Accueil Site Page 239

« Pour les Grecs, homosexualité et virilité allaient de pair »

0

Comment s’aimaient les Grecs de l’Antiquité ? Si l’homosexualité et la pédérastie faisaient partie des mœurs, elles étaient strictement codifiées et bien éloignées des pratiques actuelles. Nicolas Cartelet, écrivain et éditeur, spécialiste de l’Antiquité, analyse dans son livre Sous la jupe d’Achille la complexité de l’homosexualité grecque, et bouscule au passage les idées reçues…


Pierre des Esseintes. Comment distinguer, chez les Grecs anciens, pédérastie et pédophilie ?

Nicolas Cartelet. La confusion entre pédérastie et pédophilie est d’abord étymologique, puisque le terme « pédérastie », étymologiquement, désigne l’amour des enfants mâles. Mais les Grecs appelaient « enfant » n’importe quelle personne âgée de 0 à 20 ans. La pédérastie grecque avait pour but de former de jeunes hommes (les éromènes) à la citoyenneté en les mettant au contact d’hommes accomplis (les érastes) : l’échange était intellectuel, politique, militaire, mais aussi amoureux et sexuel. Une infinité de règles connues de tous bornaient ces échanges, jusqu’à l’âge et l’attitude convenables pour chacun. Ainsi, il semble peu probable que les érastes aient eu des relations sexuelles avec de très jeunes garçons, car le canon de beauté promu par les Grecs, c’est-à-dire l’âge auquel un jeune homme était considéré sexuellement attirant, désigne l’éromène au corps déjà formé, musclé, bronzé et viril, sans doute âgé de 16 à 20 ans.

Aujourd’hui, on a tendance à penser que l’hétérosexualité constitue une « norme » culturelle. Ce n’était pas du tout le cas chez les Grecs. Pouvez-vous nous l’expliquer ?

Les Grecs considéraient l’homosexualité comme un trait naturel de leur culture. Nulle part, dans un aucun texte, l’amour entre hommes n’est désignée comme contre-nature. On peut avancer que chez certains aristocrates, le goût des hommes et la séduction de beaux éphèbes comptaient parmi les plus grands plaisirs de la vie. Néanmoins, la société grecque avait tout d’une société traditionnelle, centrée sur la filiation et la production d’héritiers. Les Grecs considéraient que passé un certain âge (à gros traits au-delà de 30 ans), un homme devait abandonner l’homosexualité pour fonder un foyer avec une femme. Nombreux sont les témoignages se moquant de « débauchés » continuant de séduire des éromènes à un âge révolu.

Les Grecs s’intéressaient-ils à la beauté féminine ?

Les Grecs étaient sans aucun doute sensibles à la beauté féminine, mais la représentation du « beau » masculin est infiniment plus présente dans nos sources que celle du beau féminin. Chez Homère, Hélène de Troie est d’une beauté étourdissante que reconnaissent tous ses contemporains – mais sa beauté est aussi un poison car elle fait perdre la raison à Pâris, qui l’enlève et déclenche la guerre de Troie. Il y a chez les Grecs cette propension à juger la beauté féminine « vénéneuse », alors que la beauté masculine a quelque chose de divin à leurs yeux.

© D.R.

Les relations entre hommes relevaient-elles d’une recherche du plaisir pour les deux partenaires ?

La relation pédérastique est par essence inégale. L’éromène est passif et doit se contenter d’accueillir les élans de son éraste – cadeaux comme sollicitations sexuelles – sans manifester de plaisir. Son seul but doit être de s’élever moralement pour devenir un adulte accompli. Un éromène trop enthousiaste dans la relation serait regardé avec méfiance et considéré comme un débauché. L’éraste en revanche peut tirer du plaisir des relations sexuelles qu’il a avec son amant. Les sources sont bavardes sur le sujet, on exprime volontiers le plaisir que procure la pénétration anale, par exemple, et plus fréquemment encore celui tiré de la pénétration intercrurale (le sexe coulisse entre les cuisses de l’éromène). Rappelons que seul l’éraste pénètre son partenaire, l’inverse est impensable chez les Grecs.

À lire aussi, Bertrand Alliot : De la mythologie à la géographie

En Grèce, les homosexuels passifs étaient méprisés. Faut-il voir dans ce mépris les racines de l’homophobie actuelle ?

C’est surtout l’homme efféminé qui est méprisé par les Grecs, ou bien l’homosexuel qui serait passif et se laisserait pénétrer alors qu’il a passé l’âge d’être un éromène. Chez les Grecs, le masculin va de pair avec le courage et la virilité. L’homme efféminé est moqué et soupçonné de lâcheté – on le juge inapte à défendre la cité, ce qui en fait un mauvais citoyen. Il faut dire que la culture grecque est éminemment misogyne, et prête peu de qualités aux femmes (en tout cas aucune qualité utile dans le champ politique et militaire qui sont les deux piliers des cités-états grecques). Une attitude jugée féminine est de fait jugée suspecte. On peut y trouver un trait commun avec l’homophobie moderne, oui, mais nombreuses ont été les sociétés traditionnelles à opérer cette distinction entre masculin/viril, actif et féminin/doux, passif.

Dans votre livre, on apprend que le mot « lesbianisme » a été détourné…

Étymologiquement, encore une fois, le terme lesbianisme désigne le fait de pratiquer la fellation – et plus globalement, il désigne la femme lascive, séductrice. Il est intéressant de constater que le mot vient de Lesbos, cette île grecque, patrie de Sappho (qui a donné saphisme), réputée pour avoir offert une plus grande liberté aux femmes que dans beaucoup d’autres cités grecques. Comme si les femmes de Lesbos, surgissant dans l’espace public, étaient considérées comme sulfureuses, provocatrices. Il y a là l’idée, il me semble, qu’elles ne sont pas tout à fait à leur place aux yeux du monde grec.

© D.R.

Vous dressez huit portraits de couples homosexuels célèbres dans l’histoire et la mythologie. Lesquels vous semblent les plus riches d’enseignement ?

Chacun de ces couples met en lumière une facette de l’homosexualité grecque. L’histoire d’Harmodios et Aristogiton, ce couple homosexuel ayant assassiné le tyran Hipparque à Athènes et précipité l’invention de la démocratie grecque, est remarquable car elle est basée sur un mensonge historique. En effet, les historiens modernes ont démontré que la relation pédérastique entre Harmodios et Aristogiton était improbable (les deux hommes étaient trop âgés pour avoir joué le rôle d’éraste et d’éromène l’un pour l’autre). Les Grecs eux-mêmes ont réécrit l’histoire pour y insérer cette dimension homosexuelle, car à leurs yeux, la démocratie athénienne, basée sur le corps des citoyens-soldats, était indissociable de la pédérastie, dont l’essence-même était la formation des futurs citoyens.

À lire aussi, Georgia Ray : Médaille de marbre

En regard, on peut évoquer le fameux procès de Timarque, qui nous invite à ne pas idéaliser la société grecque comme un paradis pour l’homosexualité. Timarque est empêtré dans un procès politique pour trahison d’État, et la plaidoirie pour le condamner, qui nous est parvenue, insiste davantage sur son prétendu passé de débauché que sur les faits qui lui sont reprochés. On l’accuse de s’être prostitué et d’avoir agi en mauvais éromène lorsqu’il était plus jeune, c’est-à-dire en tirant du plaisir et du profit de relations sexuelles en tant que partenaire passif, et ces soupçons suffisent à salir son image aux yeux des jurés. Cette histoire judiciaire nous rappelle tous les interdits, explicites ou non, qui pesaient sur les jeunes homosexuels et pouvaient à tout moment se retourner contre eux.

Le christianisme a-t-il eu une influence sur la manière dont l’homosexualité antique est encore perçue aujourd’hui ?

Plus largement, les religions du livre ont marqué une forte évolution dans la façon dont l’homosexualité a été perçue. Dans le monde occidental, on passe d’une Europe dominée par les cultures grecque puis romaine, qui considèrent l’homosexualité naturelle, à un monde chrétien qui s’appuie sur la Bible pour condamner l’amour entre hommes. Les Grecs n’ont jamais considéré que leurs dieux avaient édicté des lois terrestres régissant la manière dont chacun devait vivre, jusque dans son intimité sexuelle. De ce point de vue, l’avènement des religions du livre opère un grand basculement civilisationnel.

Qu’est-ce que l’étude de la sexualité antique peut nous apprendre, à nous Européens de 2024 ?

À sortir du dogmatisme et des certitudes en matière de sexualité et, surtout, à abandonner la rhétorique nature/contre-nature trop souvent avancée pour condamner l’homosexualité. Elle nous apprend aussi que pour les Grecs, homosexualité et virilité allaient de pair, contrairement à l’idée véhiculée par les clichés homophobes modernes. Il est amusant de constater que l’Antiquité grecque est souvent convoquée par les communautés masculinistes (ainsi la fascination pour Sparte et le blockbuster 300, par exemple), que la dimension homosexuelle de la culture antique mettrait sans doute très mal à l’aise.

Sous la jupe d'Achille - L'homosexualité grecque, entre mythe et histoire

Price: 18,00 €

7 used & new available from 17,58 €

Et maintenant des enfants OGM?

0

Révélées par la presse, les recommandations de la Haute Autorité de Santé concernant la transition de genre à partir de 16 ans font craindre l’entrée du pays dans l’obscurrantisme wokiste, estime notre contributeur.


Ce que ces gens-là rejetteraient en poussant les hauts cris et en appelant aux armes s’il s’agissait de légumineuses, genre pomme de terre ou rutabaga, voilà qu’ils le proposent et l’encouragent sans vergogne pour le petit d’homme. En clair, l’enfant. Ces gens-là, ce sont les membres et experts de la Haute Autorité de Santé[1]. Ce qu’ils préconisent : l’accès à la transition de genre pour tous à partir de 16 ans avec la mise à disposition des personnes concernées d’une gamme de soins (sic) et d’accompagnements intégralement pris en charge par la Sécurité sociale. Parmi ces « soins », la prescription d’hormones spécifiques « d’affirmation de genre ». En clair, toutes substances propres à faciliter la transition, le changement de sexe. Et, redisons-le, ce bouleversement physiologique serait possible et rendu gratuit dès l’adolescence, la jeune personne étant elle seule maître du choix. Pire, l’autorité parentale pourrait être retirée à des pères et mères qui s’obstineraient à vouloir respecter, quant à eux, les caractéristiques attribuées à leur progéniture par dame nature elle-même. Comment, par ailleurs, ne pas décrypter là une attaque de plus contre la cellule familiale, contre en fait ce qui constitue – encore, mais pour combien de temps? – le noyau de base de notre société ?

Mais qu’est-ce donc que la H.A.S ? Voici comment elle se présente elle-même : « Autorité publique indépendante à caractère scientifique la HAS vise à développer la qualité dans le champ sanitaire, social et médicosocial au bénéfice des personnes. Elle travaille aux côtés des pouvoirs publics dont elle éclaire la décision, avec les professionnels, pour optimiser leurs pratiques et organisations au bénéfice des usagers dont elle renforce la capacité à faire leurs choix. » Trois vertus de base sont revendiquées : la rigueur scientifique, l’indépendance et la transparence. Cette autorité publique a été créée en 2004. Son budget 2023 est de 73 millions d’euros. Elle comptait cette même année 449 collaborateurs épaulés de quelque 2 400 experts.

A lire aussi, Céline Pina: Transidentité: les recommandations délirantes de la HAS

C’est beaucoup de monde et quand même aussi beaucoup d’argent. Cela pour  des travaux ou élucubrations d’une « rigueur scientifique » éminemment discutable. Plus que discutable, inexistante, outragée, foulée aux pieds. Il est évident que, avec cette préconisation, nous sommes à des années-lumière des règles les plus élémentaires de la méthode scientifique. Celle-ci exige avant toute publication, toute recommandation, toute mise en pratique, que les effets – tous les effets, à court, moyen et long termes – aient été observés, mesurés, interprétés. Dans le cas d’espèce, il n’en serait rien bien entendu. Les conséquences du tripatouillage hormonal infligé à un adolescent aujourd’hui ne pourraient être connues, évaluées qu’après des années et des années d’observation et de mesures des modifications physiologiques, mentales, psychiques entraînées. Un temps long qu’on peut vraisemblablement évaluer à une génération. Précipiter la mise en pratique et prôner la généralisation comme le fait la HAS n’a donc radicalement rien à voir avec la rigueur scientifique. C’est tout au contraire le diktat d’une rigueur toute idéologique, et seulement idéologique, qu’elle entend imposer au pays. Bref, l’obscurantisme wokiste dans toute son horreur. Horreur, est bien le mot. Car nous n’ignorons pas à quelles heures très sombres de notre histoire nous renvoient de telles aventures de pseudo science, de telles expérimentations aveugles, démentielles, inhumaines autant que contre nature… En fait, si une intervention chirurgicale salutaire et urgente s’impose, c’est bien l’ablation de cette excroissance maligne de l’État qu’est la HAS. Disparaître serait en effet ce qui lui resterait à faire de mieux dans le cadre de sa mission : « œuvrer au bénéfice des personnes ». 

LES TÊTES MOLLES - HONTE ET RUINE DE LA FRANCE

Price: 14,77 €

5 used & new available from 10,78 €


[1] https://www.lefigaro.fr/actualite-france/la-haute-autorite-de-sante-veut-un-acces-gratuit-a-la-transition-de-genre-pour-tous-a-partir-de-16-ans-20241212

Le clan des Marocains

Lors de sa visite au Maroc en octobre, le président Macron a soigneusement évité la question du trafic de drogue en faisant ses salamalecs à Mohammed VI…


Multiplication des points de vente, dealers promus narcotrafiquants, clients plus fidèles : la France est devenue un hypermarché de la drogue. L’État traque les trafiquants et accuse les consommateurs. En revanche, aucune condamnation officielle des pays producteurs, pourtant à l’origine du fléau, car sans matière première pas d’effets secondaires.

Le Maroc est ainsi le premier producteur mondial de cannabis, culture intensive soi-disant destinée et réservée à des fins thérapeutiques, mais l’alibi médical est un écran de fumée. Le 19 août, le ministère marocain de la Justice a annoncé que le roi « a bien voulu accorder sa grâce à 4 831 personnes condamnées, poursuivies ou recherchées dans des affaires liées à la culture du cannabis. »

Le Maroc est également une plaque tournante de tous les trafics, comme l’a exposé en mai dernier (dans l’hebdo marocain Telquel) Abderrahim Habib, responsable de la division de lutte contre la criminalité transnationale à la direction centrale de la police judiciaire du royaume chérifien : « Le Maroc est au carrefour des routes des trafics de drogues de tous types. L’héroïne venant d’Asie transite par ici avant d’être acheminée vers l’Europe. Les drogues de synthèse, comme l’ecstasy, font le chemin inverse et nous viennent d’Europe. Il y a aussi la cocaïne, qui provient directement d’Amérique latine ou via l’Afrique de l’Ouest. »

Quant à la Mocro Maffia, organisation criminelle qui depuis les Pays-Bas empoisonne toute l’UE (un ponte de cette mafia a été interpellé le 8 octobre à Paris par le GIGN), elle trouve ses racines au Maroc, comme la mafia américaine prend les siennes en Sicile.

En voyage trop diplomatique au Maroc fin octobre, le président Macron aurait pu et dû aborder le sujet avec Sa Majesté le roi Mohammed VI (comme en 1969 le président américain Richard Nixon l’avait fait avec le président Pompidou, à l’époque de la « French Connection », quand l’héro raffinée à Marseille inondait le marché américain). Mais les deux chefs d’État ont enterré le hasch de guerre et fumé le calumet de la paix. Macron est revenu avec 10 milliards de contrats pour nos grandes entreprises, mais il a épargné la « Maroc Connection ».

