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Quand l’union de la gauche tourne à la relation toxique

Quatre élus du Parti socialiste ont été légèrement blessés hier, M. Retailleau dénonce des attaques "absolument lamentables" et "inacceptables"


Quand l’union de la gauche tourne à la relation toxique
Le député socialiste de l'Essonne Jérôme Guedj, Paris, 1er mai 2025 © Franck Derouda/SIPA

1er Mai. Boulevard de l’Hôpital à Paris, sous les sifflets et les noms d’oiseaux, le Parti socialiste a une fois de plus goûté à sa popularité déclinante: Jérôme Guedj a dû encore un fois fuir une manif, évincé par une foule peu nostalgique des années Hollande. Les slogans bien sentis («collabos», «pourris», ou encore le grand classique «tout le monde déteste le PS») ont rythmé un quart d’heure de défoulement verbal, avant que des manifestants masqués n’ajoutent une touche plus physique à cette drôle d’ambiance islamo-gauchiste – savamment entretenue par LFI.


A l’origine, le 1er mai était une journée de grève et de manifestation afin de réduire la durée du travail à 8h par jour. Une fois ce progrès social obtenu, la journée est devenue une journée de célébration des luttes du mouvement ouvrier. Mais le 1er mai 2025 n’a plus rien à voir avec cette histoire.

Deux gauches vraiment irréconciliables

De rassemblement des travailleurs, il s’est transformé en happening gauchiste. Seul problème, l’ambiance n’était pas vraiment à la fête, plutôt au règlement de comptes et ce à quoi la France a assisté montre que le diagnostic de Manuel Valls au sujet des deux gauches irréconciliables est juste. Encore que le terme « d’irréconciliables » est discutable. « Incompatibles » serait plus exact car même si elles se haïssent, elles se réconcilient souvent quand vient le temps des élections. Mais avec l’agression de ses militants par des gauchistes déchaînés, le PS va devoir faire des choix. A-t-il l’estomac d’un doberman, capable d’avaler les couleuvres sans même les mâcher ou lui reste-t-il quelque dignité et est-il capable de rompre avec LFI, prenant sa perte au passage ?

Il faut dire que ce 1er mai a été révélateur de la trahison par l’ensemble de la gauche du monde du travail. Manifestement, celui-ci n’intéresse plus ni les syndicats, ni les partis. Le 1er mai a donc été transformé en un énième rassemblement « antiraciste et antifasciste » où l’antisémitisme se porte décomplexé et où les antifas agressent ceux qui ne leur plaisent pas et s’en vantent sur les réseaux. Loin des défilés familiaux et conviviaux qu’étaient encore les 1er mai il y a une dizaine d’années, celui-ci grouillait de drapeaux palestiniens, de keffieh, de drapeaux portant des inscriptions en arabe et de black blocks. Certains slogans appelaient à casser du flic, certains manifestants n’étaient pas loin de l’appel à la sédition et l’antisémitisme de LFI s’est une nouvelle fois manifesté à l’égard de Jerôme Guedj ; le député a encore une fois dû être exfiltré du défilé sous les menaces et les insultes. Jérôme Guedj est un caillou dans la chaussure de LFI. Pensez donc, non seulement il est Juif mais il a réussi à se faire élire en refusant l’alliance avec LFI. C’est un homme intègre et courageux, le seul à avoir choisi la voie escarpée de l’honneur et il ne l’a pas payé d’un échec électoral. Il montre qu’une autre gauche, non totalitaire, existe encore. Même embryonnaire. Il est la mauvaise conscience de la gauche vassalisée qu’incarne Olivier Faure et du proxi de LFI qu’est devenu EELV.

Si chez les socialistes, on ne peut décemment tirer sur ses propres troupes, surtout quand il en reste peu, chez EELV on ne se gêne pas pour transformer une exfiltration liée au violent antisémitisme du cortège, en « provocation » de la part de l’élu. Ainsi Marine Tondelier, interrogé sur RTL par Yves Calvi refuse de répondre à la question « Est-ce-que l’on peut parler d’un antisémitisme de gauche ? » lorsqu’il évoque les violences réitérées à l’égard de Jérôme Guedj (l’élu avait déjà dû être exfiltré de la manifestation contre « l’islamophobie » organisée après le meurtre d’Aboubakar Cissé dans une mosquée) et pour se sortir de ce mauvais pas, elle rend Jerôme Guedj responsable de son agression : il a provoqué les manifestants par sa présence et l’intérêt que lui portent les journalistes.

Fachos de gauche

La violence à l’égard de Jerôme Guedj donnait déjà le ton, mais elle va encore monter d’un cran puisque des élus socialistes qui tenaient un point fixe, un stand sur le trajet de la manifestation, vont être également victimes de violence et leur stand démonté par une foule haineuse. Des militants ont été blessés et tous sont, à juste titre, choqués. Dans cette foule radicalisée et brutale se pressent les nouveaux symboles qui deviennent les identifiants des manifestation de gauche : les symboles qu’utilisent les Frères musulmans pour manipuler la rue arabe, les traditionnels keffieh, drapeaux palestiniens. Aux militants islamisés se joignent les nervis dits « antifas » et les black blocks… Leur présence est toujours synonyme de danger et de débordements, leur union déclenche les passages à l’acte les plus dangereux. Cela n’a pas failli une fois de plus. A voir les images, on se dit que si l’islamismo-gauchisme n’existe pas, c’est fou le nombre de rejetons qu’il a produit. Certes ceux-ci sont lourdement tarés, mais de plus en plus décomplexés et comme ils ne répondent jamais de leurs actes, l’escalade devrait se poursuivre en attendant le prochain drame qui n’arrêtera rien. Et ce n’est une bonne nouvelle pour personne.

Bien entendu le PS a réagi, par la voix de son Premier secrétaire, le metteur en œuvre de la stratégie d’alliance qui vaut aux socialistes d’être traités, au mieux comme des serpillières, au pire comme des traîtres par LFI. Il déplore « la violence de pratiques qui ne servent aucune cause et détruisent les combats communs ». Emma Rafowitz, l’eurodéputée PS a dénoncé dans un tweet le fait que « des violents aux méthodes de fachos nous ont insultés, attaqués, frappés ». Le même jour sur BFMTV, elle aura un échange très tendu avec Manon Aubry, montrant qu’elle attribue à LFI le climat de brutalisation qui a entraîné ces attaques. Mais c’est Ilan Gabet qui parle le mieux de la position de LFI vis-à-vis de ses dominions : « Le parti socialiste, caution du gouvernement et de sa politique antisociale et raciste se fait virer de la manifestation parisienne ». Puis il écrit que « s’il ne cautionne pas ces violences, il les comprend ». Enfin Julien Dray commence à mettre des mots sur ce qui s’est passé : « Ceux qui ont attaqué les socialistes ce premier mai ne sont pas quelques blacks blocks égarés… Les images montrent une extrême gauche radicale qui se caractérise aussi par son antisémitisme affiché. »

Morale à géométrie très variable

Tous omettent néanmoins la présence discrète des Frères musulmans. La famille d’Aboubakar Cissé a été prise en main par les mêmes sbires qui ont tenté de faire de la famille d’Adama Traoré des icônes de la lutte contre « le racisme d’état ». C’est le même processus qui est ici à l’œuvre avec l’affaire de la mosquée de la Grand-Combe. Hélas, si le meurtre du jeune Malien est tragique, l’affaire est bien plus complexe que ce qu’espéraient les islamogauchistes et il va être compliqué d’en faire la révélation d’un suprémacisme blanc qui avancerait dans l’ombre. Mais son instrumentalisation, alors que l’histoire est récente, permettait d’exciter la haine, le ressentiment et l’esprit de vengeance, elle permet de chauffer à blanc les manifestants. Il suffit ensuite d’attendre le passage à l’acte.

