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AstraZeneca: l’impérialisme ridicule de la Commission européenne

Nationalisme dans la campagne vaccinale: et le gagnant est… !


AstraZeneca: l’impérialisme ridicule de la Commission européenne
©Sipa / Numéro de reportage : Shutterstock 40822734_000004

Les polémiques récentes entourant les livraisons du vaccin d’AstraZeneca au Royaume-Uni et à l’Union européenne, suggèrent que, loin de transcender l’égoïsme national, le club des 27 a sombré dans le jeu des reproches et frôlé la promotion de fake news.


Les donneurs de leçons coronavirales nous assurent, en emboîtant le pas à leur maître, Pangloss, que le monde d’après sera meilleur. Jusqu’à présent, la tendance générale est plutôt vers le pire. Les débuts de 2021 ont vu la prolifération, sur la scène internationale, d’accusations de « nationalisme vaccinal » censées révéler un très grave manque de solidarité entre les États. Dans quelle mesure ces accusations sont-elles fondées ? S’agit-il véritablement de « nationalisme » ? La vérité, comme si souvent, est ailleurs. 

La Commission se révèle petite

L’histoire de la gestion européenne des vaccins contre le covid-19 est  jusqu’à présent une des plus tristes de notre époque. Très prompte, face aux États-membres, à se réserver la prise en charge de l’opération de vaccination des populations européennes, la Commission s’est révélée extraordinairement lente dans la négociation et la commande des vaccins eux-mêmes. Seul le Royaume-Uni, anticipant son départ définitif du bloc fin décembre, a osé s’émanciper de la tutelle bruxelloise et traiter directement avec les entreprises pharmaceutiques, afin d’acquérir le plus de vaccins le plus vite possible. S’agit-il d’un cas d’agilité nationale ou d’égoïsme nationaliste ? Pour le trio Merkel-Macron-Von der Leyen, la deuxième réponse est d’emblée la bonne. Le trio a insinué d’abord que les Britanniques auraient fait preuve de hâte excessive et de désinvolture coupable en approuvant trop vite l’utilisation des vaccins disponibles. En revanche, l’UE aurait attendu, de manière responsable et judicieuse, pour être certaine de la sécurité de ces vaccins avant d’autoriser leur exploitation. Sauf que, pendant tout ce temps, ceux qui en avaient besoin patientaient… Deuxième insinuation, les Britanniques auraient cherché à accaparer les stocks dans un élan d’individualisme égocentré aux dépens des États-membres de l’UE. L’illustration en serait donnée avec le cas du vaccin AstraZeneca. Celui-ci présente les avantages, par rapport à celui de Pfizer déjà en usage, d’être beaucoup moins cher et plus facile à transporter et à conserver. Fruit de la recherche de l’université d’Oxford, il a été développé et commercialisé par une entreprise anglo-suédoise qui en aurait garanti les livraisons aux Britanniques tout en réduisant le volume de celles promises à l’UE.

La tentative de détourner l’attention sur la supposée traîtrise des Britanniques et la prétendue cupidité d’AstraZeneca n’a fait que révéler au grand jour l’incompétence européenne

La raison en serait essentiellement une vulgaire histoire de fric. Car Boris Johnson aurait payé le vaccin au prix le plus fort et AstraZeneca serait âpre au gain. 

À la recherche de la crédibilité perdue

Après des démentis publics de la part du PDG de l’entreprise, un Français, Bruxelles a fini par rendre public le contrat signé avec AstraZeneca, en en révélant maladroitement des détails censés restés confidentiels. Résultat des courses : il était désormais évident que les autorités bruxelloises avaient mal négocié cette transaction, s’évertuant à faire baisser le prix sans fixer une obligation de résultat en termes de délai de livraison. La tentative de détourner l’attention sur la supposée traîtrise des Britanniques et la prétendue cupidité d’AstraZeneca n’a fait que révéler au grand jour l’incompétence européenne. Pire, l’UE a adopté des mesures législatives pour contrôler l’exportation des vaccins fabriqués sur son territoire, semant l’effroi chez ses partenaires autour du monde qui redoutaient un sursaut de nationalisme – ou plutôt d’impérialisme – vaccinal. 

