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On en a marre des Suédois!

Le djihadiste Osama Krayem est inculpé pour le meurtre d’un pilote jordanien, brûlé vif


On en a marre des Suédois!
Le pilote jordanien Muath al-Kasasbeh, exécuté par l'Etat islamique. DR.

Le procès d’Osama Krayem s’ouvrira le 4 juin à Stockholm. Originaire de Malmö, dans le sud de la Suède, il avait rejoint les rangs de l’État islamique, en Syrie, en 2014, avant de revenir en Europe. Déjà condamné pour son implication dans les attentats de Paris en 2015 et de Bruxelles en 2016, il a été remis à la Suède par la France le 12 mars. Hier, la Suède l’a officiellement inculpé pour son rôle dans l’exécution macabre du pilote jordanien Muath al-Kasasbeh, brûlé vif dans une cage. Une fois le procès terminé, il retournera en France pour y purger sa peine.


En 2005, la Suède met en avant, avec la candeur qui caractérise les sociétés confiantes en leur propre vertu, un documentaire intitulé Utan gränser – en film om idrott och integration (« Sans frontières – un film sur le sport et l’intégration »). Le film entend montrer comment, à travers le sport, des enfants issus de l’immigration peuvent s’insérer harmonieusement dans la société suédoise. Il célèbre la paix sociale par l’inclusion, l’idéal suédois d’un multiculturalisme paisible, désidéologisé, presque technique. À l’écran : deux jeunes garçons de Rosengård (« jardins de Roses »), quartier populaire « multiculturel » de Malmö, jouent au football, rient, s’expriment en suédois impeccable. Parmi eux, Osama Krayem, onze ans à l’époque, né en 1992 en Suède dans une famille de réfugiés palestiniens venus de Syrie. Pour les réalisateurs comme pour les autorités, il est un symbole prometteur : intégré, enraciné, à l’image d’une Suède généreuse et inclusive, unie autour du ballon rond.

Propagandiste

Neuf ans plus tard, Osama Krayem quitte la Suède, en 2014, alors âgé de 22 ans, pour rejoindre les rangs de l’organisation État islamique (EI) en Syrie. Il est l’un des premiers djihadistes suédois à faire ce choix, influencé notamment par les prêches d’Anwar al-Awlaki, figure centrale de la propagande islamiste. En janvier 2015, une photo postée sur Facebook le montre armé d’un AK-47, en treillis, devant un drapeau noir de l’EI à Deir ez-Zor. En Syrie, Krayem aurait participé à la production de contenus de propagande et au recrutement de nouveaux combattants étrangers. Il est surtout soupçonné d’avoir pris part directement à l’une des exécutions les plus macabres de l’EI : celle du pilote jordanien Muath al-Kasasbeh, brûlé vif dans une cage, filmé dans un dispositif monstrueux, diffusé comme une opération de communication.

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Arrêté à Bruxelles en avril 2016, Krayem est inculpé pour son rôle présumé dans les attentats de Paris (novembre 2015) et de Bruxelles (mars 2016), où il aurait été impliqué dans la logistique des attaques. En 2022, il est condamné à trente ans de réclusion criminelle en France. Aujourd’hui (mardi), un Parquet suédois a déposé un acte d’accusation contre Krayem. Le même homme que la Suède présentait naguère comme modèle d’intégration s’est retrouvé au cœur de la matrice de la terreur islamiste mondiale.

Cocktail explosif

Ce retournement spectaculaire ne peut être compris sans un regard plus large sur les dynamiques migratoires et sociales à l’œuvre en Suède. Le pays a accueilli, depuis les années 1990, un grand nombre de réfugiés palestiniens, notamment en provenance du Liban, d’Irak et, plus récemment, de Syrie. Ces communautés, bien que souvent installées dans des quartiers périphériques comme Rosengård, ont longtemps bénéficié de politiques sociales généreuses, d’un accès à l’éducation et d’un environnement politiquement favorable. Cependant, en trente ans, Malmö, troisième ville de Suède, a vu l’idéal progressiste suédois se transformer sous l’effet d’une immigration massive et mal encadrée, en particulier en provenance du Moyen-Orient. Jadis symbole de tolérance et de diversité, la ville est aujourd’hui marquée par une criminalité liée aux gangs, qui y prospèrent sur fond de trafics et de règlements de compte violents, dans un contexte de séparatisme et d’autoghettoïsation. Les autorités locales peinent à contenir une situation où les tensions communautaires, les discours islamistes et l’hostilité croissante envers l’État suédois forment un cocktail explosif. Malmö incarne désormais l’enfer d’un modèle d’intégration qui, à force de nier les différences culturelles, a laissé se développer une société dans la société.

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C’est dans cette faille que s’engouffrent les récits de rupture, ceux de la radicalisation. Le cas de Krayem n’est pas isolé : près de 300 personnes ont quitté la Suède pour rejoindre des groupes djihadistes en Syrie ou en Irak, selon les services de renseignement. Certains analystes estiment même que le nombre réel est plus élevé encore. Ces départs posent la question de ce qui pousse des jeunes, souvent nés en Suède, éduqués dans ses écoles et entraînés sur ses terrains de football, à tourner le dos à la société qui a accueilli leurs parents et les a formés, en espérant développer chez eux un sentiment d’appartenance à cette nouvelle patrie.

Le parcours d’Osama Krayem est d’autant plus troublant qu’il semble avoir coché toutes les cases d’une bonne intégration : maîtrise de la langue, scolarisation, sport, visibilité médiatique, reconnaissance… mais pour certains, rien ne semble jamais suffisant.



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