Accueil Site Page 3015

Grippe porcine, attrapez-la avant tout le monde !

10

C’est la dernière livraison du très sérieux The Independendant on Sunday qui nous l’apprend : on voit se multiplier partout sur le territoire britannique des Swine Flu Parties, en VF des surboums à grippe porcine, où un invité qui l’a déjà attrapé contamine tous les autres. Même si nos confrères ne le précisent pas, on n’imagine bien que ce partage viral doit ce faire avec force french kiss, mais ce n’est pas le seul but de la manœuvre. Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas non plus par pulsion morbide que les ados se ruent à ces surpats, bien au contraire : il s’agit d’après eux d’attraper le H1N1 en plein été, et d’être soignés puis immunisés sans attendre le pic épidémique de l’automne ou de l’hiver prochain quand les hôpitaux refuseront du monde et que les stocks de Tamiflu seront épuisés. Qui a dit que les jeunes étaient idiots ?

L’armée avec nous !

266

Pour les Causeurs qui désirent une saine rasade de littérature subversive pour l’été, sachez que vous ne trouverez pas la critique la plus virulente de notre société néolibérale mise à mal par les coups de boutoirs d’une crise qu’on espère terminale dans Le Monde Diplomatique ou Politis.

Prévenons tout de suite que le choc risque d’être rude pour ceux qui plaçaient dans l’armée leur dernier espoir pour réduire la chienlit des banlieues et des ouvriers séquestreurs. Il semblerait que celle-ci, si elle devait bouger, s’oriente davantage vers une solution à la portugaise, genre 25 avril 1974, quand une poignée de capitaines cultivés ont renversé en quelques jours et sans violence un régime à peine plus exténué que le nôtre.

En effet, ainsi que nous le signale le blogueur le mieux renseigné de France sur les affaires militaires, Jean-Dominique Merchet, c’est dans la très jugulaire-jugulaire Revue de la défense nationale que l’on peut lire cette critique d’un des best-sellers de la saison : « La solution décrite est tout aussi critiquable que la société actuelle (…) Ne pas partager les solutions esquissées dans le livre est une chose. Mais on ne peut constater combien celui-ci met en évidence le profond malaise qui règne en France. Les Français traversent indubitablement une crise qui n’est pas seulement économique et sociale mais qui est avant tout une crise de la morale. On a oublié l’homme et privilégié le profit. C’est aussi une crise du sens. (…) Refonder le contrat social et moral paraît d’autant plus nécessaire que passé un point de non-retour, le sentiment d’injustice se fait trop criant et plus aucun type de légitimité ne peut être trouvé.»

Nous pourrions, dans l’un de ces jeux d’été qui ne vont pas tarder à fleurir dans les magazines de plages en même temps que les jolies filles en bikinis sortant du bain, inviter nos amis Causeurs à trouver de quel livre il s’agit. Mais il faut que certains, ici, sachent l’effroyable vérité et, comme il était écrit au fronton de l’Enfer de Dante, abandonnent tout espérance.

Il s’agit de L’Insurrection qui vient.

Vous savez, ce texte insignifiant, mal écrit, qui raconte n’importe quoi tout en servant, dans une contradiction assez croquignolette de preuve à charge pour maintenir son présumé auteur six mois en prison.

Et l’article est signé d’une commissaire à l’Armée de Terre.

Tout fout le camp, moi je vous le dis, tout fout le camp.

Les grands chantiers du Président

115

A quoi pense le président Sarkozy quand il se rase chaque matin ? Au second tour de 2012, bien sûr. La question du premier tour, elle, est pliée d’avance depuis déjà deux ans, faute de concurrent crédible à droite (je ne dis pas ça pour me moquer de DDV ou de Copé, mais un peu quand même). Le deuxième tour, comme je l’ai écrit ici avec Aimée Joubert, semble déjà largement gagné d’avance. Mais le président est d’un naturel anxieux et méticuleux. Quand on fait ce métier, c’est un vrai plus.

D’où sa volonté de blinder sa réélection, en ne comptant pas uniquement sur le trop-plein de candidats à gauche ni sur son trop-vide d’idées.

Et le président à raison de ne pas faire comme si la gauche était définitivement hors-course: certes, nombre de quadras du PS jouent, et on peut les comprendre, la défaite en rase campagne en 2012 pour mieux se placer pour 2017. Ce faisant, ils choisissent de faire exploser le PS dans sa forme actuelle, et renvoient pour de bon à l’hospice Titine et les icônes résiduelles du mitterrando-jospinisme (Ségolène, Delanoé, Fabius, Buffet etc). Mais ils prennent aussi le risque d’ouvrir un boulevard à d’autres concurrents non démonétisés et aptes à occuper le terrain dès la prochaine présidentielle (par exemple, et dans trois registres différents, Valls, Hamon ou Mélenchon). La gauche n’est non pas tout à fait sortie de la photo, elle le sera encore moins avec un candidat populaire et populiste, décidé à jouer la gauche réelle contre la gauche légale, bref à contourner les appareils par le bas, comme l’ont si bien fait en leur temps Mitterrand… et Sarkozy.

Le premier chantier du président consiste donc à détacher de la gauche une partie de son électorat. L’ouverture ne sera bien sûr pas la solution. Hier Kouchner et Bockel, demain Lang et Allègre, so what ? On est dans les opérations de prestige et de démoralisation de l’adversaire, mais tous ça ne chiffre pas beaucoup de divisions. L’ouverture politique ne fera pas bouger les lignes dans l’électorat, en revanche, l’ouverture sociologique peut le fire, et d’ailleurs, elle l’a déjà fait il y a deux ans, quand l’actuel président a marqué des points dans l’électorat ouvrier en se présentant comme le candidat de la feuille de paye.

Le problème, c’est qu’on aura du mal à rejouer sans rire le même film au prochain rendez-vous (d’autant plus que Chirac avait déjà fait le même bon gag en 95 avec la fracture sociale). Exit donc, les prolos et les fonctionnaires, qui revoteront à gauche ou resteront chez eux. Restent donc, parmi les populations traditionnellement liées à la gauche, les artistes, qu’on a su choyer avec Hadopi mais qui ne pèsent pas lourd dans l’isoloir. Restent aussi les gays, La droite ne ménage pas sa peine, mais la réconciliation prendra probablement du temps, pour cause de hiatus culturel profond.

En revanche, il existe, à gauche un vivier de voix que le président est bien décidé à plumer : les Français, et notamment les jeunes, issus de l’immigration, et pour parler plus clair, ceux qui se définissent comme noirs ou comme arabes , ou encore comme musulmans ( religion dont sont issus l’immense majorité des franco-africains). Les sondeurs ayant des pudeurs que les policiers n’ont pas, on sait peu de choses sur le vote des musulmans en France. Sauf une: il votent très majoritairement socialiste, la gauche de la gauche étant perçue comme impie, et la droite comme structurellement hostile aux immigrés.

C’est cette perception que le président est décidé à faire bouger, et il a commencé à le faire : il n’y aura plus jamais de gouvernement Sarkozy sans noir ou arabe, et ceux-ci seront toujours ostensiblement, comme Rama ou Fadala, issus des banlieues ou semblant l’être. Le président fait le pari que la jeunesse diverse se contrefiche des idéologies et se sent plus proche, du style sarkozyste (Rolex, baskets , gros mots, Rayban, jogging, soirées DVD et jolies femmes) que de la vulgate socialiste, parti des profs et fonctionnaires honnis.

