Vendredi soir, en Meurthe-et-Moselle, près de Nancy, un gendarme de 24 ans a été volontairement percuté par le pilote d’une moto engagée dans un rodéo urbain. L’individu, déjà connu de la justice, a pris la fuite[1]. Pour Charles Rojzman, auteur de Les masques tombent (FYP Éditions), cette montée des violences contre les forces de l’ordre, particulièrement dans certains quartiers, traduit une rupture profonde entre une partie de la jeunesse et la République — une fracture nourrie par un discours victimaire, le rejet de l’autorité et un séparatisme culturel que l’État ne peut plus ignorer sans danger.
À Neuves-Maisons près de Nancy un gendarme a été grièvement blessé lors d’un refus d’obtempérer à l’occasion d’un rodéo automobile. L’homme, percuté volontairement par un chauffard de 20 ans qu’il tentait d’intercepter, est aujourd’hui hospitalisé. Il aurait pu mourir. Comme d’autres policiers ou gendarmes avant lui, victimes d’une violence qui ne cesse de croître et qui, loin d’être un phénomène marginal, traduit une dégradation continue de l’ordre républicain.
Ce fait n’est ni anecdotique, ni exceptionnel. Il s’inscrit dans une série d’actes devenus presque banals dans certains quartiers : refus d’obtempérer, rodéos sauvages, caillassages de commissariats, traquenards tendus aux pompiers. Un refus d’obtempérer est enregistré toutes les vingt minutes en France. Une fréquence terrifiante, révélatrice d’un rapport profondément conflictuel à l’autorité.
Un défi permanent
La plupart du temps, les auteurs sont des jeunes, parfois mineurs, souvent sans permis, au volant de véhicules volés. Ils roulent à tombeau ouvert, parfois sous l’emprise de drogues, et se sentent intouchables. Face à eux, des forces de l’ordre tenues par des protocoles stricts, accusées à la moindre intervention, et de plus en plus exposées à des risques mortels.
La blessure de ce gendarme ne fait pas les gros titres. Elle ne déclenche ni manifestations, ni indignation médiatique. Pourtant, elle dit tout d’un climat d’insécurité et de défi permanent dans lequel nos agents sont contraints d’opérer.
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Contrairement à ce que certains veulent faire croire, les policiers et les gendarmes n’ont que très rarement des comportements inadmissibles. Ils sont dans leur immense majorité des serviteurs de la loi, épuisés, exposés, et souvent démoralisés. Ils tiennent la digue, alors même qu’ils se sentent lâchés par leur hiérarchie, désavoués par les institutions, et traités en ennemis par une partie de la population.
Cette confrontation entre une jeunesse en rupture et les représentants de l’État ne date pas d’hier. Elle dure depuis plus de quarante ans. J’ai moi-même participé à la création de la police de proximité initiée par Jean-Pierre Chevènement. C’était un projet ambitieux, lucide, humain : rapprocher la police de ceux qu’elle protège, reconstruire une confiance. Ce projet a été brutalement arrêté sous Nicolas Sarkozy, dans un geste purement politique.
Un documentaire, À l’écoute de la police, réalisé par Bernard Mangiante, retrace cette expérience à travers des formations de formateurs de la police nationale que j’ai animées. On y voit les policiers exprimer leur désarroi, leur isolement, leur colère devant les contradictions d’une institution bureaucratisée. Et l’on voit, en face, des jeunes qui ne reconnaissent plus — ou pas — la légitimité de la République.
Les discours victimaires de la gauche compliquent la tâche des forces de l’ordre
La fracture est là : dans cette hostilité profonde, cette défiance transformée en haine, que nourrissent certains discours. Cette jeunesse — ou du moins une partie d’entre elle — se vit comme victime d’un système raciste, d’un État oppresseur. Elle ne voit plus les policiers comme des agents de protection, mais comme les soldats d’une armée d’occupation.
Ce climat est alimenté par un discours victimaire, complaisamment relayé par une partie de la gauche radicale et amplifié par les propagandes islamistes. On excuse tout. On justifie tout. On inverse les responsabilités. Le policier devient coupable, le délinquant devient victime.
Or, il faut dire les choses avec clarté : ces violences, ces refus d’obtempérer, ces rodéos ne sont pas de simples provocations. Ils sont les manifestations visibles d’un rejet profond de la France et de ses valeurs. Ce n’est pas tant l’autorité qu’on défie, c’est la nation qu’on combat.
Il ne s’agit pas de nier la réalité sociale, les ghettos, la précarité, les discriminations parfois vécues. Mais il faut aussi oser dire que cette situation est aggravée par des comportements collectifs, des logiques de clan, un repli identitaire assumé, et un refus d’intégration alimenté de l’intérieur. Ceux qui ont entretenu ce séparatisme culturel portent une lourde part de responsabilité : élus, intellectuels, associations, relais communautaristes. Tous ceux qui aujourd’hui feignent de découvrir ce qu’ils ont contribué à produire.
La République ne peut pas rester passive. Cette jeunesse — radicalisée, violente, revendicative — doit être confrontée à la justice. Elle ne peut bénéficier d’aucune indulgence systématique. Les discours d’excuse, d’absolution automatique, ne font qu’alimenter le désordre. La loi doit être appliquée avec fermeté, et sans trembler.
Car si nous ne faisons rien, si nous laissons se banaliser ces actes hostiles au pacte républicain, nous verrons se lever sur notre propre sol une armée d’enfants-soldats. Des jeunes embrigadés non pas au service d’un idéal, mais au service d’ambitions totalitaires, d’une haine apprise, entretenue, dirigée contre la France. Il est encore temps d’agir. Mais ce temps se réduit. Et l’aveuglement, l’inaction ou la lâcheté pourraient bientôt ne plus être des erreurs, mais des fautes historiques.
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[1] C’est finalement dimanche en fin de matinée que le suspect s’est présenté de lui-même au commissariat de Nancy, où il a aussitôt été placé en garde à vue avant d’être incarcéré.