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Rico et Baron: un bœuf dans les nuages

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Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…


Voilà ce que c’est quand on est romancier ou nouvelliste. On fait vivre ou revivre des personnages, des amis, des méconnus obscurs ou célèbres, puis ils meurent. C’est affreux ; on est triste ; on mélancolise comme un Blondin sans verre ou comme un Kléber Haedens sans sa Caroline. C’est ce qui m’est arrivé avant Noël. Ce n’est guère original, comme beaucoup, je suis triste à cette période de l’année. Je me suis mis à repenser à Michel L., un copain d’école (collège Joliot-Curie, Tergnier, dans l’Aisne), puis de bals (il était un brillant accordéoniste et chanteur ; je m’esquintais les doigts sur ma guitare Elli Sound, copie Gibson SG à cornes de zébu). Cela se passait dans les années soixante-dix. Michel et moi – qui rêvions de rock’n’roll, de Keith Richards, de Brian Jones, d’Al Wilson, de Bob Hite, de Nick Drake et de quelques autres – étions devenus musiciens de bal afin d’acheter nos instruments et d’arrondir nos fins de mois pour dépenser nos francs en buvant des bières Stella ou Porter chez Berto ou au Rimbaud, cafés de Fargniers (Aisne). Les années passèrent ; il devint CRS, quitta la compagnie, puis chemina, erra peut-être. Je devins journaliste dans la presse rock et à L’Aisne Nouvelle. En 1994, lorsque j’appris sa mort, emporté par l’excès de Gauloises sans filtre, tout me revint dans la tronche. J’avais commencé à écrire des bouquins. Il me fallait laisser une trace de ce garçon épatant, généreux, au rire cristallin de peintre italien.

J’écrivis en trois mois Des petits bals sans importance ; Dominique Gaultier et le Dilettante eurent l’amabilité de le publier ; Sempé nous donna une couverture sublime, avec, en fond de l’œuvre, cette affiche qui signifiait qu’il avait tout compris : « Grand bal avec Georges Pouni et ses rythmes. 13-14 juillet, salle Boudot. » Notre orchestre, les Karl Steevens, de Gibercourt, dans l’Aisne (qui sont devenus les Franklin, frères jumeaux, batteur et organiste ?), je le transformais en Hans Eder ; Michel se transforma en Rico. François Angelier rédigea, comme à son habitude, un prière d’insérer doux et sensible : « Rico est là, sous la dalle, mort. Sa binette de gitan dégaine encore un sourire grinçant dans l’ovale sépia qui orne sa tombe. » Sa tombe, j’ai voulu la revoir, avant Noël dernier. J’ai pris ma Twingo et invité ma sauvageonne, mon amoureuse à me suivre ; direction le cimetière de Beautor (Aisne, celle des ALB – Aciérie Laminoirs de Beautor – où Rico travailla, peu avant sa mort). Il faisait froid, humide, presque nuit. Rico était là, sous la dalle. Toujours son sourire ; je me suis mis à lui parler pour que rien ne meure, pour que rien ne s’oublie de toutes ces années mortes ; ces années de cendre et de bière. Ma sauvageonne me regardait.

Il y a quelques jours, Joël C., un saxophoniste-flûtiste d’Eppeville (Somme) avec qui j’avais joué dans son groupe de free-jazz, Koït, à la fin des seventies, passa à son tour à l’Orient éternel des musiciens. Joël, avec ses sandwiches au camembert avec lesquels il empestait tout le lycée Henri-Martin de Saint-Quentin ; Joël, manière d’avant-gardiste à la tête d’Indien, qui découvrait tout avant tout le monde (la musique brésilienne, Soft Machine, etc.), en tout cas avant nous les apprentis musiciens du café des Halles, chez Odette, à Saint-Quentin. Je l’avais baptisé Baron dans mes romans La promesse des navires (Flammarion, 1998) et Les Ombres des Mohicans (Le Rocher, 2023). Dans ce dernier, il faisait de la mobylette bleue comme Brian, le héros de l’histoire. Je vous salue, Rico et Baron ; vous allez vous retrouver, sortir les instruments et faire un bœuf magnifique dans les nuages. Faites chauffer mon ampli Bandmaster Fender ; je ne vais tarder à vous rejoindre.

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Flacons et déraison

Dry January. Quand les débats sur l’addiction assimilent le vin aux drogues dures, c’est toute une culture française qui se voit remise en question par un puritanisme croissant


Ces temps-ci, les télévisions et radios ne sont pas avares de débats sur le thème de l’addiction. J’ai assisté à quatre de ceux-là en seulement quelques jours (sur BFM, RTL, France 2 et Slate). Chaque fois, après avoir ciblé la drogue proprement dite, la mise en accusation dérive sur l’alcool, le vin en particulier, qui, au prix d’un amalgame assez surprenant, se trouve de ce fait placé sur le même plan que le haschich, la coke ou l’héroïne. Curieuse association, en réalité.

Bien sûr, il n’est nullement question ici de nier les ravages que l’abus répété d’alcool peut générer. Il s’agit seulement de relever quelques fortes différences malheureusement passées sous silence dans les débats que j’ai suivis. Première différence, l’addiction aux drogues repose sur un délit, la circulation, le commerce et la consommation de ces substances étant illégaux. Interdit juridique qui ne frappe pas – du moins pas encore – le beaujolais ou le bas armagnac. Deuxième distinction, et de taille, l’argent mis dans la dose de came alimente un circuit qui n’a absolument rien à voir avec la paisible, la débonnaire filière vinicole française.Les éventuels différends entre vignerons d’Alsace ou d’ailleurs se règlent rarement, en effet, à la kalachnikov, et les contrats passés portent davantage, à ma connaissance, sur le volume d’hectos que sur la tête du concurrent.

Enfin, et peut-être surtout, l’amalgame évoqué évacue volontairement la puissante empreinte culturelle, civilisationnelle que portent chez nous le vin et ses dérivés. « Le vin est senti par la nation française comme un bien qui lui est propre, écrit Roland Barthes lui-même dans Mythologies. C’est une boisson-totem. » Et donc à appréhender comme telle. L’assimiler sans nuances à des saloperies d’importation criminelle revient donc à s’en prendre à une part non négligeable de notre culture. Mais peut-être bien est-ce là l’arrière-pensée de ces puritains de plateau si enclins à fourrer leur nez dans nos flacons ?

Justin Trudeau: « Ch’tu un fighter »

En v.f., « je suis un bagarreur ».


Tout « fighter » fût-il, le gouverneur démissionnaire du 51e Etat est la première cible atteinte par Donald Trump (lequel reprend le pouvoir le 20 janvier). Dans la foulée, il a fait proroger jusqu’au 24 mars prochain le parlement canadien (qui « a besoin d’un reset, de se calmer le pompon » [sic], a-t-il ajouté avec sa légendaire éloquence bilingue), afin de laisser au parti libéral du Canada un peu de temps pour choisir un successeur.

De toute manière, il était plus que temps. Depuis des années, le Canada est la risée de la communauté internationale, et voir à sa tête pendant neuf ans un guignol qui n’avait pour bagage politique qu’un nom de famille et une expérience de professeur d’art dramatique (en anglais, bien sûr), d’instructeur de surf des neiges, et de roi du déguisement carnavalesque n’a rien arrangé. « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » est un programme un peu mince, surtout quand on affecte des fonds publics à la création du poste de « représentante spéciale du Canada dans la lutte contre l’islamophobie », dont la titulaire est la propagandiste Amira Elghawaby, contemptrice éprouvée du Québec, surtout laïque.

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Rendons quand même hommage à celui qui a fait de son État le deuxième pays au monde à légaliser le cannabis.

Qui sera donc le prochain proconsul provisoire du Canada? (L’opposition a promis de faire tomber le gouvernement dès la reprise des travaux parlementaires). 

Dommage que la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, passe son tour : cette blondinette sait terroriser du regard les politiciens chinois. Quant à Marc Carney, ex-gouverneur de la banque du Canada et de la banque d’Angleterre, c’est sur une chaîne de télévision… américaine qu’il vient de lancer sa campagne. Il a pour rivale Chrystia Freeland, ex-vice Première ministre et petite-fille de collabo ukrainien.

La route semble donc sans obstacle pour Pierre Poilièvre, chef du parti conservateur du Canada, une version édulcorée de Donald Trump. D’ailleurs, au Canada, État artificiel aux frontières coloniales, tout est comme aux États-Unis, mais en plus « light ».

Roger Scruton ne plaît pas qu’à Viktor Orban…

Inspirant des figures comme Viktor Orban ou Giorgia Meloni, Roger Scruton prouvait que le conservatisme bien dosé n’est pas une idéologie rigide, mais un antidote élégant à toutes les idéologies. Il disparaissait il y a cinq ans.


Tous ceux qui s’intéressent au libéralisme et à la philosophie politique ont lu Roger Scruton ou du moins ont entendu parler de lui. Disparu il y a cinq ans à la suite d’un cancer fulgurant, sa pensée irrigue toutefois de plus en plus les réflexions et les orientations des pouvoirs, et pas seulement ceux qui seraient naturellement accordés avec elle. Sa grande force, me semble-t-il, est de privilégier une sorte de provocation de la mesure, d’élaborer une théorie argumentée du bon sens contre tous les progressismes qui n’ont pour ambition que de battre en brèche ce qui a duré et réussi.

Le conservatisme, antidote à l’idéologie

Eugénie Bastié (Champs Libres dans Le Figaro) ne pouvait pas manquer de se pencher sur cette personnalité singulière ayant su résister à l’air du temps au bénéfice de l’universel de la raison. Ses axes fondamentaux : « critique du multiculturalisme, défenseur de la nation et de la tradition contre l’orgueil de la déconstruction… » sont d’une actualité brûlante et fournissent un exceptionnel vivier aux adeptes d’une vision conservatrice aussi éloignée de la stagnation que des humeurs systématiquement régressives.

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J’apprécie tout particulièrement ce qu’a rappelé Viktor Orban en remettant à Roger Scruton la plus haute distinction hongroise le 3 décembre 2019 : « Comme nous l’avons appris de notre bien-aimé professeur, le conservatisme est tout sauf une idéologie : c’est l’antidote à l’idéologie ». En effet, on entend trop souvent des idéologues de gauche la réplique facile que le libéralisme, l’approche conservatrice, seraient également une idéologie et pâtiraient des mêmes vices que ceux qu’on leur impute.

Il me semble que l’objection décisive qui doit contredire cette tentative de confusion est que l’idéologie, par mission et par principe, est vouée à fuir la réalité en se réfugiant dans l’abstraction des concepts partisans quand le conservatisme s’honore de ne s’appuyer que sur le réel, pour éventuellement en dénoncer les ombres afin de les changer, pour en valider les lumières et donc les sauvegarder.

Amour du foyer

Le même Premier ministre hongrois, louant l’aide apportée par Roger Scruton à la lutte contre le communisme, lui rendait hommage pour n’avoir pas été dupe des dangers des sociétés « ouvertes », constat qu’apparemment l’Union européenne qui ne cesse de cibler le gouvernement hongrois ne partage pas, partant du principe qu’il est toujours facile d’être naïf et généreux sur le dos des peuples.

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Selon Eugénie Bastié, la notion centrale de la pensée de Roger Scruton est l’oikophilie, soit l’amour du foyer. On comprend bien comment à partir de ce concept à la fois humain et civilisationnel, ce grand penseur politique a pu développer des variations essentielles sur la vie en société, l’immigration, les risques du multiculturalisme et les relations internationales. Il est intéressant de noter, sur le plan de la forme, comme l’expression de Roger Scruton s’attache à répudier toute outrance, à publier ses idées et, selon lui, ses évidences, en les présentant tout simplement, par un développement limpide et quasiment irréfutable, comme héritées du réel.

Je compare à la manière dont Jean-Marie Le Pen avait usé de la même argumentation en soulignant qu’il convenait d’abord de s’occuper du prochain plus que du lointain mais son style, son oralité mettaient de l’âpreté là où Roger Scruton nous convainc doucement.

J’ai évoqué à plusieurs reprises Viktor Orban mais une démonstration encore plus éclatante de l’influence bénéfique du philosophe politique Roger Scruton est à faire : il a inspiré à l’évidence François-Xavier Bellamy mais surtout aujourd’hui il guide Giorgia Meloni et Bruno Retailleau. Dans des genres différents, en Italie et en France, deux personnalités – une femme de pouvoir, un ministre exemplaire – qui sortent du lot ! Merci, Roger Scruton !

12 milliardaires en colère

Pour exercer son deuxième mandat, le président élu Donald Trump va s’entourer d’une équipe d’hommes et de femmes fortunés. Si ses détracteurs dénoncent dans ce casting une oligarchie, on ne peut pas s’empêcher de penser que l’indépendance financière de ces nouveaux responsables politiques est, peut-être, la dernière chance des États-Unis de résister au rouleau compresseur du wokisme tout-puissant.


Les États-Unis n’ont jamais porté Karl Marx dans leur cœur. Alors que les écrits du philosophe allemand ont révolutionné la pensée politique sur le continent européen et bien au-delà, l’Amérique a tout fait pour barrer les idées de la lutte des classes et de l’égalité sociale. Pendant de longues années le « Manifeste du parti communiste » a été censuré sur le territoire américain et quasiment interdit durant la période du maccarthysme. Cependant, un siècle et demi après la naissance du marxisme, pendant que la gauche progressiste européenne est devenue, à l’image de LFI de Jean-Luc Mélenchon, un grand corps malade, la droite américaine fait sa révolution. Cette fois-ci, ce sont les forces conservatrices incarnées par des personnalités très riches qui portent, aux yeux de la majorité écrasante des citoyens américains, le message de liberté politique, de bon sens social et de prospérité économique.1

L’image de Donald Trump sur la tribune d’un meeting électoral, poing levé, visage en sang après une tentative échouée de son assassinat restera un symbole puissant de cette révolte : transcrite par le résultat des urnes lors des dernières élections présidentielles avec le vote de 312 grands électeurs (contre 226 pour sa rivale du parti démocrate, Kamala Harris). C’est d’ailleurs, après cette soirée bouleversante du 13 juillet 2024 en Pennsylvanie, qu’Elon Musk, l’homme le plus riche de la planète, a apporté publiquement son soutien au candidat républicain.

