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L’indigné chronique

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Depuis qu’il a prononcé un discours brillant écrit par Bruno Le Maire à l’ONU contre la guerre en Irak, Dominique de Villepin est reçu un peu partout comme un sage diplomate. Ces derniers jours, l’ancien Premier ministre est tout mielleux avec le régime algérien, alors qu’il n’avait pas de mots assez durs pour critiquer Israël.


Dominique de Villepin nous rejoue régulièrement son discours à l’ONU contre l’invasion de l’Irak. Sauf que ses causes ne sont plus les mêmes et que son indignation tombe à plat à force d’adopter toujours le même registre dans le domaine international. Les autres sont mauvais, moi je saurais comment faire…

Doué… pour le verbe

Le problème est qu’aussi bien pour Israël et les Palestiniens que pour les rapports de la France avec l’Algérie, il sermonne, gronde, proteste, dénonce mais au bout du compte, quand on attend un conseil, une mesure opératoires, rien ne vient jamais.

Il est très doué pour le verbe, les principes, les leçons mais il ne donne jamais à ceux qu’il houspille du haut de son passé et de son expérience unique le mode d’emploi. On brûle d’envie de lui demander ses recettes puisque, paraît-il, dans sa tête la solution est prête et qu’il suffirait de la mettre en œuvre. Le souci est qu’il nous fait languir et que derrière l’expression flamboyante, il y a le vide. Sauf à considérer que réclamer une solution diplomatique pour les conflits dans le monde constitue une originalité qui mérite d’être applaudie.

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Dominique de Villepin est un indigné chronique qui avec ses propos enflammés est devenu, juste derrière Jean-Luc Mélenchon, le préféré de LFI même si cette posture avantageuse ne lui procure pas le moindre impact électoral.

Sa nouvelle cible est le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau qui a le grand tort de ne pas tendre l’autre joue à l’Algérie et de vouloir instaurer un rapport de force avec ce pays qui se moque de la France en nous renvoyant systématiquement les Algériens indésirables chez nous, comme récemment une personne rejetée à dix reprises.

https://twitter.com/DestinationTele/status/1893716772139782507
Dominique de Villepin sur BFM TV le 23 février 2025.

Question d’honneur

Le fait que Bruno Retailleau « se fiche comme de sa première chemise » de ce que l’ancien Premier ministre lui assène ne rend pas plus tolérable ce propos qui fragilise la position française et permet à l’Algérie de se réjouir alors qu’on aurait attendu de la part de Dominique de Villepin sinon une approbation, du moins le silence.

Il est facile de deviner, derrière cet empressement à prendre le contre-pied des autorités officielles, non seulement l’effet d’une personnalité qui se sentirait offensée si elle partageait un point de vue commun mais la volonté forcenée de demeurer dans la lumière.

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Bruno Retailleau, ce ministre qui est contraint de sortir de son domaine, de s’occuper de ce qui ne le regarde pas avec l’Algérie, est insupportable pour Dominique de Villepin puisqu’il est omniprésent et en pointe dans cet affrontement dont on oublie trop vite qu’il concerne un écrivain scandaleusement emprisonné, Boualem Sansal.

Bruno Retailleau supplée un président de la République qui dialogue avec le président Trump sur l’Ukraine et qui apparemment demeure à distance de l’arrogance algérienne. Il se substitue aussi à un ministre des Affaires étrangères qui ne semble guère actif sur ce terrain.

Il faut le féliciter de tenir à sa manière la dragée haute au pouvoir algérien. On comprend bien que la réserve, voire la mollesse de la France résultent en l’occurrence d’influences commerciales, économiques et financières qui n’aspirent pas à une brisure totale avec l’Algérie et à la révision des accords de 1968. Mais il n’empêche que Bruno Retailleau sauve l’honneur quand Dominique de Villepin le relativise.

On ne donne pas une prime aux bourreaux avant qu’ils aient été châtiés.

Trump et le protectionnisme: mettre fin à la passivité européenne

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Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche rebat les cartes de l’économie mondiale. Si l’on peut saluer son patriotisme, il ne faut pas oublier qu’il incarne un protectionnisme assumé et une approche purement transactionnelle des relations internationales. Son unique boussole : l’intérêt américain, quitte à fragiliser ses partenaires. Face à cette nouvelle donne, l’Europe et la France ne peuvent plus se permettre l’attentisme : il est temps d’anticiper, de s’adapter et de défendre nos intérêts avec la même détermination.

Dès son retour, Donald Trump a signé un décret réaffirmant sa politique commerciale « America First ». Révision des accords, enquêtes sur les déficits commerciaux et potentiels tarifs douaniers globaux : rien n’est exclu pour contraindre les partenaires internationaux à plier. Pour l’Europe, le message est clair : les négociations avec les États-Unis ne seront possibles qu’au prix de concessions importantes. Les lois antidumping et les droits compensateurs, visant à protéger les industries américaines contre des produits importés jugés déloyalement compétitifs, pourraient également être durcis. Ces outils permettent aux États-Unis d’imposer des barrières protectionnistes draconiennes, frappant de plein fouet des secteurs européens déjà affaiblis, comme l’acier et l’aluminium.

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Les implications du protectionnisme américain vont bien au-delà des tarifs douaniers. L’Inflation Reduction Act (IRA), adopté sous l’administration Biden mais qui pourrait être pleinement exploité sous Trump, illustre parfaitement les risques économiques pour l’Europe. Ce texte, grâce à ses subventions et incitations fiscales massives, draine les investissements étrangers vers les États-Unis à un rythme alarmant. En Allemagne, 10 % des entreprises envisagent de relocaliser leur production outre-Atlantique, un chiffre qui grimpe à 23 % dans l’automobile. En France, l’agroalimentaire, le luxe ou l’automobile pourraient subir des pertes irrémédiables en compétitivité. Ces départs massifs dévastent notre tissu industriel et renforcent notre soumission économique. Face à cette situation, l’Europe ne peut ni se diviser, ni rester dans l’inaction.

La réindustrialisation doit devenir une priorité absolue. Sans industrie forte, souveraineté et compétitivité ne peuvent être garanties. Il ne s’agit pas simplement de rapatrier des usines : c’est toute une chaîne de valeur stratégique qu’il faut reconstruire, en mettant l’accent sur les secteurs essentiels tels que l’énergie, l’automobile et l’électronique.

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L’Europe et la France ne peuvent plus se permettre des demi-mesures. Diversifier nos partenaires commerciaux est indispensable pour sortir de notre dépendance excessive. Si Trump impose ses règles, notre réponse doit être ferme et stratégique : multiplier les alliances commerciales qui servent nos intérêts et ne plus céder à des pressions déséquilibrées. L’échec du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP) en 2016 illustre les limites d’une Europe qui négocie en position de faiblesse et de manière désunie : si l’administration Trump impose des droits de douane aux médicaments et au luxe français mais épargne les machines-outils et l’automobile outre-Rhin, les Allemands auront-il le désir de riposter aux côtés de la France ?

Enfin, il est impératif de donner à nos entreprises les moyens de riposter. Des outils fiscaux agressifs doivent être mis en œuvre : exonérations totales pour les secteurs stratégiques, investissements massifs dans la recherche et l’innovation, et un soutien sans faille à nos PME. Plutôt que de pénaliser, libérons : c’est en levant les entraves et en créant un environnement propice à la croissance que nous restaurerons notre compétitivité. Nous ne manquons pas d’argent mais de stratégie. Arrêtons par exemple de subventionner les lubies de la transition énergétique et relançons en contrepartie Astrid pour garantir une électricité à bas cout à nos entreprises

C’est un choix simple : soit nous nous relevons, soit nous nous laissons écraser. Fort ou mort.


Les Horaces sont un cercle de hauts fonctionnaires, hommes politiques, universitaires, entrepreneurs et intellectuels apportant leur expertise à Marine Le Pen, fondé et présidé par André Rougé, député français au Parlement européen

Alphonse défonce le chômage

Découvrez les aventures d’Alphonse, un chômeur « convaincu » et extrêmement maladroit, qui tente tant bien que mal de trouver un travail, du plus farfelu au moins commun.


Alphonse, une bande dessinée hilarante et déjantée, du scénariste Philippe Pelaez et du dessinateur Pascal Valdés, raconte les aventures du héros éponyme, chômeur invétéré, ouvert à des emplois improbables… Alphonse, avec sa bonne tronche de looser, est au chômage depuis des années. Il commence à s’impatienter ; ses proches aussi. On lui a dit qu’il suffisait de traverser la rue pour trouver du boulot. Alors, depuis, il épluche les petites annonces, bien décidé à dégotter un taf, quel qu’il soit. Même le plus singulier, voire le plus improbable.

Renifleur d’aisselles

Ce n’est pas triste ! Le voilà qu’il devient faiseur de file d’attente, nettoyeur de scène de crime, renifleur d’aisselles (oui, vous avez bien lu ; il est employé par une marque de sticks de déodorant qu’il teste en flairant le dessous des bras de sportifs en sueur ! Répugnant !), branleur de dindons (« (…) ce sont des animaux qui ont un taux de reproduction très faible et dont la semence est très précieuse. Il faut… ben il faut les aider, quoi ! »), sexeur de poussins (« C’est simple : les mâles dans le bac de droite, et les femelles dans celui de gauche »), thanatopracteur, enseignant d’anglais à de dangereux criminels, etc.

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Il essaie, essaie encore, mais à chaque fois ça ne marche pas ; il perd toutes ses places étonnantes, fascinantes, merveilleuses. Il faut avouer qu’il est nécessaire d’avoir le cœur bien accroché. De plus, Alphonse picole (il se gâche la santé aux anis) ; il est fichtrement maladroit et bigrement malchanceux.

Quand il branle les dindons, il finit dans l’étable avec le taureau qui se met à le poursuivre. Quand il détermine le sexe des poussins, il est tellement absorbé par sa tâche, qu’il éclate les pauvres bestioles contre le mur. Lorsqu’il s’initie aux robots et à l’IA, il prend tellement la tête des machines avec des questions à la noix, que celles-ci se mettent à chauffer et un terrible incendie se produit dans l’usine.

Sacré Alphonse ! Il est marrant, touchant, désarmant. Une manière de Mr Bean. A noter que si le scénariste Philippe Pelaez déborde d’expérience (il est l’auteur de nombreux albums chez Bamboo, Dargaud et Fluide Glacial), le dessinateur Pascal Valdés dessine là sa première bande dessinée. Et le tout est très réussi. On rigole, oui, fort souvent, mais on réfléchit aussi sur le cynisme assez pourri du monde de l’entreprise dans le système capitaliste. Merci Alphonse !


Alphonse, Pascal Valdés et Philippe Pelaez ; Fluide Glacial ; 56 p.

Rencontre Trump – Macron: une réussite plus médiatique que diplomatique

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Alors que le président Macron cherchait hier à Washington à obtenir des garanties de sécurité pour l’Europe, Donald Trump a maintenu une approche unilatérale, minimisant l’engagement américain. Le président américain se dirige à vive allure vers un cessez-le-feu. Mais un cessez-le-feu n’est pas forcément la paix. Analyse.


Donald Trump et Emmanuel Macron se sont montrés très souriants lundi 24 février à Washington. Les deux hommes s’apprécient depuis plusieurs années, n’en déplaise aux admirateurs français du Donald qui ont relayé dans la journée les éléments de langage du Kremlin sur un prétendu « mépris » de l’Américain qui aurait refusé d’accueillir son homologue français sur le perron de la Maison-Blanche. C’était évidemment faux.

En réalité, Donald Trump aura même multiplié les marques d’amitié envers son « ami Emmanuel ». Il a, excusez du peu, affirmé que le travail « formidable » d’Emmanuel Macron pour reconstruire Notre-Dame n’avait pas été assez reconnu à sa juste valeur, que le français était la plus belle langue du monde, puis il a fait diffuser une magnifique vidéo sur la page X de la Maison-Blanche vantant le « plus vieil et fidèle allié de l’Amérique ».

Le président Duda aurait bien aimé que l’engagement indéfectible de la Pologne envers l’Amérique soit récompensé de la sorte, lui qui a passé deux heures à attendre dans un cagibi que Donald Trump veuille bien le recevoir une petite dizaine de minutes. Idem pour Georgia Meloni qui n’a pas pu s’empêcher, mesquine, de diffuser une vidéo à l’issue de la rencontre… où Emmanuel Macron ne figurait pas, coupé comme on le ferait sur une vieille photo avec un ami désormais honni. Et le tout en flattant « à l’italienne », comme dans un opéra-bouffe de Rossini, le président américain…

Oui, la réussite médiatique fut au rendez-vous. Les jalousies exacerbées des puissances européennes intermédiaires en furent la meilleure preuve. Ils ne devraient pas se vexer. La réalité est qu’à l’image de Vladimir Poutine, Donald Trump ne considère vraiment comme importantes en Europe que deux nations : la France et la Grande-Bretagne. Pays dotés de l’arme nucléaire et anciens Empires aux histoires glorieuses, ces deux nations ont l’heur de plaire au président américain qui ne les gausse jamais avec vulgarité.

Mais au-delà des belles images et des démonstrations d’amitié, qu’a donc gagné Emmanuel Macron ? Peut-on se satisfaire de cet exercice d’autosatisfaction où le président est apparu rieur et décontracté, façon buddy du bully ? Pas vraiment, bien qu’il en ressorte aussi quelques motifs d’encouragement.

Un vote majeur à l’ONU

Le fait marquant du jour se produisit non pas à Washington mais à l’ONU. Nous avons assisté à un moment historique et tragique. Pile trois ans après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les Etats-Unis se sont alliés à la Russie lors de votes inédits et lamentables portant sur la résolution du conflit par une paix expresse, sans condamnation de Moscou, ni même défense de la souveraineté de l’Ukraine, ou garanties de sécurité quelconques. Russes et Américains sont désormais ensemble contre le droit international le plus élémentaire, renforcés de la Hongrie et d’Israël, et alliés à des pays aussi recommandables que la Corée-du-Nord, le Soudan, le Burkina-Faso ou encore Haïti, le Niger et le Mali. Penser que les Etats-Unis sont contre l’avis de tous les pays européens, à l’exception de la Macédoine-du-Nord, est tout de même sidérant.

