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Iran : la politique de l’humiliation

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Ahmadinejad

Le Francop, le cargo arraisonné le 4 novembre par Israël au larges des ses côtes, a livré bien des secrets : il transportait, dissimulées dans des containers, des centaines de tonnes d’armes et de munitions – notamment des roquettes – en provenance d’Iran et destinés au Hezbollah. Mais il n’est pas nécessaire de livrer une bataille rangée en pleine nuit par mer agitée pour connaître un secret de Polichinelle qui est que l’Iran mène tout le monde en bateau.

Les négociations ouvertes il y a un mois sous l’égide de l’AIEA en sont l’illustration parfaite. Les Iraniens avancent pour mieux reculer, mettent en scène des crises et sèment des obstacles pour engager leurs interlocuteurs dans des débats secondaires. Sans jamais dire clairement non, ils prennent leur temps pour concocter des « oui, mais » farfelus. Dernier exemple en date, le deal proposé par l’AIEA aux termes duquel l’Iran transférera 1200 de ses 1500 kilos d’uranium faiblement enrichi à la Russie et à la France pour qu’elles l’enrichissent plus fortement, le transformant ainsi en matière impropre à l’usage militaire. Dès que cette proposition a été mise sur la table, Téhéran s’est appliqué à la vider de sens.

Les négociateurs iraniens ont deux objectifs seulement. D’abord, ils aimeraient empocher les concessions faites par les « 5 + 1 » (les quatre membres du conseil de sécurité plus l’Allemagne) dont la plus importante est la reconnaissance du fait accompli iranien dans le domaine nucléaire. Sans rien donner en échange, les Iraniens essaient de transformer en acquis ce qui devrait être une composante d’un deal global. Leur jeu se résume à diluer autant que possible leurs engagements pour reprendre plus tard la négociation avec, comme point de départ, la dernière concession. Quant à leur deuxième objectif, il consiste à séparer les Occidentaux des Russes et des Chinois, ce qui n’est pas très difficile. Pour que Pékin et Moscou bloquent la machine internationale en mode « dialogue », il leur suffit que les apparences soient sauves et que l’Iran fasse mine de laisser toujours la porte entrouverte.

Cette pratique de la « discussion » fondée sur le chantage n’est pas une tactique provisoire mais une tendance fondamentale de la politique iranienne.

Au moment où la marine israélienne s’affairait sur le Francop, l’Iran était en fête. Comme chaque année le 4 novembre, le régime célébrait un grand moment de la révolution khomeyniste : la prise de l’ambassade américaine à Téhéran. Et pour ce 30ème anniversaire, les dirigeants de la république islamiste se sont offert un petit cadeau, à la fois ludique et pédagogique : Clotilde Reiss. Voilà qui a dû rappeler le bon vieux temps à Ahmadinejad, qui fut l’un des principaux militants du groupe d’étudiants à l’origine de l’opération.

La prise d’otages, mode opératoire favori devenu lieu de mémoire, constitue une « structure élémentaire », pour utiliser l’expression de Claude Lévi-Strauss, de la culture politique iranienne des trente dernières années. Les étudiants iraniens qui avaient réussi en novembre 1979 à forcer les portes de l’ambassade américaine et à occuper les lieux, ne se sont pas contentés de cet acte hautement symbolique. Dès le début, et malgré l’exil en France de son leader Khomeyni, cette révolution-là ne cherche pas sa Bastille mais la mise en scène sordide du renversement des rapports de forces. L’attaque de l’ambassade était la première scène du premier acte. La pièce fut une prise d’otages de 444 jours.

Depuis cette affaire, l’histoire des relations entre le régime iranien et ce qu’on peut appeler « l’Occident » n’est qu’une succession de prises d’otages. Quand les Iraniens veulent quelque chose, ils négocient avec une arme braquée sur la tempe de quelqu’un. L’humiliation de l’ennemi est au cœur du rituel politique iranien.

Un lacanien aurait déjà noté une non-coïncidence étonnante : les victimes du Shah ont besoin de souris pour jouer le rôle du grand méchant chat. En tout cas, il y a dans cette mise en scène du pouvoir quelque chose de névrotique. Le problème du régime n’a pas grand-chose à voir avec les rapports de force dans le monde réel mais avec un sentiment d’infériorité et d’humiliation qu’aucune victoire ne semble susceptible de guérir et qui se traduit par l’obsession de la domination. Trente ans après leur victoire, pour se sentir forts, Ahmadinejad et les révolutionnaires de 1979 ont toujours besoin de Clotilde Reiss.

Qui a dit…

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…à propos du sommet organisé par la FAO (organisme de l’ONU luttant contre la faim) à Rome : « Il est nécessaire de contester l’égoïsme qui permet à la spéculation de pénétrer même sur le marché des céréales, mettant la nourriture sur le même plan que toutes les autres marchandises. La convocation elle-même de ce sommet, témoigne, dans un certain sens, de la faiblesse des mécanismes actuels de la sécurité alimentaire et de la nécessité de les repenser. Le risque existe concrètement que la faim soit considérée comme structurelle, comme partie intégrante de la réalité socio-politique des pays plus faibles, et fasse donc objet d’un découragement résigné, voire même de l’indifférence. Il faut donc que mûrisse une conscience solidaire qui considère l’alimentation et l’accès à l’eau comme droits universels de tous les êtres humains, sans distinction ni discrimination. » ?

  1. Cécile Duflot entre deux nominations de têtes de listes pour Europe Ecologie ;
  2. Benoît XVI entre deux prières pour éviter la fin du monde ;
  3. Olivier Besancenot entre deux tentatives pour saboter le Front de Gauche ;
  4. Hugo Chavez entre deux provocations de l’armée colombienne.

Un indice pour les Causeurs : il s’agit d’un célèbre anticapitaliste séjournant actuellement en Italie.

Femme libre, toujours tu chériras le Mur

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Marie NDiaye

Quand De Gaulle, à propos de Sartre, affirmait « on ne met pas Voltaire en prison », il jouait de puissance à puissance, et quand il connaissait l’humiliation de voir certains élèves de Normale Sup refuser de lui serrer la main, il ne s’abaissait pas à leur dire, par exemple, « Cassez-vous, pauvres cons, c’est le contribuable qui paie vos études », et à relever les noms dans la foulée.

Pompidou, son Premier ministre, était normalien et agrégé de lettres lui-même, auteur d’une anthologie de la poésie française qu’il faudrait rendre obligatoire dans les futurs examens d’acquisition de l’Identité Nationale : elle est en effet constituée comme un portefeuille de banquier, le second métier de Pompidou, et l’on n’y trouve que des valeurs sûres qui ne sont pas atteintes pas les crises systémiques et récurrentes de la poésie contemporaine.

Cela n’a pourtant pas empêché ces deux lettrés de flirter plus d’une fois avec Anastasie. On se souvient de la censure de La religieuse de Rivette et des ennuis récurrents (procès, menaces de prison) que connurent les éditeurs Régine Desforges, quand elle exhumait Le con d’Irène d’Aragon ou Jean-Jacques Pauvert entamant l’édition des Œuvres complètes de Sade.
Mais enfin, de Gaulle et Pompidou, hommes du monde d’avant, avaient encore en eux l’image de cette spécialité française, « le grantécrivain »[1. concept emprunté à Dominique Noguez], artiste mais aussi conscience morale, figure de l’intellectuel et savaient que ce genre d’opposition au pouvoir grandit aussi le pouvoir : que l’on songe aux relations entre Napoléon et Chateaubriand, à celles entre Louis XIV et Molière pour comprendre cette dialectique aristocratique où les deux gagnaient dans la contradiction.

On s’en doutait au moins depuis Maastricht, mais si le gaullisme survit partout où survit une certaine idée de la France, il n’ plus cours dans l’actuelle UMP qui ressemble à peu près autant au RPF que Jean-Marie Bockel à un socialiste ou Daniel Cohn-Bendit à un homme de gauche. On pouvait cependant imaginer que les tenants (de tous bords) de la vulgate néo-libérale s’accommoderaient avec indifférence des critiques des écrivains, artistes ou musiciens qui affirmeraient que le monde ne va pas si bien.

La récente affaire Marie NDiaye, que l’on devrait plutôt appeler, affaire Raoult, nous prouve qu’il n’en est rien. Il fallait remonter loin pour trouver un tel concentré de bêtise flaubertienne de la part d’un élu à qui les choses de l’esprit sont décidément étrangères.

Qui sait, Eric Raoult a peut-être cru que Marie NDiaye serait une cible aussi populaire dans son électorat que les groupes de rap, régulièrement stigmatisés et parfois poursuivis. Il est vrai que la plupart des rappeurs chantent là où on leur dit de chanter des horreurs, font sans s’en rendre compte l’apologie des valeurs de leurs ennemis pour hurler à la mort quand on envisage de les censurer. De parfaits idiots utiles.
Seulement, quoique franco-sénégalaise, Marie NDiaye n’est pas rappeuse  et quelqu’un aurait dû signaler à monsieur Raoult que pour l’instant aucun rappeur n’a encore été publié sous la couverture blanche de la rue Sébastien-Bottin. En plus, comme monsieur Raoult n’a pas pu écouter le texte de Marie NDiaye qui est dans un livre, il a ressorti un entretien donné fin août aux Inrocks, donc avant qu’elle ne reçoive le prix Goncourt, entretien dans lequel l’écrivain déclarait en substance qu’elle trouvait la France de Sarkozy, Hortefeux et Besson « monstrueuse ». Et alors ? On ne peut plus dire ce que l’on veut ? Et puis elle n’est pas la seule, ça m’arrive à moi aussi, et puis à d’autres. Avec des envies de Venezuela, tiens…

Le problème, c’est qu’on ne peut pas lui dire : « La France, tu l’aimes ou tu la quittes ». De l’élection de Sarkozy, elle a tiré les conclusions pratiques, calmement, sans lancer d’appels particuliers. Elle et son mari Jean-Yves Cendrey, lui aussi écrivain, ont choisi Berlin dans les jours qui ont suivi l’arrivée de la bande du Fouquet’s aux commandes du vieux pays.