Musk, un milliardaire parmi les autres

Le ralliement de l’entrepreneur, lui-même objet des attaques du pouvoir californien, qui l’ont obligé de quitter la Silicon Valley pour le Texas, ne s’est pas seulement résumé pas la somme record de 277 millions de dollars2 pour financer la campagne de Trump. Le réseau social X dont il est propriétaire est devenu la tribune principale pour toutes les personnalités connues et inconnues du grand public, qui n’étaient pas d’accord avec la politique actuelle du gouvernement démocrate. Celle qui, selon eux, a amené leur pays à une crise migratoire sans précèdent, aux fractures sociales et culturelles provoquées par le wokisme inquisitorial et le monde entier quasiment au bord de la Troisième Guerre mondiale. Des évolutions dont les médias mainstream du pays tels le New York Times ou CNN auraient soigneusement ignoré la gravité, à les entendre. Ces derniers préférant porter toute leur attention sur les affaires judiciaires du candidat républicain…

Mais Elon Musk n’est pas l’unique milliardaire à se mettre au service du Donald Trump. Ils sont 12 à qui le 47ᵉ président des États-Unis a proposé un rôle important dans son administration, en signe de reconnaissance de leur précieux support durant sa campagne, mais sans doute également parce qu’il partage avec ces gens la même inquiétude pour le pays.  

Fin stratège, le nouveau locataire de la Maison Blanche a placé ses 12 acolytes pour couvrir pratiquement tous les domaines de la politique américaine. Pour Musk, le président élu a créé un nouveau département de l’efficacité gouvernementale, que le patron de Space X et de Tesla Motors va gérer avec un autre jeune magnat, l’étoile montante du paysage politique du pays Vivek Ramaswamy.  À 39 ans ce dernier a décidé d’abandonner son empire pharmaceutique pour d’abord se présenter aux primaires du Parti républicain en été 2023, avant de devenir l’allié inconditionnel de Trump, en mettant en avant sa formidable éloquence et la vision ‘anti-woke’ de l’Amérique.3

Deux hommes et une femme d’affaires devraient gérer les questions économiques : Scott Bessent comme secrétaire au Trésor, Howard Lutnick en tant que secrétaire au Commerce et Kelly Loeffler – chargée des petites et moyennes entreprises (Small business administration). Linda MacMahon qui, avec son mari a bâti la fortune de 3 milliards de dollars dans le divertissement, serait en tête de l’Éducation nationale et Frank Bisignano, le patron de la plus grande entreprise du FinTech américain Fiserv, prendrait la fonction de commissaire à l’administration de la Sécurité sociale. Pour le domaine régalien de la Défense, Jacob Isaacman, le magnat de l’industrie du paiement, s’apprête à piloter la NASA et Stephan Feinberg (Fonds d’Investissement) s’est vu proposer le poste de secrétaire-adjoint à la Défense. Enfin, le banquier Warren Stephens et le promoteur immobilier Charles Kushner ont été nommés les ambassadeurs des États-Unis respectivement en Grande-Bretagne et en France, pour donner un nouveau souffle à la politique américaine sur la scène internationale.4

La quête de liberté a changé de camp

La richesse cumulée de ces 12 personnalités s’élève à 360 milliards euros, ce qui est plus important que le budget de la France en 2024 (305,1M€). 240 ans après leur création, pour sortir d’une impasse existentielle, les États-Unis font appel aux forces qui incarnent le mieux le rêve américain depuis toujours : la réussite professionnelle accompagnée de la richesse matérielle. Les milliardaires américains sont, en effet, la dernière catégorie des citoyens qui, grâce à leur indépendance financière, peut encore résister à l’étrange agenda politique du parti démocrate. Qui, ivre de la victoire de l’Amérique dans la Guerre Froide s’est senti légitime à déconstruire les fondements millénaires de la civilisation occidentale s’appuyant sur les interdits moraux de la religion chrétienne et la puissance de la pensée libre, que cet ordre spirituel a créé en Europe.

Reste à voir comment la révolution des milliardaires américains va embarquer dans son élan les vieilles démocraties européennes. Quelques tweets de Musk en faveur du parti allemand l’AfD ont déjà bouleversé la dynamique des sondages sur l’intention des votes des électeurs allemands. Le parti classé à l’extrême droite a grimpé à la 2ᵉ place, avec le chiffre record de 22% des suffrages, talonnant ainsi les démocrates-chrétiens de CDU/CSU (30%) et dépassant déjà les sociaux-démocrates du chancelier actuel Olaf Scholz (16%).5 Le programme de l’AfD prévoit, entre autres, de faire sortir l’Allemagne de l’Union européenne, de lancer les déportations massives d’immigrés, de démolir les éoliennes et de réduire au minimum le support militaire à l’Ukraine. Une vision qui tranche radicalement avec les aspirations humanistes de la gauche historique, qu’ont façonné les modèles sociaux de pratiquement tous les pays du Vieux Contient. Oui, le temps de Karl Marx semble être définitivement révolu, même dans son propre pays…


  1. Marx censuré aux États-Unis, Wikipédia ↩︎
  2. Elon Musk investit 277 millions de dollars pour soutenir Trump et les candidats républicains, CBS News ↩︎
  3. 12 milliardaires, Bloomberg ↩︎
  4. Leurs rôles, The Hill  ↩︎
  5. « Remigration », sortie de l’UE… En Allemagne, l’extrême droite déroule son « plan d’avenir » avant les élections, BFM TV ↩︎

Saga Beigbeder

Avec Un homme seul (Grasset, 2025), Frédéric Beigbeder signe l’un de ses meilleurs livres, sinon le meilleur.


Il faut se méfier des enfants qui écrivent. Ils utilisent la nourriture familiale pour muscler leur univers romanesque. Les pères sont souvent sous le feu des projecteurs de nos jours. Ils n’ont pas forcément le beau rôle. L’époque déteste le virilisme et veut en découdre avec le patriarcat. Alors les écrivains, qui sont pour la plupart restés des enfants, car la littérature est le contraire de travailler comme le rappelle Georges Bataille, ouvrent les ordinateurs, fouillent dans les corbeilles, lisent les mails, scrutent l’historique des recherches sur internet, bref, se transforment en commissaire Maigret à la recherche de ce « misérable petit tas de secrets », pour reprendre la formule de Malraux, citée par Frédéric Beigbeder.

Ce père qu’il croyait détester

Disons-le d’entrée de jeu, Un homme seul est sûrement l’un des meilleurs livres de Beigbeder, sinon le meilleur. L’analyse y est pertinente et le style épuré ; la formule claque et l’émotion surgit là où le récit semblait froid comme le granit, surtout au moment d’atteindre les trop courts chapitres 30 et 31, c’est-à-dire de prendre congé de Jean-Michel Beigbeder (1938-2023), père de Frédéric. Il en fait un véritable personnage de roman, à situer à mi-chemin entre Roger Martin du Gard – totalement oublié aujourd’hui – et Ian Fleming : « C’était un Français qui s’est cru Américain alors qu’il était Anglais ». On avait vaguement entendu parler de cet homme à la forte corpulence qui, après de solides études de management à Harvard Business School, avait importé en France le métier de « chasseur de têtes » (executive search), « plaçant » tous les dirigeants du CAC 40 durant cinquante ans. Un homme sans foi, ni loi, en quelque sorte, utilisant des pratiques immorales dans un système réfutant toutes les valeurs suprêmes et les remplaçant par un seul mot d’ordre : faire du fric. Le très lettré – hypokhâgne, khâgne – et habile Jean-Michel n’hésitait pas à débaucher les personnes douées pour les intégrer dans des organigrammes de sociétés prestigieuses. Sa devise : « La guerre économique est la seule dont les déserteurs sont récompensés ». Pas de quoi rendre l’homme sympathique, malgré une trajectoire digne de L’homme pressé, roman électrique de Paul Morand, avec l’hypothèse probable d’avoir été un correspondant de la CIA, c’est-à-dire un « agent » agissant contre les intérêts de la France puisque les Américains ont toujours tenté de déstabiliser notre pays, notamment sous de Gaulle qui connaissait le sens du mot indépendance.

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Père brillant, jouisseur, égoïste, pour ne pas dire narcissique, indifférent surtout à ses deux fils, Charles et Frédéric. Celui qui fut jadis un beau jeune homme au regard ténébreux, cheveux bien coiffés, raie nette sur le côté, est mort totalement ruiné, seul, d’un cancer des voies biliaires, après un lent et irrémédiable délabrement physique dû à la maladie de Parkinson. La mort du vieil homme fut une délivrance. Le fils écrivain raconte : « Vers la fin, dans ma salle de bains de Guéthary, il m’a demandé de lui laver les cheveux. Il s’est mis torse nu, il avait perdu cinquante kilos et sa peau pendait sur son ventre comme de la guimauve dans une fête foraine. Pieds gonflés, sans chevilles. Seins en gants de toilette. Goître moucheté de taches de vieillesse. » L’écrivain ajoute : « Ne rigole pas, tu seras pareil, pauvre con. » Plus loin dans le récit, l’écrivain reconnait avoir été injuste avec lui dans ses livres précédents. « Je l’ai pris pour un salaud qui avait quitté ma mère alors que c’est elle qui l’a largué », confesse-t-il. Il dit encore : « Il n’a jamais réagi car il ne lisait pas mes livres : il les faisait lire à sa compagne, qui ‘’avait bien aimé’’. » Insupportable camouflet. Mais la mort a gommé la rancœur, et l’écrivain a décidé de mener l’enquête sur ce père pas si détestable que ça.

Infernal pensionnat

Françoise Sagan – que Beigbeder aime ; il ne cesse de citer son nom ; c’est bien qu’un écrivain de talent sauve d’un possible oubli un autre écrivain de talent – Sagan, donc, a écrit qu’à neuf ans, on a saisi l’essentiel de la vie. Tout est joué. Alors il convient de déjouer le système pour s’en jouer. Le cauchemar de Jean-Michel a commencé à huit ans, quand il fut mis en pension par ses parents. C’est l’incompréhensible abandon ; c’est l’entrée dans l’enfer des brimades, des coups, des humiliations, et peut-être pire… L’enfer porte un nom, Sorèze, un pensionnat catholique situé dans le Tarn. Incompréhensible, oui, quand on sait que les parents de Jean-Michel ont caché – et sauvé – une famille juive dans leur villa. Alors pourquoi avoir livré leur fils aux « kapos à chapelets » ? Frédéric Beigbeder écrit : « Quoi qu’il en soit, conditionné à la survie solitaire en milieu hostile, son caractère s’est fermé. Jean-Michel est devenu un humain claquemuré. » Son fils est parvenu à l’exfiltrer de cette forteresse invisible. L’écrivain possède des pouvoirs de démiurge. Ne les fréquentez qu’en cas de forte poussée sentimentale.

La fin est bouleversante, dégraissée de tout pathos. Frédéric l’appelle enfin « papa ». On comprend pourquoi quand il nous livre une anecdote que je vous laisse découvrir.

Frédéric Beigbeder avoue encore : « Au ciel, il ne sera plus jamais seul. Je suis heureux pour lui et triste pour moi parce qu’à partir de ce jour, l’homme seul, c’est moi. »

Jean-Michel repose sous une pierre rose de la Rhune, à Guéthary. Une tombe avec vue sur les flots fougueux. Comme Chateaubriand.

Frédéric Beigbeder, Un homme seul, Grasset. 224 pages.

Cessez-le-feu et libération des otages: le tweet problématique d’Emmanuel Macron

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Les soutiens habituels d’Israël ont critiqué le message du président français publié le soir de l’annonce de l’accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, y voyant une équivalence malvenue entre les souffrances des otages et celles des civils gazaouis. La « pensée complexe » présidentielle, louée par ses admirateurs, n’est peut-être pas adaptée à des messages si courts toujours sujets à interprétation…


Le tweet du président de la République sur un possible cessez-le-feu à Gaza a suscité des réactions vives, notamment en raison de l’absence d’une mention explicite du peuple israélien et du contexte même dans lequel il s’inscrit. Cet oubli, volontaire ou non, ne peut être détaché des conséquences tragiques des attaques terroristes du 7-Octobre, ni des enjeux fondamentaux de ce conflit.

Une ambiguïté choquante

« Après quinze mois de calvaire injustifiable, soulagement immense pour les Gazaouis, espoir pour les otages et leurs familles. Ce soir, mes pensées vont à Ofer et Ohad. L’accord doit être respecté. Les otages, libérés. Les Gazaouis, secourus. Une solution politique doit advenir » écrivait Emmanuel Macron le 15 janvier peu après 21 heures.

Ce message présidentiel, en mettant sur un même plan les victimes israéliennes et les conséquences de la guerre à Gaza, crée un amalgame dérangeant.

Il existe une différence fondamentale entre le pogrom sanglant du 7 octobre — une attaque préméditée contre des civils juifs, accompagnée d’enlèvements, de viols et d’assassinats — et les pertes civiles, bien que tragiques, causées par un conflit armé. En niant cette distinction, le tweet valide indirectement le discours des islamistes qui cherchent à minimiser ou justifier leurs crimes, tout en nourrissant une confusion morale inacceptable.

Le refus de reconnaître les otages juifs comme des esclaves, déshumanisés et captifs d’une barbarie assumée, renforce ce sentiment d’ambiguïté. Même le Hamas a reconnu que la population gazaouie elle-même détient une partie des otages, révélant un fanatisme enraciné et encouragé par des décennies de haine culturelle.