Le malentendu, bien réel, entre la droite et la diversité est essentiellement mythologique ou archéologique (guerres coloniales, parti des riches, imputations d’islamophobie ou de judéophilie etc), le président pense qu’a force de travail et d’effets d’annonces aussi visibles que les minorités éponymes, il peut remettre les cadrans à zéro. C’est bien pourquoi il n’y aura jamais de loi sur la burqa, et que les juifs de France, qui ont voté en masse pour Sarkozy en pensant qu’il était structurellement ami d’Israël risquent de déchanter, tant pis pour eux, ils n’avaient qu’à être cinq millions.

C’est bien pourquoi, on continuera d’aller vers la discrimination positive, en prenant bien soin, cette fois, de dire qu’il s’agit d’une politique sociale et pas raciale, et en prenant bien soin aussi que ses bénéficiaires comprennent que c’est exactement la même chose, mais en plus présentable -de la même façon que le ministère de la Ville ne s’est jamais appelé ministère des banlieues pourries.

En 2007, 80 % des Français se définissant comme musulmans ont voté PS dès le premier tour. Ramener ce chiffre à 50 % est un objectif réaliste, il sera d’autant plus facilement à portée de main si on met en orbite un candidat ethnique apte à bâcher la gauche au premier tour et sarkocompatible au second tour.

Fadela, tu fais quoi en 2012 ?

Daltonisme aggravé aux USA

20

Depuis l’annonce du décès du « roi de la pop », nous avons eu droit à tout. L’enfance de la star, ses talents, sa carrière et ses nombreuses interventions de chirurgie esthétique. Sans parler de l’annulation de tous les JT hier soir pour cause d’hommage mondial. On aura parlé de tout dans le détail, sauf de l’elephant in the room, ses rapports avec son identité, sa « négritude ». On peut, certes, dire que celui qui a été appelé par son père « gros nez » cherchait d’abord à régler des comptes avec son géniteur. Mais Michael Jackson est allé beaucoup plus loin avec son défrisage, sa dépigmentation et sa célèbre veste de groom. Le Benjamin des Jackson Five a rejeté non seulement sa filiation directe mais carrément sa « race ». Dans toute cette affaire le phénomène le plus intrigant restera donc la réaction de la communauté noire américaine, Jesse Jackson en tête, vis-à-vis de celui qui a tout fait pour se détacher physiquement d’elle. Ironie du sort, celui qui ne voulait pas être ni Jackson ni black a été rattrapé par ces deux appartenances. Identité, quand tu nous tiens…

Et si Ahmadinejad avait gagné pour de bon ?

31

Et si Ahmadinejad avait bel et bien gagné l’élection présidentielle en Iran ? Et si Mir Hossein Moussavi était en fait un mauvais perdant qui a calomnié le gagnant en l’accusant de fraude ? La réponse est simple : peu importe aujourd’hui le vrai résultat, ces élections et leurs suites dans la rue ne s’inscrivent plus dans le registre de la légalité. Le pays réel s’est affranchi du pays légal. C’est bien là le cœur de l’affaire : même si le régime arrivait à prouver qu’aucune fraude massive n’a eu lieu, aux yeux de beaucoup d’Iraniens, il a perdu le plus précieux : sa légitimité à gouverner.

Du point de vue du régime, le scénario d’une victoire honnête dans les urnes refusée par le peuple est encore pire que celui de la fraude. Dans le cas d’une tricherie, les dégâts sont certes considérables mais l’essentiel peut être sauvé. Il suffirait de sacrifier Ahmadinejad et quelques hauts fonctionnaires, d’afficher une consternation de bon ton et de faire toutes les déclarations et promesses d’usage, moyennant quoi on pourrait dire – et peut être même faire croire – que le roi est bon mais mal conseillé. En revanche, s’il s’avère que le peuple iranien – ou ceux qui se font passer pour ses authentiques représentants – s’obstine à rejeter les résultats des élections légales, c’est la rupture et l’instauration d’une situation révolutionnaire, car c’est le roi lui-même qui est en cause et, avec lui, la monarchie.

Les manifestations en Iran témoignent d’abord d’un gigantesque ras-le-bol. Pour de nombreux Iraniens, le régime a choisi d’ignorer la réalité en rompant le contrat qui leur permettait de trouver de petits arrangements conciliant les grands principes de la révolution islamique avec l’évolution des mœurs de la société. Pour la génération qui n’a connu ni le Chah ni la guerre, la révolution n’est pas une expérience personnelle, un souvenir de jeunesse héroïque mais un ensemble de slogans et d’institutions vieillissantes. L’élan et l’enthousiasme de ces moments où tout semblait possible ont été remplacés – rien de plus normal – par des structures bureaucratiques.

Face à cette situation, le régime a choisi de réagir par une sorte de révolution culturelle, une fuite en avant déguisée en retour aux sources. Pendant la quinzaine d’années qui ont passé depuis la fin de la guerre avec l’Irak et la mort de Khomeiny, le régime a su faire la part des choses entre les slogans et la réalité, entre ce qui est imprimé sur les calicots et le comportement des gens. Pour prendre un exemple estival, il a toléré que les gens fassent ce que tout le monde fait discrètement dans la piscine, à condition de ne pas le faire du haut du plongeoir. Avec l’élection d’Ahmadinejad, c’est machine arrière, retour à l’an II : la population doit être rééduquée pour retrouver la pureté de la jeunesse de la révolution islamique, afin que celle-ci trouve un deuxième souffle.

Le principal rival d’Ahmadinejad et ses partisans voulaient remettre en cause 2004 et non pas 1979. En choisissant le vert comme couleur et « Allah o Akhbar ! » comme cri de guerre, ils ont exprimé une volonté de revenir à un statu quo ante Ahmadinejad plus souple. Bref, au lieu d’accompagner le changement, le régime a choisi de s’y opposer. La meilleure mise en garde contre une telle politique nous a été donnée par Thucydide dans les chapitres de La Guerre du Péloponnèse consacrées à la crise à Kerkyra (aujourd’hui Corfou). Le régime de cette île, qui refusait tout changement ou compromis avec la population, avait provoqué ainsi un phénomène que l’historien athénien appelle « stasis », terme dérivé d’une racine signifiant « rester en place, ne pas bouger », désignait à l’époque la crise engendrée par une telle politique. À nos lecteurs, Khamenei et Ahmadinejad, je signale que ce terme est traduit en français par « révolution ».

La dernière victoire du général Giap

160

Le peuple vietnamien et ses anciens combattants héroïques, ainsi que le général Giap, 98 ans, ont l’immense bonheur de vous annoncer la mort de Robert McNamara, 93 ans, secrétaire d’état à la défense des présidents Kennedy et Johnson et à ce titre artisan de la guerre du Viet-Nam, théoricien du bombardement massif de populations civiles et du napalmage à grande échelle. Non content d’être l’auteur d’un des plus grands massacres de l’après-guerre, Robert McNamara a continué ensuite son œuvre de bienfaiteur de l’humanité. En effet, après avoir éliminé des centaines de milliers de salopards de niakoués rouges, il est devenu directeur de la banque mondiale jusqu’en 1981, c’est à dire de l’officine spécialisée dans la ruine des économies du Tiers-Monde et le régime maigre pour leurs populations. McNamara, Kissinger, mais aussi Rumsfeld et Bush : ne cherchez pas plus loin pourquoi les USA refusent obstinément de reconnaître une quelconque juridiction internationale. Quatre criminels contre l’humanité dans son histoire récente, ça fait beaucoup pour la championne autoproclamée de la démocratie mondiale.

Bambi et les bambins

33

Bon, autant prévenir mes copains tout de suite : attendez-vous, dans les mois à venir, à voir arriver sur les fonts baptismaux une ribambelle de petits Jackson ou de petites Bambi. Bébés encore innocents, et déjà victimes des lubies parentales qui distinguent mal enfant et jouet. À la manière des noms donnés aux poneys et aux caniches, les prénoms dont certains affublent leurs rejetons nous permettent de connaître de facto leur millésime. Seule exception pour les petits Johnny qui éclosent inlassablement depuis 50 ans et passent leur prime jeunesse déguisés en idole des jeunes. Car autrement, la cote des prénoms suit de près la courbe d’audience des séries américaines.

Il n’est pas nécessaire d’avoir lu Bourdieu pour comprendre qu’un prénom en dit bien plus sur vous que la couleur de vos chaussettes ou de votre bulletin de vote. Car si ces dernières relèvent de l’acquis, le premier est inné ou presque, à 24 heures près. Difficile de faire croire que vous avez pratiqué le piano et l’équitation toute votre enfance, et que vous avez écumé rallyes et pèlerinages quand vous vous appelez Brandon ou Kimberley. A tort ou à raison, on se dira plutôt que vous étiez abandonné devant la télé pendant que papa était parti encourager maman qui participait à un concours de T-shirts mouillés.

Une étude sociologique approfondie – qui m’aura bien pris cinq minutes – permet de constater une répartition en trois grandes catégories : les prénoms à connotation moyenâgeuse plaisent aux familles qui écrivent « tradition » avec un T majuscule, les prénoms normaux (Nicolas, Basile, Marc, François, Élisabeth, etc.) ont la préférence des familles équilibrées, croyantes mais peu pratiquantes, à la fois ouvertes à la modernité et moralement intègres, et les prénoms « TV shows » sont l’apanage de ceux qui tendent vers ce que les américains qualifient crûment de «white trash ».

Vous aurez compris qu’il ne s’agit pas, ici, de faire du pacorabannisme : ce n’est pas le prénom que l’on donne au gamin qui conditionnera sa future carrière. Appelez le vôtre Fidel, Bernard-Henri ou Sylvio : vous n’aurez aucune garantie de résultats tangibles. Non, mais si, d’une manière ou d’une autre, nous avons à porter le poids de l’éducation reçue, notre prénom amplifie cet héritage en le rendant ostensible, comme dirait l’autre.

Maintenant, chacun fait ce qu’il veut, c’est pas mes oignons, à vrai dire. Tout le monde s’en tape désormais, même l’état-civil qui refusait jadis, les Cerise ou Framboise. D’ailleurs, reviendrait-on à l’insupportable pratique d’antan, celle qui faisait que l’Etat républicain ne validait que les appellations issues du who’s who des saints catholiques, qu’il y aurait moyen de moyenner. Car qui peut jurer qu’un jour le Roi de la pop ne sera pas canonisé, en même temps que la princesse Diana, Sœur Emmanuelle et Yves Saint-Laurent ?
Avec tous les abats qu’on lui a retirés du ventre lors des autopsies successives, on pourra fournir des dizaines d’églises en reliques de première catégorie…

Bal des nazes à Hénin-Beaumont

108

« Qui voit les rives de la Seine voit nos peines ! » s’exclamait Guy Debord dans Panégyrique, déplorant la destruction d’une ville en temps de paix par l’urbanisation spectaculaire-marchande. « Qui voit le résultat des élections à Hénin-Beaumont aussi… », pourrait légitimement dire le militant de gauche un peu lucide, à la lecture des résultats d’élections municipales qui ont vu jusqu’à la caricature les ravages de l’antifascisme sociétal quand il s’agit de lutter contre le Front National.
Pendant plusieurs mois avec un crescendo pratiquement orgasmique, l’empire du bien et de la bonne conscience s’est déchainé dans cette ville du bassin minier dont le premier des problèmes est pourtant un chômage à vingt pour cent et des impôts locaux qui se montent à 2800 euros par an pour une maison de mineur.

Qu’importe si le précédent maire PS est en prison pour corruption présumée, qu’importe si sa gestion héliogabalesque a ruiné ses administrés, qu’importe s’il avait été soutenu comme la corde soutient le pendu par un Parti socialiste qui avait dépêché en renfort la pugnace et excellente Marie-Noëlle Lienemann en première adjointe avant de la renvoyer à ses chères études béthunoises pour d’obscures raisons d’appareil.

Qu’importe, encore, si le même parti socialiste local dont on se demande si la proximité géographique avec le parti socialiste wallon, le plus corrompu et le plus bête d’Europe, n’est pas la principale inspiration, a trouvé le moyen une fois de nouvelles élections inévitables, de ne soutenir aucune liste. Oui, vous avez bien lu, c’est à peine quelques jours avant le premier tour que Martine Aubry dans un sursaut d’indignation et de clairvoyance a appelé à voter pour la liste Ferrari, arrivée d’ailleurs en troisième position. Et quelle liste… Menée par un jeune radical de gauche, elle unissait dans un « front républicain » des communistes, des modèmistes et des militants du MJS. Même pour le vieil amateur de particularismes électoraux que nous sommes, nous n’avions jamais vu attelage plus baroque : des démocrates chrétiens qui ne représentent qu’eux-mêmes dans le bassin minier, de jeunes sociaux-démocrates écœurés par le cynisme attentiste du parti de leurs aînés et un PCF ronchon mais discipliné et ne ménageant pas ses efforts, comme d’habitude.

Qu’importe, encore, si ce « front républicain » ne voulait plus rien dire politiquement puisque, de fait, une liste divers-gauche menée par un viré du PS, une liste Verte, une liste du NPA, une liste UMP (nous la mettons après le NPA parce qu’en l’occurrence, ils sont encore plus groupusculaires dans le paysage héninois.) se présentaient sur les rangs.

Oui, qu’importe puisque toute cette incohérence, qui sentait les rancœurs recuites et les combinazione de terrils, se justifiait d’elle-même. N’est-ce pas, en face, ce n’était pas un adversaire politique, c’était le Mal incarné, c’était la Walkyrie bretonne, la fille de la Bête Immonde, Marine Le Pen en personne.

On évitait d’insister sur le fait qu’elle n’était jamais que le numéro deux sur la liste et que le numéro un Steeve Briois est un local pur jus, un vrai « boyau rouge », petit-fils de militant communiste. Oui, on évitait d’insister parce que dans le genre révision déchirante, certains à gauche auraient été obligés de reconnaître que ce dont à d’abord besoin la classe ouvrière ce n’est pas du mariage homosexuel, de la légalisation du cannabis, du vélib ou de spectacles post-brechtiens mais de travail, de salaires décents, de nouveaux droits contre le talon de fer d’un capitalisme déculpabilisé.

Et le bal des nazes a recommencé. The same old story. Plutôt que d’expliquer que Marine Le Pen ce n’était pas Hitler, même pas Doriot mais tout banalement Sarkozy en pire, l’argumentaire a été moral, jamais politique. Pendant que le Front national distribuait ses tracts sans avoir besoin de forcer la note, procédant avec une empathie manifeste pour le populo (qu’elle soit feinte ou non n’est pas le problème), une certaine gauche de la culture, appelée à la rescousse, voulait faire croire que les SS cernaient la ville. On a même, entre les deux tours, appelé Dany Boon à la rescousse. C’est vrai quoi, une région si sympathique, qu’une comédie régionaliste dégoulinante de bons sentiments a rendu nationalement célèbre, risquait de retrouver sur son si sympathique visage l’affreux point noir d’une mairie frontiste.

Non, ce n’était pas possible.

Et ce ne le fut pas. Marine Le Pen a été battue. De 500 voix. Il semblerait d’après nos informations que la population ait surtout mal perçu l’intervention entre les deux tours de colleurs d’affiches frontistes venant d’autres régions, parfois lointaines. Ce serait cette intrusion, beaucoup plus que le très pâlichon Daniel Duquenne, son adversaire, qui aurait emporté le morceau.

Le Front National a d’ailleurs déjà posé un recours. La farce continue. La gauche a emporté une victoire à la Pyrrhus, ce qui ne lui évitera se remettre en question. Comme d’habitude à Hénin-Beaumont.

Et dans toute cette histoire, nous n’avons plus qu’une seule certitude : le cadavre est ch’ti.

L’islam de France n’a pas de pétrole

474

Je prends peut-être mes désirs pour des réalités, mais j’ai l’impression que des choses changent. Des petites choses ou les petits signes de plus grandes qui semblent annoncer un redressement de l’échine nationale, comme un agacement français devant le manque de reconnaissance de notre hospitalité occidentale.

On est de plus en plus nombreux à freiner dans la descente en disant que le Moyen Âge on connaît, on en vient. Si on a mis quelques siècles à se délivrer de l’emprise de nos religions, ce n’est pas pour se laisser emmerder par celle des autres !

Ces temps-ci, l’Elysée donne le ton et à l’entendre je ne regrette pas mon vote.

En mai dernier, un déjeuner y était prévu pour le Premier ministre irakien et, pour lui faire honneur, on avait monté des caves les crus les plus renommés. C’était à l’évidence surestimer la courtoisie de notre hôte et sous-estimer son islamicité puisque Nouri Al Maliki exigea que la « boisson impie » fût retirée de la table. J’ignorais que l’islam interdît de voir du vin.

Sur ce coup-là, la diplomatie française, peut-être unie par le mot d’ordres « Touche pas à mon litron ! » a été ferme. La fin morale de cette histoire est que le repas fut simplement annulé. Pas de vin, pas de festin !

On aurait pu envoyer l’officiel de Bagdad manger dans un kebab et inviter à sa place un Irakien chrétien, juif ou idolâtre et pourquoi pas ivrogne et sodomite, mais on ne peut pas tout attendre du sommet de l’Etat.

On peut néanmoins apprécier le geste. Le poing sur la table redeviendrait-il un usage français ? On peut s’en réjouir quand on voit l’état de l’Europe soumise aux pressions de l’islam modéré.

L’islam modéré, c’est celui qui exige des tolérances et des droits qui nous rapprocheraient de la charia, mais qui n’a pas le pouvoir de les imposer. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan nous prévient : « L’expression islam modéré est laide et offensante, il n’y a pas d’islam modéré. L’islam est l’islam. » On est contents d’apprendre que les égorgeurs font partie de la famille.

Bien sûr, il y a des extrémistes dans toutes les religions. Mais il ne me viendrait pas à l’idée de mettre dans le même sac Baruch Goldstein et Woody Allen. Mais il ne s’agit pas ici de mettre les hommes dans des sacs. Après tout, ce ne sont pas des femmes. C’est tout l’enjeu de la polémique qui est en train de naître en France sur le port de la burqa. Pouvoir en parler est assurément un progrès par rapport à l’époque où on regardait ailleurs pour ne pas voir la barbarie barbue en marche – il ne fallait pas stigmatiser. Mais elle montre que le niveau du débat public est tombé bien bas. On n’est pas très loin du moratoire sur la lapidation concédé par un autre modéré[1. Pour ceux qui l’ont oublié, il s’agit de Tariq Ramadan, interpellé par Nicolas Sarkozy sur un plateau de télévision.]. Est-ce là l’enrichissement que nous promet le multiculturalisme ?

Sur les plateaux de télé, aucun musulman extrémiste ne vient défendre cette pratique exotique qu’est la burqa, les modérés s’en chargent très bien. Vous avez peut-être vu comme moi Mahmoud Doua, professeur en anthropologie du monde arabo-musulman à l’université Bordeaux-3, déclarer à « C’ dans l’air » que la burqa le choque mais qu’il défendra jusqu’au bout les droits de l’homme (sur la femme ?). Son argument décisif est un bel exemple d’arnaque dans la négociation : « Si vous acceptez l’extrême dévoilement, vous devez accepter l’extrême voilement. » Ben voyons ! Ça semble logique comme l’algèbre qu’ils ont inventée mais nous, on a les Lumières. D’abord « nous » (puisqu’on est entrés, semble-t-il, dans un dialogue entre « eux » et « nous ») n’autorisons pas l’extrême dévoilement. Si Mahmoud entend par là nudité, chez « nous », la nudité est interdite dans la rue. Il y a des camps pour ça, ça s’appelle le nudisme. Devrait-on, par souci d’égalité de traitement, ouvrir des camps pour y concentrer ceux et celles pour qui le port de la burqa est devenu un besoin vital ? Evidemment, ce n’est pas ce que l’islam modéré demande, il réclame le droit de sortir masqué partout.

L’arnaque ne s’arrête pas là. Que penserait-on d’un visiteur débarquant du Moyen Âge au sens propre et qui nous dirait : « Nous nous méfions des femmes libres, et par principe de précaution, nous les brûlons comme sorcières. Vous les aimez plus que le Bon Dieu, le Prophète et toute la smala. Nous les envoyons en enfer. Vous les laissez devenir Première dame de France[2. L’islamiste britannique Anjem Choudary écrit sur son blog : « Sarkozy doit être content d’être marié à une prostituée qui exhibe son corps au monde en croyant bien se conduire, mais qu’il lui est rappelé qu’un musulman n’est pas ce genre d’homme superficiel et dépravé. »]. Coupons la poire en deux, foutons-les dans des sacs » ? Vous la voyez, l’arnaque ? Voilà comment, au nom de la liberté, à l’abri de la laïcité, en vertu des droits de l’homme qui, une fois n’est pas coutume, s’appliquent aux femmes, dans un souci d’apaisement et une recherche d’équilibre, on nous ramène lentement mais sûrement de la lumière à l’ombre. Voilà comment avance la régression.

Qu’est-ce qu’on négocie et pourquoi ? Qui, de l’islam ou de la France, a le plus besoin de l’autre ? Qui doit s’adapter à l’autre ? Quand on accueille Khadafi, il n’a que le respect qu’on doit à son pétrole. L’islam de France n’en a pas. Alors, ses idées, disons qu’on n’est pas preneurs. À force d’entendre qu’ils sont une « chance pour la France », certains ont fini par le croire. Rappelons-leur que la chance, c’est la France. Pour tout le monde. À condition qu’on la défende. Sans négocier. Il n’y a rien à négocier.

La burqa n’est pas tolérable, donc on ne l’interdira pas

32

Tous ceux qu’inquiète la multiplication des prisons portables en climat tempéré auront été ravis en lisant la déclaration sans nuance d’Anne Hidalgo, première adjointe de Bertrand Delanoë, concernant la burqa dans le Parisien Dimanche d’hier : « En tant que féministe, je considère que la burqa n’est pas qu’une question de vêtement : c’est une violence très forte faite aux femmes. Notre République ne doit donc pas considérer comme tolérable le port de la burqa. » Mais attendez avant d’applaudir, parce qu’elle conclut fort peu logiquement en ajoutant aussitôt : « Pour autant, je ne suis pas sûre qu’il soit opportun de passer tout de suite par la loi. Il faut d’abord faire beaucoup de pédagogie. » Dommage que la même politique non-répressive n’ait pas prévalu en matière de contraventions automobiles. Mais c’est sans doute beaucoup plus grave…

Grippe porcine, attrapez-la avant tout le monde !