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Quand Macron s’amusait à « checker » la main de Donald Trump et écarter les jambes sur un gros fauteuil de la « White House », les Américains faisaient eux savoir quel était leur véritable avis sur le conflit à l’ONU. Les quelques éléments présentés comme remarquables de la part d’Emmanuel Macron relèvent du strict nécessaire et du strict minimum. Il a effectivement repris Donald Trump sur l’inversion des responsabilités qu’il fait à propos de ce conflit, mais il s’agit d’une position de principe jamais démentie. En quoi ce rappel avait-il un caractère spécifique ? N’est-ce pas une attitude élémentaire pour une puissance comme la France ? Pendant ce temps, Zelensky, conscient des enjeux, se montrait furieux et n’hésitait pas à dénoncer les anciens alliés prêts à renoncer à leur honneur pour quelques gains financiers. Les différentes piqûres de rappel du président français auront eu au moins le mérite d’être dites en face, c’est à saluer.

Mais ne soyons pas naïfs, ce qui se cache derrière ce théâtre, c’est le vide. Comme le disait Jean Baudrillard, « Ainsi le simulacre n’est pas ce qui cache la vérité, mais ce qui cache l’absence de vérité ». Emmanuel Macron a correctement tenu son rang sans s’affirmer comme un grand politique. Il n’est pas Charles de Gaulle, il est un peu rusé mais ce ne sera pas suffisant.  Il doit faire mieux et plus. Il ne doit pas hésiter à affirmer que l’Amérique et la Russie ne peuvent pas passer par-dessus l’Europe. Il doit le leur dire et le dire à toute l’Europe. Notre alliance historique avec l’Amérique, rappelée par Donald Trump, commande aussi de l’exigence.

Quand un président français se rend aux États-Unis dans un moment aussi grave, il doit être habité par les mânes de Saint Louis, Clemenceau, Charlemagne, de Gaulle, etc. Il est à ce moment-là l’incarnation de la France, qu’on le veuille ou non. Pire, il représentait même l’Europe. Une relation doit nous apporter du concret. Et qu’a-t-on eu de ce côté-là ? Le droit de pouvoir envoyer des troupes de réassurance si une paix est signée. Soit précisément ce que commandait l’Amérique. Nous proposons une assurance pour une vente dont nous ne connaissons ni les termes ni l’objet. Du jamais vu. Nous nous engageons à payer sans rien récupérer en retour. Et maintenant le négociateur en chef, le roi du deal, en fait une « concession ». Mais la vraie demande c’est que l’Europe négocie et soit à la table, qu’elle propose son propre plan de paix bien plus exigeant car la situation opérationnelle l’y autorise. C’est ce que fait Erdogan avec son propre plan de paix ou quand il propose à l’Europe son armée contre son entrée dans l’Union.

Vers un cessez-le-feu abusivement présenté en paix

Avant de signer une paix, il faut un arrêt des combats. Soit un cessez-le-feu. Et un cessez-le-feu repose sur des garanties de sécurité pour produire des effets. C’est sur cette ambiguïté sémantique que jouent les différents protagonistes de l’affaire ukrainienne.  Concluons par cette phrase un peu grossière du twitto Olivier Barnay : « Donc si je comprends bien, Macron est venu offrir une présence militaire (non belligérante SIC) européenne garantissant un accord conclu entre Trump et Poutine et ratifié sous la contrainte par Zelenski. Si cela se passe ainsi, on est tous gros-jean comme devant. » Gageons que nous n’en sommes qu’aux prolégomènes de la résolution d’une guerre pourtant déjà dramatique et longue… Les Russes ont en tout cas aujourd’hui, grâce à Donald Trump et à l’inconscience des Européens, les cartes en main.

Révolution anti-woke: la conversion surprise de Mark Zuckerberg

L’allégeance du patron de Facebook à Donald Trump a été rapide et totale. En un mois, Zuckerberg a renié tous les fondements idéologiques sur lesquels il a bâti son empire, troquant son statut de paria pour celui de disciple zélé aux avant-postes du mouvement MAGA. Retour sur une vassalisation spectaculaire.


Coup de théâtre. Mark Zuckerberg, petit prince de la tech US, patron préféré des élites démocrates et Grand Inquisiteur qui, il y a tout juste quatre ans, bannissait le président Trump de ses réseaux sociaux, vient de prêter bruyamment allégeance au nouveau maître de la Maison-Blanche. Le fondateur de Facebook a réformé, au pas de charge, le titan META (Instagram, Threads, WhatsApp, Facebook), dont les services sont utilisés par rien de moins que la moitié de la population mondiale. En un peu moins d’un mois, le dernier bastion du néolibéralisme progressiste est tombé. Avec tout le zèle des nouveaux convertis, l’icône de la Silicon Valley a aligné META sur MAGA (« Make America Great Again », ndlr).

Masculinisme, dérégulation, désir de grandeur : retour sur un numéro de haute voltige dans la nouvelle ère d’un Trump plus véloce que jamais, au sein d’une quatrième révolution industrielle.

Du relooking à l’apostasie, récit d’une conversion express

Zuckerberg revient de loin. Le quarantenaire athlétique assis au premier rang de la cérémonie d’investiture du 47e président des États-Unis ce 20 janvier 2025 n’a plus grand-chose en commun avec l’homme qu’il était il y a six mois. De son apparence jusqu’à ses convictions, la mue est impressionnante. Celui qui se tient aux côtés d’Elon Musk (X, Tesla), Sundar Pichai (Google), Tim Cook (Apple), Jeff Bezos (Amazon) et de Sam Altman (OpenAi) ne dépareille pas parmi ses pairs. Exit l’air intello, le sweat à capuche, la coupe Playmobil et le teint blafard. Avec ses cheveux mi-longs, hâlé, musculeux, costumé, masculin, Mark Zuckerberg a désormais le look du « tech bro ». Allant même jusqu’à pousser le vice du « male gaze » (œillade plongeante), dans le décolleté de la fiancée du patron d’Amazon Lauren Sanchez. Calcul ou maladresse ? L’œillade de l’ancien chantre du puritanisme progressiste devient ce jour-là l’une des anecdotes les plus commentées de la Toile.

Dans son livre Save America, paru en septembre dernier, Donald Trump accusait le patron de Meta d’avoir influencé l’élection de 2020 en faveur de Joe Biden et lui promettait la « prison à vie » s’il tentait de s’ingérer dans sa campagne à venir. Que s’est-il passé pour qu’en l’espace de six mois, Zuckerberg troque son statut de paria auprès de l’aréopage trumpiste pour celui de disciple zélé, aux avant-postes du mouvement MAGA ?

Ce n’est pas son changement de look ni le million de dollars donné pour l’investiture du président républicain qui ont permis au patron de Meta de se frayer un chemin aux premières loges du sacre de Donald Trump. Sa présence est l’aboutissement d’un chemin de Damas parcouru tambour battant dès les premiers jours de la nouvelle année.

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La volte-face tonitruante du titan de la tech

Tout commence à Mar-a-Lago, la résidence personnelle de Donald Trump. Trois semaines après l’élection présidentielle qui a consacré la défaite du camp démocrate, le président élu convie Zuckerberg à dîner. De cette réunion des contraires, rien ne filtre. Seule une déclaration d’un porte-parole trumpiste témoigne du vif réchauffement entre les deux géants : « Mark était reconnaissant d’avoir été invité à rejoindre le président Trump et d’avoir eu l’occasion de rencontrer les membres de son équipe. » Un mois plus tard, « Mark » orchestre publiquement les étapes de sa vassalisation au nouveau régime. Un ralliement tonitruant, pavé de reniements majeurs.

Début janvier, c’est sur son rival historique Elon Musk que Zuckerberg prend exemple. En annonçant la suppression de son programme de vérification des faits (« fact-checking ») et l’adoption de notes de la communauté, Zuckerberg se base sur les méthodes de X pour combattre « la censure » et revenir « aux sources de la liberté d’expression[1] ». À l’instar de son aîné, il licencie à tour de bras : 3 600 employés, soit 5 % des effectifs de META sont mis à la porte, dans un souci de « performance ». Avant de faire cap sur le Texas, où le patron de X et Tesla déplace déjà ses activités. Dans cet État républicain pionnier de l’anti-wokisme, « on s’inquiète moins de la partialité de nos équipes », déclare-t-il.

Dans la foulée, Zuckerberg renouvelle son entourage en procédant à des nominations pour le moins détonantes. Le très conservateur chef de cabinet adjoint de George W. Bush, Joel Kaplan, devient directeur des affaires mondiales du groupe et succède ainsi à Nick Clegg, lui-même ancien chef du parti des Libéraux-Démocrates britannique. Dana White, président de la plus grande ligue de MMA au monde et ami intime de Donald Trump, est quant à lui coopté au sein du conseil d’administration de META.

Immédiatement, de nouvelles réformes sont impulsées pour aligner les objectifs de META sur la philosophie du nouveau président. En une poignée de décisions foudroyantes, reléguant à la poubelle la symbolique de l’ancien régime et ses principales politiques sur la liberté d’expression et la discrimination positive, la charpente néoprogressiste de la giga-entreprise est détruite.

Ainsi, les thèmes « transgenres » et « non binaires » sont retirés de son application de chat Messenger et les bureaux META de la Silicon Valley, de New York et du Texas sont sommés de retirer les distributeurs de tampons mis à disposition dans les toilettes pour hommes.

Celui qui avait critiqué les décrets de Trump sur l’immigration lors de son premier mandat fait signer à son nouveau directeur des affaires mondiales un communiqué annonçant la fin des restrictions sur « des sujets tels que l’immigration, l’identité sexuelle et le genre, qui font l’objet de nombreux débats et discours politiques ».

Last but not least, Mark Zuckerberg met fin, avec effet immédiat, à tous les programmes de discrimination positive, anticipant ainsi le décret pris en ce sens par le président Trump le premier jour de son nouveau mandat. Une véritable révolution dans le recrutement des personnels, la formation interne ou la sélection des fournisseurs.

En l’espace de quelques jours, l’une des plus grandes entreprises du monde a effectué un virage à 180°. Pour légitimer son inscription dans la mouvance MAGA, il ne reste plus à notre néotrumpiste qu’à obtenir l’assentiment des fans du président. Pour ce faire, le baron de la tech a choisi la plateforme de Joe Rogan, podcasteur le plus écouté des États-Unis qui a déjà reçu Donald Trump en campagne et Elon Musk pour un petit joint d’herbe en direct. À l’antenne, Zuckerberg vante l’« énergie masculine » et blâme l’ancien président Joe Biden pour l’avoir, à coup d’intimidations, contraint à faire remonter sa politique de vérification des contenus « en 1984 », tout en proclamant qu’il « n’est pas normal que certaines choses puissent être dites à la télévision ou au Congrès, mais pas sur nos plateformes ». Les auditeurs boivent du petit lait, Joe Rogan s’esclaffe, et CNN s’offusque. Le tour est joué.

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Le dernier transfuge du nouveau régime

Mais pour rester dans ses bonnes grâces, le nouveau vassal de Donald Trump devra batailler. Si la transformation de sa giga-entreprise est plus que convaincante, son avenir reste inextricablement lié au bon vouloir du nouveau maître de Washington. Encore batailler donc, pour sa survie d’abord, et sa croissance ensuite.

D’énormes défis attendent le patron de Meta au cours de cette année. Notamment dans le cadre de la plainte déposée par la Federal Trade Commission (FTC) en vue d’annuler son acquisition, il y a dix ans, d’Instagram et de WhatsApp, dont le procès s’ouvrira en avril. Sa nouvelle approche de modération des contenus, favorable à Trump, représente à ce titre l’un des nombreux efforts visant à convaincre cette nouvelle administration, qui n’hésitera pas à récompenser ses amis et à punir ses ennemis.

Par-dessus tout, la métamorphose de Zuckerberg s’explique par le nouvel agenda économique du président Trump, qui entend largement distancer la Chine sur le front des nouvelles technologies. Au menu : déréglementations tous azimuts et investissements massifs dans l’IA et les cryptomonnaies. Soit des fortunes colossales en jeu. Quiconque aura l’oreille du président ces prochaines années sécurisera ses approvisionnements en les retranchant des biens et services frappés de taxes douanières, bénéficiera de contrats fédéraux démesurés et… se taillera une place de choix parmi les futurs géants de la quatrième révolution industrielle.

Mark Zuckerberg représente en réalité la figure de proue d’un mouvement de conversion à l’anti-wokisme qui s’achève par son ralliement ultime. Les décisions bruyantes du médiatique patron de Meta n’ont fait que suivre la liste toujours plus fournie des grandes entreprises ayant mis fin à leurs programmes de discrimination positive : McDonald’s, Walmart, Boeing, Molson Coors, Ford, Harley-Davidson, John Deere, Amazon… Même YouTube, filiale de Google, a procédé à de nombreux licenciements de responsables de la surveillance de ses contenus.

Il y a quatre ans, Zuckerberg coupait la tête de Trump sur tous ses réseaux sociaux. En quelques semaines il a rejoint les premiers rangs des zélés du nouveau régime. Reste à savoir comment il survivra dans cette nouvelle ère où les plus grands patrons du monde craignent pour leurs privilèges.


[1] Dans une vidéo publiée sur Facebook le 7 janvier.

Faut-il redouter une Allemagne à son tour ingouvernable?

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Le conservateur Friedrich Merz devrait être le prochain chancelier de l’Allemagne. Il estime que la politique d’Angela Merkel est responsable de la progression de l’AfD d’Alice Weidel, laquelle a obtenu 20,8% des suffrages dimanche. Et il exclut de gouverner avec elle.


Les élections anticipées en Allemagne ont marqué un tournant pour le pays, n’ayant jamais été aussi à droite, mais aussi pour l’Union européenne. Jadis pilier de stabilité et de prospérité, l’Allemagne affronte une crise économique et sociale, une instabilité politique et un chaos migratoire et sécuritaire sans précédent. Une Allemagne ingouvernable pourrait signer la fin de « l’Europe allemande » à un moment où un leadership fort est plus que jamais nécessaire.

Une élection sans réel vainqueur ?