Une politique sans ligne claire

Ce type de communication trahit une incapacité à nommer clairement les responsabilités et à défendre les valeurs démocratiques face à l’islamisme totalitaire.

Où sont les actes forts ? Pourquoi ne pas condamner le terme de « génocide », infondé ici, ou affirmer que la guerre d’Israël contre le Hamas est légitime ? Pourquoi continuer à financer l’UNRWA ou tolérer sur le sol français des discours appelant à l’intifada et au djihad, au mépris des principes républicains ?

Une fracture intérieure

En France, chaque mot du président sur le conflit israélo-palestinien a des répercussions directes. La communauté juive, déjà fragilisée par des décennies d’antisémitisme et des tensions croissantes, mérite un soutien clair.

A lire aussi: Kibboutzim: ils auront leur haine

Mais ce tweet, en donnant des « gages » implicites à des narratifs islamistes, alimente les discours haineux et renforce un sentiment d’abandon.
Dans les rues de Paris, les appels à l’intifada et les manifestations pro-Hamas témoignent d’une radicalisation inquiétante que les dirigeants n’ont pas su endiguer.

Des réactions vives de nombreuses personnalités des médias et de la communauté juive

Suite aux propos présidentiels, les réactions ne se sont pas fait attendre. La journaliste Céline Pina a déclaré sur X (anciennement Twitter) : « Ce tweet est honteux : au nom de quoi l’évocation des otages doit-elle s’accompagner de gages donnés aux islamistes ? La mort de civils est malheureuse mais il y a une différence entre les horreurs d’un pogrom, la razzia d’esclaves et les cadavres volés qui s’ensuivent et les conséquences d’un bombardement ».  L’avocat Gilles-William Goldnadel a réagi sur son compte Instagram, avant de confirmer ses propos sur C News : « Le tweet d’Emmanuel Macron est tellement inqualifiable, que j’ai du mal à le qualifier. Car cela veut dire que pour les Gazaouis il y a un calvaire, mais pour les otages il n’y en n’a pas ». Du coté des réactions dans la communauté juive, celle du président du B’nai B’rith France, Philippe Meyer, résume le ressenti de beaucoup d’entre nous : « Message pour le moins ambiguë. On aurait aimé lire autre chose du président de la République, d’autres mots, dans un autre ordre. Le « en même-temps » ne justifie pas tout ».

La responsabilité des dirigeants

Les événements tragiques du 7-Octobre rappellent que les islamistes ne font aucune distinction : leur barbarie s’abat sur quiconque n’adhère pas à leur idéologie, comme les Juifs ce jour-là. Face à cette menace, la France se doit de tenir une ligne claire et de refuser tout relativisme.

Ce tweet présidentiel, en diluant la gravité des crimes contre l’humanité commis par le Hamas dans un discours généraliste et politicien, incarne l’impuissance des élites occidentales à affronter les totalitarismes modernes. Ce manque de courage moral pousse les citoyens à chercher refuge dans des figures populistes, bien que leurs solutions soient souvent tout aussi problématiques.

La France doit choisir : défendre Israël, démocratie imparfaite mais légitime, ou céder aux injonctions d’un fanatisme qui menace les valeurs mêmes de l’Occident. Il est temps pour le président de se tenir fermement aux côtés des victimes, de nommer sans détour les responsables, et de montrer que la République ne cédera pas face à l’islamisme ni à ses complices. Le futur de notre société et de nos enfants en dépend.

Causons! Le podcast hebdomadaire de Causeur

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Avec Céline Pina et Jeremy Stubbs.


Quelle est l’espérance de vie du gouvernement Bayrou? Quelles sont les stratégies adoptées par le Parti socialiste et le Rassemblement national? Bayrou peut-il sauver le soldat Macron?

Le Royaume Uni est toujours en butte au scandale des « grooming gangs », ces bandes de pédophiles composées d’hommes d’ascendance pakistanaise. Pendant des années, ces hommes ont pu agir avec un certain degré d’impunité. Aujourd’hui, certaines de leurs victimes attendent toujours que justice soit faite. Est-ce la fin du grand rêve multiculturel?

Elon Musk vs Thierry Breton: les médias ont choisi leur champion!

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Tandis que les médias de grands chemins s’inquiètent de la montée des opinions dissidentes et des changements dans le paysage numérique, l’Union européenne prépare de nouvelles mesures pour renforcer son contrôle sur les plateformes numériques au nom de la démocratie. Mais, tout ce petit monde ne disait rien quand des ingérences « progressistes » ou woke étaient constatées par le passé…


Elon Musk « promouvant l’extrême droite partout » et Mark Zuckerberg ayant décidé de se passer dorénavant des fact-checkers sur Facebook et Instagram, l’économiste Dominique Seux déclare le plus sérieusement du monde, sur France Inter : « Thierry Breton nous manque. » Le DSA (Digital Services Act) est la loi européenne sur les services numériques concoctée par M. Breton du temps où il était commissaire européen. Le but officiel de cette loi est de « réguler » les réseaux sociaux ainsi que les plateformes de partage de contenus (Youtube, Dailymotion…), d’empêcher les « propos haineux », la désinformation et la manipulation sur la toile et d’analyser les « risques systémiques qu’ils génèrent sur les processus électoraux » – voilà qui offre mille possibilités interprétatives pouvant aboutir à une censure à peine camouflée. Voire pire.


En partance pour Bank of America, Thierry Breton fait une dernière tournée des médias

Thierry Breton a malheureusement entendu Dominique Seux. Le voici de retour. En l’espace de trois jours, il a été l’invité exceptionnel de LCI, RMC, France 5, France Info (à 8h30, le 11 janvier) et France Culture (à 12H45, le même jour).

Les journalistes ont été très gentils avec lui, ne l’ont confronté à aucun contradicteur et l’ont laissé dérouler un discours archi-rodé sur le « peuple européen » sacrément bien représenté par un « Parlement européen » garant du « progrès européen », du « vivre-ensemble européen » et de la « démocratie européenne » – ces derniers seraient menacés par les vilains réseaux sociaux en général et celui du méchant Elon Musk en particulier. Sur RMC, M. Breton a déclaré que s’il était constaté des « interférences » lors des prochaines législatives allemandes, les résultats de celles-ci pourraient être remis en cause. « On l’a fait en Roumanie et il faudra le faire si c’est nécessaire en Allemagne », a-t-il menacé en faisant référence à l’annulation par la Cour constitutionnelle de Bucarest des dernières élections présidentielles roumaines au motif que le réseau social TikTok aurait été utilisé par des « éléments étrangers » pour manipuler l’opinion publique.   

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La liberté d’expression, c’est bien. Mais c’est mieux, pensent certains, quand le cadre en est strictement délimité par les milieux informationnels qui ne manquent ni de commissaires, ni de vérificateurs, ni d’argousins médiatiques. Pour Dominique Seux, Mark Zuckerberg est passé du côté obscur de la Force numérique. « Les “vérificateurs de faits” ont fait preuve de trop de partialité politique », affirme pourtant simplement le directeur général de Meta, avant d’ajouter : « Ce qui a commencé comme un mouvement inclusif a de plus en plus été utilisé pour bloquer les opinions et exclure les personnes ayant des idées différentes ». Cette censure a été ouvertement pratiquée sur les différents réseaux sociaux, Twitter du temps où Jack Dorsey en était le propriétaire, Instagram et Facebook du temps où les Démocrates américains étaient au pouvoir et Zuckerberg à leur service. Le rachat de Twitter par Elon Musk et le revirement de Zuckerberg changent radicalement la donne. Ce dernier affirmant vouloir « supprimer un tas de restrictions sur l’immigration et le genre », les commissaires politiques de la radio publique se gargarisent de grands mots : « C’est notre modèle de démocratie qui est attaqué », gribouille sur X le journaliste Julien Pain, fact-checker officiel de France Info, avant de… bloquer les commentaires des internautes se réjouissant de la décision de Zuckerberg.

Elon Musk, le George Soros de la droite

Les médias français et la Commission européenne se plaignent de l’ingérence d’Elon Musk dans des élections européennes. Soit. On ne les a pourtant guère entendus lorsque George Soros, le discret mais très efficace financeur de centaines d’ONG immigrationnistes et d’associations wokes via son Open Society Foundation, a arrosé de ses bontés sonnantes et trébuchantes la campagne des opposants au Brexit. Aucun murmure de réprobation n’est venu entacher non plus la vidéo de soutien à Emmanuel Macron, archi-diffusée sur les réseaux sociaux entre les deux tours de la présidentielle de 2017, de l’ancien président américain Barack Obama qui, quelques mois plus tard, se rendra à Londres pour soutenir, lui aussi, la campagne contre le Brexit. Pas un mot sur Bill Gates qui, par le biais de sa fondation « philanthropique », s’insinue dans les instances internationales qui décideront demain des politiques mondiales de santé et d’alimentation. Et que dire de l’incroyable et outrancière campagne politico-médiatique européenne contre Donald Trump lors des dernières élections présidentielles américaines ou du rouleau compresseur médiatique français qui, au nom du « front républicain », a écrabouillé la campagne des dernières élections législatives ?

Il est finalement assez réjouissant de voir les journalistes progressistes paniquer en se demandant ce qui arrive. Il arrive, sommes-nous obligés de leur dire, que les digues qu’ils ont construites pour empêcher la diffusion de la libre parole commencent de se fissurer. Oh ! pas beaucoup ; mais suffisamment pour les agacer, ce qui n’est déjà pas si mal. Ne nous leurrons pas : ces digues sont si épaisses, si régulièrement réparées et même renforcées par eux-mêmes et par l’oligarchie politique, qu’il sera difficile de les abattre totalement. Il n’empêche, quelques brèches apparaissent. Aussi modestes soient-elles, elles chiffonnent ces journalistes qui ont pris l’habitude de parader dans les studios, particulièrement dans ceux de l’audiovisuel public, entre eux, sûrs d’eux, dans le confort de l’uniformité politique, la connivence et la douceur de l’endoctrinement sans accroc, en suivant la ligne définie par l’idéologie gaucho-progressiste, ligne studieusement entretenue par les crayonneurs de l’AFP et du Monde, deux éminents propagateurs de la doxa.

La presse mainstream prête à encourager les mesures coercitives et censoriales

Leur conformisme n’a d’égal que leur paresse naturelle et leur mollesse intellectuelle au moment de livrer bataille – l’adversaire est qualifié trop rapidement de réactionnaire ou de fasciste pour que l’on puisse imaginer que, derrière cette invective, se cache une argumentation intelligente, laquelle a été remplacée par le catéchisme progressiste. Ils barbotent là-dedans depuis si longtemps que la moindre résistance les blesse douloureusement. Nerveux, irascibles, peu habitués à jouter honorablement, l’existence d’une extrême droite fantasmagorique leur sert, comme d’habitude, à tenter de briser la mutinerie, aussi minime soit-elle. Leurs compatriotes regimbent et se cabrent devant leurs leçons de morale usées jusqu’à la corde ? Ils s’enferrent, frénétiques, dans un discours daté qui impressionne de moins en moins les peuples subissant les effets délétères d’une politique européenne désastreuse. Exaspérés, ils voient finalement d’un bon œil les mesures coercitives et censoriales prévues par la Commission européenne pour briser les élans patriotes.     

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Vendredi 10 janvier. Une journée ordinaire sur la radio publique. Sur France Inter, Patrick Cohen tient absolument à « rediaboliser » le RN, parti toujours aussi « raciste et antisémite » que du temps du FN de feu Jean-Marie Le Pen, selon lui. Il évoque « des chaînes où le RN est désormais comme chez lui » en rabâchant la sempiternelle litanie de messages moraux invariables et paresseux sur « l’extrême droite ». Sur la radio publique, on peut quotidiennement vouer aux gémonies les millions de Français qui n’ont pas voté comme il faut sans que l’Arcom s’émeuve. Grand castor parmi les castors, M. Cohen dit ainsi espérer que le « front républicain » opérera encore et toujours lors de prochaines élections. Autant dire que les directives de l’UE pour castoriser, de gré ou de force, les prochaines élections en Europe, ne lui font pas peur. Le même jour, sur la même radio, Pierre Haski conseillera à la Commission européenne de réagir fermement face à « l’alliance Trump-Musk ». La veille, dans l’émission “Le téléphone sonne”, Fabienne Sintes, inquiète des décisions de Zuckerberg, se sera demandé si « l’Europe est assez forte pour faire barrage avant qu’on se prenne une potentielle avalanche de bouses » sur les réseaux sociaux. France Info n’est pas en reste : Aurélie Herbemont, chef adjointe du service politique de ladite radio, s’étonne qu’Elon Musk ait « remis sur le tapis une sordide affaire de pédo-criminalité impliquant des Pakistanais il y a 10 ans » au Royaume-Uni – mais ne s’étonne pas que cette effroyable affaire, qui a duré plus de trente ans sans que les autorités anglaises, par crainte d’être taxées de xénophobie et d’islamophobie, bougent le petit doigt, n’intéresse absolument pas nos militantes féministes de gauche si promptes habituellement à réagir au moindre regard concupiscent… 

« Nous allons nous débarrasser des vérifacteurs de faits et les remplacer par des notes communautaires similaires à X, en commençant avec les États-Unis », a déclaré le PDG de Meta, Mark Zuckerberg, dans une vidéo publiée le 7 janvier 2025 © Andre M Chang/ZUMA Press Wire/Shutterstock

La nomenklatura médiatique française n’a en réalité pas grand-chose à craindre. Les fact-checkers vont pouvoir continuer de fact-checker, c’est-à-dire d’orienter l’information. Clara Chappaz, notre actuelle ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du Numérique, affirme en effet sur X : « J’ai échangé avec la direction de Meta France ce soir qui m’assure que cette fonctionnalité ne sera déployée qu’aux États-Unis pour le moment. En Europe, le Digital Service Act sera respecté. Croyez en ma vigilance sur le sujet. » Le service de censure européen veille donc au grain. Selon Mme Chappaz, les dirigeants de Meta « ont bien compris qu’en France comme en Europe, la façon dont nous définissons la liberté d’expression est différente de la façon dont elle est définie aux États-Unis ». Ne reste plus qu’à savoir ce que l’UE entend par « liberté d’expression ». Le DSA européen se verra bientôt complété par de nouvelles mesures censées protéger la démocratie mais qui, en réalité, la dépouilleront de ses derniers oripeaux. Les « vérificateurs de faits » des médias de gauche vont pouvoir continuer de dissimuler le réel et d’occulter les difficultés des sociétés européennes confrontées à l’immigration massive, l’insécurité physique et culturelle, la précarité, au déclassement d’un continent que la technocratique UE a accéléré. L’inénarrable Thierry Breton vit apparemment dans un monde parallèle. Sur LCI, il ose affirmer que « les empires déclinants – la Grande-Bretagne, la Russie, la Turquie – s’attaquent tous à l’UE » parce qu’ils sont jalouxde« nos progrès » (sic), de « notre dynamique démocratique » (resic) et de « notre projet et notre vivre-ensemble » (etsic de der). L’Europe mythologique de M. Breton doit absolument éviter de se frotter au réel, raison pour laquelle l’ex-commissaire européen prévient les propriétaires des réseaux sociaux, Elon Musk en tête : l’UE a les moyens de les interdire s’ils ne respectent pas les règles établies par lui-même, Thierry Breton, ex-démolisseur d’entreprises (Thomson, France Telecom, Atos) et ex-mamamouchi de l’oligarchie bruxelloise.

Pour conclure sur une note plus légère, signalons que Sandrine Rousseau a envoyé une missive écrite avec le pied gauche, truffée de fautes d’orthographe et d’un pléonasme intéressant, à « tou.tes les député.es du NFP », pour les inviter à quitter le réseau social X « de manière collective ». Extraits : « Ce courrier pour vous inviter à ce que (sic) nous quittions/arrêtions (sic) de poster sur la plateforme. […] X est devenue (sic) une véritable machine désinformation (sic), une arme de destruction massive de la réalité factuelle (sic), et la caisse de résonnance (sic) des courant (sic) d’extrême droite. Rester sur X, c’est en partie cautionner ce que la plateforme est devenu (sic) sous Elon Musk. » C’est beau comme du Sébastien Delogu.

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Vincent Lindon, acteur militant…

Profession : belle âme ! Le public boude les derniers films de la star, ex de Sandrine Kiberlain, Claude Chirac et Caroline de Monaco, promoteur de la « taxe Jean Valjean ». C’est parce qu’au fil du temps, l’acteur s’est enfermé dans des rôles et dans des films où la moraline le dispute au politiquement correct.


Le cinéma français n’en finit plus de sombrer. Trop de films, trop de moraline, trop de propagande délayée dans des scénarios médiocres aboutissant fatalement à des réalisations insipides. Résultat : le nombre d’entrées s’effondre – mais l’argent public, lui, continue de bourrer les poches de producteurs, réalisateurs et acteurs se contentant le plus souvent de répondre au cahier des charges du CNC, de l’audiovisuel public, des ministères, des départements et des régions, sources de financement intarissables et promoteurs de la propagande woke, immigrationniste et diversitaire.

Films à gros messages

Parmi les acteurs, Vincent Lindon s’est particulièrement distingué ces dernières années. Comme il maitrise parfaitement son art, des producteurs et des réalisateurs ont placé de grands espoirs en lui. Ils espéraient attirer ainsi le public boudant les films à gros messages. Ça a marché une fois, avec Welcome. Au fil des ans, même cet acteur accompli et reconnu n’est plus parvenu à abuser les spectateurs attendant autre chose du cinéma français et préférant, pour les plus cinéphiles d’entre eux, redécouvrir les grands films qui ont fait sa réputation – les belles restaurations de Coin de Mire, Gaumont ou Pathé permettent de revoir ces merveilles dans de magnifiques conditions. Retour sur le parcours militant de cet acteur qui n’en finit plus de montrer sa grandeur d’âme à tous les passants.

2009. Dans Welcome, Vincent Lindon, alias Simon, aide un jeune migrant kurde désirant traverser la Manche à la nage, et espère ainsi reconquérir sa femme, Marion, militante dans une association d’aide aux sans-papiers. Le film, réalisé par Philippe Lioret, attire 1 205 000 spectateurs. Il faut reconnaître que Philippe Lioret est un réalisateur talentueux. Toutes nos envies et Le Fils de Jean sont de beaux films qui n’ont pas eu le succès qu’ils méritaient. Avec Welcome, nous n’étions qu’au tout début d’une longue série de films de propagande sur l’immigration, la diversité heureuse ou l’idyllique vivre-ensemble dans les quartiers qu’on dit difficiles pour éviter de dire invivables. Ces films de plus en plus  imprégnés d’idéologie woke ou diversitaire verront le nombre de leurs spectateurs s’effondrer au fil des ans, non sans avoir profité au passage du système de financement public évoqué ci-dessus.

2015. Dans Les Chevaliers blancs, Vincent Lindon tient le rôle du président d’une ONG humanitaire qui, pour satisfaire aux demandes d’adoption de familles françaises, organise une opération compliquée afin de ramener en France 300 orphelins d’un pays africain en guerre. Malgré ce sujet alléchant, la critique de Télérama est tellement circonspecte – « Le réalisateur Joachim Lafosse a décidé de moins miser sur l’action que sur la réflexion. Pari dangereux, pas totalement abouti, mais hardi et intriguant » – que les spectateurs renâclent : seulement 196 000 iront voir ce film pourtant plein « d’émotion et de justesse », selon la critique de Franceinfo Culture.

2021. Vincent Lindon, en pompier musculeux sous stéroïdes, s’égare complètement dans un film « férocement féministe » (L’humanité) qui « détruit le male gaze pour mieux explorer l’identité humaine » (Écran Large), donc radicalement woke. La daube de Julia Ducourneau, Titane, remporte la Palme d’or au Festival de Cannes et, dans la foulée, se ramasse une méga-gamelle commerciale : 300 000 entrées seulement. [Pour info, Parasite, l’excellent film du réalisateur sud-coréen Bong Joon Ho, Palme d’or lors de l’édition précédente, a été vu par… 1 900 000 spectateurs français].

2024. Dans le film de Nicolas Boukhrief, Comme un fils, Vincent Lindon est Jacques Romand, un professeur dépressif et désabusé. Celui-ci est témoin d’une agression dans une épicerie et permet l’arrestation d’un des voleurs, Victor, un adolescent de 14 ans. Ému par la situation de ce jeune Rom, Vincent/Jacques décide de l’aider à retrouver le droit chemin. « Le film aborde avec sensibilité la question du deuil, de la filiation et de la transmission, avec en arrière-plan la question sociale de l’accueil des Roms, de leurs conditions de vie, de la violence qui s’exerce parfois sur les enfants, traitée ici avec justesse, sans caricature, et sans pathos », écrit, enthousiaste, le critique de Franceinfo Culture. Les premiers spectateurs, eux, s’ennuient profondément et tiennent à le faire savoir sur le site d’AlloCiné : « Film dégoulinant de bons sentiments » ; « On baille d’ennui devant un Vincent Lindon se plaisant à passer le costume d’un rôle qui lui est désormais familier : celui du mâle blanc d’âge mûr qui tout à la fois porte sur ses épaules le poids de la culpabilité de notre système injuste, capitaliste, postcolonial, refuse de se laisser broyer et puise dans les forces qui lui restent le ressort d’une juste colère. » Résultat : un flop. 121 000 entrées seulement.

Un documentaire à venir sur arte

2025. À partir du 22 janvier, l’on pourra voir Vincent Lindon dans le rôle d’un cheminot, veuf et père de deux garçons dont l’un est attiré par un… groupuscule d’extrême droite. Sur France Inter, Sonia Devillers a reçu l’acteur pour parler du film des sœurs Coulin, Jouer avec le feu. Ensemble, ils ont évoqué cette « jeunesse qui s’enfonce dans le rejet de l’autre » en réussissant à ne convoquer à la barre des accusés que celle qui finirait dans les bras de l’extrême droite radicalisée « façon crâne rasé et croix celtique ». Pourtant, la probabilité de voir un fils d’ouvrier attiré par un groupuscule raciste et violent d’extrême droite est aujourd’hui infiniment inférieure à celle de voir un fils de bobos aisés verser dans l’extrême gauche intolérante, furieusement woke, décolonialiste ou antisémite. La radicalisation d’une certaine jeunesse enrôlée dans des associations progressistes ou écologistes et les mouvements politiques d’extrême gauche, est d’un tout autre niveau, tant en quantité qu’en termes d’agressivité et de violence, que celle concernant les rares jeunes gens finissant dans des groupuscules d’extrême droite – pour lesquels je n’ai aucune sympathie, suis-je obligé de préciser. Vincent Lindon accepterait-il de jouer le rôle d’un cadre supérieur socialiste ou d’un enseignant mélenchoniste dont le fils se retrouve dans un groupuscule hyper-violent d’extrême gauche, genre La Jeune Garde lyonnaise, ou au sein d’un syndicat d’enseignants d’extrême gauche préconisant d’organiser des réunions racistes « non-mixtes » (sans Blancs), ou dans une association écologiste d’extrême gauche prête à toutes les exactions pour voir aboutir son projet totalitaire, ou dans les rangs d’un mouvement politique d’extrême gauche « antisioniste » ? Son talent d’acteur n’étant plus à démontrer, il trouverait là un rôle à sa mesure et le moyen d’élargir sa palette en rendant artistiquement compte d’une réalité qui semble lui échapper…

Après les films sur les gentils migrants franchissant allègrement nos frontières ou les méchants Français dérivant lamentablement vers l’extrême droite, devons-nous nous attendre à une avalanche de films ou de séries « revisitant » des œuvres classiques afin de mettre en valeur cette partie de l’humanité qui vit depuis la nuit des temps sous le joug du patriarcat et de la domination masculine, comme dirait Laure Adler ? Le 22 janvier prochain, sortira en effet sur nos écrans un film intitulé Toutes pour une. Synopsis : « Quand Sara, jeune fille en fuite, découvre que les Trois Mousquetaires qui protègent la Reine de France sont en réalité des femmes, elle décide de partir avec elles et de suivre leur exemple : se transformer pour être libre, se transformer pour être soi… » Ça donne envie, non ? Plus tard dans l’année, TF1 proposera une série dans laquelle la productrice et actrice Audrey Fleurot sera… La Comtesse de Monte-Cristo. Faut-il craindre une nouvelle adaptation des Misérables avec une Jeanne Valjean confrontée aux Thénardières et à la redoutable Javerte ? Oui, peut-être, un jour, mais pas tout de suite… une nouvelle adaptation, fidèle au roman de Victor Hugo, doit d’abord débarquer dans les salles de cinéma fin 2025. Et devinez qui tiendra le rôle de Jean Valjean. Vincent Lindon, bien entendu [1]. Avant cela, l’acteur « se dévoilera dans un documentaire à son image, passionnant portrait en forme d’introspection sur le métier d’acteur et la célébrité, sa vie intérieure angoissée, ses souvenirs d’enfant mal aimé », nous prévient-on sur le site d’Arte. Je crains le pire. Et j’affirme que, dans ce domaine aussi, c’était mieux avant. La preuve : sur Madelen, le site d’archives de l’INA, il est possible de voir et revoir, entre autres choses passionnantes, l’émission Les Monstres sacrés regroupant des extraits d’interviews de Michel Simon, Arletty, Pierre Brasseur, Fernandel, Bourvil (interviewé joyeusement, alors qu’il est en cure à Contrexéville, sous un jet d’eau de source ou lors d’une séance de massage), Michèle Morgan, Jean Gabin, Lino Ventura (entretien risqué : le journaliste interrompt l’acteur en train de dévorer une assiette de charcuterie sur le zinc d’un bistrot), Danielle Darrieux, etc. Quel plaisir d’écouter ces artistes renommés raconter simplement, parfois avec humour, souvent avec pudeur, sans jamais se prendre au sérieux, un souvenir, une rencontre décisive, une anecdote de tournage, une scène de vie, sans se croire obligés de donner ne serait-ce qu’une leçon de morale ou de politique. Mais ça, c’était avant [2]


[1] En 2020, en pleine crise sanitaire, Vincent Lindon a proposé que les plus riches de nos compatriotes contribuent exceptionnellement au redressement de l’économie française et à la lutte contre les inégalités en payant un nouvel impôt baptisé « taxe Jean Valjean ».

[2] Dans un entretien donné récemment à la chaîne Public Sénat, l’acteur Jean-Pierre Daroussin est parvenu à condenser dans une seule phrase toute la morale niaiseuse des artistes gauchisants : « La gauche tend à chercher une morale, une éthique du lien, à considérer qu’une société ne doit pas être faite de ce qui nous sépare mais doit être faite de ce qui nous relie, et donc à chercher des idées et à ne pas rejeter l’autre. » Après avoir entendu ça, histoire de me désinfecter les oreilles, j’ai réécouté Jean Rochefort dans l’émission À voix nue podcastable sur France Culture. Un pur bonheur.    

Rico et Baron: un bœuf dans les nuages

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DR.

Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…


Voilà ce que c’est quand on est romancier ou nouvelliste. On fait vivre ou revivre des personnages, des amis, des méconnus obscurs ou célèbres, puis ils meurent. C’est affreux ; on est triste ; on mélancolise comme un Blondin sans verre ou comme un Kléber Haedens sans sa Caroline. C’est ce qui m’est arrivé avant Noël. Ce n’est guère original, comme beaucoup, je suis triste à cette période de l’année. Je me suis mis à repenser à Michel L., un copain d’école (collège Joliot-Curie, Tergnier, dans l’Aisne), puis de bals (il était un brillant accordéoniste et chanteur ; je m’esquintais les doigts sur ma guitare Elli Sound, copie Gibson SG à cornes de zébu). Cela se passait dans les années soixante-dix. Michel et moi – qui rêvions de rock’n’roll, de Keith Richards, de Brian Jones, d’Al Wilson, de Bob Hite, de Nick Drake et de quelques autres – étions devenus musiciens de bal afin d’acheter nos instruments et d’arrondir nos fins de mois pour dépenser nos francs en buvant des bières Stella ou Porter chez Berto ou au Rimbaud, cafés de Fargniers (Aisne). Les années passèrent ; il devint CRS, quitta la compagnie, puis chemina, erra peut-être. Je devins journaliste dans la presse rock et à L’Aisne Nouvelle. En 1994, lorsque j’appris sa mort, emporté par l’excès de Gauloises sans filtre, tout me revint dans la tronche. J’avais commencé à écrire des bouquins. Il me fallait laisser une trace de ce garçon épatant, généreux, au rire cristallin de peintre italien.

J’écrivis en trois mois Des petits bals sans importance ; Dominique Gaultier et le Dilettante eurent l’amabilité de le publier ; Sempé nous donna une couverture sublime, avec, en fond de l’œuvre, cette affiche qui signifiait qu’il avait tout compris : « Grand bal avec Georges Pouni et ses rythmes. 13-14 juillet, salle Boudot. » Notre orchestre, les Karl Steevens, de Gibercourt, dans l’Aisne (qui sont devenus les Franklin, frères jumeaux, batteur et organiste ?), je le transformais en Hans Eder ; Michel se transforma en Rico. François Angelier rédigea, comme à son habitude, un prière d’insérer doux et sensible : « Rico est là, sous la dalle, mort. Sa binette de gitan dégaine encore un sourire grinçant dans l’ovale sépia qui orne sa tombe. » Sa tombe, j’ai voulu la revoir, avant Noël dernier. J’ai pris ma Twingo et invité ma sauvageonne, mon amoureuse à me suivre ; direction le cimetière de Beautor (Aisne, celle des ALB – Aciérie Laminoirs de Beautor – où Rico travailla, peu avant sa mort). Il faisait froid, humide, presque nuit. Rico était là, sous la dalle. Toujours son sourire ; je me suis mis à lui parler pour que rien ne meure, pour que rien ne s’oublie de toutes ces années mortes ; ces années de cendre et de bière. Ma sauvageonne me regardait.

Il y a quelques jours, Joël C., un saxophoniste-flûtiste d’Eppeville (Somme) avec qui j’avais joué dans son groupe de free-jazz, Koït, à la fin des seventies, passa à son tour à l’Orient éternel des musiciens. Joël, avec ses sandwiches au camembert avec lesquels il empestait tout le lycée Henri-Martin de Saint-Quentin ; Joël, manière d’avant-gardiste à la tête d’Indien, qui découvrait tout avant tout le monde (la musique brésilienne, Soft Machine, etc.), en tout cas avant nous les apprentis musiciens du café des Halles, chez Odette, à Saint-Quentin. Je l’avais baptisé Baron dans mes romans La promesse des navires (Flammarion, 1998) et Les Ombres des Mohicans (Le Rocher, 2023). Dans ce dernier, il faisait de la mobylette bleue comme Brian, le héros de l’histoire. Je vous salue, Rico et Baron ; vous allez vous retrouver, sortir les instruments et faire un bœuf magnifique dans les nuages. Faites chauffer mon ampli Bandmaster Fender ; je ne vais tarder à vous rejoindre.

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Flacons et déraison

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© D.R.

Dry January. Quand les débats sur l’addiction assimilent le vin aux drogues dures, c’est toute une culture française qui se voit remise en question par un puritanisme croissant


Ces temps-ci, les télévisions et radios ne sont pas avares de débats sur le thème de l’addiction. J’ai assisté à quatre de ceux-là en seulement quelques jours (sur BFM, RTL, France 2 et Slate). Chaque fois, après avoir ciblé la drogue proprement dite, la mise en accusation dérive sur l’alcool, le vin en particulier, qui, au prix d’un amalgame assez surprenant, se trouve de ce fait placé sur le même plan que le haschich, la coke ou l’héroïne. Curieuse association, en réalité.

Bien sûr, il n’est nullement question ici de nier les ravages que l’abus répété d’alcool peut générer. Il s’agit seulement de relever quelques fortes différences malheureusement passées sous silence dans les débats que j’ai suivis. Première différence, l’addiction aux drogues repose sur un délit, la circulation, le commerce et la consommation de ces substances étant illégaux. Interdit juridique qui ne frappe pas – du moins pas encore – le beaujolais ou le bas armagnac. Deuxième distinction, et de taille, l’argent mis dans la dose de came alimente un circuit qui n’a absolument rien à voir avec la paisible, la débonnaire filière vinicole française.Les éventuels différends entre vignerons d’Alsace ou d’ailleurs se règlent rarement, en effet, à la kalachnikov, et les contrats passés portent davantage, à ma connaissance, sur le volume d’hectos que sur la tête du concurrent.

Enfin, et peut-être surtout, l’amalgame évoqué évacue volontairement la puissante empreinte culturelle, civilisationnelle que portent chez nous le vin et ses dérivés. « Le vin est senti par la nation française comme un bien qui lui est propre, écrit Roland Barthes lui-même dans Mythologies. C’est une boisson-totem. » Et donc à appréhender comme telle. L’assimiler sans nuances à des saloperies d’importation criminelle revient donc à s’en prendre à une part non négligeable de notre culture. Mais peut-être bien est-ce là l’arrière-pensée de ces puritains de plateau si enclins à fourrer leur nez dans nos flacons ?

Justin Trudeau: « Ch’tu un fighter »

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Le très "woke" dirigeant canadien Justin Trudeau annonce son départ, 6 janvier 2025, Ottawa © Adrian Wyld/AP/SIPA

En v.f., « je suis un bagarreur ».


Tout « fighter » fût-il, le gouverneur démissionnaire du 51e Etat est la première cible atteinte par Donald Trump (lequel reprend le pouvoir le 20 janvier). Dans la foulée, il a fait proroger jusqu’au 24 mars prochain le parlement canadien (qui « a besoin d’un reset, de se calmer le pompon » [sic], a-t-il ajouté avec sa légendaire éloquence bilingue), afin de laisser au parti libéral du Canada un peu de temps pour choisir un successeur.

De toute manière, il était plus que temps. Depuis des années, le Canada est la risée de la communauté internationale, et voir à sa tête pendant neuf ans un guignol qui n’avait pour bagage politique qu’un nom de famille et une expérience de professeur d’art dramatique (en anglais, bien sûr), d’instructeur de surf des neiges, et de roi du déguisement carnavalesque n’a rien arrangé. « Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil » est un programme un peu mince, surtout quand on affecte des fonds publics à la création du poste de « représentante spéciale du Canada dans la lutte contre l’islamophobie », dont la titulaire est la propagandiste Amira Elghawaby, contemptrice éprouvée du Québec, surtout laïque.

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Rendons quand même hommage à celui qui a fait de son État le deuxième pays au monde à légaliser le cannabis.

Qui sera donc le prochain proconsul provisoire du Canada? (L’opposition a promis de faire tomber le gouvernement dès la reprise des travaux parlementaires). 

Dommage que la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, passe son tour : cette blondinette sait terroriser du regard les politiciens chinois. Quant à Marc Carney, ex-gouverneur de la banque du Canada et de la banque d’Angleterre, c’est sur une chaîne de télévision… américaine qu’il vient de lancer sa campagne. Il a pour rivale Chrystia Freeland, ex-vice Première ministre et petite-fille de collabo ukrainien.

La route semble donc sans obstacle pour Pierre Poilièvre, chef du parti conservateur du Canada, une version édulcorée de Donald Trump. D’ailleurs, au Canada, État artificiel aux frontières coloniales, tout est comme aux États-Unis, mais en plus « light ».

Roger Scruton ne plaît pas qu’à Viktor Orban…

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Roger Scruton en 2012 © Christopher Jones / Rex/REX/SIPA

Inspirant des figures comme Viktor Orban ou Giorgia Meloni, Roger Scruton prouvait que le conservatisme bien dosé n’est pas une idéologie rigide, mais un antidote élégant à toutes les idéologies. Il disparaissait il y a cinq ans.


Tous ceux qui s’intéressent au libéralisme et à la philosophie politique ont lu Roger Scruton ou du moins ont entendu parler de lui. Disparu il y a cinq ans à la suite d’un cancer fulgurant, sa pensée irrigue toutefois de plus en plus les réflexions et les orientations des pouvoirs, et pas seulement ceux qui seraient naturellement accordés avec elle. Sa grande force, me semble-t-il, est de privilégier une sorte de provocation de la mesure, d’élaborer une théorie argumentée du bon sens contre tous les progressismes qui n’ont pour ambition que de battre en brèche ce qui a duré et réussi.

Le conservatisme, antidote à l’idéologie

Eugénie Bastié (Champs Libres dans Le Figaro) ne pouvait pas manquer de se pencher sur cette personnalité singulière ayant su résister à l’air du temps au bénéfice de l’universel de la raison. Ses axes fondamentaux : « critique du multiculturalisme, défenseur de la nation et de la tradition contre l’orgueil de la déconstruction… » sont d’une actualité brûlante et fournissent un exceptionnel vivier aux adeptes d’une vision conservatrice aussi éloignée de la stagnation que des humeurs systématiquement régressives.

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J’apprécie tout particulièrement ce qu’a rappelé Viktor Orban en remettant à Roger Scruton la plus haute distinction hongroise le 3 décembre 2019 : « Comme nous l’avons appris de notre bien-aimé professeur, le conservatisme est tout sauf une idéologie : c’est l’antidote à l’idéologie ». En effet, on entend trop souvent des idéologues de gauche la réplique facile que le libéralisme, l’approche conservatrice, seraient également une idéologie et pâtiraient des mêmes vices que ceux qu’on leur impute.

Il me semble que l’objection décisive qui doit contredire cette tentative de confusion est que l’idéologie, par mission et par principe, est vouée à fuir la réalité en se réfugiant dans l’abstraction des concepts partisans quand le conservatisme s’honore de ne s’appuyer que sur le réel, pour éventuellement en dénoncer les ombres afin de les changer, pour en valider les lumières et donc les sauvegarder.

Amour du foyer

Le même Premier ministre hongrois, louant l’aide apportée par Roger Scruton à la lutte contre le communisme, lui rendait hommage pour n’avoir pas été dupe des dangers des sociétés « ouvertes », constat qu’apparemment l’Union européenne qui ne cesse de cibler le gouvernement hongrois ne partage pas, partant du principe qu’il est toujours facile d’être naïf et généreux sur le dos des peuples.

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Selon Eugénie Bastié, la notion centrale de la pensée de Roger Scruton est l’oikophilie, soit l’amour du foyer. On comprend bien comment à partir de ce concept à la fois humain et civilisationnel, ce grand penseur politique a pu développer des variations essentielles sur la vie en société, l’immigration, les risques du multiculturalisme et les relations internationales. Il est intéressant de noter, sur le plan de la forme, comme l’expression de Roger Scruton s’attache à répudier toute outrance, à publier ses idées et, selon lui, ses évidences, en les présentant tout simplement, par un développement limpide et quasiment irréfutable, comme héritées du réel.

Je compare à la manière dont Jean-Marie Le Pen avait usé de la même argumentation en soulignant qu’il convenait d’abord de s’occuper du prochain plus que du lointain mais son style, son oralité mettaient de l’âpreté là où Roger Scruton nous convainc doucement.

J’ai évoqué à plusieurs reprises Viktor Orban mais une démonstration encore plus éclatante de l’influence bénéfique du philosophe politique Roger Scruton est à faire : il a inspiré à l’évidence François-Xavier Bellamy mais surtout aujourd’hui il guide Giorgia Meloni et Bruno Retailleau. Dans des genres différents, en Italie et en France, deux personnalités – une femme de pouvoir, un ministre exemplaire – qui sortent du lot ! Merci, Roger Scruton !

12 milliardaires en colère

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Le président de la Chambre des représentants Mike Johnson, R-La., de gauche à droite, marche avec Vivek Ramaswamy et Elon Musk pour une table ronde à propos projet d'efficacité du département du gouvernement du président élu Donald Trump, sur Capitol Hill à Washington, le jeudi 5 décembre 2024 © AP Photo/Jose Luis Magana /DCJL113/24340695028166//2412052102

Pour exercer son deuxième mandat, le président élu Donald Trump va s’entourer d’une équipe d’hommes et de femmes fortunés. Si ses détracteurs dénoncent dans ce casting une oligarchie, on ne peut pas s’empêcher de penser que l’indépendance financière de ces nouveaux responsables politiques est, peut-être, la dernière chance des États-Unis de résister au rouleau compresseur du wokisme tout-puissant.


Les États-Unis n’ont jamais porté Karl Marx dans leur cœur. Alors que les écrits du philosophe allemand ont révolutionné la pensée politique sur le continent européen et bien au-delà, l’Amérique a tout fait pour barrer les idées de la lutte des classes et de l’égalité sociale. Pendant de longues années le « Manifeste du parti communiste » a été censuré sur le territoire américain et quasiment interdit durant la période du maccarthysme. Cependant, un siècle et demi après la naissance du marxisme, pendant que la gauche progressiste européenne est devenue, à l’image de LFI de Jean-Luc Mélenchon, un grand corps malade, la droite américaine fait sa révolution. Cette fois-ci, ce sont les forces conservatrices incarnées par des personnalités très riches qui portent, aux yeux de la majorité écrasante des citoyens américains, le message de liberté politique, de bon sens social et de prospérité économique.1

L’image de Donald Trump sur la tribune d’un meeting électoral, poing levé, visage en sang après une tentative échouée de son assassinat restera un symbole puissant de cette révolte : transcrite par le résultat des urnes lors des dernières élections présidentielles avec le vote de 312 grands électeurs (contre 226 pour sa rivale du parti démocrate, Kamala Harris). C’est d’ailleurs, après cette soirée bouleversante du 13 juillet 2024 en Pennsylvanie, qu’Elon Musk, l’homme le plus riche de la planète, a apporté publiquement son soutien au candidat républicain.