10

C’est la dernière livraison du très sérieux The Independendant on Sunday qui nous l’apprend : on voit se multiplier partout sur le territoire britannique des Swine Flu Parties, en VF des surboums à grippe porcine, où un invité qui l’a déjà attrapé contamine tous les autres. Même si nos confrères ne le précisent pas, on n’imagine bien que ce partage viral doit ce faire avec force french kiss, mais ce n’est pas le seul but de la manœuvre. Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas non plus par pulsion morbide que les ados se ruent à ces surpats, bien au contraire : il s’agit d’après eux d’attraper le H1N1 en plein été, et d’être soignés puis immunisés sans attendre le pic épidémique de l’automne ou de l’hiver prochain quand les hôpitaux refuseront du monde et que les stocks de Tamiflu seront épuisés. Qui a dit que les jeunes étaient idiots ?

L’armée avec nous !

266

Pour les Causeurs qui désirent une saine rasade de littérature subversive pour l’été, sachez que vous ne trouverez pas la critique la plus virulente de notre société néolibérale mise à mal par les coups de boutoirs d’une crise qu’on espère terminale dans Le Monde Diplomatique ou Politis.

Prévenons tout de suite que le choc risque d’être rude pour ceux qui plaçaient dans l’armée leur dernier espoir pour réduire la chienlit des banlieues et des ouvriers séquestreurs. Il semblerait que celle-ci, si elle devait bouger, s’oriente davantage vers une solution à la portugaise, genre 25 avril 1974, quand une poignée de capitaines cultivés ont renversé en quelques jours et sans violence un régime à peine plus exténué que le nôtre.

En effet, ainsi que nous le signale le blogueur le mieux renseigné de France sur les affaires militaires, Jean-Dominique Merchet, c’est dans la très jugulaire-jugulaire Revue de la défense nationale que l’on peut lire cette critique d’un des best-sellers de la saison : « La solution décrite est tout aussi critiquable que la société actuelle (…) Ne pas partager les solutions esquissées dans le livre est une chose. Mais on ne peut constater combien celui-ci met en évidence le profond malaise qui règne en France. Les Français traversent indubitablement une crise qui n’est pas seulement économique et sociale mais qui est avant tout une crise de la morale. On a oublié l’homme et privilégié le profit. C’est aussi une crise du sens. (…) Refonder le contrat social et moral paraît d’autant plus nécessaire que passé un point de non-retour, le sentiment d’injustice se fait trop criant et plus aucun type de légitimité ne peut être trouvé.»

Nous pourrions, dans l’un de ces jeux d’été qui ne vont pas tarder à fleurir dans les magazines de plages en même temps que les jolies filles en bikinis sortant du bain, inviter nos amis Causeurs à trouver de quel livre il s’agit. Mais il faut que certains, ici, sachent l’effroyable vérité et, comme il était écrit au fronton de l’Enfer de Dante, abandonnent tout espérance.

Il s’agit de L’Insurrection qui vient.

Vous savez, ce texte insignifiant, mal écrit, qui raconte n’importe quoi tout en servant, dans une contradiction assez croquignolette de preuve à charge pour maintenir son présumé auteur six mois en prison.

Et l’article est signé d’une commissaire à l’Armée de Terre.

Tout fout le camp, moi je vous le dis, tout fout le camp.

Les grands chantiers du Président

115

A quoi pense le président Sarkozy quand il se rase chaque matin ? Au second tour de 2012, bien sûr. La question du premier tour, elle, est pliée d’avance depuis déjà deux ans, faute de concurrent crédible à droite (je ne dis pas ça pour me moquer de DDV ou de Copé, mais un peu quand même). Le deuxième tour, comme je l’ai écrit ici avec Aimée Joubert, semble déjà largement gagné d’avance. Mais le président est d’un naturel anxieux et méticuleux. Quand on fait ce métier, c’est un vrai plus.

D’où sa volonté de blinder sa réélection, en ne comptant pas uniquement sur le trop-plein de candidats à gauche ni sur son trop-vide d’idées.

Et le président à raison de ne pas faire comme si la gauche était définitivement hors-course: certes, nombre de quadras du PS jouent, et on peut les comprendre, la défaite en rase campagne en 2012 pour mieux se placer pour 2017. Ce faisant, ils choisissent de faire exploser le PS dans sa forme actuelle, et renvoient pour de bon à l’hospice Titine et les icônes résiduelles du mitterrando-jospinisme (Ségolène, Delanoé, Fabius, Buffet etc). Mais ils prennent aussi le risque d’ouvrir un boulevard à d’autres concurrents non démonétisés et aptes à occuper le terrain dès la prochaine présidentielle (par exemple, et dans trois registres différents, Valls, Hamon ou Mélenchon). La gauche n’est non pas tout à fait sortie de la photo, elle le sera encore moins avec un candidat populaire et populiste, décidé à jouer la gauche réelle contre la gauche légale, bref à contourner les appareils par le bas, comme l’ont si bien fait en leur temps Mitterrand… et Sarkozy.

Le premier chantier du président consiste donc à détacher de la gauche une partie de son électorat. L’ouverture ne sera bien sûr pas la solution. Hier Kouchner et Bockel, demain Lang et Allègre, so what ? On est dans les opérations de prestige et de démoralisation de l’adversaire, mais tous ça ne chiffre pas beaucoup de divisions. L’ouverture politique ne fera pas bouger les lignes dans l’électorat, en revanche, l’ouverture sociologique peut le fire, et d’ailleurs, elle l’a déjà fait il y a deux ans, quand l’actuel président a marqué des points dans l’électorat ouvrier en se présentant comme le candidat de la feuille de paye.

Le problème, c’est qu’on aura du mal à rejouer sans rire le même film au prochain rendez-vous (d’autant plus que Chirac avait déjà fait le même bon gag en 95 avec la fracture sociale). Exit donc, les prolos et les fonctionnaires, qui revoteront à gauche ou resteront chez eux. Restent donc, parmi les populations traditionnellement liées à la gauche, les artistes, qu’on a su choyer avec Hadopi mais qui ne pèsent pas lourd dans l’isoloir. Restent aussi les gays, La droite ne ménage pas sa peine, mais la réconciliation prendra probablement du temps, pour cause de hiatus culturel profond.

En revanche, il existe, à gauche un vivier de voix que le président est bien décidé à plumer : les Français, et notamment les jeunes, issus de l’immigration, et pour parler plus clair, ceux qui se définissent comme noirs ou comme arabes , ou encore comme musulmans ( religion dont sont issus l’immense majorité des franco-africains). Les sondeurs ayant des pudeurs que les policiers n’ont pas, on sait peu de choses sur le vote des musulmans en France. Sauf une: il votent très majoritairement socialiste, la gauche de la gauche étant perçue comme impie, et la droite comme structurellement hostile aux immigrés.

C’est cette perception que le président est décidé à faire bouger, et il a commencé à le faire : il n’y aura plus jamais de gouvernement Sarkozy sans noir ou arabe, et ceux-ci seront toujours ostensiblement, comme Rama ou Fadala, issus des banlieues ou semblant l’être. Le président fait le pari que la jeunesse diverse se contrefiche des idéologies et se sent plus proche, du style sarkozyste (Rolex, baskets , gros mots, Rayban, jogging, soirées DVD et jolies femmes) que de la vulgate socialiste, parti des profs et fonctionnaires honnis.