Les élections de dimanche dernier ne devraient pas résoudre les problèmes politiques de l’Allemagne, mais au contraire les aggraver. Depuis le départ d’Angela Merkel, une coalition fragile en « feux tricolores » rassemblant les sociaux-démocrates du SPD, les Verts et les libéraux du FDP gouvernait l’Allemagne. Néanmoins, des tensions ont fait imploser la coalition entre les libéraux tenants d’une ligne pro-business et de rigueur budgétaire opposés aux sociaux-démocrates et aux écologistes partisans d’une atténuation du « frein à l’endettement » limitant l’emprunt public à 0,35 % du PIB. Les différents partis de cette coalition ont payé le prix fort cet échec. Le SPD d’Olaf Scholz a subi une défaite retentissante, qui devrait le pousser vers la sortie. Les libéraux du FDP ne seront plus au Bundestag après avoir fait moins de 5% des voix. Les Verts, bien que mieux lotis, ont perdu du terrain avec 11,6% des suffrages, en nette régression après les 14,7% de 2021.

Seulement, l’alternative majoritaire n’existe pas. Plus précisément, elle n’existe qu’au niveau des électeurs et non des partis. En effet, près de la moitié des Allemands ont voté pour un parti de droite : 28,5% pour la CDU/CSU (droite de gouvernement) et 20,8% pour l’AfD (droite radicale). Pourtant, bien qu’arrivée en tête, la droite n’a pas de majorité au Bundestag. La seule coalition envisageable semble être une alliance forcée avec l’AfD ou le SPD. La première alliance est empêchée par le cordon sanitaire et la seconde, bien que plus probable, ne coule pas de source car l’opposition entre les deux partis s’est récemment accentuée. En effet, ils sont chacun débordés par un parti plus radical les obligeant à tenir des lignes plus dures comme LR et le PS en France. Pour schématiser, il est plus difficile d’envisager Laurent Wauquiez/Bruno Retailleau travailler avec Olivier Faure qu’Alain Juppé avec Dominique Strauss-Kahn.

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Le moteur de l’Europe tombe en panne

Longtemps perçue comme le pilier économique de l’Europe, l’Allemagne fait face à une triple crise : économique, industrielle et sociale. Sur le plan économique, le PIB allemand a reculé de 0,3 % en 2023, puis de 0,2 % en 2024. En comparaison, l’Espagne, considérée comme plus fragile, a affiché une croissance de 2,1 % sur la même période. De plus, la production industrielle allemande a chuté de 1,6 % en 2024, en raison des coûts énergétiques élevés et de la baisse de la demande chinoise, son principal partenaire commercial. Enfin, sur le plan social, l’Allemagne a atteint 6,1% de chômage en janvier, son plus haut niveau depuis 10 ans (hors Covid). Un point de chômage sépare l’Allemagne de la France contre plus de 4 points en 2017 !

Une Allemagne instable et ingouvernable affaiblira l’Europe. Pendant des décennies, l’Allemagne a façonné les politiques européennes, qu’il s’agisse de la gestion de la crise des dettes souveraines ou du plan de relance post-Covid. Les débats cruciaux sur les nouvelles règles budgétaires européennes et la défense commune stagnent en raison de l’indécision allemande. Alors que l’Europe doit faire face à des pressions économiques croissantes, à des États-Unis ou une Chine plus agressifs que jamais et à la guerre en Ukraine, l’absence d’un leadership fort en Allemagne entrave la capacité de l’UE à réagir de manière coordonnée. La campagne électorale nationale allemande a monopolisé l’attention de ses dirigeants, qui délaissent ainsi les enjeux européens. Historiquement moteur de l’intégration européenne, l’Allemagne devient un facteur de blocage, privant l’UE de sa boussole habituelle.

La fin de l’Europe allemande ?

Une Allemagne ingouvernable pourrait signer la fin de l’Europe allemande et offrir une opportunité à la France de prendre le leadership de l’Europe. Seulement, cette idée souffre de deux écueils. D’une part, les Allemands ne semblent pas prêts de revenir sur les erreurs qui ont conduit à faire du pays européen le plus puissant, un pays dépendant. Dépendant sur le plan militaire des Américains, dépendant sur le plan économique et commercial de la Chine et dépendant sur le plan énergétique de la Russie. Or, une Allemagne dépendante conduit naturellement le reste des pays européens d’Europe du Nord et de l’Est à suivre ce même chemin néfaste. D’autre part, la France d’Emmanuel Macron est un pays affaibli par une crise politique marquée par une dissolution qui aura coûté un trimestre de croissance économique et une censure qui aura coûté 12 Mds € aux finances publiques. Sans compter qu’Emmanuel Macron espère que l’éventuelle accession de M. Merz (CDU) à la chancellerie relancera le couple franco-allemand alors que ce dernier soutient l’accord commercial UE-Mercosur.

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Avec une Allemagne et une France en difficulté, d’autres pays prennent l’initiative. La Pologne, dont les dépenses militaires atteignent désormais 5% du PIB, s’impose comme un pilier stratégique en Europe de l’Est, notamment vis-à-vis des États-Unis. L’Italie de Giorgia Meloni affiche une croissance dynamique et s’impose comme un acteur économique de premier plan dans l’UE. Si la ligne économique de l’Union européenne devrait revenir à une ligne plus frugale avec le retour de la CDU, le nouvel équilibre des pouvoirs en Europe suggère que Berlin ne sera plus automatiquement le centre de gravité du Vieux-continent.

Si l’on peut se réjouir de la fin de l’Europe allemande, une Europe sans cap pourrait être pire à l’heure où les grandes puissances se réarment. Si les grands pays européens (France, Espagne et maintenant Allemagne) entrent en instabilité politique permanente alors qu’ils doivent se redresser, la question de dégager une majorité se posera. Du point de vue des électeurs, elle existe dans les trois pays : c’est l’union des droites. D’ailleurs, l’Italie, seul grand pays qui l’expérimente, est devenu en deux ans le nouveau pôle de stabilité de l’Europe… Les prémices d’une nouvelle ère en Europe ?

Poutine, Musk, populistes: Emmanuel Macron voit des méchants partout… sauf à Alger

Emmanuel Macron se rend à Washington pour mettre en garde le président Trump contre l’autocrate Vladimir Poutine. L’épouvantail russe du président français cache-t-il son impuissance face à l’Algérie ?


Le populisme, voilà l’ennemi !

Qui est l’ennemi ? Emmanuel Macron, après avoir déclaré la guerre au Covid, au réchauffement climatique et au populisme, désigne cette fois Vladimir Poutine. Mais le chef de l’État a beau abracadabrer, nombreux sont les Français qui le tiennent pour leur adversaire. Jeudi dernier, Macron a dénoncé « la menace existentielle russe ». Ce lundi soir, il devrait rencontrer Donald Trump à Washington. Il entend lui dire : « Tu ne peux pas être faible face au président Poutine ». Mais que vaut ce conseil venant d’un président qui laisse l’Algérie humilier la France ? Samedi soir, sur TF1, Bruno Retailleau a rappelé que l’expulsion de l’islamiste algérien qui venait de commettre un attentat ou couteau à Mulhouse, tuant un passant en criant « Allah Akbar ! », avait été refusée dix fois par les autorités consulaires, en dépit d’une interdiction de territoire1. Le rapport de force que réclame le ministre de l’Intérieur face à l’Algérie, au nom de la réciprocité, se heurte à l’apathie de l’Elysée. Cela fait 100 jours que Boualem Sansal, qui a entrepris une grève de la faim, est otage du régime. Désigner la Russie comme l’adversaire le plus dangereux, au même titre que « la nouvelle internationale réactionnaire » représentée par Elon Musk, est un artifice dont abuse Macron, désavoué dans les sondages. Comme l’a rappelé JD Vance dans son discours de Munich, « la menace la plus inquiétante pour l’Europe n’est ni la Russie ni la Chine », mais les dirigeants européens indifférents à leurs peuples et à l’immigration de masse.

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Oui, une menace existentielle assombrit la défunte « douce France ». Toutefois, la Russie est utilisée comme un leurre. L’épouvantail dissimule les renoncements intérieurs du chef de l’État, obsédé par sa détestation d’une « extrême droite » fantasmée : y sont précipités les plus lucides des citoyens. Quand le patron du Renseignement territorial, Bertrand Chamoulaud, estime que « les deux risques majeurs pour la cohésion nationale sont le narcotrafic et le séparatisme islamiste »2, il se rapproche davantage de ce qui fragilise le pays. L’islam colonisateur est bien un ennemi. Il a pour dessein, appuyé par l’extrême gauche et la somnolence du pouvoir, de conquérir par la subversion idéologique ou la violence terroriste. Or cette invasion est le produit de la légèreté des dirigeants, qui ont laissé la nation ouverte. Quand Retailleau exhorte de « changer les règles du droit pour protéger les Français », il pointe les politiques qui ont laissé faire, au prétexte d’un « État de droit » intouchable. Macron est comptable de cette débandade, même s’il n’a pas craint de qualifier le meurtre de samedi de « terrorisme islamiste ».

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Menace existentielle

Le poids électoral de la communauté musulmane en France le dissuade d’affronter l’islam politique, représenté notamment par la Grande mosquée de Paris. Les « populistes » sont pour lui des cibles moins dangereuses. Hier soir, les législatives allemandes ont confirmé la victoire des conservateurs CDU/CSU (28,6%) et le doublement du score du mouvement national AfD, Alles Für Deutschland (20,8%) que Macron désigne, avec les mondialistes, comme un parti paria. Le président ne voit pas que c’est lui qui est devenu, par son aveuglement, une menace existentielle pour la France.

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  1. https://www.youtube.com/watch?v=iSXY22JSS3M ↩︎
  2. https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/12/23/pour-le-patron-du-renseignement-territorial-les-deux-risques-majeurs-pour-la-cohesion-nationale-sont-le-narcotrafic-et-le-separatisme-islamiste_6463074_3224.html ↩︎

Les Ballets de Monte-Carlo à Paris

Pour la première fois, les Ballets de Monte Carlo sont à l’affiche du Théâtre de la Ville avec Vers un pays sage, une œuvre qui touche à la perfection.


On peut le dire sans détours : créée pour les Ballets de Monte Carlo par Jean-Christophe Maillot, la chorégraphie Vers un pays sage est un chef-d’œuvre. Ou pour le moins son chef-d’œuvre.

À quoi, dira-t-on, reconnaître un chef d’œuvre ? Ici, à la beauté sereine, à la lumière qui s’en dégage ; au style racé, à la virtuosité raffinée de l’écriture ; à ce sentiment de plénitude, d’accomplissement qui l’accompagne. Au temps aussi : composée il y a près de trois décennies, la pièce est toujours aussi envoûtante, toujours aussi surprenante, demeurant inaltérée. Les œuvres fortes ne vieillissent pas.

Art Déco

Sur des pages magnifiques du musicien américain John Adams, Fearful Symetries, qui sont comme un fabuleux tremplin pour qui sait y répondre chorégraphiquement, et tout en rendant hommage à son père qui était peintre, Maillot a composé un poème épique qui entraîne les magnifiques danseurs des Ballets de Monte-Carlo dans une aventure qu’on redécouvre avec émerveillement car tout y est beau. Et les lumières changeantes de Dominique Drillot, auteur d’un rose rare sur la scène des théâtres, ne font qu’exalter la pièce.

Il y a quelque chose de balanchinien dans cette composition qui rappelle l’esprit Art déco, dans certaines attitudes des danseurs surtout qui sont de fugitives rémanences de la sculpture des Années 30. Et cette énergie qui fouette les interprètes recèle quelque chose d’électrique.

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Avec Vers un Pays sage, les Ballets de Monte-Carlo brisent partiellement l’ostracisme auquel ils se sont heurtés à Paris depuis leur création. En plus de trente ans, cette compagnie qui se range parmi les meilleures d’Europe et qui a cent fois peut-être fait le tour du monde, ne s’est produite qu’à cinq reprises dans la capitale. Et il serait éloquent d’analyser les causes inavouées de ce dédain au sein des milieux culturels parisiens où l’on vous appréhende souvent en fonction de votre provenance plutôt que de vos qualités propres et auquel la réputation fâcheuse de la principauté dans ces milieux doit peut-être beaucoup. Sans compter la suspicion que suscite toute velléité d’excellence à une époque où règne cette tendance à la déglingue et à l’absence de talent qu’on flatte joliment du terme de liberté d’expression.

© Alice Blangero

Scrofuleuses et racornies

Hôtes occasionnels du Théâtre des Champs-Élysées, du Théâtre de Chaillot ou du Festival Paris Quartiers d’été où l’on avait déjà représenté Vers un pays sage en 1996, les Ballets de Monte Carlo n’avaient jamais été à l’affiche du Théâtre de la Ville d’où ils ont été soigneusement écartés durant des décennies. Et le plus étonnant dans cette programmation si tardive, c’est qu’elle ne survient peut-être pas pour les meilleures raisons, en l’occurrence, grâce à Vers un pays sage

Il y a fort à parier, hélas ! que ce soit l’autre partie du programme de cette série de représentations parisiennes qui ait déclenché cette invitation. Une pièce, Autodance, qui colle davantage à l’actuelle et très déroutante politique chorégraphique du Théâtre de la Ville et qui a été commise par l’Israélienne Sharon Eyal. On y retrouve les lumineux interprètes de Vers un pays sage mais métamorphosés en créatures souffreteuses, racornies, scrofuleuses, s’agitant frénétiquement en bordure d’un espace obscur figuré sur le sol, comme autant de cafards grouillant autour d’un gouffre. Consternant !

Jean-Christophe Maillot, la danse en festin

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Ballets de Monte Carlo, du 28 février au 5 mars 2025. Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt, à Paris.
01 42 74 22 77 ou theatredelaville-paris.com

Syrie: l’Occident peut-il faire confiance à Hayat Tahrir al-Cham?

Ce lundi 24 février se tient à Bruxelles un important conseil européen des ministres des Affaires étrangères au sujet de la nouvelle Syrie après la récente chute du régime tyrannique de Bachar al-Assad. Nos démocraties occidentales seront-elles toutefois assez lucides et vigilantes, contre un excès de naïveté, pour ne pas concourir à remplacer l’ancienne dictature politique par une nouvelle tyrannie religieuse, comme peut le laisser légitimement craindre le nouveau maître autoproclamé de Damas, ancien djihadiste ? C’est là la mise en garde de cette tribune critique ! Il en va, aussi, de notre propre sécurité et liberté…


Paris, 8 décembre 2024 : ce jour-là, il y a un peu moins de trois mois donc, le porte-parole du Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères déclarait, dans un communiqué officiel, qu’en « ce jour historique, pour la Syrie et le peuple syrien, la France saluait la chute du régime de Bachar al-Assad (…) après 13 ans d’une répression d’une grande violence contre son propre peuple ». Et d’ajouter aussitôt : « Les Syriens ont trop souffert. Bachar al-Assad laisse un pays exsangue, vidé d’une grande partie de sa population qui, si elle n’a pas été soumise à l’exil, a été massacrée, torturée et bombardée aux armes chimiques par le régime et ses alliés. » Il en concluait très opportunément, à l’instar de la plupart des chancelleries de nos démocraties occidentales : « La France rend hommage à toutes ses victimes. » Dont acte !