Musk, un milliardaire parmi les autres

Le ralliement de l’entrepreneur, lui-même objet des attaques du pouvoir californien, qui l’ont obligé de quitter la Silicon Valley pour le Texas, ne s’est pas seulement résumé pas la somme record de 277 millions de dollars2 pour financer la campagne de Trump. Le réseau social X dont il est propriétaire est devenu la tribune principale pour toutes les personnalités connues et inconnues du grand public, qui n’étaient pas d’accord avec la politique actuelle du gouvernement démocrate. Celle qui, selon eux, a amené leur pays à une crise migratoire sans précèdent, aux fractures sociales et culturelles provoquées par le wokisme inquisitorial et le monde entier quasiment au bord de la Troisième Guerre mondiale. Des évolutions dont les médias mainstream du pays tels le New York Times ou CNN auraient soigneusement ignoré la gravité, à les entendre. Ces derniers préférant porter toute leur attention sur les affaires judiciaires du candidat républicain…

Mais Elon Musk n’est pas l’unique milliardaire à se mettre au service du Donald Trump. Ils sont 12 à qui le 47ᵉ président des États-Unis a proposé un rôle important dans son administration, en signe de reconnaissance de leur précieux support durant sa campagne, mais sans doute également parce qu’il partage avec ces gens la même inquiétude pour le pays.  

Fin stratège, le nouveau locataire de la Maison Blanche a placé ses 12 acolytes pour couvrir pratiquement tous les domaines de la politique américaine. Pour Musk, le président élu a créé un nouveau département de l’efficacité gouvernementale, que le patron de Space X et de Tesla Motors va gérer avec un autre jeune magnat, l’étoile montante du paysage politique du pays Vivek Ramaswamy.  À 39 ans ce dernier a décidé d’abandonner son empire pharmaceutique pour d’abord se présenter aux primaires du Parti républicain en été 2023, avant de devenir l’allié inconditionnel de Trump, en mettant en avant sa formidable éloquence et la vision ‘anti-woke’ de l’Amérique.3

Deux hommes et une femme d’affaires devraient gérer les questions économiques : Scott Bessent comme secrétaire au Trésor, Howard Lutnick en tant que secrétaire au Commerce et Kelly Loeffler – chargée des petites et moyennes entreprises (Small business administration). Linda MacMahon qui, avec son mari a bâti la fortune de 3 milliards de dollars dans le divertissement, serait en tête de l’Éducation nationale et Frank Bisignano, le patron de la plus grande entreprise du FinTech américain Fiserv, prendrait la fonction de commissaire à l’administration de la Sécurité sociale. Pour le domaine régalien de la Défense, Jacob Isaacman, le magnat de l’industrie du paiement, s’apprête à piloter la NASA et Stephan Feinberg (Fonds d’Investissement) s’est vu proposer le poste de secrétaire-adjoint à la Défense. Enfin, le banquier Warren Stephens et le promoteur immobilier Charles Kushner ont été nommés les ambassadeurs des États-Unis respectivement en Grande-Bretagne et en France, pour donner un nouveau souffle à la politique américaine sur la scène internationale.4

La quête de liberté a changé de camp

La richesse cumulée de ces 12 personnalités s’élève à 360 milliards euros, ce qui est plus important que le budget de la France en 2024 (305,1M€). 240 ans après leur création, pour sortir d’une impasse existentielle, les États-Unis font appel aux forces qui incarnent le mieux le rêve américain depuis toujours : la réussite professionnelle accompagnée de la richesse matérielle. Les milliardaires américains sont, en effet, la dernière catégorie des citoyens qui, grâce à leur indépendance financière, peut encore résister à l’étrange agenda politique du parti démocrate. Qui, ivre de la victoire de l’Amérique dans la Guerre Froide s’est senti légitime à déconstruire les fondements millénaires de la civilisation occidentale s’appuyant sur les interdits moraux de la religion chrétienne et la puissance de la pensée libre, que cet ordre spirituel a créé en Europe.

Reste à voir comment la révolution des milliardaires américains va embarquer dans son élan les vieilles démocraties européennes. Quelques tweets de Musk en faveur du parti allemand l’AfD ont déjà bouleversé la dynamique des sondages sur l’intention des votes des électeurs allemands. Le parti classé à l’extrême droite a grimpé à la 2ᵉ place, avec le chiffre record de 22% des suffrages, talonnant ainsi les démocrates-chrétiens de CDU/CSU (30%) et dépassant déjà les sociaux-démocrates du chancelier actuel Olaf Scholz (16%).5 Le programme de l’AfD prévoit, entre autres, de faire sortir l’Allemagne de l’Union européenne, de lancer les déportations massives d’immigrés, de démolir les éoliennes et de réduire au minimum le support militaire à l’Ukraine. Une vision qui tranche radicalement avec les aspirations humanistes de la gauche historique, qu’ont façonné les modèles sociaux de pratiquement tous les pays du Vieux Contient. Oui, le temps de Karl Marx semble être définitivement révolu, même dans son propre pays…


  1. Marx censuré aux États-Unis, Wikipédia ↩︎
  2. Elon Musk investit 277 millions de dollars pour soutenir Trump et les candidats républicains, CBS News ↩︎
  3. 12 milliardaires, Bloomberg ↩︎
  4. Leurs rôles, The Hill  ↩︎
  5. « Remigration », sortie de l’UE… En Allemagne, l’extrême droite déroule son « plan d’avenir » avant les élections, BFM TV ↩︎

Saga Beigbeder

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Frédéric Beigbeder © Hannah Assouline

Avec Un homme seul (Grasset, 2025), Frédéric Beigbeder signe l’un de ses meilleurs livres, sinon le meilleur.


Il faut se méfier des enfants qui écrivent. Ils utilisent la nourriture familiale pour muscler leur univers romanesque. Les pères sont souvent sous le feu des projecteurs de nos jours. Ils n’ont pas forcément le beau rôle. L’époque déteste le virilisme et veut en découdre avec le patriarcat. Alors les écrivains, qui sont pour la plupart restés des enfants, car la littérature est le contraire de travailler comme le rappelle Georges Bataille, ouvrent les ordinateurs, fouillent dans les corbeilles, lisent les mails, scrutent l’historique des recherches sur internet, bref, se transforment en commissaire Maigret à la recherche de ce « misérable petit tas de secrets », pour reprendre la formule de Malraux, citée par Frédéric Beigbeder.

Ce père qu’il croyait détester

Disons-le d’entrée de jeu, Un homme seul est sûrement l’un des meilleurs livres de Beigbeder, sinon le meilleur. L’analyse y est pertinente et le style épuré ; la formule claque et l’émotion surgit là où le récit semblait froid comme le granit, surtout au moment d’atteindre les trop courts chapitres 30 et 31, c’est-à-dire de prendre congé de Jean-Michel Beigbeder (1938-2023), père de Frédéric. Il en fait un véritable personnage de roman, à situer à mi-chemin entre Roger Martin du Gard – totalement oublié aujourd’hui – et Ian Fleming : « C’était un Français qui s’est cru Américain alors qu’il était Anglais ». On avait vaguement entendu parler de cet homme à la forte corpulence qui, après de solides études de management à Harvard Business School, avait importé en France le métier de « chasseur de têtes » (executive search), « plaçant » tous les dirigeants du CAC 40 durant cinquante ans. Un homme sans foi, ni loi, en quelque sorte, utilisant des pratiques immorales dans un système réfutant toutes les valeurs suprêmes et les remplaçant par un seul mot d’ordre : faire du fric. Le très lettré – hypokhâgne, khâgne – et habile Jean-Michel n’hésitait pas à débaucher les personnes douées pour les intégrer dans des organigrammes de sociétés prestigieuses. Sa devise : « La guerre économique est la seule dont les déserteurs sont récompensés ». Pas de quoi rendre l’homme sympathique, malgré une trajectoire digne de L’homme pressé, roman électrique de Paul Morand, avec l’hypothèse probable d’avoir été un correspondant de la CIA, c’est-à-dire un « agent » agissant contre les intérêts de la France puisque les Américains ont toujours tenté de déstabiliser notre pays, notamment sous de Gaulle qui connaissait le sens du mot indépendance.

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Père brillant, jouisseur, égoïste, pour ne pas dire narcissique, indifférent surtout à ses deux fils, Charles et Frédéric. Celui qui fut jadis un beau jeune homme au regard ténébreux, cheveux bien coiffés, raie nette sur le côté, est mort totalement ruiné, seul, d’un cancer des voies biliaires, après un lent et irrémédiable délabrement physique dû à la maladie de Parkinson. La mort du vieil homme fut une délivrance. Le fils écrivain raconte : « Vers la fin, dans ma salle de bains de Guéthary, il m’a demandé de lui laver les cheveux. Il s’est mis torse nu, il avait perdu cinquante kilos et sa peau pendait sur son ventre comme de la guimauve dans une fête foraine. Pieds gonflés, sans chevilles. Seins en gants de toilette. Goître moucheté de taches de vieillesse. » L’écrivain ajoute : « Ne rigole pas, tu seras pareil, pauvre con. » Plus loin dans le récit, l’écrivain reconnait avoir été injuste avec lui dans ses livres précédents. « Je l’ai pris pour un salaud qui avait quitté ma mère alors que c’est elle qui l’a largué », confesse-t-il. Il dit encore : « Il n’a jamais réagi car il ne lisait pas mes livres : il les faisait lire à sa compagne, qui ‘’avait bien aimé’’. » Insupportable camouflet. Mais la mort a gommé la rancœur, et l’écrivain a décidé de mener l’enquête sur ce père pas si détestable que ça.

Infernal pensionnat

Françoise Sagan – que Beigbeder aime ; il ne cesse de citer son nom ; c’est bien qu’un écrivain de talent sauve d’un possible oubli un autre écrivain de talent – Sagan, donc, a écrit qu’à neuf ans, on a saisi l’essentiel de la vie. Tout est joué. Alors il convient de déjouer le système pour s’en jouer. Le cauchemar de Jean-Michel a commencé à huit ans, quand il fut mis en pension par ses parents. C’est l’incompréhensible abandon ; c’est l’entrée dans l’enfer des brimades, des coups, des humiliations, et peut-être pire… L’enfer porte un nom, Sorèze, un pensionnat catholique situé dans le Tarn. Incompréhensible, oui, quand on sait que les parents de Jean-Michel ont caché – et sauvé – une famille juive dans leur villa. Alors pourquoi avoir livré leur fils aux « kapos à chapelets » ? Frédéric Beigbeder écrit : « Quoi qu’il en soit, conditionné à la survie solitaire en milieu hostile, son caractère s’est fermé. Jean-Michel est devenu un humain claquemuré. » Son fils est parvenu à l’exfiltrer de cette forteresse invisible. L’écrivain possède des pouvoirs de démiurge. Ne les fréquentez qu’en cas de forte poussée sentimentale.

La fin est bouleversante, dégraissée de tout pathos. Frédéric l’appelle enfin « papa ». On comprend pourquoi quand il nous livre une anecdote que je vous laisse découvrir.

Frédéric Beigbeder avoue encore : « Au ciel, il ne sera plus jamais seul. Je suis heureux pour lui et triste pour moi parce qu’à partir de ce jour, l’homme seul, c’est moi. »

Jean-Michel repose sous une pierre rose de la Rhune, à Guéthary. Une tombe avec vue sur les flots fougueux. Comme Chateaubriand.

Frédéric Beigbeder, Un homme seul, Grasset. 224 pages.

Un homme seul

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Cessez-le-feu et libération des otages: le tweet problématique d’Emmanuel Macron

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Un homme tient une pancarte avec la photo d'Ohad Yahalomi, détenu en otage à Gaza, lors d'une manifestation à Tel Aviv, 14 septembre 2024 © SOPA Images/SIPA

Les soutiens habituels d’Israël ont critiqué le message du président français publié le soir de l’annonce de l’accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, y voyant une équivalence malvenue entre les souffrances des otages et celles des civils gazaouis. La « pensée complexe » présidentielle, louée par ses admirateurs, n’est peut-être pas adaptée à des messages si courts toujours sujets à interprétation…


Le tweet du président de la République sur un possible cessez-le-feu à Gaza a suscité des réactions vives, notamment en raison de l’absence d’une mention explicite du peuple israélien et du contexte même dans lequel il s’inscrit. Cet oubli, volontaire ou non, ne peut être détaché des conséquences tragiques des attaques terroristes du 7-Octobre, ni des enjeux fondamentaux de ce conflit.

Une ambiguïté choquante

« Après quinze mois de calvaire injustifiable, soulagement immense pour les Gazaouis, espoir pour les otages et leurs familles. Ce soir, mes pensées vont à Ofer et Ohad. L’accord doit être respecté. Les otages, libérés. Les Gazaouis, secourus. Une solution politique doit advenir » écrivait Emmanuel Macron le 15 janvier peu après 21 heures.

Ce message présidentiel, en mettant sur un même plan les victimes israéliennes et les conséquences de la guerre à Gaza, crée un amalgame dérangeant.

Il existe une différence fondamentale entre le pogrom sanglant du 7 octobre — une attaque préméditée contre des civils juifs, accompagnée d’enlèvements, de viols et d’assassinats — et les pertes civiles, bien que tragiques, causées par un conflit armé. En niant cette distinction, le tweet valide indirectement le discours des islamistes qui cherchent à minimiser ou justifier leurs crimes, tout en nourrissant une confusion morale inacceptable.

