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Waly Dia, la répétition sans comique

Waly Dia face à Marion Maréchal: quand la mouche asticote le coche


Waly Dia, la répétition sans comique
L'acteur Waly Dia. Image : Capture d'écran France 2

Invité à échanger avec Marion Maréchal (Reconquête), le comique de France Inter n’en démord pas: c’est une raciste obsessionnelle


N’a pas l’insomnie féconde qui veut. Pour la Nuit de Feu où Pascal découvrit « qu’il est raisonnable de croire », ou la Nuit de Gênes qui permit à Valéry de « répudier les idoles » de la littérature, de l’amour et de l’imprécision afin de vouer son existence à « la vie de l’esprit », combien de nuits perdues, pour nous autres médiocres, condamnés à nous vautrer dans le pire pour amadouer un sommeil fuyant ? Insomniaque, on est prêt à tout, même à suivre, avec un masochisme qu’on ne se connaissait pas, n’importe quelle émission de « l’odieux -visuel », et à subir le « sévice public », pour reprendre la nomenclature savoureuse de Gilles-William Goldnadel. 

C’est ainsi que le 4 février, à 23H 25, je me suis retrouvée devant « Quelle Époque ! » Ce divertissement est vendu comme un « talk-show spectaculaire, drôle et festif, une émission de société et de divertissement, qui raconte notre époque et interroge notre société. » Why not ? Après tout… Toutefois, l’émission est animée par Léa Salamé, et y intervient, ce qui n’augure rien de bon, non plus, Christophe Dechavanne flanqué des subtils humoristes Philippe Caverivière et Paul de Saint Sernin. 

L’heure du crime

Ce petit monde, complice, communie dans la bien-pensance autour de conviés inféodés à leurs nobles idées. L’ensemble constitue un tribunal inquisitorial qui cloue au pilori « l’invité de minuit », à savoir : « un homme ou une femme politique qui fait l’actualité. » 


Ce soir-là, c’est Marion Maréchal qui se jetait dans l’arène. Pour tester son endurance face à l’adversité et à l’hostilité ? Son Koh-Lanta personnel ? À moins que, dans un moment d’égarement, elle ne se soit prise pour l’âne des Animaux malades de la Peste, et ait décidé de se sacrifier « au céleste courroux » pour obtenir « la guérison commune ». Quoi qu’il en soit, c’est bien « haro sur le baudet » (Marion) qu’on hurla. 

Cette séance d’exorcisme, m’a permis de découvrir l’un de nos humoristes les plus prometteurs, Waly Dia. Ce jeune talent, s’est ici conduit comme la véritable mouche d’un coche qu’aurait été Marion. Omniprésent, il vrombissait toutes ailes déployées contre « l’extrême droite » et le « racisme ». C’est la recension de ce grand moment télévisuel qui insistera sur la prestation de ce petit moustique que je vous propose ici.

Avant la mise au pilori de Marion Maréchal, la démoniaque invitée de minuit, imaginez un plateau d’invités suintant le Bien comme des saucisses sur un grill. Parmi eux, notre Waly Dia, Marlène Schiappa et Philippe Besson. Tous se congratulaient, sourires larges, tout en dents, œillades énamourées échangées : célébration de la fraternité, de l’élection, autosatisfaction, morgue et connivence.

Debbouze, Vanhoenacker: les plus grands voient en Dia leur semblable

Le jeune comique fut présenté à l’assemblée par Léa Salamé. On apprit que Charline Vanhoenacker l’avait surnommé : « la mitraillette » et que Jamel Debbouze le voyait comme « un mélange de Will Smith et d’une crise d’épilepsie ». La présentatrice poursuivit l’éloge du jeune prodige, précisant qu’il n’avait pas peur de toucher à tous les sujets épineux. Et de citer : « l’islamisme », « le féminisme », « l’antisémitisme », « la pédocriminalité », « l’homophobie », « la pédophilie ». Là, ce fut le moment d’envoyer un extrait du spectacle de l’humoriste. Tout naturellement, le choix se porta sur un bon mot à propos du curé pédophile : « Y’en a à qui ça rappelle des souvenirs douloureux du catéchisme ? Le cliché du curé qui se tape des gamins, faut arrêter ? Bah promis, quand ils arrêtent, j’arrête. » Un moment de franche rigolade, s’il en est. Le jeune prodige précisa ensuite : ce qu’il aimait, c’était : « tirer les gens sur les sujets les plus compliqués et s’amuser avec. » On l’a vu à l’œuvre avec Marion Maréchal. Elle-même l’a constaté, le bougre excelle dans le comique de répétition.

Revenons au moment où notre amusant apprit que la vice-présidente de Reconquête participerait à l’émission. « C’est pas vrai, s’est-il écrié, on va parler d’immigration avec Marion Maréchal ? Pardon, on me dit rien, à moi. Mais vous avez besoin d’avoir son avis sur ce qu’elle pense de l’immigration ? », poursuivit le jeune talent, désabusé. « Ici on ose », précisa Léa Salamé. « Peut-être, elle a changé d’avis, peut- être maintenant, elle veut plein de Noirs et d’Arabes en France ? », tenta Waly, pour se rassurer… Christophe Dechavanne intervint : « On ne peut pas être tous contre elle. » Ce à quoi, le sage Philippe Besson rétorqua : « Oh si ! On peut ». Le jeune troubadour pointa alors la place vacante du plateau et nous gratifia d’une vanne fine : « Au niveau du plan de table, c’est là ? », trait d’esprit accueilli par des applaudissements nourris…

La démoniaque Marion fit enfin son entrée, sur les notes du Thriller de Michael Jackson et Léa Salamé fit les présentations: « Étoile montante de la politique, elle a marqué la présidentielle en choisissant Éric Zemmour plutôt que sa tante, Marine Le Pen. Un an après a-t-elle des regrets ? Comment peut-elle rebondir ? Sera-t-elle candidate aux Européennes ? » Le ton était, d’emblée, donné pour un échange de haute volée. On n’a pas été déçu.