La famille blanche géante de Greg Lindberg

Un milliardaire américain est accusé d’être l’auteur d’un étrange « projet eugéniste » afin de construire une famille racialement pure.


C’est une enquête troublante publiée par Bloomberg et qui interroge les États-Unis. Greg Lindberg, 54 ans, est un magnat qui a fait fortune dans les assurances. Il est accusé d’avoir mis en place un « projet eugéniste » digne d’un scénario de science-fiction. Ce milliardaire aurait manipulé plusieurs femmes pour qu’elles lui fournissent des ovules et renoncent à leurs droits parentaux en échange d’un chèque d’un million de dollars, avec un objectif précis : fonder une immense famille exclusivement blanche.

Manipulations et pressions psychologiques

C’est le témoignage d’Anya, native du Kazakhstan, une des nombreuses femmes impliquées dans ce projet, qui a attiré l’attention du média américain. La seule à avoir accepté de parler aux journalistes. On découvre qu’elle serait la mère biologique d’un garçon de cinq ans qu’elle n’a pas vu depuis sa naissance. Selon elle, le « self-made man » lui aurait mis une pression intense afin qu’elle signe un contrat qui ne lui autorise plus à voir sa progéniture, une fois celle-ci conçue.

Toujours d’après Bloomberg, Greg Lindberg aurait eu cette idée de créer une famille géante après avoir vécu un divorce difficile qui lui ayant fait perdre la garde de ses trois enfants.

Un stratagème inquiétant

Grâce à un réseau d’avocats et à des cliniques spécialisées en fécondation in vitro (FIV), Greg Lindberg aurait réussi à contourner toute surveillance de l’industrie de la fertilité, sous-régulée aux États-Unis.  Le milliardaire aurait même fait appel à un vaste réseau de mères porteuses pour donner vie à ses ambitions qui ne sont pas sans rappeler celles des nazis sous le Troisième Reich. Que des femmes de type caucasien, blondes, de taille mannequin et aux yeux d’une clarté absolue ! Deux de ses assistantes auraient pris part à ce plan, l’une d’elles ayant même porté un de ses enfants.

A lire aussi, Olivier Annichini: Le clan des Marocains

Greg Lindberg serait aujourd’hui le père de 12 enfants issus de cette manipulation génétique, encore loin du nombre de 50 que cet admirateur d’Elon Musk se serait fixé comme objectif à atteindre. « Chaque enfant qui naît est un vote futur pour ce pays. Je suis d’accord avec Elon Musk, l’extinction de la population à cause d’un taux de natalité trop faible représente un risque bien plus élevé que le réchauffement climatique », explique-t-il d’ailleurs avec fierté.

Un séjour probable en prison

Pour autant, ce n’est pas par le biais de son projet que Greg Lindberg pourrait retourner une nouvelle fois derrière les barreaux d’une prison sécurisée. Déjà condamné dans le cadre d’une affaire de corruption, ultérieurement annulée pour vice de procédure, il a récemment plaidé coupable dans une nouvelle affaire de fraude et de blanchiment d’argent portant sur 2 milliards de dollars. Quid de ses héritiers en bas âge ? La justice devrait certainement les séparer et les placer dans des centres, le temps qu’il effectue sa peine.

Si les pratiques de Greg Lindberg profitent d’un cadre juridique flou, elles posent néanmoins un problème moral évident : celui de l’instrumentalisation des femmes et des enfants à des fins obsessionnelles. Ces révélations relancent le débat sur la régulation de la procréation assistée en Amérique. On n’ose imaginer un monde dans lequel de telles pratiques se multiplieraient.

Lyrique: Don Carlo de Verdi, à l’Opéra de Vienne. La lecture décapante de Kirill Serebrennikov

0

Le public viennois n’est pas de tout repos. Dans la captation du Don Carlo de Verdi que diffuse à bon escient Arte Concert[1] jusqu’à l’avant-veille du Jour de l’An, les huées ne couvrent pas la marée des applaudissements… mais on entend quand même bien meugler le comité d’accueil ! À l’évidence, ces braillements mammifères ne s’adressent qu’à la mise en scène de Kirill Serebrennikov, nullement aux chanteurs. Non plus qu’à l’inégalable orchestre maison, sous l’attentive battue de Philippe Jordan, dont c’est la dernière saison au pays de Mozart… Mais c’est qu’à Vienne, on ne rigole pas avec la tradition. Celle-ci en prend un sacré coup dans la relecture contemporaine, sciemment corrélée au conflit russo-ukrainien, qu’en fait le natif de Rostov-sur-le-Don désormais exilé à Berlin.  

Don Carlos (à l’Espagnole, avec s), ou Don Carlo (à l’Italienne, sans s) ? Car il y a bien des versions de ce drame tiré d’une pièce de Schiller, composé à partir de 1865 par un Verdi alors en contrat avec l’Opéra de Paris (le Palais Garnier est en construction), sur un livret concocté par un poète, Joseph Méry (lequel mourra cette année-là) et terminé par Camille du Locle, le gendre du patron de la maison, un dénommé Perrin. La tradition du « grand opéra » à la française, en ce XIXème siècle où le public parisien prise les machines opératiques spectaculaires, exige que l’œuvre soit chantée en langue française, avec ballet obligatoire au milieu des cinq actes. En 1866 éclate en Italie une guerre qui oppose l’Autriche à la Prusse pour le contrôle de la Vénétie ; un traité entérine finalement l’annexion de la région par l’Autriche. Le député Verdi, politiquement engagé dans l’unification de la péninsule et très préoccupé par la situation, tentera sans succès d’annuler le contrat qui le lie à Paris…

Autant dire que le contexte politique local trouve un écho puissant dans Don Carlo : l’intrigue, située au milieu du XVIème siècle, oppose le roi Philippe II, descendant de Charles Quint, à l’infant Don Carlos, promis à la princesse Elisabeth de Valois venue de Fontainebleau et dont il tombe amoureux, mais que son père veuf décide d’épouser à la place de son fils. Rodrigue, marquis de Posa, ami de cœur de Carlos, rentre quant à lui des Pays-Bas, sous occupation espagnole comme l’on sait, et supplie ce dernier d’intervenir auprès du roi pour la cause flamande. Ce qu’il fait. Mis en confiance, Philippe l’invite à surveiller son fils dont il soupçonne d’être son rival en amour, et lui conseille de se méfier du Grand Inquisiteur. La princesse Eboli, suivante d’Elisabeth, secrètement amoureuse de Carlos mais ayant commis avec Philippe l’adultère dont elle cherchera à accuser la reine, se verra ultérieurement piégée par celle-ci, et aussitôt bannie, dans des péripéties improbables dont on vous passe ici le détail. Carlos, s’opposant au supplice des hérétiques par l’Inquisition, semble à son tour trahi par Rodrigue qui, cédant au souverain intraitable et mal-aimé (cf. l’aria sublime « Elle ne m’aime pas… ») se charge de l’arrêter au nom du tyran néanmoins tourmenté à l’idée de devoir condamner à mort son propre enfant. Rodrigue sera finalement assassiné ; Carlos obtient le gouvernement des Flandres mais au moment des adieux surgit le roi, qui ordonne au Grand Inquisiteur de le sacrifier au tribunal du sang. C’est alors qu’apparaît le fantôme de Charles Quint…

A lire aussi, du même auteur: Edouard Limonov, ou la vie comme rhapsodie

Amours contrariées, raison d’Etat, oppression du pouvoir despotique et de l’autorité ecclésiastique, guerre d’occupation… Chef d’œuvre absolu de la maturité verdienne, la partition de Don Carlos est une pure merveille d’orchestration, dans une homogénéité d’écriture qui préfigure les chefs d’œuvre que seront encore, quelques années plus tard, Aïda en 1871 puis Otello en 1887. L’hiver 1882-1883 (rappelons au passage que Wagner meurt le 13 février 1883), Verdi entreprend de réviser son Don Carlos, en le ramenant à quatre actes, quitte à couper certains airs, en particulier au début de l’opéra. Mais en réalité, il n’y a pas UNE version française, Don Carlos d’une part ; et UNE version italienne baptisée Don Carlo (sans s) d’autre part. Tout comme Macbeth (1847) et Simon Boccanegra (1857) auront été également révisé, sur le tard, par un compositeur toujours soucieux d’étoffer son matériau musical pour plus d’intensité, de continuum dramatique, d’expérimentation dans l’orchestration et la mélodie, cet opéra agence, selon les occurrences où il fut donné, de Paris à Naples ou Milan, et ce jusqu’à aujourd’hui, des passages originaux ou remaniés, avec ou sans ballet, dans une forme d’hybridation jamais définitive. Le Don Carlo (sans s) donné en 1998 à l’Opéra-Bastille dans la mise en scène de Graham Vick reprise ensuite à maintes reprises, était par exemple chanté en italien. Tandis que l’Opéra de Paris programme à présent, pour mars/avril 2025, la reprise d’un Don Carlossss…. en cinq actes, dans la version originelle de 1867, chanté en français, donc (mise en scène signée Krysztof Warilowski millésimée 2017, et déjà reprise en 2019/2020).      

Ces digressions pour en revenir à Kirill Serebrennikov. C’est donc un Don Carlo en langue italienne qui est proposé au Staatoper de Vienne : la version la plus complète, dite « milanaise », celle de 1884. Sous les auspices de l’opposant déclaré à Poutine avait déjà fait jaser dans la capitale autrichienne, en 2021, sa mise en scène d’un Parsifal concentrationnaire (entreprise depuis la résidence surveillée où le réalisateur de Leto, de La Femme de Tchaïkovski et tout récemment du film Limonov la ballade était alors assigné à Moscou)…

Cette fois, pour Don Carlo, L’Escurial de Philippe II devient un Institut des Costumes high teck, où sont conservés en chambre froide les précieuses vêtures anciennes de la monarchie ibérique, exhumées de leurs cartons pour habiller les doubles ancestraux, comme réincarnés en chair et en os, des protagonistes transportés au XXIème siècle. Transposition tout à fait transparente qui imprime à l’intrigue une lecture politique clairement adossée au conflit russo-ukrainien : Rodrigue et Carlos enfilant des tee-shirts griffés LIBERTA en lettres capitales,  comparses portant pancartes ou bannières marqués « Il tempo stringe » (le temps presse), « Non tardare » ou « Salva nuesto solo », tandis que des cartels projetés en fond de plateau renvoient, dûment illustrés par la reproduction en vignette de leurs portraits officiels, aux authentiques figures historiques dont s’inspire la tragédie de Schiller et, partant, son adaptation lyrique… Quant aux protagonistes de l’opéra verdien, on les voit troquer sur le plateau leurs habits de 2024 contre les « patrons » de couleur noire, cousus de simples fils blancs, des costumes d’époque en cours de confection par le tailleur. Comme si Carlos, Elisabeth et Posa ne figuraient jamais que la réincarnation d’un combat sans âge contre l’oppresseur.  

Au-delà de cette lecture en somme très cohérente avec le livret, la partition est portée, dans cette nouvelle production autrichienne, par un casting, disons-le, superlativement virtuose, à commencer par Joshua Guerrero dans le rôle-titre, le baryton Etienne Dupuis en marquis de Posa, la mezzo suisse Eve-Maud Hubeaux extraordinaire en Eboli et surtout, la soprano lituanienne de 43 ans Asmik Grigorian, dont le timbre cuivré, rutilant, admirablement projeté imprime au rôle d’Elisabeth de Valois quelque chose qui tient du sublime. D’ailleurs, même à Vienne, au tomber de rideau, le public lui fait un triomphe. À vos écrans !    


Don Carlo. Opéra de Giuseppe Verdi. Avec Roberto Tagliavini, Joshua Guerrero, Etienne Dupuis, Dmitri Ulyanov, Asmik Grigoriam, Eve-Maud Hubeaux.
Direction : Philippe Jordan. Mise en scène : Kirill Serebrennikov. Orchestre de l’Opéra de Vienne.
Durée : 3h13
Captation visionnable en accès libre sur Arte Concert jusqu’au 28 décembre 2024


[1] https://www.arte.tv/fr/videos/120902-001-A/giuseppe-verdi-don-carlo/

L’Argentine à la tronçonneuse

Javier Milei a été élu à la tête de l’Argentine il y a un an. Ces douze derniers mois, l’ancien professeur d’économie a appliqué méthodiquement son programme ultra-libéral. Résultat : l’inflation s’est effondrée, les loyers ont baissé, la monnaie s’est renforcée et le budget est aujourd’hui excédentaire.


Gil Mihaely m’a demandé de faire le point sur un personnage singulier : le nouveau président argentin, Javier Milei, qui a fait campagne en exhibant une tronçonneuse partout où il allait. Par ce geste, il voulait symboliser son intention de nettoyer l’État argentin et de couper toutes les dépenses inutiles.

De quoi souffre ce pays béni des dieux ? Du fait que nos démocraties ont attrapé la vérole.

Nos démocraties représentatives sont en effet devenues des inaptocraties, où ceux qui sont incapables de gouverner sont élus par ceux qui ne veulent pas travailler, afin que les premiers organisent légalement la spoliation de ceux qui acceptent de travailler, au profit des passagers clandestins, les entretenant ainsi dans une oisiveté confortable.

Comme le disait Bastiat : « Quand le pillage devient un mode de vie pour un groupe d’hommes vivant ensemble en société, il se crée alors un système légal qui l’autorise et un code moral qui le glorifie. »

Un pays au fond du gouffre

L’Argentine, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a pratiqué avec constance ce type de gouvernement, passant ainsi de 1945 à 2023 du deuxième rang mondial en termes de niveau de vie à celui des pays les plus pauvres. C’est le pays non communiste qui a vu son niveau de vie régresser le plus au monde en soixante-dix ans, une période durant laquelle nous avons connu une forte croissance mondiale. Rien de quoi être fier.

En 2023, l’Argentine était véritablement au fond du gouffre : l’inflation atteignait 25 % par mois, la monnaie s’effondrait face au dollar (passant en quelques mois de 200 à 1 000 pesos pour un dollar), le pays était en faillite après avoir fait défaut sur des prêts du FMI, octroyés sur ordre de Mme Lagarde, alors présidente du Fonds. Pour compléter ce tableau lugubre, les réserves de change avaient fondu, la balance commerciale enregistrait mois après mois des déficits croissants, et enfin, les déficits budgétaires faisaient pâlir d’envie les inspecteurs des finances français. En résumé, les subventions que les inaptocrates versaient aux paresseux ne couvraient même plus le prix du ticket de métro pour aller les toucher.

C’est dans ce contexte que se sont déroulées les élections, et que le peuple argentin a finalement compris qu’il était temps de changer. C’est à ce moment que Javier Milei et sa tronçonneuse sont apparus. À la surprise générale, il a été élu avec 55 % des voix. Voici ce qu’il a fait une fois en fonction : il a commencé par annoncer des coupes budgétaires de 20 milliards de dollars (soit 5 % du PIB, l’équivalent de 75 milliards d’euros chez nous), avec des réductions de subventions pour les transports publics, l’électricité, le gaz et l’eau. Ensuite, il a procédé à une série de dérégulations par décret présidentiel, avec 300 mesures et 664 articles visant à déréguler le commerce, les services et l’industrie.

À lire aussi, Charles Gave: Abolissons les banques centrales !

Une opération de sauvetage : la loi « omnibus »

Le 27 décembre, cinq semaines après sa victoire électorale, Javier Milei a présenté le projet de loi « omnibus » visant à privatiser des entreprises publiques, dont la grande société pétrolière YPF. Cela a conduit à d’importantes manifestations fin janvier, organisées par les syndicats. Le gouvernement a répondu en menaçant de suspendre les allocations des manifestants et en indiquant qu’il ferait payer aux syndicats les frais de maintien de l’ordre. Cependant, il convient de noter que peu de violences policières ont été observées. Cela montre que l’idée selon laquelle un gouvernement libéral serait forcément très répressif est, dans ce cas précis, erronée.

