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Zemmour au chevet de la France silencieuse

À Saulieu, le meeting du monde rural


Zemmour au chevet de la France silencieuse
Saulieu, Côte d'Or, 12 février 2022 © JC Tardivon/SIPA

Les rassemblements d’Eric Zemmour continuent de rameuter un important public. Ce samedi 12 février, le candidat à la présidentielle était ainsi à Saulieu (21), capitale du Morvan, pour développer devant plus de 3000 personnes le thème de la protection de la France oubliée et de la ruralité. Il en a profité pour draguer les maires des petites communes, et a fait de Valérie Pécresse sa principale tête de Turc.


Les mots forts chers au candidat de “Reconquête” s’affichent sur les écrans du plus beau foirail de Bourgogne : oser, travailler, s’engager, reconquérir, transmettre, rester Français… 3 500 Bourguignons trépignent en attendant leur messie. Au premier rang, les habitués de son sillage : Stanislas Rigault, Jérôme Rivière, Antoine Diers, Jean-Frédéric Poisson ou Joachim Son-Forget. On ne les présente plus. 

Mais c’est à Franck Gaillard et Loup Bommier, deux maires de la région et parrains d’Eric Zemmour, que revient le devoir de chauffer la salle. L’impérieux appel aux parrainages achève les discours des deux élus. Puis, la musique épique retentit et des ovations montent dans la salle, les écrans géants affichent finalement « Impossible n’est pas français » : Eric Zemmour entre en scène. 

« Vive la Bourgogne ! »

Comme souvent, l’auteur du Destin français entame son discours par la louange de la région dans laquelle il se trouve. À Saulieu, il salue le « cœur de cette France rurale que nous aimons tant ». Un lieu chargé d’histoire, « pays de la gourmandise, des grands vins, des grands vignerons, de l’architecture et des vallons »… Saulieu est aussi le lieu idéal pour évoquer malicieusement “La Grande vadrouille”, et pour rendre un vibrant hommage aux grands Bourguignons qui ont fait notre pays : Bossuet, Eiffel, Vauban, mais aussi Bernard Loiseau, ce grand chef français qui a permis de « hisser notre gastronomie sur le toit du monde » – il s’est d’ailleurs arrêté dans l’établissement du restaurateur disparu en 2003 avant le meeting.

En guise d’introduction, Zemmour dévoile les grands thèmes du jour, prometteurs : que l’État « cesse d’emmerder les Français, définitivement et le plus vite possible ». Il faut de la fermeté envers la racaille et de la bienveillance envers les faibles, et il faut en finir avec la bureaucratie d’un État oppressant. Rapidement, son public en est convaincu : « On est chez nous ! »

« Il y a urgence, nos campagnes sont en danger »

Eric Zemmour rappelle la mise en place d’une présomption de légitime défense pour les gendarmes et les policiers, ainsi qu’une défense excusable pour les Français. Un Français doit « avoir le droit de contre-attaquer », justifie-t-il. « Je veux la protection de votre sécurité, de nos campagnes et de nos villages, des Français les plus fragiles, des agriculteurs et de nos paysages, de tous ceux que l’État a abandonné » et « voir enfin nos impôts utilisés à bon escient ».

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Pour encourager la natalité dans les campagnes, le candidat de “Reconquête” promet une bourse de naissance de 10 000 euros à chaque famille rurale pour la naissance d’un nouvel enfant. Les conditions sont simples : être Français, vivre depuis deux ans dans une commune rurale, et y résider encore pendant trois ans.

« J’ai honte », s’exclame l’orateur un peu plus tard. Eric Zemmour aborde le problème des déserts médicaux. S’il est élu, il compte recruter immédiatement 1 000 médecins pour couvrir les zones les plus sinistrées. Suite au scandale Orpea qui a fait les gros titres ces derniers jours, le candidat annonce que « nous transférerons le contrôle des EHPAD aux préfets, qui auront le pouvoir d’un contrôle immédiat en cas de maltraitance ». Il tient par ailleurs à ce que les personnes âgées puissent « rester le plus longtemps possible chez elles », et s’engage donc à simplifier les services d’aide à domicile. « Je préfère la retraite à la maison que la maison de retraite ». Zemmour promet d’augmenter la pension des veuves, de 50 à 75% de la pension du conjoint décédé : « Les vieux jours doivent être sans angoisse ni désespoir ».