C’est ainsi donc que l’opposition syrienne, menée principalement là par le groupe « Hayat Tahrir al-Cham », dirigée par le commandant Ahmed Hussein al-Sharaa, mieux connu sous son nom de guerre d’Abou Mohammed al-Joulani, fondateur du très sanguinaire « Front al-Nosra » et donc, à cet inquiétant titre, ancien djihadiste à la solde du non moins abominable terrorisme islamiste, prenait effectivement le pouvoir, après une offensive éclair face à la débandade des forces loyalistes, en Syrie !  

L’Occident face à l’ancienne nébuleuse islamiste d’« Hayat Tahrir al-Cham » 

Nul ne regrettera certes ici la chute d’un dictateur aussi épouvantable que Bachar al-Assad. Mais, ceci étant dit et admis, faudra-t-il, pour autant, se réjouir précipitamment, en un nouvel, inconsidéré et béat excès de naïveté, de cette récente et soudaine accession au pouvoir syrien d’un ancien terroriste islamiste, et non des moindres au vu de l’abondance du sang sur ses mains, tel qu’Ahmed al-Sharaa précisément ? Prudence, bien évidemment, sinon, à l’aune de cet effrayant, cruel et sombre pedigree, méfiance ! On comprendra donc aisément, et à juste titre, l’inquiétude des capitales occidentales, malgré les assurances du nouveau maître de Damas, face à pareil profil politico-religieux. Nombreux sont par ailleurs les témoignages, encore aujourd’hui, d’un extrémisme malheureusement persistant au sein des villes et campagnes de Syrie !

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Mais il n’empêche : les pays de l’Union Européenne, sous l’égide de la France principalement, cherchent néanmoins, face à cet enjeu géopolitique et même stratégique pour la stabilité de cette région tout entière, sinon pour l’Occident en son ensemble, à établir un dialogue constructif avec la nouvelle administration syrienne, dominée donc, à l’heure actuelle, par cette nébuleuse constituée par « Hayat Tahrir al-Cham ». Et ce, malgré le fait que cette organisation soit encore classée, par les Etats-Unis d’Amérique notamment, comme « groupe terroriste » au niveau international !  

Rencontres diplomatiques à haut niveau et risque

Sur le plan pratique, ces efforts impliquent un certain nombre de  rencontres, tant officielles qu’officieuses, entre les responsables européens, de haut niveau, et Ahmed al-Sharaa lui-même, ancien rebelle autoproclamé donc aujourd’hui, depuis le 29 janvier 2025, nouveau Président, par intérim, de la Syrie et, à ce prestigieux titre, soucieux donc, en tentant de se présenter sous l’affable visage d’un allié rassurant quant aux intentions de son gouvernement, de répondre aux attentes de ses interlocuteurs occidentaux du moment. Le risque de tomber dans le piège n’est certes pas négligeable !

Ainsi, ces théoriques mais nécessaires précautions étant prises, l’Union Européenne prévoit-elle, aux dires des diplomates réunis vendredi dernier à Bruxelles, de lever très bientôt ses sanctions contre la Syrie, quoique cependant graduellement, en fonction des progrès véritablement démocratiques en matière de droits de l’homme et d’inclusion de ses différentes minorités et ethnies, notamment kurdes (au nord-est du pays) et alaouites (en s’interdisant d’avoir recours, par exemple, à la vengeance par rapport à Bachar al-Assad, d’origine alaouite précisément). 

Davantage : ces mêmes diplomates ont indiqué que les ministres des Affaires étrangères des 27 pays membres, réunis en conseil ce lundi 24 février dans la capitale belge, pourront officiellement prendre cette décision, lourde de conséquences positives ou négatives, suite à l’accord préliminaire trouvé lors de leur précédente réunion en janvier dernier.  

Un communiqué de la présidence française a par ailleurs rappelé les déclarations du président Emmanuel Macron soulignant l’importance de poursuivre la lutte contre le terrorisme, et précisant, en outre, que cette démarche était « dans l’intérêt du peuple syrien et de la sécurité nationale française ».  

Emmanuel Macron, dans le même esprit, a également insisté sur la nécessité d’intégrer les Forces démocratiques syriennes au sein du processus de transition politique en Syrie.  

Aussi, au début de cette année, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrotet son homologue allemande, Annalena Baerbock, se sont-ils donc rendus à Damas, où, munis d’un mandat de l’Union Européenne, ils ont rencontré Ahmed al-Sharaa justement. Barrot y a exprimé, parmi d’autres points essentiels, la volonté de la France d’apporter son « expertise juridique » en vue de soutenir la rédaction d’une nouvelle Constitution syrienne.  

L’inquiétude européenne malgré les assurances d’Ahmed al-Sharaa

Mais, nonobstant ces efforts de « Hayat Tahrir al-Cham » pour se montrer sous un jour plus « conciliant », espérant réduire ainsi les tensions avec les pays occidentaux, comme l’explique le chercheur Aron Lund dans une interview à Deutsche Welle, l’inquiétude des Européens, cependant, demeure.  

Aron Lund ajoute même que l’organisation pourrait revenir à ses « fondements idéologiques plus stricts » en cas de menaces à son encontre : attitude, celle-ci, alimentant, bien sûr, les craintes, au sein des démocraties occidentales, que son noyau djihadiste continue de la sorte, envers et contre tout, d’influencer sa politique générale, tant intérieure qu’extérieure.  

En ce qui concerne la communauté internationale, la docteure Faten Ghosn, directrice du département de gouvernance à l’Université d’Essex, au Royaume-Uni, estime, quant à elle, que la réponse occidentale restera conditionnée à la capacité du nouveau régime syrien de dissiper les inquiétudes liées à la propagation de l’idéologie islamiste.  

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Elle ajoute, non moins judicieusement : « Leur inquiétude grandit, car ils ne veulent pas voir émerger davantage de groupes extrémistes susceptibles d’engendrer plus de violence et d’accroître le flux de réfugiés vers l’Europe ».  

Bien qu’Ahmed al-Sharaa, chez qui l’on ne peut légitimement écarter d’indéniables calculs démagogiques et autres attitudes opportunistes, tente de rassurer la communauté internationale par des discours apaisants, la docteure Katia al-Khatibenseignante en droit humanitaire international, affirme que les mesures prises par les autorités syriennes « ne sont pas conformes à la vision de la résolution 2254 » des Nations-Unies. Elle espère donc que les conférences internationales, comme celle tenue récemment, le 13 février dernier, à Paris, permettront des avancées, concrètes et effectives, vers un changement plus positif, significatif sur le plan socio-politico-idéologique, en Syrie.  

Mises en garde et défi socio-politico-idéologique

Conclusion ? Au vu de semblable contexte, la menace terroriste reste une préoccupation dans la gouvernance actuelle de la Syrie, en raison notamment des profondes divisions entre les diverses, et parfois rivales entre elles, factions armées. À cet épineux mais réel sujet, où les mises en garde tendent toujours plus et fort heureusement à se multiplient avec lucidité tout autant que réalisme, Bruce Hoffman, professeur de sciences politiques à l’Université de Georgetown, rappelle que la rivalité historique entre l’ « État islamique » (Daech) et « Hayat Tahrir al-Cham » complique encore davantage la situation sécuritaire de la région : ce qui, bien évidemment, n’est pas peu dire !  

Ainsi le principal défi, à l’heure actuelle, reste-t-il donc d’empêcher un retour des organisations terroristes en Syrie, surtout au regard des très légitimes préoccupations sécuritaires européennes, l’Europe ayant déjà été frappée à plusieurs reprises, de manière particulièrement sanglante et dramatique, par de violentes attaques terroristes, comme celles successivement, à Paris, du 7 janvier 2015, à « Charlie Hebdo », où sa rédaction a été pratiquement disséminée, avec 12 morts et 11 blessés, puis du 13 novembre de la même année (au Bataclan, notamment), attentats meurtriers ayant fait, de sinistre mémoire quant au nombre très élevé de victimes en ce terrible bilan humain, 130 tués, tous innocents, et 413 blessés hospitalisés, dont 99 en situation d’urgence absolue !

Restons vigilants face au péril islamiste : ne remplaçons pas une dictature politique par une tyrannie religieuse !

Reste à espérer, en ces difficiles conditions, que la prochaine conférence internationale sur la Syrie, qui se tiendra à Bruxelles le 17 mars prochain, portera réellement ses fruits, positifs, démocratiques et dans l’intérêt de tous. Et ce en veillant donc, en demeurant lucides et vigilants, à ne pas remplacer, comme lors de l’ancien et prétendu « printemps arabe » (en Tunisie, Egypte, Irak, Lybie et Algérie), une dictature politique par une tyrannie religieuse : ce qui, et ce n’est pas peu dire, est peut-être pire encore !

Car, à réhabiliter précipitamment ce  dangereux islamiste qu’est le nouveau maître incontesté, même si éminemment contestable, de la Syrie, le péril, pour la sauvegarde même du monde libre et démocratique, est grand, en Occident comme ailleurs.

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Paris-Alger, le curieux bras de fer

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Attentat terroriste au marché de Mulhouse ! Oui, mais rassurez-vous : ce n’est qu’un Algérien de 37 ans fiché S pour terrorisme et sous OQTF… Si ce n’était pas si dramatique – un homme est mort-, on pourrait presque en rire.


À la veille d’un dimanche au cours duquel nos voisins allemands ont placé l’AfD en deuxième place aux élections – après une campagne centrée sur les débats sur l’immigration, et marquée par des attaques sanglantes commises par des migrants- , les Français ont de nouveau été la cible d’un attentat au couteau. Samedi après-midi, en plein centre-ville de Mulhouse, Brahim A., un Algérien de 37 ans faisant l’objet d’une procédure d’extradition, s’en est pris aux agents de la ville. Il a tué un Portugais de 69 ans. Le commentaire d’Elisabeth Lévy.


L’attentat terroriste qui a fait un mort et sept blessés à Mulhouse n’a pas fait la une des journaux bien longtemps. C’est normal, on finit par s’habituer : il n’y a pas une semaine sans qu’un terroriste islamiste (généralement demandeur d’asile ou réfugié) frappe une ville européenne (Munich, Berlin en Allemagne, Villach en Autriche, Apt en France…).

La singularité de l’attentat de samedi: le régime algérien a le sang de ce héros portugais sur les mains. On peut incriminer les failles de notre droit qui interdit d’incarcérer un homme jugé dangereux en attente d’expulsion, mais les services de l’Etat ont fait leur boulot. Il n’y a pas de trou dans la raquette cette fois-ci, le problème c’est la raquette elle-même.

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Fiché pour radicalisation terroriste, Brahim A. a été refusé dix fois par l’Algérie. Ce pays interdit son territoire à un de ses ressortissants, il piétine donc ses droits fondamentaux, mais évidemment il n’y a pas de CEDH à l’horizon. À nous de nous débrouiller avec des malfrats et des tueurs à qui nous ne devons strictement rien. Et Boualem Sansal, otage français, a entamé hier une grève de la faim pour pouvoir garder son avocat juif !  

Bruno Retailleau, Patrick Stefanini, Jordan Bardella et toute la droite appellent à changer de ton et à créer un rapport de forces. Amen.

L’affaire Sansal aurait déjà dû entraîner sanctions financières, gels des visas, et fermetures de consulats. En plus de retenir Boualem Sansal, les Algériens nous font tous les quatre matins un chantage aux OQTF pour lesquels ils exigent des laissez-passer consulaires qu’ils ne donnent pas même à des ressortissants ayant des papiers en bonne et due forme !

La question n’est pas de savoir ce qu’il faut faire, on le sait tous, mais pourquoi on ne le fait pas. Il y a de petits intérêts commerciaux et sécuritaires, bien sûr, mais surtout l’idéologie et la psychologie d’une grande constellation gauche / médias / quai d’Orsay. On a fait tant de mal aux Algériens, et si on s’énerve ils vont s’énerver encore plus. Des voix insoumises expliquent que si le tueur de Mulhouse avait été expulsé il aurait pu commettre des attentats en Algérie, donc qu’il valait mieux le garder… C’est très généreux avec la vie des autres. Alors que des « influenceurs » répondront aujourd’hui de leurs diatribes devant le tribunal, il serait stigmatisant de se demander combien il y a d’influencés.

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Nous sommes gouvernés par des lâches ou, plus poliment, par des herbivores incapables de nous protéger des carnivores qui nous entourent (qu’ils s’appellent Trump, Poutine ou Tebboune).

Cette soumission est incarnée par le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot. Voilà ce qu’il répond dans Le Point à Bruno Retailleau: « Ce qui nous intéresse, c’est la sécurité des Français, pas le rapport de force pour le rapport de force. Nous agissons par la diplomatie, avec une palette d’outils dont nous parlons, et d’autres dont nous ne parlons pas. » Grâce à cette merveilleuse palette, Brahim A. était libre en France et Boualem Sansal est incarcéré en Algérie.


Cette chronique a été diffusée sur Sud radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale

L’indigné chronique

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Dominique de Villepin lors d'un grand entretien sur les questions internationales à la fête de l'Humanité, Bretigny-sur-Orge, 15 septembre 2024 © Chang Martin/SIPA

Depuis qu’il a prononcé un discours brillant écrit par Bruno Le Maire à l’ONU contre la guerre en Irak, Dominique de Villepin est reçu un peu partout comme un sage diplomate. Ces derniers jours, l’ancien Premier ministre est tout mielleux avec le régime algérien, alors qu’il n’avait pas de mots assez durs pour critiquer Israël.