Sans surprise, Le Monde, Le Monde diplomatique, Télérama, toutes nos chaînes de télévision et les intellectuels français admis à s’exprimer dans les médias ont hurlé que les Argentins allaient tous mourir de faim… Pourquoi sans surprise ? Parce que j’ai déjà vu ce film je ne sais combien de fois… Je l’ai vu avec Margaret Thatcher et la lettre signée en 1981 par 300 économistes britanniques expliquant que sa politique allait mener à la fin de la Grande-Bretagne, au moment même où les marchés financiers atteignaient leur plus bas. Je l’ai vu au Canada, quand le Premier ministre a décidé de réduire tous les budgets ministériels de 20 % d’un seul coup. Les économistes locaux étaient unanimes à prédire une dépression, l’effondrement de la monnaie et du niveau de vie. Non seulement le Canada n’a pas connu de récession immédiatement après, mais il n’y en a pas eu pendant plus de dix ans, et en fin de mandat, Jean Chrétien a baissé les impôts de plus de 100 milliards de dollars (canadiens…).

Enfin, je l’ai vu aux États-Unis, quand Reagan, fraîchement élu, a supprimé les contrôles des prix sur le pétrole, instaurés par Carter. Le prix à la pompe s’est effondré…

… Et tout se passe comme prévu

En réalité, comme le dit le professeur Raoult, les sociétés humaines peuvent être fondées sur la compétence ou sur l’obéissance. Et les organisations fondées sur l’obéissance cherchent toujours à détruire celles fondées sur la compétence. Comme Raymond Boudon l’a dit en réponse à la question « Pourquoi les intellectuels français n’aiment-ils pas le libéralisme ? » : « Parce que, dans un régime libéral, ils seraient payés à leur vraie valeur. »

En Argentine, tout se passe donc comme prévu, c’est-à-dire à l’inverse de ce que prédisaient les intellectuels et économistes universitaires. Après un peu plus d’un an au pouvoir, l’inflation mensuelle est tombée de 25 % à 4 %, le budget est excédentaire, ainsi que les comptes courants. Les loyers ont baissé grâce à l’augmentation de l’offre locative (conséquence de la fin des réglementations visant à protéger les locataires), la monnaie s’est renforcée (de 1 000 à 850 pesos pour un dollar), la bourse est au plus haut, et la popularité de Milei est telle qu’il peut espérer que son parti devienne majoritaire à l’été 2025. Seule ombre au tableau : la pauvreté aurait augmenté, mais tout porte à croire que cela ne durera pas. Pour expliquer cette prévision, je citerai Milton Friedman, autre maître à penser de Milei : « Si vous payez les gens à ne rien faire et si vous taxez ceux qui travaillent, il ne faut pas s’étonner que le chômage augmente. » Le chômage va donc baisser en Argentine, et avec lui, la pauvreté, puisque Javier Milei a décidé de ne plus payer les gens à ne rien faire.

Syrie: le nouveau casse-tête d’Israël

Après la chute et la fuite de Bachar Al-Assad, Israël a investi la zone de séparation avec la Syrie sur le plateau du Golan. Qu’y font ses militaires, et qu’y ont-ils trouvé?


Vendredi dernier, les postes d’observation de l’armée israélienne dans le Golan ont repéré des mouvements inhabituels parmi les soldats de l’armée syrienne stationnés à quelques centaines de mètres plus à l’est, au-delà de la zone démilitarisée séparant les deux frontières, connue sous les appellations de « ligne Alpha » (côté israélien) et« ligne Bravo » (côté syrien). Cette zone, située sur le plateau du Golan, est placée sous la supervision militaire de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (UNDOF) et bénéficie d’une administration civile syrienne.

La zone tampon, on s’en tamponne depuis longtemps

Dans le cadre de l’accord de désengagement signé en 1974, deux zones de réduction des forces militaires ont été définies de part et d’autre de cette zone tampon, chacune d’environ dix kilomètres de large. Dans la première zone, chaque partie est autorisée à déployer jusqu’à 75 chars et 6 000 soldats, tandis que dans la deuxième zone, il est permis de positionner jusqu’à 450 chars. En outre, il a été strictement convenu qu’aucun missile sol-air ne serait positionné à moins de 25 kilomètres des lignes de séparation, afin de prévenir toute escalade militaire. Pour Israël, cependant, cet équilibre fragile, garantissant une sécurité relative dans cette région sensible, a cessé d’exister à partir du moment où Bachar el-Assad a perdu le contrôle effectif de certaines parties de la Syrie, transférant de facto ses pouvoirs à des acteurs multiples, inconnus et imprévisibles, dont les intentions demeurent incertaines. Ce vide de pouvoir a ajouté une dimension d’instabilité supplémentaire, rendant les engagements passés de plus en plus difficiles à maintenir sur le terrain.

Les militaires syriens, stationnés dans des postes avancés répartis dans la région, ont été observés en train de quitter leurs positions face à la progression des rebelles syriens. Consciente de l’urgence de la situation, l’armée israélienne a donné l’ordre à la division 210 (« Bashan », la division territoriale relevant du Commandement Nord, chargée de la surveillance et de la défense de la frontière avec la Syrie) d’agir rapidement. Le commandant de la division, le brigadier général Yaïr Péli, connaît parfaitement la région. Il habite encore le village où il est né, situé en plein milieu du plateau du Golan, à 5 km de la frontière syrienne. Péli a effectué l’essentiel de son service militaire au sein du régiment Golani (en hébreu « du Golan »), l’unité d’infanterie par excellence du Commandement Nord. En moins de 24 heures, les forces israéliennes se sont déplacées vers l’est, ont franchi la barrière frontalière et pris le contrôle de larges zones stratégiques dans la zone tampon.

Actuellement, quatre groupements tactiques (équipes de combat interarmées) opèrent dans la zone tampon sous la direction de la division. Ces équipes comprennent des forces issues de la brigade des parachutistes, de l’unité Yahalom (spécialisée dans le déminage et la guerre souterraine), des brigades blindées 188 et 7, des forces spéciales, des unités du génie et des équipes de renseignement et de reconnaissance. Cette mission vise à établir une défense proactive dans la zone tampon, à éliminer les menaces à la frontière et, surtout, à empêcher d’autres éléments armés de s’emparer des positions syriennes et de s’y maintenir.

A lire aussi, Aurélien Bernheim: La « solution à deux États », tarte à la crème diplomatique

L’un des groupements principaux, celui de la brigade territoriale 474, continue de tenir des positions clés dans la zone. Lors des patrouilles, les forces ont découvert et confisqué plusieurs chars syriens laissés à l’abandon. Pendant ce temps, d’autres unités mènent des opérations complémentaires. Par exemple, les forces de la brigade de montagne 810 et les combattants de l’unité Shaldag, une unité d’élite de l’armée de l’Air, ont récemment terminé une opération sur le mont Hermon, dans la partie syrienne de la zone tampon. Cette mission a conduit à la saisie d’un poste militaire syrien situé au sommet le plus élevé de la montagne, offrant un champ de vue (de radar et d’écoute) ininterrompu sur le Liban et la Syrie, jusqu’à Damas.

L’une des priorités de Tsahal dans cette opération était le contrôle d’un poste syrien situé sur la colline de Tel Qudna. Ce point offre une vue dominante sur de vastes portions du plateau du Golan israélien. Pendant la guerre civile, des échanges de tirs avaient déjà eu lieu entre les forces israéliennes et syriennes dans cette région. Les parachutistes ont été déployés pour sécuriser ce poste, déjà abandonné par les soldats syriens. Sur place, les forces israéliennes ont trouvé des équipements militaires dont une partie était orientée vers l’ouest, en direction d’Israël, tandis que d’autres visaient l’est, indiquant une préparation en vue de l’arrivée des rebelles.

Les soldats israéliens ont découvert les postes abandonnés dans un état de délabrement avancé. Ces installations rudimentaires étaient dépourvues d’électricité et d’eau. Les soldats syriens semblaient y allumer des feux pour se réchauffer – l’hiver il neige et il fait très froid sur le plateau battu par les vents.

Occupation temporaire

Malgré l’urgence et les incertitudes, Israël insiste sur le caractère temporaire de cette occupation. Les forces sur le terrain ont reçu pour consigne de ne pas intervenir dans les conflits internes syriens, sauf si ces derniers menacent directement les soldats ou les localités israéliens.

Un journaliste d’Haaretz qui a accompagné les forces israéliennes dans la zone démilitarisée, témoigne de la surprise des forces israéliennes face à l’état déplorable des infrastructures militaires syriennes et la faible résistance des soldats syriens, qui semblent avoir abandonné leurs positions en toute hâte. Cette découverte a remis en question les scénarios de menace anticipés par Tsahal concernant l’armée syrienne. Contrairement à des groupes comme le Hamas ou le Hezbollah, qui disposent de forces bien organisées et bien équipées, l’armée syrienne s’est révélée particulièrement faible dans cette région. Pendant des décennies, des générations de militaires israéliens se préparaient à prendre ces positions construites et défendues selon la doctrine soviétique. Ces mythiques « pitas syriens » méritent un petit détour.

Tout commence par le choix d’une colline (d’où leur nom en hébreu « pita », probablement dérivé du mot français « piton »), point névralgique du dispositif. Au sommet de la colline, sont construits les bâtiments principaux : des logements pour les soldats, des installations logistiques et des centres de commandement. Autour de la colline, des tranchées sont creusées pour former un premier cercle défensif. Ces tranchées, parfois profondes et larges, servent à protéger les soldats des tirs ennemis tout en leur offrant des points de tir sécurisés. Plus le poste est important, plus ce réseau de tranchées s’étend. Parallèlement, des talus de terre sont élevés pour offrir une dissimulation supplémentaire contre les tirs d’artillerie et les frappes aériennes.

Dans ces tranchées sont aménagées des positions spécifiques en béton : des postes pour tireurs d’élite, des positions pour mitrailleuses protégées par des abris supérieurs permettant un feu d’enfilade, des postes d’observation et, surtout, des emplacements pour missiles antichars. Ces dernières positions sont particulièrement distinctives, car elles sont ouvertes à l’arrière pour permettre l’évacuation des gaz produits lors du lancement.

A lire aussi, du même auteur: Atoun, rebelle mais pas trop

Au-dessus des tranchées, une route circulaire est souvent aménagée. Elle est dissimulée par un talus qui protège les mouvements des véhicules blindés des regards ennemis. Cette route est essentielle pour les manœuvres de chars, qui peuvent se déplacer rapidement autour du poste, répondre à une attaque depuis plusieurs directions ou se replier vers des positions défensives.

Les positions des chars le long de cette route sont soigneusement étudiées. Une configuration particulièrement ingénieuse, appelée « rampe de police », permet au char de rester caché jusqu’à ce qu’il atteigne un point de tir idéal. En montant une rampe inclinée, le canon du char est orienté vers l’extérieur à travers une ouverture discrète. Une fois au sommet de la rampe, le char peut tirer tout en restant partiellement dissimulé, avant de redescendre et de se repositionner derrière le talus.

Pour compléter ces dispositifs mobiles, des « chars enterrés » sont parfois installés autour du poste. Ces chars, immobilisés et enfouis dans le sol, ont leur canon orienté vers l’extérieur, prêt à tirer sur une menace. Ce système, bien que fixe, permet d’accroître la puissance de feu et d’assurer une défense continue, même si les blindés mobiles doivent se déplacer pour répondre à une attaque ailleurs. Jadis considérés comme des obstacles redoutables, ces « pita » ont été laissés à l’abandon bien avant la chute du régime, témoignant d’un long processus de déliquescence de l’armée de terre d’Assad et de la marginalisation de ce front dans les priorités du régime depuis le déclenchement de la guerre civile. Pendant la dernière décennie, le Golan a davantage intéressé le Hezbollah et l’Iran que le gouvernement syrien.

Jusqu’à l’offensive des rebelles, la frontière était relativement calme, maintenue avec un minimum de forces israéliennes. Désormais, la Syrie est devenue la principale zone d’opération pour Tsahal. Cependant, aujourd’hui, contrairement à la guerre civile de 2011, aucun signe de fumée ou d’explosion n’est visible sur le plateau. Dans le Golan, les activistes encore présents semblent eux aussi désorientés face à la situation et à son évolution. En tout cas, ils se préparent davantage à des dangers venant de l’intérieur qu’à des menaces venant du voisin à l’ouest. Bien que l’objectif israélien soit de maintenir une présence tactique temporaire, la durée de cette opération reste incertaine. Pour l’instant, Tsahal poursuit le renforcement de ses positions dans la zone tampon, tout en maintenant une vigilance renforcée face aux évolutions rapides et imprévisibles de la situation dans cette région stratégique. La décision de déclarer caduc l’Accord de désengagement signé entre Israël et la Syrie le 31 mai 1974, est lourde de conséquences. Surtout, elle traduit la grande méfiance israélienne vis-à-vis les forces qui ont détrôné les Assad. L’ombre de la surprise du 7-Octobre plane encore lourdement sur les forces déployées sur le terrain ainsi que sur les décideurs à Jérusalem.

Anastasia Colosimo: plus couillue que ses délateurs

0

La conseillère de Macron, fille de l’éditeur bien connu Jean-François Colosimo, se voit reprocher des propos vulgaires. Des journaux sérieux vont jusqu’à l’accuser d’outrage sexiste et de menaces. Les journalistes sont décidément des êtres bien sensibles…


Au cœur d’une actualité internationale surchargée, certains médias ont réussi à trouver le temps de s’intéresser au langage fleuri de la « conseillère presse internationale » d’Emmanuel Macron.

Ils ont même littéralement inventé un « Colosimogate », pour quelques tournures de phrase légèrement grossières tenues dans un contexte privé. Un petit bout de femme à lunettes rondes à double foyer est devenu, en un instant, le symbole d’une macronie arrogante et déconnectée, voire des méthodes fascistes que l’Élysée emploierait contre d’humbles et toujours courtois journalistes.

http://twitter.com/ELevyCauseur/status/1863970594728948085

Une histoire sans queue ni tête

Des messages dégradants et méchants, constituant un harcèlement caractérisé, ont depuis visé Anastasia Colosimo sur les réseaux sociaux. L’essayiste qui aurait dit, oh malheur, avoir envisagé de voter pour Marine Le Pen en 2017, travaille depuis janvier 2023 avec Emmanuel Macron. Âgée de 34 ans, elle est chargée de traduire les positions de l’Élysée sur les grands enjeux internationaux, enjeux ô combien nombreux. Une tâche peu évidente tant ces questions font l’objet d’une constante désinformation mais aussi de multiples incompréhensions. De quoi susciter quelques inimitiés, et quelques disputes, assurément. Normal. Mais, la profession de journaliste compte de nombreuses petites natures que les méthodes de Mademoiselle Colosimo « choquent ».

A lire aussi: Le wokisme n’existe pas. Enfin, ça dépend des jours…

Comme souvent dans ce genre d’histoires complaisamment relayées par les médias, nous sommes sûrement face à un cas de rivalité personnelle. Un petit peu comme si un conflit entre collègues de bureau vous concernant faisait la une des actualités ! Mademoiselle serait « sexiste » et « menaçante ». Elle aurait notamment dit à un journaliste : « Tu dois avoir une grosse queue d’homme courageux, j’aimerais bien la voir, la sentir, la toucher ». Le pauvre, sûrement traumatisé par cette réplique, s’est empressé de rapporter tout ça au Nouvel Obs. Répondre directement et en personne à l’essayiste au service du président de la République ? Cela demandait vraisemblablement trop de caractère. Au point qu’on doute maintenant de la taille de la queue que l’infortuné cache finalement dans son pantalon… De nos jours, il est apparemment devenu impossible de se défendre soi-même d’une attaque – même verbale. Nous sommes tellement lyophilisés, que la moindre offense ne peut se régler que par des plaintes devant le tribunal médiatique, des fuites savamment orchestrées sur les réseaux sociaux ou des jérémiades à la direction des ressources humaines.