Ce sont de mauvais Français ? Même pas, ce sont des Français fatigués, sans doute, mais qui ne sont jamais restés isolés dans leur tour d’ivoire, bien qu’écrivains. On lira par exemple de Cendrey, le bouleversant Les jouets vivants : il raconte comment son couple et ses enfants vivant tranquillement à Cormeilles en Normandie se sont retrouvés confrontés aux agissements d’un instit pédophile protégé par l’omerta villageoise et comment c’est Cendrey lui-même qui se chargea d’amener l’instit à la police.

Le devoir de réserve imaginé par Raoult prouve surtout sa confusion mentale. Sans doute aurait-il attaqué le préfet d’Alphonse Daudet qui s’en allait rimer aux champs.

Reste une question. Au-delà de l’initiative personnelle d’un député désœuvré soucieux d’apporter sa contribution culturelle à l’identité nationale, la sortie de Raoult reflète-t-elle la haine ou la peur de la Sarkozie pour le du travail du négatif qui est la marque de fabrique de tout écrivain digne de ce nom ?

En attendant la réponse, qui se posait déjà dans les années trente pour Bernanos au Brésil, ne prenez pas de risques, Marie.

Femme libre, toujours tu chériras le Mur.

Il faut donner du crédit à la France !

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Euro

Elisabeth, vénérée tôlière de cette confrérie de causeurs mal léchés, avait parfaitement résumé le cours des choses, le 22 juin 2009 à 19 h 51, en nous livrant cette confession gouailleuse : Ce Sarkozy-là j’ai envie d’y croire.

Aux vierges effarouchées qui s’inquiétaient déjà – sur les bancs socialistes notamment – du poids que constituerait le grand emprunt sur nos finances publiques, Elisabeth prodiguait un conseil abrupt mais éclairé : « S’ils ne comprennent pas que recourir à l’emprunt pour boucler ses fins de mois ou pour construire des infrastructures ne sont pas la même chose, qu’ils retournent à l’école. »

Je voudrais préciser cependant à la chère Elisabeth ainsi qu’à vous-même, qu’il faut être vigilant quant au choix de l’enseignant et éviter par exemple de confier son cerveau au regrettable Yves de Kerdrel, qui a cru devoir commettre une laborieuse et fielleuse chronique entièrement à charge contre Henri Guaino et à la dévotion du sage et orthodoxe François Fillon.

La ficelle est grossièrement manichéenne et ce Kerdrel – fayot de la bonne pensée – est trop inconsistant intellectuellement pour être une cible. Cela étant dit, si un organisateur d’évènementiel avait la bonne idée d’organiser, sous les auspices de Laguiole, une fête intitulée « la nuit des seconds couteaux », ce clone triste de Jacques Marseille pour nouvelles écoles de commerce discount récolterait assurément la palme d’or.

Oublions Kerdrel, mais méfiez-vous de cette clique de bras cassés hypnotisés par les préceptes douteux de la pseudo-science économique ; à travers la personne d’Henri Guaino, c’est vous que vise cette ligue des orthodoxes factieux conspirant au nom de la vertu budgétaire.

Enivrés par les senteurs opiacées de la nouvelle bluette intitulée Puisque la crise est finie, Oui-oui fait des économies, ils se font, en effet, les chantres d’une sortie de crise improbable qui leur permet d’entonner l’hymne vintage du retour aux fondamentaux, comprenons : les canons d’une conception de la vie économique, politique et sociale qui nous a fait frôler l’apocalypse.

Les grands toxicomanes de l’idéologie se ressemblent tous, quel que soit le vice auquel ils sacrifient et, même si c’est un produit de substitution qui nous est proposé, il faut refuser cette abolition du discernement prônée avec force coups de mentons par ces héros harassés de « la seule politique possible ». Oui, ces ânes bâtés veulent vous entraîner dans le déni du réel, occultant une crise qui plonge ses racines dans la libre circulation des capitaux, un libre-échangisme effréné, l’avènement d’un capitalisme actionnarial carnassier et de cette financiarisation qui n’en a pas fini- de cracher ses glaviots toxiques à la face du monde.

Que les socialistes qui ont contribué à dicter au capitalisme cet itinéraire erratique en appellent stupidement à une relance par la consommation à l’échelle européenne tout en torpillant le super-emprunt au nom de la discipline budgétaire européenne, rien que de plus naturel. Mais que la majorité se laisse entraîner dans cette spirale faussement vertueuse est beaucoup plus dangereux pour l’avenir du pays.

C’est donc une bonne raison d’en appeler au tôlier.

Le discours que vous avez prononcé en effet devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles le 22 juin 2009 mériterait d’être relu attentivement, notamment par cette meute pathétique unie par les liens du déni qui prétend dissoudre dans un océan d’orthodoxie budgétaire retrouvée la stratégie du Grand emprunt telle que vous l’avez énoncée.

Le Sarkozy de la crise avait du cran et du corps. Et la crise n’étant pas terminée, je vous conjure de ne pas couper le Sarko 2010 avec l’eau bénite de cet ordre trop influent, notamment auprès de vous.

Monsieur le Président, ne vous laissez pas enfumer par ce chœur asséché qui, de Benoit Hamon, Michel Sapin, Didier Migaud en passant par Alain Juppé, Michel Rocard et Eric Woerth, voire François Fillon, distille une mélodie tiédasse destinée à raviver la psychose de la faillite, de l’endettement, du fardeau pour les générations futures.

Tout ce que ce gang des premiers de la classe peut vous apporter c’est un passeport pour les emmerdements, ils sont capables de vous faire perdre l’élection présidentielle face à une chèvre ou un rottweiler.

À titre personnel, je me suis senti bien plus en phase avec votre magistère de crise, énergique, décisionniste, iconoclaste, qu’avec la première séquence de votre mandat, qui pouvait faire redouter une forme d’allégeance aux canons du capitalisme anglo-saxon matinée d’une certaine dévotion pour les tables de la loi de l’orthodoxie budgétaire européenne. Je dois vous le confesser, j’ai voté non au référendum sur le TCE, j’ajoute qu’en ma qualité de Français moisi, j’ai beaucoup d’amis qui en ont fait de même, souvent les mêmes d’ailleurs qui ont voté pour vous en grand nombre. Comme quoi le Français moisi n’est ni mauvais bougre, ni rancunier.

Face à la crise, je vous ai découvert tellement moins engoncé dans l’idéalisme européen et le fétichisme des traités que les hiérarques socialistes. J’ai été agréablement surpris lorsque vous avez réaffirmé l’idée d’une intervention légitime de l’Etat et la pérennité d’un modèle social qui lui est consubstantiellement lié, marquant ainsi sans tapage une distance avec l’aile disons la plus libérale de votre majorité.

Alors, je vous en supplie, ne vous laissez pas abuser par les visiteurs du soir, refusez leur potion qui entraîne ce sommeil de la raison qu’est le dogmatisme. Ne vous soumettez-pas à leur verbiage obscur, à leurs postulats déguisés en vérités axiomatiques.

La France n’est pas ruinée.

Elle est moins endettée que ses partenaires, avec une dette qui représente 81,5 % du PIB (prévision 2010) alors que la moyenne pondérée de la zone euro est 83,6 %.

Surtout, contrairement à ce que disent les marchands de sornettes, la seule réalité qui compte est l’endettement global des agents économiques et non la simple dette publique ! Or, si l’on ajoute la dette des ménages et celle des entreprises, la France était en 2006 la moins endettée de tous les grands pays d’Europe, ceci s’expliquant par la relative faiblesse de l’endettement des ménages, les deux champions étant en Europe, l’Espagne et la Grande-Bretagne, et le champion toutes catégories les Etats Unis d’Amérique, avec une dette globale qui se monte à 240 % du PIB. Mais laissons parler Patrick Artus qu’on ne peut soupçonner d »extrémisme échevelé ou de souverainisme scrogneugneu : « Si les déficits public et l’endettement public financent des investissements à long terme utiles (recherche, infrastructures, éducation, PME innovantes, croissance verte…), la qualité de l’endettement public est supérieure à l’endettement privé. »

Ne cédez rien, monsieur le Président. S’attaquer à la dérive budgétaire alors que nous ne sommes pas sortis de la crise est irresponsable, c’est la déflation qu’il faut craindre pas le déficit public.

Oui, Monsieur le Président, il faut injecter de l’argent dans l’économie alors que les effets de la crise de liquidité ne sont pas surmontés et que les prévisions économiques de la zone euro sont plutôt celle d’une atonie chronique que d’une reprise galopante.

Le nombre des faillites de PME est en augmentation, les plans sociaux  vont se multiplier, il faut donc soutenir sans mégoter, tant sur le principe que sur le montant, votre Grand emprunt. La tribune de 63 députés en ce sens est la seule forme de soutien intellectuellement loyale et politiquement utile à votre égard.

Seul l’Etat peut investir en pareil moment et tant pis s’il faut pour cela froisser quelques susceptibilités : quand les dogmatismes ont failli, l’heure est à une hérésie raisonnable et décomplexée.

Oui, il faut comme vous aimez à le dire mettre le paquet, organiser le débat sur les priorités stratégiques et donner à ce programme d’investissement public une visibilité démocratique qui annonce et justifie un second mandat.

La France est capable d’entendre ce discours, à condition que la tribu des malfaisants cesse d’organiser sa danse du scalp autour de Henri Guaino. La politique de la France ne se fait pas sur un dance floor, surtout quand c’est Michel Rocard qui conduit le bal.

La vraie menace pour notre pays ne réside pas dans la dette diabolisée mais dans la désindustrialisation induite par la concurrence mondiale et la financiarisation de l’économie.

J’ajoute qu’il est quand même exaspérant de constater qu’en matière de remboursement la BCE garantisse un taux de 1 % à ces chiens galeux de banquiers quand il est fixé à 3,51 % pour les Etats.

Du sang et des larmes pour les uns, des couilles en or pour les apprentis sorciers, voilà ce qui se dit sur n’importe quel zinc de l’Hexagone et l’apéro c’est quand même le moment où se forme l’opinion d’un peuple doté d’un solide bon sens non dénué d’espièglerie.

Vous allez rendre votre arbitrage. Avec des taux historiquement bas, il est parfaitement concevable d’obtenir un rendement des investissements supérieurs au coût de l’emprunt. En revanche, il convient de bien discerner les dépenses productives, d’investir dans les écosystèmes de croissance que sont les grandes métropoles, de songer à protéger l’économie nationale pour doter le fonds de réserve des retraites, de rechercher des participations visant à renforcer l’appareil productif présent sur le territoire et d’éviter les délocalisations. Bref, il s’agit de renouer avec une certaine idée du capitalisme d’Etat.

Vous pouvez rassembler la nation autour d’un tel programme. Cela marquerait un tournant dans le quinquennat. Tournez le dos aux pères la rigueur. Ne vous laissez pas voler votre énergie transformatrice par les inspecteurs des finances, la commission de Bruxelles et autres clubs d’anciens premiers ministres, compagnons de grisaille technocratique.

Donnez du crédit à la France.

Carla, fais les valises

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Sans doute pour couper court aux rumeurs de la carlaïsation du régime et de l’influence exagérée qu’elle aurait prise sur son mari en lui faisant préférer Benjamin Biolay à Didier Barbelivien, par exemple, la première dame de France a donné un entretien à Elle, ce vendredi. Il en ressort, de son propre aveu, qu’elle n’entrave que pouic à la politique, que c’est le président qui a l’initiative des conversations sur les sujets importants et qu’il ne lui demande même pas son avis sur les points de détails. C’est à peine si elle ne reste pas debout quand les hommes, les vrais, parlent affaires étrangères, délinquance et chômage en flèche. Elle déclare elle-même tout de go : « Je donne mon avis à mon mari s’il me le demande, mais il ne me consulte jamais sur des points politiques précis, car je n’y connais rien. » Et c’est ainsi que l’on perdit l’égérie française…

Pan-pan sur la fessée

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Pédiatre et députée UMP, Edwige Antier s’apprête à frapper un grand coup ! Ce matin, dans Le Parisien, elle annonce qu’elle va déposer une proposition de loi visant à interdire la fessée, dont elle rappelle qu’elle est traumatisante au point que 18 Etats européens l’ont déjà proscrite. Mais, confie la députée, il ne s’agit pas « d’envoyer les parents en prison » : « L’article serait lu aux parents lors du mariage. » Il n’est pas dit que la lecture de ce petit article de loi ne donne pas des idées à certains jeunes mariés et que des nuits de noces ne s’annoncent pas bien agitées.

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Géopolitique de la baston

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Chuck Norris dans <em>Delta Force,</em> 1986.
Chuck Norris dans Delta Force, 1986.

Ces jours-ci, j’ai eu envie de revoir Delta force. Un de ces films que je regardais avec mon fils quand il était petit pour qu’il ne devienne pas plus tard une couille molle d’étudiant trotskiste pro-palestinien. Produit par Menahem Golan et Yoram Globus, deux Américains qui nous avaient donné Un justicier dans la ville avec Charles Bronson – celui-là, je l’ai sans doute vu avec mon père –, et qui avaient décidé cette fois-ci d’envoyer Chuck Norris au Liban.

Sa mission était simple, avec son groupe commando, les « Delta force », il avait carte blanche pour délivrer des otages détenus par une milice de salopards armée par deux pays voisins et qui devaient être exécutés si on ne libérait pas d’autres salopards du même genre. Chuck Norris était partant, il faut dire qu’il avait les mains libres et qu’on était venu le chercher pour ce qu’il savait faire et rien d’autre : la guerre. Et ensuite, la paix. Pendant la mission, pas de colis de la Croix-Rouge à distribuer, pas de contact à établir avec la population, pas besoin de négocier ceci ou cela avec des chefs de tribus. Après, pas d’inspecteurs onusiens des travaux finis qui viendraient l’emmerder avec des histoires de sommation ou de dommages collatéraux, pas de tribunal international qui allait lui pourrir la retraite sur des points de droit ou de crimes contre l’humanité.

J’ai à peu près tout oublié du film sauf la fin. Avec l’élite des combattants de l’armée américaine, l’ex-champion du monde de karaté, (car au départ, Chuck Norris n’est pas comédien, à l’arrivée non plus d’ailleurs et pour jouer Tootsie, il vaut mieux prendre Dustin Hoffman mais sur ce coup-là, il ne s’agit pas de se mettre du rimmel mais de se mettre sur la gueule) fonce avec les otages vers la côte, poursuivi par les Arabes en Mercedes. Dans les films, si les terroristes avaient du goût, ça se saurait.

Dans la dernière scène du film, le chef des Libanais pro-syrien, pro-iranien et pro-tout ce qui peut leur fournir des armes dans leur lutte contre la souveraineté du Liban, se retrouve en face de notre héros. L’Arabe fourbe et sadique, celui-ci est comme ça, qui du fond de son bunker a envoyé tant de jeunes hommes à une mort certaine, est à découvert. Chuck Norris, sur sa moto armée d’un lance-roquette (les producteurs ont peut être décroché un contrat avec Suzuki) arme son tir. Rien ne peut empêcher la justice américano-sioniste de se frayer un chemin à la vitesse de la lumière jusqu’à la gueule du chiite. Et il le sait. On peut lire dans son regard de la terreur. Il a compris qu’aucun président Français pro-arabe ne viendra le tirer d’affaire, qu’aucune campagne mondiale d’opinion pro-palestinienne ne pourra arrêter le glaive punitif. Lui qui se voyait finir sous les applaudissements comme son frère d’arme après avoir tué une petite fille à coups de crosse, va connaître le triste sort du cheikh à roulettes et de tous ceux qui ont tenté de s’asseoir après lui dans son fauteuil. Rien ne vient le consoler dans la minute qui lui reste à vivre, ni les 100 vierges qui l’attendent, ni les obsèques héroïques et hystériques que lui réservent ses coreligionnaires armés, ni les protestations de Michel Warschawski, ni l’indignation de Stéphane Hessel ni les rapports accusateurs des ONG scandinaves. Il repense à Soral, Meyssan et Dieudonné, ces Français libres et visionnaires qui lui avaient prédit, alors qu’ils le rencontraient à Damas, qu’il se ferait flinguer par un Américain financé par des juifs, mais il avait lâché un débonnaire « Inch’Allah » en comptant plutôt sur les protections diplomatiques.

Là, il n’a plus le temps d’appeler l’ambassade et quand la caméra resserre l’image sur sa gueule de métèque de chiite antisioniste, on lit au fond de ses yeux noirs de la trouille. Face à Chuck Norris, le combattant prêt à tuer pour la cause chie dans son froc.

À ce moment-là du film, j’ai beau être profondément antiraciste et farouchement persuadé que la violence n’est pas la solution, j’ai beau être convaincu qu’il faut tendre la main, pardonner les péchés, construire la paix dans le dialogue, quand la roquette made in USA vient fendre en mille la gueule du terroriste, je ne peux réprimer un chah[1. Bien fait, en arabe.] jubilatoire. Est-ce que ça fait ça à tout le monde ?

Marie NDiaye, femme puissante

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Marie NDiaye

J’étais à l’étranger, en train de confronter mon identité nationale à celle des citoyens de la République tchèque lorsqu’a éclaté, dans notre beau pays de France une de ces polémiques politico-littéraires dont il raffole. Le 18 août dernier, dans un entretien accordé aux Inrockuptibles, organe central de la branchitude bien-pensante, la romancière Marie NDiaye, toute nouvellement auréolée du prix Goncourt, avait affirmé que la France de Nicolas Sarkozy était « monstrueuse ».
Pour bien montrer qu’il ne s’agissait pas là seulement de paroles verbales, elle précisait : « Nous sommes partis [à Berlin] juste après l’élection [présidentielle] en grande partie à cause de Sarkozy (…). Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité ».
Etant issu d’une famille qui fit, au siècle dernier le chemin inverse pour des raisons qu’il n’est pas besoin de rappeler en détail, sinon qu’en matière de flicage et de vulgarité le Berlin, de 1933 n’était pas mal non plus, je me suis senti interpellé, et même interpellé quelque part.

