Après l’USM et le syndicat de la magistrature, après le CRAN, le MRAP et la LICRA, voilà que c’est au tour de France Télévisions de rejoindre la meute de ceux qui veulent expulser Eric Zemmour du paysage audiovisuel français. D’après le blog de Jean-Marc Morandini, Patrice Duhamel, directeur général de France 2, a interrogé la société de production « Tout sur l’écran » sur « les mesures qu’elle comptait prendre pour que cette polémique ne finisse pas par porter atteinte à la réputation de France Télévisions ». S’agit-il d’une ouverture de parapluie, manière élégante de répondre aux curés du politiquement correct qu’il fait son boulot ? Ou s’agit-il d’une manière d’inviter Catherine Barma à se débarrasser de Zemmour ? Chacun se fera son opinion en analysant les termes. Ce qui est certain, en revanche, c’est que la chasse continue.
Juge ripoux : un métier d’avenir

Déjà bien amochée par le scandale des « cols rouges » de l’hôtel Drouot, ma fierté savoyarde a pris un nouveau coup lorsque j’ai découvert que, pendant une dizaine d’années, les administrateurs judiciaires locaux avaient graissé la patte des juges chargés de prendre des décisions en matière commerciale (faillites, liquidations judiciaires, etc.). Ils obtenaient ainsi des décisions qui les arrangeaient, le plus souvent au détriment des sociétés où ils exerçaient leur mission de mandataires judiciaires.
L’affaire des juges ripoux de Haute-Savoie avait déjà eu les honneurs de la grande presse en septembre 2008, lorsque Marianne, suivie par d’autres journaux de la capitale, révélait qu’un administrateur judiciaire d’Annecy, Robert Meynet, et une juge faisaient l’objet d’une information judiciaire instruite au parquet de Lyon pour corruption active et passive.
L’affaire est toujours en cours, mais les pauvres bougres qui ont été victimes des manigances des robins (ils sont une trentaine dans la région), attendent, pour certains depuis plus de dix ans, que la justice reconsidère leur dossier à la lumière des préjudices subis par la mise en œuvre de ce système mafieux.
Ainsi, une habitante de mon village dont l’entreprise familiale avait fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire jugée par l’une des magistrates mise en cause, ne peut avoir accès au reliquat de ses biens, même après avoir remboursé toutes ses créances. Il leur faut d’abord faire reconnaître que la manière dont la faillite de l’entreprise avait été prise en main par Robert Meynet et la juge en question les a gravement lésés, et cela prend du temps, beaucoup de temps. Ce sont des gens simples, qui travaillent dur et n’ont pas les moyens matériels de mener une guerre d’usure judiciaire. Il faut s’appeler Bernard Tapie pour avoir droit à un traitement spécial dans ce genre d’histoires…
En revanche, les juges qui ont touché les bakchichs généreusement distribués par Robert Meynet s’en tirent bien, très bien même.
Ainsi, l’ex-épouse d’un homme politique important, qui vient d’être nommé au Conseil constitutionnel, avait, du temps où elle était juge à Annecy, reçu de Meynet un stylo et un sac d’une valeur à l’époque, de 6.200 francs (presque 1000 euros). Elle vient n’être nommée conseillère à la Cour de cassation et n’a aucun souci judiciaire à se faire. Les faits ont été jugés trop anciens pour justifier des poursuites. Un de ses collègues et son épouse, tous deux magistrats, ont été gratifiés d’un vélo d’une valeur de 19.950 francs pour monsieur (avec une telle machine on ne doit même plus avoir besoin de pédaler !) et d’un tableau d’une valeur de 6.200 francs pour madame. Même motif, même non punition : prescription et promotion à Lyon. Seule l’une des magistrates, qui fut, elle, promue à la cour d’appel de Douai est poursuivie pour des chèques encaissés par elle-même et son mari en temps non prescrit. En revanche, le fait que Robert Meynet ait financé son voyage de noces en Terre Sainte (un mois dans des hôtels de luxe) ne peut plus lui être reproché.
Tout cela parce que le parquet d’Annecy, saisi de ces faits par l’une des victimes de ces agissements, Fernand Vogne, a tout fait pour enterrer le dossier, jusqu’à ce qu’une plainte avec constitution de partie civile ne vienne la relancer et que la chancellerie, en 2008, se mêle de ce dossier de juges ripoux. Le ministère demande alors au procureur général de Chambéry de saisir la Cour de cassation pour demander la délocalisation du dossier, qui passe alors d’Annecy à Lyon. L’inertie corporatiste des magistrats du parquet d’Annecy a permis de sauver la mise à ceux des collègues qui auraient dû, en bonne justice, se retrouver sur le banc d’infamie. Peut-être même qu’un jour l’un ou l’une d’entre eux se retrouvera sur une liste d’Europe Ecologie aux élections, c’est très tendance en ce moment chez les magistrats.
UMP : rémission impossible

Techniquement, la grosse colère piquée ce mardi par le Premier ministre contre les éléments les plus regimbeurs de sa majorité est tout à fait justifiée : ce n’est pas le meilleur moment pour déballer son linge familial tout cradingue face caméras. « Entre les deux tours, a-t-il dit, nous sommes engagés ensemble dans un combat et tous ceux qui veulent par des critiques, qui sont des critiques inutiles, affaiblir la majorité commettent une faute contre cette majorité. » A priori, l’argument est imparable, le B-A BA de la tactique implique qu’on attende dimanche 20 heures pour se livrer à ce genre de sport.
Sauf qu’il n’est pas dit que lesdites critiques, qui ne manqueront pas de se multiplier après l’heure fatidique des premières estimations, seront mieux reçues. Depuis deux ans et demi, dans la majorité présidentielle, la moindre appréciation nuancée relève de la Haute Cour. Nicolas Sarkozy ne veut voir qu’une tête, en l’occurrence, la sienne. C’est un des revers de la pratique managériale qui tient désormais lieu de Constitution secrète à la néo-Ve. Ou bien on est avec Coca à 100 %, ou alors on fait le jeu de Pepsi. Point barre. Au passage, le revers de ce revers étant que plus on exprime son accord total avec le Président, plus on progresse dans l’organigramme. À l’arrivée, ça donne un Estrosi, un Chatel ou une Penchard au conseil des ministres, mais c’est une autre histoire…
Revenons à nos moutons noirs de l’UMP. Qu’a dit de si grave, par exemple, Alain Juppé ? Eh bien, il a osé écrire sur son blog qu’« une réflexion s’impose désormais sur le rythme des réformes, la méthode selon laquelle elles sont lancées et préparées, la concertation qui les accompagne, la façon dont elles peuvent être mieux comprises et acceptées par une opinion que la crise déboussole ». On ne peut pas dire que ce soit extrêmement violent. Ni même que ça ne relève pas du bon sens minimal. Ça acte juste qu’il y a comme un problème quelque part, sinon on voit mal pourquoi, ce dimanche-là, les électeurs UMP ont préféré faire la queue chez Leroy-Merlin plutôt qu’au bureau de vote. Mais il faut croire que se poser ce genre de questions – ne serait-ce que dans un blog – c’est jouer contre son camp, pour reprendre une de ces délicieuses métaphores footballistiques dont nos politiques – ou leurs nègres sous-payés – émaillent leurs déclarations. Bref, Alain, soit tu la fermes, soit tu viens écrire sous pseudo chez Causeur (mais alors, essaye de rajouter quelques gags), soit tu tiens ton blog en copiant/collant les analyses de fond de Frédéric Lefebvre, genre « les p’tits gars, rien est foutu, tout est possible, y’ a qu’à convaincre les abstentionnistes !… »
Sauf que là aussi ça craint sur les bordures. C’est bien beau de décréter la mobilisation générale pour ramener les électeurs de droite aux urnes. Mais qu’est-ce qu’on leur raconte de funky pour les remettre dans le droit chemin ? D’où la question toute bête que pose un autre mouton noir, Ladislas Poniatowski : « Nos leaders nationaux de l’UMP ne peuvent pas dire qu’il y a une masse de gens à aller convaincre de venir voter. Je pense que la première tâche pour les convaincre, c’est de les écouter. »
Et là, pour le coup, on comprend que Fillon soit colère : c’est pile poil la question qu’il ne fallait pas poser. Parce que l’équation est rigoureusement insoluble. L’UMP en panique court après trois lièvres différents : le dedroite boudeur, l’écolo indécis et l’ex-lepeniste converti au sarkozysme et 2007 et redevenu lepéniste depuis. Or, les stratégies de reconquête des uns et des autres sont antagoniques. Plus on en fait des tonnes (et ces jours-ci, ça y va !) sur le Grenelle de l’Environnement, et donc sur la taxe carbone, plus on dissuade le plombier UMP d’Aubusson de se bouger les miches dimanche. Et quand on insiste lourdement sur la sécurité, on dissuade du même coup les électeurs hulotistes CSP++ d’avoir un autre vote au second tour que celui préconisé par Cécile Duflot. Et ainsi de suite…
Le grand écart, c’est spectaculaire, mais c’est un sport dangereux. Faut de la souplesse, et aussi de l’entraînement. Sans quoi, on risque de se faire mal. Très mal même. Et au mauvais endroit…
Hippopodame, hippopodrame ?
J’adore les Etats-Unis. C’est la patrie immortelle de John Wayne, de Steinbeck, de la poupée Barbie et d’Ava Gardner. Mais, des fois, cette Amérique me fâche. Ainsi, le figaro.fr nous apprend qu’une jeune américaine, Donna Simpson, 42 ans, s’est lancée un défi gargantuesque : avaler l’équivalent de 12.000 calories par jour (alors que 2.000 suffirait bien) afin de s’arracher à son poids-plume actuel de 273 kilos pour tendre à l’objectif des 450 kilos, d’ici deux ans. On voit la jeune-femme, dans les pages du Daily Mail britannique, le regard mutin, sur le point d’ingurgiter une bonne dizaine de hamburgers et autant de donuts bien gras. Cette mère de famille, assurant être en « parfaite santé » (on aimerait avoir l’avis d’un cardiologue), est pourtant obligée de se déplacer en voiturette de golf dans les rues de sa petite ville du New-Jersey. Le plus agaçant n’est pas que Donna Simpson souhaite peser le poids tératologique de dix Kate Moss ou d’une Fiat Panda, mais qu’elle entraîne dans son pari stupide toute l’Amérique, qui ne manquera pas d’être à nouveau discréditée – par le petit bout de la lorgnette – à l’occasion de cette info insolite. La triste Amérique de Ronald Mc Donald, masquant toutes les autres. Clou du spectacle : pour financer les 750 $ de nourriture hebdomadaire nécessaire à l’accomplissement de ce défi, Donna a monté un site Internet où des hommes peuvent payer pour… la regarder manger. Vous avez dits « cirque » ? Hippopodame, hippopodrame ?
L’objet du Dély

Il y a des torchons qu’on n’aime pas lire. Il y a des torchons qu’on n’aime pas lire, surtout dans son journal.
Lorsqu’on est un fidèle de Marianne depuis le numéro 1, lire l’article consacré par Renaud Dély à Eric Zemmour dans l’édition de cette semaine rend furieux. On a le droit de ne pas aimer Eric Zemmour – et même le devoir de l’exprimer dans cette éventualité – et de ne pas être d’accord avec la thèse centrale de son livre,ce qui est d’ailleurs mon cas, ce n’est pas une raison pour piétiner allègrement les principes fondateurs de l’hebdomadaire fondé par Jean-François Kahn[1. On passera sur l’article d’Alexis Lacroix qui, heureusement, ne tombe pas dans les mêmes travers que son confrère. Même si on a l’impression qu’il n’a vraiment lu que le dernier chapitre : contrairement à ce qu’écrit Lacroix, Zemmour n’est en phase avec l’histoire de France de Bainville – qui détestait tous les empires et leur préférait les Nations – que sur son analyse du traité de Versailles. Pour le reste, il est davantage proche de Michelet, lequel n’aurait certainement pas vu d’un mauvais œil la comparaison zemmourienne entre la France et Rome.].
La dernière phrase du papier symbolise à elle seule ce qui motivait le rédacteur en chef-adjoint de Marianne. Nuire. Lorsqu’on est capable de moquer avec arrogance la vie privée de l’objet de son article, en l’occurrence les personnes que celui-ci invite à son anniversaire, il est certain qu’on à affaire à quelqu’un qui ne s’embarrasse pas de la moindre éthique. Minable. Vous avez acheté Marianne, vous avez du sous-Closer en plus snob. Remboursez !
Lorsqu’il relaie d’éventuelles jalousies de confrères du Figaro, sur le fait que Zemmour refuserait des piges pour se faire rémunérer « grassement » à la télé et à la radio, de qui se moque t-il ? Faut-il voir dans le « grassement » une jalousie personnelle ? Yves Calvi et Eugène Saccomano paieraient-ils moins que Laurent Ruquier et Christophe Baldelli[2. Directeur de RTL.] ? C’est possible mais ce n’est guère glorieux d’étaler tant de rancœur personnelle dans son journal. Au fait, qu’en pensent les autres journalistes de Marianne ? Ont-ils marginalisé Dély à force de le voir sur France 5 ou de l’écouter discuter ballon rond à « On refait le match » ? Quand bien même s’agirait-il de bénévolat de sa part que cela pourrait expliquer la manière dont il bâcle certains papiers, dont celui qui nous occupe.
On pourrait s’arrêter là. L’opinion que nous avons de Renaud Dély et la confiance que nous pouvons lui accorder seraient déjà réduites à peau de chagrin. Mais il y a pire.
Ce que la quasi-totalité des lecteurs de Marianne ne savent pas, c’est que Renaud Dély quitte Marianne et que ce papier fut le dernier rédigé pour l’hebdo de la rue Boulanger. Ce qu’ils ne savent pas – et ils auraient été certainement reconnaissants d’en être informés, c’est qu’il a été embauché par France Inter pour assurer la rédaction en chef de la matinale de France Inter. Joli cadeau de bienvenue à Philippe Val qui ne doit pas apprécier que les audiences de RTL dans cette tranche horaire profitent de l’arrivée récente d’Eric Zemmour. Avant même qu’on lui verse ses premiers émoluments, la recrue travaille déjà pour la bonne cause.
On me dira que la nature humaine est ainsi faite. Certes. Mais Marianne ne nous avait pas habitués à cela. Et l’hebdo a souvent traqué avec raison les conflits d’intérêts qui déconsidèrent la politique, les affaires ou la Presse. Dès lors, qu’on ait confié à Renaud Dély la rédaction d’un article sur Zemmour pose question. Si on est soulagé d’apprendre qu’on n’aura plus à le lire, on s’interroge sur la manière dont est aujourd’hui dirigé notre hebdo – de moins en moins – préféré.
Et, pour tout dire, on attend des réponses.
Si tu avances et que je recule…

On est très injuste, à droite, avec Nicolas Sarkozy. Finalement, ses promesses, ses vraies promesses, celles qui étaient inscrites sur la feuille de route donnée par ses amis du Fouquet’s, il les a tenues et il les tient. Les rapports de force entre capital et travail n’ont jamais été aussi défavorables à ce dernier, le bouclier fiscal est toujours là, le principe de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux est appliqué avec une rigueur qui ferait passer un policier tchékiste pour le clown Popov, il a sauvé les banques victimes d’une crise créée par leur propre rapport psychotique à la spéculation et, pour finir, il a lancé un beau débat sur l’identité nationale, histoire de faire oublier au futur ouvrier délocalisé son triste sort et de l’intéresser, dans un grand souci pédagogique d’émancipation, à des questions philosophiques, politiques, voire métaphysiques : qui es-tu, toi, au fond ? Que signifie être français, oui, toi, là, devant ta raffinerie, et pose cette banderole, s’il te plaît, arrête de mettre le feu à ce pneu ou de casser cette sous-préfecture et assieds-toi, réfléchis à tes ancêtres les Gaulois, ça te changera les idées.
Non, décidément, on est injuste avec le Président. Le voilà, le malheureux, qui se retrouve avec un parti unique qui est passé derrière le PS. Le voilà, aussi qui doit faire face une abstention massive qu’il est difficile de ne pas prendre comme un désaveu personnel : quand bien même on tente de faire accroire le contraire, la carte électorale ne ment pas et les zones où l’on a voté avec les pieds sont celles qui l’avaient plébiscité au premier tour de 2007.
Et, cerise sur le gâteau, c’est le grand retour du FN.
Et là, ce n’est vraiment pas juste. Parce que Sarkozy, il faut s’en souvenir, avait promis d’en finir avec Le Pen père et fille, d’éradiquer ces Archaïques aux questions embarrassantes (immigration, insécurité) en les récupérant à son compte et en les ripolinant aux couleurs clinquantes mais acceptables, au moins un temps, du berlusco-populisme. Il a même fait un ministère pour ça…
Alors que s’est-il passé ? Parce que tout de même, tout était bétonné, bouclé, verrouillé grâce, notamment, à cette technique politique très en vogue depuis les années 1990 et qui s’appelle la triangulation. La triangulation, inventée par un conseiller de Clinton, consiste à s’approprier les idées de l’adversaire en les mélangeant avec les siennes, histoire de lui retirer le pain de la bouche. Elle fut utilisée par exemple avec succès par un Tony Blair qui partit du constat sociologique d’un Royaume Uni psychologiquement conservateur malgré sa demande de réduction des inégalités après deux décennies de thatchero-majorisme. Ségolène Royal elle-même surfa un instant sur des sommets de popularité qui lui permirent de s’imposer au PS pour la présidentielle grâce à des thèmes banalement familialistes et sécuritaires qu’elle renomma « égalité homme/femme » ou « ordre juste ».
Nicolas Sarkozy, lui aussi, a été un grand triangulateur. Pour la gauche, la politique d’ouverture a effectivement déstabilisé le camp d’en face. On avait l’impression dans l’opinion que le PS n’avait pas su utiliser ses compétences et que Sarkozy était plus pragmatique qu’idéologue et ne recherchait que le gouvernement des meilleurs. Quant à l’extrême droite, sans trop se forcer, il a repris ses thèmes classiques : immigration et sécurité en leur donnant le sourire politiquement correct de messieurs Hortefeux et Besson. D’ailleurs, un moment, toute critique émise sur cette politique dure risquait la « reductio ad Petainum » et se voyait discréditée : « Enfin, vous exagérez, ce n’est pas la même chose. » Et non, ce n’était pas la même chose, effectivement. C’est même tout l’art de la triangulation d’une idée, qui peut se résumer à ce vers de Verlaine : « Et qui n’est chaque fois ni tout à fait la même ni tout à fait une autre. »
Seulement voilà, en voulant trianguler l’extrême droite, Nicolas Sarkozy ne s’est pas aperçu exactement de ce qui changeait comme une vague de fond dans la société française et explique d’ailleurs aussi bien le score du Front de Gauche que celui des Le Pen : la question sociale, avec la crise, a fait un retour en force.
