncent les narines. « Qui a intérêt à faire sortir cette histoire ? », se demande-t-on avec des airs entendus. Soucieuse, sans doute, de se montrer médias-friendly, la Préfecture de police saisit l’IGS « pour connaître l’origine de la fuite qui avait permis à cette vidéo, filmée par la caméra de surveillance d’un bus, de sortir sur Internet ». Durant quelques heures, on place même en garde à vue un policier, membre du Service régional de la police des transports. L’intéressé ayant été mis hors de cause, « les investigations se poursuivent donc pour trouver le responsable », promet la PP dans un communiqué. On est soulagé de savoir que tous les moyens sont mobilisés pour retrouver cet odieux délinquant.

L’authenticité du document paraissant indiscutable, les vigilants, retrouvant leurs vieux réflexes, orientent les soupçons sur le messager, le désormais fameux site François Desouche que l’on ne doit citer qu’en se bouchant le nez. Qu’une information ait transité par ce dernier repaire de la bête immonde devrait suffire à la rendre impropre à la consommation – pas cachère si j’ose dire. Les vertueux s’alarment : n’y a-t-il pas là une manipulation politique venu de là où on pense ? Méfiance.

Autant avouer mon crime, il m’arrive de consulter ce site. On y trouve, en plus d’une indigeste propagande, des informations censurées – ou ignorées – ailleurs. Celles-ci sont à l’évidence sélectionnées dans l’unique perspective de démontrer les dangers de l’immigration. Il est vrai que l’apologie de la France multiculturelle est infiniment plus sympathique que la nostalgie d’une France blanche, largement fantasmée au demeurant, qui rassemble les contributeurs de Desouche. Il est clair que nombre d’entre eux flirtent et plus si affinités avec le racisme. On peut ne pas aimer – certains diront qu’on doit. Faut-il aller plus loin encore et se rendre sourd et aveugle à tout ce qui vient d’un si détestable environnement ? Il est assez plaisant de voir les plus pompeux adorateurs du culte de l’Information se comporter comme des propagandistes de bas étage. Le réel nous déplaît, changeons-le. Une vieille rengaine.

Au-delà des modalités de sa diffusion, décrétées douteuses et fermez le ban, il faut croire qu’il y a quelque chose dans cette vidéo qu’on ne veut pas voir. Ces images durant lesquelles on voit trois ou quatre jeunes gens s’acharner sur un autre et le rouer de coup alors qu’il est pratiquement à terre ont de quoi heurter certaines sensibilités – et même toutes les sensibilités. Il n’est pas sûr, cependant, que la retenue des médias dans cette affaire s’explique par le louable souci de ménager la nôtre.

Il faut en effet le proclamer haut et fort, ce film donne une image négative de la réalité. La Halde et tous ses disciples qui somment publicitaires, cinéastes et gens de télévision de s’employer à donner une image positive de tel ou tel groupe injustement traité par l’histoire et la société, devraient d’ailleurs émettre sous peu une protestation bien sentie. Enfin, plutôt que d’image négative, peut-être serait-il plus indiqué de parler d’image non-conforme – un manifestant molesté par la police, c’est aussi une image négative mais elle ne gêne personne.

Ce qui déplaît, dans la scène de l’agression dans l’autobus de nuit, c’est son casting : les agresseurs étaient « issus de l’immigration » et la victime blanche. Bien entendu, ces faits établis ne suffisent aucunement à conclure à l’agression raciste mais ils ne permettent pas non plus de décréter qu’elle n’avait rien de raciste. Imaginons que les agresseurs aient été blancs et la victime noire ou arabe. On aurait sans doute, pour sa plus grande joie d’ailleurs, évoqué le spectre de Le Pen et dénoncé une ratonnade. On aurait peut-être eu raison de le faire – et peut-être pas.

On me dira que le combat contre le racisme vaut bien quelques petits arrangements avec la vérité. Admettons. Aussi bien intentionnée soit-elle, cette tactique de l’aveuglement appliquée avec constance et avec le succès que l’on sait par la gauche dans la lutte contre le Front national, n’a strictement aucune chance de faire reculer le racisme. C’est même tout le contraire. C’est en planquant sous le tapis la délinquance ou le racisme quand les coupables sont des Français noirs ou arabes – au motif inavoué qu’eux-mêmes victimes de racisme –, qu’on jette la suspicion sur tous. Trois petites frappes qui s’acharnent sur un homme à terre ne représentent rien ni personne d’autre que trois petites frappes. Au lieu de détourner les yeux ou de leur tenir le langage de l’angélisme, il serait temps de leur parler le seul qu’ils comprennent, celui de la force. Sans distinction de race ou de religion.

