Accueil Monde A New York, avortez quand vous voulez?

A New York, avortez quand vous voulez?

Sous certaines conditions, une femme pourra y avorter jusqu'au dernier jour de grossesse


A New York, avortez quand vous voulez?
Andrew Cuomo, gouverneur de New York. janvier 2019. ©Hans Pennink/AP/SIPA / AP22296269_000002

Le Sénat de l’Etat de New York aux Etats-Unis a voté une loi qui permet l’avortement jusqu’au moment de l’accouchement, si le fœtus n’est pas viable ou que la « santé » de la mère est en danger.


Le 22 janvier 2019, le gouverneur démocrate (catholique) de l’Etat de New York, Andrew Cuomo, signait en grandes pompes à Albany la nouvelle loi sur l’avortement, dénommée « Reproductive Health Act ». Cette loi – qui remonte en fait à 2006 mais qui avait été bloquée jusqu’à présent par la majorité républicaine au Sénat de New York – a pu être adoptée, les démocrates ayant remporté la majorité dans les deux chambres à Albany en novembre dernier. Cette nouvelle législation modifie en profondeur la loi de 1970 qui avait légalisé l’avortement. Jusqu’à présent, dans l’Etat de New York, avorter au-delà de 6 mois de grossesse n’était possible que si la vie de la mère était en danger. En dehors de ce cas extrême, avorter au-delà de la 24ème semaine constituait une infraction pénale (passible d’une peine de 7 ans de prison). On rappellera pour mémoire que le cœur du fœtus commence à battre entre la 3ème semaine et la 6ème semaine.

L’avortement, une question de santé privée

Désormais, comme le confirme Libération qui cite Valeurs actuelles, « une femme pourra désormais avoir recours à l’avortement jusqu’au dernier jour de sa grossesse, si sa santé ou celle de l’enfant est en danger, ou encore si le fœtus n’est pas jugé viable ». Le législateur a bien pris soin de ne pas définir le terme « santé ». Sur quels critères les médecins vont-ils décider ? Vise-t-on notamment la santé psychique ou émotionnelle de la mère ? Il semblerait que la réponse soit positive, en l’absence d’exclusion spécifique prévue par la loi. Ainsi, l’angoisse ou la crainte de tomber en dépression après la naissance pourraient constituer des motifs légitimes d’un avortement tardif.

Par ailleurs, la loi autorise dorénavant du personnel qui n’est pas médecin assermenté (“non-physician”) à pratiquer l’avortement. Du reste, pour rassurer les praticiens qui effectueront les avortements tardifs, avorter au-delà de la 24ème semaine ne constituera plus une infraction passible de poursuites pénales. Point intéressant à souligner à ce sujet, l’article du Code pénal de New York qui définit l’homicide visait jusqu’à présent les personnes, c’est-à-dire toute personne vivante ainsi qu’un bébé ayant plus de 24 semaines dans le ventre de sa mère (« unborn child »). Désormais, avec cette réforme, le « unborn child » ne fait plus partie de la définition des personnes humaines (« human being »).

La revanche d’Hillary

Enfin, la loi a abrogé les articles de la loi de 1970 qui obligeaient le corps médical à porter assistance à un enfant né après avoir survécu à une tentative d’avortement. La procédure qui doit être suivie dans ce cas n’est désormais pas claire.

En résumé, l’avortement peut aujourd’hui intervenir dans l’Etat de New York à n’importe quel moment de la grossesse, et ce jusqu’au jour de la naissance, si la mère craint pour sa santé. La loi énonce d’ailleurs sans ambiguïté qu’est désormais garanti « un droit fondamental de la mère de choisir de mener à terme sa grossesse, de donner naissance à un enfant ou de recourir à un avortement. » Ce vocabulaire présage peut-être des poursuites judiciaires contre des médecins ou établissements médicaux qui refuseraient de procéder à des avortements tardifs.

Il est important de souligner qu’en adoptant cette législation, les démocrates de New York n’ont fait que reprendre la position officielle du Parti démocrate sur l’avortement (« DNC platform »). Donald Trump avait d’ailleurs mis en exergue ce point lors du troisième débat télévisé contre Hillary Clinton en octobre 2016 : « Je pense que l’avortement tardif est horrible. Si on suit ce que dit Hillary, au cours du 9ème mois, vous pouvez arracher le bébé du ventre de sa mère juste avant la naissance, au dernier jour, et c’est inacceptable. Vous pouvez dire que c’est OK et Hillary peut dire que c’est OK mais ce n’est pas OK avec moi. »

La législation « la plus agressive des Etats-Unis »

Par cette position, la gauche américaine reconnaît, en premier lieu, qu’il n’y a aucune différence entre détruire un fœtus et tuer un bébé avant la naissance lorsqu’il est totalement formé, viable et sur le point de naître. Par ailleurs, pour les socialistes américains, le bébé qui est sur le point de naître n’est pas un être humain (que l’on peut donc broyer, démembrer ou empoisonner sans conséquences pénales) alors que le bébé sorti de l’utérus devient une personne protégée par la loi.

A l’occasion de la cérémonie de signature de la nouvelle loi à Albany, le gouverneur de New York s’est réjoui de s’être doté de la législation sur l’avortement « la plus agressive des Etats-Unis » et de créer un « nouveau précédent national », sous un tonnerre d’applaudissements de ses acolytes démocrates (l’Etat de New York fit partie en effet des premiers Etats à légaliser le mariage homosexuel aux Etats-Unis).

Le cardinal de New York, Thimothy Dolan a lui qualifié l’attitude de Cuomo de « hideuse » (« hideous »). « C’est de la sauvagerie, c’est révoltant », a réagi le très conservateur Mike Huckabee, ancien gouverneur de l’Arkansas.

Et maintenant, la Virginie ?

Une semaine plus tard, un projet de loi comparable a été déposé au Parlement de l’Etat de Virginie (« Repeal Act »), ayant pour objet d’éliminer les restrictions à l’accès à l’avortement. Dans une interview radio donnée le 30 janvier, Ralph Northam, le nouveau gouverneur démocrate de la Virginie, promet de signer la loi si elle est adoptée en l’état. Il confirme que l’avortement pourra être pratiqué même lorsque la mère est en train d’accoucher (« in labor »). Il va même plus loin en confirmant son accord avec le principe de tuer un bébé qui serait né après avoir survécu à une tentative d’avortement (« born alive abortion survivor »). Dans cette interview hallucinante, le gouverneur décrit avec froideur qu’en cas d’échec de l’avortement pratiqué le jour de la naissance, l’enfant sera placé dans des conditions « confortables » puis les médecins et la mère auront « une discussion » pour décider si l’enfant va être maintenu en vie ou non.

Ce représentant de la gauche américaine ne voit donc pas de différence notable entre un bébé sur le point de naître et un bébé sorti de l’utérus, ce en quoi il a d’ailleurs tout à fait raison.



Vous venez de lire un article en accès libre.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !

Article précédent Ces musulmanes qui osent retirer le voile
Article suivant PMA pour toutes: bonjour les débuts de Moi difficiles

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Le système de commentaires sur Causeur.fr évolue : nous vous invitons à créer ci-dessous un nouveau compte Disqus si vous n'en avez pas encore.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération