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PSL: McCarthy reviens, ils sont devenus fous!

Qu'est-ce que le Parti pour le socialisme et la libération, ce mouvement marginal qui récuse désormais tout lien avec le tueur de Washington?


PSL: McCarthy reviens, ils sont devenus fous!
Des journalistes et des voitures de police entourent les pâtés de maisons autour du Musée juif de la capitale américaine le matin suivant la fusillade où Yaron Lischinsky et Sarah Milgrim, deux membres du personnel de l'ambassade d'Israël, ont été tués en quittant un événement organisé par l'American Jewish Committee à Washington, le jeudi 22 mai 2025. Le tireur, Elias Rodriguez, âgé de 30 ans, s'est rendu lui-même et a crié "Libérez, libérez la Palestine" lors de son arrestation © UPI/Newscom/SIPA

L’assassinat de deux diplomates israéliens à Washington, hier, a braqué les projecteurs sur une formation politique jusque-là marginale aux États-Unis : le Parti pour le socialisme et la libération, plus connu sous l’acronyme PSL.


Le tueur présumé de Washington, Elias Rodriguez, a été arrêté sur place alors qu’il criait « Free Palestine » et « Intifada revolution », un keffieh rouge sur les épaules. Très vite, les enquêteurs ont mis en lumière un élément biographique troublant : Rodriguez avait été brièvement affilié au PSL en 2017. Bien que le parti ait depuis publié un communiqué condamnant « toute attaque antisémite » et niant tout lien actuel avec lui, cette révélation a suffi à inscrire le nom du PSL au cœur du débat public outre-Atlantique.

Rhétorique radicale

La présence de ce petit parti révolutionnaire dans l’actualité d’un fait aussi tragique que symbolique pose une question essentielle : jusqu’à quel point une organisation politique, même marginale, peut-elle contribuer à façonner un climat idéologique propice à l’extrémisme ? Pour comprendre les enjeux, il faut d’abord saisir ce qu’est réellement le PSL, d’où il vient et quelle est sa vision du monde.

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Fondé en 2004 à la suite d’une scission du Workers World Party, le PSL se revendique explicitement du marxisme-léninisme. Il rejette le capitalisme sous toutes ses formes et appelle à une transformation révolutionnaire de la société américaine : nationalisation des secteurs stratégiques, économie planifiée, suppression de la police telle qu’elle existe, fin du système carcéral et retrait complet des États-Unis de toutes les interventions militaires à l’étranger. Il se distingue aussi par une rhétorique radicale sur les questions raciales, sociales et internationales. Il ne participe que très marginalement aux élections, recueillant des scores symboliques, mais agit intensément dans les mouvements de rue, les manifestations pro-palestiniennes, les mobilisations antiracistes ou anti-impérialistes.

C’est sur la question israélo-palestinienne que le PSL se montre le plus tranchant. Il ne se contente pas de critiquer la politique de l’État d’Israël qu’il qualifie de régime colonial et d’apartheid, il nie sa légitimité et soutient ouvertement la résistance palestinienne, y compris dans ses formes armées. Le PSL exprime sa solidarité avec le Hamas, le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et d’autres groupes que la plupart des pays occidentaux considèrent comme terroristes. Il appelle à un boycott total d’Israël, au démantèlement de l’État sioniste et à l’instauration d’un État unique, laïc, sur l’ensemble du territoire de la Palestine historique.

Des paroles et des actes

Ce positionnement, à rebours du consensus politique américain, place le PSL en porte-à-faux avec la gauche institutionnelle, y compris avec des organisations comme Democratic Socialists of America (DSA), dont il dénonce la tiédeur et le réformisme. Il se veut le porte-voix d’un antisionisme radical qui ne fait pas la distinction entre critique d’un gouvernement et négation de la légitimité d’un État. Pour ses partisans, cette intransigeance est le gage de sa cohérence idéologique. Pour ses détracteurs, elle flirte dangereusement avec l’essentialisation, voire la haine.

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Dans ce contexte, l’affaire Elias Rodriguez agit comme un révélateur. Le suspect n’était plus membre du PSL depuis plusieurs années. Rien ne prouve que son geste ait été commandité, inspiré ou approuvé par le parti. Mais la question n’est pas seulement de savoir qui donne les ordres, mais aussi qui alimente un discours où la violence est normalisée, et où l’adversaire est constamment présenté comme intrinsèquement illégitime. Entre dénonciation politique et incitation symbolique, la frontière peut devenir poreuse, surtout dans des contextes de polarisation extrême comme celui que connaît actuellement la société américaine.

Le PSL ne détient aucun siège, ne participe à aucune coalition parlementaire, et ses candidats ne recueillent qu’une poignée de voix. Pourtant, par son omniprésence dans les manifestations, sa diffusion idéologique sur les réseaux sociaux, et sa capacité à incarner un radicalisme sans compromis, il occupe une place symbolique bien plus grande que son poids électoral. Il cristallise à la fois les espoirs d’une gauche révolutionnaire et les inquiétudes d’une société confrontée à la montée de discours de rupture.

L’assassinat de Washington n’a pas été revendiqué, il n’est pas « revendicable ». Mais il résonne dans un espace idéologique où certains discours, légaux, jettent les bases d’une conflictualité sans limites. Le cas du PSL rappelle que les partis minoritaires peuvent, eux aussi, produire des effets majeurs. Non par le pouvoir qu’ils exercent, mais par les imaginaires qu’ils forgent et leur capacité de mobiliser et radicaliser des jeunes.



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est historien et directeur de la publication de Causeur.

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