Libérez Barabbas !

95

Le serviteur se tient en retrait. Un geste et il apportera à son maître une coupe pleine d’eau. Sale métier que de servir un homme aussi à cheval sur l’hygiène. On ne le retiendrait pas qu’il passerait ses journées en ablutions multiples, apportant plus de soins à ses mains qu’à sa procurature, rendant par trois fois à Esculape ce qu’exige César. Ça tarde à venir. Il éructe, moitié grec, moitié latin, et ponctue ses phrases des trois mots qu’il connaît d’araméen. Parler peuple, lui ressembler et faire ce qu’il réclame, voilà la politique. Ça n’en finit pas. Il fait venir sa femme. Elle chante, vous savez ? Le peuple s’impatiente. On n’est pas monté de la ville basse pour mater Claudia. Ce qu’on veut, c’est la peau de Joshua. Lequel ? Pilate en a deux sous la main. L’un est surnommé bar ’abb’a, l’autre se dit lui-même bar ’abb’a. C’est à n’y rien comprendre. Et personne n’y comprend rien. Va pour Joshua donc, qu’on le crucifie et qu’on libère Joshua ! De l’eau, vite.

Jusqu’à Origène et son Commentaire sur Matthieu, dans lequel il juge indécent d’attribuer à un impie un nom aussi saint, de nombreux manuscrits du récit de la Passion faisaient mention du prénom de Barabbas : Jésus. Ajoutez à cela qu’en araméen – langue supposée de rédaction de l’évangile de Matthieu –, bar’abb’a signifie « le fils du père », la confusion grandit. Et Pilate répète sa question : « Voulez-vous que je libère Jésus le Messie ou Jésus le Fils du Père ? » (Matthieu 27,17.) Pourquoi autant de similitudes entre deux hommes que la tradition nous présente, depuis le IIIe siècle, comme absolument dissemblables ? Serait-ce là un complot ourdi par l’Eglise, une vérité passée sous silence ? Les choses sont plus simples, c’est-à-dire beaucoup plus complexes.

Une hypothèse. Barrabas n’est pas le nom d’un personnage historique, mais une figure rhétorique : l’allégorie d’une idée théologique. Quand les évangiles synoptiques insistent sur la messianité de Jésus, le quatrième évangile, celui de Jean, insiste sur la divinité du Christ. L’idée de « Jésus messie d’Israël » est recevable par les juifs du Ier siècle ; celle de « Jésus fils du Père » coince en revanche aux entournures. Elle est même inacceptable : un peu rigolards, ils regardent les empereurs romains se prétendre fils de Vénus ou de Mars, mais pour ce qui est du Dieu d’Israël, e finita la comedia ! Comment pourrait-Il, Lui dont le nom est imprononçable, avoir un fils ? C’est proprement inconcevable et inadmissible.

Ce bar’abb’a que Luc, Matthieu et Marc nous font passer pour un « fameux brigand » n’est pas un personnage, mais le johannisme lui-même, c’est-à-dire l’idée que le Christ dépasse sa propre messianité pour n’être plus que fils de Dieu. C’est une hypothèse d’autant plus vraisemblable que l’exégèse nous apprend que, dans l’évangile de Jean, l’épisode de Barabbas est une pièce visiblement rapportée et que le texte original n’en fait nullement mention.

Dès lors, Barrabas ne serait donc que l’un des innombrables motifs de débats et de discussions qui animent l’Eglise des premiers siècles et que les évangiles ont recueillis au long du temps en strates imbriquées. Une borne témoin rappelant que l’idée de divinité du Christ n’était pas du tout évidente pour les premiers chrétiens (à l’exception des gnostiques, qui ne font pas la fine bouche quand il s’agit de rompre avec la référence vétérotestamentaire) et qu’il aura fallu attendre le concile de Nicée pour réconcilier ceux qui, à l’instar des trois premiers évangélistes, insistent sur la messianité du Christ et ceux qui, avec Jean, mettent en avant sa divinité. Mais ce n’est là qu’une hypothèse : l’exégèse nous apprend qu’un texte ne se laisse jamais enfermer dans l’univocité. Aucun commentaire, fût-il délivré par Gérard Mordillat en personne, n’épuise le sens ni le séquestre : l’infinitude du texte, c’est ce que le christianisme a reçu en partage du judaïsme.