Le malentendu, bien réel, entre la droite et la diversité est essentiellement mythologique ou archéologique (guerres coloniales, parti des riches, imputations d’islamophobie ou de judéophilie etc), le président pense qu’a force de travail et d’effets d’annonces aussi visibles que les minorités éponymes, il peut remettre les cadrans à zéro. C’est bien pourquoi il n’y aura jamais de loi sur la burqa, et que les juifs de France, qui ont voté en masse pour Sarkozy en pensant qu’il était structurellement ami d’Israël risquent de déchanter, tant pis pour eux, ils n’avaient qu’à être cinq millions.

C’est bien pourquoi, on continuera d’aller vers la discrimination positive, en prenant bien soin, cette fois, de dire qu’il s’agit d’une politique sociale et pas raciale, et en prenant bien soin aussi que ses bénéficiaires comprennent que c’est exactement la même chose, mais en plus présentable -de la même façon que le ministère de la Ville ne s’est jamais appelé ministère des banlieues pourries.

En 2007, 80 % des Français se définissant comme musulmans ont voté PS dès le premier tour. Ramener ce chiffre à 50 % est un objectif réaliste, il sera d’autant plus facilement à portée de main si on met en orbite un candidat ethnique apte à bâcher la gauche au premier tour et sarkocompatible au second tour.

Fadela, tu fais quoi en 2012 ?

Daltonisme aggravé aux USA

20

Depuis l’annonce du décès du « roi de la pop », nous avons eu droit à tout. L’enfance de la star, ses talents, sa carrière et ses nombreuses interventions de chirurgie esthétique. Sans parler de l’annulation de tous les JT hier soir pour cause d’hommage mondial. On aura parlé de tout dans le détail, sauf de l’elephant in the room, ses rapports avec son identité, sa « négritude ». On peut, certes, dire que celui qui a été appelé par son père « gros nez » cherchait d’abord à régler des comptes avec son géniteur. Mais Michael Jackson est allé beaucoup plus loin avec son défrisage, sa dépigmentation et sa célèbre veste de groom. Le Benjamin des Jackson Five a rejeté non seulement sa filiation directe mais carrément sa « race ». Dans toute cette affaire le phénomène le plus intrigant restera donc la réaction de la communauté noire américaine, Jesse Jackson en tête, vis-à-vis de celui qui a tout fait pour se détacher physiquement d’elle. Ironie du sort, celui qui ne voulait pas être ni Jackson ni black a été rattrapé par ces deux appartenances. Identité, quand tu nous tiens…

Et si Ahmadinejad avait gagné pour de bon ?

31

Et si Ahmadinejad avait bel et bien gagné l’élection présidentielle en Iran ? Et si Mir Hossein Moussavi était en fait un mauvais perdant qui a calomnié le gagnant en l’accusant de fraude ? La réponse est simple : peu importe aujourd’hui le vrai résultat, ces élections et leurs suites dans la rue ne s’inscrivent plus dans le registre de la légalité. Le pays réel s’est affranchi du pays légal. C’est bien là le cœur de l’affaire : même si le régime arrivait à prouver qu’aucune fraude massive n’a eu lieu, aux yeux de beaucoup d’Iraniens, il a perdu le plus précieux : sa légitimité à gouverner.

Du point de vue du régime, le scénario d’une victoire honnête dans les urnes refusée par le peuple est encore pire que celui de la fraude. Dans le cas d’une tricherie, les dégâts sont certes considérables mais l’essentiel peut être sauvé. Il suffirait de sacrifier Ahmadinejad et quelques hauts fonctionnaires, d’afficher une consternation de bon ton et de faire toutes les déclarations et promesses d’usage, moyennant quoi on pourrait dire – et peut être même faire croire – que le roi est bon mais mal conseillé. En revanche, s’il s’avère que le peuple iranien – ou ceux qui se font passer pour ses authentiques représentants – s’obstine à rejeter les résultats des élections légales, c’est la rupture et l’instauration d’une situation révolutionnaire, car c’est le roi lui-même qui est en cause et, avec lui, la monarchie.

Les manifestations en Iran témoignent d’abord d’un gigantesque ras-le-bol. Pour de nombreux Iraniens, le régime a choisi d’ignorer la réalité en rompant le contrat qui leur permettait de trouver de petits arrangements conciliant les grands principes de la révolution islamique avec l’évolution des mœurs de la société. Pour la génération qui n’a connu ni le Chah ni la guerre, la révolution n’est pas une expérience personnelle, un souvenir de jeunesse héroïque mais un ensemble de slogans et d’institutions vieillissantes. L’élan et l’enthousiasme de ces moments où tout semblait possible ont été remplacés – rien de plus normal – par des structures bureaucratiques.

Face à cette situation, le régime a choisi de réagir par une sorte de révolution culturelle, une fuite en avant déguisée en retour aux sources. Pendant la quinzaine d’années qui ont passé depuis la fin de la guerre avec l’Irak et la mort de Khomeiny, le régime a su faire la part des choses entre les slogans et la réalité, entre ce qui est imprimé sur les calicots et le comportement des gens. Pour prendre un exemple estival, il a toléré que les gens fassent ce que tout le monde fait discrètement dans la piscine, à condition de ne pas le faire du haut du plongeoir. Avec l’élection d’Ahmadinejad, c’est machine arrière, retour à l’an II : la population doit être rééduquée pour retrouver la pureté de la jeunesse de la révolution islamique, afin que celle-ci trouve un deuxième souffle.

Le principal rival d’Ahmadinejad et ses partisans voulaient remettre en cause 2004 et non pas 1979. En choisissant le vert comme couleur et « Allah o Akhbar ! » comme cri de guerre, ils ont exprimé une volonté de revenir à un statu quo ante Ahmadinejad plus souple. Bref, au lieu d’accompagner le changement, le régime a choisi de s’y opposer. La meilleure mise en garde contre une telle politique nous a été donnée par Thucydide dans les chapitres de La Guerre du Péloponnèse consacrées à la crise à Kerkyra (aujourd’hui Corfou). Le régime de cette île, qui refusait tout changement ou compromis avec la population, avait provoqué ainsi un phénomène que l’historien athénien appelle « stasis », terme dérivé d’une racine signifiant « rester en place, ne pas bouger », désignait à l’époque la crise engendrée par une telle politique. À nos lecteurs, Khamenei et Ahmadinejad, je signale que ce terme est traduit en français par « révolution ».

La dernière victoire du général Giap

160

Le peuple vietnamien et ses anciens combattants héroïques, ainsi que le général Giap, 98 ans, ont l’immense bonheur de vous annoncer la mort de Robert McNamara, 93 ans, secrétaire d’état à la défense des présidents Kennedy et Johnson et à ce titre artisan de la guerre du Viet-Nam, théoricien du bombardement massif de populations civiles et du napalmage à grande échelle. Non content d’être l’auteur d’un des plus grands massacres de l’après-guerre, Robert McNamara a continué ensuite son œuvre de bienfaiteur de l’humanité. En effet, après avoir éliminé des centaines de milliers de salopards de niakoués rouges, il est devenu directeur de la banque mondiale jusqu’en 1981, c’est à dire de l’officine spécialisée dans la ruine des économies du Tiers-Monde et le régime maigre pour leurs populations. McNamara, Kissinger, mais aussi Rumsfeld et Bush : ne cherchez pas plus loin pourquoi les USA refusent obstinément de reconnaître une quelconque juridiction internationale. Quatre criminels contre l’humanité dans son histoire récente, ça fait beaucoup pour la championne autoproclamée de la démocratie mondiale.