Sur le moment, ces déclarations étaient passées inaperçues, mais l’attribution du prix Goncourt à l’auteur de Trois femmes puissantes leur a donné l’écho qu’elles méritaient.

Serais-je à ce point aveuglé par les avantages sybaritiques liés aux conditions de vie dans la République française pour ne pas voir que ce pays est devenu monstrueux depuis l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Elysée ?
Dans ce cas, Marie NDiaye serait tout-à-fait dans le rôle nécessaire et admirable de l’écrivain qui révèle par son art et son comportement social une réalité non encore parvenue à la conscience du grand public. L’exil comme protestation suprême contre la toute-puissance des tyrans, celui de Victor Hugo, Thomas Mann, Alexandre Soljenitsyne serait alors celui choisi par Marie NDiaye pour mener son combat culturel et politique.

De retour en France, je m’attendais à plonger dans une mêlée polémique relative au contenu des propos de Mme NDiaye : La France de Nicolas Sarkozy est-elle vraiment monstrueuse ? Si oui, quels traits tératologiques peut-on discerner dans l’image qu’elle offre au monde ? L’exil volontaire de Marie NDiaye doit-il être considéré comme un acte héroïque de résistance à un régime politique ignoble ?
Il n’en est rien. Le débat s’est déplacé des déclarations de la romancière (avant l’obtention du Goncourt) aux propos du député UMP Eric Raoult, invitant Marie NDiaye à ne pas transgresser un « devoir de réserve » qui s’imposerait, selon lui, au récipiendaire de la plus prestigieuse récompense littéraire française. Il n’en fallait pas plus pour que le parti des écrivains et écrivaines vole au secours d’un de ses membres les plus éminents. La stupidité proférée par un parlementaire en mal de publicité exonérait Marie NDiaye de s’expliquer plus avant sur les propos pour le moins légers, et je suis poli, tenus par elle dans les Inrocks. Merci Eric.

Ce que l’on attend d’un prix Goncourt, ce n’est pas qu’il pèse ses mots comme un sous-préfet censé incarner la République sur le territoire où il est affecté. On attend de lui qu’il fasse un meilleur usage des mots ne notre langue que ceux à qui la nature n’a pas donné le talent de romancier ou de poète.
Admettons que Marie NDiaye soit dans le vrai en qualifiant de monstrueuse la France de Nicolas Sarkozy. Je lui demande alors bien humblement, en tant que prolétaire de la belle langue, de me fournir les adjectifs me permettant de qualifier l’Iran d’Ahmadinejad, le Cambodge de Pol Pot, la Libye de Kadhafi ou le régime militaire birman.

Le Goncourt assure, paraît-il, de confortables revenus à celui ou celle qui le reçoit. Mais il n’ouvre pas un crédit illimité à dire n’importe quoi.

Lauréats du Goncourt, taisez-vous !

42

Eric Raoult

Si les prix littéraires supposent un devoir de réserve, Mauriac a eu tort de dénoncer l’usage de la torture en Algérie, Gide n’aurait pas dû critiquer le colonialisme dans Voyage au Congo et Victor Hugo aurait dû s’abstenir de rabaisser Napoléon le petit.

« On ne met pas Voltaire en prison » avait dit dans sa grande sagesse De Gaulle à son ministre de l’Intérieur qui lui suggérait de faire arrêter Jean Paul Sartre.

La sotte injonction adressée par Eric Raoult à Marie NDiaye, lauréate du Goncourt, pose une question : où est notre passion française pour les libertés ?

Cependant, ramenons cette histoire de coquecigrues à sa véritable dimension. Le 30 août, dans un entretien aux Inrockuptibles, à la question « Vous sentez vous bien dans la France de Sarkozy ? », Marie NDiaye, qui vit à Berlin, fait la réponse suivante : « Je trouve cette France monstrueuse… Nous sommes partis après les élections en grande partie à cause de Sarko…Je trouve détestable cette atmosphère de flicage… Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux »

Raoult, député UMP de Seine Saint Denis, qui semble confondre le Goncourt avec un poste de préfet somme l’auteur de Trois femmes puissantes de respecter « un devoir de réserve ». « Le message délivré par la lauréate se doit de respecter la cohérence nationale et l’image de notre pays », affirme-t-il.
Dans le tout-Paris des médias et des lettres littéraire, c’est le branle-bas de combat. Ce devoir de réserve, s’indigne Bernard Pivot, « n’a jamais existé, n’existe pas et n’existera jamais ».
Les politiques joignent leur voix à ce tohu-bohu abracadabrantesteque. Ségo et Aubry se fendent d’un message de « soutien » et de « sympathie » à la « victime ». Sollicité à son tour, Frédéric Mitterrand estime prudemment qu’il n’a pas compétence pour « arbitrer cette polémique ».

Bien entendu, un auteur n’étant ni fonctionnaire, ni élu, ni représentant de l’Etat à quelque titre que ce soit, il n’y a aucun devoir de réserve qui tienne. Tempête dans un verre d’eau, bêtise au front de taureau, aurait dit Baudelaire.

Ceci étant clairement dit, on a cependant le droit de trouver que Marie NDiaye est parfaitement à côté de la plaque. La France serait « monstrueuse », la droite, c’est la « mort et la vulgarité ? ». Vivons-nous, sans le savoir dans la Russie de Staline ou le Chili de Pinochet ? Expliquez-nous donc, chère Marie en quoi l’Allemagne libérale de Mme Angela Merkel est-elle plus attirante que la France de Sarkozy.

Je préfère penser que c’est l’envie du dépaysement, le désir de se sentir étranger dans un ailleurs qui vous a poussé à vivre à Berlin. (Porca misere ! J’aurais choisi Rome ou Florence, mais bon). Et que vous continuerez à y écrire de beaux livres. Dans la langue de Talleyrand (qui disait fort justement que « tout ce qui est excessif est inutile ») et de Sarkozy.

Fierté picarde

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Picardie
Philippe Lacoche livre une Picardie intime.

Philippe Lacoche, républicain old school, est déjà l’auteur de plusieurs romans et recueils de nouvelles, élégants et nostalgiques, qui font de lui un héritier aussi direct que modeste d’auteurs comme Henri Calet ou Roger Vailland. Cité Roosevelt, Le Pêcheur de nuages ou encore De Petits bals sans importance ont montré son art délicat, presque minimaliste, pour rendre compte des enfances dans la Baie de Somme pendant les années soixante, de la vie quotidienne dans les premiers HLM de Picardie et la création picaresque de groupes de rock improbables qui « font la route » entre Abbeville et Chaugny-Tergnier ou Verberie et Attigny.

Egalement journaliste au Courrier picard et ancien critique à Best, quand il suivait les groupes français en concert, Lacoche n’avait à priori rien dans son ADN politique pour écrire ce Pour la Picardie, qu’il sous-titre d’un bel oxymore : Pamphlet sentimental. Lacoche est en effet un archéo-jacobin qui a fait partie de la belle aventure du Chevènement de 2002 en participant au recueil Contes de campagnes (Mille et une nuits) qui rassemblait l’essentiel de ses soutiens dans le monde littéraire.

[access capability= »lire_inedits »]Alors, Lacoche, dans une défense girondine des régions en général et de la sienne en particulier ? Que s’est-il passé ? Il s’est passé, comme nous le dit lui-même l’auteur, la commission Balladur que l’on a chargée de redessiner technocratiquement le territoire français et qui a proposé, outre la suppression de l’échelon départemental, le démantèlement de certaines régions. Tout cela, évidemment, dans un souci de rationalisation européenne, histoire de présenter devant les nouveaux maîtres de Bruxelles non plus une encombrante nation avec des régions trop petites et des départements minuscules mais des unités administratives de consommation viables de 8 à 10 millions d’habitants. Parmi les régions promises au néant géographique, la Picardie, donc. L’Oise avec l’Ile-de-France, la Somme avec le Nord-Pas-de-Calais et l’Aisne avec Champagne-Ardenne.

Alors, parce que ce projet rappelle les délires d’un Colot d’Herbois voulant découper la France en carrés au moment de la Révolution française, Lacoche réagit. La Picardie, c’est évidemment une identité, une plaine au bord de la mer avec ces bibles de pierre que sont les cathédrales, sur le parvis desquelles se jouèrent les Mystères, ces premières pièces de théâtres de notre littérature, dans une langue qui allait permettre au français de trouver son assise définitive. La Picardie, c’est aussi cette province du carnage, parsemée de cimetières militaires, où pendant la première guerre mondiale, une bonne partie de toutes les nationalités existantes est venue s’étriper, se gazer, se canonner à bout portant pendant quatre ans.

Mais Lacoche sait entremêler à sa Picardie historique sa Picardie intime. Il célèbre le chevalier de la Barre, jeune aristocrate brûlé vif à Abbeville pour avoir refusé de saluer une procession, tout en se souvenant du bar près de son lycée à Saint-Quentin, quand il montait un groupe de rock. Et il se rappelle que c’est à l’ombre fortifiée des églises de Thiérache qu’il a donné ses premiers baisers pluvieux.

Alors vous comprendrez pourquoi Lacoche ne veut laisser à personne le droit de rayer d’un trait de plume la Picardie. Et qui sait, grâce à lui, vous visiterez peut-être enfin cette région qui vaut bien la Provence, avec son livre à la main, en guise de guide ?

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Iran : la politique de l’humiliation

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Ahmadinejad

Le Francop, le cargo arraisonné le 4 novembre par Israël au larges des ses côtes, a livré bien des secrets : il transportait, dissimulées dans des containers, des centaines de tonnes d’armes et de munitions – notamment des roquettes – en provenance d’Iran et destinés au Hezbollah. Mais il n’est pas nécessaire de livrer une bataille rangée en pleine nuit par mer agitée pour connaître un secret de Polichinelle qui est que l’Iran mène tout le monde en bateau.

Les négociations ouvertes il y a un mois sous l’égide de l’AIEA en sont l’illustration parfaite. Les Iraniens avancent pour mieux reculer, mettent en scène des crises et sèment des obstacles pour engager leurs interlocuteurs dans des débats secondaires. Sans jamais dire clairement non, ils prennent leur temps pour concocter des « oui, mais » farfelus. Dernier exemple en date, le deal proposé par l’AIEA aux termes duquel l’Iran transférera 1200 de ses 1500 kilos d’uranium faiblement enrichi à la Russie et à la France pour qu’elles l’enrichissent plus fortement, le transformant ainsi en matière impropre à l’usage militaire. Dès que cette proposition a été mise sur la table, Téhéran s’est appliqué à la vider de sens.

Les négociateurs iraniens ont deux objectifs seulement. D’abord, ils aimeraient empocher les concessions faites par les « 5 + 1 » (les quatre membres du conseil de sécurité plus l’Allemagne) dont la plus importante est la reconnaissance du fait accompli iranien dans le domaine nucléaire. Sans rien donner en échange, les Iraniens essaient de transformer en acquis ce qui devrait être une composante d’un deal global. Leur jeu se résume à diluer autant que possible leurs engagements pour reprendre plus tard la négociation avec, comme point de départ, la dernière concession. Quant à leur deuxième objectif, il consiste à séparer les Occidentaux des Russes et des Chinois, ce qui n’est pas très difficile. Pour que Pékin et Moscou bloquent la machine internationale en mode « dialogue », il leur suffit que les apparences soient sauves et que l’Iran fasse mine de laisser toujours la porte entrouverte.

Cette pratique de la « discussion » fondée sur le chantage n’est pas une tactique provisoire mais une tendance fondamentale de la politique iranienne.

Au moment où la marine israélienne s’affairait sur le Francop, l’Iran était en fête. Comme chaque année le 4 novembre, le régime célébrait un grand moment de la révolution khomeyniste : la prise de l’ambassade américaine à Téhéran. Et pour ce 30ème anniversaire, les dirigeants de la république islamiste se sont offert un petit cadeau, à la fois ludique et pédagogique : Clotilde Reiss. Voilà qui a dû rappeler le bon vieux temps à Ahmadinejad, qui fut l’un des principaux militants du groupe d’étudiants à l’origine de l’opération.

La prise d’otages, mode opératoire favori devenu lieu de mémoire, constitue une « structure élémentaire », pour utiliser l’expression de Claude Lévi-Strauss, de la culture politique iranienne des trente dernières années. Les étudiants iraniens qui avaient réussi en novembre 1979 à forcer les portes de l’ambassade américaine et à occuper les lieux, ne se sont pas contentés de cet acte hautement symbolique. Dès le début, et malgré l’exil en France de son leader Khomeyni, cette révolution-là ne cherche pas sa Bastille mais la mise en scène sordide du renversement des rapports de forces. L’attaque de l’ambassade était la première scène du premier acte. La pièce fut une prise d’otages de 444 jours.

Depuis cette affaire, l’histoire des relations entre le régime iranien et ce qu’on peut appeler « l’Occident » n’est qu’une succession de prises d’otages. Quand les Iraniens veulent quelque chose, ils négocient avec une arme braquée sur la tempe de quelqu’un. L’humiliation de l’ennemi est au cœur du rituel politique iranien.

Un lacanien aurait déjà noté une non-coïncidence étonnante : les victimes du Shah ont besoin de souris pour jouer le rôle du grand méchant chat. En tout cas, il y a dans cette mise en scène du pouvoir quelque chose de névrotique. Le problème du régime n’a pas grand-chose à voir avec les rapports de force dans le monde réel mais avec un sentiment d’infériorité et d’humiliation qu’aucune victoire ne semble susceptible de guérir et qui se traduit par l’obsession de la domination. Trente ans après leur victoire, pour se sentir forts, Ahmadinejad et les révolutionnaires de 1979 ont toujours besoin de Clotilde Reiss.

Qui a dit…

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…à propos du sommet organisé par la FAO (organisme de l’ONU luttant contre la faim) à Rome : « Il est nécessaire de contester l’égoïsme qui permet à la spéculation de pénétrer même sur le marché des céréales, mettant la nourriture sur le même plan que toutes les autres marchandises. La convocation elle-même de ce sommet, témoigne, dans un certain sens, de la faiblesse des mécanismes actuels de la sécurité alimentaire et de la nécessité de les repenser. Le risque existe concrètement que la faim soit considérée comme structurelle, comme partie intégrante de la réalité socio-politique des pays plus faibles, et fasse donc objet d’un découragement résigné, voire même de l’indifférence. Il faut donc que mûrisse une conscience solidaire qui considère l’alimentation et l’accès à l’eau comme droits universels de tous les êtres humains, sans distinction ni discrimination. » ?

  1. Cécile Duflot entre deux nominations de têtes de listes pour Europe Ecologie ;
  2. Benoît XVI entre deux prières pour éviter la fin du monde ;
  3. Olivier Besancenot entre deux tentatives pour saboter le Front de Gauche ;
  4. Hugo Chavez entre deux provocations de l’armée colombienne.

Un indice pour les Causeurs : il s’agit d’un célèbre anticapitaliste séjournant actuellement en Italie.

Femme libre, toujours tu chériras le Mur

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Marie NDiaye

Quand De Gaulle, à propos de Sartre, affirmait « on ne met pas Voltaire en prison », il jouait de puissance à puissance, et quand il connaissait l’humiliation de voir certains élèves de Normale Sup refuser de lui serrer la main, il ne s’abaissait pas à leur dire, par exemple, « Cassez-vous, pauvres cons, c’est le contribuable qui paie vos études », et à relever les noms dans la foulée.

Pompidou, son Premier ministre, était normalien et agrégé de lettres lui-même, auteur d’une anthologie de la poésie française qu’il faudrait rendre obligatoire dans les futurs examens d’acquisition de l’Identité Nationale : elle est en effet constituée comme un portefeuille de banquier, le second métier de Pompidou, et l’on n’y trouve que des valeurs sûres qui ne sont pas atteintes pas les crises systémiques et récurrentes de la poésie contemporaine.

Cela n’a pourtant pas empêché ces deux lettrés de flirter plus d’une fois avec Anastasie. On se souvient de la censure de La religieuse de Rivette et des ennuis récurrents (procès, menaces de prison) que connurent les éditeurs Régine Desforges, quand elle exhumait Le con d’Irène d’Aragon ou Jean-Jacques Pauvert entamant l’édition des Œuvres complètes de Sade.
Mais enfin, de Gaulle et Pompidou, hommes du monde d’avant, avaient encore en eux l’image de cette spécialité française, « le grantécrivain »[1. concept emprunté à Dominique Noguez], artiste mais aussi conscience morale, figure de l’intellectuel et savaient que ce genre d’opposition au pouvoir grandit aussi le pouvoir : que l’on songe aux relations entre Napoléon et Chateaubriand, à celles entre Louis XIV et Molière pour comprendre cette dialectique aristocratique où les deux gagnaient dans la contradiction.

On s’en doutait au moins depuis Maastricht, mais si le gaullisme survit partout où survit une certaine idée de la France, il n’ plus cours dans l’actuelle UMP qui ressemble à peu près autant au RPF que Jean-Marie Bockel à un socialiste ou Daniel Cohn-Bendit à un homme de gauche. On pouvait cependant imaginer que les tenants (de tous bords) de la vulgate néo-libérale s’accommoderaient avec indifférence des critiques des écrivains, artistes ou musiciens qui affirmeraient que le monde ne va pas si bien.

La récente affaire Marie NDiaye, que l’on devrait plutôt appeler, affaire Raoult, nous prouve qu’il n’en est rien. Il fallait remonter loin pour trouver un tel concentré de bêtise flaubertienne de la part d’un élu à qui les choses de l’esprit sont décidément étrangères.

Qui sait, Eric Raoult a peut-être cru que Marie NDiaye serait une cible aussi populaire dans son électorat que les groupes de rap, régulièrement stigmatisés et parfois poursuivis. Il est vrai que la plupart des rappeurs chantent là où on leur dit de chanter des horreurs, font sans s’en rendre compte l’apologie des valeurs de leurs ennemis pour hurler à la mort quand on envisage de les censurer. De parfaits idiots utiles.
Seulement, quoique franco-sénégalaise, Marie NDiaye n’est pas rappeuse  et quelqu’un aurait dû signaler à monsieur Raoult que pour l’instant aucun rappeur n’a encore été publié sous la couverture blanche de la rue Sébastien-Bottin. En plus, comme monsieur Raoult n’a pas pu écouter le texte de Marie NDiaye qui est dans un livre, il a ressorti un entretien donné fin août aux Inrocks, donc avant qu’elle ne reçoive le prix Goncourt, entretien dans lequel l’écrivain déclarait en substance qu’elle trouvait la France de Sarkozy, Hortefeux et Besson « monstrueuse ». Et alors ? On ne peut plus dire ce que l’on veut ? Et puis elle n’est pas la seule, ça m’arrive à moi aussi, et puis à d’autres. Avec des envies de Venezuela, tiens…

Le problème, c’est qu’on ne peut pas lui dire : « La France, tu l’aimes ou tu la quittes ». De l’élection de Sarkozy, elle a tiré les conclusions pratiques, calmement, sans lancer d’appels particuliers. Elle et son mari Jean-Yves Cendrey, lui aussi écrivain, ont choisi Berlin dans les jours qui ont suivi l’arrivée de la bande du Fouquet’s aux commandes du vieux pays.

Ce sont de mauvais Français ? Même pas, ce sont des Français fatigués, sans doute, mais qui ne sont jamais restés isolés dans leur tour d’ivoire, bien qu’écrivains. On lira par exemple de Cendrey, le bouleversant Les jouets vivants : il raconte comment son couple et ses enfants vivant tranquillement à Cormeilles en Normandie se sont retrouvés confrontés aux agissements d’un instit pédophile protégé par l’omerta villageoise et comment c’est Cendrey lui-même qui se chargea d’amener l’instit à la police.

Le devoir de réserve imaginé par Raoult prouve surtout sa confusion mentale. Sans doute aurait-il attaqué le préfet d’Alphonse Daudet qui s’en allait rimer aux champs.

Reste une question. Au-delà de l’initiative personnelle d’un député désœuvré soucieux d’apporter sa contribution culturelle à l’identité nationale, la sortie de Raoult reflète-t-elle la haine ou la peur de la Sarkozie pour le du travail du négatif qui est la marque de fabrique de tout écrivain digne de ce nom ?

En attendant la réponse, qui se posait déjà dans les années trente pour Bernanos au Brésil, ne prenez pas de risques, Marie.

Femme libre, toujours tu chériras le Mur.

Il faut donner du crédit à la France !

60

Euro

Elisabeth, vénérée tôlière de cette confrérie de causeurs mal léchés, avait parfaitement résumé le cours des choses, le 22 juin 2009 à 19 h 51, en nous livrant cette confession gouailleuse : Ce Sarkozy-là j’ai envie d’y croire.

Aux vierges effarouchées qui s’inquiétaient déjà – sur les bancs socialistes notamment – du poids que constituerait le grand emprunt sur nos finances publiques, Elisabeth prodiguait un conseil abrupt mais éclairé : « S’ils ne comprennent pas que recourir à l’emprunt pour boucler ses fins de mois ou pour construire des infrastructures ne sont pas la même chose, qu’ils retournent à l’école. »

Je voudrais préciser cependant à la chère Elisabeth ainsi qu’à vous-même, qu’il faut être vigilant quant au choix de l’enseignant et éviter par exemple de confier son cerveau au regrettable Yves de Kerdrel, qui a cru devoir commettre une laborieuse et fielleuse chronique entièrement à charge contre Henri Guaino et à la dévotion du sage et orthodoxe François Fillon.

La ficelle est grossièrement manichéenne et ce Kerdrel – fayot de la bonne pensée – est trop inconsistant intellectuellement pour être une cible. Cela étant dit, si un organisateur d’évènementiel avait la bonne idée d’organiser, sous les auspices de Laguiole, une fête intitulée « la nuit des seconds couteaux », ce clone triste de Jacques Marseille pour nouvelles écoles de commerce discount récolterait assurément la palme d’or.

Oublions Kerdrel, mais méfiez-vous de cette clique de bras cassés hypnotisés par les préceptes douteux de la pseudo-science économique ; à travers la personne d’Henri Guaino, c’est vous que vise cette ligue des orthodoxes factieux conspirant au nom de la vertu budgétaire.

Enivrés par les senteurs opiacées de la nouvelle bluette intitulée Puisque la crise est finie, Oui-oui fait des économies, ils se font, en effet, les chantres d’une sortie de crise improbable qui leur permet d’entonner l’hymne vintage du retour aux fondamentaux, comprenons : les canons d’une conception de la vie économique, politique et sociale qui nous a fait frôler l’apocalypse.

Les grands toxicomanes de l’idéologie se ressemblent tous, quel que soit le vice auquel ils sacrifient et, même si c’est un produit de substitution qui nous est proposé, il faut refuser cette abolition du discernement prônée avec force coups de mentons par ces héros harassés de « la seule politique possible ». Oui, ces ânes bâtés veulent vous entraîner dans le déni du réel, occultant une crise qui plonge ses racines dans la libre circulation des capitaux, un libre-échangisme effréné, l’avènement d’un capitalisme actionnarial carnassier et de cette financiarisation qui n’en a pas fini- de cracher ses glaviots toxiques à la face du monde.

Que les socialistes qui ont contribué à dicter au capitalisme cet itinéraire erratique en appellent stupidement à une relance par la consommation à l’échelle européenne tout en torpillant le super-emprunt au nom de la discipline budgétaire européenne, rien que de plus naturel. Mais que la majorité se laisse entraîner dans cette spirale faussement vertueuse est beaucoup plus dangereux pour l’avenir du pays.

C’est donc une bonne raison d’en appeler au tôlier.

Le discours que vous avez prononcé en effet devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles le 22 juin 2009 mériterait d’être relu attentivement, notamment par cette meute pathétique unie par les liens du déni qui prétend dissoudre dans un océan d’orthodoxie budgétaire retrouvée la stratégie du Grand emprunt telle que vous l’avez énoncée.

Le Sarkozy de la crise avait du cran et du corps. Et la crise n’étant pas terminée, je vous conjure de ne pas couper le Sarko 2010 avec l’eau bénite de cet ordre trop influent, notamment auprès de vous.

Monsieur le Président, ne vous laissez pas enfumer par ce chœur asséché qui, de Benoit Hamon, Michel Sapin, Didier Migaud en passant par Alain Juppé, Michel Rocard et Eric Woerth, voire François Fillon, distille une mélodie tiédasse destinée à raviver la psychose de la faillite, de l’endettement, du fardeau pour les générations futures.

Tout ce que ce gang des premiers de la classe peut vous apporter c’est un passeport pour les emmerdements, ils sont capables de vous faire perdre l’élection présidentielle face à une chèvre ou un rottweiler.

À titre personnel, je me suis senti bien plus en phase avec votre magistère de crise, énergique, décisionniste, iconoclaste, qu’avec la première séquence de votre mandat, qui pouvait faire redouter une forme d’allégeance aux canons du capitalisme anglo-saxon matinée d’une certaine dévotion pour les tables de la loi de l’orthodoxie budgétaire européenne. Je dois vous le confesser, j’ai voté non au référendum sur le TCE, j’ajoute qu’en ma qualité de Français moisi, j’ai beaucoup d’amis qui en ont fait de même, souvent les mêmes d’ailleurs qui ont voté pour vous en grand nombre. Comme quoi le Français moisi n’est ni mauvais bougre, ni rancunier.

Face à la crise, je vous ai découvert tellement moins engoncé dans l’idéalisme européen et le fétichisme des traités que les hiérarques socialistes. J’ai été agréablement surpris lorsque vous avez réaffirmé l’idée d’une intervention légitime de l’Etat et la pérennité d’un modèle social qui lui est consubstantiellement lié, marquant ainsi sans tapage une distance avec l’aile disons la plus libérale de votre majorité.

Alors, je vous en supplie, ne vous laissez pas abuser par les visiteurs du soir, refusez leur potion qui entraîne ce sommeil de la raison qu’est le dogmatisme. Ne vous soumettez-pas à leur verbiage obscur, à leurs postulats déguisés en vérités axiomatiques.

La France n’est pas ruinée.

Elle est moins endettée que ses partenaires, avec une dette qui représente 81,5 % du PIB (prévision 2010) alors que la moyenne pondérée de la zone euro est 83,6 %.

Surtout, contrairement à ce que disent les marchands de sornettes, la seule réalité qui compte est l’endettement global des agents économiques et non la simple dette publique ! Or, si l’on ajoute la dette des ménages et celle des entreprises, la France était en 2006 la moins endettée de tous les grands pays d’Europe, ceci s’expliquant par la relative faiblesse de l’endettement des ménages, les deux champions étant en Europe, l’Espagne et la Grande-Bretagne, et le champion toutes catégories les Etats Unis d’Amérique, avec une dette globale qui se monte à 240 % du PIB. Mais laissons parler Patrick Artus qu’on ne peut soupçonner d »extrémisme échevelé ou de souverainisme scrogneugneu : « Si les déficits public et l’endettement public financent des investissements à long terme utiles (recherche, infrastructures, éducation, PME innovantes, croissance verte…), la qualité de l’endettement public est supérieure à l’endettement privé. »

Ne cédez rien, monsieur le Président. S’attaquer à la dérive budgétaire alors que nous ne sommes pas sortis de la crise est irresponsable, c’est la déflation qu’il faut craindre pas le déficit public.

Oui, Monsieur le Président, il faut injecter de l’argent dans l’économie alors que les effets de la crise de liquidité ne sont pas surmontés et que les prévisions économiques de la zone euro sont plutôt celle d’une atonie chronique que d’une reprise galopante.

Le nombre des faillites de PME est en augmentation, les plans sociaux  vont se multiplier, il faut donc soutenir sans mégoter, tant sur le principe que sur le montant, votre Grand emprunt. La tribune de 63 députés en ce sens est la seule forme de soutien intellectuellement loyale et politiquement utile à votre égard.

Seul l’Etat peut investir en pareil moment et tant pis s’il faut pour cela froisser quelques susceptibilités : quand les dogmatismes ont failli, l’heure est à une hérésie raisonnable et décomplexée.

Oui, il faut comme vous aimez à le dire mettre le paquet, organiser le débat sur les priorités stratégiques et donner à ce programme d’investissement public une visibilité démocratique qui annonce et justifie un second mandat.

La France est capable d’entendre ce discours, à condition que la tribu des malfaisants cesse d’organiser sa danse du scalp autour de Henri Guaino. La politique de la France ne se fait pas sur un dance floor, surtout quand c’est Michel Rocard qui conduit le bal.

La vraie menace pour notre pays ne réside pas dans la dette diabolisée mais dans la désindustrialisation induite par la concurrence mondiale et la financiarisation de l’économie.

J’ajoute qu’il est quand même exaspérant de constater qu’en matière de remboursement la BCE garantisse un taux de 1 % à ces chiens galeux de banquiers quand il est fixé à 3,51 % pour les Etats.

Du sang et des larmes pour les uns, des couilles en or pour les apprentis sorciers, voilà ce qui se dit sur n’importe quel zinc de l’Hexagone et l’apéro c’est quand même le moment où se forme l’opinion d’un peuple doté d’un solide bon sens non dénué d’espièglerie.

Vous allez rendre votre arbitrage. Avec des taux historiquement bas, il est parfaitement concevable d’obtenir un rendement des investissements supérieurs au coût de l’emprunt. En revanche, il convient de bien discerner les dépenses productives, d’investir dans les écosystèmes de croissance que sont les grandes métropoles, de songer à protéger l’économie nationale pour doter le fonds de réserve des retraites, de rechercher des participations visant à renforcer l’appareil productif présent sur le territoire et d’éviter les délocalisations. Bref, il s’agit de renouer avec une certaine idée du capitalisme d’Etat.

Vous pouvez rassembler la nation autour d’un tel programme. Cela marquerait un tournant dans le quinquennat. Tournez le dos aux pères la rigueur. Ne vous laissez pas voler votre énergie transformatrice par les inspecteurs des finances, la commission de Bruxelles et autres clubs d’anciens premiers ministres, compagnons de grisaille technocratique.

Donnez du crédit à la France.

Carla, fais les valises

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Sans doute pour couper court aux rumeurs de la carlaïsation du régime et de l’influence exagérée qu’elle aurait prise sur son mari en lui faisant préférer Benjamin Biolay à Didier Barbelivien, par exemple, la première dame de France a donné un entretien à Elle, ce vendredi. Il en ressort, de son propre aveu, qu’elle n’entrave que pouic à la politique, que c’est le président qui a l’initiative des conversations sur les sujets importants et qu’il ne lui demande même pas son avis sur les points de détails. C’est à peine si elle ne reste pas debout quand les hommes, les vrais, parlent affaires étrangères, délinquance et chômage en flèche. Elle déclare elle-même tout de go : « Je donne mon avis à mon mari s’il me le demande, mais il ne me consulte jamais sur des points politiques précis, car je n’y connais rien. » Et c’est ainsi que l’on perdit l’égérie française…

Pan-pan sur la fessée

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Pédiatre et députée UMP, Edwige Antier s’apprête à frapper un grand coup ! Ce matin, dans Le Parisien, elle annonce qu’elle va déposer une proposition de loi visant à interdire la fessée, dont elle rappelle qu’elle est traumatisante au point que 18 Etats européens l’ont déjà proscrite. Mais, confie la députée, il ne s’agit pas « d’envoyer les parents en prison » : « L’article serait lu aux parents lors du mariage. » Il n’est pas dit que la lecture de ce petit article de loi ne donne pas des idées à certains jeunes mariés et que des nuits de noces ne s’annoncent pas bien agitées.

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Géopolitique de la baston

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Chuck Norris dans Delta Force, 1986.
Chuck Norris dans <em>Delta Force,</em> 1986.
Chuck Norris dans Delta Force, 1986.

Ces jours-ci, j’ai eu envie de revoir Delta force. Un de ces films que je regardais avec mon fils quand il était petit pour qu’il ne devienne pas plus tard une couille molle d’étudiant trotskiste pro-palestinien. Produit par Menahem Golan et Yoram Globus, deux Américains qui nous avaient donné Un justicier dans la ville avec Charles Bronson – celui-là, je l’ai sans doute vu avec mon père –, et qui avaient décidé cette fois-ci d’envoyer Chuck Norris au Liban.

Sa mission était simple, avec son groupe commando, les « Delta force », il avait carte blanche pour délivrer des otages détenus par une milice de salopards armée par deux pays voisins et qui devaient être exécutés si on ne libérait pas d’autres salopards du même genre. Chuck Norris était partant, il faut dire qu’il avait les mains libres et qu’on était venu le chercher pour ce qu’il savait faire et rien d’autre : la guerre. Et ensuite, la paix. Pendant la mission, pas de colis de la Croix-Rouge à distribuer, pas de contact à établir avec la population, pas besoin de négocier ceci ou cela avec des chefs de tribus. Après, pas d’inspecteurs onusiens des travaux finis qui viendraient l’emmerder avec des histoires de sommation ou de dommages collatéraux, pas de tribunal international qui allait lui pourrir la retraite sur des points de droit ou de crimes contre l’humanité.

J’ai à peu près tout oublié du film sauf la fin. Avec l’élite des combattants de l’armée américaine, l’ex-champion du monde de karaté, (car au départ, Chuck Norris n’est pas comédien, à l’arrivée non plus d’ailleurs et pour jouer Tootsie, il vaut mieux prendre Dustin Hoffman mais sur ce coup-là, il ne s’agit pas de se mettre du rimmel mais de se mettre sur la gueule) fonce avec les otages vers la côte, poursuivi par les Arabes en Mercedes. Dans les films, si les terroristes avaient du goût, ça se saurait.

Dans la dernière scène du film, le chef des Libanais pro-syrien, pro-iranien et pro-tout ce qui peut leur fournir des armes dans leur lutte contre la souveraineté du Liban, se retrouve en face de notre héros. L’Arabe fourbe et sadique, celui-ci est comme ça, qui du fond de son bunker a envoyé tant de jeunes hommes à une mort certaine, est à découvert. Chuck Norris, sur sa moto armée d’un lance-roquette (les producteurs ont peut être décroché un contrat avec Suzuki) arme son tir. Rien ne peut empêcher la justice américano-sioniste de se frayer un chemin à la vitesse de la lumière jusqu’à la gueule du chiite. Et il le sait. On peut lire dans son regard de la terreur. Il a compris qu’aucun président Français pro-arabe ne viendra le tirer d’affaire, qu’aucune campagne mondiale d’opinion pro-palestinienne ne pourra arrêter le glaive punitif. Lui qui se voyait finir sous les applaudissements comme son frère d’arme après avoir tué une petite fille à coups de crosse, va connaître le triste sort du cheikh à roulettes et de tous ceux qui ont tenté de s’asseoir après lui dans son fauteuil. Rien ne vient le consoler dans la minute qui lui reste à vivre, ni les 100 vierges qui l’attendent, ni les obsèques héroïques et hystériques que lui réservent ses coreligionnaires armés, ni les protestations de Michel Warschawski, ni l’indignation de Stéphane Hessel ni les rapports accusateurs des ONG scandinaves. Il repense à Soral, Meyssan et Dieudonné, ces Français libres et visionnaires qui lui avaient prédit, alors qu’ils le rencontraient à Damas, qu’il se ferait flinguer par un Américain financé par des juifs, mais il avait lâché un débonnaire « Inch’Allah » en comptant plutôt sur les protections diplomatiques.

Là, il n’a plus le temps d’appeler l’ambassade et quand la caméra resserre l’image sur sa gueule de métèque de chiite antisioniste, on lit au fond de ses yeux noirs de la trouille. Face à Chuck Norris, le combattant prêt à tuer pour la cause chie dans son froc.

À ce moment-là du film, j’ai beau être profondément antiraciste et farouchement persuadé que la violence n’est pas la solution, j’ai beau être convaincu qu’il faut tendre la main, pardonner les péchés, construire la paix dans le dialogue, quand la roquette made in USA vient fendre en mille la gueule du terroriste, je ne peux réprimer un chah[1. Bien fait, en arabe.] jubilatoire. Est-ce que ça fait ça à tout le monde ?

Marie NDiaye, femme puissante

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Marie NDiaye

J’étais à l’étranger, en train de confronter mon identité nationale à celle des citoyens de la République tchèque lorsqu’a éclaté, dans notre beau pays de France une de ces polémiques politico-littéraires dont il raffole. Le 18 août dernier, dans un entretien accordé aux Inrockuptibles, organe central de la branchitude bien-pensante, la romancière Marie NDiaye, toute nouvellement auréolée du prix Goncourt, avait affirmé que la France de Nicolas Sarkozy était « monstrueuse ».
Pour bien montrer qu’il ne s’agissait pas là seulement de paroles verbales, elle précisait : « Nous sommes partis [à Berlin] juste après l’élection [présidentielle] en grande partie à cause de Sarkozy (…). Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité ».
Etant issu d’une famille qui fit, au siècle dernier le chemin inverse pour des raisons qu’il n’est pas besoin de rappeler en détail, sinon qu’en matière de flicage et de vulgarité le Berlin, de 1933 n’était pas mal non plus, je me suis senti interpellé, et même interpellé quelque part.