Historiquement, rien n’atteste qu’on élargissait chaque année un criminel au moment de Pessa’h[1. Ni le Talmud ni le Midrasch, qui surabondent pourtant en détails historiques sur Pessa’h, n’évoquent nulle part cette coutume.]. Rien sinon les évangiles, qui nous disent que c’était une coutume. Ce qui confirme le statut essentiellement symbolique de Barabbas. Mais, dans le récit de la Passion, il n’est pas un simple figurant polémique ni une pauvre allégorie. Il est le premier homme, celui qui bénéficie en avant-première du sacrifice du Christ. Il n’est pas le parangon du juif déicide, mais la figure du chrétien lui-même, c’est-à-dire du pécheur qui reçoit le pardon parce qu’un autre a été sacrifié à sa place.

Barabbas permet également d’introduire dans le récit de la Passion la référence au rite du bouc émissaire décrit au chapitre 16 du Lévitique : Aaron choisit deux boucs semblables. L’un est immolé, l’autre est envoyé dans le désert. La différence – René Girard l’a mise en évidence, après que Nietzsche avait décelé combien elle inversait les valeurs de la civilisation antique – est que, contrairement à ce qui se passe dans la mythologie grecque, la victime est innocente. Et c’est pour cette innocence même qu’elle est condamnée à mort. Barabbas vient rappeler l’innocence de la victime, soulignant, par contraste, l’iniquité du jugement.

La troisième fonction que remplit Barabbas nous est rapportée par Marc qui le présente comme « un rebelle et un meurtrier ». Là encore, historiquement, la procurature de Ponce Pilate se distingue par le calme civil en Judée : il faudra attendre vingt ans pour que la paix cède le pas à un climat d’émeutes et de révoltes anti-romaines, avant de culminer en 66 à Massada et de s’achever en 70 par la destruction du Temple. Marc ment-il ? Non. Lorsqu’il écrit sa haggadah dans la Rome des années 65, transcrivant ce que Pierre lui a rapporté pendant leurs longues années de collaboration, l’évangéliste a les yeux braqués sur la Judée et les événements qui s’y déroulent. Il a de la sympathie pour ces juifs entrés en rébellion contre l’Empire. Il les connaît et les a fréquentés avec Pierre, en Judée puis à Rome. Le message qu’il leur adresse est simple : tout n’est pas politique. Ou plutôt : la royauté que vous promet le Christ n’est pas de ce monde.

Chez Marc, la figure des deux Jésus bar’abb’a illustre deux messianismes distincts : l’un prend les armes pour affranchir Israël de son occupant romain, l’autre poursuit des visées qui ne sont pas de ce monde. En mettant en scène l’un et l’autre Jésus, Marc nous met en garde contre tous les petits Mordillat que l’humanité enfantera jusqu’aux temps derniers : la politique et le messianisme font deux, quand bien même la politique prend des allures messianiques. La première veut la rébellion ici et maintenant. Elle complote, exécute, assassine, sans nécessairement avoir recours à la perspective de lendemains qui chantent et de surlendemains qui dansent. Quand elle en a, ses mains sont rouges de sang. Quant au messianisme, dont la nature est proprement eschatologique, il tient un discours sur les fins ultimes, sans pour autant les précipiter ni les devancer. Il nous parle en somme d’une insurrection qui vient et n’a pas fini d’advenir dans les cœurs humains.

Simone Weil notait : « Un ancien exemple de décision démocratique : la demande populaire de libérer Barabbas, et de crucifier Jésus. » Et tout ça, sans démocratie participative ni jurys citoyens.

Vite, de l’eau. Pilate n’attend pas.

Boycott d’Israël : des avocats exécutés sans jugement !