Le PS en a été victime. On comprend qu’il en souffre, mais reconnaissons-le, le soutien qu’il reçoit est tempéré par la conscience qu’il fait partie du problème. En effet, le PS ne fait ici que déplorer les conséquences dont il chérit les causes. Les mêmes ont appelé à faire barrage à un fascisme fantasmé lors des dernières législatives, pour au final s’allier avec des gens aux méthodes fascistes assumées, à l’antisémitisme décomplexé et à la violence désinhibée. Le NFP a réuni dans le même lit LFI, EELV, le PC et le PS et nul n’ignorait la dérive de LFI. Mais leur intérêt électoral a eu raison de leur morale intransigeante surtout à l’égard d’autrui et de leur dignité. Le PS actuel n’a aucune ligne rouge et après le crime contre l’humanité commis le 7-Octobre, il n’a aucun mal à s’allier avec ceux qui ont qualifié les monstres du Hamas de «résistants », qui ne voient aucun inconvénient à ce que l’on appelle à l’intifada dans les rues de Paris et qui lancent de fausses accusations de génocide à l’égard d’Israël pour semer la haine des Juifs. Le PS a semé le vent, il vient de se prendre les premières bourrasques de la tempête et au lieu de nommer explicitement ceux qui l’agressent, il leur reproche de faire monter l’extrême-droite et d’être au final les agents électoraux de Jordan Bardella. Insulte suprême à gauche. Pourtant, gageons que la rupture n’est pas consommée et que bientôt le PS posera main dans la main aux côtés de LFI, contribuant ainsi, si on suit leur raisonnement vis-à-vis du comportement du parti de M. Mélenchon, à faire monter le RN alors qu’ils justifient leur alliance par la nécessité de le combattre. Cela devient kafkaïen.

La preuve de la future reddition ? Ce tweet du 30 avril de Marine Tondelier. Elle brandissait un sondage sur la présidentielle de 2027 accompagné de ce message : « Retenez bien ce sondage, unie la gauche accède au second tour. Notre électorat le demande alors qu’est-ce-qu’on attend ? ». Cela explique pourquoi les formulations des tweets des leaders socialistes sont alambiqués. On parle de « violents », « de haineux » mais jamais le parti qui cultive cette violence politique n’est désigné. Jamais n’est dit ce que tout le monde sait : l’extrême gauche aujourd’hui c’est LFI et elle se comporte avec une violence bien plus visible et affichée que celle qu’elle reproche à l’extrême droite. Et il y a une raison pour que les socialistes se montrent si magnanimes : ils savent qu’ils s’allieront à nouveau avec LFI car ils n’ont presque plus d’électorat qui leur appartient en propre. La rupture des partis de gauche avec le monde du travail les a mis dans les mains des islamo-gauchistes et c’est LFI qui est leur truchement. Ce sont eux qui tiennent le « vote musulman », tant recherché par les partis de gauche. Non qu’ils tiennent le vote de toutes les personnes d’origine arabo-musulmane, mais ils ont une forte influence sur les esprits les plus faibles dont l’identité repose sur la religion et ils sont majoritaires dans cette jeunesse. Aujourd’hui c’est ce clientélisme-là qui fait le fond de sauce électoral de la gauche. Voilà pourquoi le PS ne mettra pas fin à cette relation toxique au niveau national. Il peut encore prendre ce risque aux municipales mais il ira à Canossa pour la présidentielle et les législatives – encore et encore. Pour la simple raison que retrouver le chemin de l’honneur, c’est aujourd’hui prendre le risque de la disparition, il choisira donc probablement de rester le supplétif honteux d’un parti brutal et qui incline vers le totalitarisme. Il disparaitra dans la honte mais il aura eu « cinq minutes de plus, M. Le Bourreau ».




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Ancienne conseillère régionale PS d'Île de France et cofondatrice, avec Fatiha Boudjahlat, du mouvement citoyen Viv(r)e la République, Céline Pina est essayiste et chroniqueuse. Dernier essai: "Ces biens essentiels" (Bouquins, 2021)

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