Culture du viol

Quant au contexte exact dans lequel ces phrases ont été prononcées, nous n’en saurons évidemment rien. Il a été décrété que tout cela était totalement gratuit et à prendre au premier degré. Car, comme le rapporte Le Nouvel Obs, le père de cette machiste en jupons est Jean-François Colosimo, lequel est « lui-même connu pour ses intérêts rapprochés avec le journal Valeurs Actuelles ». Brrr… On se demande bien ce que peut signifier cette culpabilité par association. Les journalistes de gauche auraient-ils un mur des cons dans leur salon, sur lequel ils lancent des fléchettes ?

A lire aussi, Arnaud Benedetti: Qui a peur de Boualem Sansal?

Personnellement, si tout ce qu’on en dit est vrai, je la trouve plutôt marrante, cette Anastasia Colosimo. Qu’une fille de son âge puisse balancer à un prêtre du catéchisme cathodique « Tu fais de la merde et tu pisses autour » a son petit fumet séduisant de bar PMU des années 80. On l’imagine nerveuse, façon petite dure en tailleur noir un peu froissé, s’emportant après les chroniqueurs de BFM TV un pastis à la main. Que la communicante nous secoue tous ces fourbes, ça ne peut pas leur faire de mal ! Les Français n’en peuvent plus des faux self, des discours lisses et des hypocrites. Qui adopte toujours un comportement parfaitement approprié dans un cadre privé et / ou professionnel ? Qui ne lâche jamais un « connard » à un enquiquineur ? Toute personne saine et normalement constituée devrait toujours préférer une franche insulte en face-à-face à des calomnies dans le dos. Un peu de vérité, un peu de drôlerie voire un peu de vulgarité ne fait pas de mal. De plus, admettez qu’Anastasia Colosimo fait tout cela avec une certaine inventivité ! 

Dans le journal Le Monde, on apprenait aussi récemment qu’Emmanuel Macron aime chantonner du Michel Sardou dans les couloirs de l’Élysée. De quoi faire dire à Edwy Plenel que le président de la République serait nostalgique du « bon temps des colonies » et défenseur de la culture du viol, puisqu’il est bien connu que le narrateur des Villes de Solitude se confond avec l’interprète Sardou. Alexis Corbière, qui comme Le Nouvel Obs ou Le Monde se situe à gauche de l’échiquier politique, et qui adore le chanteur, a dû être heureux d’apprendre qu’il défendait le droit au viol !

La Syrie pour les Nuls

0

Syrie. Israël a joué un rôle clé en affaiblissant l’Iran et le Hezbollah par ses frappes ciblées, contribuant ainsi indirectement à l’effondrement du projet d’axe chiite et au succès des islamistes.


La chute d’Assad a entrainé un torrent de commentaires. Nouvelle malchance pour Emmanuel Macron, elle a rejeté dans l’ombre le haut fait de sa présidence, à savoir le pari réussi de la reconstruction de Notre-Dame. 

Les noms de ceux qui sont aujourd’hui les maitres d’une Syrie où régnait depuis 54 ans une dynastie impitoyable, protégée par deux régimes qui font peur, la Russie et l’Iran, étaient inconnus il y a quinze jours. Ils se sont emparés d’un couloir stratégique fait de quatre grandes villes du nord au sud dont l’existence remonte à la nuit des temps, Alep, Hama, Homs et Damas, qui ont été le centre de l’empire omeyyade et les bastions de l’islam contre les croisés. 

Révolution arabe en retard

En août 2012, Obama avait déclaré que l’utilisation d’armes chimiques par la Syrie constituerait une «ligne rouge» à ne pas franchir. Un an plus tard, alors qu’une attaque aux gaz neurotoxiques avait fait des milliers de victimes, le même Obama préféra un «deal» naïf, moralement et politiquement désastreux, à une opération militaire, et accepta une proposition de Poutine qui marquait le retour russe au Moyen-Orient. La Syrie s’engageait à liquider ses stocks d’armes chimiques. Inutile de préciser qu’elle ne l’a pas fait, et il faut saluer l’opération aérienne israélienne actuelle de destruction de ces stocks.

Les experts ne donnaient pas cher à Assad quand la guerre civile a commencé dans l’été 2011, alors qu’étaient renversés ses collègues Ben Ali, Moubarak et Kadhafi en Tunisie, Egypte et Libye. Ils se sont trompés et ils n’ont pas non plus prévu l’écroulement actuel du régime. 

Assad fut soutenu massivement par l’Iran, puis, depuis 2015 par la Russie, qui prétendait lutter contre un terrorisme soutenu par les occidentaux,  mélangeant à dessein les opposants modérés à Assad et les milices islamistes radicales. 

Cette guerre a été terrible, 500 000 morts, encore plus de blessés et mutilés. En combinant les 7 millions de réfugiés et les 7 millions de déplacés internes, plus de la moitié des Syriens se sont enfuis, vingt fois plus que les réfugiés palestiniens de 1948. Depuis près de 10 ans, les réfugiés syriens en Turquie donnent à Erdogan un levier de chantage sur l’Europe, qu’il a utilisé magistralement.

La poche d’Idlib

Le régime de Bachar ne contrôlait pas tout le territoire syrien. Au nord-ouest, jouxtant la frontière et sous protection turque, c’était la poche d’Idlib d’où sont partis les insurgés. Sa population avait triplé lors de la guerre civile et atteignait 4 millions de personnes, deux fois plus d’habitants qu’à Gaza, mais sur une superficie 10 fois supérieure. Les troupes syriennes, malgré l’aide russe, n’étaient pas parvenues à prendre cette poche. Entre les parrains turc et russe, un «gentlemen’s agreement» avait été signé en 2018 car Erdogan était trop utile à Poutine pour qu’il laisse éclater une vraie guerre. La passivité actuelle de la Russie vient aussi de ce choix de préserver ses relations avec la Turquie.

Le mouvement HTS (Hayat Tahrir al-Cham, HTS ou HTC suivant qu’on transcrit le mot Sham «Syrie» avec un S ou un C) qui contrôle Idlib, et aujourd’hui la Syrie, est qualifié de terroriste non seulement par les États-Unis, mais par la Turquie qui le soutient par ailleurs, continuel double jeu de Erdogan. On dit que le financement du HTS provient en grande partie du Qatar….

Le chef de HTS depuis sa création il y a douze ans sous le nom d’al Nosra, est Abou Mohamed al-Joulani, fils d’une famille de la bourgeoisie syrienne, qui coche toutes les cases du djihadisme: prison d’Abu Ghraib, allégeance au sanguinaire Abu Moussab al Zarqawi, puis à Abu Bakr al-Baghdadi, le chef de Daech, puis à Ayman al Zawahiri, successeur de Ben Laden à al-Qaida, mais depuis plusieurs années, il semble bien avoir rompu avec ces mouvements qui prônent le djihad global. Il dit vouloir se concentrer sur la situation en Syrie. Dans ce cas, il lui reste fort à faire, car peu de pays sont dans un état économiquement et humainement aussi catastrophique.

À lire aussi, Gil Mihaely: Atoun, rebelle mais pas trop

Le gouvernement du Rojava

Parmi les organisations coopérant avec HTS, il y a l’Armée nationale Syrienne, un nom trompeur pour des milices entièrement à la solde de la Turquie. Elles seront le fer de lance d’une offensive probable contre les Kurdes qui occupent un grand territoire au Nord Est de la Syrie, qu’ils appellent le Rojava. Là se trouvent le pétrole syrien et les prisons où sont détenus les djihadistes de Daech. L’Union démocratique, le parti kurde modéré qui y prédomine est considérée par Erdogan comme un faux nez du PKK, son ennemi juré.

Les Kurdes ont été les meilleurs alliés de l’Occident dans la lutte contre Daech et les Américains ont gardé 900 soldats dans la région, ainsi que, tout près en Jordanie et à la frontière irakienne, la Tour 22, une importante base militaire.

Le 10 décembre, HTS a repris aux troupes de Bashar, Deir el Zohr, la grande ville de l’Est syrien, et vient ainsi au contact des Kurdes. Un face-à-face avec les Américains alors qu’il a fait reculer les Russes ne peut que faire plaisir à Erdogan. Il est possible, probable même, que les Américains refuseront l’affrontement et que les jours de l’autonomie kurde au Rojava sont comptés.

Le massif des Alaouites

Provenant des montagnes à l’ouest du pays, les Alaouites forment 10% de la population syrienne, les Assad en font partie.

C’est une secte ésotérique historiquement méprisée par l’islam sunnite. Leur vénération pour Ali, gendre du Prophète, mais surtout, l’intérêt d’une alliance avec Hafez el-Assad, ennemi acharné de l’Irakien Saddam Hussein, avec qui Khomeini était en guerre, avait poussé ce dernier à proclamer opportunément dans une fatwa que les Alaouites faisaient partie du chiisme duodécimain, celui de l’Iran. 

L’excellence des relations des sunnites du Hamas avec l’Iran et le régime Assad ne se transpose pas aux fondamentalistes sunnites syriens. Ceux-ci gardent la mémoire du massacre de Hama en 1982 perpétré par Hafez el-Assad contre les Frères Musulmans. Pour Joulani, les Alaouites sont des hérétiques, même s’il déclare ne pas vouloir s’en prendre à eux. Quant aux Iraniens, le saccage de leur ambassade dit l’hostilité populaire.  Le lien syrien entre l’Iran et le Hezbollah est donc rompu et il est à prévoir que des règlements de compte auront lieu à Téhéran à la suite de l’anéantissement du grand projet d’axe chiite.

À lire aussi, Gil Mihaely: Armée d’Assad: la déroute de Damas

Quelques remarques

Aujourd’hui, des témoignages indiquant que la charia n’est pas appliquée à Idlib avec rigueur s’ajoutent aux déclarations apaisantes de Joulani et alimentent les espoirs des optimistes. Les pessimistes rappellent les illusions sur l’arrivée de «Talibans modérés» à Kaboul et les plus anciens se souviennent des déclarations sur la liberté qu’allait apporter l’ayatollah Khomeini au peuple iranien. 

Aujourd’hui aussi, il y a unanimité en France sur l’horreur du règne des Assad. Mais dans le passé, les complaisances furent nombreuses et ne se limitent certainement pas à Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon. Quant à l’ONU, suivant UN Watch, l’Assemblée Générale a voté depuis 2015 156 résolutions contre Israël et 11 contre la Syrie. Assad a été réélu en 2021 avec 95% des voix et ce truquage, finalement internationalement banal, n’a entrainé  aucune sanction.

Bachar al-Assad a été un mauvais dictateur qui avait la cruauté, mais pas l’intuition du rapport de forces. Laissant son armée en déshérence, il s’est reposé sur ses protecteurs, qu’il s’est de plus parfois mis à dos. La Russie ne lui a offert qu’un asile «humanitaire». Comme elle veut préserver sa base navale de Tartous, la seule en Méditerranée, et sa base aérienne de Hmeimim, près de Lattaquié, elle a vite accepté le changement de drapeau sur l’Ambassade de Syrie à Moscou.

Enfin, chacun comprend que l’évaporation du Hezbollah et des forces iraniennes a été provoquée par les coups qu’Israël leur a portés, facteur majeur et paradoxal du succès des islamistes. Ceux-ci sont désormais à la frontière d’un Golan d’où est issu leur chef, car Joulani signifie en dialecte syrien, l’homme du Golan. Mais pour Israël, cette proximité est gérable et tout ce qui affaiblit l’Iran est bon à prendre…

Pour Boualem Sansal

0

« La gauche n’aime pas la liberté ! » se désole notre directrice de la rédaction au micro de Sud Radio


Boualem Sansal reste en prison. La Cour d’Appel d’Alger a rejeté son appel hier. En son absence, et en l’absence de son avocat français, interdit d’entrer en Algérie. Depuis le 16 novembre, un écrivain français est détenu par la justice algérienne, poursuivi pour « atteinte à l’unité nationale » et « complot contre la sûreté de l’État ». Il risque la perpétuité. Personne n’a eu de contact avec lui sinon ses avocats algériens commis d’office.
Ses crimes: des écrits, des propos et son irrévérence assumée et joyeuse envers l’islam et envers le régime algérien. Je connais peu d’hommes aussi libres.
Il est otage de la crise franco-algérienne. Son arrestation est un bras d’honneur des Algériens après le tournant marocain et notre reconnaissance du Sahara oriental. Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris (sous tutelle directe d’Alger depuis 1982), longtemps présenté comme un modéré, n’a pas eu un mot pour son collègue de l’Académie des sciences d’outre-mer. Et tous les réseaux algériens en France répètent les éléments de langage du régime de façon assez dégoutante.
La France officielle s’agite en sous-main, mais semble tétanisée. Pas de vagues. Ne les énervons pas. Pour l’instant, cette stratégie de l’hyper-prudence et du silence s’est avérée inefficace. Sommes-nous capables d’utiliser nos moyens de pressions réels : visas, traité de 1968, comptes de la nomenklatura algérienne ?

À lire aussi, Arnaud Benedetti: Qui a peur de Boualem Sansal?

Pour Arnaud Benedetti, directeur de la Revue Politique et Parlementaire, qui organise une soirée de soutien lundi à Paris, le plus grand danger est l’ensevelissement dans l’indifférence. Il y a pire que l’oubli : certains, toute honte bue, en profitent pour cracher sur l’écrivain. Comme Sandrine Rousseau, au micro de Sud Radio, il y a deux jours.

C’était le pompon de l’abjection. J’ai bondi quand je l’ai entendue. Sansal n’a pas à être en prison MAIS ses positions relèvent de l’extrême droite et du suprémacisme, nous a-t-elle dit. Selon la députée, il dirait qu’une civilisation est supérieure à une autre. Cela prouve qu’elle n’a jamais lu une ligne de lui et récite sa leçon. Elle aurait certainement dit aussi que Soljenitsyne était trop anticommuniste et Salman Rushdie islamophobe. Son tweet a d’ailleurs été publié par TSA, un des médias aux ordres du gouvernement algérien – à sa place j’aurais honte. Commentaire : vous voyez bien, cet écrivain d’extrême droite ne fait pas l’unanimité en France.
Je vois là une faillite morale de presque toute la gauche. Un écrivain est accusé de crime-pensée comme on dit dans 1984, emprisonné parce qu’il est libre et ose défier un pouvoir prédateur et dictatorial, et c’est le silence radio chez LFI et les Ecolos. Au PS, c’est service minimum à quelques voix près (M. Guedj, M. Delafosse, Mme Delga). Nos personnalités politiques de toute la vieille gauche sont doublement gênées : un peu complaisantes avec la dictature algérienne par repentance coloniale, et aussi un peu complaisantes avec l’islam politique par ailleurs. C’est exactement comme après Charlie. C’est pas bien de tuer des journalistes, MAIS ils n’auraient pas dû… Je vois là-dedans de la lâcheté, du cynisme et surtout, une haine sidérante de la liberté. Cette gauche a déjà le déshonneur, j’espère que les Français lui infligeront vite la défaite qu’elle mérite.

Comite.soutien.boualem.sansal@gmail.com
16 décembre à 20 h, 4 boulevard de Strasbourg, Paris


Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Sud Radio

« Pour les Grecs, homosexualité et virilité allaient de pair »

0
Nicolas Cartelet © Isabelle Nery

Comment s’aimaient les Grecs de l’Antiquité ? Si l’homosexualité et la pédérastie faisaient partie des mœurs, elles étaient strictement codifiées et bien éloignées des pratiques actuelles. Nicolas Cartelet, écrivain et éditeur, spécialiste de l’Antiquité, analyse dans son livre Sous la jupe d’Achille la complexité de l’homosexualité grecque, et bouscule au passage les idées reçues…


Pierre des Esseintes. Comment distinguer, chez les Grecs anciens, pédérastie et pédophilie ?

Nicolas Cartelet. La confusion entre pédérastie et pédophilie est d’abord étymologique, puisque le terme « pédérastie », étymologiquement, désigne l’amour des enfants mâles. Mais les Grecs appelaient « enfant » n’importe quelle personne âgée de 0 à 20 ans. La pédérastie grecque avait pour but de former de jeunes hommes (les éromènes) à la citoyenneté en les mettant au contact d’hommes accomplis (les érastes) : l’échange était intellectuel, politique, militaire, mais aussi amoureux et sexuel. Une infinité de règles connues de tous bornaient ces échanges, jusqu’à l’âge et l’attitude convenables pour chacun. Ainsi, il semble peu probable que les érastes aient eu des relations sexuelles avec de très jeunes garçons, car le canon de beauté promu par les Grecs, c’est-à-dire l’âge auquel un jeune homme était considéré sexuellement attirant, désigne l’éromène au corps déjà formé, musclé, bronzé et viril, sans doute âgé de 16 à 20 ans.

Aujourd’hui, on a tendance à penser que l’hétérosexualité constitue une « norme » culturelle. Ce n’était pas du tout le cas chez les Grecs. Pouvez-vous nous l’expliquer ?

Les Grecs considéraient l’homosexualité comme un trait naturel de leur culture. Nulle part, dans un aucun texte, l’amour entre hommes n’est désignée comme contre-nature. On peut avancer que chez certains aristocrates, le goût des hommes et la séduction de beaux éphèbes comptaient parmi les plus grands plaisirs de la vie. Néanmoins, la société grecque avait tout d’une société traditionnelle, centrée sur la filiation et la production d’héritiers. Les Grecs considéraient que passé un certain âge (à gros traits au-delà de 30 ans), un homme devait abandonner l’homosexualité pour fonder un foyer avec une femme. Nombreux sont les témoignages se moquant de « débauchés » continuant de séduire des éromènes à un âge révolu.

Les Grecs s’intéressaient-ils à la beauté féminine ?

Les Grecs étaient sans aucun doute sensibles à la beauté féminine, mais la représentation du « beau » masculin est infiniment plus présente dans nos sources que celle du beau féminin. Chez Homère, Hélène de Troie est d’une beauté étourdissante que reconnaissent tous ses contemporains – mais sa beauté est aussi un poison car elle fait perdre la raison à Pâris, qui l’enlève et déclenche la guerre de Troie. Il y a chez les Grecs cette propension à juger la beauté féminine « vénéneuse », alors que la beauté masculine a quelque chose de divin à leurs yeux.

© D.R.

Les relations entre hommes relevaient-elles d’une recherche du plaisir pour les deux partenaires ?

La relation pédérastique est par essence inégale. L’éromène est passif et doit se contenter d’accueillir les élans de son éraste – cadeaux comme sollicitations sexuelles – sans manifester de plaisir. Son seul but doit être de s’élever moralement pour devenir un adulte accompli. Un éromène trop enthousiaste dans la relation serait regardé avec méfiance et considéré comme un débauché. L’éraste en revanche peut tirer du plaisir des relations sexuelles qu’il a avec son amant. Les sources sont bavardes sur le sujet, on exprime volontiers le plaisir que procure la pénétration anale, par exemple, et plus fréquemment encore celui tiré de la pénétration intercrurale (le sexe coulisse entre les cuisses de l’éromène). Rappelons que seul l’éraste pénètre son partenaire, l’inverse est impensable chez les Grecs.

À lire aussi, Bertrand Alliot : De la mythologie à la géographie

En Grèce, les homosexuels passifs étaient méprisés. Faut-il voir dans ce mépris les racines de l’homophobie actuelle ?

C’est surtout l’homme efféminé qui est méprisé par les Grecs, ou bien l’homosexuel qui serait passif et se laisserait pénétrer alors qu’il a passé l’âge d’être un éromène. Chez les Grecs, le masculin va de pair avec le courage et la virilité. L’homme efféminé est moqué et soupçonné de lâcheté – on le juge inapte à défendre la cité, ce qui en fait un mauvais citoyen. Il faut dire que la culture grecque est éminemment misogyne, et prête peu de qualités aux femmes (en tout cas aucune qualité utile dans le champ politique et militaire qui sont les deux piliers des cités-états grecques). Une attitude jugée féminine est de fait jugée suspecte. On peut y trouver un trait commun avec l’homophobie moderne, oui, mais nombreuses ont été les sociétés traditionnelles à opérer cette distinction entre masculin/viril, actif et féminin/doux, passif.

Dans votre livre, on apprend que le mot « lesbianisme » a été détourné…

Étymologiquement, encore une fois, le terme lesbianisme désigne le fait de pratiquer la fellation – et plus globalement, il désigne la femme lascive, séductrice. Il est intéressant de constater que le mot vient de Lesbos, cette île grecque, patrie de Sappho (qui a donné saphisme), réputée pour avoir offert une plus grande liberté aux femmes que dans beaucoup d’autres cités grecques. Comme si les femmes de Lesbos, surgissant dans l’espace public, étaient considérées comme sulfureuses, provocatrices. Il y a là l’idée, il me semble, qu’elles ne sont pas tout à fait à leur place aux yeux du monde grec.

© D.R.

Vous dressez huit portraits de couples homosexuels célèbres dans l’histoire et la mythologie. Lesquels vous semblent les plus riches d’enseignement ?

Chacun de ces couples met en lumière une facette de l’homosexualité grecque. L’histoire d’Harmodios et Aristogiton, ce couple homosexuel ayant assassiné le tyran Hipparque à Athènes et précipité l’invention de la démocratie grecque, est remarquable car elle est basée sur un mensonge historique. En effet, les historiens modernes ont démontré que la relation pédérastique entre Harmodios et Aristogiton était improbable (les deux hommes étaient trop âgés pour avoir joué le rôle d’éraste et d’éromène l’un pour l’autre). Les Grecs eux-mêmes ont réécrit l’histoire pour y insérer cette dimension homosexuelle, car à leurs yeux, la démocratie athénienne, basée sur le corps des citoyens-soldats, était indissociable de la pédérastie, dont l’essence-même était la formation des futurs citoyens.

À lire aussi, Georgia Ray : Médaille de marbre

En regard, on peut évoquer le fameux procès de Timarque, qui nous invite à ne pas idéaliser la société grecque comme un paradis pour l’homosexualité. Timarque est empêtré dans un procès politique pour trahison d’État, et la plaidoirie pour le condamner, qui nous est parvenue, insiste davantage sur son prétendu passé de débauché que sur les faits qui lui sont reprochés. On l’accuse de s’être prostitué et d’avoir agi en mauvais éromène lorsqu’il était plus jeune, c’est-à-dire en tirant du plaisir et du profit de relations sexuelles en tant que partenaire passif, et ces soupçons suffisent à salir son image aux yeux des jurés. Cette histoire judiciaire nous rappelle tous les interdits, explicites ou non, qui pesaient sur les jeunes homosexuels et pouvaient à tout moment se retourner contre eux.

Le christianisme a-t-il eu une influence sur la manière dont l’homosexualité antique est encore perçue aujourd’hui ?

Plus largement, les religions du livre ont marqué une forte évolution dans la façon dont l’homosexualité a été perçue. Dans le monde occidental, on passe d’une Europe dominée par les cultures grecque puis romaine, qui considèrent l’homosexualité naturelle, à un monde chrétien qui s’appuie sur la Bible pour condamner l’amour entre hommes. Les Grecs n’ont jamais considéré que leurs dieux avaient édicté des lois terrestres régissant la manière dont chacun devait vivre, jusque dans son intimité sexuelle. De ce point de vue, l’avènement des religions du livre opère un grand basculement civilisationnel.

Qu’est-ce que l’étude de la sexualité antique peut nous apprendre, à nous Européens de 2024 ?

À sortir du dogmatisme et des certitudes en matière de sexualité et, surtout, à abandonner la rhétorique nature/contre-nature trop souvent avancée pour condamner l’homosexualité. Elle nous apprend aussi que pour les Grecs, homosexualité et virilité allaient de pair, contrairement à l’idée véhiculée par les clichés homophobes modernes. Il est amusant de constater que l’Antiquité grecque est souvent convoquée par les communautés masculinistes (ainsi la fascination pour Sparte et le blockbuster 300, par exemple), que la dimension homosexuelle de la culture antique mettrait sans doute très mal à l’aise.

Sous la jupe d'Achille - L'homosexualité grecque, entre mythe et histoire

Price: 18,00 €

7 used & new available from 17,58 €

Et maintenant des enfants OGM?

0
DR.

Révélées par la presse, les recommandations de la Haute Autorité de Santé concernant la transition de genre à partir de 16 ans font craindre l’entrée du pays dans l’obscurrantisme wokiste, estime notre contributeur.


Ce que ces gens-là rejetteraient en poussant les hauts cris et en appelant aux armes s’il s’agissait de légumineuses, genre pomme de terre ou rutabaga, voilà qu’ils le proposent et l’encouragent sans vergogne pour le petit d’homme. En clair, l’enfant. Ces gens-là, ce sont les membres et experts de la Haute Autorité de Santé[1]. Ce qu’ils préconisent : l’accès à la transition de genre pour tous à partir de 16 ans avec la mise à disposition des personnes concernées d’une gamme de soins (sic) et d’accompagnements intégralement pris en charge par la Sécurité sociale. Parmi ces « soins », la prescription d’hormones spécifiques « d’affirmation de genre ». En clair, toutes substances propres à faciliter la transition, le changement de sexe. Et, redisons-le, ce bouleversement physiologique serait possible et rendu gratuit dès l’adolescence, la jeune personne étant elle seule maître du choix. Pire, l’autorité parentale pourrait être retirée à des pères et mères qui s’obstineraient à vouloir respecter, quant à eux, les caractéristiques attribuées à leur progéniture par dame nature elle-même. Comment, par ailleurs, ne pas décrypter là une attaque de plus contre la cellule familiale, contre en fait ce qui constitue – encore, mais pour combien de temps? – le noyau de base de notre société ?

Mais qu’est-ce donc que la H.A.S ? Voici comment elle se présente elle-même : « Autorité publique indépendante à caractère scientifique la HAS vise à développer la qualité dans le champ sanitaire, social et médicosocial au bénéfice des personnes. Elle travaille aux côtés des pouvoirs publics dont elle éclaire la décision, avec les professionnels, pour optimiser leurs pratiques et organisations au bénéfice des usagers dont elle renforce la capacité à faire leurs choix. » Trois vertus de base sont revendiquées : la rigueur scientifique, l’indépendance et la transparence. Cette autorité publique a été créée en 2004. Son budget 2023 est de 73 millions d’euros. Elle comptait cette même année 449 collaborateurs épaulés de quelque 2 400 experts.

A lire aussi, Céline Pina: Transidentité: les recommandations délirantes de la HAS

C’est beaucoup de monde et quand même aussi beaucoup d’argent. Cela pour  des travaux ou élucubrations d’une « rigueur scientifique » éminemment discutable. Plus que discutable, inexistante, outragée, foulée aux pieds. Il est évident que, avec cette préconisation, nous sommes à des années-lumière des règles les plus élémentaires de la méthode scientifique. Celle-ci exige avant toute publication, toute recommandation, toute mise en pratique, que les effets – tous les effets, à court, moyen et long termes – aient été observés, mesurés, interprétés. Dans le cas d’espèce, il n’en serait rien bien entendu. Les conséquences du tripatouillage hormonal infligé à un adolescent aujourd’hui ne pourraient être connues, évaluées qu’après des années et des années d’observation et de mesures des modifications physiologiques, mentales, psychiques entraînées. Un temps long qu’on peut vraisemblablement évaluer à une génération. Précipiter la mise en pratique et prôner la généralisation comme le fait la HAS n’a donc radicalement rien à voir avec la rigueur scientifique. C’est tout au contraire le diktat d’une rigueur toute idéologique, et seulement idéologique, qu’elle entend imposer au pays. Bref, l’obscurantisme wokiste dans toute son horreur. Horreur, est bien le mot. Car nous n’ignorons pas à quelles heures très sombres de notre histoire nous renvoient de telles aventures de pseudo science, de telles expérimentations aveugles, démentielles, inhumaines autant que contre nature… En fait, si une intervention chirurgicale salutaire et urgente s’impose, c’est bien l’ablation de cette excroissance maligne de l’État qu’est la HAS. Disparaître serait en effet ce qui lui resterait à faire de mieux dans le cadre de sa mission : « œuvrer au bénéfice des personnes ». 

LES TÊTES MOLLES - HONTE ET RUINE DE LA FRANCE

Price: 14,77 €

5 used & new available from 10,78 €


[1] https://www.lefigaro.fr/actualite-france/la-haute-autorite-de-sante-veut-un-acces-gratuit-a-la-transition-de-genre-pour-tous-a-partir-de-16-ans-20241212

Le clan des Marocains

0
© D. R.

Lors de sa visite au Maroc en octobre, le président Macron a soigneusement évité la question du trafic de drogue en faisant ses salamalecs à Mohammed VI…


Multiplication des points de vente, dealers promus narcotrafiquants, clients plus fidèles : la France est devenue un hypermarché de la drogue. L’État traque les trafiquants et accuse les consommateurs. En revanche, aucune condamnation officielle des pays producteurs, pourtant à l’origine du fléau, car sans matière première pas d’effets secondaires.

Le Maroc est ainsi le premier producteur mondial de cannabis, culture intensive soi-disant destinée et réservée à des fins thérapeutiques, mais l’alibi médical est un écran de fumée. Le 19 août, le ministère marocain de la Justice a annoncé que le roi « a bien voulu accorder sa grâce à 4 831 personnes condamnées, poursuivies ou recherchées dans des affaires liées à la culture du cannabis. »

Le Maroc est également une plaque tournante de tous les trafics, comme l’a exposé en mai dernier (dans l’hebdo marocain Telquel) Abderrahim Habib, responsable de la division de lutte contre la criminalité transnationale à la direction centrale de la police judiciaire du royaume chérifien : « Le Maroc est au carrefour des routes des trafics de drogues de tous types. L’héroïne venant d’Asie transite par ici avant d’être acheminée vers l’Europe. Les drogues de synthèse, comme l’ecstasy, font le chemin inverse et nous viennent d’Europe. Il y a aussi la cocaïne, qui provient directement d’Amérique latine ou via l’Afrique de l’Ouest. »

Quant à la Mocro Maffia, organisation criminelle qui depuis les Pays-Bas empoisonne toute l’UE (un ponte de cette mafia a été interpellé le 8 octobre à Paris par le GIGN), elle trouve ses racines au Maroc, comme la mafia américaine prend les siennes en Sicile.

En voyage trop diplomatique au Maroc fin octobre, le président Macron aurait pu et dû aborder le sujet avec Sa Majesté le roi Mohammed VI (comme en 1969 le président américain Richard Nixon l’avait fait avec le président Pompidou, à l’époque de la « French Connection », quand l’héro raffinée à Marseille inondait le marché américain). Mais les deux chefs d’État ont enterré le hasch de guerre et fumé le calumet de la paix. Macron est revenu avec 10 milliards de contrats pour nos grandes entreprises, mais il a épargné la « Maroc Connection ».

La famille blanche géante de Greg Lindberg

0
DR.

Un milliardaire américain est accusé d’être l’auteur d’un étrange « projet eugéniste » afin de construire une famille racialement pure.


C’est une enquête troublante publiée par Bloomberg et qui interroge les États-Unis. Greg Lindberg, 54 ans, est un magnat qui a fait fortune dans les assurances. Il est accusé d’avoir mis en place un « projet eugéniste » digne d’un scénario de science-fiction. Ce milliardaire aurait manipulé plusieurs femmes pour qu’elles lui fournissent des ovules et renoncent à leurs droits parentaux en échange d’un chèque d’un million de dollars, avec un objectif précis : fonder une immense famille exclusivement blanche.

