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Berlin: 1500 islamistes rêvent d’un califat en plein cœur de l’Europe!

Les barbus, la police et un tribunal laxiste


Berlin: 1500 islamistes rêvent d’un califat en plein cœur de l’Europe!
Berlin, 5 juillet 2025 © Kuenne/PRESSCOV/Shutterstock/SIPA

Malgré leurs efforts, dans la capitale allemande, la mairie et la police sont de plus en plus régulièrement débordées par des manifestations communautaristes radicales mobilisant les foules grâce à la guerre à Gaza.


Le 5 juillet 2025, Berlin a été le théâtre d’un spectacle aussi sidérant qu’inquiétant. Près de 1 500 militants islamistes, réunis sous la bannière de l’organisation « Génération Islam », ont défilé dans les rues de la capitale allemande pour réclamer l’instauration d’un califat islamique ! 

Initialement interdit par la police, ce rassemblement, orchestré par le prédicateur et youtubeur Ahmad Tamin, a finalement été autorisé par une décision de dernière minute du Tribunal administratif supérieur de Berlin. Sous couvert d’une « campagne de protection pour Gaza », les manifestants ont brandi des drapeaux évoquant ceux des talibans et de l’État islamique, dans une mise en scène où l’antisémitisme et les appels à la violence se mêlaient à une rhétorique enflammée. 

Cet épisode, loin d’être marginal, expose crûment les failles d’une démocratie allemande qui peine à répondre avec clarté à la poussée de l’islamisme radical.

Ahmad Tamin, apôtre du califat

Berlin a donc été samedi dernier le théâtre d’un spectacle aussi troublant que révélateur. Devant l’ambassade d’Égypte, Ahmad Tamin, figure de proue de « Génération Islam » et prédicateur charismatique, a déversé un discours incandescent. Sous prétexte de défendre les Palestiniens de Gaza, ce tribun de l’islamisme militant a franchi un cap, prônant une vision où la charia régnerait en maître et où un califat viendrait unifier les musulmans du monde entier.

Devant une foule galvanisée, Tamin a d’abord interpellé les autorités égyptiennes avec une injonction brutale : « Levez-vous pour vos frères à Gaza, ou Allah vous jugera ! » Puis, dans une escalade rhétorique, il a accusé de trahison ceux qui restent passifs face à la crise : « Où est votre honneur ? Où sont les hommes ? » Des propos sans ambiguïté : l’inaction est assimilée à une trahison, et seule une réponse active, guidée par la foi et la lutte, est jugée légitime. 

Ce n’est pas la première fois que Tamin fait trembler Berlin. En 2024, sur Alexanderplatz, il avait déjà marqué les esprits en lançant, lors d’une prière publique en arabe : « Ô Allah, détruis les injustes, ceux qui soutiennent Israël et son génocide. Humilie-les devant le monde entier. » Des paroles qui, déjà, sentaient la poudre. Mais cette fois, le discours prend une ampleur nouvelle. Au-delà des imprécations, Tamin esquisse un projet politique : une « armée musulmane » pour fédérer la Oumma, non pas comme une simple communauté spirituelle, mais comme un bloc politique uni sous l’étendard d’un califat. Les pancartes brandies et les drapeaux frappés de la Chahada témoignaient sans équivoque d’un projet d’État islamique régi par la charia, dans lequel Israël n’aurait aucune légitimité. 

Le plus sidérant ? Ce prêche enflammé, où les femmes voilées étaient reléguées à l’écart des hommes, a bien eu lieu malgré une tentative d’interdiction par la police berlinoise. Contre toute attente, la justice allemande a annulé la décision, provoquant une onde de stupeur. Barbara Slowik, cheffe de la police, n’a pas mâché ses mots : « En sept ans et demi à ce poste, je n’ai jamais été aussi déçue par une décision de justice. » Même indignation du côté du maire de Berlin, Kai Wegner (CDU), qui a dénoncé un verdict « aberrant », rappelant une évidence que certains semblent oublier : un califat et son idéologie « n’ont pas leur place en Allemagne ». 

Malgré la présence d’environ 600 policiers, la manifestation a été le théâtre de slogans d’une violence glaçante. D’après Die Welt, des cris tels que « mort aux Juifs » et « mort à Tsahal » ont été entendus dans la foule, dans une atmosphère où l’antisémitisme le plus brut côtoyait les appels à cette fameuse unité islamique. Selon l’Office fédéral de protection de la Constitution (BfV), le mouvement « Génération Islam » est proche de Hizb ut-Tahrir (HUT), une organisation islamiste interdite en Allemagne depuis 2003.

