Pierre Joncquez explore dans son nouvel ouvrage l’influence originale des Évangiles dans le cinéma hollywoodien. Des films populaires des années 80 et 90, apparemment éloignés de tout message religieux, contiennent en fait de nombreuses références bibliques.
Pierre Joncquez vient de publier aux Éditions Salvator un ouvrage sur l’étonnante inspiration d’Hollywood par les Évangiles. L’auteur présente cette hypothèse avec brio et beaucoup d’esprit.

Malgré quelques controverses sur sa paternité, le cinéma est bien une invention française, et le marché a largement été dominé à ses débuts par les productions françaises et européennes. Mais le retard a vite été rattrapé quand quelques pionniers américains se sont installés sous le soleil californien, dans les environs de Los Angeles, aux côtés des parcelles d’une promotion immobilière nommée « Hollywood », à la recherche de luminosité, mais surtout d’absences de syndicats sur la côte ouest et à l’abri de la pression des taxes du trust Edison qui avait le monopole de la vente de pellicule…
L’immense historien du cinéma, Georges Sadoul (1904-1967) a relaté avec précision les débuts de l’art et de l’industrie du cinéma. Il rappelle notamment ce qu’il nomme « La première crise du cinéma de 1907-1908 » alors que celui-ci stagnait comme un divertissement de foires : « Beaucoup croyaient le cinéma prêt à mourir. Des salles obscures se vidaient et faisaient faillite. La “crise du sujet“ avait sa part dans cette décadence ».
Les Européens vont être dans les premiers à proposer de véritables histoires pour scénariser les films. Les Américains vont suivre et avec le succès que l’on sait, faisant en sorte que Hollywood domine encore de nos jours largement le marché mondial de l’audiovisuel et aussi l’imaginaire collectif…
Pas tout de suite évident…
Mais où aller chercher ces histoires racontées sur grand écran ? Dans un premier temps on se tourne vers la littérature, à l’image du projet français « Film d’Art » pour lequel on fait appel à Anatole France ou Edmond Rostand.
Et quelle plus universelle littérature que celle des Évangiles ? Si tant est qu’on accepte ces dernières davantage comme des biographies antiques…
Il n’est donc pas si étonnant de trouver des éléments évangéliques dans les histoires racontées par le cinéma, surtout depuis que celui-ci est dominé par les États-Unis, un pays qui bien que « laïque », donne une place et une visibilité très importante à la religion, essentiellement chrétienne, dans la sphère publique.
Pierre Joncquez recherche et trouve surtout des références aux Évangiles dans des films hollywoodiens auxquels on ne penserait pas immédiatement – Cela serait trop simple avec « Les Dix commandements » de Cecil B. DeMille (1956) ou « La Passion du Christ » de Mel Gibson (2004)…
A lire aussi : « Mission impossible, The Final Reckoning » : Ne boudons pas notre plaisir !
Pierre Joncquez cible ainsi des films « cultes », issus de la culture populaire « VHS » des années 80 et 90, qui ne semblent pas forcément avoir de lien avec les Évangiles de « Piège de cristal » (1988) en passant par le dessin animé « Le Roi lion » (1994) et jusqu’à « La soupe aux choux » (1981), oui oui… (Seule exception à l’origine nord américaine des films présentés).



En lisant les chapitres dédiés à chaque film, on peut être sceptique au départ et se dire qu’il s’agit de simples coïncidences, voire de biais cognitifs de l’auteur, car il est toujours possible de trouver des détails dans une œuvre pouvant être orientés dans le sens de notre propos…
Et pourtant, on adhère rapidement aux démonstrations de Pierre Joncquez dont les recherches sont érudites et documentées, tout en n’étant jamais pontifiantes, mais au contraire pleines d’humour – On trouve même un tableau synthétique de la « continuité » entre Moïse, Jésus et… Superman pour sa version cinématographique de 1978 !
À chaque chapitre, on est curieux et en attente de voir comment l’auteur va arriver à nous convaincre de l’influence plus ou moins cachée des Évangiles dans une superproduction hollywoodienne que rien ne disposait à porter un message biblique…
Objectif caché ?
C’est ainsi que l’auteur compare par exemple le film de science-fiction « Terminator » (1984) à l’annonciation, le film d’action « Piège de cristal » (1988) à la Passion du Christ, la comédie « Un jour sans fin » (1993) à la purification de l’âme au purgatoire, etc.
Peut-il s’agir d’un objectif non avoué d’évangélisation par les majors hollywoodiennes ?
L’influence quasi officielle de la religion dans le cinéma américain appartient normalement au passé. Le temps du Code Hays, du nom du sénateur et président de l’association des producteurs et distributeurs américains, qui a imposé des recommandations morales et une autocensure puritaine au cinéma entre les années trente et cinquante, est révolu.
Mais il peut s’agir d’une sorte de cryptomnésie, la mémorisation inconsciente qui réapparaît, comme cela arrive parfois à des artistes de bonne foi. Ou bien, s’agit-il simplement de la preuve que la Bible reste une influence majeure des scénaristes et « La plus grande histoire jamais contée » du nom du film de 1965 de George Stevens…
Price: 19,80 €
9 used & new available from 11,44 €
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !