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École: François Civil ne sait pas lutter contre l’incivilité!

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Pas de vagues, film de Teddy Lussi-Modeste pourra avantageusement être montré dans les instituts de formation des maîtres, non comme document sur la dureté de la condition professorale, mais comme un parfait catalogue de ce qu’un jeune professeur débutant ne doit surtout pas faire. Ce personnage, joué par Fançois Civil, accumule les maladresses.


Julien copine volontiers avec ses élèves, c’est excusable, mais dans la scène où il offre des chich-kebab, il semble adopter un clan de la classe et ignorer l’autre, c’est impardonnable. Pour garder le respect de tous, il faut planer au-dessus des passions et des affects de ses subordonnés, comme dans tous les métiers d’autorité. Le copinage est possible, à condition de respecter une période initiale de froideur et de distance. Le vieux professeur de pédagogie de l’Université de Strasbourg qui m’a dispensé, à moi et aux autres agrégatifs il y a bien longtemps, les quelques heures de conseils qui étaient un viatique restreint mais suffisant disait : deux mois au début de l’année sans un seul sourire, trois mois sans un seul rire, ensuite vous pourrez danser sur les tables, les élèves garderont pour vous le plus profond respect. Je n’ai pas dansé sur les tables mais j’ai ajouté à ces préceptes le vouvoiement, même avec des sixièmes. Moyennant quoi j’ai été un prof heureux avec des élèves heureux. Enfin, ils avaient l’air.

Julien et Julien Sorel

Deuxième erreur de Julien, celle-là est une erreur technique de latiniste insuffisant. Patatras, je vais rallumer la guerre entre lettres classiques et lettres modernes ! Il explique séduire par se-ducere ramener à soi, conduire à soi. Faux, la véritable origine de se est un préfixe du vieux latin qui indique la séparation, l’éloignement. On le trouve dans justement séparer et son doublet sevrer, dans sécession et quelques autres mots. Ce préfixe a disparu, remplacé en latin classique par ex. Séduire a donc une étymologie beaucoup plus amusante et imagée, c’est emmener à l’écart, là, juste derrière ce buisson bien touffu et ce ne sera pas pour enfiler des perles.

Je dis cela par plaisir d’étaler ma cuistrerie mais surtout parce que la séduction joue un grand rôle dans la littérature en général et particulièrement dans la littérature française. Et aussi parce qu’il y a deux manières d’entraîner une femme ou tout objet de son désir derrière le buisson : de force, en la tirant par le bras, ou par le discours amoureux, plus trivialement appelé baratin. Force ou baratin, c’est toute la différence entre barbarie et civilisation.

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Julien fait étudier à ses élèves un grand poème de séduction, Mignonne, allons voir si la rose de Ronsard. Très bien. Les imbéciles seuls penseront que c’est vieillot, car le frémissement de désir qui parcourt le poème est sensible à tout adolescent même de nos jours. La rose est symbole de jeunesse, mais le professeur a le droit de suggérer le plus chastement possible qu’elle représente aussi le sexe féminin, comme dans beaucoup de chansons populaires de la vieille France. J’ai souvent fait étudier la merveilleuse scène de séduction de Madame de Rênal par Julien Sorel dans Le Rouge et le Noir de Stendhal. Une belle nuit d’été, le cœur d’un petit jeune homme qui bat très fort, il a décidé de prendre la main de la femme qu’il aime, mariée et supérieure à lui socialement, quand sonnera minuit. Prendre la main et non la traîner de force derrière un buisson. Deux actes qui ne sont équivalents que pour les délirantes de la culture du viol. L’heure de cours allait finir et pour une fois je m’adressais spécialement aux garçons de la classe, je leur disais que le séducteur a droit au mensonge, aux promesses mirifiques, mais jamais à la violence. Tout bénef, ils prenaient leur prof de français pour un tombeur de dames, ce qui était bon pour son prestige, et cet interdit de la violence pénétrait dans leur cortex. La littérature est essentiellement l’antiviolence, elle peut convertir en mots tous les conflits.

Le piège classique

Troisième erreur de ce jeune, gentil et séduisant professeur : voulant expliquer l‘astéisme, ce procédé stylistique qui fait semblant de blâmer pour faire en réalité un éloge paradoxal, il prend un exemple où il se met lui-même en scène faisant une déclaration d’amour par astéisme à l’une de ses élèves, la timide Leslie. On sent venir l’accident gravissime, le bus scolaire tombant dans un précipice avec cinquante élèves à bord, mais Julien fonce quand même dans le décor. Sa seule excuse est son besoin désespéré de proximité avec ses élèves. Comme tous les professeurs débutants, il pense qu’il va révolutionner la pédagogie par l’affection, et aucun vieux prof de Strasbourg ne l’a mis en garde contre ce panneau. La catastrophe est totale, Leslie, secrètement amoureuse du beau prof l’accuse de harcèlement sexuel, le grand frère s’en mêle et menace de mort le pauvre Julien, sa hiérarchie ne le soutient pas, ses collègues l’abandonnent, sa vie privée tourne en eau de boudin.

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C’est ici qu’intervient la quatrième erreur du film, celle-là n’est pas dans l’attitude du professeur mais dans le scénario et ses pudeurs. Pour ne pas fâcher l’une des “communautés” qui se partagent désormais la France, le grand frère, personnage fatal des tragédies de banlieue, est joué par un jeune homme parfaitement caucasien, d’allure skinhead. Il ne correspond pas du tout au physique de grand frère que statistiquement on s’attend à voir. On ne peut s’empêcher de penser au fameux clip de Julie Gayet contre le mariage forcé qui a été tourné dans une église avec des acteurs d’allure parfaitement souchienne. Ce triomphe du politiquement correct enlève beaucoup de crédibilité au film.

Dommage. Le professeur de français, à travers les œuvres qu’il fait découvrir, peut faire infiniment plus pour la laïcité et le vivre-ensemble que toutes les proclamations ministérielles ou les baroques “cours d’empathie”. Faisons notre Finkielkraut au petit pied, puisqu’aussi bien je me prénomme Alain : la littérature est salvatrice. J’ai souvent fait apprendre par cœur des tartines de Roméo et Juliette dans la traduction du fils de Victor Hugo, avec bien sûr la scène du balcon. Aucun adolescent n’y résiste, ils se glissent tous dans la peau des héros, ce n’est pas des tartines qu’ils apprenaient, c’était d’immenses sandwiches comme les sous-marins du Québec. La liberté de l’amour à l’occidentale ne peut que triompher à la longue des pressions communautaristes archaïques et de l’abaissement des femmes qu’elles véhiculent. Faire lire et apprendre Molière, et particulièrement L’école des Femmes, est un remède souverain contre le mépris qui les frappe dans des cultures nouvellement importées en Europe :  “Ah ! C’est que vous l’aimez, traîtresse ! – Oui je l’aime. – Et vous avez le front de le dire à moi-même ? – Et pourquoi, s’il est vrai, ne le dirais-je pas ?” Agnès et Arnolphe font rire, mais en douce ils occidentalisent la petite Tchètchène et le petit Afghan qui récitent assez bien leurs rôles, ma foi, malgré leur accent. Le garçon renonce au crime d’honneur qu’il devait accomplir ce soir sur le petit ami de sa sœur et il se promet de faire abandonner par ses frères ce projet barbare.

Mila, le retour d’une sacrée profane

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Mila “blasphème” encore : elle a “osé” s’acoquiner avec les féministes identitaires du collectif Némésis ! L’adolescente menacée par les islamistes réapparait dans les médias, et pense que la laïcité est morte à l’école. Alors que les autorités craignaient hier un attentat de Daech pendant PSG / Barça, un homme en djellaba tuait au couteau un Algérien à Bordeaux pour une histoire d’alcool.


Vous vous souvenez de Mila. Cette jeune fille a été le révélateur en 2020 non seulement de la lâcheté du gouvernement Macron, mais de l’absence d’humanité comme de l’absence de sens des responsabilités de beaucoup de politiques. Pour avoir usé de sa liberté d’expression et moqué le prophète principal de l’islam alors qu’elle recevait des insultes homophobes de la part d’un jeune musulman, cette adolescente de 16 ans avait subi un déferlement de haine sur les réseaux et reçu tellement de menaces que beaucoup ont pensé qu’elle ne survivrait pas au déchainement de violence islamiste dont elle faisait l’objet.

Critiquée pour le choix de son entourage actuel

Elle est à nouveau sous le feu des projecteurs pour avoir expliqué qu’on l’avait influencée, il y a quatre ans, pour la forcer à présenter ses excuses aux croyants sur le plateau de Quotidien. On peut comprendre ses conseillers de l’époque. Il s’agissait alors de sauver la jeune fille, les chances que les menaces de mort soient mises à exécution étaient élevées et Mila était encore influençable. Ce n’est pas ce qui est choquant dans cette histoire. En revanche, ce qui est inacceptable c’est la façon dont, à nouveau, certains politiques et journalistes font un procès à Mila car elle est proche notamment de l’association Némésis et des « milieux identitaires ». Outre que Mila est libre de faire ses choix, il se trouve que si la jeune fille est debout, digne et refuse de se soumettre, c’est à sa force intérieure qu’elle le doit, à son entourage familial et sans doute à son entourage militant – mais pas au soutien qu’aurait pourtant dû lui apporter le milieu politique et culturel. 

Mila aurait dû être le symbole de notre résistance face à la barbarie, nous aurions tous dû être un rempart pour elle. 

Cette affaire a été le symbole de notre lâcheté collective, de notre faiblesse et de nos reniements. Dans cette histoire, la liberté d’expression a perdu contre le blasphème, et la vie d’une jeune fille a été sacrifiée. Pour rien. Les islamistes n’ont cessé de gagner en puissance.

Sacrifiée par le pouvoir pour ne pas faire le jeu de l’extrême-droite

Car comment respecter ces politiques qui se sont tus ou qui se sont joints à la meute des intégristes ? Comment respecter des élus qui veulent le pouvoir et après l’avoir obtenu ne font pas leur travail et abandonnent aux islamistes une jeune fille de 16 ans, qui ne bafoue aucune loi et use de son droit ? Comment respecter des adultes qui sacrifient une enfant à leur confort, car les forces qui l’attaquent leur font peur ? C’est pourtant ce que le président de la République a fait. C’est pourtant ce que Nicole Belloubet, actuelle ministre de l’Éducation et à l’époque garde des Sceaux a fait. Elle en a même rajouté dans l’ignominie en attaquant gratuitement l’adolescente menacée de mort. Ségolène Royal a montré également l’étendue de son indifférence face aux violences pesant sur une jeune fille ; la gauche a été en dessous de tout, les associations féministes et LGBT n’ont même pas condamné les appels au viol et l’homophobie. À tous les niveaux du pouvoir, la lâcheté a été omniprésente. Et il y a une raison à cela. Politiques et associatifs avaient peur « de faire le jeu de l’extrême-droite » en désignant l’islam comme un facteur de violence et de déstabilisation politique.

Au nom de l’islam : police des mœurs et de la religion dans les lycées

Quatre ans après, on n’est pas sorti de ce piège stupide qui consiste à nier les offensives de l’islam politique, le sang qu’il fait couler, la violence et la mort que ses mœurs puritaines et inadaptées génèrent dans les quartiers où il règne en maître. Quatre ans après, l’influence des islamistes, faute d’être combattue, a encore augmenté. Mila parle de police des mœurs et de la religion dans les lycées, mais les témoignages se multiplient aussi au travail où des musulmans prosélytes et des islamistes font des remarques à ceux qui ne font pas le ramadan. Et maintenant ce sont de jeunes musulmans, pas assez réislamisés aux yeux des islamistes, qui sont victimes d’agressions, voire tués, car ils ne respectent pas la charia. La lâcheté n’a fait qu’augmenter le malheur public et le danger qui pèse sur toute la population. 

Alors franchement, voir des éditorialistes et des politiques venir faire un procès aujourd’hui à Mila parce qu’elle est proche du collectif Némésis est ridicule. Cette posture qui consiste à accrocher des cibles sur une personne qui ne doit rien au collectif, n’exerce pas de fonction de représentation et est déjà menacée, est irresponsable. Quelle est l’utilité d’une telle posture ? Comment peut-on essayer de se tailler un costume de vertu et de probité politique en dénonçant une jeune fille de 20 ans qui a déjà versé un lourd tribut à la lâcheté ?

Les choix de Mila, produit de l’abandon et de la médiocrité des politiques

La vérité devrait pourtant faire honte à tous ces petits commissaires politiques de bac à sable : si Mila a pris la main tendue des identitaires, c’est parce que ni le pouvoir ni la société ne se sont montré à la hauteur des enjeux. La jeune femme s’est sentie manipulée et abandonnée. Et elle l’a été. Influencée, elle a pu l’être par des gens sincères, qui géraient une situation d’urgence, fortement inflammable. En revanche, l’abandon des politiques, l’incapacité à trouver une solution qui montre la force de notre attachement à nos libertés publiques, la déscolarisation de Mila, l’incapacité à punir les lycéens qui l’avaient menacée dans son propre lycée, la complaisance manifestée à l’égard de ceux qui au nom de l’islam menacent de mort une adolescente de 16 ans : tout cela est inqualifiable et impardonnable. 

Le parcours de Mila s’explique d’abord et avant tout par la tragique médiocrité dont une partie du monde politique a fait preuve et par son incapacité à défendre un des fondamentaux de notre contrat social, la liberté de conscience. Une fois de plus, le parcours de la jeune fille est un révélateur de l’état du pays : si le RN ne cesse de monter dans les intentions de vote, ce n’est pas par adhésion à une dérive fascisante. Si c’était le cas, LFI, qui cumule dérapages antisémites, falsification historique, fascination pour la violence politique ou déshumanisation de l’adversaire serait au plus haut dans les intentions de vote… C’est même tout le contraire, l’ascension du RN s’explique par le conservatisme. Les Français veulent sauver leur modèle civilisationnel et social, leur système politique et leurs mœurs. C’est parce que, pour eux, leurs représentants actuels trahissent cette mission sacrée, qu’ils se tournent vers le RN. Au lieu d’en faire des gorges chaudes et de chercher des boucs émissaires à condamner, comme Mila, nos élites devraient plutôt retrouver le chemin de l’intérêt général et de l’utilité publique. Les Français pensent que les islamistes ne sont grands que parce que leurs élites sont à genoux. C’est pourquoi ils cherchent de nouveaux champions pour porter leurs couleurs. C’est cela que l’histoire de Mila raconte et que personne une fois de plus ne veut entendre.

Silence coupable

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Le Divin Chesterton

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À l’occasion de la parution de l’épatant Madame Chesterton (1869-1938), de Nancy Carpentier Brown (Téqui) et dans la série « Retour sur un géant du XXème siècle » : G. K. Chesterton – for ever.


« L’espèce humaine à laquelle appartiennent tant de mes lecteurs… »
G.K. Chesterton, Le Napoléon de Notting Hill

« Le progrès doit être autre chose qu’un parricide continuel »
G.K. Chesterton, Le Défenseur

« Le problème du communisme est qu’il tente de s’opposer au pickpocket en interdisant les poches »
G.K. Chesterton, Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste


Chesterton déconcerte, désoriente, désempare. Plus de cent livres publiés, une vie assez courte (1874-1936) – et tous les genres abordés : articles de journaux, romans (Un nommé Jeudi, Le Napoléon de Notting Hill), théâtre, poésie, philosophie, critique littéraire, critique d’art, économie (concepteur du distributisme), controverses religieuses et sociales (Hérétiques), voire littéraires avec ses alter ego, adversaires ou complices (H.G. Wells et G.B. Shaw en particulier), roman policier (Enquêtes du père Brown), essais d’inspiration catholique (L’Homme éternel, 1925, un de ses chefs d’œuvre).

Pour le comprendre – osons l’hypothèse tautologique – il faut, d’abord, l’aimer : « Quand on lit Chesterton, on se sent submergé par une extraordinaire impression de bonheur. Sa prose est le contraire d’académique : elle est joyeuse, physique », écrit Alberto Manguel.
Il a raison : le secret, pour lire Chesterton et (tenter d’) accéder à la profusion et à la diversité de son œuvre, c’est d’abord de le fréquenter régulièrement pour en devenir un (presque) familier, s’imprégner de son tour, de sa manière, deviner le sourire derrière la facétie – et comprendre que Chesterton est un état d’esprit, une fantaisie étayée par une pensée très cohérente (clé de l’œuvre) et très claire, qui fait l’ensemble du corpus dominé, voire subsumé par une vista dont son catholicisme serait la note de tête, de coeur et de fond (G.K. se convertit au catholicisme romain en 1922, son épouse, Frances, en 1926).

Étincelant, pragmatique, virevoltant, aux antipodes du dogme et de l’aristocratisme anglais qui ne l’accueillera pas, plutôt libéral avec une continuelle préoccupation de la justice sociale, de l’honnêteté et de la common decency qui consonnent avec sa foi chrétienne, apôtre lui-même du paradoxe fécond, Chesterton est le contraire du « rouleau convertisseur » (Gide, à propos de Claudel).

Les essais et chroniques qu’il a, toute sa vie, disséminés dans la presse, leur diversité, leur suggestivité, l’esprit d’enfance qui les caractérise, le font cousin, certes très anglais et catholique, de Vialatte. C’est encore Manguel qui ose la comparaison – et on entérine le citant, tant elle nous semble non pas aventurée, mais judicieuse.

Le cercle de ses lecteurs n’a jamais cessé de s’entretenir voire de s’étendre : Russell, Shaw, Kafka, Hemingway, Larbaud, Gide, J. Green, Claudel, Paulhan, Klossowski, J.R.R Tolkien, C.S. Lewis, Alfred Hitchcock – jusqu’aujourd’hui Michéa ou Finkielkraut.

Borges est sans doute celui qui se l’est le plus précisément, le plus profondément, le plus justement approprié : « Il aurait pu être Kafka ou Poe mais, courageusement, il opta pour le bonheur, du moins feignit-il de l’avoir trouvé. De la foi anglicane, il passa à la foi catholique, fondée, selon lui, sur le bon sens. Il avança que la singularité de cette foi s’ajuste à celle de l’univers comme la forme étrange d’une clé s’ajuste exactement à la forme étrange de la serrure ».

On a récemment réédité L’Homme à la clé d’or, son autobiographie – qui renseigne autant sur l’homme que sur l’époque (Les Belles Lettres) – et François Rivière s’est tiré avec les honneurs de la première biographie en langue française de Chesterton : cursif, inspiré et scrupuleux, son livre atteste sa longue fréquentation du colossal bonhomme.


N.B. Deux notes-citations éloquentes pour finir :

  • À propos de Frances, épouse de Chesterton – Nancy Brown, sa biographe, cite George ELIOT (Middlemarch) et donne ce faisant une idée précise, exacte, du rôle de cette femme remarquable (et poète) auprès de G.K. Chesterton :

« Beaucoup de ceux qui la connaissaient trouvaient regrettable qu’une créature si remarquable et si unique eût été absorbée dans la vie d’un autre et ne fût uniquement connue dans un certain cercle qu’en tant qu’épouse…
Mais elle eut une influence inestimable et très étendue sur son entourage : en effet, l’épanouissement du monde repose en partie sur des actes non historiques, et si les choses ne vont pas si mal pour vous et pour moi comme cela aurait pu être le cas, c’est en partie grâce à de nombreuses personnes qui vécurent fidèlement une vie cachée et qui reposent dans des tombes oubliées. »

« Plus les hommes deviennent forts et sages, moins ils se considèrent supérieurs à qui que ce soit. » (Frances Chesterton)

« Un proverbe dit : ‘’rien ne réussit comme le succès’’, mais bien que je n’aie nulle intention d’inventer un nouveau paradoxe, en un sens profond et spirituel, ‘’rien n’échoue comme le succès’’. » (Frances Chesterton)

  • À propos du socialisme (versus le distributisme que prônera Chesterton) :

    « On peut dire du socialisme que ses amis l’ont recommandé comme une égalité croissante, alors que ses adversaires y ont résisté comme une diminution de la liberté…
    Le compromis éventuel a été l’un des cas les plus intéressants et les plus curieux de l’histoire. Il a été décidé de faire tout ce qui avait été dénoncé dans le socialisme, et rien de ce qui avait été désiré auparavant… nous avons prouvé qu’il était possible de sacrifier la liberté sans obtenir l’égalité…
    En bref, les gens ont décidé qu’il était impossible de réaliser le bien du socialisme, mais ils se sont réconfortés en en réalisant tout le mal. »

    G.K. Chesterton, Utopie des usuriers, 1917 – Chesterton a 43 ans.


    François Rivière, Le Divin Chesterton – biographie, Rivages, 224p.

    Camille Delmas, Le Paradoxe G.K. Chesterton, L’Escargot, 128p.

    À lire également : Bréviaire capricieux de littérature contemporaine pour lecteurs déconcertés, désorientés, désemparés, de François Kasbi, Éditions de Paris-Max Chaleil.

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    La Surveillante générale

    Changer Sandrine Rousseau ? Vous rêvez ! L’illuminée de la lutte contre le patriarcat est de retour avec une nouvelle charge anti-Sardou, qui – ne lui déplaise –  s’élève encore d’un grade dans le Mérite national. La député écolo de la très bobo 9ème circonscription de Paris en est verte ! C’est surtout, pour la néoféministe, une nouvelle aubaine pour renouer avec l’actu…


    Sandrine Rousseau… Si elle n’existait pas, il faudrait ne surtout pas l’inventer ! En parler, bien sûr, c’est rentrer dans son jeu. Taire ses éternelles dérives millimétrées : les banaliser. Mais tant pis : la plume s’impose, finalement…

    Pour faire accepter Aya Nakamura aux JO, Macron décore Sardou

    Née sous le signe du poisson, Sandrine Rousseau prospère joyeusement dans les eaux troubles de la Nupes, salmigondis créé artificiellement par Mélenchon pour amadouer les urnes. Mais qui lui a matraqué aux oreilles à outrance, quand elle était enfant, le refrain libérateur du talentueux Jean-Jacques Goldman : « Elle a fait un bébé toute seule », à la fin ? Celle que l’on identifie plus sous les traits du « Surveillant général » de Michel Sardou (1973) vient de faillir s’étrangler. L’abhorré Sardou, celui qui voulait récemment organiser une marche blanche pour soutenir son compagnon – déconstruit – va recevoir en juin prochain des mains du président de la République les insignes de grand officier de l’ordre national du Mérite. La pourfendeuse des crinolines, la passionaria des cuisines, la porte-voix des violentées, l’égérie des utérus libérés, qui sait donner du très délicat « Sardou, ferme ta gueule ! » se répand un peu partout pour exprimer sa rancœur. Celle qui ne vit que par et pour l’outrance, serait-elle aigrie d’avoir raté une carrière de chanteuse ? Tremble dans ta tombe, Maria Callas ! On sait que ses premiers pas en la matière étaient, disons approximatifs, lorsqu’en novembre dernier elle avait entonné de grand cœur, debout derrière son pupitre du Palais-Bourbon, un pas franchement inoubliable mais court hymne féministe, rapidement écourté par Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, sa prestation ne l’ayant pas convaincue…

    Ministère amer

    Le constat est amer : la Madone d’un féminisme désespéré dessert de fait les causes parfois justes qu’elle prétend défendre. Cette agitée de la verdure jette hardiment aux orties et avec une certaine délectation, tout porteur de testicules, forcément suspect. Des déclarations reprises souvent avidement par des médias, grisés par la « bonne » parole de cette gourou(e !) d’un nouveau genre. Elle qui se love lascivement dans le wokisme le plus échevelé, veut faire le ménage dans la vie des femmes. Et balayer des siècles de machisme, repasser les vieux dogmes au crible pour mieux les essorer et nettoyer toute domination masculine honnie. Noble cause, par essence, mais dévoyée par calcul, et vaste programme, comme dirait un certain grand homme. Tout cela pourrait asseoir une intégrité louable, si sa grande mansuétude envers la barbarie barbue en ternissait le clinquant. Car la noblesse de l’idéologie est douteuse, surtout quand la dame reste muette lors de drames réguliers et atroces dont sont victimes jeunes filles, femmes ou dames âgées, imputables à une frange de la population connue, ou, quand elle s’accommode d’un silence complice envers les thèses islamistes les plus radicales, connues pour piétiner allégrement les droits élémentaires de la femme et pas seulement.

    Prends garde mâle blanc occidental, hérétique de nature : Sandrine, grande inquisitrice d’une cause revisitée et qui l’a pénétrée – oserait-on dire – veille !

    Tchétchénie: non, le président musulman Kadyrov ne veut pas interdire la musique!

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    Les autorités tchétchènes ont décrété une mesure inattendue: la régulation des tempos musicaux afin que ceux-ci s’alignent sur les traditions rythmiques locales, criminalisant ainsi certains genres jugés trop occidentaux.


    La tradition, y’a que ça de vrai !

    Le dernier communiqué du ministère tchétchène de la Culture a surpris le monde entier. Rapporté par l’agence de presse officielle russe TASS, le ministre de la Culture, Musa Dadayev, a annoncé que les œuvres « musicales, vocales et chorégraphiques » seraient limitées à un tempo compris entre 80 et 116 battements par minute (BPM) afin de « s’harmoniser avec la mentalité et le sens du rythme tchétchènes ». « Emprunter la culture musicale à d’autres peuples est inadmissible », s’est indigné Dadayev. « Nous devons transmettre au peuple et aux futures générations de nos enfants l’héritage culturel du peuple tchétchène, y compris toutes les normes morales et éthiques qui régissent la vie des Tchétchènes », a ajouté le ministre qui prône un retour aux traditions.

    Et l’hymne national ?

    Les artistes disposent jusqu’au 1er juin pour réadapter toute musique ne respectant pas cette nouvelle règle dont les dispositions restent cependant floues. Une décision qui aurait été prise par le président Ramzan Kadyrov lui-même qui entend couper le sifflet aux standards européens dont les rythmes ont tendance à envahir cette République. Dans le viseur du gouvernement, diverses tendances musicales électroniques comme la house, la techno et le dubstep. Si divers titres connus pourraient échapper à cette nouvelle loi quelque peu ubuesque, l’hymne national russe serait ironiquement touché par cette réforme, jugé trop lent comme l’indique le média russe indépendant Meduza !

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    La musique n’adoucit pas les mœurs

    La Tchétchénie, située dans le Caucase du Nord, est majoritairement composée de musulmans.  Nommé par le président russe Vladimir Poutine à qui il fournit des supplétifs militaires dans le conflit qui l’oppose à l’Ukraine, Ramzan Kadyrov dirige ce satellite de Moscou depuis 2007. Il a progressivement imposé un pouvoir qui ne laisse aucune place à la dissidence et a instauré sur l’ensemble de son despotat, sa propre vision « traditionnelle » de l’islam. Laquelle sert en réalité à couvrir un régime brutal qui viole les principes mêmes de la constitution russe. Enlèvements et arrestations arbitraires (ponctués par de mystérieux décès ou disparitions inexpliquées), ou multiplication d’emprisonnements des homosexuel(le)s… ont été signalés par des opposants en exil comme par des familles des victimes. Le régime n’a pas hésité à mettre en place une véritable purge au sein de sa population afin d’embastiller toute personne suspectée d’être homosexuelle. Malgré diverses tentatives d’indépendance au cours des deux siècles précédents, marquées par de violents conflits, la Tchétchénie a décidé de se maintenir au sein de la Fédération russe. 

    En réalité, pas une première mondiale

    Pour autant, la Tchétchénie n’est pas la seule nation à avoir mis en place un tel style de décret. Que ce soit en Iran (où la musique occidentale est jugée comme source de corruption des esprits), au Cambodge sous le règne génocidaire des Khmers rouges (proscrite), en Afghanistan avec l’actuel régime talibans (qui affirme que la musique « provoque la corruption morale»), en Corée du Nord (qui estime que la K-Pop un « cancer vicieux»), la monarchie malaisienne (où les lois locales interdisent aux stations de radio de diffuser des chansons « offensantes pour le sentiment public » ou « violant le bon goût et la décence ») ou même au Royaume-Uni (l’article 63 de la loi sur la justice pénale de 1994 donne à la police le pouvoir d’interrompre des événements mettant en vedette de la musique « caractérisée par l’émission d’une succession de rythmes répétitifs »), plusieurs gouvernements n’ont pas hésité à contrôler ou censurer la musique selon leurs propres critères idéologiques ou religieux. Toujours au grand dam d’une jeunesse toujours avide de modernité et de liberté!

    D’or et de sang

    Minotaures, le livre de notre ami Yannis Ezziadi, explore ce monde singulier où on a en partage la passion du toro et de ceux qui l’affrontent. Des élevages aux arènes enfiévrées, se joue une tragédie splendide et angoissante. Cet art qui glorifie le courage et magnifie la mort est un défi à l’époque.


    C’était le 16 mai 1975. Jeune reporter à TF1, j’avais accepté la proposition du directeur de l’information : « Allez nous raconter la féria de Nîmes. C’est une grande fête. On y a vu Picasso et Cocteau… il y a toujours du beau monde… »

    Uniformes impeccables

    Et là, maintenant, je suis planté derrière les arènes, devant la porte de service par où entrent toreros, cuadrillas, chevaux de picadors et tout le personnel des arènes. Jusqu’au balayeur, chacun s’est présenté dans un uniforme impeccable. Je suis à l’affût des moments secrets de ce spectacle que je découvre. La corrida a commencé depuis une demi-heure. Le premier combat est terminé. Les lourdes portes s’entrouvrent pour laisser passer un camion. Sur la benne ouverte gît un énorme animal noir qui baigne dans son sang. C’est le cadavre du premier toro de l’après-midi qui part pour l’équarrissage. Olivier, le cameraman, écarte l’œil de son objectif. Le camion disparaît dans les ruelles. On se regarde muets… Olivier : « Je rentre à Paris… pas capable de filmer ça. » L’ingénieur du son : « Connaissais pas cette boucherie… » Ce fut difficile, je parvins finalement à les convaincre. Il fallait terminer le travail qui nous avait été commandé.

    Installation dans la contre-piste aux côtés d’un torero habillé de noir et or. Un confrère m’explique que c’est lui qu’il faut filmer : un jeune français qui va prendre l’alternative, qui va être consacré matador de toros. Son nom : Simon Casas. Il entre en piste, il a peur, il fait peur. Ça se passe mal. Il insiste. Les arènes sont combles. Encouragements, applaudissements et peu à peu sifflets. Le jeune « se joue la peau [1] ». Mais on ne pardonne rien dans un cirque où l’on contemple ses passions.

    A lire aussi : Simon Casas: « La tauromachie a signé mon divorce avec l’époque »

    Simon Casas a arrêté d’être torero le lendemain. Mais ce jour-là, je suis devenu aficionado et ami du personnage le plus passionné et passionnant rencontré dans ma vie de journaliste, aussi fou que celui avec qui un soir de printemps 1984 j’avais traîné dans les rues de Paris et qui, le lendemain, brûlait son billet de 500 francs sur le plateau de mon émission « 7 sur 7 ».

    Submergé, envahi par une passion inconnue de moi, petit Savoyard, homme des montagnes et du silence. Je suis entré dans une religion interdite aux incultes : l’afición. J’ai découvert le jeu de la passion et du courage comme il n’existe nulle part ailleurs, j’ai découvert des rituels immuables, des superstitions effrayantes, des ballets millimétrés face à la mort. J’ai même souhaité transmettre ma découverte aux téléspectateurs de Canal+, à l’époque où cette chaîne savait inventer des spectacles. Ce fut un beau succès et un rituel du dimanche soir en été.

    Le plus chanceux des animaux d’élevage est le toro de combat

    Alors je suis heureux quand je feuillette aujourd’hui un livre comme celui de Yannis Ezziadi. Heureux qu’un jeune auteur ait découvert que dans notre monde d’abattoirs, le plus chanceux des animaux d’élevage est le toro de combat, que dans notre monde de vêtements troués et de dégaines trash, une cape de paseo en soie rose sur un costume blanc brodé d’or s’ajuste au millimètre près avant d’entrer dans la violence du combat, que dans notre monde de l’assurance tous risques un garçon bien né comme Lalo de Maria, fils d’un riche publicitaire parisien, petit-fils de grands comédiens, décide de danser chaque été devant les cornes d’un toro, que les petits gitans de Triana ont pour idole sportive l’immense matador Rafael de Paula, ou que les premiers toreros français – l’artiste Robert Pilés, le courageux Chinito ou le rageur Richard Milian –ont encore la voix qui tremble lorsqu’ils racontent leurs premières faenas d’il y a trente ans.

    La tauromachie de Nîmes à Béziers, Vic, Arles, Dax, Séville, Pampelune, Valence, Bilbao, Madrid, Mexico ou Cartagena est bien vivante. De jeunes toreros rencontrés par l’auteur tâtent du bout de leurs zapatillas le sable doré des arènes chaque nouvelle année. Les férias restent les plus grandes fêtes régionales. On vibre ici dans les arènes de Béziers.

    © Fayard

    Yannis Ezziadi joue le rôle du découvreur de talents et offre quelques grands témoignages sur cette passion hors d’âge. Bien sûr on retrouve Simon Casas, l’empereur du monde tauromachique, en ses royaumes de Nîmes ou Madrid, mais aussi à l’autre bout du chemin Curro Caro, le Curro Romero arlésien, avec ses fulgurances et ses souvenirs de gitan au cœur immense. Ezziadi présente aussi ce que l’on connaissait peu à mon époque, l’œuvre du meilleur éleveur français de toros espagnols, Robert Margé, au milieu de ses garrigues, ses pâtures et ses centaines de monstres noirs qui s’étripent parfois les soirs d’orage.

    Ce livre est écrit comme le cri d’un cœur naïf mais amoureux. Ezziadi n’est pas encore Hemingway ni Jean Cau, mais offre un voyage dans ce monde étrange qu’il montre parfois même par l’œil du toro. C’est un témoignage vivifiant sur la puissance de ce spectacle devenu une culture grâce à ses écrivains. Olé !

    Yannis Ezziadi, Minotaures : voyage au cœur de la corrida, Fayard, 2024.

    Minotaures: Voyage au coeur de la corrida

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    [1] Traduction littérale d’une expression taurine espagnole – il joue sa peau, dirait-on en français.

    Le triste séjour de Séjourné au quai d’Orsay

    Les récentes postures prises par notre ministre des Affaires étrangères sur le conflit entre Israël et le Hamas au mieux déçoivent, au pire indignent.


    7 octobre 2023 : ce funeste jour-là, il y a donc six mois presque jour pour jour, les terroristes du Hamas perpétraient, à l’encontre d’Israël, un massacre d’une violence inouïe, inconcevable pour le commun des mortels, mais que la conscience collective juive, encore profondément blessée par ce crime unique dans les annales de l’(in)humanité que fut la Shoah, ne pouvait, quant à elle, que rapprocher à juste titre, et de sinistre mémoire, de la barbarie nazie !

    L’innommable barbarie du Hamas à l’encontre des juifs d’Israël : un abominable sommet d’antisémitisme

    Comment, du reste, ne pas être choqué, bien plus encore qu’outré, par ces innommables atrocités qui, ce jour-là, furent commises, au comble de l’infamie, par ces terroristes gorgés de haine à l’encontre de leurs innocentes victimes, pour cette seule (dé)raison qu’elles étaient juives ? Un sommet, rarement atteint dans l’odieuse histoire de l’antisémitisme, d’abomination : familles entières trucidées au cœur de leur foyer, jeunes tués à bout portant, lâchement et sans pitié, nourrissons brûlés vifs, femmes enceintes éventrées, parfois violées, leurs entrailles ensanglantées, alors même qu’elles étaient déjà mortes, hommes émasculés et plusieurs centaines de personnes prises en otages, emmenées sans ménagement, tel du vulgaire bétail, dans d’obscurs tunnels de Gaza afin d’y servir par la suite, le cas échéant, d’ignoble monnaie d’échanges en vue d’hypothétiques et futures négociations territoriales à défaut de réel sens politico-diplomatique !

    Pour une solution à deux États

    La diplomatie, précisément ! Certes, une solution à deux États, où Israéliens et Palestiniens pourraient vivre côte à côte et dans un respect mutuel, s’avère-t-elle le seul réel gage de paix, tel un horizon indépassable, en cette région, particulièrement turbulente et instable, du globe. Et, certes, le peuple palestinien, quand il ne s’acoquine pas avec ces abjects tortionnaires du Hamas, a-t-il droit à notre entière et sincère compassion dans l’indicible malheur qui, victime qu’il est toutefois avant tout de l’effroyable cynisme de ces mêmes affidés du Hamas, l’accable aujourd’hui.

    Davantage : nous sommes même prêts, nous juifs de bonne volonté, viscéralement attachés aux imprescriptibles principes universels de l’humanisme, à reconnaître l’énorme part de responsabilité que l’actuel gouvernement de Benyamin Netanyahou, réputé à l’extrême-droite idéologiquement, endosse, depuis trop longtemps, dans ce carnage sans nom.

    Des sanctions contre Israël ? L’indigne fourvoiement, toute honte bue, du chef de la diplomatie française !

    Mais, enfin, tout cela étant dit, rien, absolument rien, ne justifie la récente déclaration du nouveau, et manifestement inexpérimenté, ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, selon qui de lourdes sanctions devraient être appliquées à Israël, pays pourtant traditionnellement ami de surcroît, afin de le contraindre à négocier, en vue d’un significatif cessez-le-feu, avec le Hamas.

    A lire aussi: Famine organisée à Gaza: mensonge de guerre

    Pis : comment, en l’occurrence, ce chef de la diplomatie française ose-t-il mettre dès lors sur un même plan, établissant ainsi une sorte d’égalité politique entre eux, un État démocratique tel qu’Israël et, d’autre part, une nébuleuse terroriste, fanatique terreau de l’islamisme radical, comme le Hamas ?

    « Il faut qu’il y ait des leviers d’influence et il y a des leviers multiples qui vont jusqu’à des sanctions pour que l’aide humanitaire puisse franchir les points de passage », a déclaré M. Séjourné sur France 241. Le ministre a dit la nécessité d’exercer des pressions sur le gouvernement israélien.

    Une faute politique, morale et humaine

    Oui : d’une honte absolue, irresponsable, sinon criminelle dans ses conséquences les plus aventureuses, voire imprévisibles, cette ultime sortie du jeune et volubile Séjourné, qui, en plus de manier une syntaxe parfois étrangement approximative dans sa propre langue maternelle, se révèle ainsi, une fois encore, indigne, au vu de cette éminente fonction qu’il occupe au sein du gouvernement, d’un grand pays comme la France, berceau des Lumières et patrie des Droits de l’Homme. D’avantage : c’est proprement là une impardonnable faute politique, morale et humaine !

    Triste séjour, donc, que celui de Séjourné dans les bureaux feutrés et sous les lambris dorés, visiblement trop hauts ou trop brillants pour lui, du prestigieux Quai d’Orsay, dont il n’est décidément pas, hélas pour la voltairienne France elle-même, à la taille !

    La foudre, dans un éclair de lucidité, à défaut de génie, du jupiterien Macron ?

    La foudre du jupitérien Macron, président d’une France trop souvent amnésique, sinon complaisante, face à ses nombreux ennemis, tant externes qu’internes, ne devrait normalement pas apprécier, dans un salvateur éclair de lucidité, à défaut de réelle sagesse ou de véritable génie, pareille et aveuglante bévue de la part de son inénarrable ministre : c’est sa propre aura, au sein du concert des nations, qui s’en voit en effet là, par ce genre de fausse note, dangereusement, et peut-être irrémédiablement, ternie…

    1. https://www.rfi.fr/fr/podcasts/le-grand-invit%C3%A9-international/20240408-gaza-il-faudra-des-leviers-d-influence-pour-obtenir-l-ouverture-humanitaire-d%C3%A9clare-st%C3%A9phane-s%C3%A9journ%C3%A9 ↩︎

    «Liberté Cathédrale» en chute libre

    « Liberté Cathédrale », mis en scène par Boris Chamatz au théâtre du Châtelet, est aussi infantile qu’insignifiant. Sous sa direction, la troupe du Tanztheater de Wuppertal, fondée par la grande Pina Bausch, oscille entre le vide et le néant.


    Certes, on pouvait légitimement s’attendre au pire. Au pire, la plupart des productions de Boris Chamatz nous y ont généreusement et régulièrement habitués. Mais là, peut-être, avec « Liberté Cathédrale », le pire a été submergé par quelque chose de plus lamentable encore. Parce que ce spectacle porte le sigle du Tanztheater de Wuppertal, la troupe devenue légendaire fondée jadis par Pina Bausch et à laquelle sont ici mêlés des individus de tous bords, cela rend plus indécent, plus déplorable, le misérabilisme de cette somme d’insignifiance, laquelle se présente, à la lecture du programme, avec tant de risible prétention.

    1h45 d’un vain et permanent délire

    Surprise ! Avant même que le spectacle commence, salle et scène du théâtre du Châtelet où il va se commettre ont été bouleversées. Dans la salle, les sièges du parterre ont disparu sous un plancher afin de faire place à quelques gradins massés sous les quatre étages de galeries et de permettre de prolonger la scène qui le dévore presque en entier. Le plateau, lui, accueille une grande partie du public réparti sur trois côtés, côté cour, côté jardin, tout comme en fond de scène. Ce dispositif, sans doute très coûteux à installer, ménage ainsi un espace formidable, aussi majestueux et spectaculaire que ce qu’il va recevoir sera consternant. Car durant une heure et quarante cinq minutes, en cinq tableaux qui se veulent différents sans l’être véritablement, plus de 25 exécutants vont se livrer à une débauche terriblement uniforme de contorsions, de grimaces, de cris, de sauts, de reptations, de galops, et agiter leurs membres en tous sens dans un vain et permanent délire entrecoupé de silences. Le tout apparaît à ce point infantile que c’en est indescriptible. Car à quoi bon décrire ce qui ressemble au mieux à des improvisations d’adolescents attardés à qui on aurait lâché la bride pour qu’ils se livrent à une bacchanale en tous points régressive.

    A lire aussi: Deauville divertimento

    Comment, sous l’effet de quelles funestes et malfaisantes influences, de quelle monumentale incompétence, a-t-on pu nommer le Savoyard Boris Charmatz pour succéder à Pina Bausch à la tête du Tanztheater de Wuppertal ? Même Rolf Salomon, le fils de Pina Bausch, a soutenu sa candidature, lui qui n’avait vu aucun de ses spectacles. Boris Charmatz au Tanztheater, c’est Yvette Horner à la tête de la Philharmonie de Berlin ! C’est le nain après la géante ! Une telle aberration a conduit nombre de danseurs « historiques » de Pina Bausch à abandonner leur collaboration avec la troupe à laquelle ils demeuraient liés. Et déjà on se mord les doigts avec cette nomination invraisemblable. D’autant plus révoltante que jusque là les plus grands interprètes du Tanztheater avaient miraculeusement réussi à maintenir parfaitement l’essence même des œuvres de la dame de Wuppertal.

    Photo: Simon Gosselin

    Lui, Charmatz, n’a pas peur d’affirmer, avec la candide prétention de la grenouille qui se veut aussi grosse que le bœuf, « être arrivé là pour amener l’œuvre de Pina Bausch dans l’aventure du XXIe siècle », tout en se permettant quelques retouches pour l’adapter aux nouvelles générations, « comme on rénoverait un tableau ». Ose-t-il vraiment croire les énormités qu’il profère ? C’est bien possible. Et il y a des individus dans le milieu culturel qui semblent le prendre également au sérieux et considérer ses « happenings » fatigués, façon années 1970, comme des audaces novatrices. Les actuels spectateurs du Festival d’Avignon, où l’on avait reconnu avec éclat le génie de Pina Bausch en 1981, et où l’on affichera cet été « Liberté Cathédrale », seront-t-ils aussi crédules que ceux qui ont salué ce regrettable événement au théâtre du Châtelet ? C’est bien possible encore. Et c’est bien là ce qui est inquiétant : l’aveuglement d’une partie du public, l’absence totale de discernement devant l’insignifiance ou les impostures, mécaniquement applaudies, et parfois même avec enthousiasme.

    A lire aussi: Thomas Jolly, de Shakespeare aux JO. Ou la culture à l’heure de la déconstruction 

    Naguère, on conspuait à Paris les premiers chefs d’œuvre de Pina Bausch ou de Merce Cunningham parce qu’ils heurtaient un public académique et borné. Aujourd’hui, les descendants des imbéciles d’alors applaudissent le néant de ceux qui, par ailleurs, occupent les mêmes scènes.  


    « Liberté Cathédrale »

    Jusqu’au 18 avril. Au théâtre du Châtelet, en collaboration avec le théâtre de la Ville.
    Location : 01 42 74 22 77 ou theatredelaville-paris.com

    Génération Opinel

    L’actualité des derniers jours regorge de rixes entre jeunes se terminant dans le sang. Au point que certains observateurs y voient de l’ « ensauvagement » et un inquiétant basculement sociétal – plutôt que de simples faits divers.


    On ne peut guère reprocher à une certaine jeunesse de ne rien faire pour soutenir l’industrie et l’artisanat français de la coutellerie. Il ne se passe guère de jour en effet sans qu’un quidam ne donne de la lame contre un autre quidam. Regrettable mais banal fait divers, s’abuse-t-on dans les officines où se cultive l’anesthésie de masse. Lame de fond, oserais-je corriger. Au point que certains de la frange de la population adeptes de cette pratique (je dis bien «  frange » et non pas « fange », cette précaution afin de m’épargner l’insulte de vieux con réac, fasciste et raciste tout aussi tendance ces derniers temps que le coup de surin) nous paraissent être en mesure de mériter une sorte de prix Opinel, récompense qui pourrait être le pendant du prestigieux prix Nobel venant couronner chaque année, comme on sait, de formidables « grands esprits ».

    Pas de vagues

    Puisque nous parlons de « grands esprits » n’oublions pas ceux qui sévissent sur les plateaux de télévision d’excellente tenue où ils se font un plaisir de nous exposer doctement que le problème (en général ils préfèrent le mot problématique qui fait nettement plus chic) relève d’un enjeu global de civilisation et que la solution, la recherche de solution, doit donc être elle aussi absolument globale. Sans doute, n’est-ce pas faux. Du moins, d’un point de vue purement théorique. Pour ce qui est du concret, de la mise en œuvre, il semble bien qu’il en aille tout différemment. Voilà belle lurette qu’on ne nous la fait plus et que nous avons bien que compris que l’argument du « problème global appelant un traitement global » n’est, dans l’immense majorité des cas, que l’alibi de confort destiné à justifier l’impuissance, l’incurie, l’impéritie. L’affaire est si vaste, si complexe, si tentaculaire, n’est-ce pas, qu’on n’y peut pas grand-chose, au fond.

    A lire aussi: Shamseddine, Samara, Mila: non, le problème ce n’est pas «Internet»

    Comment arrêter l’opinelisation de la société ?

    Dans le registre qui nous intéresse ici, celui de l’opinelisation de la société, peut-être pourrait-on commencer par réaffirmer la sacralité absolue, sublime, unique de la vie humaine. Ce bien suprême accordé à chacun de nous. La traduction judiciaire et pénitentiaire de cette volonté de réhabilitation de cette évidence serait de décréter que la peine pour acte de violence contre l’intégrité physique d’une personne ne devrait plus être le moins du monde assimilable – dans l’esprit des coupables comme dans celui du public – à une peine pour tout autre délit ou crime. En conséquence, les auteurs de ces actes, de ces crimes, devraient impérativement purger leur condamnation dans des établissements spécifiques, régis par un règlement de vie et une discipline également spécifiques, d’une rigueur autrement affirmée et contraignante que ce qu’il en est aujourd’hui dans les structures où tout se mêle, où la distinction prise en compte est bien davantage le temps à purger que la nature de l’acte commis. À l’évidence cela doit changer. Il faut désormais clamer urbi et orbi que s’en prendre à la vie humaine est d’une nature bien différente que toutes autres transgressions de la loi.

    Ce n’est en rien minimiser ces dernières, c’est juste faire en sorte que chacun, à commencer par les auteurs potentiels de ces actes, ne puissent ignorer que cette vie humaine est, répétons-le, fondamentalement sacrée.

    Au-dessus de tout le reste.

    Je sais, on va m’objecter qu’on n’a pas les moyens, ni en fric, ni en personnels. Air connu. Couplet de la lâcheté ordinaire. En fait, il suffirait d’un peu de courage politique. Denrée fort rare, à ce qu’il semble. Il est vrai que celle-ci, contrairement à l’Opinel ou au cran d’arrêt, ne figure pas parmi les articles en vente libre.

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    «Il est où le grand remplacement?», ou comment prendre les Français pour des imbéciles

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    « Aujourd’hui, on a 7% d’étrangers en France. En 1930 on en avait 5%. Il est où le grand remplacement ? » affirme la macroniste Valérie Hayer.


    À ce point, c’est de la bêtise : Valérie Hayer ne voit rien des mutations historiques de la France. La tête de liste Renaissance aux européennes porte le déni du réel à son apex. Elle fait de la mauvaise foi et du mensonge les deux piliers de la politique du chef de l’État. La méthode, exaspérante, est celle des faussaires. Lundi soir sur CNews, confrontée à Marion Maréchal, la candidate macroniste a lancé ceci, parmi d’autres aplombs saugrenus : « Aujourd’hui, on a 7% d’étrangers en France. En 1930 on en avait 5%. Il est où le grand remplacement ? ».

    A lire aussi: Immigration et démographie urbaine: les cartes à peine croyables de France Stratégie

    Donc, pour Hayer, la France homogène d’il y a un siècle reste peu ou prou semblable à celle d’aujourd’hui. Pour elle, l’accès bradé et massif à la nationalité – qui explique ce nombre stable des étrangers dans la statistique – n’a aucune incidence sur la physionomie de la nation et son unité. Devenir Français suffit à « faire France ». Or les mots d’Hayer, qui sont ceux du politiquement correct et du récit officiel, sont objectivement frauduleux. Ils falsifient la réalité. L’embrouille prend les gens pour des imbéciles. L’œil nu constate qu’un processus démographique de substitution de population est à l’œuvre depuis plus de trente ans sous l’effet de l’immigration de masse. Un peuple nouveau, portant une autre civilisation, islamique en l’occurrence, est en train de remplacer le peuple indigène en certains territoires. En fait, Hayer confirme que son mouvement ne fera rien pour entraver ce processus létal de dilution de la France française. Ben oui quoi, il est où le grand remplacement ?

    Valérie Hayer et Marion Maréchal, 8 avril 2024. Image: Capture CNews / YouTube

    Mardi, Gabriel Attal a promis des mesures « extraordinairement fortes » pour répondre à l’hyperviolence des « jeunes » et espérer un « sursaut ». Mais les actes tomberont à plat si le Premier ministre cautionne à son tour ces fadaises d’un « ensauvagement » et d’une « décivilisation » généralisés, n’ayant rien à voir avec la survenue d’une deuxième France ne partageant pas les mêmes valeurs. Or les crimes et les agressions qui se multiplient – mardi, un adolescent de 15 ans a été tué au couteau à Romans-sur-Isère, dans le quartier « sensible » de La Monnaie – sont le plus souvent les expressions de comportements tribaux, claniques, sexistes, importés par la culture islamique nord-africaine et africaine.

    A lire aussi: Jordan Bardella: «Je suis l’enfant de la génération 2005-2015»

    À Achenheim (Bas-Rhin), une adolescente musulmane de 13 ans a été frappée par quatre mineurs car elle ne respectait pas le ramadan. Dans Le Figaro de ce mercredi1, le pédopsychiatre Maurice Berger observe que la violence « débute souvent dès l’enfance, dans des milieux familiaux où règne une violence acceptée culturellement, sur fond d’inégalité hommes-femmes ». Les réponses doivent donc être à la hauteur de ces réalités. Elles doivent, dès lors, stopper l’immigration islamique invasive et adapter la sévérité des peines à ce choc de cultures. Dans une note pour la Fondapol, l’ancien préfet Michel Auboin suggère également de lutter contre les appropriations de territoires en redonnant aux logements sociaux, d’où sont exclus les familles d’origine française, leur vocation initiale d’habitat temporaire2. Mais faut-il espérer une once de lucidité chez ceux qui ferment les yeux ?


    1. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/maurice-berger-le-fonctionnement-communautaire-familial-ou-religieux-legitimise-la-violence-20240409 ↩︎
    2. https://www.fondapol.org/app/uploads/2024/03/239-aubouin-fr-2024-03-22-w-1.pdf ↩︎

    École: François Civil ne sait pas lutter contre l’incivilité!

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    "Pas de vagues", un film de Teddy Lussi-Modeste. © France 3 Cinéma

    Pas de vagues, film de Teddy Lussi-Modeste pourra avantageusement être montré dans les instituts de formation des maîtres, non comme document sur la dureté de la condition professorale, mais comme un parfait catalogue de ce qu’un jeune professeur débutant ne doit surtout pas faire. Ce personnage, joué par Fançois Civil, accumule les maladresses.


    Julien copine volontiers avec ses élèves, c’est excusable, mais dans la scène où il offre des chich-kebab, il semble adopter un clan de la classe et ignorer l’autre, c’est impardonnable. Pour garder le respect de tous, il faut planer au-dessus des passions et des affects de ses subordonnés, comme dans tous les métiers d’autorité. Le copinage est possible, à condition de respecter une période initiale de froideur et de distance. Le vieux professeur de pédagogie de l’Université de Strasbourg qui m’a dispensé, à moi et aux autres agrégatifs il y a bien longtemps, les quelques heures de conseils qui étaient un viatique restreint mais suffisant disait : deux mois au début de l’année sans un seul sourire, trois mois sans un seul rire, ensuite vous pourrez danser sur les tables, les élèves garderont pour vous le plus profond respect. Je n’ai pas dansé sur les tables mais j’ai ajouté à ces préceptes le vouvoiement, même avec des sixièmes. Moyennant quoi j’ai été un prof heureux avec des élèves heureux. Enfin, ils avaient l’air.

    Julien et Julien Sorel

    Deuxième erreur de Julien, celle-là est une erreur technique de latiniste insuffisant. Patatras, je vais rallumer la guerre entre lettres classiques et lettres modernes ! Il explique séduire par se-ducere ramener à soi, conduire à soi. Faux, la véritable origine de se est un préfixe du vieux latin qui indique la séparation, l’éloignement. On le trouve dans justement séparer et son doublet sevrer, dans sécession et quelques autres mots. Ce préfixe a disparu, remplacé en latin classique par ex. Séduire a donc une étymologie beaucoup plus amusante et imagée, c’est emmener à l’écart, là, juste derrière ce buisson bien touffu et ce ne sera pas pour enfiler des perles.

    Je dis cela par plaisir d’étaler ma cuistrerie mais surtout parce que la séduction joue un grand rôle dans la littérature en général et particulièrement dans la littérature française. Et aussi parce qu’il y a deux manières d’entraîner une femme ou tout objet de son désir derrière le buisson : de force, en la tirant par le bras, ou par le discours amoureux, plus trivialement appelé baratin. Force ou baratin, c’est toute la différence entre barbarie et civilisation.

    A lire aussi, Jean-Paul Brighelli: Un prof jeté aux chiens

    Julien fait étudier à ses élèves un grand poème de séduction, Mignonne, allons voir si la rose de Ronsard. Très bien. Les imbéciles seuls penseront que c’est vieillot, car le frémissement de désir qui parcourt le poème est sensible à tout adolescent même de nos jours. La rose est symbole de jeunesse, mais le professeur a le droit de suggérer le plus chastement possible qu’elle représente aussi le sexe féminin, comme dans beaucoup de chansons populaires de la vieille France. J’ai souvent fait étudier la merveilleuse scène de séduction de Madame de Rênal par Julien Sorel dans Le Rouge et le Noir de Stendhal. Une belle nuit d’été, le cœur d’un petit jeune homme qui bat très fort, il a décidé de prendre la main de la femme qu’il aime, mariée et supérieure à lui socialement, quand sonnera minuit. Prendre la main et non la traîner de force derrière un buisson. Deux actes qui ne sont équivalents que pour les délirantes de la culture du viol. L’heure de cours allait finir et pour une fois je m’adressais spécialement aux garçons de la classe, je leur disais que le séducteur a droit au mensonge, aux promesses mirifiques, mais jamais à la violence. Tout bénef, ils prenaient leur prof de français pour un tombeur de dames, ce qui était bon pour son prestige, et cet interdit de la violence pénétrait dans leur cortex. La littérature est essentiellement l’antiviolence, elle peut convertir en mots tous les conflits.

    Le piège classique

    Troisième erreur de ce jeune, gentil et séduisant professeur : voulant expliquer l‘astéisme, ce procédé stylistique qui fait semblant de blâmer pour faire en réalité un éloge paradoxal, il prend un exemple où il se met lui-même en scène faisant une déclaration d’amour par astéisme à l’une de ses élèves, la timide Leslie. On sent venir l’accident gravissime, le bus scolaire tombant dans un précipice avec cinquante élèves à bord, mais Julien fonce quand même dans le décor. Sa seule excuse est son besoin désespéré de proximité avec ses élèves. Comme tous les professeurs débutants, il pense qu’il va révolutionner la pédagogie par l’affection, et aucun vieux prof de Strasbourg ne l’a mis en garde contre ce panneau. La catastrophe est totale, Leslie, secrètement amoureuse du beau prof l’accuse de harcèlement sexuel, le grand frère s’en mêle et menace de mort le pauvre Julien, sa hiérarchie ne le soutient pas, ses collègues l’abandonnent, sa vie privée tourne en eau de boudin.

    A lire aussi, Céline Pina: Mila, le retour d’une sacrée profane

    C’est ici qu’intervient la quatrième erreur du film, celle-là n’est pas dans l’attitude du professeur mais dans le scénario et ses pudeurs. Pour ne pas fâcher l’une des “communautés” qui se partagent désormais la France, le grand frère, personnage fatal des tragédies de banlieue, est joué par un jeune homme parfaitement caucasien, d’allure skinhead. Il ne correspond pas du tout au physique de grand frère que statistiquement on s’attend à voir. On ne peut s’empêcher de penser au fameux clip de Julie Gayet contre le mariage forcé qui a été tourné dans une église avec des acteurs d’allure parfaitement souchienne. Ce triomphe du politiquement correct enlève beaucoup de crédibilité au film.

    Dommage. Le professeur de français, à travers les œuvres qu’il fait découvrir, peut faire infiniment plus pour la laïcité et le vivre-ensemble que toutes les proclamations ministérielles ou les baroques “cours d’empathie”. Faisons notre Finkielkraut au petit pied, puisqu’aussi bien je me prénomme Alain : la littérature est salvatrice. J’ai souvent fait apprendre par cœur des tartines de Roméo et Juliette dans la traduction du fils de Victor Hugo, avec bien sûr la scène du balcon. Aucun adolescent n’y résiste, ils se glissent tous dans la peau des héros, ce n’est pas des tartines qu’ils apprenaient, c’était d’immenses sandwiches comme les sous-marins du Québec. La liberté de l’amour à l’occidentale ne peut que triompher à la longue des pressions communautaristes archaïques et de l’abaissement des femmes qu’elles véhiculent. Faire lire et apprendre Molière, et particulièrement L’école des Femmes, est un remède souverain contre le mépris qui les frappe dans des cultures nouvellement importées en Europe :  “Ah ! C’est que vous l’aimez, traîtresse ! – Oui je l’aime. – Et vous avez le front de le dire à moi-même ? – Et pourquoi, s’il est vrai, ne le dirais-je pas ?” Agnès et Arnolphe font rire, mais en douce ils occidentalisent la petite Tchètchène et le petit Afghan qui récitent assez bien leurs rôles, ma foi, malgré leur accent. Le garçon renonce au crime d’honneur qu’il devait accomplir ce soir sur le petit ami de sa sœur et il se promet de faire abandonner par ses frères ce projet barbare.

    Mila, le retour d’une sacrée profane

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    Mila © JOEL SAGET/SIPA

    Mila “blasphème” encore : elle a “osé” s’acoquiner avec les féministes identitaires du collectif Némésis ! L’adolescente menacée par les islamistes réapparait dans les médias, et pense que la laïcité est morte à l’école. Alors que les autorités craignaient hier un attentat de Daech pendant PSG / Barça, un homme en djellaba tuait au couteau un Algérien à Bordeaux pour une histoire d’alcool.


    Vous vous souvenez de Mila. Cette jeune fille a été le révélateur en 2020 non seulement de la lâcheté du gouvernement Macron, mais de l’absence d’humanité comme de l’absence de sens des responsabilités de beaucoup de politiques. Pour avoir usé de sa liberté d’expression et moqué le prophète principal de l’islam alors qu’elle recevait des insultes homophobes de la part d’un jeune musulman, cette adolescente de 16 ans avait subi un déferlement de haine sur les réseaux et reçu tellement de menaces que beaucoup ont pensé qu’elle ne survivrait pas au déchainement de violence islamiste dont elle faisait l’objet.

    Critiquée pour le choix de son entourage actuel

    Elle est à nouveau sous le feu des projecteurs pour avoir expliqué qu’on l’avait influencée, il y a quatre ans, pour la forcer à présenter ses excuses aux croyants sur le plateau de Quotidien. On peut comprendre ses conseillers de l’époque. Il s’agissait alors de sauver la jeune fille, les chances que les menaces de mort soient mises à exécution étaient élevées et Mila était encore influençable. Ce n’est pas ce qui est choquant dans cette histoire. En revanche, ce qui est inacceptable c’est la façon dont, à nouveau, certains politiques et journalistes font un procès à Mila car elle est proche notamment de l’association Némésis et des « milieux identitaires ». Outre que Mila est libre de faire ses choix, il se trouve que si la jeune fille est debout, digne et refuse de se soumettre, c’est à sa force intérieure qu’elle le doit, à son entourage familial et sans doute à son entourage militant – mais pas au soutien qu’aurait pourtant dû lui apporter le milieu politique et culturel. 

    Mila aurait dû être le symbole de notre résistance face à la barbarie, nous aurions tous dû être un rempart pour elle. 

    Cette affaire a été le symbole de notre lâcheté collective, de notre faiblesse et de nos reniements. Dans cette histoire, la liberté d’expression a perdu contre le blasphème, et la vie d’une jeune fille a été sacrifiée. Pour rien. Les islamistes n’ont cessé de gagner en puissance.

    Sacrifiée par le pouvoir pour ne pas faire le jeu de l’extrême-droite

    Car comment respecter ces politiques qui se sont tus ou qui se sont joints à la meute des intégristes ? Comment respecter des élus qui veulent le pouvoir et après l’avoir obtenu ne font pas leur travail et abandonnent aux islamistes une jeune fille de 16 ans, qui ne bafoue aucune loi et use de son droit ? Comment respecter des adultes qui sacrifient une enfant à leur confort, car les forces qui l’attaquent leur font peur ? C’est pourtant ce que le président de la République a fait. C’est pourtant ce que Nicole Belloubet, actuelle ministre de l’Éducation et à l’époque garde des Sceaux a fait. Elle en a même rajouté dans l’ignominie en attaquant gratuitement l’adolescente menacée de mort. Ségolène Royal a montré également l’étendue de son indifférence face aux violences pesant sur une jeune fille ; la gauche a été en dessous de tout, les associations féministes et LGBT n’ont même pas condamné les appels au viol et l’homophobie. À tous les niveaux du pouvoir, la lâcheté a été omniprésente. Et il y a une raison à cela. Politiques et associatifs avaient peur « de faire le jeu de l’extrême-droite » en désignant l’islam comme un facteur de violence et de déstabilisation politique.

    Au nom de l’islam : police des mœurs et de la religion dans les lycées

    Quatre ans après, on n’est pas sorti de ce piège stupide qui consiste à nier les offensives de l’islam politique, le sang qu’il fait couler, la violence et la mort que ses mœurs puritaines et inadaptées génèrent dans les quartiers où il règne en maître. Quatre ans après, l’influence des islamistes, faute d’être combattue, a encore augmenté. Mila parle de police des mœurs et de la religion dans les lycées, mais les témoignages se multiplient aussi au travail où des musulmans prosélytes et des islamistes font des remarques à ceux qui ne font pas le ramadan. Et maintenant ce sont de jeunes musulmans, pas assez réislamisés aux yeux des islamistes, qui sont victimes d’agressions, voire tués, car ils ne respectent pas la charia. La lâcheté n’a fait qu’augmenter le malheur public et le danger qui pèse sur toute la population. 

    Alors franchement, voir des éditorialistes et des politiques venir faire un procès aujourd’hui à Mila parce qu’elle est proche du collectif Némésis est ridicule. Cette posture qui consiste à accrocher des cibles sur une personne qui ne doit rien au collectif, n’exerce pas de fonction de représentation et est déjà menacée, est irresponsable. Quelle est l’utilité d’une telle posture ? Comment peut-on essayer de se tailler un costume de vertu et de probité politique en dénonçant une jeune fille de 20 ans qui a déjà versé un lourd tribut à la lâcheté ?

    Les choix de Mila, produit de l’abandon et de la médiocrité des politiques

    La vérité devrait pourtant faire honte à tous ces petits commissaires politiques de bac à sable : si Mila a pris la main tendue des identitaires, c’est parce que ni le pouvoir ni la société ne se sont montré à la hauteur des enjeux. La jeune femme s’est sentie manipulée et abandonnée. Et elle l’a été. Influencée, elle a pu l’être par des gens sincères, qui géraient une situation d’urgence, fortement inflammable. En revanche, l’abandon des politiques, l’incapacité à trouver une solution qui montre la force de notre attachement à nos libertés publiques, la déscolarisation de Mila, l’incapacité à punir les lycéens qui l’avaient menacée dans son propre lycée, la complaisance manifestée à l’égard de ceux qui au nom de l’islam menacent de mort une adolescente de 16 ans : tout cela est inqualifiable et impardonnable. 

    Le parcours de Mila s’explique d’abord et avant tout par la tragique médiocrité dont une partie du monde politique a fait preuve et par son incapacité à défendre un des fondamentaux de notre contrat social, la liberté de conscience. Une fois de plus, le parcours de la jeune fille est un révélateur de l’état du pays : si le RN ne cesse de monter dans les intentions de vote, ce n’est pas par adhésion à une dérive fascisante. Si c’était le cas, LFI, qui cumule dérapages antisémites, falsification historique, fascination pour la violence politique ou déshumanisation de l’adversaire serait au plus haut dans les intentions de vote… C’est même tout le contraire, l’ascension du RN s’explique par le conservatisme. Les Français veulent sauver leur modèle civilisationnel et social, leur système politique et leurs mœurs. C’est parce que, pour eux, leurs représentants actuels trahissent cette mission sacrée, qu’ils se tournent vers le RN. Au lieu d’en faire des gorges chaudes et de chercher des boucs émissaires à condamner, comme Mila, nos élites devraient plutôt retrouver le chemin de l’intérêt général et de l’utilité publique. Les Français pensent que les islamistes ne sont grands que parce que leurs élites sont à genoux. C’est pourquoi ils cherchent de nouveaux champions pour porter leurs couleurs. C’est cela que l’histoire de Mila raconte et que personne une fois de plus ne veut entendre.

    Silence coupable

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    Le Divin Chesterton

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    L'écrivain anglais G. K. Chesterton, 1918. DR.

    À l’occasion de la parution de l’épatant Madame Chesterton (1869-1938), de Nancy Carpentier Brown (Téqui) et dans la série « Retour sur un géant du XXème siècle » : G. K. Chesterton – for ever.


    « L’espèce humaine à laquelle appartiennent tant de mes lecteurs… »
    G.K. Chesterton, Le Napoléon de Notting Hill

    « Le progrès doit être autre chose qu’un parricide continuel »
    G.K. Chesterton, Le Défenseur

    « Le problème du communisme est qu’il tente de s’opposer au pickpocket en interdisant les poches »
    G.K. Chesterton, Plaidoyer pour une propriété anticapitaliste


    Chesterton déconcerte, désoriente, désempare. Plus de cent livres publiés, une vie assez courte (1874-1936) – et tous les genres abordés : articles de journaux, romans (Un nommé Jeudi, Le Napoléon de Notting Hill), théâtre, poésie, philosophie, critique littéraire, critique d’art, économie (concepteur du distributisme), controverses religieuses et sociales (Hérétiques), voire littéraires avec ses alter ego, adversaires ou complices (H.G. Wells et G.B. Shaw en particulier), roman policier (Enquêtes du père Brown), essais d’inspiration catholique (L’Homme éternel, 1925, un de ses chefs d’œuvre).

    Pour le comprendre – osons l’hypothèse tautologique – il faut, d’abord, l’aimer : « Quand on lit Chesterton, on se sent submergé par une extraordinaire impression de bonheur. Sa prose est le contraire d’académique : elle est joyeuse, physique », écrit Alberto Manguel.
    Il a raison : le secret, pour lire Chesterton et (tenter d’) accéder à la profusion et à la diversité de son œuvre, c’est d’abord de le fréquenter régulièrement pour en devenir un (presque) familier, s’imprégner de son tour, de sa manière, deviner le sourire derrière la facétie – et comprendre que Chesterton est un état d’esprit, une fantaisie étayée par une pensée très cohérente (clé de l’œuvre) et très claire, qui fait l’ensemble du corpus dominé, voire subsumé par une vista dont son catholicisme serait la note de tête, de coeur et de fond (G.K. se convertit au catholicisme romain en 1922, son épouse, Frances, en 1926).

    Étincelant, pragmatique, virevoltant, aux antipodes du dogme et de l’aristocratisme anglais qui ne l’accueillera pas, plutôt libéral avec une continuelle préoccupation de la justice sociale, de l’honnêteté et de la common decency qui consonnent avec sa foi chrétienne, apôtre lui-même du paradoxe fécond, Chesterton est le contraire du « rouleau convertisseur » (Gide, à propos de Claudel).

    Les essais et chroniques qu’il a, toute sa vie, disséminés dans la presse, leur diversité, leur suggestivité, l’esprit d’enfance qui les caractérise, le font cousin, certes très anglais et catholique, de Vialatte. C’est encore Manguel qui ose la comparaison – et on entérine le citant, tant elle nous semble non pas aventurée, mais judicieuse.

    Le cercle de ses lecteurs n’a jamais cessé de s’entretenir voire de s’étendre : Russell, Shaw, Kafka, Hemingway, Larbaud, Gide, J. Green, Claudel, Paulhan, Klossowski, J.R.R Tolkien, C.S. Lewis, Alfred Hitchcock – jusqu’aujourd’hui Michéa ou Finkielkraut.

    Borges est sans doute celui qui se l’est le plus précisément, le plus profondément, le plus justement approprié : « Il aurait pu être Kafka ou Poe mais, courageusement, il opta pour le bonheur, du moins feignit-il de l’avoir trouvé. De la foi anglicane, il passa à la foi catholique, fondée, selon lui, sur le bon sens. Il avança que la singularité de cette foi s’ajuste à celle de l’univers comme la forme étrange d’une clé s’ajuste exactement à la forme étrange de la serrure ».

    On a récemment réédité L’Homme à la clé d’or, son autobiographie – qui renseigne autant sur l’homme que sur l’époque (Les Belles Lettres) – et François Rivière s’est tiré avec les honneurs de la première biographie en langue française de Chesterton : cursif, inspiré et scrupuleux, son livre atteste sa longue fréquentation du colossal bonhomme.


    N.B. Deux notes-citations éloquentes pour finir :

    • À propos de Frances, épouse de Chesterton – Nancy Brown, sa biographe, cite George ELIOT (Middlemarch) et donne ce faisant une idée précise, exacte, du rôle de cette femme remarquable (et poète) auprès de G.K. Chesterton :

    « Beaucoup de ceux qui la connaissaient trouvaient regrettable qu’une créature si remarquable et si unique eût été absorbée dans la vie d’un autre et ne fût uniquement connue dans un certain cercle qu’en tant qu’épouse…
    Mais elle eut une influence inestimable et très étendue sur son entourage : en effet, l’épanouissement du monde repose en partie sur des actes non historiques, et si les choses ne vont pas si mal pour vous et pour moi comme cela aurait pu être le cas, c’est en partie grâce à de nombreuses personnes qui vécurent fidèlement une vie cachée et qui reposent dans des tombes oubliées. »

    « Plus les hommes deviennent forts et sages, moins ils se considèrent supérieurs à qui que ce soit. » (Frances Chesterton)

    « Un proverbe dit : ‘’rien ne réussit comme le succès’’, mais bien que je n’aie nulle intention d’inventer un nouveau paradoxe, en un sens profond et spirituel, ‘’rien n’échoue comme le succès’’. » (Frances Chesterton)

    • À propos du socialisme (versus le distributisme que prônera Chesterton) :

      « On peut dire du socialisme que ses amis l’ont recommandé comme une égalité croissante, alors que ses adversaires y ont résisté comme une diminution de la liberté…
      Le compromis éventuel a été l’un des cas les plus intéressants et les plus curieux de l’histoire. Il a été décidé de faire tout ce qui avait été dénoncé dans le socialisme, et rien de ce qui avait été désiré auparavant… nous avons prouvé qu’il était possible de sacrifier la liberté sans obtenir l’égalité…
      En bref, les gens ont décidé qu’il était impossible de réaliser le bien du socialisme, mais ils se sont réconfortés en en réalisant tout le mal. »

      G.K. Chesterton, Utopie des usuriers, 1917 – Chesterton a 43 ans.


      François Rivière, Le Divin Chesterton – biographie, Rivages, 224p.

      Camille Delmas, Le Paradoxe G.K. Chesterton, L’Escargot, 128p.

      À lire également : Bréviaire capricieux de littérature contemporaine pour lecteurs déconcertés, désorientés, désemparés, de François Kasbi, Éditions de Paris-Max Chaleil.

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      La Surveillante générale

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      "Une chanson, une chanson !" © ISA HARSIN/SIPA

      Changer Sandrine Rousseau ? Vous rêvez ! L’illuminée de la lutte contre le patriarcat est de retour avec une nouvelle charge anti-Sardou, qui – ne lui déplaise –  s’élève encore d’un grade dans le Mérite national. La député écolo de la très bobo 9ème circonscription de Paris en est verte ! C’est surtout, pour la néoféministe, une nouvelle aubaine pour renouer avec l’actu…


      Sandrine Rousseau… Si elle n’existait pas, il faudrait ne surtout pas l’inventer ! En parler, bien sûr, c’est rentrer dans son jeu. Taire ses éternelles dérives millimétrées : les banaliser. Mais tant pis : la plume s’impose, finalement…

      Pour faire accepter Aya Nakamura aux JO, Macron décore Sardou

      Née sous le signe du poisson, Sandrine Rousseau prospère joyeusement dans les eaux troubles de la Nupes, salmigondis créé artificiellement par Mélenchon pour amadouer les urnes. Mais qui lui a matraqué aux oreilles à outrance, quand elle était enfant, le refrain libérateur du talentueux Jean-Jacques Goldman : « Elle a fait un bébé toute seule », à la fin ? Celle que l’on identifie plus sous les traits du « Surveillant général » de Michel Sardou (1973) vient de faillir s’étrangler. L’abhorré Sardou, celui qui voulait récemment organiser une marche blanche pour soutenir son compagnon – déconstruit – va recevoir en juin prochain des mains du président de la République les insignes de grand officier de l’ordre national du Mérite. La pourfendeuse des crinolines, la passionaria des cuisines, la porte-voix des violentées, l’égérie des utérus libérés, qui sait donner du très délicat « Sardou, ferme ta gueule ! » se répand un peu partout pour exprimer sa rancœur. Celle qui ne vit que par et pour l’outrance, serait-elle aigrie d’avoir raté une carrière de chanteuse ? Tremble dans ta tombe, Maria Callas ! On sait que ses premiers pas en la matière étaient, disons approximatifs, lorsqu’en novembre dernier elle avait entonné de grand cœur, debout derrière son pupitre du Palais-Bourbon, un pas franchement inoubliable mais court hymne féministe, rapidement écourté par Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, sa prestation ne l’ayant pas convaincue…

      Ministère amer

      Le constat est amer : la Madone d’un féminisme désespéré dessert de fait les causes parfois justes qu’elle prétend défendre. Cette agitée de la verdure jette hardiment aux orties et avec une certaine délectation, tout porteur de testicules, forcément suspect. Des déclarations reprises souvent avidement par des médias, grisés par la « bonne » parole de cette gourou(e !) d’un nouveau genre. Elle qui se love lascivement dans le wokisme le plus échevelé, veut faire le ménage dans la vie des femmes. Et balayer des siècles de machisme, repasser les vieux dogmes au crible pour mieux les essorer et nettoyer toute domination masculine honnie. Noble cause, par essence, mais dévoyée par calcul, et vaste programme, comme dirait un certain grand homme. Tout cela pourrait asseoir une intégrité louable, si sa grande mansuétude envers la barbarie barbue en ternissait le clinquant. Car la noblesse de l’idéologie est douteuse, surtout quand la dame reste muette lors de drames réguliers et atroces dont sont victimes jeunes filles, femmes ou dames âgées, imputables à une frange de la population connue, ou, quand elle s’accommode d’un silence complice envers les thèses islamistes les plus radicales, connues pour piétiner allégrement les droits élémentaires de la femme et pas seulement.

      Prends garde mâle blanc occidental, hérétique de nature : Sandrine, grande inquisitrice d’une cause revisitée et qui l’a pénétrée – oserait-on dire – veille !

      Tchétchénie: non, le président musulman Kadyrov ne veut pas interdire la musique!

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      Ramzan Kadyrov. © Sergei Savostyanov/SPUTNIK/SIPA

      Les autorités tchétchènes ont décrété une mesure inattendue: la régulation des tempos musicaux afin que ceux-ci s’alignent sur les traditions rythmiques locales, criminalisant ainsi certains genres jugés trop occidentaux.


      La tradition, y’a que ça de vrai !

      Le dernier communiqué du ministère tchétchène de la Culture a surpris le monde entier. Rapporté par l’agence de presse officielle russe TASS, le ministre de la Culture, Musa Dadayev, a annoncé que les œuvres « musicales, vocales et chorégraphiques » seraient limitées à un tempo compris entre 80 et 116 battements par minute (BPM) afin de « s’harmoniser avec la mentalité et le sens du rythme tchétchènes ». « Emprunter la culture musicale à d’autres peuples est inadmissible », s’est indigné Dadayev. « Nous devons transmettre au peuple et aux futures générations de nos enfants l’héritage culturel du peuple tchétchène, y compris toutes les normes morales et éthiques qui régissent la vie des Tchétchènes », a ajouté le ministre qui prône un retour aux traditions.

      Et l’hymne national ?

      Les artistes disposent jusqu’au 1er juin pour réadapter toute musique ne respectant pas cette nouvelle règle dont les dispositions restent cependant floues. Une décision qui aurait été prise par le président Ramzan Kadyrov lui-même qui entend couper le sifflet aux standards européens dont les rythmes ont tendance à envahir cette République. Dans le viseur du gouvernement, diverses tendances musicales électroniques comme la house, la techno et le dubstep. Si divers titres connus pourraient échapper à cette nouvelle loi quelque peu ubuesque, l’hymne national russe serait ironiquement touché par cette réforme, jugé trop lent comme l’indique le média russe indépendant Meduza !

      A lire aussi: Crocus City Hall: l’Etat islamique frappe en Russie

      La musique n’adoucit pas les mœurs

      La Tchétchénie, située dans le Caucase du Nord, est majoritairement composée de musulmans.  Nommé par le président russe Vladimir Poutine à qui il fournit des supplétifs militaires dans le conflit qui l’oppose à l’Ukraine, Ramzan Kadyrov dirige ce satellite de Moscou depuis 2007. Il a progressivement imposé un pouvoir qui ne laisse aucune place à la dissidence et a instauré sur l’ensemble de son despotat, sa propre vision « traditionnelle » de l’islam. Laquelle sert en réalité à couvrir un régime brutal qui viole les principes mêmes de la constitution russe. Enlèvements et arrestations arbitraires (ponctués par de mystérieux décès ou disparitions inexpliquées), ou multiplication d’emprisonnements des homosexuel(le)s… ont été signalés par des opposants en exil comme par des familles des victimes. Le régime n’a pas hésité à mettre en place une véritable purge au sein de sa population afin d’embastiller toute personne suspectée d’être homosexuelle. Malgré diverses tentatives d’indépendance au cours des deux siècles précédents, marquées par de violents conflits, la Tchétchénie a décidé de se maintenir au sein de la Fédération russe. 

      En réalité, pas une première mondiale

      Pour autant, la Tchétchénie n’est pas la seule nation à avoir mis en place un tel style de décret. Que ce soit en Iran (où la musique occidentale est jugée comme source de corruption des esprits), au Cambodge sous le règne génocidaire des Khmers rouges (proscrite), en Afghanistan avec l’actuel régime talibans (qui affirme que la musique « provoque la corruption morale»), en Corée du Nord (qui estime que la K-Pop un « cancer vicieux»), la monarchie malaisienne (où les lois locales interdisent aux stations de radio de diffuser des chansons « offensantes pour le sentiment public » ou « violant le bon goût et la décence ») ou même au Royaume-Uni (l’article 63 de la loi sur la justice pénale de 1994 donne à la police le pouvoir d’interrompre des événements mettant en vedette de la musique « caractérisée par l’émission d’une succession de rythmes répétitifs »), plusieurs gouvernements n’ont pas hésité à contrôler ou censurer la musique selon leurs propres critères idéologiques ou religieux. Toujours au grand dam d’une jeunesse toujours avide de modernité et de liberté!

      D’or et de sang

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      Yannis Ezziadi © William Lentz.

      Minotaures, le livre de notre ami Yannis Ezziadi, explore ce monde singulier où on a en partage la passion du toro et de ceux qui l’affrontent. Des élevages aux arènes enfiévrées, se joue une tragédie splendide et angoissante. Cet art qui glorifie le courage et magnifie la mort est un défi à l’époque.


      C’était le 16 mai 1975. Jeune reporter à TF1, j’avais accepté la proposition du directeur de l’information : « Allez nous raconter la féria de Nîmes. C’est une grande fête. On y a vu Picasso et Cocteau… il y a toujours du beau monde… »

      Uniformes impeccables

      Et là, maintenant, je suis planté derrière les arènes, devant la porte de service par où entrent toreros, cuadrillas, chevaux de picadors et tout le personnel des arènes. Jusqu’au balayeur, chacun s’est présenté dans un uniforme impeccable. Je suis à l’affût des moments secrets de ce spectacle que je découvre. La corrida a commencé depuis une demi-heure. Le premier combat est terminé. Les lourdes portes s’entrouvrent pour laisser passer un camion. Sur la benne ouverte gît un énorme animal noir qui baigne dans son sang. C’est le cadavre du premier toro de l’après-midi qui part pour l’équarrissage. Olivier, le cameraman, écarte l’œil de son objectif. Le camion disparaît dans les ruelles. On se regarde muets… Olivier : « Je rentre à Paris… pas capable de filmer ça. » L’ingénieur du son : « Connaissais pas cette boucherie… » Ce fut difficile, je parvins finalement à les convaincre. Il fallait terminer le travail qui nous avait été commandé.

      Installation dans la contre-piste aux côtés d’un torero habillé de noir et or. Un confrère m’explique que c’est lui qu’il faut filmer : un jeune français qui va prendre l’alternative, qui va être consacré matador de toros. Son nom : Simon Casas. Il entre en piste, il a peur, il fait peur. Ça se passe mal. Il insiste. Les arènes sont combles. Encouragements, applaudissements et peu à peu sifflets. Le jeune « se joue la peau [1] ». Mais on ne pardonne rien dans un cirque où l’on contemple ses passions.

      A lire aussi : Simon Casas: « La tauromachie a signé mon divorce avec l’époque »

      Simon Casas a arrêté d’être torero le lendemain. Mais ce jour-là, je suis devenu aficionado et ami du personnage le plus passionné et passionnant rencontré dans ma vie de journaliste, aussi fou que celui avec qui un soir de printemps 1984 j’avais traîné dans les rues de Paris et qui, le lendemain, brûlait son billet de 500 francs sur le plateau de mon émission « 7 sur 7 ».

      Submergé, envahi par une passion inconnue de moi, petit Savoyard, homme des montagnes et du silence. Je suis entré dans une religion interdite aux incultes : l’afición. J’ai découvert le jeu de la passion et du courage comme il n’existe nulle part ailleurs, j’ai découvert des rituels immuables, des superstitions effrayantes, des ballets millimétrés face à la mort. J’ai même souhaité transmettre ma découverte aux téléspectateurs de Canal+, à l’époque où cette chaîne savait inventer des spectacles. Ce fut un beau succès et un rituel du dimanche soir en été.

      Le plus chanceux des animaux d’élevage est le toro de combat

      Alors je suis heureux quand je feuillette aujourd’hui un livre comme celui de Yannis Ezziadi. Heureux qu’un jeune auteur ait découvert que dans notre monde d’abattoirs, le plus chanceux des animaux d’élevage est le toro de combat, que dans notre monde de vêtements troués et de dégaines trash, une cape de paseo en soie rose sur un costume blanc brodé d’or s’ajuste au millimètre près avant d’entrer dans la violence du combat, que dans notre monde de l’assurance tous risques un garçon bien né comme Lalo de Maria, fils d’un riche publicitaire parisien, petit-fils de grands comédiens, décide de danser chaque été devant les cornes d’un toro, que les petits gitans de Triana ont pour idole sportive l’immense matador Rafael de Paula, ou que les premiers toreros français – l’artiste Robert Pilés, le courageux Chinito ou le rageur Richard Milian –ont encore la voix qui tremble lorsqu’ils racontent leurs premières faenas d’il y a trente ans.

      La tauromachie de Nîmes à Béziers, Vic, Arles, Dax, Séville, Pampelune, Valence, Bilbao, Madrid, Mexico ou Cartagena est bien vivante. De jeunes toreros rencontrés par l’auteur tâtent du bout de leurs zapatillas le sable doré des arènes chaque nouvelle année. Les férias restent les plus grandes fêtes régionales. On vibre ici dans les arènes de Béziers.

      © Fayard

      Yannis Ezziadi joue le rôle du découvreur de talents et offre quelques grands témoignages sur cette passion hors d’âge. Bien sûr on retrouve Simon Casas, l’empereur du monde tauromachique, en ses royaumes de Nîmes ou Madrid, mais aussi à l’autre bout du chemin Curro Caro, le Curro Romero arlésien, avec ses fulgurances et ses souvenirs de gitan au cœur immense. Ezziadi présente aussi ce que l’on connaissait peu à mon époque, l’œuvre du meilleur éleveur français de toros espagnols, Robert Margé, au milieu de ses garrigues, ses pâtures et ses centaines de monstres noirs qui s’étripent parfois les soirs d’orage.

      Ce livre est écrit comme le cri d’un cœur naïf mais amoureux. Ezziadi n’est pas encore Hemingway ni Jean Cau, mais offre un voyage dans ce monde étrange qu’il montre parfois même par l’œil du toro. C’est un témoignage vivifiant sur la puissance de ce spectacle devenu une culture grâce à ses écrivains. Olé !

      Yannis Ezziadi, Minotaures : voyage au cœur de la corrida, Fayard, 2024.

      Minotaures: Voyage au coeur de la corrida

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      [1] Traduction littérale d’une expression taurine espagnole – il joue sa peau, dirait-on en français.

      Le triste séjour de Séjourné au quai d’Orsay

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      Le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné, Paris, 12 mars 2024 © JEANNE ACCORSINI/SIPA

      Les récentes postures prises par notre ministre des Affaires étrangères sur le conflit entre Israël et le Hamas au mieux déçoivent, au pire indignent.


      7 octobre 2023 : ce funeste jour-là, il y a donc six mois presque jour pour jour, les terroristes du Hamas perpétraient, à l’encontre d’Israël, un massacre d’une violence inouïe, inconcevable pour le commun des mortels, mais que la conscience collective juive, encore profondément blessée par ce crime unique dans les annales de l’(in)humanité que fut la Shoah, ne pouvait, quant à elle, que rapprocher à juste titre, et de sinistre mémoire, de la barbarie nazie !

      L’innommable barbarie du Hamas à l’encontre des juifs d’Israël : un abominable sommet d’antisémitisme

      Comment, du reste, ne pas être choqué, bien plus encore qu’outré, par ces innommables atrocités qui, ce jour-là, furent commises, au comble de l’infamie, par ces terroristes gorgés de haine à l’encontre de leurs innocentes victimes, pour cette seule (dé)raison qu’elles étaient juives ? Un sommet, rarement atteint dans l’odieuse histoire de l’antisémitisme, d’abomination : familles entières trucidées au cœur de leur foyer, jeunes tués à bout portant, lâchement et sans pitié, nourrissons brûlés vifs, femmes enceintes éventrées, parfois violées, leurs entrailles ensanglantées, alors même qu’elles étaient déjà mortes, hommes émasculés et plusieurs centaines de personnes prises en otages, emmenées sans ménagement, tel du vulgaire bétail, dans d’obscurs tunnels de Gaza afin d’y servir par la suite, le cas échéant, d’ignoble monnaie d’échanges en vue d’hypothétiques et futures négociations territoriales à défaut de réel sens politico-diplomatique !

      Pour une solution à deux États

      La diplomatie, précisément ! Certes, une solution à deux États, où Israéliens et Palestiniens pourraient vivre côte à côte et dans un respect mutuel, s’avère-t-elle le seul réel gage de paix, tel un horizon indépassable, en cette région, particulièrement turbulente et instable, du globe. Et, certes, le peuple palestinien, quand il ne s’acoquine pas avec ces abjects tortionnaires du Hamas, a-t-il droit à notre entière et sincère compassion dans l’indicible malheur qui, victime qu’il est toutefois avant tout de l’effroyable cynisme de ces mêmes affidés du Hamas, l’accable aujourd’hui.

      Davantage : nous sommes même prêts, nous juifs de bonne volonté, viscéralement attachés aux imprescriptibles principes universels de l’humanisme, à reconnaître l’énorme part de responsabilité que l’actuel gouvernement de Benyamin Netanyahou, réputé à l’extrême-droite idéologiquement, endosse, depuis trop longtemps, dans ce carnage sans nom.

      Des sanctions contre Israël ? L’indigne fourvoiement, toute honte bue, du chef de la diplomatie française !

      Mais, enfin, tout cela étant dit, rien, absolument rien, ne justifie la récente déclaration du nouveau, et manifestement inexpérimenté, ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, selon qui de lourdes sanctions devraient être appliquées à Israël, pays pourtant traditionnellement ami de surcroît, afin de le contraindre à négocier, en vue d’un significatif cessez-le-feu, avec le Hamas.

      A lire aussi: Famine organisée à Gaza: mensonge de guerre

      Pis : comment, en l’occurrence, ce chef de la diplomatie française ose-t-il mettre dès lors sur un même plan, établissant ainsi une sorte d’égalité politique entre eux, un État démocratique tel qu’Israël et, d’autre part, une nébuleuse terroriste, fanatique terreau de l’islamisme radical, comme le Hamas ?

      « Il faut qu’il y ait des leviers d’influence et il y a des leviers multiples qui vont jusqu’à des sanctions pour que l’aide humanitaire puisse franchir les points de passage », a déclaré M. Séjourné sur France 241. Le ministre a dit la nécessité d’exercer des pressions sur le gouvernement israélien.

      Une faute politique, morale et humaine

      Oui : d’une honte absolue, irresponsable, sinon criminelle dans ses conséquences les plus aventureuses, voire imprévisibles, cette ultime sortie du jeune et volubile Séjourné, qui, en plus de manier une syntaxe parfois étrangement approximative dans sa propre langue maternelle, se révèle ainsi, une fois encore, indigne, au vu de cette éminente fonction qu’il occupe au sein du gouvernement, d’un grand pays comme la France, berceau des Lumières et patrie des Droits de l’Homme. D’avantage : c’est proprement là une impardonnable faute politique, morale et humaine !

      Triste séjour, donc, que celui de Séjourné dans les bureaux feutrés et sous les lambris dorés, visiblement trop hauts ou trop brillants pour lui, du prestigieux Quai d’Orsay, dont il n’est décidément pas, hélas pour la voltairienne France elle-même, à la taille !

      La foudre, dans un éclair de lucidité, à défaut de génie, du jupiterien Macron ?

      La foudre du jupitérien Macron, président d’une France trop souvent amnésique, sinon complaisante, face à ses nombreux ennemis, tant externes qu’internes, ne devrait normalement pas apprécier, dans un salvateur éclair de lucidité, à défaut de réelle sagesse ou de véritable génie, pareille et aveuglante bévue de la part de son inénarrable ministre : c’est sa propre aura, au sein du concert des nations, qui s’en voit en effet là, par ce genre de fausse note, dangereusement, et peut-être irrémédiablement, ternie…

      1. https://www.rfi.fr/fr/podcasts/le-grand-invit%C3%A9-international/20240408-gaza-il-faudra-des-leviers-d-influence-pour-obtenir-l-ouverture-humanitaire-d%C3%A9clare-st%C3%A9phane-s%C3%A9journ%C3%A9 ↩︎

      «Liberté Cathédrale» en chute libre

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      © Uwe Stratmann

      « Liberté Cathédrale », mis en scène par Boris Chamatz au théâtre du Châtelet, est aussi infantile qu’insignifiant. Sous sa direction, la troupe du Tanztheater de Wuppertal, fondée par la grande Pina Bausch, oscille entre le vide et le néant.


      Certes, on pouvait légitimement s’attendre au pire. Au pire, la plupart des productions de Boris Chamatz nous y ont généreusement et régulièrement habitués. Mais là, peut-être, avec « Liberté Cathédrale », le pire a été submergé par quelque chose de plus lamentable encore. Parce que ce spectacle porte le sigle du Tanztheater de Wuppertal, la troupe devenue légendaire fondée jadis par Pina Bausch et à laquelle sont ici mêlés des individus de tous bords, cela rend plus indécent, plus déplorable, le misérabilisme de cette somme d’insignifiance, laquelle se présente, à la lecture du programme, avec tant de risible prétention.

      1h45 d’un vain et permanent délire

      Surprise ! Avant même que le spectacle commence, salle et scène du théâtre du Châtelet où il va se commettre ont été bouleversées. Dans la salle, les sièges du parterre ont disparu sous un plancher afin de faire place à quelques gradins massés sous les quatre étages de galeries et de permettre de prolonger la scène qui le dévore presque en entier. Le plateau, lui, accueille une grande partie du public réparti sur trois côtés, côté cour, côté jardin, tout comme en fond de scène. Ce dispositif, sans doute très coûteux à installer, ménage ainsi un espace formidable, aussi majestueux et spectaculaire que ce qu’il va recevoir sera consternant. Car durant une heure et quarante cinq minutes, en cinq tableaux qui se veulent différents sans l’être véritablement, plus de 25 exécutants vont se livrer à une débauche terriblement uniforme de contorsions, de grimaces, de cris, de sauts, de reptations, de galops, et agiter leurs membres en tous sens dans un vain et permanent délire entrecoupé de silences. Le tout apparaît à ce point infantile que c’en est indescriptible. Car à quoi bon décrire ce qui ressemble au mieux à des improvisations d’adolescents attardés à qui on aurait lâché la bride pour qu’ils se livrent à une bacchanale en tous points régressive.

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      Comment, sous l’effet de quelles funestes et malfaisantes influences, de quelle monumentale incompétence, a-t-on pu nommer le Savoyard Boris Charmatz pour succéder à Pina Bausch à la tête du Tanztheater de Wuppertal ? Même Rolf Salomon, le fils de Pina Bausch, a soutenu sa candidature, lui qui n’avait vu aucun de ses spectacles. Boris Charmatz au Tanztheater, c’est Yvette Horner à la tête de la Philharmonie de Berlin ! C’est le nain après la géante ! Une telle aberration a conduit nombre de danseurs « historiques » de Pina Bausch à abandonner leur collaboration avec la troupe à laquelle ils demeuraient liés. Et déjà on se mord les doigts avec cette nomination invraisemblable. D’autant plus révoltante que jusque là les plus grands interprètes du Tanztheater avaient miraculeusement réussi à maintenir parfaitement l’essence même des œuvres de la dame de Wuppertal.

      Photo: Simon Gosselin

      Lui, Charmatz, n’a pas peur d’affirmer, avec la candide prétention de la grenouille qui se veut aussi grosse que le bœuf, « être arrivé là pour amener l’œuvre de Pina Bausch dans l’aventure du XXIe siècle », tout en se permettant quelques retouches pour l’adapter aux nouvelles générations, « comme on rénoverait un tableau ». Ose-t-il vraiment croire les énormités qu’il profère ? C’est bien possible. Et il y a des individus dans le milieu culturel qui semblent le prendre également au sérieux et considérer ses « happenings » fatigués, façon années 1970, comme des audaces novatrices. Les actuels spectateurs du Festival d’Avignon, où l’on avait reconnu avec éclat le génie de Pina Bausch en 1981, et où l’on affichera cet été « Liberté Cathédrale », seront-t-ils aussi crédules que ceux qui ont salué ce regrettable événement au théâtre du Châtelet ? C’est bien possible encore. Et c’est bien là ce qui est inquiétant : l’aveuglement d’une partie du public, l’absence totale de discernement devant l’insignifiance ou les impostures, mécaniquement applaudies, et parfois même avec enthousiasme.

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      Naguère, on conspuait à Paris les premiers chefs d’œuvre de Pina Bausch ou de Merce Cunningham parce qu’ils heurtaient un public académique et borné. Aujourd’hui, les descendants des imbéciles d’alors applaudissent le néant de ceux qui, par ailleurs, occupent les mêmes scènes.  


      « Liberté Cathédrale »

      Jusqu’au 18 avril. Au théâtre du Châtelet, en collaboration avec le théâtre de la Ville.
      Location : 01 42 74 22 77 ou theatredelaville-paris.com

      Génération Opinel

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      Xose Bouzas / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

      L’actualité des derniers jours regorge de rixes entre jeunes se terminant dans le sang. Au point que certains observateurs y voient de l’ « ensauvagement » et un inquiétant basculement sociétal – plutôt que de simples faits divers.


      On ne peut guère reprocher à une certaine jeunesse de ne rien faire pour soutenir l’industrie et l’artisanat français de la coutellerie. Il ne se passe guère de jour en effet sans qu’un quidam ne donne de la lame contre un autre quidam. Regrettable mais banal fait divers, s’abuse-t-on dans les officines où se cultive l’anesthésie de masse. Lame de fond, oserais-je corriger. Au point que certains de la frange de la population adeptes de cette pratique (je dis bien «  frange » et non pas « fange », cette précaution afin de m’épargner l’insulte de vieux con réac, fasciste et raciste tout aussi tendance ces derniers temps que le coup de surin) nous paraissent être en mesure de mériter une sorte de prix Opinel, récompense qui pourrait être le pendant du prestigieux prix Nobel venant couronner chaque année, comme on sait, de formidables « grands esprits ».

      Pas de vagues

      Puisque nous parlons de « grands esprits » n’oublions pas ceux qui sévissent sur les plateaux de télévision d’excellente tenue où ils se font un plaisir de nous exposer doctement que le problème (en général ils préfèrent le mot problématique qui fait nettement plus chic) relève d’un enjeu global de civilisation et que la solution, la recherche de solution, doit donc être elle aussi absolument globale. Sans doute, n’est-ce pas faux. Du moins, d’un point de vue purement théorique. Pour ce qui est du concret, de la mise en œuvre, il semble bien qu’il en aille tout différemment. Voilà belle lurette qu’on ne nous la fait plus et que nous avons bien que compris que l’argument du « problème global appelant un traitement global » n’est, dans l’immense majorité des cas, que l’alibi de confort destiné à justifier l’impuissance, l’incurie, l’impéritie. L’affaire est si vaste, si complexe, si tentaculaire, n’est-ce pas, qu’on n’y peut pas grand-chose, au fond.

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      Comment arrêter l’opinelisation de la société ?

      Dans le registre qui nous intéresse ici, celui de l’opinelisation de la société, peut-être pourrait-on commencer par réaffirmer la sacralité absolue, sublime, unique de la vie humaine. Ce bien suprême accordé à chacun de nous. La traduction judiciaire et pénitentiaire de cette volonté de réhabilitation de cette évidence serait de décréter que la peine pour acte de violence contre l’intégrité physique d’une personne ne devrait plus être le moins du monde assimilable – dans l’esprit des coupables comme dans celui du public – à une peine pour tout autre délit ou crime. En conséquence, les auteurs de ces actes, de ces crimes, devraient impérativement purger leur condamnation dans des établissements spécifiques, régis par un règlement de vie et une discipline également spécifiques, d’une rigueur autrement affirmée et contraignante que ce qu’il en est aujourd’hui dans les structures où tout se mêle, où la distinction prise en compte est bien davantage le temps à purger que la nature de l’acte commis. À l’évidence cela doit changer. Il faut désormais clamer urbi et orbi que s’en prendre à la vie humaine est d’une nature bien différente que toutes autres transgressions de la loi.

      Ce n’est en rien minimiser ces dernières, c’est juste faire en sorte que chacun, à commencer par les auteurs potentiels de ces actes, ne puissent ignorer que cette vie humaine est, répétons-le, fondamentalement sacrée.

      Au-dessus de tout le reste.

      Je sais, on va m’objecter qu’on n’a pas les moyens, ni en fric, ni en personnels. Air connu. Couplet de la lâcheté ordinaire. En fait, il suffirait d’un peu de courage politique. Denrée fort rare, à ce qu’il semble. Il est vrai que celle-ci, contrairement à l’Opinel ou au cran d’arrêt, ne figure pas parmi les articles en vente libre.

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      «Il est où le grand remplacement?», ou comment prendre les Français pour des imbéciles

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      Aulnay Sous Bois, 1987 © PRENERON/SIPA

      « Aujourd’hui, on a 7% d’étrangers en France. En 1930 on en avait 5%. Il est où le grand remplacement ? » affirme la macroniste Valérie Hayer.


      À ce point, c’est de la bêtise : Valérie Hayer ne voit rien des mutations historiques de la France. La tête de liste Renaissance aux européennes porte le déni du réel à son apex. Elle fait de la mauvaise foi et du mensonge les deux piliers de la politique du chef de l’État. La méthode, exaspérante, est celle des faussaires. Lundi soir sur CNews, confrontée à Marion Maréchal, la candidate macroniste a lancé ceci, parmi d’autres aplombs saugrenus : « Aujourd’hui, on a 7% d’étrangers en France. En 1930 on en avait 5%. Il est où le grand remplacement ? ».

      A lire aussi: Immigration et démographie urbaine: les cartes à peine croyables de France Stratégie

      Donc, pour Hayer, la France homogène d’il y a un siècle reste peu ou prou semblable à celle d’aujourd’hui. Pour elle, l’accès bradé et massif à la nationalité – qui explique ce nombre stable des étrangers dans la statistique – n’a aucune incidence sur la physionomie de la nation et son unité. Devenir Français suffit à « faire France ». Or les mots d’Hayer, qui sont ceux du politiquement correct et du récit officiel, sont objectivement frauduleux. Ils falsifient la réalité. L’embrouille prend les gens pour des imbéciles. L’œil nu constate qu’un processus démographique de substitution de population est à l’œuvre depuis plus de trente ans sous l’effet de l’immigration de masse. Un peuple nouveau, portant une autre civilisation, islamique en l’occurrence, est en train de remplacer le peuple indigène en certains territoires. En fait, Hayer confirme que son mouvement ne fera rien pour entraver ce processus létal de dilution de la France française. Ben oui quoi, il est où le grand remplacement ?

      Valérie Hayer et Marion Maréchal, 8 avril 2024. Image: Capture CNews / YouTube

      Mardi, Gabriel Attal a promis des mesures « extraordinairement fortes » pour répondre à l’hyperviolence des « jeunes » et espérer un « sursaut ». Mais les actes tomberont à plat si le Premier ministre cautionne à son tour ces fadaises d’un « ensauvagement » et d’une « décivilisation » généralisés, n’ayant rien à voir avec la survenue d’une deuxième France ne partageant pas les mêmes valeurs. Or les crimes et les agressions qui se multiplient – mardi, un adolescent de 15 ans a été tué au couteau à Romans-sur-Isère, dans le quartier « sensible » de La Monnaie – sont le plus souvent les expressions de comportements tribaux, claniques, sexistes, importés par la culture islamique nord-africaine et africaine.

      A lire aussi: Jordan Bardella: «Je suis l’enfant de la génération 2005-2015»

      À Achenheim (Bas-Rhin), une adolescente musulmane de 13 ans a été frappée par quatre mineurs car elle ne respectait pas le ramadan. Dans Le Figaro de ce mercredi1, le pédopsychiatre Maurice Berger observe que la violence « débute souvent dès l’enfance, dans des milieux familiaux où règne une violence acceptée culturellement, sur fond d’inégalité hommes-femmes ». Les réponses doivent donc être à la hauteur de ces réalités. Elles doivent, dès lors, stopper l’immigration islamique invasive et adapter la sévérité des peines à ce choc de cultures. Dans une note pour la Fondapol, l’ancien préfet Michel Auboin suggère également de lutter contre les appropriations de territoires en redonnant aux logements sociaux, d’où sont exclus les familles d’origine française, leur vocation initiale d’habitat temporaire2. Mais faut-il espérer une once de lucidité chez ceux qui ferment les yeux ?


      1. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/maurice-berger-le-fonctionnement-communautaire-familial-ou-religieux-legitimise-la-violence-20240409 ↩︎
      2. https://www.fondapol.org/app/uploads/2024/03/239-aubouin-fr-2024-03-22-w-1.pdf ↩︎