Le licenciement massif fait plus peur que l’Arabe, le harcèlement au boulot que l’insécurité dans le métro, la silhouette d’une cheminée d’usine désaffectée que celle, hypothétique, d’un minaret. Le plus drôle, dans cette histoire, c’est que le Front National et Marine Le Pen qui en est évidemment le nouveau visage, l’avaient déjà compris. Ils ne sont pas dans l’autisme des palais ministériels, ils sont sur le terrain. Ils ne fantasment pas le peuple, ils le voient. Ceux qui ont suivi la redoutable campagne de Marine Le Pen dans le Nord-Pas-de-Calais et ses 18 % à l’arrivée comprendront ce que je veux dire.
Pour le Nord, vieille terre ouvrière qui a accueilli pour la plus grande gloire de l’industrie française des vagues d’immigrations depuis cent ans, l’étranger n’est pas le problème principal. La misère, si. Marine le sait. L’immigration n’a pas été le thème central de sa campagne, loin de là, et si elle avait fait le commencement de l’ombre d’un début de dérapage, genre Ali Soumaré, on ne l’aurait pas ratée tant elle a été scrutée dans l’espérance d’une faute que l’on se serait empressé de rendre rédhibitoire. Eh bien non, elle a fait une « campagne sociale » sur les thèmes de la désindustrialisation, du pouvoir d’achat, de la mondialisation malheureuse, de la fierté ouvrière.
Comme quoi, au petit jeu de la triangulation, Monsieur le Président, on finit toujours par trouver meilleur que soi.
Gordon Brown toujours pas mort
On peut penser ce que l’on veut du premier ministre anglais, mais sa faculté de récupération et sa pugnacité forcent l’admiration. Conformément à ce que l’on pressentait, il est très loin d’avoir abandonné la partie, bref Gordon y croit encore dur comme fer.
En annonçant la présentation du budget pour le 24 mars, il vient enfin de lancer la campagne électorale pour un scrutin qui devrait désormais se tenir le 6 mai, et compte bien en tirer avantage pour assurer sa régulière remontée dans les sondages. Le budget, son ultime carte, celle qui peut emporter le morceau en convainquant les électeurs et les marchés qu’il dispose d’un plan crédible pour réduire le déficit… La manœuvre semble relever de l’incantation, mais, avec ce diable d’homme, on se prend à croire à l’impossible.
Aux dernières nouvelles, YouGov pour le Sunday Times crédite les conservateurs de 37 % des intentions de vote contre 33 % au Labour. Autrement dit, plus rien. La campagne et surtout les imminents débats télévisés seront décisifs. David Cameron doit se répéter devant sa glace tous les matins en se rasant, non je n’ai pas peur, non je n’ai…
Allègre mais pas trop

Si vous en êtes d’accord, vous serez les arbitres. J’ai un léger différend familial avec mon père qui, s’il n’en est pas moins mon père, a parfois tort. En l’occurrence, il s’évertue à trouver intéressants les plats propos de Claude Allègre. Je crains pour ma part d’y avoir déclaré une allergie.
Bien sûr, cela m’emmerde un peu. Parce que ça me classe notamment avec les écolos et avec un paquet de gens qui croient tenir, là et ailleurs, leur brevet de rectitude morale. Ça me met du côté du Monde ou de Libération. Contre Valeurs Actuelles. Ça, c’est un peu la honte. Fort heureusement, il reste Marianne, qui me permet de me réconcilier avec l’idée que Allègre, c’est bien de la fumisterie, du poujadisme climatique. Et de me sermonner, vertement : être minoritaire n’est pas nécessairement le gage que l’on a raison. La majorité a parfois raison. Notamment quand j’en fais partie.
Et sur le réchauffement climatique, il faut dire qu’Allègre me brise les noix. Remarquez, je n’y connais rien en réchauffement climatique. Comme Allègre, apparemment. Comme l’ensemble des personnes avec lesquelles je m’en entretiens, soit dit en passant. Comme mon père. Oui, même mon père. Qui n’en est pas moins mon père, notez bien. C’est que, j’ai beau retourner le truc dans tous les sens[1. Je parle du réchauffement climatique, donc, et plus de mon père.], j’ai la grosse impression que tout ceci est affaire de présupposés. Comme tout, me direz-vous. Mais plus que tout, vous répondrai-je. Fermez la parenthèse, merde à la fin.
Bon, prenez les libéraux. Ok, Allègre a rejoint Sarkozy. Et l’on se souvient de sa sortie du QG de Sarko, à la dérobée. De son ample et chaloupée démarche, empruntant au mammouth sa grâce printanière. Mais tout de même, voir Valeurs Actuelles chérir ainsi un ancien ministre de Lionel Jospin, ça vous laisse comme deux ronds de flan. Y’a anguille. Moi, qui ne suis que moi – certes, mais c’est déjà ça[2. Pour les incultes, ça commence comme ça : « Et moi, moi qui ne suis que moi / entre mendiant et roi / quand je rentre chez moi / je deviens comédien, mes espoirs, mes chagrins / je les laisse en chemin. »] – je ne peux pas m’empêcher de penser que si les libéraux chérissent Allègre, c’est moins par souci de vérité scientifique, que par allergie à la règlementation. Or voilà, si on laisse l’homme entièrement libre de déterminer son comportement et si l’origine humaine du réchauffement climatique est avérée, il est probable qu’un jour il jure, mais un peu tard, qu’on ne l’y reprendra plus. Alors de fait, on l’encadre un peu.
Vous me direz : de l’autre côté, c’est le goût de l’Etat, c’est le collectivisme, c’est l’intervention dans ma vie et celle du voisin. Ce serait une méfiance à l’égard de l’Homme. Sans aller jusque-là, possible qu’il y ait une méfiance vis-à-vis de la société de consommation. Un certain goût pour la sobriété.
Alors voilà, sur le climat, malheureusement, on part tous de quelques présupposés. Et, sauf surprise, l’immense majorité d’entre nous est incapable d’appuyer son avis sur une connaissance personnelle. Cela dit, tout de même…
Tout de même, il y a des petites choses, des indices, des éléments infimes mais qui suscitent ma méfiance. Il y a ce ton, cette mise en avant personnelle, mise en scène, auto-représentation en chevalier blanc pourfendant la pensée forcément unique, mise en scène qui dérive lorsque, comme le souligne Jade Lindgaard, l’homme ne craint pas d’entamer son propos par un vibrant « Nous, les résistants… » Et de faire un parallèle avec la résistance au nazisme ou au pouvoir soviétique. Faut-il aimer le burlesque ou n’avoir pas le sens du ridicule pour en arriver là ?