63

C’est le talentueux Sylvain Lapoix de Marianne2 qui nous l’apprend, les militants pro-Hamas de la banlieue nord ont trouvé un moyen radical de combattre l’envahisseur sioniste sans trop s’éloigner de chez eux. Comme le montre la vidéo jointe à cet article punchy, et que diffuse largement, mais pas exactement aux mêmes fins, le site de la liste EuroPalestine. Qu’y voit-on ? Des militants vêtus de T-shirts verts (on pense que la couleur n’a pas été choisie au hasard), siglés Boycott Israël, vont dans le magasin Carrefour le plus proche de chez eux et détruisent tous les produits originaires de l’ »Entité » honnie. Leur vindicte se porte plus particulièrement sur les légumes, pourtant verts eux aussi, ainsi que sur les fruits, tous accusés de pousser sur « la Terre volée au Palestiniens, grâce à l’eau volée aux Palestiniens ». Pendant que les boycotteurs détruisent en toute impunité les oranges, poivrons, avocats et autres végétaux impies, on voit aussi leur chef spirituel, si j’ose dire, accuser au mégaphone les hypermarchés Carrefour de dissimuler volontairement aux clients l’origine israélienne des produits frais. Du coup, on se demande comment font nos Europalestiniens pour reconnaître les légumes sionistes. Au faciès ?

On a sa carte ou on ne l’a pas

75

Tout n’est pas à jeter par la fenêtre dans le XXIe siècle. Le monde d’après le Mur réserve parfois de bonnes surprises, une fois qu’on a chassé de son esprit les spectres d’Angot, des frères Dardenne ou de Gad Elmaleh. Par exemple, j’aime bien certains mots de ce temps. Ou plus précisément le sens que prennent certains mots de ce temps.

Parfois parce qu’ils sont bien utiles. Quand vous lisez ou entendez quelqu’un utilisant l’adjectif lisible dans son acception moderne, du style : « Le gouvernement devrait rendre plus lisible sa position sur le RMI des couples homosexuels à Mayotte », vous savez que vous avez très probablement affaire à un crétin[1. J’ai banni de mon vocabulaire l’expression crétin des Alpes par crainte de voir Luc Rosenzweig m’envoyer en représailles depuis son shtetl chamoniard un de ses scuds-maison dont on se relève pas. Luc, il n’y a que des gens biens dans les Alpes, et je n’ai jamais prétendu, moi, que le peuple savoyard n’existait pas…].

Un avatar sémantique dont je fais mes délices est avoir sa carte. Au siècle passé, cela signifiait une seule chose : être membre du Parti. Le parti signifiant lui-même – toujours à l’époque – le Parti communiste. Quand tous les communistes en furent partis[2. V’la que je me fâche aussi avec Jérôme Leroy. Mais bon, j’avais ma carte avant lui…], l’expression avoir sa carte muta brutalement en moins d’une génération, donnant raison aux regrettés Jean-Baptiste Lamarck et Trofim Lyssenko. Au XXIe siècle, avoir sa carte signifie avoir le ticket, en clair être socialement et médiatiquement inattaquable, ou a minima être protégé des médisances par un préjugé favorable en kevlar. À ne pas confondre avec bankable, un mot un rien abject mais énonçant assez crûment l’équation postmoderne qui rapporte la surface sociale non plus à l’épaisseur du compte en banque, façon Patron-à-cigare, mais à la solvabilité médiatique, façon Premier pouvoir. Claire Chazal est bankable, tout ce qu’elle fait intéresse la France d’en bas, Le Clézio a sa carte, tout ce qu’il fait subjugue l’intelligentsia[3. Il faut s’appeler au moins Clint Eastwood ou Barack Obama pour bénéficier consubstantiellement de ces deux onctions à la fois.]. Si Claire Chazal présente depuis cinq ans, dans l’indifférence générale, une émission intelloïde (intitulée : « Je/nous de Claire », on ne rit pas) sur la chaine gaie Pink TV, c’est sans doute parce que quelqu’un lui a fait miroiter qu’elle pourrait un jour avoir sa carte à la force du poignet. C’est pas gentil.

