Les enfants violents des cités qui se déchainent dans les rues le soir de la Fête de la musique : le symptôme d’un effondrement civilisationnel.
La Fête de la musique, censée être un moment de partage culturel et de liesse populaire, s’est muée cette année encore en une démonstration brutale d’un désordre profond. Dans plusieurs villes de France, les festivités ont été le théâtre de scènes inquiétantes : pillages de commerces, voitures incendiées, agressions au couteau, et même parfois agressions sexuelles. Plus grave encore, des femmes ont dénoncé sur les réseaux sociaux avoir été droguées à leur insu à l’aide de piqûres, phénomène aussi choquant qu’inquiétant.
La police ne sait plus où donner de la tête
Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, la Fête de la musique 2025 a été marquée par plus de 730 interpellations, près de 60 policiers blessés, et une centaine d’agressions recensées sur l’ensemble du territoire, dont plusieurs à l’arme blanche. À Lille, Lyon, Bordeaux, Marseille ou encore Nanterre, les forces de l’ordre ont été débordées face à des groupes organisés, parfois très jeunes, multipliant les attaques coordonnées contre les commerces, les véhicules ou les passants. À Paris, la préfecture a confirmé l’ouverture de plusieurs enquêtes pour violences sexuelles en réunion, tandis que la multiplication des cas de piqûres suspectes, souvent en pleine foule, alimente la sidération.
Du côté du gouvernement, le ministre Gérald Darmanin a dénoncé « des actes barbares et lâches, qui n’ont rien à voir avec la fête », tout en appelant à « une réponse judiciaire ferme et rapide ». Mais dans l’opposition, les critiques fusent. Jordan Bardella (RN) y voit « l’expression d’une insécurité systémique que le pouvoir refuse d’admettre », tandis que Manuel Bompard (LFI) évoque « une stratégie de la tension exploitée politiquement, sans jamais s’attaquer aux causes sociales profondes ». Le président Emmanuel Macron, en déplacement en Bretagne, s’est dit « préoccupé par la multiplication des violences urbaines », affirmant que « la République ne reculera pas ».
Tissu social et jeunesse déchirés
Ces violences ne sont ni des faits divers isolés ni de simples dérapages liés à l’alcool ou à la foule. Elles traduisent une dégradation accélérée de notre tissu social. Elles révèlent une jeunesse hors de tout cadre, une culture de la violence banalisée, et une société qui perd ses repères. Plus qu’un problème de sécurité, nous faisons face à une crise de civilisation. Et les responsables sont multiples : familles déstructurées, État démissionnaire, école en faillite, communautarismes identitaires, et une République paralysée par sa propre lâcheté. Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement l’ordre public, c’est l’avenir même de la nation.
Il est temps de cesser les circonvolutions. La violence des jeunes dans les cités n’est pas un accident. Ce n’est pas non plus un simple effet collatéral de la pauvreté. C’est le fruit amer d’un projet échoué de modernité démocratique, incapable de maintenir ses propres structures de transmission, de régulation, d’autorégénération. Cette violence est un cri, mais un cri dirigé contre le silence coupable d’une société qui ne sait plus ce qu’elle est, ni ce qu’elle veut.
Pendant trop longtemps, on a refusé de voir. On a même interdit de penser. Nommer les causes profondes de cette désintégration était suspect. Pointer la responsabilité de certains modèles familiaux ou culturels était un délit moral. Le politiquement correct a imposé sa chape de plomb : toute analyse un tant soit peu honnête était aussitôt assimilée à un discours de haine. Il est temps de briser ce mur d’autocensure.
Les jeunes violents des cités sont les enfants d’un vide. Vide de l’autorité paternelle, disparue sous les coups de boutoir de la délinquance, du consumérisme, de l’abandon social. Le père, lorsqu’il n’est pas physiquement absent, est souvent disqualifié dans son rôle : soit il est marginalisé, soit il incarne lui-même l’arbitraire ou la violence. L’adolescent sans repères se construit alors dans la rue, dans le gang, dans la loi du plus fort.
Vide d’une mère laissée seule, dépositaire d’une mission impossible, sans soutien, sans relais, parfois elle-même sous emprise culturelle ou religieuse. Elle tente de régner sur un foyer miné par l’anomie, souvent sous la domination d’un fils devenu chef de clan à la maison. Ce renversement des générations est une bombe à retardement sociale et psychologique.
Fausse tolérance
Vide d’un État devenu spectateur de sa propre impuissance, piétinant ses principes au nom d’une tolérance dévoyée. L’administration ferme les yeux, les politiques reculent, la justice tergiverse. L’ordre est devenu un mot tabou, la fermeté un acte de provocation.
Et l’École ? Elle aussi s’est effondrée. Jadis instrument d’émancipation, elle est devenue le théâtre de l’inversion des rôles : ce ne sont plus les élèves qui doivent s’adapter à l’institution, mais l’institution qui courbe l’échine devant les revendications identitaires, les communautarismes agressifs, les refus d’apprendre. L’autorité du professeur est constamment remise en question, la discipline remplacée par la peur du scandale. Les savoirs fondamentaux cèdent la place à une pédagogie de l’évitement.
N’ayons plus peur de nommer ce que tout le monde sait : une partie de cette jeunesse violente est irriguée par un islam de rupture. Pas la foi tranquille du croyant, mais l’islam de combat, politique, identitaire, conquérant. Celui qui enseigne la supériorité de la loi divine sur les lois humaines. Celui qui réduit la femme à l’ombre, l’étranger à l’ennemi, la France à une terre à réislamiser. Cet islam-là n’est pas une spiritualité : c’est une stratégie.
Il prospère sur le terrain que la République a abandonné : l’imaginaire, la règle, le récit collectif. Il offre un contre-modèle cohérent, totalisant, à une jeunesse en rupture. Face à une société qui n’ose plus transmettre, qui doute d’elle-même, qui s’excuse en permanence, l’islam radical offre de la fierté, de la discipline, un sens. Il parle à ceux que la République a désertés. Et il le fait mieux qu’elle, parce qu’il croit à ce qu’il dit, quand nous ne croyons plus à rien.
La France est piégée par sa propre lâcheté. Elle a laissé s’installer des enclaves où sa loi ne s’applique plus, où son école est décriée, où son autorité est contestée, où ses valeurs sont rejetées. Ces territoires sont devenus des zones grises, des foyers de désordre culturel et politique, des contre-sociétés où la logique du droit a cédé la place à celle de l’appartenance.
Et quand elle tente timidement de rappeler ses principes, elle se fait traiter de raciste, de colonialiste, de réactionnaire. Ce chantage moral, orchestré par certaines élites universitaires et médiatiques, a figé l’action publique dans un immobilisme suicidaire.
Il ne s’agit pas de stigmatiser, mais d’affirmer. Non, toutes les cultures ne se valent pas. Non, toutes les pratiques religieuses ne sont pas compatibles avec la démocratie. Oui, il faut poser des limites. Oui, il faut exiger l’adhésion aux principes républicains. Et s’il le faut, exclure ceux qui les rejettent frontalement. Il n’y a pas de liberté sans frontières, pas d’intégration sans exigence.
Restaurer ou sombrer
Ce n’est pas une simple affaire de volontarisme ou de slogans incantatoires. Il ne suffit pas de dire « il faut ». Ce qu’il faut, précisément, c’est sortir du registre moral pour revenir au politique, c’est-à-dire au conflit assumé entre des visions du monde. Il faut accepter que toute société repose sur une hiérarchie de valeurs, sur des choix de civilisation. La nôtre, si elle veut survivre, doit cesser de composer avec ce qui la nie.
Il ne s’agit pas d’en appeler à un réveil général, mais à une réforme structurelle de l’action publique. Réaffirmer l’autorité, cela suppose de réarmer les institutions, de garantir à l’école, à la police, à la justice, les moyens et la légitimité d’agir sans peur d’être désavouées. Cela suppose aussi de sortir de l’ambiguïté législative : interdire les discours de haine, certes, mais reconnaître que certains discours religieux, lorsqu’ils minent l’ordre public et la cohésion nationale, ne relèvent pas de la liberté de conscience, mais de la subversion.
Il faut également poser la question du rapport de force culturel. Ce que nous affrontons n’est pas seulement une crise sociale, mais une contestation de fond du projet démocratique par des logiques communautaires, parfois théocratiques, souvent violentes. La réponse ne peut être ni molle, ni purement morale. Elle doit être politique, stratégique, résolue.
Sans cela, la suite est connue : des quartiers toujours plus nombreux en rupture, des services publics en repli, une République réduite à la périphérie de son propre territoire. Une société qui ne se défend pas finit par se dissoudre. Ce qui se joue ici, ce n’est pas seulement la sécurité, c’est la possibilité même de faire encore peuple.
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