Manipulations et pressions psychologiques

C’est le témoignage d’Anya, native du Kazakhstan, une des nombreuses femmes impliquées dans ce projet, qui a attiré l’attention du média américain. La seule à avoir accepté de parler aux journalistes. On découvre qu’elle serait la mère biologique d’un garçon de cinq ans qu’elle n’a pas vu depuis sa naissance. Selon elle, le « self-made man » lui aurait mis une pression intense afin qu’elle signe un contrat qui ne lui autorise plus à voir sa progéniture, une fois celle-ci conçue.

Toujours d’après Bloomberg, Greg Lindberg aurait eu cette idée de créer une famille géante après avoir vécu un divorce difficile qui lui ayant fait perdre la garde de ses trois enfants.

Un stratagème inquiétant

Grâce à un réseau d’avocats et à des cliniques spécialisées en fécondation in vitro (FIV), Greg Lindberg aurait réussi à contourner toute surveillance de l’industrie de la fertilité, sous-régulée aux États-Unis.  Le milliardaire aurait même fait appel à un vaste réseau de mères porteuses pour donner vie à ses ambitions qui ne sont pas sans rappeler celles des nazis sous le Troisième Reich. Que des femmes de type caucasien, blondes, de taille mannequin et aux yeux d’une clarté absolue ! Deux de ses assistantes auraient pris part à ce plan, l’une d’elles ayant même porté un de ses enfants.

A lire aussi, Olivier Annichini: Le clan des Marocains

Greg Lindberg serait aujourd’hui le père de 12 enfants issus de cette manipulation génétique, encore loin du nombre de 50 que cet admirateur d’Elon Musk se serait fixé comme objectif à atteindre. « Chaque enfant qui naît est un vote futur pour ce pays. Je suis d’accord avec Elon Musk, l’extinction de la population à cause d’un taux de natalité trop faible représente un risque bien plus élevé que le réchauffement climatique », explique-t-il d’ailleurs avec fierté.

Un séjour probable en prison

Pour autant, ce n’est pas par le biais de son projet que Greg Lindberg pourrait retourner une nouvelle fois derrière les barreaux d’une prison sécurisée. Déjà condamné dans le cadre d’une affaire de corruption, ultérieurement annulée pour vice de procédure, il a récemment plaidé coupable dans une nouvelle affaire de fraude et de blanchiment d’argent portant sur 2 milliards de dollars. Quid de ses héritiers en bas âge ? La justice devrait certainement les séparer et les placer dans des centres, le temps qu’il effectue sa peine.

Si les pratiques de Greg Lindberg profitent d’un cadre juridique flou, elles posent néanmoins un problème moral évident : celui de l’instrumentalisation des femmes et des enfants à des fins obsessionnelles. Ces révélations relancent le débat sur la régulation de la procréation assistée en Amérique. On n’ose imaginer un monde dans lequel de telles pratiques se multiplieraient.

Lyrique: Don Carlo de Verdi, à l’Opéra de Vienne. La lecture décapante de Kirill Serebrennikov

0
Don Carlo de Verdi. Direction : Philippe Jordan. Mise en scène : Kirill Serebrennikov Image: Capture arte.tv

Le public viennois n’est pas de tout repos. Dans la captation du Don Carlo de Verdi que diffuse à bon escient Arte Concert[1] jusqu’à l’avant-veille du Jour de l’An, les huées ne couvrent pas la marée des applaudissements… mais on entend quand même bien meugler le comité d’accueil ! À l’évidence, ces braillements mammifères ne s’adressent qu’à la mise en scène de Kirill Serebrennikov, nullement aux chanteurs. Non plus qu’à l’inégalable orchestre maison, sous l’attentive battue de Philippe Jordan, dont c’est la dernière saison au pays de Mozart… Mais c’est qu’à Vienne, on ne rigole pas avec la tradition. Celle-ci en prend un sacré coup dans la relecture contemporaine, sciemment corrélée au conflit russo-ukrainien, qu’en fait le natif de Rostov-sur-le-Don désormais exilé à Berlin.  

Don Carlos (à l’Espagnole, avec s), ou Don Carlo (à l’Italienne, sans s) ? Car il y a bien des versions de ce drame tiré d’une pièce de Schiller, composé à partir de 1865 par un Verdi alors en contrat avec l’Opéra de Paris (le Palais Garnier est en construction), sur un livret concocté par un poète, Joseph Méry (lequel mourra cette année-là) et terminé par Camille du Locle, le gendre du patron de la maison, un dénommé Perrin. La tradition du « grand opéra » à la française, en ce XIXème siècle où le public parisien prise les machines opératiques spectaculaires, exige que l’œuvre soit chantée en langue française, avec ballet obligatoire au milieu des cinq actes. En 1866 éclate en Italie une guerre qui oppose l’Autriche à la Prusse pour le contrôle de la Vénétie ; un traité entérine finalement l’annexion de la région par l’Autriche. Le député Verdi, politiquement engagé dans l’unification de la péninsule et très préoccupé par la situation, tentera sans succès d’annuler le contrat qui le lie à Paris…

Autant dire que le contexte politique local trouve un écho puissant dans Don Carlo : l’intrigue, située au milieu du XVIème siècle, oppose le roi Philippe II, descendant de Charles Quint, à l’infant Don Carlos, promis à la princesse Elisabeth de Valois venue de Fontainebleau et dont il tombe amoureux, mais que son père veuf décide d’épouser à la place de son fils. Rodrigue, marquis de Posa, ami de cœur de Carlos, rentre quant à lui des Pays-Bas, sous occupation espagnole comme l’on sait, et supplie ce dernier d’intervenir auprès du roi pour la cause flamande. Ce qu’il fait. Mis en confiance, Philippe l’invite à surveiller son fils dont il soupçonne d’être son rival en amour, et lui conseille de se méfier du Grand Inquisiteur. La princesse Eboli, suivante d’Elisabeth, secrètement amoureuse de Carlos mais ayant commis avec Philippe l’adultère dont elle cherchera à accuser la reine, se verra ultérieurement piégée par celle-ci, et aussitôt bannie, dans des péripéties improbables dont on vous passe ici le détail. Carlos, s’opposant au supplice des hérétiques par l’Inquisition, semble à son tour trahi par Rodrigue qui, cédant au souverain intraitable et mal-aimé (cf. l’aria sublime « Elle ne m’aime pas… ») se charge de l’arrêter au nom du tyran néanmoins tourmenté à l’idée de devoir condamner à mort son propre enfant. Rodrigue sera finalement assassiné ; Carlos obtient le gouvernement des Flandres mais au moment des adieux surgit le roi, qui ordonne au Grand Inquisiteur de le sacrifier au tribunal du sang. C’est alors qu’apparaît le fantôme de Charles Quint…

A lire aussi, du même auteur: Edouard Limonov, ou la vie comme rhapsodie

Amours contrariées, raison d’Etat, oppression du pouvoir despotique et de l’autorité ecclésiastique, guerre d’occupation… Chef d’œuvre absolu de la maturité verdienne, la partition de Don Carlos est une pure merveille d’orchestration, dans une homogénéité d’écriture qui préfigure les chefs d’œuvre que seront encore, quelques années plus tard, Aïda en 1871 puis Otello en 1887. L’hiver 1882-1883 (rappelons au passage que Wagner meurt le 13 février 1883), Verdi entreprend de réviser son Don Carlos, en le ramenant à quatre actes, quitte à couper certains airs, en particulier au début de l’opéra. Mais en réalité, il n’y a pas UNE version française, Don Carlos d’une part ; et UNE version italienne baptisée Don Carlo (sans s) d’autre part. Tout comme Macbeth (1847) et Simon Boccanegra (1857) auront été également révisé, sur le tard, par un compositeur toujours soucieux d’étoffer son matériau musical pour plus d’intensité, de continuum dramatique, d’expérimentation dans l’orchestration et la mélodie, cet opéra agence, selon les occurrences où il fut donné, de Paris à Naples ou Milan, et ce jusqu’à aujourd’hui, des passages originaux ou remaniés, avec ou sans ballet, dans une forme d’hybridation jamais définitive. Le Don Carlo (sans s) donné en 1998 à l’Opéra-Bastille dans la mise en scène de Graham Vick reprise ensuite à maintes reprises, était par exemple chanté en italien. Tandis que l’Opéra de Paris programme à présent, pour mars/avril 2025, la reprise d’un Don Carlossss…. en cinq actes, dans la version originelle de 1867, chanté en français, donc (mise en scène signée Krysztof Warilowski millésimée 2017, et déjà reprise en 2019/2020).      

Ces digressions pour en revenir à Kirill Serebrennikov. C’est donc un Don Carlo en langue italienne qui est proposé au Staatoper de Vienne : la version la plus complète, dite « milanaise », celle de 1884. Sous les auspices de l’opposant déclaré à Poutine avait déjà fait jaser dans la capitale autrichienne, en 2021, sa mise en scène d’un Parsifal concentrationnaire (entreprise depuis la résidence surveillée où le réalisateur de Leto, de La Femme de Tchaïkovski et tout récemment du film Limonov la ballade était alors assigné à Moscou)…

Cette fois, pour Don Carlo, L’Escurial de Philippe II devient un Institut des Costumes high teck, où sont conservés en chambre froide les précieuses vêtures anciennes de la monarchie ibérique, exhumées de leurs cartons pour habiller les doubles ancestraux, comme réincarnés en chair et en os, des protagonistes transportés au XXIème siècle. Transposition tout à fait transparente qui imprime à l’intrigue une lecture politique clairement adossée au conflit russo-ukrainien : Rodrigue et Carlos enfilant des tee-shirts griffés LIBERTA en lettres capitales,  comparses portant pancartes ou bannières marqués « Il tempo stringe » (le temps presse), « Non tardare » ou « Salva nuesto solo », tandis que des cartels projetés en fond de plateau renvoient, dûment illustrés par la reproduction en vignette de leurs portraits officiels, aux authentiques figures historiques dont s’inspire la tragédie de Schiller et, partant, son adaptation lyrique… Quant aux protagonistes de l’opéra verdien, on les voit troquer sur le plateau leurs habits de 2024 contre les « patrons » de couleur noire, cousus de simples fils blancs, des costumes d’époque en cours de confection par le tailleur. Comme si Carlos, Elisabeth et Posa ne figuraient jamais que la réincarnation d’un combat sans âge contre l’oppresseur.  

Au-delà de cette lecture en somme très cohérente avec le livret, la partition est portée, dans cette nouvelle production autrichienne, par un casting, disons-le, superlativement virtuose, à commencer par Joshua Guerrero dans le rôle-titre, le baryton Etienne Dupuis en marquis de Posa, la mezzo suisse Eve-Maud Hubeaux extraordinaire en Eboli et surtout, la soprano lituanienne de 43 ans Asmik Grigorian, dont le timbre cuivré, rutilant, admirablement projeté imprime au rôle d’Elisabeth de Valois quelque chose qui tient du sublime. D’ailleurs, même à Vienne, au tomber de rideau, le public lui fait un triomphe. À vos écrans !    


Don Carlo. Opéra de Giuseppe Verdi. Avec Roberto Tagliavini, Joshua Guerrero, Etienne Dupuis, Dmitri Ulyanov, Asmik Grigoriam, Eve-Maud Hubeaux.
Direction : Philippe Jordan. Mise en scène : Kirill Serebrennikov. Orchestre de l’Opéra de Vienne.
Durée : 3h13
Captation visionnable en accès libre sur Arte Concert jusqu’au 28 décembre 2024


[1] https://www.arte.tv/fr/videos/120902-001-A/giuseppe-verdi-don-carlo/

L’Argentine à la tronçonneuse

0
Le président argentin Javier Milei sonne la cloche d'ouverture de la Bourse de New York (NYSE), 23 septembre 2024. Un geste fort pour marquer l'ouverture de l'Argentine aux marchés mondiaux © AP Photo/Seth Wenig/SIPA

Javier Milei a été élu à la tête de l’Argentine il y a un an. Ces douze derniers mois, l’ancien professeur d’économie a appliqué méthodiquement son programme ultra-libéral. Résultat : l’inflation s’est effondrée, les loyers ont baissé, la monnaie s’est renforcée et le budget est aujourd’hui excédentaire.


Gil Mihaely m’a demandé de faire le point sur un personnage singulier : le nouveau président argentin, Javier Milei, qui a fait campagne en exhibant une tronçonneuse partout où il allait. Par ce geste, il voulait symboliser son intention de nettoyer l’État argentin et de couper toutes les dépenses inutiles.

De quoi souffre ce pays béni des dieux ? Du fait que nos démocraties ont attrapé la vérole.

Nos démocraties représentatives sont en effet devenues des inaptocraties, où ceux qui sont incapables de gouverner sont élus par ceux qui ne veulent pas travailler, afin que les premiers organisent légalement la spoliation de ceux qui acceptent de travailler, au profit des passagers clandestins, les entretenant ainsi dans une oisiveté confortable.

Comme le disait Bastiat : « Quand le pillage devient un mode de vie pour un groupe d’hommes vivant ensemble en société, il se crée alors un système légal qui l’autorise et un code moral qui le glorifie. »

Un pays au fond du gouffre

L’Argentine, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a pratiqué avec constance ce type de gouvernement, passant ainsi de 1945 à 2023 du deuxième rang mondial en termes de niveau de vie à celui des pays les plus pauvres. C’est le pays non communiste qui a vu son niveau de vie régresser le plus au monde en soixante-dix ans, une période durant laquelle nous avons connu une forte croissance mondiale. Rien de quoi être fier.

En 2023, l’Argentine était véritablement au fond du gouffre : l’inflation atteignait 25 % par mois, la monnaie s’effondrait face au dollar (passant en quelques mois de 200 à 1 000 pesos pour un dollar), le pays était en faillite après avoir fait défaut sur des prêts du FMI, octroyés sur ordre de Mme Lagarde, alors présidente du Fonds. Pour compléter ce tableau lugubre, les réserves de change avaient fondu, la balance commerciale enregistrait mois après mois des déficits croissants, et enfin, les déficits budgétaires faisaient pâlir d’envie les inspecteurs des finances français. En résumé, les subventions que les inaptocrates versaient aux paresseux ne couvraient même plus le prix du ticket de métro pour aller les toucher.

C’est dans ce contexte que se sont déroulées les élections, et que le peuple argentin a finalement compris qu’il était temps de changer. C’est à ce moment que Javier Milei et sa tronçonneuse sont apparus. À la surprise générale, il a été élu avec 55 % des voix. Voici ce qu’il a fait une fois en fonction : il a commencé par annoncer des coupes budgétaires de 20 milliards de dollars (soit 5 % du PIB, l’équivalent de 75 milliards d’euros chez nous), avec des réductions de subventions pour les transports publics, l’électricité, le gaz et l’eau. Ensuite, il a procédé à une série de dérégulations par décret présidentiel, avec 300 mesures et 664 articles visant à déréguler le commerce, les services et l’industrie.

À lire aussi, Charles Gave: Abolissons les banques centrales !

Une opération de sauvetage : la loi « omnibus »

Le 27 décembre, cinq semaines après sa victoire électorale, Javier Milei a présenté le projet de loi « omnibus » visant à privatiser des entreprises publiques, dont la grande société pétrolière YPF. Cela a conduit à d’importantes manifestations fin janvier, organisées par les syndicats. Le gouvernement a répondu en menaçant de suspendre les allocations des manifestants et en indiquant qu’il ferait payer aux syndicats les frais de maintien de l’ordre. Cependant, il convient de noter que peu de violences policières ont été observées. Cela montre que l’idée selon laquelle un gouvernement libéral serait forcément très répressif est, dans ce cas précis, erronée.

Sans surprise, Le Monde, Le Monde diplomatique, Télérama, toutes nos chaînes de télévision et les intellectuels français admis à s’exprimer dans les médias ont hurlé que les Argentins allaient tous mourir de faim… Pourquoi sans surprise ? Parce que j’ai déjà vu ce film je ne sais combien de fois… Je l’ai vu avec Margaret Thatcher et la lettre signée en 1981 par 300 économistes britanniques expliquant que sa politique allait mener à la fin de la Grande-Bretagne, au moment même où les marchés financiers atteignaient leur plus bas. Je l’ai vu au Canada, quand le Premier ministre a décidé de réduire tous les budgets ministériels de 20 % d’un seul coup. Les économistes locaux étaient unanimes à prédire une dépression, l’effondrement de la monnaie et du niveau de vie. Non seulement le Canada n’a pas connu de récession immédiatement après, mais il n’y en a pas eu pendant plus de dix ans, et en fin de mandat, Jean Chrétien a baissé les impôts de plus de 100 milliards de dollars (canadiens…).

Enfin, je l’ai vu aux États-Unis, quand Reagan, fraîchement élu, a supprimé les contrôles des prix sur le pétrole, instaurés par Carter. Le prix à la pompe s’est effondré…

… Et tout se passe comme prévu

En réalité, comme le dit le professeur Raoult, les sociétés humaines peuvent être fondées sur la compétence ou sur l’obéissance. Et les organisations fondées sur l’obéissance cherchent toujours à détruire celles fondées sur la compétence. Comme Raymond Boudon l’a dit en réponse à la question « Pourquoi les intellectuels français n’aiment-ils pas le libéralisme ? » : « Parce que, dans un régime libéral, ils seraient payés à leur vraie valeur. »

En Argentine, tout se passe donc comme prévu, c’est-à-dire à l’inverse de ce que prédisaient les intellectuels et économistes universitaires. Après un peu plus d’un an au pouvoir, l’inflation mensuelle est tombée de 25 % à 4 %, le budget est excédentaire, ainsi que les comptes courants. Les loyers ont baissé grâce à l’augmentation de l’offre locative (conséquence de la fin des réglementations visant à protéger les locataires), la monnaie s’est renforcée (de 1 000 à 850 pesos pour un dollar), la bourse est au plus haut, et la popularité de Milei est telle qu’il peut espérer que son parti devienne majoritaire à l’été 2025. Seule ombre au tableau : la pauvreté aurait augmenté, mais tout porte à croire que cela ne durera pas. Pour expliquer cette prévision, je citerai Milton Friedman, autre maître à penser de Milei : « Si vous payez les gens à ne rien faire et si vous taxez ceux qui travaillent, il ne faut pas s’étonner que le chômage augmente. » Le chômage va donc baisser en Argentine, et avec lui, la pauvreté, puisque Javier Milei a décidé de ne plus payer les gens à ne rien faire.

Syrie: le nouveau casse-tête d’Israël

0
Véhicule blindé israélien franchissant la barrière de sécurité près de la ligne dite Alpha, qui sépare le plateau du Golan contrôlé par Israël de la Syrie, dans la ville de Majdal Shams, 12 décembre 2024 © Matias Delacroix/AP/SIPA

Après la chute et la fuite de Bachar Al-Assad, Israël a investi la zone de séparation avec la Syrie sur le plateau du Golan. Qu’y font ses militaires, et qu’y ont-ils trouvé?


Vendredi dernier, les postes d’observation de l’armée israélienne dans le Golan ont repéré des mouvements inhabituels parmi les soldats de l’armée syrienne stationnés à quelques centaines de mètres plus à l’est, au-delà de la zone démilitarisée séparant les deux frontières, connue sous les appellations de « ligne Alpha » (côté israélien) et« ligne Bravo » (côté syrien). Cette zone, située sur le plateau du Golan, est placée sous la supervision militaire de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (UNDOF) et bénéficie d’une administration civile syrienne.

La zone tampon, on s’en tamponne depuis longtemps

Dans le cadre de l’accord de désengagement signé en 1974, deux zones de réduction des forces militaires ont été définies de part et d’autre de cette zone tampon, chacune d’environ dix kilomètres de large. Dans la première zone, chaque partie est autorisée à déployer jusqu’à 75 chars et 6 000 soldats, tandis que dans la deuxième zone, il est permis de positionner jusqu’à 450 chars. En outre, il a été strictement convenu qu’aucun missile sol-air ne serait positionné à moins de 25 kilomètres des lignes de séparation, afin de prévenir toute escalade militaire. Pour Israël, cependant, cet équilibre fragile, garantissant une sécurité relative dans cette région sensible, a cessé d’exister à partir du moment où Bachar el-Assad a perdu le contrôle effectif de certaines parties de la Syrie, transférant de facto ses pouvoirs à des acteurs multiples, inconnus et imprévisibles, dont les intentions demeurent incertaines. Ce vide de pouvoir a ajouté une dimension d’instabilité supplémentaire, rendant les engagements passés de plus en plus difficiles à maintenir sur le terrain.

Les militaires syriens, stationnés dans des postes avancés répartis dans la région, ont été observés en train de quitter leurs positions face à la progression des rebelles syriens. Consciente de l’urgence de la situation, l’armée israélienne a donné l’ordre à la division 210 (« Bashan », la division territoriale relevant du Commandement Nord, chargée de la surveillance et de la défense de la frontière avec la Syrie) d’agir rapidement. Le commandant de la division, le brigadier général Yaïr Péli, connaît parfaitement la région. Il habite encore le village où il est né, situé en plein milieu du plateau du Golan, à 5 km de la frontière syrienne. Péli a effectué l’essentiel de son service militaire au sein du régiment Golani (en hébreu « du Golan »), l’unité d’infanterie par excellence du Commandement Nord. En moins de 24 heures, les forces israéliennes se sont déplacées vers l’est, ont franchi la barrière frontalière et pris le contrôle de larges zones stratégiques dans la zone tampon.

Actuellement, quatre groupements tactiques (équipes de combat interarmées) opèrent dans la zone tampon sous la direction de la division. Ces équipes comprennent des forces issues de la brigade des parachutistes, de l’unité Yahalom (spécialisée dans le déminage et la guerre souterraine), des brigades blindées 188 et 7, des forces spéciales, des unités du génie et des équipes de renseignement et de reconnaissance. Cette mission vise à établir une défense proactive dans la zone tampon, à éliminer les menaces à la frontière et, surtout, à empêcher d’autres éléments armés de s’emparer des positions syriennes et de s’y maintenir.

A lire aussi, Aurélien Bernheim: La « solution à deux États », tarte à la crème diplomatique

L’un des groupements principaux, celui de la brigade territoriale 474, continue de tenir des positions clés dans la zone. Lors des patrouilles, les forces ont découvert et confisqué plusieurs chars syriens laissés à l’abandon. Pendant ce temps, d’autres unités mènent des opérations complémentaires. Par exemple, les forces de la brigade de montagne 810 et les combattants de l’unité Shaldag, une unité d’élite de l’armée de l’Air, ont récemment terminé une opération sur le mont Hermon, dans la partie syrienne de la zone tampon. Cette mission a conduit à la saisie d’un poste militaire syrien situé au sommet le plus élevé de la montagne, offrant un champ de vue (de radar et d’écoute) ininterrompu sur le Liban et la Syrie, jusqu’à Damas.

L’une des priorités de Tsahal dans cette opération était le contrôle d’un poste syrien situé sur la colline de Tel Qudna. Ce point offre une vue dominante sur de vastes portions du plateau du Golan israélien. Pendant la guerre civile, des échanges de tirs avaient déjà eu lieu entre les forces israéliennes et syriennes dans cette région. Les parachutistes ont été déployés pour sécuriser ce poste, déjà abandonné par les soldats syriens. Sur place, les forces israéliennes ont trouvé des équipements militaires dont une partie était orientée vers l’ouest, en direction d’Israël, tandis que d’autres visaient l’est, indiquant une préparation en vue de l’arrivée des rebelles.

Les soldats israéliens ont découvert les postes abandonnés dans un état de délabrement avancé. Ces installations rudimentaires étaient dépourvues d’électricité et d’eau. Les soldats syriens semblaient y allumer des feux pour se réchauffer – l’hiver il neige et il fait très froid sur le plateau battu par les vents.

Occupation temporaire

Malgré l’urgence et les incertitudes, Israël insiste sur le caractère temporaire de cette occupation. Les forces sur le terrain ont reçu pour consigne de ne pas intervenir dans les conflits internes syriens, sauf si ces derniers menacent directement les soldats ou les localités israéliens.

Un journaliste d’Haaretz qui a accompagné les forces israéliennes dans la zone démilitarisée, témoigne de la surprise des forces israéliennes face à l’état déplorable des infrastructures militaires syriennes et la faible résistance des soldats syriens, qui semblent avoir abandonné leurs positions en toute hâte. Cette découverte a remis en question les scénarios de menace anticipés par Tsahal concernant l’armée syrienne. Contrairement à des groupes comme le Hamas ou le Hezbollah, qui disposent de forces bien organisées et bien équipées, l’armée syrienne s’est révélée particulièrement faible dans cette région. Pendant des décennies, des générations de militaires israéliens se préparaient à prendre ces positions construites et défendues selon la doctrine soviétique. Ces mythiques « pitas syriens » méritent un petit détour.

Tout commence par le choix d’une colline (d’où leur nom en hébreu « pita », probablement dérivé du mot français « piton »), point névralgique du dispositif. Au sommet de la colline, sont construits les bâtiments principaux : des logements pour les soldats, des installations logistiques et des centres de commandement. Autour de la colline, des tranchées sont creusées pour former un premier cercle défensif. Ces tranchées, parfois profondes et larges, servent à protéger les soldats des tirs ennemis tout en leur offrant des points de tir sécurisés. Plus le poste est important, plus ce réseau de tranchées s’étend. Parallèlement, des talus de terre sont élevés pour offrir une dissimulation supplémentaire contre les tirs d’artillerie et les frappes aériennes.

Dans ces tranchées sont aménagées des positions spécifiques en béton : des postes pour tireurs d’élite, des positions pour mitrailleuses protégées par des abris supérieurs permettant un feu d’enfilade, des postes d’observation et, surtout, des emplacements pour missiles antichars. Ces dernières positions sont particulièrement distinctives, car elles sont ouvertes à l’arrière pour permettre l’évacuation des gaz produits lors du lancement.

A lire aussi, du même auteur: Atoun, rebelle mais pas trop

Au-dessus des tranchées, une route circulaire est souvent aménagée. Elle est dissimulée par un talus qui protège les mouvements des véhicules blindés des regards ennemis. Cette route est essentielle pour les manœuvres de chars, qui peuvent se déplacer rapidement autour du poste, répondre à une attaque depuis plusieurs directions ou se replier vers des positions défensives.

Les positions des chars le long de cette route sont soigneusement étudiées. Une configuration particulièrement ingénieuse, appelée « rampe de police », permet au char de rester caché jusqu’à ce qu’il atteigne un point de tir idéal. En montant une rampe inclinée, le canon du char est orienté vers l’extérieur à travers une ouverture discrète. Une fois au sommet de la rampe, le char peut tirer tout en restant partiellement dissimulé, avant de redescendre et de se repositionner derrière le talus.

Pour compléter ces dispositifs mobiles, des « chars enterrés » sont parfois installés autour du poste. Ces chars, immobilisés et enfouis dans le sol, ont leur canon orienté vers l’extérieur, prêt à tirer sur une menace. Ce système, bien que fixe, permet d’accroître la puissance de feu et d’assurer une défense continue, même si les blindés mobiles doivent se déplacer pour répondre à une attaque ailleurs. Jadis considérés comme des obstacles redoutables, ces « pita » ont été laissés à l’abandon bien avant la chute du régime, témoignant d’un long processus de déliquescence de l’armée de terre d’Assad et de la marginalisation de ce front dans les priorités du régime depuis le déclenchement de la guerre civile. Pendant la dernière décennie, le Golan a davantage intéressé le Hezbollah et l’Iran que le gouvernement syrien.

Jusqu’à l’offensive des rebelles, la frontière était relativement calme, maintenue avec un minimum de forces israéliennes. Désormais, la Syrie est devenue la principale zone d’opération pour Tsahal. Cependant, aujourd’hui, contrairement à la guerre civile de 2011, aucun signe de fumée ou d’explosion n’est visible sur le plateau. Dans le Golan, les activistes encore présents semblent eux aussi désorientés face à la situation et à son évolution. En tout cas, ils se préparent davantage à des dangers venant de l’intérieur qu’à des menaces venant du voisin à l’ouest. Bien que l’objectif israélien soit de maintenir une présence tactique temporaire, la durée de cette opération reste incertaine. Pour l’instant, Tsahal poursuit le renforcement de ses positions dans la zone tampon, tout en maintenant une vigilance renforcée face aux évolutions rapides et imprévisibles de la situation dans cette région stratégique. La décision de déclarer caduc l’Accord de désengagement signé entre Israël et la Syrie le 31 mai 1974, est lourde de conséquences. Surtout, elle traduit la grande méfiance israélienne vis-à-vis les forces qui ont détrôné les Assad. L’ombre de la surprise du 7-Octobre plane encore lourdement sur les forces déployées sur le terrain ainsi que sur les décideurs à Jérusalem.

Anastasia Colosimo: plus couillue que ses délateurs

0
Anastasia Colosimo, au palais de l'Elysée, à Paris, 14 mai 2024 © Jacques Witt/SIPA

La conseillère de Macron, fille de l’éditeur bien connu Jean-François Colosimo, se voit reprocher des propos vulgaires. Des journaux sérieux vont jusqu’à l’accuser d’outrage sexiste et de menaces. Les journalistes sont décidément des êtres bien sensibles…


Au cœur d’une actualité internationale surchargée, certains médias ont réussi à trouver le temps de s’intéresser au langage fleuri de la « conseillère presse internationale » d’Emmanuel Macron.

Ils ont même littéralement inventé un « Colosimogate », pour quelques tournures de phrase légèrement grossières tenues dans un contexte privé. Un petit bout de femme à lunettes rondes à double foyer est devenu, en un instant, le symbole d’une macronie arrogante et déconnectée, voire des méthodes fascistes que l’Élysée emploierait contre d’humbles et toujours courtois journalistes.

http://twitter.com/ELevyCauseur/status/1863970594728948085

Une histoire sans queue ni tête

Des messages dégradants et méchants, constituant un harcèlement caractérisé, ont depuis visé Anastasia Colosimo sur les réseaux sociaux. L’essayiste qui aurait dit, oh malheur, avoir envisagé de voter pour Marine Le Pen en 2017, travaille depuis janvier 2023 avec Emmanuel Macron. Âgée de 34 ans, elle est chargée de traduire les positions de l’Élysée sur les grands enjeux internationaux, enjeux ô combien nombreux. Une tâche peu évidente tant ces questions font l’objet d’une constante désinformation mais aussi de multiples incompréhensions. De quoi susciter quelques inimitiés, et quelques disputes, assurément. Normal. Mais, la profession de journaliste compte de nombreuses petites natures que les méthodes de Mademoiselle Colosimo « choquent ».

A lire aussi: Le wokisme n’existe pas. Enfin, ça dépend des jours…

Comme souvent dans ce genre d’histoires complaisamment relayées par les médias, nous sommes sûrement face à un cas de rivalité personnelle. Un petit peu comme si un conflit entre collègues de bureau vous concernant faisait la une des actualités ! Mademoiselle serait « sexiste » et « menaçante ». Elle aurait notamment dit à un journaliste : « Tu dois avoir une grosse queue d’homme courageux, j’aimerais bien la voir, la sentir, la toucher ». Le pauvre, sûrement traumatisé par cette réplique, s’est empressé de rapporter tout ça au Nouvel Obs. Répondre directement et en personne à l’essayiste au service du président de la République ? Cela demandait vraisemblablement trop de caractère. Au point qu’on doute maintenant de la taille de la queue que l’infortuné cache finalement dans son pantalon… De nos jours, il est apparemment devenu impossible de se défendre soi-même d’une attaque – même verbale. Nous sommes tellement lyophilisés, que la moindre offense ne peut se régler que par des plaintes devant le tribunal médiatique, des fuites savamment orchestrées sur les réseaux sociaux ou des jérémiades à la direction des ressources humaines.