Dominique de Villepin nous rejoue régulièrement son discours à l’ONU contre l’invasion de l’Irak. Sauf que ses causes ne sont plus les mêmes et que son indignation tombe à plat à force d’adopter toujours le même registre dans le domaine international. Les autres sont mauvais, moi je saurais comment faire…

Doué… pour le verbe

Le problème est qu’aussi bien pour Israël et les Palestiniens que pour les rapports de la France avec l’Algérie, il sermonne, gronde, proteste, dénonce mais au bout du compte, quand on attend un conseil, une mesure opératoires, rien ne vient jamais.

Il est très doué pour le verbe, les principes, les leçons mais il ne donne jamais à ceux qu’il houspille du haut de son passé et de son expérience unique le mode d’emploi. On brûle d’envie de lui demander ses recettes puisque, paraît-il, dans sa tête la solution est prête et qu’il suffirait de la mettre en œuvre. Le souci est qu’il nous fait languir et que derrière l’expression flamboyante, il y a le vide. Sauf à considérer que réclamer une solution diplomatique pour les conflits dans le monde constitue une originalité qui mérite d’être applaudie.

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Dominique de Villepin est un indigné chronique qui avec ses propos enflammés est devenu, juste derrière Jean-Luc Mélenchon, le préféré de LFI même si cette posture avantageuse ne lui procure pas le moindre impact électoral.

Sa nouvelle cible est le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau qui a le grand tort de ne pas tendre l’autre joue à l’Algérie et de vouloir instaurer un rapport de force avec ce pays qui se moque de la France en nous renvoyant systématiquement les Algériens indésirables chez nous, comme récemment une personne rejetée à dix reprises.

https://twitter.com/DestinationTele/status/1893716772139782507
Dominique de Villepin sur BFM TV le 23 février 2025.

Question d’honneur

Le fait que Bruno Retailleau « se fiche comme de sa première chemise » de ce que l’ancien Premier ministre lui assène ne rend pas plus tolérable ce propos qui fragilise la position française et permet à l’Algérie de se réjouir alors qu’on aurait attendu de la part de Dominique de Villepin sinon une approbation, du moins le silence.

Il est facile de deviner, derrière cet empressement à prendre le contre-pied des autorités officielles, non seulement l’effet d’une personnalité qui se sentirait offensée si elle partageait un point de vue commun mais la volonté forcenée de demeurer dans la lumière.

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Bruno Retailleau, ce ministre qui est contraint de sortir de son domaine, de s’occuper de ce qui ne le regarde pas avec l’Algérie, est insupportable pour Dominique de Villepin puisqu’il est omniprésent et en pointe dans cet affrontement dont on oublie trop vite qu’il concerne un écrivain scandaleusement emprisonné, Boualem Sansal.

Bruno Retailleau supplée un président de la République qui dialogue avec le président Trump sur l’Ukraine et qui apparemment demeure à distance de l’arrogance algérienne. Il se substitue aussi à un ministre des Affaires étrangères qui ne semble guère actif sur ce terrain.

Il faut le féliciter de tenir à sa manière la dragée haute au pouvoir algérien. On comprend bien que la réserve, voire la mollesse de la France résultent en l’occurrence d’influences commerciales, économiques et financières qui n’aspirent pas à une brisure totale avec l’Algérie et à la révision des accords de 1968. Mais il n’empêche que Bruno Retailleau sauve l’honneur quand Dominique de Villepin le relativise.

On ne donne pas une prime aux bourreaux avant qu’ils aient été châtiés.

Trump et le protectionnisme: mettre fin à la passivité européenne

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Le président américain dans Air Force One, 9 février 2025 © Ben Curtis/AP/SIPA

Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche rebat les cartes de l’économie mondiale. Si l’on peut saluer son patriotisme, il ne faut pas oublier qu’il incarne un protectionnisme assumé et une approche purement transactionnelle des relations internationales. Son unique boussole : l’intérêt américain, quitte à fragiliser ses partenaires. Face à cette nouvelle donne, l’Europe et la France ne peuvent plus se permettre l’attentisme : il est temps d’anticiper, de s’adapter et de défendre nos intérêts avec la même détermination.

Dès son retour, Donald Trump a signé un décret réaffirmant sa politique commerciale « America First ». Révision des accords, enquêtes sur les déficits commerciaux et potentiels tarifs douaniers globaux : rien n’est exclu pour contraindre les partenaires internationaux à plier. Pour l’Europe, le message est clair : les négociations avec les États-Unis ne seront possibles qu’au prix de concessions importantes. Les lois antidumping et les droits compensateurs, visant à protéger les industries américaines contre des produits importés jugés déloyalement compétitifs, pourraient également être durcis. Ces outils permettent aux États-Unis d’imposer des barrières protectionnistes draconiennes, frappant de plein fouet des secteurs européens déjà affaiblis, comme l’acier et l’aluminium.

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Les implications du protectionnisme américain vont bien au-delà des tarifs douaniers. L’Inflation Reduction Act (IRA), adopté sous l’administration Biden mais qui pourrait être pleinement exploité sous Trump, illustre parfaitement les risques économiques pour l’Europe. Ce texte, grâce à ses subventions et incitations fiscales massives, draine les investissements étrangers vers les États-Unis à un rythme alarmant. En Allemagne, 10 % des entreprises envisagent de relocaliser leur production outre-Atlantique, un chiffre qui grimpe à 23 % dans l’automobile. En France, l’agroalimentaire, le luxe ou l’automobile pourraient subir des pertes irrémédiables en compétitivité. Ces départs massifs dévastent notre tissu industriel et renforcent notre soumission économique. Face à cette situation, l’Europe ne peut ni se diviser, ni rester dans l’inaction.

La réindustrialisation doit devenir une priorité absolue. Sans industrie forte, souveraineté et compétitivité ne peuvent être garanties. Il ne s’agit pas simplement de rapatrier des usines : c’est toute une chaîne de valeur stratégique qu’il faut reconstruire, en mettant l’accent sur les secteurs essentiels tels que l’énergie, l’automobile et l’électronique.

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L’Europe et la France ne peuvent plus se permettre des demi-mesures. Diversifier nos partenaires commerciaux est indispensable pour sortir de notre dépendance excessive. Si Trump impose ses règles, notre réponse doit être ferme et stratégique : multiplier les alliances commerciales qui servent nos intérêts et ne plus céder à des pressions déséquilibrées. L’échec du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP) en 2016 illustre les limites d’une Europe qui négocie en position de faiblesse et de manière désunie : si l’administration Trump impose des droits de douane aux médicaments et au luxe français mais épargne les machines-outils et l’automobile outre-Rhin, les Allemands auront-il le désir de riposter aux côtés de la France ?

Enfin, il est impératif de donner à nos entreprises les moyens de riposter. Des outils fiscaux agressifs doivent être mis en œuvre : exonérations totales pour les secteurs stratégiques, investissements massifs dans la recherche et l’innovation, et un soutien sans faille à nos PME. Plutôt que de pénaliser, libérons : c’est en levant les entraves et en créant un environnement propice à la croissance que nous restaurerons notre compétitivité. Nous ne manquons pas d’argent mais de stratégie. Arrêtons par exemple de subventionner les lubies de la transition énergétique et relançons en contrepartie Astrid pour garantir une électricité à bas cout à nos entreprises

C’est un choix simple : soit nous nous relevons, soit nous nous laissons écraser. Fort ou mort.


Les Horaces sont un cercle de hauts fonctionnaires, hommes politiques, universitaires, entrepreneurs et intellectuels apportant leur expertise à Marine Le Pen, fondé et présidé par André Rougé, député français au Parlement européen

Alphonse défonce le chômage

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© Fluide Glacial

Découvrez les aventures d’Alphonse, un chômeur « convaincu » et extrêmement maladroit, qui tente tant bien que mal de trouver un travail, du plus farfelu au moins commun.


Alphonse, une bande dessinée hilarante et déjantée, du scénariste Philippe Pelaez et du dessinateur Pascal Valdés, raconte les aventures du héros éponyme, chômeur invétéré, ouvert à des emplois improbables… Alphonse, avec sa bonne tronche de looser, est au chômage depuis des années. Il commence à s’impatienter ; ses proches aussi. On lui a dit qu’il suffisait de traverser la rue pour trouver du boulot. Alors, depuis, il épluche les petites annonces, bien décidé à dégotter un taf, quel qu’il soit. Même le plus singulier, voire le plus improbable.

Renifleur d’aisselles

Ce n’est pas triste ! Le voilà qu’il devient faiseur de file d’attente, nettoyeur de scène de crime, renifleur d’aisselles (oui, vous avez bien lu ; il est employé par une marque de sticks de déodorant qu’il teste en flairant le dessous des bras de sportifs en sueur ! Répugnant !), branleur de dindons (« (…) ce sont des animaux qui ont un taux de reproduction très faible et dont la semence est très précieuse. Il faut… ben il faut les aider, quoi ! »), sexeur de poussins (« C’est simple : les mâles dans le bac de droite, et les femelles dans celui de gauche »), thanatopracteur, enseignant d’anglais à de dangereux criminels, etc.

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Il essaie, essaie encore, mais à chaque fois ça ne marche pas ; il perd toutes ses places étonnantes, fascinantes, merveilleuses. Il faut avouer qu’il est nécessaire d’avoir le cœur bien accroché. De plus, Alphonse picole (il se gâche la santé aux anis) ; il est fichtrement maladroit et bigrement malchanceux.

Quand il branle les dindons, il finit dans l’étable avec le taureau qui se met à le poursuivre. Quand il détermine le sexe des poussins, il est tellement absorbé par sa tâche, qu’il éclate les pauvres bestioles contre le mur. Lorsqu’il s’initie aux robots et à l’IA, il prend tellement la tête des machines avec des questions à la noix, que celles-ci se mettent à chauffer et un terrible incendie se produit dans l’usine.

Sacré Alphonse ! Il est marrant, touchant, désarmant. Une manière de Mr Bean. A noter que si le scénariste Philippe Pelaez déborde d’expérience (il est l’auteur de nombreux albums chez Bamboo, Dargaud et Fluide Glacial), le dessinateur Pascal Valdés dessine là sa première bande dessinée. Et le tout est très réussi. On rigole, oui, fort souvent, mais on réfléchit aussi sur le cynisme assez pourri du monde de l’entreprise dans le système capitaliste. Merci Alphonse !


Alphonse, Pascal Valdés et Philippe Pelaez ; Fluide Glacial ; 56 p.

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Rencontre Trump – Macron: une réussite plus médiatique que diplomatique

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Emmanuel Macron, Donald Trump et JD Vance à la Maison Blanche, 24 février 2025 © Ludovic MARIN/UPI/Shutterstock/SIPA

Alors que le président Macron cherchait hier à Washington à obtenir des garanties de sécurité pour l’Europe, Donald Trump a maintenu une approche unilatérale, minimisant l’engagement américain. Le président américain se dirige à vive allure vers un cessez-le-feu. Mais un cessez-le-feu n’est pas forcément la paix. Analyse.


Donald Trump et Emmanuel Macron se sont montrés très souriants lundi 24 février à Washington. Les deux hommes s’apprécient depuis plusieurs années, n’en déplaise aux admirateurs français du Donald qui ont relayé dans la journée les éléments de langage du Kremlin sur un prétendu « mépris » de l’Américain qui aurait refusé d’accueillir son homologue français sur le perron de la Maison-Blanche. C’était évidemment faux.

En réalité, Donald Trump aura même multiplié les marques d’amitié envers son « ami Emmanuel ». Il a, excusez du peu, affirmé que le travail « formidable » d’Emmanuel Macron pour reconstruire Notre-Dame n’avait pas été assez reconnu à sa juste valeur, que le français était la plus belle langue du monde, puis il a fait diffuser une magnifique vidéo sur la page X de la Maison-Blanche vantant le « plus vieil et fidèle allié de l’Amérique ».

Le président Duda aurait bien aimé que l’engagement indéfectible de la Pologne envers l’Amérique soit récompensé de la sorte, lui qui a passé deux heures à attendre dans un cagibi que Donald Trump veuille bien le recevoir une petite dizaine de minutes. Idem pour Georgia Meloni qui n’a pas pu s’empêcher, mesquine, de diffuser une vidéo à l’issue de la rencontre… où Emmanuel Macron ne figurait pas, coupé comme on le ferait sur une vieille photo avec un ami désormais honni. Et le tout en flattant « à l’italienne », comme dans un opéra-bouffe de Rossini, le président américain…

Oui, la réussite médiatique fut au rendez-vous. Les jalousies exacerbées des puissances européennes intermédiaires en furent la meilleure preuve. Ils ne devraient pas se vexer. La réalité est qu’à l’image de Vladimir Poutine, Donald Trump ne considère vraiment comme importantes en Europe que deux nations : la France et la Grande-Bretagne. Pays dotés de l’arme nucléaire et anciens Empires aux histoires glorieuses, ces deux nations ont l’heur de plaire au président américain qui ne les gausse jamais avec vulgarité.

Mais au-delà des belles images et des démonstrations d’amitié, qu’a donc gagné Emmanuel Macron ? Peut-on se satisfaire de cet exercice d’autosatisfaction où le président est apparu rieur et décontracté, façon buddy du bully ? Pas vraiment, bien qu’il en ressorte aussi quelques motifs d’encouragement.

Un vote majeur à l’ONU

Le fait marquant du jour se produisit non pas à Washington mais à l’ONU. Nous avons assisté à un moment historique et tragique. Pile trois ans après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les Etats-Unis se sont alliés à la Russie lors de votes inédits et lamentables portant sur la résolution du conflit par une paix expresse, sans condamnation de Moscou, ni même défense de la souveraineté de l’Ukraine, ou garanties de sécurité quelconques. Russes et Américains sont désormais ensemble contre le droit international le plus élémentaire, renforcés de la Hongrie et d’Israël, et alliés à des pays aussi recommandables que la Corée-du-Nord, le Soudan, le Burkina-Faso ou encore Haïti, le Niger et le Mali. Penser que les Etats-Unis sont contre l’avis de tous les pays européens, à l’exception de la Macédoine-du-Nord, est tout de même sidérant.

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Quand Macron s’amusait à « checker » la main de Donald Trump et écarter les jambes sur un gros fauteuil de la « White House », les Américains faisaient eux savoir quel était leur véritable avis sur le conflit à l’ONU. Les quelques éléments présentés comme remarquables de la part d’Emmanuel Macron relèvent du strict nécessaire et du strict minimum. Il a effectivement repris Donald Trump sur l’inversion des responsabilités qu’il fait à propos de ce conflit, mais il s’agit d’une position de principe jamais démentie. En quoi ce rappel avait-il un caractère spécifique ? N’est-ce pas une attitude élémentaire pour une puissance comme la France ? Pendant ce temps, Zelensky, conscient des enjeux, se montrait furieux et n’hésitait pas à dénoncer les anciens alliés prêts à renoncer à leur honneur pour quelques gains financiers. Les différentes piqûres de rappel du président français auront eu au moins le mérite d’être dites en face, c’est à saluer.

Mais ne soyons pas naïfs, ce qui se cache derrière ce théâtre, c’est le vide. Comme le disait Jean Baudrillard, « Ainsi le simulacre n’est pas ce qui cache la vérité, mais ce qui cache l’absence de vérité ». Emmanuel Macron a correctement tenu son rang sans s’affirmer comme un grand politique. Il n’est pas Charles de Gaulle, il est un peu rusé mais ce ne sera pas suffisant.  Il doit faire mieux et plus. Il ne doit pas hésiter à affirmer que l’Amérique et la Russie ne peuvent pas passer par-dessus l’Europe. Il doit le leur dire et le dire à toute l’Europe. Notre alliance historique avec l’Amérique, rappelée par Donald Trump, commande aussi de l’exigence.

Quand un président français se rend aux États-Unis dans un moment aussi grave, il doit être habité par les mânes de Saint Louis, Clemenceau, Charlemagne, de Gaulle, etc. Il est à ce moment-là l’incarnation de la France, qu’on le veuille ou non. Pire, il représentait même l’Europe. Une relation doit nous apporter du concret. Et qu’a-t-on eu de ce côté-là ? Le droit de pouvoir envoyer des troupes de réassurance si une paix est signée. Soit précisément ce que commandait l’Amérique. Nous proposons une assurance pour une vente dont nous ne connaissons ni les termes ni l’objet. Du jamais vu. Nous nous engageons à payer sans rien récupérer en retour. Et maintenant le négociateur en chef, le roi du deal, en fait une « concession ». Mais la vraie demande c’est que l’Europe négocie et soit à la table, qu’elle propose son propre plan de paix bien plus exigeant car la situation opérationnelle l’y autorise. C’est ce que fait Erdogan avec son propre plan de paix ou quand il propose à l’Europe son armée contre son entrée dans l’Union.

Vers un cessez-le-feu abusivement présenté en paix

Avant de signer une paix, il faut un arrêt des combats. Soit un cessez-le-feu. Et un cessez-le-feu repose sur des garanties de sécurité pour produire des effets. C’est sur cette ambiguïté sémantique que jouent les différents protagonistes de l’affaire ukrainienne.  Concluons par cette phrase un peu grossière du twitto Olivier Barnay : « Donc si je comprends bien, Macron est venu offrir une présence militaire (non belligérante SIC) européenne garantissant un accord conclu entre Trump et Poutine et ratifié sous la contrainte par Zelenski. Si cela se passe ainsi, on est tous gros-jean comme devant. » Gageons que nous n’en sommes qu’aux prolégomènes de la résolution d’une guerre pourtant déjà dramatique et longue… Les Russes ont en tout cas aujourd’hui, grâce à Donald Trump et à l’inconscience des Européens, les cartes en main.

Révolution anti-woke: la conversion surprise de Mark Zuckerberg

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Mark Zuckerberg, passionné de MMA et pratiquant d’arts martiaux, lors d’un entraînement avec les champions de l’UFC Israel Adesanya et Alexander Volkanovski, juillet 2023 © nstagram/Israel Adesanya (@stylebender)

L’allégeance du patron de Facebook à Donald Trump a été rapide et totale. En un mois, Zuckerberg a renié tous les fondements idéologiques sur lesquels il a bâti son empire, troquant son statut de paria pour celui de disciple zélé aux avant-postes du mouvement MAGA. Retour sur une vassalisation spectaculaire.


Coup de théâtre. Mark Zuckerberg, petit prince de la tech US, patron préféré des élites démocrates et Grand Inquisiteur qui, il y a tout juste quatre ans, bannissait le président Trump de ses réseaux sociaux, vient de prêter bruyamment allégeance au nouveau maître de la Maison-Blanche. Le fondateur de Facebook a réformé, au pas de charge, le titan META (Instagram, Threads, WhatsApp, Facebook), dont les services sont utilisés par rien de moins que la moitié de la population mondiale. En un peu moins d’un mois, le dernier bastion du néolibéralisme progressiste est tombé. Avec tout le zèle des nouveaux convertis, l’icône de la Silicon Valley a aligné META sur MAGA (« Make America Great Again », ndlr).

Masculinisme, dérégulation, désir de grandeur : retour sur un numéro de haute voltige dans la nouvelle ère d’un Trump plus véloce que jamais, au sein d’une quatrième révolution industrielle.

Du relooking à l’apostasie, récit d’une conversion express

Zuckerberg revient de loin. Le quarantenaire athlétique assis au premier rang de la cérémonie d’investiture du 47e président des États-Unis ce 20 janvier 2025 n’a plus grand-chose en commun avec l’homme qu’il était il y a six mois. De son apparence jusqu’à ses convictions, la mue est impressionnante. Celui qui se tient aux côtés d’Elon Musk (X, Tesla), Sundar Pichai (Google), Tim Cook (Apple), Jeff Bezos (Amazon) et de Sam Altman (OpenAi) ne dépareille pas parmi ses pairs. Exit l’air intello, le sweat à capuche, la coupe Playmobil et le teint blafard. Avec ses cheveux mi-longs, hâlé, musculeux, costumé, masculin, Mark Zuckerberg a désormais le look du « tech bro ». Allant même jusqu’à pousser le vice du « male gaze » (œillade plongeante), dans le décolleté de la fiancée du patron d’Amazon Lauren Sanchez. Calcul ou maladresse ? L’œillade de l’ancien chantre du puritanisme progressiste devient ce jour-là l’une des anecdotes les plus commentées de la Toile.

Dans son livre Save America, paru en septembre dernier, Donald Trump accusait le patron de Meta d’avoir influencé l’élection de 2020 en faveur de Joe Biden et lui promettait la « prison à vie » s’il tentait de s’ingérer dans sa campagne à venir. Que s’est-il passé pour qu’en l’espace de six mois, Zuckerberg troque son statut de paria auprès de l’aréopage trumpiste pour celui de disciple zélé, aux avant-postes du mouvement MAGA ?

Ce n’est pas son changement de look ni le million de dollars donné pour l’investiture du président républicain qui ont permis au patron de Meta de se frayer un chemin aux premières loges du sacre de Donald Trump. Sa présence est l’aboutissement d’un chemin de Damas parcouru tambour battant dès les premiers jours de la nouvelle année.

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La volte-face tonitruante du titan de la tech

Tout commence à Mar-a-Lago, la résidence personnelle de Donald Trump. Trois semaines après l’élection présidentielle qui a consacré la défaite du camp démocrate, le président élu convie Zuckerberg à dîner. De cette réunion des contraires, rien ne filtre. Seule une déclaration d’un porte-parole trumpiste témoigne du vif réchauffement entre les deux géants : « Mark était reconnaissant d’avoir été invité à rejoindre le président Trump et d’avoir eu l’occasion de rencontrer les membres de son équipe. » Un mois plus tard, « Mark » orchestre publiquement les étapes de sa vassalisation au nouveau régime. Un ralliement tonitruant, pavé de reniements majeurs.

Début janvier, c’est sur son rival historique Elon Musk que Zuckerberg prend exemple. En annonçant la suppression de son programme de vérification des faits (« fact-checking ») et l’adoption de notes de la communauté, Zuckerberg se base sur les méthodes de X pour combattre « la censure » et revenir « aux sources de la liberté d’expression[1] ». À l’instar de son aîné, il licencie à tour de bras : 3 600 employés, soit 5 % des effectifs de META sont mis à la porte, dans un souci de « performance ». Avant de faire cap sur le Texas, où le patron de X et Tesla déplace déjà ses activités. Dans cet État républicain pionnier de l’anti-wokisme, « on s’inquiète moins de la partialité de nos équipes », déclare-t-il.

Dans la foulée, Zuckerberg renouvelle son entourage en procédant à des nominations pour le moins détonantes. Le très conservateur chef de cabinet adjoint de George W. Bush, Joel Kaplan, devient directeur des affaires mondiales du groupe et succède ainsi à Nick Clegg, lui-même ancien chef du parti des Libéraux-Démocrates britannique. Dana White, président de la plus grande ligue de MMA au monde et ami intime de Donald Trump, est quant à lui coopté au sein du conseil d’administration de META.

Immédiatement, de nouvelles réformes sont impulsées pour aligner les objectifs de META sur la philosophie du nouveau président. En une poignée de décisions foudroyantes, reléguant à la poubelle la symbolique de l’ancien régime et ses principales politiques sur la liberté d’expression et la discrimination positive, la charpente néoprogressiste de la giga-entreprise est détruite.

Ainsi, les thèmes « transgenres » et « non binaires » sont retirés de son application de chat Messenger et les bureaux META de la Silicon Valley, de New York et du Texas sont sommés de retirer les distributeurs de tampons mis à disposition dans les toilettes pour hommes.

Celui qui avait critiqué les décrets de Trump sur l’immigration lors de son premier mandat fait signer à son nouveau directeur des affaires mondiales un communiqué annonçant la fin des restrictions sur « des sujets tels que l’immigration, l’identité sexuelle et le genre, qui font l’objet de nombreux débats et discours politiques ».

Last but not least, Mark Zuckerberg met fin, avec effet immédiat, à tous les programmes de discrimination positive, anticipant ainsi le décret pris en ce sens par le président Trump le premier jour de son nouveau mandat. Une véritable révolution dans le recrutement des personnels, la formation interne ou la sélection des fournisseurs.

En l’espace de quelques jours, l’une des plus grandes entreprises du monde a effectué un virage à 180°. Pour légitimer son inscription dans la mouvance MAGA, il ne reste plus à notre néotrumpiste qu’à obtenir l’assentiment des fans du président. Pour ce faire, le baron de la tech a choisi la plateforme de Joe Rogan, podcasteur le plus écouté des États-Unis qui a déjà reçu Donald Trump en campagne et Elon Musk pour un petit joint d’herbe en direct. À l’antenne, Zuckerberg vante l’« énergie masculine » et blâme l’ancien président Joe Biden pour l’avoir, à coup d’intimidations, contraint à faire remonter sa politique de vérification des contenus « en 1984 », tout en proclamant qu’il « n’est pas normal que certaines choses puissent être dites à la télévision ou au Congrès, mais pas sur nos plateformes ». Les auditeurs boivent du petit lait, Joe Rogan s’esclaffe, et CNN s’offusque. Le tour est joué.

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Le dernier transfuge du nouveau régime

Mais pour rester dans ses bonnes grâces, le nouveau vassal de Donald Trump devra batailler. Si la transformation de sa giga-entreprise est plus que convaincante, son avenir reste inextricablement lié au bon vouloir du nouveau maître de Washington. Encore batailler donc, pour sa survie d’abord, et sa croissance ensuite.

D’énormes défis attendent le patron de Meta au cours de cette année. Notamment dans le cadre de la plainte déposée par la Federal Trade Commission (FTC) en vue d’annuler son acquisition, il y a dix ans, d’Instagram et de WhatsApp, dont le procès s’ouvrira en avril. Sa nouvelle approche de modération des contenus, favorable à Trump, représente à ce titre l’un des nombreux efforts visant à convaincre cette nouvelle administration, qui n’hésitera pas à récompenser ses amis et à punir ses ennemis.

Par-dessus tout, la métamorphose de Zuckerberg s’explique par le nouvel agenda économique du président Trump, qui entend largement distancer la Chine sur le front des nouvelles technologies. Au menu : déréglementations tous azimuts et investissements massifs dans l’IA et les cryptomonnaies. Soit des fortunes colossales en jeu. Quiconque aura l’oreille du président ces prochaines années sécurisera ses approvisionnements en les retranchant des biens et services frappés de taxes douanières, bénéficiera de contrats fédéraux démesurés et… se taillera une place de choix parmi les futurs géants de la quatrième révolution industrielle.

Mark Zuckerberg représente en réalité la figure de proue d’un mouvement de conversion à l’anti-wokisme qui s’achève par son ralliement ultime. Les décisions bruyantes du médiatique patron de Meta n’ont fait que suivre la liste toujours plus fournie des grandes entreprises ayant mis fin à leurs programmes de discrimination positive : McDonald’s, Walmart, Boeing, Molson Coors, Ford, Harley-Davidson, John Deere, Amazon… Même YouTube, filiale de Google, a procédé à de nombreux licenciements de responsables de la surveillance de ses contenus.

Il y a quatre ans, Zuckerberg coupait la tête de Trump sur tous ses réseaux sociaux. En quelques semaines il a rejoint les premiers rangs des zélés du nouveau régime. Reste à savoir comment il survivra dans cette nouvelle ère où les plus grands patrons du monde craignent pour leurs privilèges.


[1] Dans une vidéo publiée sur Facebook le 7 janvier.

Faut-il redouter une Allemagne à son tour ingouvernable?

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Friedrich Merz (CDU), président du parti et candidat à la chancellerie, s'exprime à la Maison Konrad Adenauer après la prévision des résultats des élections fédérales, Berlin, 23 février 2025 © Marcus Brandt/DPA/SIPA

Le conservateur Friedrich Merz devrait être le prochain chancelier de l’Allemagne. Il estime que la politique d’Angela Merkel est responsable de la progression de l’AfD d’Alice Weidel, laquelle a obtenu 20,8% des suffrages dimanche. Et il exclut de gouverner avec elle.


Les élections anticipées en Allemagne ont marqué un tournant pour le pays, n’ayant jamais été aussi à droite, mais aussi pour l’Union européenne. Jadis pilier de stabilité et de prospérité, l’Allemagne affronte une crise économique et sociale, une instabilité politique et un chaos migratoire et sécuritaire sans précédent. Une Allemagne ingouvernable pourrait signer la fin de « l’Europe allemande » à un moment où un leadership fort est plus que jamais nécessaire.

Une élection sans réel vainqueur ?