Il y a dans tout ce scénario la marque habituelle du complotiste, fier de se draper dans le costume du martyre. Et « l’imposture climatique » de faire écho à « l’effroyable imposture ». De renvoyer à ces diatribes contre ceux qui vous cachent tout, ne vous disent rien, mais qui, c’est certain, s’organisent dans l’ombre.
Ridicule encore lorsque Dominique de Montvalon lui adresse ces questions empressées : « Pourquoi ? Parce que vous êtes foncièrement rebelle ? », « Vous, ils n’ont pas réussi à vous “normaliser” ! », « Vous êtes devenu un véritable “expert” en climat, ne vous en déplaise ! », « Vous êtes décidément l’apôtre de la complexité… »
Faut-il que l’esprit fin soit embrumé pour ne pas discerner là la complaisance et la flagornerie de son intervieweur ?
Ridicule encore lorsque celui qui veut incarner la rigueur scientifique définit le GIEC, sa cible directe, l’instrument du grand complot, comme le « Groupement international pour l’étude du climat », alors qu’il s’agit du « Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat » (cf Le Monde). Moins amusante et révélatrice d’un esprit plus petit qu’il ne voudrait le faire croire, cette pique inutile, déplacée, incongrue et puérile, lorsqu’il évoque « l’incapacité (congénitale ?) des climatologues à maîtriser certaines méthodes statistiques ».
On reprochait à l’article du Monde de faire son marché dans les erreurs qui parsèmeraient le livre de Claude Allègre. Mais n’est-ce pas précisément ainsi que procède Claude Allègre avec les travaux de la communauté scientifique ? Pour celui qui veut se parer des vertus scientifiques, n’est-il pas gênant par exemple de présenter comme le résultat d’un vote de « spécialistes américains du climat » celui de présentateurs météo des chaînes de télévision américaines ?
On s’amusera encore de l’aversion proclamée pour le principe de précaution de celui qui déclame définitivement : « un pays qui n’assume pas l’idée du risque n’avance plus. Le risque, c’est la vie », mais qui, lorsqu’il fut décisionnaire et non pas simple commentateur, provoqua l’évacuation de 76.000 personnes autour de la Soufrière, contre l’avis d’Haroun Tazieff, qui soutenait que l’éruption serait sans danger… ce qui se confirma.
Mais il y a plus substantiel. On pourrait s’étonner que « l’apôtre de la complexité » emploie force comparaisons vulgarisatrices pour faire triompher son point de vue. Comme si, finalement, il ne fallait qu’un peu de bon sens dans tout ça. D’ailleurs, il le soutient. Tant qu’à faire. C’est Jean-Louis Fellous (ancien responsable des programmes d’observation de la Terre du CNES et ancien directeur des recherches océaniques de l’Ifremer) qui lui répond : « »Imposture que d’affirmer qu’on peut prévoir, qu’on sait prévoir le climat qu’il fera dans un siècle. (…) On sait, au contraire, que la météo est imprévisible à plus de quatre jours, et parfois moins. » Élève Allègre, vous êtes recalé ! Vous confondez (mais vous le faites exprès, je n’en doute pas) la prévision météorologique et la projection climatique. Un médecin serait imprudent de prévoir votre disparition à court terme. Mais il lui est facile d’affirmer que dans un siècle vous ne serez plus des nôtres (moi non plus, d’ailleurs). De même, la prévision déterministe du temps météorologique trouve ses limites dans une fourchette de 4 à 15 jours, selon la latitude. Mais on peut prédire la prochaine glaciation, rythmée par les oscillations de l’orbite terrestre sous l’influence des autres astres du système solaire.
Autres erreurs relevées, lorsque Claude Allègre affirme que les climatologues attribueraient à un critère unique le réchauffement climatique, ou que le changement climatique serait le seul problème auquel l’humanité ait à faire face[4. En oubliant l’eau, donc, puisque Claude Allègre aime à se faire passer pour l’un des rares lucides à en percevoir l’enjeu. Et pourtant.].
D’ailleurs, on ne sait plus bien si c’est l’origine humaine ou carrément le réchauffement climatique que conteste Allègre, puisqu’il soutient que « l’on ne sait dans quel sens, finalement [le changement climatique] aura lieu ». Mais comme le lui rappelle, entre autres, Jean-Louis Fellous : « N’en déplaise à Claude Allègre, il n’y a pas de satellite climato-sceptique. »
C’est que contrairement à ce que soutient Claude Allègre, il semblerait bien que le changement climatique soit mesuré, observé et quantifié. Et modélisé, en prenant compte, comme le souligne realclimate parmi d’autres points de divergences, d’éléments dont Claude Allègre affirme pourtant qu’ils seraient négligés : « Mais il y a mieux : « Comme on ne sait pas bien comment se forment les nuages, on les néglige ! Comme on maîtrise mal le rôle des aérosols et des poussières, on les néglige ! » (p. 104) C’est complètement faux. Nuages, aérosols et poussières (comme variations de l’irradiance solaire et éruptions volcaniques) sont tous pris en compte par les modèles actuels. Les modèles qui négligent l’influence de l’augmentation du CO2 n’arrivent pas à reproduire le réchauffement des derniers trente ans, et c’est précisément pour cette raison que le CO2 a été confirmé comme le responsable principal du réchauffement global. »
Vous me le direz, pourtant je le sais : je n’ai guère de points d’appui évidents pour justifier ma position – même mon radiateur est un mauvais indicateur –, mais au pif, là, je le sens pas. À cause d’une foultitude de trucs qui coincent. À cause d’un boniment qui m’en rappellent bien d’autres, de ces bonimenteurs simplificateurs qui profitent de la complexité du sujet d’étude[5. Comme, tiens, Etienne Chouard et la Constitution européenne.] pour fourguer des idées simplistes et fausses. Et mon pif, d’après ma mère, est fiable. Pour sentir les gens, voyez. Alors, d’accord, c’est ma mère. Mais de la même manière qu’une idée n’est pas forcément fausse parce qu’elle est partagée par la majorité, ma mère a parfois raison en ce qui concerne mes grandes qualités. Et pour ce qui est de l’allègre imposteur, j’emprunterai sa conclusion à Jade Lingaard : « Si Claude Allègre a raison, rien de tout cela n’est très grave. Et la postérité lui reconnaîtra peut-être son mérite. Mais s’il a tort ? Il nous fait perdre un temps précieux. En retardant la mise en place de mesures qui permettraient dès aujourd’hui de réduire les gaz à effet de serre, il prend la responsabilité de mettre des vies humaines en péril. »
Fausse route et match nul

Vaut-il mieux avoir tort avec Élisabeth Badinter ou tort avec Edwige Antier ? Telle semble être l’alternative qui nous est offerte, à nous les femmes de 2010. Et c’est pas joyeux. A ma droite, l’option lénifiante de la maternité niaiseuse et rose bonbon ; à ma gauche, une belle mécanique de pensée mal appliquée. Même s’il est injurieux pour la seconde de les situer au même niveau, dans les deux cas : fausse route. Fausse route, tel était d’ailleurs le titre du dernier essai d’Elisabeth Badinter (Odile Jacob, 2003) consacré aux régressions du féminisme, sur lesquelles elle revient aujourd’hui avec les mêmes arguments : l’instinct maternel n’existe pas, et la maternité n’est qu’un aspect parmi d’autres de la féminité. Sa crainte principale ? La « guerre souterraine » livrée contre les femmes qui travaillent et/ou n’ont pas d’enfant, dont Mme Antier serait le héraut (ses conseils sont, il est vrai, particulièrement gnangnan, mais parler d’une « guerre » est excessif).
[access capability= »lire_inedits »]Difficile de s’attaquer à un tel mythe vivant : Badinter la juste, la pure, celle dont les très courageuses prises de position sur le voile (à bannir) ou sur les quotas (à éviter) ont fait honneur à la France, à la République et aux femmes. Dur, dur, de contredire une telle intelligence, une telle réflexion. Et pourtant.
D’abord, Badinter s’élève contre un supposé « retour du naturalisme » et ses ravages sur l’émancipation des femmes. Mais en dehors de quelques excitées de la Leache League et des injonctions médiatiques de Mme Antier (on peut changer de chaîne), il me semble au contraire qu’on n’a jamais autant fichu la paix aux femmes concernant leurs choix en la matière. On assiste, c’est vrai, à un retour de mode de l’allaitement (sans oublier, mais oui, que certaines femmes allaitent avec plaisir), mais je n’ai vu nulle part d' »injonctions soutenues par les plus respectables institutions » ni subi d' »oukases des pédiatres ». La « maternité triomphante » est peut-être en vogue, mais elle n’empêche pas les femmes françaises de travailler, au prix d’acrobaties parfois vertigineuses entre nounous, horaires de crèche, pères participant encore peu, etc. Ce que Badinter souligne, mais pour alimenter l’argument inverse ! Les femmes feront bientôt, dit-elle « le calcul des plaisirs et des peines », comme si le désir d’enfant ne pouvait en aucun cas être une envie qui nous dépasse et écrase sous elle tous les arguments les plus raisonnables. « Il faut perdre la tête… ou perdre sa race », disait crûment Paul Valéry, et comme c’est vrai : vouloir un enfant, c’est perdre la tête, et c’est tant mieux (pour ceux qui en veulent). Badinter cite en exemple de résistance à l’air maternel du temps les 25 % de femmes allemandes qui n’ont pas d’enfant : bel exemple, dit-elle, d’un refus de modèle imposé. Or, en Allemagne, avoir un enfant signifie souvent renoncer à toute vie professionnelle puisque les écoles ferment en début d’après-midi et que la garde à domicile n’est ni répandue ni bien vue (en Suède non plus). Dans cette perspective, il me semble au contraire que les Allemandes sont moins libres que les Françaises, qui peuvent mener les deux de front, ce que beaucoup parviennent fort bien à faire. Certes, leur vie est très souvent tiraillée, c’est vrai, et leurs exploits quotidiens, comparables à ceux du marathon, sont admirables et peu reconnus : mais elles continuent. À croire qu’elles aiment ça…
Enfin, un acteur légèrement indispensable de la maternité brille par son absence dans ce livre : le père. Les hommes semblent totalement exclus du désir (ou plutôt du « calcul ») des femmes dans cet ouvrage, dans lequel ils sont avant tout cités comme une donnée entravante et/ou pesante, par leur absence d’aide et leur peu de compréhension des doubles tâches féminines : « Le bébé, écrit-elle, est le meilleur allié de la domination masculine » (propos presque injurieux pour les femmes, qui seraient donc dépourvues de libre-arbitre au point de subir le désir d’enfant d’hommes dominateurs… autour de moi, j’ai plutôt vu l’inverse). Pourtant, les bébés − jusqu’à nouvel ordre ! − se font toujours à deux, détail que Badinter semble négliger. Depuis la fin du XVIIIe siècle et la maîtrise de la fécondité dans notre précoce pays, les hommes et les femmes qui décident ou non d’avoir des enfants y ont souvent pensé ensemble. Choix fous, parfois aliénants, difficiles pour les couples : peut-être, mais choix tout de même. Et c’est là que ça se complique. Car en admettant que « retour du naturalisme » il y ait, ne pourrait-on y lire plutôt une sorte de retour du refoulé, de cette époque si dure − et si douce − où l’on n’avait pas le choix ?
Cette liberté si chèrement acquise ne nous pèse-t-elle pas, par moments ? Avoir un enfant aujourd’hui, c’est l’avoir voulu. Telle est sans doute la vraie question. Et la clef de bien de nos contradictions modernes.[/access]
C’est Graves, docteur ?
L’acteur Peter Graves vient de décéder à l’âge de 83 ans dans sa propriété de Pacific Palissades, près de Malibu. Nous ne verrons plus son élégante silhouette répondre aux injonctions du département d’Etat niant toute responsabilité, etc. Peter Graves était en effet, dans la série Mission Impossible, celui qui incarnait le chef de la dream team sous le nom de Monsieur Phelps. Apparemment, la mort de Peter Graves est naturelle mais des rumeurs insistantes tournent autour d’un mystérieux dictaphone siglé UMP qui serait parvenu à l’acteur dans la soirée de dimanche : « Monsieur Phelps, votre mission, si vous l’acceptez, consistera à mobiliser les abstentionnistes du premier tour en faveur du parti présidentiel… » C’est alors que Peter Graves, fin connaisseur de la politique française, se serait effondré.
PS : Marc Cohen me fait remarquer que Peter Graves a aussi prononcé une des meilleures répliques de l’histoire du cinéma, en l’occurrence dans Y a-t-il un pilote dans l’avion ? des ZAZ : « Joey, est-ce que tu aimes les films de gladiateurs ? » Dans le monde d’avant, on pouvait encore rire de ces choses-là…
Zemmour : la chasse continue
Après l’USM et le syndicat de la magistrature, après le CRAN, le MRAP et la LICRA, voilà que c’est au tour de France Télévisions de rejoindre la meute de ceux qui veulent expulser Eric Zemmour du paysage audiovisuel français. D’après le blog de Jean-Marc Morandini, Patrice Duhamel, directeur général de France 2, a interrogé la société de production « Tout sur l’écran » sur « les mesures qu’elle comptait prendre pour que cette polémique ne finisse pas par porter atteinte à la réputation de France Télévisions ». S’agit-il d’une ouverture de parapluie, manière élégante de répondre aux curés du politiquement correct qu’il fait son boulot ? Ou s’agit-il d’une manière d’inviter Catherine Barma à se débarrasser de Zemmour ? Chacun se fera son opinion en analysant les termes. Ce qui est certain, en revanche, c’est que la chasse continue.
Juge ripoux : un métier d’avenir

Déjà bien amochée par le scandale des « cols rouges » de l’hôtel Drouot, ma fierté savoyarde a pris un nouveau coup lorsque j’ai découvert que, pendant une dizaine d’années, les administrateurs judiciaires locaux avaient graissé la patte des juges chargés de prendre des décisions en matière commerciale (faillites, liquidations judiciaires, etc.). Ils obtenaient ainsi des décisions qui les arrangeaient, le plus souvent au détriment des sociétés où ils exerçaient leur mission de mandataires judiciaires.
L’affaire des juges ripoux de Haute-Savoie avait déjà eu les honneurs de la grande presse en septembre 2008, lorsque Marianne, suivie par d’autres journaux de la capitale, révélait qu’un administrateur judiciaire d’Annecy, Robert Meynet, et une juge faisaient l’objet d’une information judiciaire instruite au parquet de Lyon pour corruption active et passive.
L’affaire est toujours en cours, mais les pauvres bougres qui ont été victimes des manigances des robins (ils sont une trentaine dans la région), attendent, pour certains depuis plus de dix ans, que la justice reconsidère leur dossier à la lumière des préjudices subis par la mise en œuvre de ce système mafieux.
Ainsi, une habitante de mon village dont l’entreprise familiale avait fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire jugée par l’une des magistrates mise en cause, ne peut avoir accès au reliquat de ses biens, même après avoir remboursé toutes ses créances. Il leur faut d’abord faire reconnaître que la manière dont la faillite de l’entreprise avait été prise en main par Robert Meynet et la juge en question les a gravement lésés, et cela prend du temps, beaucoup de temps. Ce sont des gens simples, qui travaillent dur et n’ont pas les moyens matériels de mener une guerre d’usure judiciaire. Il faut s’appeler Bernard Tapie pour avoir droit à un traitement spécial dans ce genre d’histoires…
En revanche, les juges qui ont touché les bakchichs généreusement distribués par Robert Meynet s’en tirent bien, très bien même.
Ainsi, l’ex-épouse d’un homme politique important, qui vient d’être nommé au Conseil constitutionnel, avait, du temps où elle était juge à Annecy, reçu de Meynet un stylo et un sac d’une valeur à l’époque, de 6.200 francs (presque 1000 euros). Elle vient n’être nommée conseillère à la Cour de cassation et n’a aucun souci judiciaire à se faire. Les faits ont été jugés trop anciens pour justifier des poursuites. Un de ses collègues et son épouse, tous deux magistrats, ont été gratifiés d’un vélo d’une valeur de 19.950 francs pour monsieur (avec une telle machine on ne doit même plus avoir besoin de pédaler !) et d’un tableau d’une valeur de 6.200 francs pour madame. Même motif, même non punition : prescription et promotion à Lyon. Seule l’une des magistrates, qui fut, elle, promue à la cour d’appel de Douai est poursuivie pour des chèques encaissés par elle-même et son mari en temps non prescrit. En revanche, le fait que Robert Meynet ait financé son voyage de noces en Terre Sainte (un mois dans des hôtels de luxe) ne peut plus lui être reproché.
Tout cela parce que le parquet d’Annecy, saisi de ces faits par l’une des victimes de ces agissements, Fernand Vogne, a tout fait pour enterrer le dossier, jusqu’à ce qu’une plainte avec constitution de partie civile ne vienne la relancer et que la chancellerie, en 2008, se mêle de ce dossier de juges ripoux. Le ministère demande alors au procureur général de Chambéry de saisir la Cour de cassation pour demander la délocalisation du dossier, qui passe alors d’Annecy à Lyon. L’inertie corporatiste des magistrats du parquet d’Annecy a permis de sauver la mise à ceux des collègues qui auraient dû, en bonne justice, se retrouver sur le banc d’infamie. Peut-être même qu’un jour l’un ou l’une d’entre eux se retrouvera sur une liste d’Europe Ecologie aux élections, c’est très tendance en ce moment chez les magistrats.
UMP : rémission impossible

Techniquement, la grosse colère piquée ce mardi par le Premier ministre contre les éléments les plus regimbeurs de sa majorité est tout à fait justifiée : ce n’est pas le meilleur moment pour déballer son linge familial tout cradingue face caméras. « Entre les deux tours, a-t-il dit, nous sommes engagés ensemble dans un combat et tous ceux qui veulent par des critiques, qui sont des critiques inutiles, affaiblir la majorité commettent une faute contre cette majorité. » A priori, l’argument est imparable, le B-A BA de la tactique implique qu’on attende dimanche 20 heures pour se livrer à ce genre de sport.