Bambi et les bambins

33

Bon, autant prévenir mes copains tout de suite : attendez-vous, dans les mois à venir, à voir arriver sur les fonts baptismaux une ribambelle de petits Jackson ou de petites Bambi. Bébés encore innocents, et déjà victimes des lubies parentales qui distinguent mal enfant et jouet. À la manière des noms donnés aux poneys et aux caniches, les prénoms dont certains affublent leurs rejetons nous permettent de connaître de facto leur millésime. Seule exception pour les petits Johnny qui éclosent inlassablement depuis 50 ans et passent leur prime jeunesse déguisés en idole des jeunes. Car autrement, la cote des prénoms suit de près la courbe d’audience des séries américaines.

Il n’est pas nécessaire d’avoir lu Bourdieu pour comprendre qu’un prénom en dit bien plus sur vous que la couleur de vos chaussettes ou de votre bulletin de vote. Car si ces dernières relèvent de l’acquis, le premier est inné ou presque, à 24 heures près. Difficile de faire croire que vous avez pratiqué le piano et l’équitation toute votre enfance, et que vous avez écumé rallyes et pèlerinages quand vous vous appelez Brandon ou Kimberley. A tort ou à raison, on se dira plutôt que vous étiez abandonné devant la télé pendant que papa était parti encourager maman qui participait à un concours de T-shirts mouillés.

Une étude sociologique approfondie – qui m’aura bien pris cinq minutes – permet de constater une répartition en trois grandes catégories : les prénoms à connotation moyenâgeuse plaisent aux familles qui écrivent « tradition » avec un T majuscule, les prénoms normaux (Nicolas, Basile, Marc, François, Élisabeth, etc.) ont la préférence des familles équilibrées, croyantes mais peu pratiquantes, à la fois ouvertes à la modernité et moralement intègres, et les prénoms « TV shows » sont l’apanage de ceux qui tendent vers ce que les américains qualifient crûment de «white trash ».

Vous aurez compris qu’il ne s’agit pas, ici, de faire du pacorabannisme : ce n’est pas le prénom que l’on donne au gamin qui conditionnera sa future carrière. Appelez le vôtre Fidel, Bernard-Henri ou Sylvio : vous n’aurez aucune garantie de résultats tangibles. Non, mais si, d’une manière ou d’une autre, nous avons à porter le poids de l’éducation reçue, notre prénom amplifie cet héritage en le rendant ostensible, comme dirait l’autre.

Maintenant, chacun fait ce qu’il veut, c’est pas mes oignons, à vrai dire. Tout le monde s’en tape désormais, même l’état-civil qui refusait jadis, les Cerise ou Framboise. D’ailleurs, reviendrait-on à l’insupportable pratique d’antan, celle qui faisait que l’Etat républicain ne validait que les appellations issues du who’s who des saints catholiques, qu’il y aurait moyen de moyenner. Car qui peut jurer qu’un jour le Roi de la pop ne sera pas canonisé, en même temps que la princesse Diana, Sœur Emmanuelle et Yves Saint-Laurent ?
Avec tous les abats qu’on lui a retirés du ventre lors des autopsies successives, on pourra fournir des dizaines d’églises en reliques de première catégorie…

Bal des nazes à Hénin-Beaumont

108

« Qui voit les rives de la Seine voit nos peines ! » s’exclamait Guy Debord dans Panégyrique, déplorant la destruction d’une ville en temps de paix par l’urbanisation spectaculaire-marchande. « Qui voit le résultat des élections à Hénin-Beaumont aussi… », pourrait légitimement dire le militant de gauche un peu lucide, à la lecture des résultats d’élections municipales qui ont vu jusqu’à la caricature les ravages de l’antifascisme sociétal quand il s’agit de lutter contre le Front National.
Pendant plusieurs mois avec un crescendo pratiquement orgasmique, l’empire du bien et de la bonne conscience s’est déchainé dans cette ville du bassin minier dont le premier des problèmes est pourtant un chômage à vingt pour cent et des impôts locaux qui se montent à 2800 euros par an pour une maison de mineur.

Qu’importe si le précédent maire PS est en prison pour corruption présumée, qu’importe si sa gestion héliogabalesque a ruiné ses administrés, qu’importe s’il avait été soutenu comme la corde soutient le pendu par un Parti socialiste qui avait dépêché en renfort la pugnace et excellente Marie-Noëlle Lienemann en première adjointe avant de la renvoyer à ses chères études béthunoises pour d’obscures raisons d’appareil.

Qu’importe, encore, si le même parti socialiste local dont on se demande si la proximité géographique avec le parti socialiste wallon, le plus corrompu et le plus bête d’Europe, n’est pas la principale inspiration, a trouvé le moyen une fois de nouvelles élections inévitables, de ne soutenir aucune liste. Oui, vous avez bien lu, c’est à peine quelques jours avant le premier tour que Martine Aubry dans un sursaut d’indignation et de clairvoyance a appelé à voter pour la liste Ferrari, arrivée d’ailleurs en troisième position. Et quelle liste… Menée par un jeune radical de gauche, elle unissait dans un « front républicain » des communistes, des modèmistes et des militants du MJS. Même pour le vieil amateur de particularismes électoraux que nous sommes, nous n’avions jamais vu attelage plus baroque : des démocrates chrétiens qui ne représentent qu’eux-mêmes dans le bassin minier, de jeunes sociaux-démocrates écœurés par le cynisme attentiste du parti de leurs aînés et un PCF ronchon mais discipliné et ne ménageant pas ses efforts, comme d’habitude.

Qu’importe, encore, si ce « front républicain » ne voulait plus rien dire politiquement puisque, de fait, une liste divers-gauche menée par un viré du PS, une liste Verte, une liste du NPA, une liste UMP (nous la mettons après le NPA parce qu’en l’occurrence, ils sont encore plus groupusculaires dans le paysage héninois.) se présentaient sur les rangs.

Oui, qu’importe puisque toute cette incohérence, qui sentait les rancœurs recuites et les combinazione de terrils, se justifiait d’elle-même. N’est-ce pas, en face, ce n’était pas un adversaire politique, c’était le Mal incarné, c’était la Walkyrie bretonne, la fille de la Bête Immonde, Marine Le Pen en personne.

On évitait d’insister sur le fait qu’elle n’était jamais que le numéro deux sur la liste et que le numéro un Steeve Briois est un local pur jus, un vrai « boyau rouge », petit-fils de militant communiste. Oui, on évitait d’insister parce que dans le genre révision déchirante, certains à gauche auraient été obligés de reconnaître que ce dont à d’abord besoin la classe ouvrière ce n’est pas du mariage homosexuel, de la légalisation du cannabis, du vélib ou de spectacles post-brechtiens mais de travail, de salaires décents, de nouveaux droits contre le talon de fer d’un capitalisme déculpabilisé.

Et le bal des nazes a recommencé. The same old story. Plutôt que d’expliquer que Marine Le Pen ce n’était pas Hitler, même pas Doriot mais tout banalement Sarkozy en pire, l’argumentaire a été moral, jamais politique. Pendant que le Front national distribuait ses tracts sans avoir besoin de forcer la note, procédant avec une empathie manifeste pour le populo (qu’elle soit feinte ou non n’est pas le problème), une certaine gauche de la culture, appelée à la rescousse, voulait faire croire que les SS cernaient la ville. On a même, entre les deux tours, appelé Dany Boon à la rescousse. C’est vrai quoi, une région si sympathique, qu’une comédie régionaliste dégoulinante de bons sentiments a rendu nationalement célèbre, risquait de retrouver sur son si sympathique visage l’affreux point noir d’une mairie frontiste.

Non, ce n’était pas possible.