Culture du viol

Quant au contexte exact dans lequel ces phrases ont été prononcées, nous n’en saurons évidemment rien. Il a été décrété que tout cela était totalement gratuit et à prendre au premier degré. Car, comme le rapporte Le Nouvel Obs, le père de cette machiste en jupons est Jean-François Colosimo, lequel est « lui-même connu pour ses intérêts rapprochés avec le journal Valeurs Actuelles ». Brrr… On se demande bien ce que peut signifier cette culpabilité par association. Les journalistes de gauche auraient-ils un mur des cons dans leur salon, sur lequel ils lancent des fléchettes ?

A lire aussi, Arnaud Benedetti: Qui a peur de Boualem Sansal?

Personnellement, si tout ce qu’on en dit est vrai, je la trouve plutôt marrante, cette Anastasia Colosimo. Qu’une fille de son âge puisse balancer à un prêtre du catéchisme cathodique « Tu fais de la merde et tu pisses autour » a son petit fumet séduisant de bar PMU des années 80. On l’imagine nerveuse, façon petite dure en tailleur noir un peu froissé, s’emportant après les chroniqueurs de BFM TV un pastis à la main. Que la communicante nous secoue tous ces fourbes, ça ne peut pas leur faire de mal ! Les Français n’en peuvent plus des faux self, des discours lisses et des hypocrites. Qui adopte toujours un comportement parfaitement approprié dans un cadre privé et / ou professionnel ? Qui ne lâche jamais un « connard » à un enquiquineur ? Toute personne saine et normalement constituée devrait toujours préférer une franche insulte en face-à-face à des calomnies dans le dos. Un peu de vérité, un peu de drôlerie voire un peu de vulgarité ne fait pas de mal. De plus, admettez qu’Anastasia Colosimo fait tout cela avec une certaine inventivité ! 

Dans le journal Le Monde, on apprenait aussi récemment qu’Emmanuel Macron aime chantonner du Michel Sardou dans les couloirs de l’Élysée. De quoi faire dire à Edwy Plenel que le président de la République serait nostalgique du « bon temps des colonies » et défenseur de la culture du viol, puisqu’il est bien connu que le narrateur des Villes de Solitude se confond avec l’interprète Sardou. Alexis Corbière, qui comme Le Nouvel Obs ou Le Monde se situe à gauche de l’échiquier politique, et qui adore le chanteur, a dû être heureux d’apprendre qu’il défendait le droit au viol !

La Syrie pour les Nuls

0
Un rebelle utilise un chargeur de fusil d'assaut pour détruire une photo de l'ancien président Bachar al-Assad le 9 décembre 2024 au poste frontière syro-libanais près de Jdaidit Yabws, en Syrie © Daniel Carde/ZUMA Press Wire/Shutterstock (14994973k)

Syrie. Israël a joué un rôle clé en affaiblissant l’Iran et le Hezbollah par ses frappes ciblées, contribuant ainsi indirectement à l’effondrement du projet d’axe chiite et au succès des islamistes.


La chute d’Assad a entrainé un torrent de commentaires. Nouvelle malchance pour Emmanuel Macron, elle a rejeté dans l’ombre le haut fait de sa présidence, à savoir le pari réussi de la reconstruction de Notre-Dame. 

Les noms de ceux qui sont aujourd’hui les maitres d’une Syrie où régnait depuis 54 ans une dynastie impitoyable, protégée par deux régimes qui font peur, la Russie et l’Iran, étaient inconnus il y a quinze jours. Ils se sont emparés d’un couloir stratégique fait de quatre grandes villes du nord au sud dont l’existence remonte à la nuit des temps, Alep, Hama, Homs et Damas, qui ont été le centre de l’empire omeyyade et les bastions de l’islam contre les croisés. 

Révolution arabe en retard

En août 2012, Obama avait déclaré que l’utilisation d’armes chimiques par la Syrie constituerait une «ligne rouge» à ne pas franchir. Un an plus tard, alors qu’une attaque aux gaz neurotoxiques avait fait des milliers de victimes, le même Obama préféra un «deal» naïf, moralement et politiquement désastreux, à une opération militaire, et accepta une proposition de Poutine qui marquait le retour russe au Moyen-Orient. La Syrie s’engageait à liquider ses stocks d’armes chimiques. Inutile de préciser qu’elle ne l’a pas fait, et il faut saluer l’opération aérienne israélienne actuelle de destruction de ces stocks.

Les experts ne donnaient pas cher à Assad quand la guerre civile a commencé dans l’été 2011, alors qu’étaient renversés ses collègues Ben Ali, Moubarak et Kadhafi en Tunisie, Egypte et Libye. Ils se sont trompés et ils n’ont pas non plus prévu l’écroulement actuel du régime. 

Assad fut soutenu massivement par l’Iran, puis, depuis 2015 par la Russie, qui prétendait lutter contre un terrorisme soutenu par les occidentaux,  mélangeant à dessein les opposants modérés à Assad et les milices islamistes radicales. 

Cette guerre a été terrible, 500 000 morts, encore plus de blessés et mutilés. En combinant les 7 millions de réfugiés et les 7 millions de déplacés internes, plus de la moitié des Syriens se sont enfuis, vingt fois plus que les réfugiés palestiniens de 1948. Depuis près de 10 ans, les réfugiés syriens en Turquie donnent à Erdogan un levier de chantage sur l’Europe, qu’il a utilisé magistralement.

La poche d’Idlib

Le régime de Bachar ne contrôlait pas tout le territoire syrien. Au nord-ouest, jouxtant la frontière et sous protection turque, c’était la poche d’Idlib d’où sont partis les insurgés. Sa population avait triplé lors de la guerre civile et atteignait 4 millions de personnes, deux fois plus d’habitants qu’à Gaza, mais sur une superficie 10 fois supérieure. Les troupes syriennes, malgré l’aide russe, n’étaient pas parvenues à prendre cette poche. Entre les parrains turc et russe, un «gentlemen’s agreement» avait été signé en 2018 car Erdogan était trop utile à Poutine pour qu’il laisse éclater une vraie guerre. La passivité actuelle de la Russie vient aussi de ce choix de préserver ses relations avec la Turquie.

Le mouvement HTS (Hayat Tahrir al-Cham, HTS ou HTC suivant qu’on transcrit le mot Sham «Syrie» avec un S ou un C) qui contrôle Idlib, et aujourd’hui la Syrie, est qualifié de terroriste non seulement par les États-Unis, mais par la Turquie qui le soutient par ailleurs, continuel double jeu de Erdogan. On dit que le financement du HTS provient en grande partie du Qatar….

Le chef de HTS depuis sa création il y a douze ans sous le nom d’al Nosra, est Abou Mohamed al-Joulani, fils d’une famille de la bourgeoisie syrienne, qui coche toutes les cases du djihadisme: prison d’Abu Ghraib, allégeance au sanguinaire Abu Moussab al Zarqawi, puis à Abu Bakr al-Baghdadi, le chef de Daech, puis à Ayman al Zawahiri, successeur de Ben Laden à al-Qaida, mais depuis plusieurs années, il semble bien avoir rompu avec ces mouvements qui prônent le djihad global. Il dit vouloir se concentrer sur la situation en Syrie. Dans ce cas, il lui reste fort à faire, car peu de pays sont dans un état économiquement et humainement aussi catastrophique.

À lire aussi, Gil Mihaely: Atoun, rebelle mais pas trop

Le gouvernement du Rojava

Parmi les organisations coopérant avec HTS, il y a l’Armée nationale Syrienne, un nom trompeur pour des milices entièrement à la solde de la Turquie. Elles seront le fer de lance d’une offensive probable contre les Kurdes qui occupent un grand territoire au Nord Est de la Syrie, qu’ils appellent le Rojava. Là se trouvent le pétrole syrien et les prisons où sont détenus les djihadistes de Daech. L’Union démocratique, le parti kurde modéré qui y prédomine est considérée par Erdogan comme un faux nez du PKK, son ennemi juré.

Les Kurdes ont été les meilleurs alliés de l’Occident dans la lutte contre Daech et les Américains ont gardé 900 soldats dans la région, ainsi que, tout près en Jordanie et à la frontière irakienne, la Tour 22, une importante base militaire.

Le 10 décembre, HTS a repris aux troupes de Bashar, Deir el Zohr, la grande ville de l’Est syrien, et vient ainsi au contact des Kurdes. Un face-à-face avec les Américains alors qu’il a fait reculer les Russes ne peut que faire plaisir à Erdogan. Il est possible, probable même, que les Américains refuseront l’affrontement et que les jours de l’autonomie kurde au Rojava sont comptés.

Le massif des Alaouites

Provenant des montagnes à l’ouest du pays, les Alaouites forment 10% de la population syrienne, les Assad en font partie.

C’est une secte ésotérique historiquement méprisée par l’islam sunnite. Leur vénération pour Ali, gendre du Prophète, mais surtout, l’intérêt d’une alliance avec Hafez el-Assad, ennemi acharné de l’Irakien Saddam Hussein, avec qui Khomeini était en guerre, avait poussé ce dernier à proclamer opportunément dans une fatwa que les Alaouites faisaient partie du chiisme duodécimain, celui de l’Iran. 

L’excellence des relations des sunnites du Hamas avec l’Iran et le régime Assad ne se transpose pas aux fondamentalistes sunnites syriens. Ceux-ci gardent la mémoire du massacre de Hama en 1982 perpétré par Hafez el-Assad contre les Frères Musulmans. Pour Joulani, les Alaouites sont des hérétiques, même s’il déclare ne pas vouloir s’en prendre à eux. Quant aux Iraniens, le saccage de leur ambassade dit l’hostilité populaire.  Le lien syrien entre l’Iran et le Hezbollah est donc rompu et il est à prévoir que des règlements de compte auront lieu à Téhéran à la suite de l’anéantissement du grand projet d’axe chiite.

À lire aussi, Gil Mihaely: Armée d’Assad: la déroute de Damas

Quelques remarques

Aujourd’hui, des témoignages indiquant que la charia n’est pas appliquée à Idlib avec rigueur s’ajoutent aux déclarations apaisantes de Joulani et alimentent les espoirs des optimistes. Les pessimistes rappellent les illusions sur l’arrivée de «Talibans modérés» à Kaboul et les plus anciens se souviennent des déclarations sur la liberté qu’allait apporter l’ayatollah Khomeini au peuple iranien. 

Aujourd’hui aussi, il y a unanimité en France sur l’horreur du règne des Assad. Mais dans le passé, les complaisances furent nombreuses et ne se limitent certainement pas à Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon. Quant à l’ONU, suivant UN Watch, l’Assemblée Générale a voté depuis 2015 156 résolutions contre Israël et 11 contre la Syrie. Assad a été réélu en 2021 avec 95% des voix et ce truquage, finalement internationalement banal, n’a entrainé  aucune sanction.

Bachar al-Assad a été un mauvais dictateur qui avait la cruauté, mais pas l’intuition du rapport de forces. Laissant son armée en déshérence, il s’est reposé sur ses protecteurs, qu’il s’est de plus parfois mis à dos. La Russie ne lui a offert qu’un asile «humanitaire». Comme elle veut préserver sa base navale de Tartous, la seule en Méditerranée, et sa base aérienne de Hmeimim, près de Lattaquié, elle a vite accepté le changement de drapeau sur l’Ambassade de Syrie à Moscou.

Enfin, chacun comprend que l’évaporation du Hezbollah et des forces iraniennes a été provoquée par les coups qu’Israël leur a portés, facteur majeur et paradoxal du succès des islamistes. Ceux-ci sont désormais à la frontière d’un Golan d’où est issu leur chef, car Joulani signifie en dialecte syrien, l’homme du Golan. Mais pour Israël, cette proximité est gérable et tout ce qui affaiblit l’Iran est bon à prendre…

Pour Boualem Sansal

0
Boualem Sansal © Hannah Assouline

« La gauche n’aime pas la liberté ! » se désole notre directrice de la rédaction au micro de Sud Radio


Boualem Sansal reste en prison. La Cour d’Appel d’Alger a rejeté son appel hier. En son absence, et en l’absence de son avocat français, interdit d’entrer en Algérie. Depuis le 16 novembre, un écrivain français est détenu par la justice algérienne, poursuivi pour « atteinte à l’unité nationale » et « complot contre la sûreté de l’État ». Il risque la perpétuité. Personne n’a eu de contact avec lui sinon ses avocats algériens commis d’office.
Ses crimes: des écrits, des propos et son irrévérence assumée et joyeuse envers l’islam et envers le régime algérien. Je connais peu d’hommes aussi libres.
Il est otage de la crise franco-algérienne. Son arrestation est un bras d’honneur des Algériens après le tournant marocain et notre reconnaissance du Sahara oriental. Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris (sous tutelle directe d’Alger depuis 1982), longtemps présenté comme un modéré, n’a pas eu un mot pour son collègue de l’Académie des sciences d’outre-mer. Et tous les réseaux algériens en France répètent les éléments de langage du régime de façon assez dégoutante.
La France officielle s’agite en sous-main, mais semble tétanisée. Pas de vagues. Ne les énervons pas. Pour l’instant, cette stratégie de l’hyper-prudence et du silence s’est avérée inefficace. Sommes-nous capables d’utiliser nos moyens de pressions réels : visas, traité de 1968, comptes de la nomenklatura algérienne ?

À lire aussi, Arnaud Benedetti: Qui a peur de Boualem Sansal?

Pour Arnaud Benedetti, directeur de la Revue Politique et Parlementaire, qui organise une soirée de soutien lundi à Paris, le plus grand danger est l’ensevelissement dans l’indifférence. Il y a pire que l’oubli : certains, toute honte bue, en profitent pour cracher sur l’écrivain. Comme Sandrine Rousseau, au micro de Sud Radio, il y a deux jours.

C’était le pompon de l’abjection. J’ai bondi quand je l’ai entendue. Sansal n’a pas à être en prison MAIS ses positions relèvent de l’extrême droite et du suprémacisme, nous a-t-elle dit. Selon la députée, il dirait qu’une civilisation est supérieure à une autre. Cela prouve qu’elle n’a jamais lu une ligne de lui et récite sa leçon. Elle aurait certainement dit aussi que Soljenitsyne était trop anticommuniste et Salman Rushdie islamophobe. Son tweet a d’ailleurs été publié par TSA, un des médias aux ordres du gouvernement algérien – à sa place j’aurais honte. Commentaire : vous voyez bien, cet écrivain d’extrême droite ne fait pas l’unanimité en France.
Je vois là une faillite morale de presque toute la gauche. Un écrivain est accusé de crime-pensée comme on dit dans 1984, emprisonné parce qu’il est libre et ose défier un pouvoir prédateur et dictatorial, et c’est le silence radio chez LFI et les Ecolos. Au PS, c’est service minimum à quelques voix près (M. Guedj, M. Delafosse, Mme Delga). Nos personnalités politiques de toute la vieille gauche sont doublement gênées : un peu complaisantes avec la dictature algérienne par repentance coloniale, et aussi un peu complaisantes avec l’islam politique par ailleurs. C’est exactement comme après Charlie. C’est pas bien de tuer des journalistes, MAIS ils n’auraient pas dû… Je vois là-dedans de la lâcheté, du cynisme et surtout, une haine sidérante de la liberté. Cette gauche a déjà le déshonneur, j’espère que les Français lui infligeront vite la défaite qu’elle mérite.

Comite.soutien.boualem.sansal@gmail.com
16 décembre à 20 h, 4 boulevard de Strasbourg, Paris


Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Sud Radio