Berlin-Gaza : quand la rue allemande bat le pavé pour le Hamas

Depuis l’attaque barbare du Hamas contre Israël, le 7 octobre 2023, l’Allemagne, et en particulier Berlin, est devenue le théâtre régulier de manifestations pro-palestiniennes où le militantisme dérape de plus en plus ouvertement vers la radicalisation. Chaque semaine ou presque, des cortèges défilent dans la capitale sous une iconographie bien rodée : drapeaux palestiniens en nombre, keffiehs soigneusement noués, banderoles en arabe, slogans rageurs – le tout dans une atmosphère où l’antisionisme vire très volontiers à l’antisémitisme pur et simple.

Le 21 juin 2025, ce climat a atteint un nouveau sommet. Sous l’étendard « United4Gaza », 15 000 manifestants ont envahi les rues de Berlin. La journée s’est soldée par des affrontements violents avec la police, une cinquantaine d’interpellations, et un fait particulièrement révélateur : la petite contre-manifestation pro-israélienne – une vingtaine de personnes seulement – a dû être évacuée pour des raisons de sécurité. Les forces de l’ordre, débordées, n’ont pas su garantir leur protection. Un aveu d’impuissance aussi saisissant qu’inquiétant, révélateur de la fragilité croissante du vivre-ensemble dans la capitale allemande.

Ce n’était pas une exception. Le 12 octobre 2024, à Hambourg, 2 300 militants islamistes s’étaient déjà rassemblés sous la bannière du groupe « Muslim Interaktiv », autre bras militant du mouvement radical Hizb ut-Tahrir (HUT). Ce jour-là, dans une mise en scène rigoureusement masculine, les manifestants ont lancé un appel explicite à l’instauration d’un califat islamique. Face à cette démonstration de force de l’islam politique, la réaction de la ministre de l’Intérieur, Nancy Faeser, s’est voulue ferme sur le fond mais molle dans les faits : « Quiconque préfère vivre dans un califat, et donc à l’âge de pierre, s’oppose à tout ce que représente l’Allemagne. Nous défendons notre constitution – avec les moyens de notre constitution. » Une déclaration joliment tournée, mais dont l’effet reste, pour l’instant, strictement symbolique.

Liberté d’expression ou permis de haine ?

Quand la haine antisémite défile en toute impunité dans les rues allemandes, certains continuent de brandir la liberté d’expression comme un paravent commode. Günther Jikeli, expert reconnu de l’antisémitisme, ne s’y trompe pas : il décrit ces rassemblements pro-palestiniens comme une « mobilisation contre les Juifs », dissimulée derrière un alibi bien pratique.

Car lorsque, comme ce fut le cas le 2 février 2025, des manifestants appellent ouvertement au meurtre de Juifs ou à les livrer au Hamas, on ne parle plus d’opinion, mais d’incitation à la haine – une infraction pénale en bonne et due forme.

Ahmad Mansour, chercheur spécialisé dans l’extrémisme, met en garde contre l’inaction des autorités. Selon lui, laisser passer de tels rassemblements revient à normaliser des discours qui menacent gravement les valeurs fondamentales de la démocratie allemande. L’anthropologue Susanne Schröter va plus loin encore en pointant du doigt une gauche « woke » qui, au lieu de condamner fermement ces dérives, les soutient ou les instrumentalise. Cette mouvance, dit-elle, y voit un « potentiel révolutionnaire » pour renverser le système en place, tout en discréditant les critiques du totalitarisme islamique sous les accusations d’islamophobie ou de racisme anti-musulman.

Face à ces dérives, le maire de Berlin, Kai Wegner (CDU), a enfin haussé le ton. Il a évoqué la possibilité d’interdire certains de ces rassemblements et a réaffirmé son soutien à Israël et à la communauté juive. Se présentant comme un ami des deux, il a exprimé sa volonté de renforcer les liens entre Berlin et Tel-Aviv par un partenariat officiel. Un geste fort, qui fait écho à ses déclarations de l’an dernier, lorsqu’il dénonçait déjà les manifestations pro-palestiniennes comme des événements qui « souillent » la ville.

Mais au-delà des discours, une question demeure : jusqu’à quand la liberté d’expression servira-t-elle d’abri à ceux qui prêchent la haine ?




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