Le mentir-faux de Bruno Le Maire
« La France doit cesser d’être un figurant du show perpétuel de Donald Trump ». C’est au tour de Bruno Le Maire d’y aller de sa leçon de choses géo-politico-morale, dans une tribune du Figaro[1](4 juillet). Épouvantail et exutoire, Trompe le Maudit aurait ce mérite de nous ouvrir les yeux, de nous remettre les pieds sous terre. Le « réel » est à la mode. Terminé, les naïvetés de Bisounours et rêveries des promeneurs solidaires ? Voire… À Zuydcoote, sur les plages, les pages, dans la sueur et le babeurre, Bruno Le Maire défend La Voie française, se débat. Daladier se prend pour Churchill. Naufrageurs insubmersibles, indécrottables champions du prêchi-prêcha, nos politiques sont incapables de mea-culpa, de se confronter à un réel qui les dépasse, les écrase.
Chasser l’irréel, il revient au galop
« Le réel, ce sont des menaces nouvelles à nos frontières qui appellent des dépenses militaires à la hauteur des enjeux stratégiques… des capacités nucléaires iraniennes simplement endommagées… les souffrances infligées à Gaza… la progression des troupes russes en Ukraine… des surcapacités chinoises qui font courir un danger de mort à nos industries…
La vocation de la France est de rassembler les forces européennes au service d’un travail politique et diplomatique qui seul donnera des résultats durables. Ce combat, elle doit le mener en convainquant ses partenaires européens de sortir de leur fascination infantile pour des États-Unis qui nous ont clairement signifié, de Barack Obama en passant par Joe Biden, notre congé du monde. Tant que les Européens verront dans le président américain un « Papa », ils resteront des enfants…
Les choses bougent… Mais tout va encore trop lentement. Tout est trop faible. Donc : arrêtons de regarder le show, défendons nos intérêts vitaux… Il est temps que les Européens se comportent en adultes, élargissent leurs alliances à de nouveaux partenaires, rassemblent leurs forces économiques, financières, scientifiques, qui sont immenses… ».
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La vocation de la France est de lutter contre la distraction du monde. Le show perpétuel de Donald Trump est opportuniste et erratique. Il fait un mauvais usage de l’impressionnante domination militaire et technologique des États-Unis – car il crée du désordre plus qu’un nouvel ordre. Aucune nation européenne ne peut le suivre sur ce terrain. Le réel reprend toujours ses droits. Il nous appartient de le prendre en main. Vite, et fort ». Quand les borgnes sont franchis…
Yakafocon. Un vide sidéral, l’anaphore hollandaise, les antiennes de circonstance, des incantations macroniennes, flottent dans un court-bouillon de truismes. Aucune proposition concrète, originale, réaliste pour sortir de l’ornière. La vérité, Bruno, tu nous fais de la peine ! Comment un politique galonné, énarque, major de l’agrégation de Lettres modernes, peut-il aligner autant de platitudes, être aussi naïf et superficiel ? La cerise sur le gâteau de yaourt ce sont les 7 ans, 4 mois et 4 jours que Bruno Le Maire a passé à la tête du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. Les délices de l’hétérotélie : Coué qu’il en coule, La Vérité si je mens.…
La réalité dépasse l’affliction
« La vocation de la France, fille aînée des Lumières, est de regarder ce réel en face ». Le ministre se suce la langue et oublie Héraclite. Ni le soleil, ni la mort, [ni la vérité, en France] ne peuvent se regarder en face. La vérité, c’est que nos politiques prennent les mots pour des faits, que Marianne a passé l’âge des vocations, des Lumières, des miroirs, du réel et du rimmel. Chaos debout, dé(cons)truite, aux outrages, elle s’en va, à crédit, à vau-l’eau. Les Regrets, mensonges et naïvetés ne changent rien à l’affaire. Marianne se meurt, Marianne est morte.
Le réel, c’est un pays en pleine crise de nerfs, gangréné par les rezzous sociaux, le communautarisme, l’islamo-hystéro-trotskysme attisés par Dominique de Mélenchon de Villepinte, le bateau ivre d’une dette colossale, les clapotements furieux des monnaies, une industrie en cessation des paiements, toujours plus d’impôts, le recrutement d’un million de nouveaux fonctionnaires depuis 25 ans, alors que l’on prétend assainir les finances publiques.
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Le réel, c’est l’écroulement de notre système éducatif, l’école des fans de Bourdieuseries, les consignes aux correcteurs du Brevet et du Bac pour maquiller le naufrage. C’est la Culture minée, non par les coupes budgétaires, mais par la nullité de ses ministres, les batailles d’Hernani.que, les Franciscains de Cour d’Honneur, avides de présidences, prébendes et subventions. Ce sont les apparatchiks de l’audiovisuel public, planqués dans leur roue de fromage avenue du Président Kennedy, qui reniflent et pourchassent le réac dans l’attente du Grand Soir. C’est le Chant des Partisans du Festival de Cannes, les rentiers des avances sur recettes, Fédayins Bella Ciao sous contrat Lancôme. Une pierre à la main ils guettent le sommet, de l’autre ils font l’aumône. Leurs aides de géant les empêchent de voler.
Le réel, hors-les-murs, dans le concert des nations, c’est la France et l’Europe qui dégringolent de la Champions League en National 3, en une décennie. Notre congé du monde, personne ne nous l’a signifié. Il était acté, logique, attendu. Il ne faut ni accuser, ni rien attendre des Yankees, des Chinois, des Russes, d’alliances imaginaires, alliés lilliputiens. Les défaites ne sont jamais étranges. Les Européens, les Français, leurs élites, Bruno Le Maire, sont seuls responsables de nos malheurs. Depuis cinquante ans, ils vivent hors-sols, dans les illusions, bons sentiments, la Com, la politique du chat crevé au fil de l’eau. Au royaume des belles idées, les faits n’ont pas d’importance. « Le plus grand dérèglement de l’esprit c’est de croire les choses parce qu’on veut qu’elles soient et non parce qu’on a vu qu’elles sont en effet » (Bossuet).
Bruno Le Maire en appelle au réel. La vérité, c’est qu’il le craint et l’esquive. La vérité c’est que le réel Bip Bip a dépassé et cornérisé Bruno Coyote. À bout de souffle, en suspension au-dessus du précipice, le Canis latrans gesticule, mouline des jambes pour essayer de retarder le moment fatal, le crash tout au fond du ravin. That’s all folks ! Bercy patron.
[1] https://www.lefigaro.fr/vox/monde/bruno-le-maire-la-france-doit-cesser-d-etre-un-figurant-du-show-perpetuel-de-donald-trump-20250703
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