Et ce ne le fut pas. Marine Le Pen a été battue. De 500 voix. Il semblerait d’après nos informations que la population ait surtout mal perçu l’intervention entre les deux tours de colleurs d’affiches frontistes venant d’autres régions, parfois lointaines. Ce serait cette intrusion, beaucoup plus que le très pâlichon Daniel Duquenne, son adversaire, qui aurait emporté le morceau.

Le Front National a d’ailleurs déjà posé un recours. La farce continue. La gauche a emporté une victoire à la Pyrrhus, ce qui ne lui évitera se remettre en question. Comme d’habitude à Hénin-Beaumont.

Et dans toute cette histoire, nous n’avons plus qu’une seule certitude : le cadavre est ch’ti.

L’islam de France n’a pas de pétrole

474

Je prends peut-être mes désirs pour des réalités, mais j’ai l’impression que des choses changent. Des petites choses ou les petits signes de plus grandes qui semblent annoncer un redressement de l’échine nationale, comme un agacement français devant le manque de reconnaissance de notre hospitalité occidentale.

On est de plus en plus nombreux à freiner dans la descente en disant que le Moyen Âge on connaît, on en vient. Si on a mis quelques siècles à se délivrer de l’emprise de nos religions, ce n’est pas pour se laisser emmerder par celle des autres !

Ces temps-ci, l’Elysée donne le ton et à l’entendre je ne regrette pas mon vote.

En mai dernier, un déjeuner y était prévu pour le Premier ministre irakien et, pour lui faire honneur, on avait monté des caves les crus les plus renommés. C’était à l’évidence surestimer la courtoisie de notre hôte et sous-estimer son islamicité puisque Nouri Al Maliki exigea que la « boisson impie » fût retirée de la table. J’ignorais que l’islam interdît de voir du vin.

Sur ce coup-là, la diplomatie française, peut-être unie par le mot d’ordres « Touche pas à mon litron ! » a été ferme. La fin morale de cette histoire est que le repas fut simplement annulé. Pas de vin, pas de festin !

On aurait pu envoyer l’officiel de Bagdad manger dans un kebab et inviter à sa place un Irakien chrétien, juif ou idolâtre et pourquoi pas ivrogne et sodomite, mais on ne peut pas tout attendre du sommet de l’Etat.

On peut néanmoins apprécier le geste. Le poing sur la table redeviendrait-il un usage français ? On peut s’en réjouir quand on voit l’état de l’Europe soumise aux pressions de l’islam modéré.

L’islam modéré, c’est celui qui exige des tolérances et des droits qui nous rapprocheraient de la charia, mais qui n’a pas le pouvoir de les imposer. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan nous prévient : « L’expression islam modéré est laide et offensante, il n’y a pas d’islam modéré. L’islam est l’islam. » On est contents d’apprendre que les égorgeurs font partie de la famille.

Bien sûr, il y a des extrémistes dans toutes les religions. Mais il ne me viendrait pas à l’idée de mettre dans le même sac Baruch Goldstein et Woody Allen. Mais il ne s’agit pas ici de mettre les hommes dans des sacs. Après tout, ce ne sont pas des femmes. C’est tout l’enjeu de la polémique qui est en train de naître en France sur le port de la burqa. Pouvoir en parler est assurément un progrès par rapport à l’époque où on regardait ailleurs pour ne pas voir la barbarie barbue en marche – il ne fallait pas stigmatiser. Mais elle montre que le niveau du débat public est tombé bien bas. On n’est pas très loin du moratoire sur la lapidation concédé par un autre modéré[1. Pour ceux qui l’ont oublié, il s’agit de Tariq Ramadan, interpellé par Nicolas Sarkozy sur un plateau de télévision.]. Est-ce là l’enrichissement que nous promet le multiculturalisme ?

Sur les plateaux de télé, aucun musulman extrémiste ne vient défendre cette pratique exotique qu’est la burqa, les modérés s’en chargent très bien. Vous avez peut-être vu comme moi Mahmoud Doua, professeur en anthropologie du monde arabo-musulman à l’université Bordeaux-3, déclarer à « C’ dans l’air » que la burqa le choque mais qu’il défendra jusqu’au bout les droits de l’homme (sur la femme ?). Son argument décisif est un bel exemple d’arnaque dans la négociation : « Si vous acceptez l’extrême dévoilement, vous devez accepter l’extrême voilement. » Ben voyons ! Ça semble logique comme l’algèbre qu’ils ont inventée mais nous, on a les Lumières. D’abord « nous » (puisqu’on est entrés, semble-t-il, dans un dialogue entre « eux » et « nous ») n’autorisons pas l’extrême dévoilement. Si Mahmoud entend par là nudité, chez « nous », la nudité est interdite dans la rue. Il y a des camps pour ça, ça s’appelle le nudisme. Devrait-on, par souci d’égalité de traitement, ouvrir des camps pour y concentrer ceux et celles pour qui le port de la burqa est devenu un besoin vital ? Evidemment, ce n’est pas ce que l’islam modéré demande, il réclame le droit de sortir masqué partout.

L’arnaque ne s’arrête pas là. Que penserait-on d’un visiteur débarquant du Moyen Âge au sens propre et qui nous dirait : « Nous nous méfions des femmes libres, et par principe de précaution, nous les brûlons comme sorcières. Vous les aimez plus que le Bon Dieu, le Prophète et toute la smala. Nous les envoyons en enfer. Vous les laissez devenir Première dame de France[2. L’islamiste britannique Anjem Choudary écrit sur son blog : « Sarkozy doit être content d’être marié à une prostituée qui exhibe son corps au monde en croyant bien se conduire, mais qu’il lui est rappelé qu’un musulman n’est pas ce genre d’homme superficiel et dépravé. »]. Coupons la poire en deux, foutons-les dans des sacs » ? Vous la voyez, l’arnaque ? Voilà comment, au nom de la liberté, à l’abri de la laïcité, en vertu des droits de l’homme qui, une fois n’est pas coutume, s’appliquent aux femmes, dans un souci d’apaisement et une recherche d’équilibre, on nous ramène lentement mais sûrement de la lumière à l’ombre. Voilà comment avance la régression.

Qu’est-ce qu’on négocie et pourquoi ? Qui, de l’islam ou de la France, a le plus besoin de l’autre ? Qui doit s’adapter à l’autre ? Quand on accueille Khadafi, il n’a que le respect qu’on doit à son pétrole. L’islam de France n’en a pas. Alors, ses idées, disons qu’on n’est pas preneurs. À force d’entendre qu’ils sont une « chance pour la France », certains ont fini par le croire. Rappelons-leur que la chance, c’est la France. Pour tout le monde. À condition qu’on la défende. Sans négocier. Il n’y a rien à négocier.

La burqa n’est pas tolérable, donc on ne l’interdira pas

32

Tous ceux qu’inquiète la multiplication des prisons portables en climat tempéré auront été ravis en lisant la déclaration sans nuance d’Anne Hidalgo, première adjointe de Bertrand Delanoë, concernant la burqa dans le Parisien Dimanche d’hier : « En tant que féministe, je considère que la burqa n’est pas qu’une question de vêtement : c’est une violence très forte faite aux femmes. Notre République ne doit donc pas considérer comme tolérable le port de la burqa. » Mais attendez avant d’applaudir, parce qu’elle conclut fort peu logiquement en ajoutant aussitôt : « Pour autant, je ne suis pas sûre qu’il soit opportun de passer tout de suite par la loi. Il faut d’abord faire beaucoup de pédagogie. » Dommage que la même politique non-répressive n’ait pas prévalu en matière de contraventions automobiles. Mais c’est sans doute beaucoup plus grave…