Le nadir a été atteint le vendredi 29 janvier quand, dans une confusion administrative sans nom, la Commission a proposé d’invoquer l’article 16 du protocole sur l’Irlande et l’Irlande du Nord afin d’empêcher que des vaccins soient livrés de l’UE au Royaume-Uni en passant par les deux Irlandes. 

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Autrement dit, après avoir négocié dur pendant trois ans pour éviter la création d’une frontière en Irlande, l’UE était sur le point de trahir un de ses propres États-membres ! La colère du gouvernement irlandais et le flegme du britannique ont permis à Bruxelles de faire volte-face. Plutôt que de montrer le bon exemple de l’internationalisme vaccinal, la Commission a provoqué une crise aiguë de sa propre légitimité. 

« No country for old men »

Ceux qui devraient être les plus scandalisés par cet épisode ne sont pas les anti-européens, qui, sans aucun doute, se frottent les mains en contemplant la déconfiture des bureaucrates bruxellois. Non, ce sont ceux qui croient encore au projet européen qui devraient se mettre en colère devant tant d’incompétence et de mauvaise foi – d’autant que la gestion européenne de la vaccination constituait une opportunité en or pour affirmer la solidarité entre les 27 et démontrer l’utilité des structures supranationales. Dans leur désespoir, les membres du trio Merkel-Macron-Van der Leyen ont essayé tous les stratagèmes pour limiter leur propre responsabilité dans cette débâcle générale et faire porter le chapeau à leurs boucs émissaires. Un seul de ces stratagèmes a survécu piteusement cette semaine. Tout se passe encore une fois ce fatidique 29 janvier. Ce matin-là, devant un groupe de correspondants étrangers, Emmanuel Macron a annoncé que le vaccin d’AstraZeneca présentaient apparemment des défauts, expliquant que « tout porte à croire qu’il est quasi inefficace sur les personnes de plus de 65 ans. » Cette idée-là a son origine dans la mauvaise lecture par des médias allemands d’un tableau de données concernant ce vaccin publié par la STIKO, une commission de l’Institut Robert Koch. Comme les premiers tests conduits sur le vaccin d’Oxford portaient sur peu de personnes âgées de plus de 65 ans, la colonne du tableau concernant cette tranche d’âge semblait donner un pourcentage de réactions favorables extrêmement bas. Plusieurs autorités, y compris le gouvernement allemand, ont expliqué cette erreur de lecture. Toutes les expériences montrent une bonne réponse immunitaire chez les plus de 65 ans comme chez les jeunes. D’ailleurs, ce même 29 janvier, l’Agence européenne a approuvé l’usage du vaccin d’AstraZeneca pour tous les âges. Prudente, la Haute Autorité de santé française a également approuvé le vaccin pour tout le monde le 2 février, mais ne l’a pas encore recommandé pour les plus de 65 ans, comme les autorités allemandes, suédoises, polonaises autrichiennes et italiennes. Cet inconvénient du vaccin d’AstraZeneca le rend inutilisable, jusqu’à nouvel ordre, dans le cas des personnes ayant le plus besoin d’être vaccinées. M. Macron a sans doute exagéré l’inconvénient pour justifier son déploiement ralenti qui est en réalité plutôt dû à la mauvaise gestion de la Commission. Heureuse coïncidence, le 26 janvier, Ursula Van der Leyen prononçait une allocution dans le contexte du Forum de Davos où, citant l’exemple du Capitole américain, elle mettait en garde contre les dangers de la désinformation. C’est une leçon que les autorités européennes ont elles-mêmes besoin de méditer.



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