Jean-Marie Bigard n’est pas prêt d’avoir sa carte. Quand il fait un spectacle, on est certes plus ou moins obligé d’en parler mais à cause de son public de prols blanchâtres et de son soutien à Sarko, on a largement le droit d’en dire du mal. Et même un peu l’obligation, depuis sa malheureuse saillie sur le 11 septembre chez Ruquier, dont Bigard entendra parler toute sa vie, qu’il traînera toujours au bout de la queue, gravée qu’elle est, en lettres de feu sur sa fiche Wikipédia : « Le 5 septembre 2008, lors d’une intervention sur l’antenne d’Europe 1, l’humoriste défend la thèse du complot intérieur à propos des attentats du 11 septembre 2001. Ses déclarations, ont déclenché une vive polémique, et une condamnation des principaux médias. Quelques jours plus tard, par communiqué de presse, il s’excuse : « Je demande pardon à tout le monde pour les propos que j’ai tenus vendredi dernier pendant l’émission de Laurent Ruquier sur Europe 1. Je ne parlerai plus jamais des événements du 11 septembre. Je n’émettrai plus jamais de doutes. J’ai été traité de révisionniste, ce que je ne suis évidemment pas. » »

Dario Fo, lui, a sa carte. Metteur en scène d’avant-garde, anarchiste militant, prix Nobel de Littérature en 1997, ça vous pose un homme. L’une de ses pièces, Faut pas payer, a été diffusée sur France 5. Un thème d’actu puisqu’il s’agit d’une évocation de la vie chère et des premières tentatives d’autoréduction dans les magasins pratiquées par les autonomes italiens des seventies[4. Et que tentent péniblement de rejouer pour les 20 heures de 2009 les troupes du NPA, avec un rendu qui n’est pas sans rappeler celui des StarAcadémiciens reprenant Léo Ferré.]. Faut-il le préciser, la diffusion de la pièce a été saluée par un chœur spontané de louanges, comme l’avait été sa création aux Amandiers en 2005.

Vous ne voyez pas le rapport avec Bigard. C’est que Dario Fo s’est beaucoup plus investi que le plus papistes de nos comiques-troupiers (voire le seul) dans la relecture complotiste du 11 septembre. Il a multiplié les déclarations hostiles à la thèse couramment admise de l’attentat islamiste et répété à l’envi que les Services américains étaient dans la combine.

Dario Fo est l’un des trois narrateurs du film italien Zero : enquête sur le 11 septembre. Un film dont nous laisserons un de ses metteurs en scène, Franco Fracassi, résumer la problématique : « Ben Laden a-t-il profité des attentats du 11 Septembre ? Peut-être… mais il n’est certainement pas le seul ! D’autres personnes ont largement profité de ces attentats, celles-là mêmes qui, ensuite, se sont revendiquées comme victimes de ce crime… » Un film qui, dans la foulée de Thierry Meyssan, affirme notamment qu’aucun avion ne s’est écrasé sur le Pentagone. Comprenons-nous bien : c’est le droit le plus absolu des uns et des autres de communier dans le délire paranoïaque et le conspirationnisme à front bas. Reste à comprendre pourquoi la vision bien à lui qu’a Dario Fo des Twin Towers ne suscite pas la moindre indignation. Or contrairement à l’infortuné Bigard qui a proféré une ânerie une fois en passant et s’en est de surcroît repenti, notre anarchiste ne cesse de répéter ses théories et son propre blog nous apprend qu’il n’hésite pas à en assurer lui-même la promo lors de projections-débats. Mais c’est la jurisprudence Ken Loach qui prévaut. Silence radio. Pas un seul mot sur cette affaire qui compte tant pour lui dans la notice Wikipédia de Dario Fo. Ses admirateurs le protègent de lui-même. Telle la femme de César, le Nobel altermondialiste est structurellement insoupçonnable. Dario Fo a sa carte. Quand on n’est pas n’importe qui, on peut dire n’importe quoi !

Epaulard ? C’est assez !

16

Deux nouvelles pour le prix d’une : Causeur a des lecteurs au Modem. Et aussi dans le Val de Marne ! A preuve, ce mail que nous recevons d’une responsable bayrouyste du 9/4, restitué, déontologie oblige, dans sa poétique intégralité : « Pourriez-vous vérifier l’identité de ce Monsieur nommé André Epaulard, qui a récemment écrit 2 billets sur votre site Causeur.fr ? Ce Monsieur André Epaulard n’est pas connu du MoDem, n’est pas adhérent et inconnu de la direction du MoDem. Il semble même qu’il n’existe pas. André Epaulard est un personnage de roman Nada, mis en film en 1973 par Chabrol, qui traite de politique apparemment sur le même sujet (alliance communiste-fasciste). Le CULET, Comité pour une littérature éthique, dont il se proclame président, ne paraît pas exister non plus, en tout cas aucune trace sur internet. Ce doit être une supercherie, une farce ou une manipulation. Merci au site causeur.fr de vérifier préalablement ses sources. »