Les élections de dimanche dernier ne devraient pas résoudre les problèmes politiques de l’Allemagne, mais au contraire les aggraver. Depuis le départ d’Angela Merkel, une coalition fragile en « feux tricolores » rassemblant les sociaux-démocrates du SPD, les Verts et les libéraux du FDP gouvernait l’Allemagne. Néanmoins, des tensions ont fait imploser la coalition entre les libéraux tenants d’une ligne pro-business et de rigueur budgétaire opposés aux sociaux-démocrates et aux écologistes partisans d’une atténuation du « frein à l’endettement » limitant l’emprunt public à 0,35 % du PIB. Les différents partis de cette coalition ont payé le prix fort cet échec. Le SPD d’Olaf Scholz a subi une défaite retentissante, qui devrait le pousser vers la sortie. Les libéraux du FDP ne seront plus au Bundestag après avoir fait moins de 5% des voix. Les Verts, bien que mieux lotis, ont perdu du terrain avec 11,6% des suffrages, en nette régression après les 14,7% de 2021.

Seulement, l’alternative majoritaire n’existe pas. Plus précisément, elle n’existe qu’au niveau des électeurs et non des partis. En effet, près de la moitié des Allemands ont voté pour un parti de droite : 28,5% pour la CDU/CSU (droite de gouvernement) et 20,8% pour l’AfD (droite radicale). Pourtant, bien qu’arrivée en tête, la droite n’a pas de majorité au Bundestag. La seule coalition envisageable semble être une alliance forcée avec l’AfD ou le SPD. La première alliance est empêchée par le cordon sanitaire et la seconde, bien que plus probable, ne coule pas de source car l’opposition entre les deux partis s’est récemment accentuée. En effet, ils sont chacun débordés par un parti plus radical les obligeant à tenir des lignes plus dures comme LR et le PS en France. Pour schématiser, il est plus difficile d’envisager Laurent Wauquiez/Bruno Retailleau travailler avec Olivier Faure qu’Alain Juppé avec Dominique Strauss-Kahn.

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Le moteur de l’Europe tombe en panne

Longtemps perçue comme le pilier économique de l’Europe, l’Allemagne fait face à une triple crise : économique, industrielle et sociale. Sur le plan économique, le PIB allemand a reculé de 0,3 % en 2023, puis de 0,2 % en 2024. En comparaison, l’Espagne, considérée comme plus fragile, a affiché une croissance de 2,1 % sur la même période. De plus, la production industrielle allemande a chuté de 1,6 % en 2024, en raison des coûts énergétiques élevés et de la baisse de la demande chinoise, son principal partenaire commercial. Enfin, sur le plan social, l’Allemagne a atteint 6,1% de chômage en janvier, son plus haut niveau depuis 10 ans (hors Covid). Un point de chômage sépare l’Allemagne de la France contre plus de 4 points en 2017 !

Une Allemagne instable et ingouvernable affaiblira l’Europe. Pendant des décennies, l’Allemagne a façonné les politiques européennes, qu’il s’agisse de la gestion de la crise des dettes souveraines ou du plan de relance post-Covid. Les débats cruciaux sur les nouvelles règles budgétaires européennes et la défense commune stagnent en raison de l’indécision allemande. Alors que l’Europe doit faire face à des pressions économiques croissantes, à des États-Unis ou une Chine plus agressifs que jamais et à la guerre en Ukraine, l’absence d’un leadership fort en Allemagne entrave la capacité de l’UE à réagir de manière coordonnée. La campagne électorale nationale allemande a monopolisé l’attention de ses dirigeants, qui délaissent ainsi les enjeux européens. Historiquement moteur de l’intégration européenne, l’Allemagne devient un facteur de blocage, privant l’UE de sa boussole habituelle.

La fin de l’Europe allemande ?

Une Allemagne ingouvernable pourrait signer la fin de l’Europe allemande et offrir une opportunité à la France de prendre le leadership de l’Europe. Seulement, cette idée souffre de deux écueils. D’une part, les Allemands ne semblent pas prêts de revenir sur les erreurs qui ont conduit à faire du pays européen le plus puissant, un pays dépendant. Dépendant sur le plan militaire des Américains, dépendant sur le plan économique et commercial de la Chine et dépendant sur le plan énergétique de la Russie. Or, une Allemagne dépendante conduit naturellement le reste des pays européens d’Europe du Nord et de l’Est à suivre ce même chemin néfaste. D’autre part, la France d’Emmanuel Macron est un pays affaibli par une crise politique marquée par une dissolution qui aura coûté un trimestre de croissance économique et une censure qui aura coûté 12 Mds € aux finances publiques. Sans compter qu’Emmanuel Macron espère que l’éventuelle accession de M. Merz (CDU) à la chancellerie relancera le couple franco-allemand alors que ce dernier soutient l’accord commercial UE-Mercosur.

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Avec une Allemagne et une France en difficulté, d’autres pays prennent l’initiative. La Pologne, dont les dépenses militaires atteignent désormais 5% du PIB, s’impose comme un pilier stratégique en Europe de l’Est, notamment vis-à-vis des États-Unis. L’Italie de Giorgia Meloni affiche une croissance dynamique et s’impose comme un acteur économique de premier plan dans l’UE. Si la ligne économique de l’Union européenne devrait revenir à une ligne plus frugale avec le retour de la CDU, le nouvel équilibre des pouvoirs en Europe suggère que Berlin ne sera plus automatiquement le centre de gravité du Vieux-continent.

Si l’on peut se réjouir de la fin de l’Europe allemande, une Europe sans cap pourrait être pire à l’heure où les grandes puissances se réarment. Si les grands pays européens (France, Espagne et maintenant Allemagne) entrent en instabilité politique permanente alors qu’ils doivent se redresser, la question de dégager une majorité se posera. Du point de vue des électeurs, elle existe dans les trois pays : c’est l’union des droites. D’ailleurs, l’Italie, seul grand pays qui l’expérimente, est devenu en deux ans le nouveau pôle de stabilité de l’Europe… Les prémices d’une nouvelle ère en Europe ?

Poutine, Musk, populistes: Emmanuel Macron voit des méchants partout… sauf à Alger

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Emmanuel Macron au téléphone lors du salon de l'agriculture. Il a appris peu de temps avant l'attaque terroriste survenue à Mulhouse, Paris, 22 février 2025 © Christian Liewig- POOL/SIPA

Emmanuel Macron se rend à Washington pour mettre en garde le président Trump contre l’autocrate Vladimir Poutine. L’épouvantail russe du président français cache-t-il son impuissance face à l’Algérie ?


Le populisme, voilà l’ennemi !

Qui est l’ennemi ? Emmanuel Macron, après avoir déclaré la guerre au Covid, au réchauffement climatique et au populisme, désigne cette fois Vladimir Poutine. Mais le chef de l’État a beau abracadabrer, nombreux sont les Français qui le tiennent pour leur adversaire. Jeudi dernier, Macron a dénoncé « la menace existentielle russe ». Ce lundi soir, il devrait rencontrer Donald Trump à Washington. Il entend lui dire : « Tu ne peux pas être faible face au président Poutine ». Mais que vaut ce conseil venant d’un président qui laisse l’Algérie humilier la France ? Samedi soir, sur TF1, Bruno Retailleau a rappelé que l’expulsion de l’islamiste algérien qui venait de commettre un attentat ou couteau à Mulhouse, tuant un passant en criant « Allah Akbar ! », avait été refusée dix fois par les autorités consulaires, en dépit d’une interdiction de territoire1. Le rapport de force que réclame le ministre de l’Intérieur face à l’Algérie, au nom de la réciprocité, se heurte à l’apathie de l’Elysée. Cela fait 100 jours que Boualem Sansal, qui a entrepris une grève de la faim, est otage du régime. Désigner la Russie comme l’adversaire le plus dangereux, au même titre que « la nouvelle internationale réactionnaire » représentée par Elon Musk, est un artifice dont abuse Macron, désavoué dans les sondages. Comme l’a rappelé JD Vance dans son discours de Munich, « la menace la plus inquiétante pour l’Europe n’est ni la Russie ni la Chine », mais les dirigeants européens indifférents à leurs peuples et à l’immigration de masse.

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Oui, une menace existentielle assombrit la défunte « douce France ». Toutefois, la Russie est utilisée comme un leurre. L’épouvantail dissimule les renoncements intérieurs du chef de l’État, obsédé par sa détestation d’une « extrême droite » fantasmée : y sont précipités les plus lucides des citoyens. Quand le patron du Renseignement territorial, Bertrand Chamoulaud, estime que « les deux risques majeurs pour la cohésion nationale sont le narcotrafic et le séparatisme islamiste »2, il se rapproche davantage de ce qui fragilise le pays. L’islam colonisateur est bien un ennemi. Il a pour dessein, appuyé par l’extrême gauche et la somnolence du pouvoir, de conquérir par la subversion idéologique ou la violence terroriste. Or cette invasion est le produit de la légèreté des dirigeants, qui ont laissé la nation ouverte. Quand Retailleau exhorte de « changer les règles du droit pour protéger les Français », il pointe les politiques qui ont laissé faire, au prétexte d’un « État de droit » intouchable. Macron est comptable de cette débandade, même s’il n’a pas craint de qualifier le meurtre de samedi de « terrorisme islamiste ».

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Menace existentielle

Le poids électoral de la communauté musulmane en France le dissuade d’affronter l’islam politique, représenté notamment par la Grande mosquée de Paris. Les « populistes » sont pour lui des cibles moins dangereuses. Hier soir, les législatives allemandes ont confirmé la victoire des conservateurs CDU/CSU (28,6%) et le doublement du score du mouvement national AfD, Alles Für Deutschland (20,8%) que Macron désigne, avec les mondialistes, comme un parti paria. Le président ne voit pas que c’est lui qui est devenu, par son aveuglement, une menace existentielle pour la France.

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  1. https://www.youtube.com/watch?v=iSXY22JSS3M ↩︎
  2. https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/12/23/pour-le-patron-du-renseignement-territorial-les-deux-risques-majeurs-pour-la-cohesion-nationale-sont-le-narcotrafic-et-le-separatisme-islamiste_6463074_3224.html ↩︎

Les Ballets de Monte-Carlo à Paris

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© Alice Blangero

Pour la première fois, les Ballets de Monte Carlo sont à l’affiche du Théâtre de la Ville avec Vers un pays sage, une œuvre qui touche à la perfection.


On peut le dire sans détours : créée pour les Ballets de Monte Carlo par Jean-Christophe Maillot, la chorégraphie Vers un pays sage est un chef-d’œuvre. Ou pour le moins son chef-d’œuvre.

À quoi, dira-t-on, reconnaître un chef d’œuvre ? Ici, à la beauté sereine, à la lumière qui s’en dégage ; au style racé, à la virtuosité raffinée de l’écriture ; à ce sentiment de plénitude, d’accomplissement qui l’accompagne. Au temps aussi : composée il y a près de trois décennies, la pièce est toujours aussi envoûtante, toujours aussi surprenante, demeurant inaltérée. Les œuvres fortes ne vieillissent pas.

Art Déco

Sur des pages magnifiques du musicien américain John Adams, Fearful Symetries, qui sont comme un fabuleux tremplin pour qui sait y répondre chorégraphiquement, et tout en rendant hommage à son père qui était peintre, Maillot a composé un poème épique qui entraîne les magnifiques danseurs des Ballets de Monte-Carlo dans une aventure qu’on redécouvre avec émerveillement car tout y est beau. Et les lumières changeantes de Dominique Drillot, auteur d’un rose rare sur la scène des théâtres, ne font qu’exalter la pièce.

Il y a quelque chose de balanchinien dans cette composition qui rappelle l’esprit Art déco, dans certaines attitudes des danseurs surtout qui sont de fugitives rémanences de la sculpture des Années 30. Et cette énergie qui fouette les interprètes recèle quelque chose d’électrique.

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Avec Vers un Pays sage, les Ballets de Monte-Carlo brisent partiellement l’ostracisme auquel ils se sont heurtés à Paris depuis leur création. En plus de trente ans, cette compagnie qui se range parmi les meilleures d’Europe et qui a cent fois peut-être fait le tour du monde, ne s’est produite qu’à cinq reprises dans la capitale. Et il serait éloquent d’analyser les causes inavouées de ce dédain au sein des milieux culturels parisiens où l’on vous appréhende souvent en fonction de votre provenance plutôt que de vos qualités propres et auquel la réputation fâcheuse de la principauté dans ces milieux doit peut-être beaucoup. Sans compter la suspicion que suscite toute velléité d’excellence à une époque où règne cette tendance à la déglingue et à l’absence de talent qu’on flatte joliment du terme de liberté d’expression.

© Alice Blangero

Scrofuleuses et racornies

Hôtes occasionnels du Théâtre des Champs-Élysées, du Théâtre de Chaillot ou du Festival Paris Quartiers d’été où l’on avait déjà représenté Vers un pays sage en 1996, les Ballets de Monte Carlo n’avaient jamais été à l’affiche du Théâtre de la Ville d’où ils ont été soigneusement écartés durant des décennies. Et le plus étonnant dans cette programmation si tardive, c’est qu’elle ne survient peut-être pas pour les meilleures raisons, en l’occurrence, grâce à Vers un pays sage

Il y a fort à parier, hélas ! que ce soit l’autre partie du programme de cette série de représentations parisiennes qui ait déclenché cette invitation. Une pièce, Autodance, qui colle davantage à l’actuelle et très déroutante politique chorégraphique du Théâtre de la Ville et qui a été commise par l’Israélienne Sharon Eyal. On y retrouve les lumineux interprètes de Vers un pays sage mais métamorphosés en créatures souffreteuses, racornies, scrofuleuses, s’agitant frénétiquement en bordure d’un espace obscur figuré sur le sol, comme autant de cafards grouillant autour d’un gouffre. Consternant !

Jean-Christophe Maillot, la danse en festin

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Ballets de Monte Carlo, du 28 février au 5 mars 2025. Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt, à Paris.
01 42 74 22 77 ou theatredelaville-paris.com

Syrie: l’Occident peut-il faire confiance à Hayat Tahrir al-Cham?

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Annalena Baerbock et Jean-Noel Barrot à Damas avec Ahmad al-Sharaa, 3 janvier 2025 © AP/SIPA

Ce lundi 24 février se tient à Bruxelles un important conseil européen des ministres des Affaires étrangères au sujet de la nouvelle Syrie après la récente chute du régime tyrannique de Bachar al-Assad. Nos démocraties occidentales seront-elles toutefois assez lucides et vigilantes, contre un excès de naïveté, pour ne pas concourir à remplacer l’ancienne dictature politique par une nouvelle tyrannie religieuse, comme peut le laisser légitimement craindre le nouveau maître autoproclamé de Damas, ancien djihadiste ? C’est là la mise en garde de cette tribune critique ! Il en va, aussi, de notre propre sécurité et liberté…


Paris, 8 décembre 2024 : ce jour-là, il y a un peu moins de trois mois donc, le porte-parole du Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères déclarait, dans un communiqué officiel, qu’en « ce jour historique, pour la Syrie et le peuple syrien, la France saluait la chute du régime de Bachar al-Assad (…) après 13 ans d’une répression d’une grande violence contre son propre peuple ». Et d’ajouter aussitôt : « Les Syriens ont trop souffert. Bachar al-Assad laisse un pays exsangue, vidé d’une grande partie de sa population qui, si elle n’a pas été soumise à l’exil, a été massacrée, torturée et bombardée aux armes chimiques par le régime et ses alliés. » Il en concluait très opportunément, à l’instar de la plupart des chancelleries de nos démocraties occidentales : « La France rend hommage à toutes ses victimes. » Dont acte !

C’est ainsi donc que l’opposition syrienne, menée principalement là par le groupe « Hayat Tahrir al-Cham », dirigée par le commandant Ahmed Hussein al-Sharaa, mieux connu sous son nom de guerre d’Abou Mohammed al-Joulani, fondateur du très sanguinaire « Front al-Nosra » et donc, à cet inquiétant titre, ancien djihadiste à la solde du non moins abominable terrorisme islamiste, prenait effectivement le pouvoir, après une offensive éclair face à la débandade des forces loyalistes, en Syrie !  

L’Occident face à l’ancienne nébuleuse islamiste d’« Hayat Tahrir al-Cham » 

Nul ne regrettera certes ici la chute d’un dictateur aussi épouvantable que Bachar al-Assad. Mais, ceci étant dit et admis, faudra-t-il, pour autant, se réjouir précipitamment, en un nouvel, inconsidéré et béat excès de naïveté, de cette récente et soudaine accession au pouvoir syrien d’un ancien terroriste islamiste, et non des moindres au vu de l’abondance du sang sur ses mains, tel qu’Ahmed al-Sharaa précisément ? Prudence, bien évidemment, sinon, à l’aune de cet effrayant, cruel et sombre pedigree, méfiance ! On comprendra donc aisément, et à juste titre, l’inquiétude des capitales occidentales, malgré les assurances du nouveau maître de Damas, face à pareil profil politico-religieux. Nombreux sont par ailleurs les témoignages, encore aujourd’hui, d’un extrémisme malheureusement persistant au sein des villes et campagnes de Syrie !

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Mais il n’empêche : les pays de l’Union Européenne, sous l’égide de la France principalement, cherchent néanmoins, face à cet enjeu géopolitique et même stratégique pour la stabilité de cette région tout entière, sinon pour l’Occident en son ensemble, à établir un dialogue constructif avec la nouvelle administration syrienne, dominée donc, à l’heure actuelle, par cette nébuleuse constituée par « Hayat Tahrir al-Cham ». Et ce, malgré le fait que cette organisation soit encore classée, par les Etats-Unis d’Amérique notamment, comme « groupe terroriste » au niveau international !  

Rencontres diplomatiques à haut niveau et risque

Sur le plan pratique, ces efforts impliquent un certain nombre de  rencontres, tant officielles qu’officieuses, entre les responsables européens, de haut niveau, et Ahmed al-Sharaa lui-même, ancien rebelle autoproclamé donc aujourd’hui, depuis le 29 janvier 2025, nouveau Président, par intérim, de la Syrie et, à ce prestigieux titre, soucieux donc, en tentant de se présenter sous l’affable visage d’un allié rassurant quant aux intentions de son gouvernement, de répondre aux attentes de ses interlocuteurs occidentaux du moment. Le risque de tomber dans le piège n’est certes pas négligeable !

Ainsi, ces théoriques mais nécessaires précautions étant prises, l’Union Européenne prévoit-elle, aux dires des diplomates réunis vendredi dernier à Bruxelles, de lever très bientôt ses sanctions contre la Syrie, quoique cependant graduellement, en fonction des progrès véritablement démocratiques en matière de droits de l’homme et d’inclusion de ses différentes minorités et ethnies, notamment kurdes (au nord-est du pays) et alaouites (en s’interdisant d’avoir recours, par exemple, à la vengeance par rapport à Bachar al-Assad, d’origine alaouite précisément). 

Davantage : ces mêmes diplomates ont indiqué que les ministres des Affaires étrangères des 27 pays membres, réunis en conseil ce lundi 24 février dans la capitale belge, pourront officiellement prendre cette décision, lourde de conséquences positives ou négatives, suite à l’accord préliminaire trouvé lors de leur précédente réunion en janvier dernier.  

Un communiqué de la présidence française a par ailleurs rappelé les déclarations du président Emmanuel Macron soulignant l’importance de poursuivre la lutte contre le terrorisme, et précisant, en outre, que cette démarche était « dans l’intérêt du peuple syrien et de la sécurité nationale française ».  

Emmanuel Macron, dans le même esprit, a également insisté sur la nécessité d’intégrer les Forces démocratiques syriennes au sein du processus de transition politique en Syrie.  

Aussi, au début de cette année, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrotet son homologue allemande, Annalena Baerbock, se sont-ils donc rendus à Damas, où, munis d’un mandat de l’Union Européenne, ils ont rencontré Ahmed al-Sharaa justement. Barrot y a exprimé, parmi d’autres points essentiels, la volonté de la France d’apporter son « expertise juridique » en vue de soutenir la rédaction d’une nouvelle Constitution syrienne.  

L’inquiétude européenne malgré les assurances d’Ahmed al-Sharaa

Mais, nonobstant ces efforts de « Hayat Tahrir al-Cham » pour se montrer sous un jour plus « conciliant », espérant réduire ainsi les tensions avec les pays occidentaux, comme l’explique le chercheur Aron Lund dans une interview à Deutsche Welle, l’inquiétude des Européens, cependant, demeure.  

Aron Lund ajoute même que l’organisation pourrait revenir à ses « fondements idéologiques plus stricts » en cas de menaces à son encontre : attitude, celle-ci, alimentant, bien sûr, les craintes, au sein des démocraties occidentales, que son noyau djihadiste continue de la sorte, envers et contre tout, d’influencer sa politique générale, tant intérieure qu’extérieure.  

En ce qui concerne la communauté internationale, la docteure Faten Ghosn, directrice du département de gouvernance à l’Université d’Essex, au Royaume-Uni, estime, quant à elle, que la réponse occidentale restera conditionnée à la capacité du nouveau régime syrien de dissiper les inquiétudes liées à la propagation de l’idéologie islamiste.  

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Elle ajoute, non moins judicieusement : « Leur inquiétude grandit, car ils ne veulent pas voir émerger davantage de groupes extrémistes susceptibles d’engendrer plus de violence et d’accroître le flux de réfugiés vers l’Europe ».  

Bien qu’Ahmed al-Sharaa, chez qui l’on ne peut légitimement écarter d’indéniables calculs démagogiques et autres attitudes opportunistes, tente de rassurer la communauté internationale par des discours apaisants, la docteure Katia al-Khatibenseignante en droit humanitaire international, affirme que les mesures prises par les autorités syriennes « ne sont pas conformes à la vision de la résolution 2254 » des Nations-Unies. Elle espère donc que les conférences internationales, comme celle tenue récemment, le 13 février dernier, à Paris, permettront des avancées, concrètes et effectives, vers un changement plus positif, significatif sur le plan socio-politico-idéologique, en Syrie.  

Mises en garde et défi socio-politico-idéologique

Conclusion ? Au vu de semblable contexte, la menace terroriste reste une préoccupation dans la gouvernance actuelle de la Syrie, en raison notamment des profondes divisions entre les diverses, et parfois rivales entre elles, factions armées. À cet épineux mais réel sujet, où les mises en garde tendent toujours plus et fort heureusement à se multiplient avec lucidité tout autant que réalisme, Bruce Hoffman, professeur de sciences politiques à l’Université de Georgetown, rappelle que la rivalité historique entre l’ « État islamique » (Daech) et « Hayat Tahrir al-Cham » complique encore davantage la situation sécuritaire de la région : ce qui, bien évidemment, n’est pas peu dire !  

Ainsi le principal défi, à l’heure actuelle, reste-t-il donc d’empêcher un retour des organisations terroristes en Syrie, surtout au regard des très légitimes préoccupations sécuritaires européennes, l’Europe ayant déjà été frappée à plusieurs reprises, de manière particulièrement sanglante et dramatique, par de violentes attaques terroristes, comme celles successivement, à Paris, du 7 janvier 2015, à « Charlie Hebdo », où sa rédaction a été pratiquement disséminée, avec 12 morts et 11 blessés, puis du 13 novembre de la même année (au Bataclan, notamment), attentats meurtriers ayant fait, de sinistre mémoire quant au nombre très élevé de victimes en ce terrible bilan humain, 130 tués, tous innocents, et 413 blessés hospitalisés, dont 99 en situation d’urgence absolue !

Restons vigilants face au péril islamiste : ne remplaçons pas une dictature politique par une tyrannie religieuse !

Reste à espérer, en ces difficiles conditions, que la prochaine conférence internationale sur la Syrie, qui se tiendra à Bruxelles le 17 mars prochain, portera réellement ses fruits, positifs, démocratiques et dans l’intérêt de tous. Et ce en veillant donc, en demeurant lucides et vigilants, à ne pas remplacer, comme lors de l’ancien et prétendu « printemps arabe » (en Tunisie, Egypte, Irak, Lybie et Algérie), une dictature politique par une tyrannie religieuse : ce qui, et ce n’est pas peu dire, est peut-être pire encore !

Car, à réhabiliter précipitamment ce  dangereux islamiste qu’est le nouveau maître incontesté, même si éminemment contestable, de la Syrie, le péril, pour la sauvegarde même du monde libre et démocratique, est grand, en Occident comme ailleurs.

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Paris-Alger, le curieux bras de fer

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Mulhouse, 23 février 2025 © CATHERINE KOHLER/SIPA

Attentat terroriste au marché de Mulhouse ! Oui, mais rassurez-vous : ce n’est qu’un Algérien de 37 ans fiché S pour terrorisme et sous OQTF… Si ce n’était pas si dramatique – un homme est mort-, on pourrait presque en rire.


À la veille d’un dimanche au cours duquel nos voisins allemands ont placé l’AfD en deuxième place aux élections – après une campagne centrée sur les débats sur l’immigration, et marquée par des attaques sanglantes commises par des migrants- , les Français ont de nouveau été la cible d’un attentat au couteau. Samedi après-midi, en plein centre-ville de Mulhouse, Brahim A., un Algérien de 37 ans faisant l’objet d’une procédure d’extradition, s’en est pris aux agents de la ville. Il a tué un Portugais de 69 ans. Le commentaire d’Elisabeth Lévy.


L’attentat terroriste qui a fait un mort et sept blessés à Mulhouse n’a pas fait la une des journaux bien longtemps. C’est normal, on finit par s’habituer : il n’y a pas une semaine sans qu’un terroriste islamiste (généralement demandeur d’asile ou réfugié) frappe une ville européenne (Munich, Berlin en Allemagne, Villach en Autriche, Apt en France…).

La singularité de l’attentat de samedi: le régime algérien a le sang de ce héros portugais sur les mains. On peut incriminer les failles de notre droit qui interdit d’incarcérer un homme jugé dangereux en attente d’expulsion, mais les services de l’Etat ont fait leur boulot. Il n’y a pas de trou dans la raquette cette fois-ci, le problème c’est la raquette elle-même.

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Fiché pour radicalisation terroriste, Brahim A. a été refusé dix fois par l’Algérie. Ce pays interdit son territoire à un de ses ressortissants, il piétine donc ses droits fondamentaux, mais évidemment il n’y a pas de CEDH à l’horizon. À nous de nous débrouiller avec des malfrats et des tueurs à qui nous ne devons strictement rien. Et Boualem Sansal, otage français, a entamé hier une grève de la faim pour pouvoir garder son avocat juif !  

Bruno Retailleau, Patrick Stefanini, Jordan Bardella et toute la droite appellent à changer de ton et à créer un rapport de forces. Amen.

L’affaire Sansal aurait déjà dû entraîner sanctions financières, gels des visas, et fermetures de consulats. En plus de retenir Boualem Sansal, les Algériens nous font tous les quatre matins un chantage aux OQTF pour lesquels ils exigent des laissez-passer consulaires qu’ils ne donnent pas même à des ressortissants ayant des papiers en bonne et due forme !

La question n’est pas de savoir ce qu’il faut faire, on le sait tous, mais pourquoi on ne le fait pas. Il y a de petits intérêts commerciaux et sécuritaires, bien sûr, mais surtout l’idéologie et la psychologie d’une grande constellation gauche / médias / quai d’Orsay. On a fait tant de mal aux Algériens, et si on s’énerve ils vont s’énerver encore plus. Des voix insoumises expliquent que si le tueur de Mulhouse avait été expulsé il aurait pu commettre des attentats en Algérie, donc qu’il valait mieux le garder… C’est très généreux avec la vie des autres. Alors que des « influenceurs » répondront aujourd’hui de leurs diatribes devant le tribunal, il serait stigmatisant de se demander combien il y a d’influencés.

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Nous sommes gouvernés par des lâches ou, plus poliment, par des herbivores incapables de nous protéger des carnivores qui nous entourent (qu’ils s’appellent Trump, Poutine ou Tebboune).

Cette soumission est incarnée par le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot. Voilà ce qu’il répond dans Le Point à Bruno Retailleau: « Ce qui nous intéresse, c’est la sécurité des Français, pas le rapport de force pour le rapport de force. Nous agissons par la diplomatie, avec une palette d’outils dont nous parlons, et d’autres dont nous ne parlons pas. » Grâce à cette merveilleuse palette, Brahim A. était libre en France et Boualem Sansal est incarcéré en Algérie.


Cette chronique a été diffusée sur Sud radio

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