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Paris enthousiaste, Paris mouillé, Paris réconcilié, plébiscite le Tour

Le Tour de France 2025 s’achève en beauté à Montmartre


Paris enthousiaste, Paris mouillé, Paris réconcilié, plébiscite le Tour
Le Slovène Tadej Pogacar et le Belge Wout van Aert rue Lepic à Paris, 27 juillet 2025 © Shutterstock/SIPA

Pour la première fois passé par la butte Montmartre, ce Tour de France 2025, considéré comme l’un des plus palpitants de l’histoire récente par notre chroniqueur, s’est conclu par une victoire magistrale de Wout van Aert sur une dernière étape épique sous la pluie parisienne…


Assurément, osons le dire, n’hésitons pas à être dithyrambique, et que les acrimonieux qui ne veulent y voir qu’une « farce » à cause du soupçon récurrent de dopage ravalent leur bile, le Tour de France est beaucoup plus qu’une épreuve sportive.

Le mythe

Quel événement au monde peut se targuer en effet de rassembler tout au long de son parcours, pendant trois semaines un public aussi nombreux, impossible réellement à estimer, joyeux, bon enfant, facétieux, de tout âge et sexe, brandissant une multitude de drapeaux souvent inconnus, d’exploser les après-midis de juillet l’audimat, d’être suivi à la télé à des heures pas possibles à cause du décalage horaire en Asie, en Afrique et aux Amériques, même dans les îles les plus isolées du Pacifique ?

Dans les années 60, l’écrivain Roland Barthe, dans son livre Mythologies l’avait qualifié de dernière « épopée » dans une société sur-administrée. Probable, mais aujourd’hui, ce qui est sûr c’est qu’il est le plus grand événement mondial, toutes catégories confondues.

Aucune manifestation culturelle ou politique ne peut lui être comparée. Même les grands succès cinématographiques hollywoodiens ne rivalisent pas avec lui. En 2024, selon différentes sources concordantes, dont France Sport Expertise (FSE), un regroupement d’entreprises françaises, il avait été vu par 3,5 milliards de téléspectateurs cumulés… Seules les cérémonies d’ouverture et de clôture des JO et les deux finales des coupes du monde de foot et de rugby font mieux que la Grande boucle. Mais elles n’ont lieu que tous les quatre ans… Et le Tour, c’est tous les ans. Depuis sa création en 1903, le Tour n’a pas été couru à deux reprises : pendant les deux guerres mondiales.

Derniers feux

Dans une France qui a été chassée de son pré-carré africain, qui ne fait plus entendre sa voix sur la scène internationale, plus particulièrement moyenne-orientale, et ce depuis le mémorable discours anti-guerre du Golfe à l’ONU de Dominique de Villepin prononcé avec fougue à l’instigation de Jacques Chirac, que sa capitale n’est plus celle des arts et des lettres, n’est plus cette fête que célébrait Ernest Hemingway, le Tour est la dernière survivance de son feu rayonnement. Le Tour est l’ultime étendard d’une singularité nationale qui se dissout.

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C’est sans doute pour cela que, dimanche, lors de la 21ème et ultime étape de cette 112ème édition, que Paris enthousiaste, Paris mouillé, Paris réconcilié, Paris festif[1], l’a plébiscité ! Et le Tour le lui a bien rendu en lui offrant une course homérique, digne de Dante. La rue Lepic qui mène au sommet de Montmartre où trône le Sacré-Cœur, est entrée dans la légende vélocipédique, au même titre que les grands cols, tels que le Tourmalet, le Galibier, le Ventoux…

C’est là, sous une pluie battante, sur un pavé glissant, sous les acclamations incrédules d’un public qui n’en attendait pas tant, sur ce « volcan en éruption » dixit Le Figaro, que le vainqueur, Wout van Aert, a dompté le vorace maillot jaune, Tadej Pogačar, qui de toute évidence la voulait cette étape.

Pas de temps mort

La victoire de Van Aert en solitaire est le résultat d’une habile tactique et aussi consécutive à un excès de suffisance de Pogacar. Le temps ayant été gelé par l’organisation à cause d’une chaussée glissante au troisième passage sur la ligne d’arrivée, son leader, second au général, Jonas Vingegaard, qu’il devait protéger jusqu’à la fin, lui a laissé carte blanche pour jouer la sienne et l’a jouée en maître tacticien car pour gagner il faut des jambes mais surtout une tête.

En résumé, au premier passage au sommet de Lepic, Julian Alaphilippe a déclenché les hostilités ; Pogacar a riposté sans faire la décision ; au deuxième passage, ce dernier, sûr de lui-même, son erreur, est passé à l’offensive pensant terminer en solitaire, comme à son habitude, et asseoir sa gloire. Mais, Van Aert était aux aguets et l’a neutralisé, lui portant un coup certain au moral. Et au troisième franchissement du haut de la butte de Montmartre, il lui a alors porté l’estocade fatale. Mais ce panache dont a fait preuve Pogacar a été aussi une sorte de cadeau qu’il a offert à un public ébahi de le voir dans ses œuvres… non plus à la télé mais bel et bien sur le vif.    

Ainsi il a contribué à faire de cette étape une étape d’anthologie dans un Tour d’anthologie qui depuis son départ de Lille n’a pas connu le moindre temps mort, un Tour qui marque un tournant dans l’histoire de la Grande Boucle. Les deux équipes les plus riches, UEA et Wisma, celles du premier et second au général, ont pratiquement tout raflé, ne laissant aux autres que les accessits. Nous y reviendrons rapidement dans ces colonnes, sur ce nouveau cyclisme, dont ce Tour 2025 est l’annonce… À suivre…


[1] Plagiat de la célèbre citation de de Gaulle prononcée à l’hôtel de ville de Paris, évidemment: Paris outragé, Paris brisé, Paris, martyrisé, Paris libéré…



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écrivain et journaliste français.

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