Le défi patrimonial 

Sous ce grand préau, le seul nom du président de la République suffit à provoquer des huées. 

« Macron veut une politique de la ville, moi je veux une politique de la campagne. » Sans que le public n’y voit apparemment quelque annonce démagogique, Eric Zemmour promet aux Bourguignons et aux ruraux de rediriger massivement les investissements du Plan national Cœur de ville vers les campagnes, car, il en est certain : « vous saurez mieux les utiliser ». Une autre mesure pourrait faire grincer des dents : c’est la promesse de la fin de la construction de nouveaux centres commerciaux à l’entrée des villes, cette concurrence meurtrière pour les petits producteurs. Zemmour veut également mettre fin au regroupement de plusieurs enseignes dans les centrales d’achat. Devant son public, il promet qu’il augmentera la part des produits locaux dans la restauration et les cantines scolaires. « Je veux que les enfants de Saulieu puissent goûter à l’école le fromage du Jura et la viande charolaise », car « on devient français par le goût et par la table »

Un autre dessein : lutter contre la bétonisation des campagnes, « la folie des éoliennes » qui remplacent « les lointains clochers et les flèches des cathédrales », et qui « ne font que satisfaire quelques bobos parisiens qui n’ont pas à vivre à côté d’elles ». Eric Zemmour s’attache aussi à évoquer le sujet forestier, prégnant dans cette région : le « vert manteau de la France », ce sont « des siècles d’histoire et de labeur », déclame-t-il. Il se veut « l’infatigable défenseur de ce trésor français ». Déplorant les difficultés de la filière, un domaine d’activité plus du tout attractif, il promet un grand plan de reboisement dès l’été 2022. Cela revalorisera l’industrie du bois. « Voilà l’écologie que nous aimons (…), qui respecte ce que l’on est ». Chasse et pêche sont aussi de mise dans cet éloge du patrimoine naturel français : « Je veux que dans 50 ans, on puisse encore aller chasser avec son petit-fils ». L’ancien journaliste ne peut se montrer plus clair : « Je sanctuarisai la pratique de la chasse et de la pêche comme des éléments constitutifs de notre patrimoine culturel ». Les acclamations de la foule couvrent ces derniers mots.

Zemmour à ses militants: “Le peuple qui respecte le passé et l’avenir, c’est nous!”

« Pendant cette campagne électorale, raille Zemmour, qui décidément sait ménager ses effets ou le suspense, il y a de  parfaites représentations de l’économie politicienne, l’une d’entre elles est… Valérie Pécresse ». Huées. 

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Le candidat de « Reconquête » n’a pas forcément tort, et il a en tout cas plus d’un argument dans son sac pour le démontrer. Sa rivale LR a annoncé vouloir créer une banque publique pour financer les projets des jeunes, qu’elle appelle mot pour mot, « banque du droit à l’échec ». Voilà qui fait moyennement sourire Zemmour ! Elle veut ensuite augmenter le SMIC de 10%, ce qui est certes une louable intention, mais en faisant payer une grande partie par les patrons. « C’est la mesure de gauche par excellence », estime l’orateur. Enfin, elle veut créer 500 000 logements, « parce qu’elle aime les chiffres ronds sans doute ». Zemmour sonne le tocsin : « Elle fera de chaque village un 9-3 miniature », perspective qui évidemment fait frémir l’assistance. Enfin, il en est certain, Valérie Pécresse continuera selon lui de s’entourer « d’islamo-droitistes ». Zemmour met en garde les Républicains encore hésitants dont il convoite les suffrages : non,  Pécresse ce n’est pas un Zemmour centriste, soft : « Reconnaissez que le centre-droit de Valérie Pécresse ne vaudra pas mieux que le centre-gauche d’Emmanuel Macron ». Partant, l’affrontement entre Macron et Pécresse, c’est « Big Brother contre Big Sister ». Cette dernière formule provoque un tonnerre d’applaudissements. À 57 jours du premier tour des élections présidentielles, Zemmour met de nouveau en garde les électeurs de droite : vous aurez « le choix entre sauver les LR et sauver la nation, ne vous trompez pas d’idéal »

Devant un public de Bourguignons acquis à sa cause, Eric Zemmour aura parlé pendant une heure 15.




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Etudiante en Histoire à la Sorbonne, et étudiante à l'ILDJ.

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