Le refus de reconnaître les otages juifs comme des esclaves, déshumanisés et captifs d’une barbarie assumée, renforce ce sentiment d’ambiguïté. Même le Hamas a reconnu que la population gazaouie elle-même détient une partie des otages, révélant un fanatisme enraciné et encouragé par des décennies de haine culturelle.

Une politique sans ligne claire

Ce type de communication trahit une incapacité à nommer clairement les responsabilités et à défendre les valeurs démocratiques face à l’islamisme totalitaire.

Où sont les actes forts ? Pourquoi ne pas condamner le terme de « génocide », infondé ici, ou affirmer que la guerre d’Israël contre le Hamas est légitime ? Pourquoi continuer à financer l’UNRWA ou tolérer sur le sol français des discours appelant à l’intifada et au djihad, au mépris des principes républicains ?

Une fracture intérieure

En France, chaque mot du président sur le conflit israélo-palestinien a des répercussions directes. La communauté juive, déjà fragilisée par des décennies d’antisémitisme et des tensions croissantes, mérite un soutien clair.

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Mais ce tweet, en donnant des « gages » implicites à des narratifs islamistes, alimente les discours haineux et renforce un sentiment d’abandon.
Dans les rues de Paris, les appels à l’intifada et les manifestations pro-Hamas témoignent d’une radicalisation inquiétante que les dirigeants n’ont pas su endiguer.

Des réactions vives de nombreuses personnalités des médias et de la communauté juive

Suite aux propos présidentiels, les réactions ne se sont pas fait attendre. La journaliste Céline Pina a déclaré sur X (anciennement Twitter) : « Ce tweet est honteux : au nom de quoi l’évocation des otages doit-elle s’accompagner de gages donnés aux islamistes ? La mort de civils est malheureuse mais il y a une différence entre les horreurs d’un pogrom, la razzia d’esclaves et les cadavres volés qui s’ensuivent et les conséquences d’un bombardement ».  L’avocat Gilles-William Goldnadel a réagi sur son compte Instagram, avant de confirmer ses propos sur C News : « Le tweet d’Emmanuel Macron est tellement inqualifiable, que j’ai du mal à le qualifier. Car cela veut dire que pour les Gazaouis il y a un calvaire, mais pour les otages il n’y en n’a pas ». Du coté des réactions dans la communauté juive, celle du président du B’nai B’rith France, Philippe Meyer, résume le ressenti de beaucoup d’entre nous : « Message pour le moins ambiguë. On aurait aimé lire autre chose du président de la République, d’autres mots, dans un autre ordre. Le « en même-temps » ne justifie pas tout ».

La responsabilité des dirigeants

Les événements tragiques du 7-Octobre rappellent que les islamistes ne font aucune distinction : leur barbarie s’abat sur quiconque n’adhère pas à leur idéologie, comme les Juifs ce jour-là. Face à cette menace, la France se doit de tenir une ligne claire et de refuser tout relativisme.

Ce tweet présidentiel, en diluant la gravité des crimes contre l’humanité commis par le Hamas dans un discours généraliste et politicien, incarne l’impuissance des élites occidentales à affronter les totalitarismes modernes. Ce manque de courage moral pousse les citoyens à chercher refuge dans des figures populistes, bien que leurs solutions soient souvent tout aussi problématiques.

La France doit choisir : défendre Israël, démocratie imparfaite mais légitime, ou céder aux injonctions d’un fanatisme qui menace les valeurs mêmes de l’Occident. Il est temps pour le président de se tenir fermement aux côtés des victimes, de nommer sans détour les responsables, et de montrer que la République ne cédera pas face à l’islamisme ni à ses complices. Le futur de notre société et de nos enfants en dépend.

Causons! Le podcast hebdomadaire de Causeur

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Marche contre les bandes de pédophiles organisée par l'activiste Tommy Robinson à Telford, 29/1/2022 Licensed by Story Picture Agency/SIPA

Avec Céline Pina et Jeremy Stubbs.


Quelle est l’espérance de vie du gouvernement Bayrou? Quelles sont les stratégies adoptées par le Parti socialiste et le Rassemblement national? Bayrou peut-il sauver le soldat Macron?

Le Royaume Uni est toujours en butte au scandale des « grooming gangs », ces bandes de pédophiles composées d’hommes d’ascendance pakistanaise. Pendant des années, ces hommes ont pu agir avec un certain degré d’impunité. Aujourd’hui, certaines de leurs victimes attendent toujours que justice soit faite. Est-ce la fin du grand rêve multiculturel?

Elon Musk vs Thierry Breton: les médias ont choisi leur champion!

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© Jonas Ekströmer/AP/SIPA © Michel Euler/AP/SIPA

Tandis que les médias de grands chemins s’inquiètent de la montée des opinions dissidentes et des changements dans le paysage numérique, l’Union européenne prépare de nouvelles mesures pour renforcer son contrôle sur les plateformes numériques au nom de la démocratie. Mais, tout ce petit monde ne disait rien quand des ingérences « progressistes » ou woke étaient constatées par le passé…


Elon Musk « promouvant l’extrême droite partout » et Mark Zuckerberg ayant décidé de se passer dorénavant des fact-checkers sur Facebook et Instagram, l’économiste Dominique Seux déclare le plus sérieusement du monde, sur France Inter : « Thierry Breton nous manque. » Le DSA (Digital Services Act) est la loi européenne sur les services numériques concoctée par M. Breton du temps où il était commissaire européen. Le but officiel de cette loi est de « réguler » les réseaux sociaux ainsi que les plateformes de partage de contenus (Youtube, Dailymotion…), d’empêcher les « propos haineux », la désinformation et la manipulation sur la toile et d’analyser les « risques systémiques qu’ils génèrent sur les processus électoraux » – voilà qui offre mille possibilités interprétatives pouvant aboutir à une censure à peine camouflée. Voire pire.


En partance pour Bank of America, Thierry Breton fait une dernière tournée des médias

Thierry Breton a malheureusement entendu Dominique Seux. Le voici de retour. En l’espace de trois jours, il a été l’invité exceptionnel de LCI, RMC, France 5, France Info (à 8h30, le 11 janvier) et France Culture (à 12H45, le même jour).

Les journalistes ont été très gentils avec lui, ne l’ont confronté à aucun contradicteur et l’ont laissé dérouler un discours archi-rodé sur le « peuple européen » sacrément bien représenté par un « Parlement européen » garant du « progrès européen », du « vivre-ensemble européen » et de la « démocratie européenne » – ces derniers seraient menacés par les vilains réseaux sociaux en général et celui du méchant Elon Musk en particulier. Sur RMC, M. Breton a déclaré que s’il était constaté des « interférences » lors des prochaines législatives allemandes, les résultats de celles-ci pourraient être remis en cause. « On l’a fait en Roumanie et il faudra le faire si c’est nécessaire en Allemagne », a-t-il menacé en faisant référence à l’annulation par la Cour constitutionnelle de Bucarest des dernières élections présidentielles roumaines au motif que le réseau social TikTok aurait été utilisé par des « éléments étrangers » pour manipuler l’opinion publique.   

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La liberté d’expression, c’est bien. Mais c’est mieux, pensent certains, quand le cadre en est strictement délimité par les milieux informationnels qui ne manquent ni de commissaires, ni de vérificateurs, ni d’argousins médiatiques. Pour Dominique Seux, Mark Zuckerberg est passé du côté obscur de la Force numérique. « Les “vérificateurs de faits” ont fait preuve de trop de partialité politique », affirme pourtant simplement le directeur général de Meta, avant d’ajouter : « Ce qui a commencé comme un mouvement inclusif a de plus en plus été utilisé pour bloquer les opinions et exclure les personnes ayant des idées différentes ». Cette censure a été ouvertement pratiquée sur les différents réseaux sociaux, Twitter du temps où Jack Dorsey en était le propriétaire, Instagram et Facebook du temps où les Démocrates américains étaient au pouvoir et Zuckerberg à leur service. Le rachat de Twitter par Elon Musk et le revirement de Zuckerberg changent radicalement la donne. Ce dernier affirmant vouloir « supprimer un tas de restrictions sur l’immigration et le genre », les commissaires politiques de la radio publique se gargarisent de grands mots : « C’est notre modèle de démocratie qui est attaqué », gribouille sur X le journaliste Julien Pain, fact-checker officiel de France Info, avant de… bloquer les commentaires des internautes se réjouissant de la décision de Zuckerberg.

Elon Musk, le George Soros de la droite

Les médias français et la Commission européenne se plaignent de l’ingérence d’Elon Musk dans des élections européennes. Soit. On ne les a pourtant guère entendus lorsque George Soros, le discret mais très efficace financeur de centaines d’ONG immigrationnistes et d’associations wokes via son Open Society Foundation, a arrosé de ses bontés sonnantes et trébuchantes la campagne des opposants au Brexit. Aucun murmure de réprobation n’est venu entacher non plus la vidéo de soutien à Emmanuel Macron, archi-diffusée sur les réseaux sociaux entre les deux tours de la présidentielle de 2017, de l’ancien président américain Barack Obama qui, quelques mois plus tard, se rendra à Londres pour soutenir, lui aussi, la campagne contre le Brexit. Pas un mot sur Bill Gates qui, par le biais de sa fondation « philanthropique », s’insinue dans les instances internationales qui décideront demain des politiques mondiales de santé et d’alimentation. Et que dire de l’incroyable et outrancière campagne politico-médiatique européenne contre Donald Trump lors des dernières élections présidentielles américaines ou du rouleau compresseur médiatique français qui, au nom du « front républicain », a écrabouillé la campagne des dernières élections législatives ?

Il est finalement assez réjouissant de voir les journalistes progressistes paniquer en se demandant ce qui arrive. Il arrive, sommes-nous obligés de leur dire, que les digues qu’ils ont construites pour empêcher la diffusion de la libre parole commencent de se fissurer. Oh ! pas beaucoup ; mais suffisamment pour les agacer, ce qui n’est déjà pas si mal. Ne nous leurrons pas : ces digues sont si épaisses, si régulièrement réparées et même renforcées par eux-mêmes et par l’oligarchie politique, qu’il sera difficile de les abattre totalement. Il n’empêche, quelques brèches apparaissent. Aussi modestes soient-elles, elles chiffonnent ces journalistes qui ont pris l’habitude de parader dans les studios, particulièrement dans ceux de l’audiovisuel public, entre eux, sûrs d’eux, dans le confort de l’uniformité politique, la connivence et la douceur de l’endoctrinement sans accroc, en suivant la ligne définie par l’idéologie gaucho-progressiste, ligne studieusement entretenue par les crayonneurs de l’AFP et du Monde, deux éminents propagateurs de la doxa.

La presse mainstream prête à encourager les mesures coercitives et censoriales

Leur conformisme n’a d’égal que leur paresse naturelle et leur mollesse intellectuelle au moment de livrer bataille – l’adversaire est qualifié trop rapidement de réactionnaire ou de fasciste pour que l’on puisse imaginer que, derrière cette invective, se cache une argumentation intelligente, laquelle a été remplacée par le catéchisme progressiste. Ils barbotent là-dedans depuis si longtemps que la moindre résistance les blesse douloureusement. Nerveux, irascibles, peu habitués à jouter honorablement, l’existence d’une extrême droite fantasmagorique leur sert, comme d’habitude, à tenter de briser la mutinerie, aussi minime soit-elle. Leurs compatriotes regimbent et se cabrent devant leurs leçons de morale usées jusqu’à la corde ? Ils s’enferrent, frénétiques, dans un discours daté qui impressionne de moins en moins les peuples subissant les effets délétères d’une politique européenne désastreuse. Exaspérés, ils voient finalement d’un bon œil les mesures coercitives et censoriales prévues par la Commission européenne pour briser les élans patriotes.     

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Vendredi 10 janvier. Une journée ordinaire sur la radio publique. Sur France Inter, Patrick Cohen tient absolument à « rediaboliser » le RN, parti toujours aussi « raciste et antisémite » que du temps du FN de feu Jean-Marie Le Pen, selon lui. Il évoque « des chaînes où le RN est désormais comme chez lui » en rabâchant la sempiternelle litanie de messages moraux invariables et paresseux sur « l’extrême droite ». Sur la radio publique, on peut quotidiennement vouer aux gémonies les millions de Français qui n’ont pas voté comme il faut sans que l’Arcom s’émeuve. Grand castor parmi les castors, M. Cohen dit ainsi espérer que le « front républicain » opérera encore et toujours lors de prochaines élections. Autant dire que les directives de l’UE pour castoriser, de gré ou de force, les prochaines élections en Europe, ne lui font pas peur. Le même jour, sur la même radio, Pierre Haski conseillera à la Commission européenne de réagir fermement face à « l’alliance Trump-Musk ». La veille, dans l’émission “Le téléphone sonne”, Fabienne Sintes, inquiète des décisions de Zuckerberg, se sera demandé si « l’Europe est assez forte pour faire barrage avant qu’on se prenne une potentielle avalanche de bouses » sur les réseaux sociaux. France Info n’est pas en reste : Aurélie Herbemont, chef adjointe du service politique de ladite radio, s’étonne qu’Elon Musk ait « remis sur le tapis une sordide affaire de pédo-criminalité impliquant des Pakistanais il y a 10 ans » au Royaume-Uni – mais ne s’étonne pas que cette effroyable affaire, qui a duré plus de trente ans sans que les autorités anglaises, par crainte d’être taxées de xénophobie et d’islamophobie, bougent le petit doigt, n’intéresse absolument pas nos militantes féministes de gauche si promptes habituellement à réagir au moindre regard concupiscent… 

« Nous allons nous débarrasser des vérifacteurs de faits et les remplacer par des notes communautaires similaires à X, en commençant avec les États-Unis », a déclaré le PDG de Meta, Mark Zuckerberg, dans une vidéo publiée le 7 janvier 2025 © Andre M Chang/ZUMA Press Wire/Shutterstock

La nomenklatura médiatique française n’a en réalité pas grand-chose à craindre. Les fact-checkers vont pouvoir continuer de fact-checker, c’est-à-dire d’orienter l’information. Clara Chappaz, notre actuelle ministre déléguée chargée de l’intelligence artificielle et du Numérique, affirme en effet sur X : « J’ai échangé avec la direction de Meta France ce soir qui m’assure que cette fonctionnalité ne sera déployée qu’aux États-Unis pour le moment. En Europe, le Digital Service Act sera respecté. Croyez en ma vigilance sur le sujet. » Le service de censure européen veille donc au grain. Selon Mme Chappaz, les dirigeants de Meta « ont bien compris qu’en France comme en Europe, la façon dont nous définissons la liberté d’expression est différente de la façon dont elle est définie aux États-Unis ». Ne reste plus qu’à savoir ce que l’UE entend par « liberté d’expression ». Le DSA européen se verra bientôt complété par de nouvelles mesures censées protéger la démocratie mais qui, en réalité, la dépouilleront de ses derniers oripeaux. Les « vérificateurs de faits » des médias de gauche vont pouvoir continuer de dissimuler le réel et d’occulter les difficultés des sociétés européennes confrontées à l’immigration massive, l’insécurité physique et culturelle, la précarité, au déclassement d’un continent que la technocratique UE a accéléré. L’inénarrable Thierry Breton vit apparemment dans un monde parallèle. Sur LCI, il ose affirmer que « les empires déclinants – la Grande-Bretagne, la Russie, la Turquie – s’attaquent tous à l’UE » parce qu’ils sont jalouxde« nos progrès » (sic), de « notre dynamique démocratique » (resic) et de « notre projet et notre vivre-ensemble » (etsic de der). L’Europe mythologique de M. Breton doit absolument éviter de se frotter au réel, raison pour laquelle l’ex-commissaire européen prévient les propriétaires des réseaux sociaux, Elon Musk en tête : l’UE a les moyens de les interdire s’ils ne respectent pas les règles établies par lui-même, Thierry Breton, ex-démolisseur d’entreprises (Thomson, France Telecom, Atos) et ex-mamamouchi de l’oligarchie bruxelloise.