Maréchal victime de mansplaining

Rien n’aura été épargné à la jeune femme, essorée par la pensée unique, ni les blagues salaces ni le coupage de parole. Sous couvert d’un simulacre d’échange démocratique, on a assisté en direct à l’habituelle humiliation et à la mise à mort sociale orchestrée de l’une des représentantes du Mal. Marlène Schiappa plastronnait, confite de suffisance et le jeune humoriste, auquel on va continuer à s’intéresser, caution de gauche par excellence, attaquait Marion Maréchal aussi finement que Christian de Neuvilette parlant de son nez à Cyrano.

La vice-présidente de Reconquête le précisa d’abord : participer à une émission comme « Quelle Époque » était difficile pour elle car il fallait allier humour et politique, exercice périlleux. Elle s’adressa à Waly Dia, souhaitant étayer son propos : « Vous, vous êtes sur le terrain de l’humour… » Mais, elle n’eut malheureusement pas le temps de développer. La « mitraillette » arrosa : « Et vous, vous êtes sur le terrain du racisme, c’est un autre truc. » 

Les attaques fusèrent de tous côtés. Bien sûr, on entraîna Marion Maréchal sur le « Grand Remplacement » et un Philippe Besson grimaçant lui cracha toute sa bonne haine au visage : « Il n’y pas lieu de s’inquiéter avant 50, 60, 70 ans. Le « Grand Remplacement » n’existe pas, sauf dans votre esprit et dans vos fantasmes. » Besson convulsait : « Vous les voyez où, dans la rue, les 50% d’Arabes et de Noirs ! » Waly, inspiré, hurla alors, empoignant le romancier : « Mais, je suis là ! » Marlène Schiappa, docte et posée, pointa à son tour l’indigence politique de Marion Maréchal ainsi que sa sécheresse de cœur. Dechavanne renchérit. Enfin, Léa Salamé conseilla à la jeune femme de prendre un coach pour mener sa carrière. 

Notre Waly décida alors que le dénouement du show mettrait en lumière sa petite personne. Il posa donc à l’encan la question suivante : « De cette interview, on a appris quoi ? » Schiappa finement précisa : « On a appris qu’on ne dit plus « extrême droite », mais « droite civisilationnelle ». Dia, poursuivit : « Qu’est-ce que je pense de l’extrême droite qui n’existe plus ? Ah, je ne sais pas, on est en face de gens qui rabâchent toujours les mêmes trucs. On parlait des retraites, on arrive sur l’immigration. On parle de l’état des hôpitaux, on arrive sur l’immigration. C’est une obsession (…) On est quand même face à des gens qui exploitent le filon depuis très longtemps, parce que c’est un business, cette politique, ces partis. » 

Sauvez Waly, faites-la sortir du plateau !

Marion, mise à rude épreuve par les picadors qui s’acharnaient sur elle depuis le début de l’émission, se départit ici fugacement de sa « ligne Cyrano », cédant, on le déplore, à un léger agacement. « Je ne me lève pas le matin en me disant : je me fais du blé sur le dos des Français. Faites des blagues, ça marchera mieux. Quoi que… » Toujours à l’affut, Madame Salamé pointa la violence insoutenable de la réponse de Marion : « Là, c’est méprisant. » Et notre jeune coq renchérit : « En tout cas, on remarque que j’ai énormément de liberté d’expression. »

« Qu’est-ce qu’il vous a dit de violent, là ? » poursuivit Léa, tout à la défense de son poulain. « Que je suis d’extrême droite et obsessionnelle. » En effet, pas de quoi fouetter un chat ! Quant à notre coquelet de combat, tous ergots sortis, il poursuivit, variant l’argumentaire : « Marion Maréchal n’est pas d’extrême droite, là, celle-là, je vais dormir dessus. »

Cette soirée placée sous le signe de la tolérance et de l’échange bienveillant, s’acheva quand Marlène Schiappa demanda enfin à Marion Maréchal si elle soutiendrait sa fille, amoureuse d’un migrant sans papier. « On va la perdre ! », s’exclama le comique. Le jeune drôle conclut le débat sur ces propos intellectuellement imparables : « J’ai le droit de décider que vous êtes une raciste. » Quant à nous, jeune puceau, nous usons, nous aussi, de notre droit imprescriptible à affirmer que vous êtes un peu niais, à jouer ainsi les mouches du coche, dans une répétition exempte de tout comique. Aussi, je vous renvoie à la lecture de La Fontaine : 

Ainsi certaines gens, faisant les empressés, 
S’introduisent dans les affaires : 
Ils font partout les nécessaires, 
Et, partout importuns, devraient être chassés. 

Le coche et la Mouche, Livre VII, fable 9, La Fontaine.




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est professeur de Lettres modernes

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