Sur le moment, ces déclarations étaient passées inaperçues, mais l’attribution du prix Goncourt à l’auteur de Trois femmes puissantes leur a donné l’écho qu’elles méritaient.

Serais-je à ce point aveuglé par les avantages sybaritiques liés aux conditions de vie dans la République française pour ne pas voir que ce pays est devenu monstrueux depuis l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Elysée ?
Dans ce cas, Marie NDiaye serait tout-à-fait dans le rôle nécessaire et admirable de l’écrivain qui révèle par son art et son comportement social une réalité non encore parvenue à la conscience du grand public. L’exil comme protestation suprême contre la toute-puissance des tyrans, celui de Victor Hugo, Thomas Mann, Alexandre Soljenitsyne serait alors celui choisi par Marie NDiaye pour mener son combat culturel et politique.

De retour en France, je m’attendais à plonger dans une mêlée polémique relative au contenu des propos de Mme NDiaye : La France de Nicolas Sarkozy est-elle vraiment monstrueuse ? Si oui, quels traits tératologiques peut-on discerner dans l’image qu’elle offre au monde ? L’exil volontaire de Marie NDiaye doit-il être considéré comme un acte héroïque de résistance à un régime politique ignoble ?
Il n’en est rien. Le débat s’est déplacé des déclarations de la romancière (avant l’obtention du Goncourt) aux propos du député UMP Eric Raoult, invitant Marie NDiaye à ne pas transgresser un « devoir de réserve » qui s’imposerait, selon lui, au récipiendaire de la plus prestigieuse récompense littéraire française. Il n’en fallait pas plus pour que le parti des écrivains et écrivaines vole au secours d’un de ses membres les plus éminents. La stupidité proférée par un parlementaire en mal de publicité exonérait Marie NDiaye de s’expliquer plus avant sur les propos pour le moins légers, et je suis poli, tenus par elle dans les Inrocks. Merci Eric.

Ce que l’on attend d’un prix Goncourt, ce n’est pas qu’il pèse ses mots comme un sous-préfet censé incarner la République sur le territoire où il est affecté. On attend de lui qu’il fasse un meilleur usage des mots ne notre langue que ceux à qui la nature n’a pas donné le talent de romancier ou de poète.
Admettons que Marie NDiaye soit dans le vrai en qualifiant de monstrueuse la France de Nicolas Sarkozy. Je lui demande alors bien humblement, en tant que prolétaire de la belle langue, de me fournir les adjectifs me permettant de qualifier l’Iran d’Ahmadinejad, le Cambodge de Pol Pot, la Libye de Kadhafi ou le régime militaire birman.

Le Goncourt assure, paraît-il, de confortables revenus à celui ou celle qui le reçoit. Mais il n’ouvre pas un crédit illimité à dire n’importe quoi.

Lauréats du Goncourt, taisez-vous !

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Eric Raoult

Si les prix littéraires supposent un devoir de réserve, Mauriac a eu tort de dénoncer l’usage de la torture en Algérie, Gide n’aurait pas dû critiquer le colonialisme dans Voyage au Congo et Victor Hugo aurait dû s’abstenir de rabaisser Napoléon le petit.

« On ne met pas Voltaire en prison » avait dit dans sa grande sagesse De Gaulle à son ministre de l’Intérieur qui lui suggérait de faire arrêter Jean Paul Sartre.

La sotte injonction adressée par Eric Raoult à Marie NDiaye, lauréate du Goncourt, pose une question : où est notre passion française pour les libertés ?

Cependant, ramenons cette histoire de coquecigrues à sa véritable dimension. Le 30 août, dans un entretien aux Inrockuptibles, à la question « Vous sentez vous bien dans la France de Sarkozy ? », Marie NDiaye, qui vit à Berlin, fait la réponse suivante : « Je trouve cette France monstrueuse… Nous sommes partis après les élections en grande partie à cause de Sarko…Je trouve détestable cette atmosphère de flicage… Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux »

Raoult, député UMP de Seine Saint Denis, qui semble confondre le Goncourt avec un poste de préfet somme l’auteur de Trois femmes puissantes de respecter « un devoir de réserve ». « Le message délivré par la lauréate se doit de respecter la cohérence nationale et l’image de notre pays », affirme-t-il.
Dans le tout-Paris des médias et des lettres littéraire, c’est le branle-bas de combat. Ce devoir de réserve, s’indigne Bernard Pivot, « n’a jamais existé, n’existe pas et n’existera jamais ».
Les politiques joignent leur voix à ce tohu-bohu abracadabrantesteque. Ségo et Aubry se fendent d’un message de « soutien » et de « sympathie » à la « victime ». Sollicité à son tour, Frédéric Mitterrand estime prudemment qu’il n’a pas compétence pour « arbitrer cette polémique ».

Bien entendu, un auteur n’étant ni fonctionnaire, ni élu, ni représentant de l’Etat à quelque titre que ce soit, il n’y a aucun devoir de réserve qui tienne. Tempête dans un verre d’eau, bêtise au front de taureau, aurait dit Baudelaire.

Ceci étant clairement dit, on a cependant le droit de trouver que Marie NDiaye est parfaitement à côté de la plaque. La France serait « monstrueuse », la droite, c’est la « mort et la vulgarité ? ». Vivons-nous, sans le savoir dans la Russie de Staline ou le Chili de Pinochet ? Expliquez-nous donc, chère Marie en quoi l’Allemagne libérale de Mme Angela Merkel est-elle plus attirante que la France de Sarkozy.

Je préfère penser que c’est l’envie du dépaysement, le désir de se sentir étranger dans un ailleurs qui vous a poussé à vivre à Berlin. (Porca misere ! J’aurais choisi Rome ou Florence, mais bon). Et que vous continuerez à y écrire de beaux livres. Dans la langue de Talleyrand (qui disait fort justement que « tout ce qui est excessif est inutile ») et de Sarkozy.

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Fierté picarde

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Picardie
Philippe Lacoche livre une Picardie intime.
Picardie
Philippe Lacoche livre une Picardie intime.

Philippe Lacoche, républicain old school, est déjà l’auteur de plusieurs romans et recueils de nouvelles, élégants et nostalgiques, qui font de lui un héritier aussi direct que modeste d’auteurs comme Henri Calet ou Roger Vailland. Cité Roosevelt, Le Pêcheur de nuages ou encore De Petits bals sans importance ont montré son art délicat, presque minimaliste, pour rendre compte des enfances dans la Baie de Somme pendant les années soixante, de la vie quotidienne dans les premiers HLM de Picardie et la création picaresque de groupes de rock improbables qui « font la route » entre Abbeville et Chaugny-Tergnier ou Verberie et Attigny.

Egalement journaliste au Courrier picard et ancien critique à Best, quand il suivait les groupes français en concert, Lacoche n’avait à priori rien dans son ADN politique pour écrire ce Pour la Picardie, qu’il sous-titre d’un bel oxymore : Pamphlet sentimental. Lacoche est en effet un archéo-jacobin qui a fait partie de la belle aventure du Chevènement de 2002 en participant au recueil Contes de campagnes (Mille et une nuits) qui rassemblait l’essentiel de ses soutiens dans le monde littéraire.

[access capability= »lire_inedits »]Alors, Lacoche, dans une défense girondine des régions en général et de la sienne en particulier ? Que s’est-il passé ? Il s’est passé, comme nous le dit lui-même l’auteur, la commission Balladur que l’on a chargée de redessiner technocratiquement le territoire français et qui a proposé, outre la suppression de l’échelon départemental, le démantèlement de certaines régions. Tout cela, évidemment, dans un souci de rationalisation européenne, histoire de présenter devant les nouveaux maîtres de Bruxelles non plus une encombrante nation avec des régions trop petites et des départements minuscules mais des unités administratives de consommation viables de 8 à 10 millions d’habitants. Parmi les régions promises au néant géographique, la Picardie, donc. L’Oise avec l’Ile-de-France, la Somme avec le Nord-Pas-de-Calais et l’Aisne avec Champagne-Ardenne.

Alors, parce que ce projet rappelle les délires d’un Colot d’Herbois voulant découper la France en carrés au moment de la Révolution française, Lacoche réagit. La Picardie, c’est évidemment une identité, une plaine au bord de la mer avec ces bibles de pierre que sont les cathédrales, sur le parvis desquelles se jouèrent les Mystères, ces premières pièces de théâtres de notre littérature, dans une langue qui allait permettre au français de trouver son assise définitive. La Picardie, c’est aussi cette province du carnage, parsemée de cimetières militaires, où pendant la première guerre mondiale, une bonne partie de toutes les nationalités existantes est venue s’étriper, se gazer, se canonner à bout portant pendant quatre ans.

Mais Lacoche sait entremêler à sa Picardie historique sa Picardie intime. Il célèbre le chevalier de la Barre, jeune aristocrate brûlé vif à Abbeville pour avoir refusé de saluer une procession, tout en se souvenant du bar près de son lycée à Saint-Quentin, quand il montait un groupe de rock. Et il se rappelle que c’est à l’ombre fortifiée des églises de Thiérache qu’il a donné ses premiers baisers pluvieux.

Alors vous comprendrez pourquoi Lacoche ne veut laisser à personne le droit de rayer d’un trait de plume la Picardie. Et qui sait, grâce à lui, vous visiterez peut-être enfin cette région qui vaut bien la Provence, avec son livre à la main, en guise de guide ?

POUR LA PICARDIE

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