Pour conclure sur une note plus légère, signalons que Sandrine Rousseau a envoyé une missive écrite avec le pied gauche, truffée de fautes d’orthographe et d’un pléonasme intéressant, à « tou.tes les député.es du NFP », pour les inviter à quitter le réseau social X « de manière collective ». Extraits : « Ce courrier pour vous inviter à ce que (sic) nous quittions/arrêtions (sic) de poster sur la plateforme. […] X est devenue (sic) une véritable machine désinformation (sic), une arme de destruction massive de la réalité factuelle (sic), et la caisse de résonnance (sic) des courant (sic) d’extrême droite. Rester sur X, c’est en partie cautionner ce que la plateforme est devenu (sic) sous Elon Musk. » C’est beau comme du Sébastien Delogu.

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Vincent Lindon, acteur militant…

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Dans "Jouer avec le feu" de Delphine et Muriel Coulin, Vincent Lindon interprète un cheminot dont le fils bascule dans l'extrème droite © Felicita - Curiosa Films - France 3 Cinema

Profession : belle âme ! Le public boude les derniers films de la star, ex de Sandrine Kiberlain, Claude Chirac et Caroline de Monaco, promoteur de la « taxe Jean Valjean ». C’est parce qu’au fil du temps, l’acteur s’est enfermé dans des rôles et dans des films où la moraline le dispute au politiquement correct.


Le cinéma français n’en finit plus de sombrer. Trop de films, trop de moraline, trop de propagande délayée dans des scénarios médiocres aboutissant fatalement à des réalisations insipides. Résultat : le nombre d’entrées s’effondre – mais l’argent public, lui, continue de bourrer les poches de producteurs, réalisateurs et acteurs se contentant le plus souvent de répondre au cahier des charges du CNC, de l’audiovisuel public, des ministères, des départements et des régions, sources de financement intarissables et promoteurs de la propagande woke, immigrationniste et diversitaire.

Films à gros messages

Parmi les acteurs, Vincent Lindon s’est particulièrement distingué ces dernières années. Comme il maitrise parfaitement son art, des producteurs et des réalisateurs ont placé de grands espoirs en lui. Ils espéraient attirer ainsi le public boudant les films à gros messages. Ça a marché une fois, avec Welcome. Au fil des ans, même cet acteur accompli et reconnu n’est plus parvenu à abuser les spectateurs attendant autre chose du cinéma français et préférant, pour les plus cinéphiles d’entre eux, redécouvrir les grands films qui ont fait sa réputation – les belles restaurations de Coin de Mire, Gaumont ou Pathé permettent de revoir ces merveilles dans de magnifiques conditions. Retour sur le parcours militant de cet acteur qui n’en finit plus de montrer sa grandeur d’âme à tous les passants.

2009. Dans Welcome, Vincent Lindon, alias Simon, aide un jeune migrant kurde désirant traverser la Manche à la nage, et espère ainsi reconquérir sa femme, Marion, militante dans une association d’aide aux sans-papiers. Le film, réalisé par Philippe Lioret, attire 1 205 000 spectateurs. Il faut reconnaître que Philippe Lioret est un réalisateur talentueux. Toutes nos envies et Le Fils de Jean sont de beaux films qui n’ont pas eu le succès qu’ils méritaient. Avec Welcome, nous n’étions qu’au tout début d’une longue série de films de propagande sur l’immigration, la diversité heureuse ou l’idyllique vivre-ensemble dans les quartiers qu’on dit difficiles pour éviter de dire invivables. Ces films de plus en plus  imprégnés d’idéologie woke ou diversitaire verront le nombre de leurs spectateurs s’effondrer au fil des ans, non sans avoir profité au passage du système de financement public évoqué ci-dessus.

2015. Dans Les Chevaliers blancs, Vincent Lindon tient le rôle du président d’une ONG humanitaire qui, pour satisfaire aux demandes d’adoption de familles françaises, organise une opération compliquée afin de ramener en France 300 orphelins d’un pays africain en guerre. Malgré ce sujet alléchant, la critique de Télérama est tellement circonspecte – « Le réalisateur Joachim Lafosse a décidé de moins miser sur l’action que sur la réflexion. Pari dangereux, pas totalement abouti, mais hardi et intriguant » – que les spectateurs renâclent : seulement 196 000 iront voir ce film pourtant plein « d’émotion et de justesse », selon la critique de Franceinfo Culture.

2021. Vincent Lindon, en pompier musculeux sous stéroïdes, s’égare complètement dans un film « férocement féministe » (L’humanité) qui « détruit le male gaze pour mieux explorer l’identité humaine » (Écran Large), donc radicalement woke. La daube de Julia Ducourneau, Titane, remporte la Palme d’or au Festival de Cannes et, dans la foulée, se ramasse une méga-gamelle commerciale : 300 000 entrées seulement. [Pour info, Parasite, l’excellent film du réalisateur sud-coréen Bong Joon Ho, Palme d’or lors de l’édition précédente, a été vu par… 1 900 000 spectateurs français].

2024. Dans le film de Nicolas Boukhrief, Comme un fils, Vincent Lindon est Jacques Romand, un professeur dépressif et désabusé. Celui-ci est témoin d’une agression dans une épicerie et permet l’arrestation d’un des voleurs, Victor, un adolescent de 14 ans. Ému par la situation de ce jeune Rom, Vincent/Jacques décide de l’aider à retrouver le droit chemin. « Le film aborde avec sensibilité la question du deuil, de la filiation et de la transmission, avec en arrière-plan la question sociale de l’accueil des Roms, de leurs conditions de vie, de la violence qui s’exerce parfois sur les enfants, traitée ici avec justesse, sans caricature, et sans pathos », écrit, enthousiaste, le critique de Franceinfo Culture. Les premiers spectateurs, eux, s’ennuient profondément et tiennent à le faire savoir sur le site d’AlloCiné : « Film dégoulinant de bons sentiments » ; « On baille d’ennui devant un Vincent Lindon se plaisant à passer le costume d’un rôle qui lui est désormais familier : celui du mâle blanc d’âge mûr qui tout à la fois porte sur ses épaules le poids de la culpabilité de notre système injuste, capitaliste, postcolonial, refuse de se laisser broyer et puise dans les forces qui lui restent le ressort d’une juste colère. » Résultat : un flop. 121 000 entrées seulement.

Un documentaire à venir sur arte

2025. À partir du 22 janvier, l’on pourra voir Vincent Lindon dans le rôle d’un cheminot, veuf et père de deux garçons dont l’un est attiré par un… groupuscule d’extrême droite. Sur France Inter, Sonia Devillers a reçu l’acteur pour parler du film des sœurs Coulin, Jouer avec le feu. Ensemble, ils ont évoqué cette « jeunesse qui s’enfonce dans le rejet de l’autre » en réussissant à ne convoquer à la barre des accusés que celle qui finirait dans les bras de l’extrême droite radicalisée « façon crâne rasé et croix celtique ». Pourtant, la probabilité de voir un fils d’ouvrier attiré par un groupuscule raciste et violent d’extrême droite est aujourd’hui infiniment inférieure à celle de voir un fils de bobos aisés verser dans l’extrême gauche intolérante, furieusement woke, décolonialiste ou antisémite. La radicalisation d’une certaine jeunesse enrôlée dans des associations progressistes ou écologistes et les mouvements politiques d’extrême gauche, est d’un tout autre niveau, tant en quantité qu’en termes d’agressivité et de violence, que celle concernant les rares jeunes gens finissant dans des groupuscules d’extrême droite – pour lesquels je n’ai aucune sympathie, suis-je obligé de préciser. Vincent Lindon accepterait-il de jouer le rôle d’un cadre supérieur socialiste ou d’un enseignant mélenchoniste dont le fils se retrouve dans un groupuscule hyper-violent d’extrême gauche, genre La Jeune Garde lyonnaise, ou au sein d’un syndicat d’enseignants d’extrême gauche préconisant d’organiser des réunions racistes « non-mixtes » (sans Blancs), ou dans une association écologiste d’extrême gauche prête à toutes les exactions pour voir aboutir son projet totalitaire, ou dans les rangs d’un mouvement politique d’extrême gauche « antisioniste » ? Son talent d’acteur n’étant plus à démontrer, il trouverait là un rôle à sa mesure et le moyen d’élargir sa palette en rendant artistiquement compte d’une réalité qui semble lui échapper…

Après les films sur les gentils migrants franchissant allègrement nos frontières ou les méchants Français dérivant lamentablement vers l’extrême droite, devons-nous nous attendre à une avalanche de films ou de séries « revisitant » des œuvres classiques afin de mettre en valeur cette partie de l’humanité qui vit depuis la nuit des temps sous le joug du patriarcat et de la domination masculine, comme dirait Laure Adler ? Le 22 janvier prochain, sortira en effet sur nos écrans un film intitulé Toutes pour une. Synopsis : « Quand Sara, jeune fille en fuite, découvre que les Trois Mousquetaires qui protègent la Reine de France sont en réalité des femmes, elle décide de partir avec elles et de suivre leur exemple : se transformer pour être libre, se transformer pour être soi… » Ça donne envie, non ? Plus tard dans l’année, TF1 proposera une série dans laquelle la productrice et actrice Audrey Fleurot sera… La Comtesse de Monte-Cristo. Faut-il craindre une nouvelle adaptation des Misérables avec une Jeanne Valjean confrontée aux Thénardières et à la redoutable Javerte ? Oui, peut-être, un jour, mais pas tout de suite… une nouvelle adaptation, fidèle au roman de Victor Hugo, doit d’abord débarquer dans les salles de cinéma fin 2025. Et devinez qui tiendra le rôle de Jean Valjean. Vincent Lindon, bien entendu [1]. Avant cela, l’acteur « se dévoilera dans un documentaire à son image, passionnant portrait en forme d’introspection sur le métier d’acteur et la célébrité, sa vie intérieure angoissée, ses souvenirs d’enfant mal aimé », nous prévient-on sur le site d’Arte. Je crains le pire. Et j’affirme que, dans ce domaine aussi, c’était mieux avant. La preuve : sur Madelen, le site d’archives de l’INA, il est possible de voir et revoir, entre autres choses passionnantes, l’émission Les Monstres sacrés regroupant des extraits d’interviews de Michel Simon, Arletty, Pierre Brasseur, Fernandel, Bourvil (interviewé joyeusement, alors qu’il est en cure à Contrexéville, sous un jet d’eau de source ou lors d’une séance de massage), Michèle Morgan, Jean Gabin, Lino Ventura (entretien risqué : le journaliste interrompt l’acteur en train de dévorer une assiette de charcuterie sur le zinc d’un bistrot), Danielle Darrieux, etc. Quel plaisir d’écouter ces artistes renommés raconter simplement, parfois avec humour, souvent avec pudeur, sans jamais se prendre au sérieux, un souvenir, une rencontre décisive, une anecdote de tournage, une scène de vie, sans se croire obligés de donner ne serait-ce qu’une leçon de morale ou de politique. Mais ça, c’était avant [2]


[1] En 2020, en pleine crise sanitaire, Vincent Lindon a proposé que les plus riches de nos compatriotes contribuent exceptionnellement au redressement de l’économie française et à la lutte contre les inégalités en payant un nouvel impôt baptisé « taxe Jean Valjean ».

[2] Dans un entretien donné récemment à la chaîne Public Sénat, l’acteur Jean-Pierre Daroussin est parvenu à condenser dans une seule phrase toute la morale niaiseuse des artistes gauchisants : « La gauche tend à chercher une morale, une éthique du lien, à considérer qu’une société ne doit pas être faite de ce qui nous sépare mais doit être faite de ce qui nous relie, et donc à chercher des idées et à ne pas rejeter l’autre. » Après avoir entendu ça, histoire de me désinfecter les oreilles, j’ai réécouté Jean Rochefort dans l’émission À voix nue podcastable sur France Culture. Un pur bonheur.