Sauf qu’il n’est pas dit que lesdites critiques, qui ne manqueront pas de se multiplier après l’heure fatidique des premières estimations, seront mieux reçues. Depuis deux ans et demi, dans la majorité présidentielle, la moindre appréciation nuancée relève de la Haute Cour. Nicolas Sarkozy ne veut voir qu’une tête, en l’occurrence, la sienne. C’est un des revers de la pratique managériale qui tient désormais lieu de Constitution secrète à la néo-Ve. Ou bien on est avec Coca à 100 %, ou alors on fait le jeu de Pepsi. Point barre. Au passage, le revers de ce revers étant que plus on exprime son accord total avec le Président, plus on progresse dans l’organigramme. À l’arrivée, ça donne un Estrosi, un Chatel ou une Penchard au conseil des ministres, mais c’est une autre histoire…
Revenons à nos moutons noirs de l’UMP. Qu’a dit de si grave, par exemple, Alain Juppé ? Eh bien, il a osé écrire sur son blog qu’« une réflexion s’impose désormais sur le rythme des réformes, la méthode selon laquelle elles sont lancées et préparées, la concertation qui les accompagne, la façon dont elles peuvent être mieux comprises et acceptées par une opinion que la crise déboussole ». On ne peut pas dire que ce soit extrêmement violent. Ni même que ça ne relève pas du bon sens minimal. Ça acte juste qu’il y a comme un problème quelque part, sinon on voit mal pourquoi, ce dimanche-là, les électeurs UMP ont préféré faire la queue chez Leroy-Merlin plutôt qu’au bureau de vote. Mais il faut croire que se poser ce genre de questions – ne serait-ce que dans un blog – c’est jouer contre son camp, pour reprendre une de ces délicieuses métaphores footballistiques dont nos politiques – ou leurs nègres sous-payés – émaillent leurs déclarations. Bref, Alain, soit tu la fermes, soit tu viens écrire sous pseudo chez Causeur (mais alors, essaye de rajouter quelques gags), soit tu tiens ton blog en copiant/collant les analyses de fond de Frédéric Lefebvre, genre « les p’tits gars, rien est foutu, tout est possible, y’ a qu’à convaincre les abstentionnistes !… »
Sauf que là aussi ça craint sur les bordures. C’est bien beau de décréter la mobilisation générale pour ramener les électeurs de droite aux urnes. Mais qu’est-ce qu’on leur raconte de funky pour les remettre dans le droit chemin ? D’où la question toute bête que pose un autre mouton noir, Ladislas Poniatowski : « Nos leaders nationaux de l’UMP ne peuvent pas dire qu’il y a une masse de gens à aller convaincre de venir voter. Je pense que la première tâche pour les convaincre, c’est de les écouter. »
Et là, pour le coup, on comprend que Fillon soit colère : c’est pile poil la question qu’il ne fallait pas poser. Parce que l’équation est rigoureusement insoluble. L’UMP en panique court après trois lièvres différents : le dedroite boudeur, l’écolo indécis et l’ex-lepeniste converti au sarkozysme et 2007 et redevenu lepéniste depuis. Or, les stratégies de reconquête des uns et des autres sont antagoniques. Plus on en fait des tonnes (et ces jours-ci, ça y va !) sur le Grenelle de l’Environnement, et donc sur la taxe carbone, plus on dissuade le plombier UMP d’Aubusson de se bouger les miches dimanche. Et quand on insiste lourdement sur la sécurité, on dissuade du même coup les électeurs hulotistes CSP++ d’avoir un autre vote au second tour que celui préconisé par Cécile Duflot. Et ainsi de suite…
Le grand écart, c’est spectaculaire, mais c’est un sport dangereux. Faut de la souplesse, et aussi de l’entraînement. Sans quoi, on risque de se faire mal. Très mal même. Et au mauvais endroit…
Hippopodame, hippopodrame ?
J’adore les Etats-Unis. C’est la patrie immortelle de John Wayne, de Steinbeck, de la poupée Barbie et d’Ava Gardner. Mais, des fois, cette Amérique me fâche. Ainsi, le figaro.fr nous apprend qu’une jeune américaine, Donna Simpson, 42 ans, s’est lancée un défi gargantuesque : avaler l’équivalent de 12.000 calories par jour (alors que 2.000 suffirait bien) afin de s’arracher à son poids-plume actuel de 273 kilos pour tendre à l’objectif des 450 kilos, d’ici deux ans. On voit la jeune-femme, dans les pages du Daily Mail britannique, le regard mutin, sur le point d’ingurgiter une bonne dizaine de hamburgers et autant de donuts bien gras. Cette mère de famille, assurant être en « parfaite santé » (on aimerait avoir l’avis d’un cardiologue), est pourtant obligée de se déplacer en voiturette de golf dans les rues de sa petite ville du New-Jersey. Le plus agaçant n’est pas que Donna Simpson souhaite peser le poids tératologique de dix Kate Moss ou d’une Fiat Panda, mais qu’elle entraîne dans son pari stupide toute l’Amérique, qui ne manquera pas d’être à nouveau discréditée – par le petit bout de la lorgnette – à l’occasion de cette info insolite. La triste Amérique de Ronald Mc Donald, masquant toutes les autres. Clou du spectacle : pour financer les 750 $ de nourriture hebdomadaire nécessaire à l’accomplissement de ce défi, Donna a monté un site Internet où des hommes peuvent payer pour… la regarder manger. Vous avez dits « cirque » ? Hippopodame, hippopodrame ?
L’objet du Dély

Il y a des torchons qu’on n’aime pas lire. Il y a des torchons qu’on n’aime pas lire, surtout dans son journal.
Lorsqu’on est un fidèle de Marianne depuis le numéro 1, lire l’article consacré par Renaud Dély à Eric Zemmour dans l’édition de cette semaine rend furieux. On a le droit de ne pas aimer Eric Zemmour – et même le devoir de l’exprimer dans cette éventualité – et de ne pas être d’accord avec la thèse centrale de son livre,ce qui est d’ailleurs mon cas, ce n’est pas une raison pour piétiner allègrement les principes fondateurs de l’hebdomadaire fondé par Jean-François Kahn[1. On passera sur l’article d’Alexis Lacroix qui, heureusement, ne tombe pas dans les mêmes travers que son confrère. Même si on a l’impression qu’il n’a vraiment lu que le dernier chapitre : contrairement à ce qu’écrit Lacroix, Zemmour n’est en phase avec l’histoire de France de Bainville – qui détestait tous les empires et leur préférait les Nations – que sur son analyse du traité de Versailles. Pour le reste, il est davantage proche de Michelet, lequel n’aurait certainement pas vu d’un mauvais œil la comparaison zemmourienne entre la France et Rome.].
La dernière phrase du papier symbolise à elle seule ce qui motivait le rédacteur en chef-adjoint de Marianne. Nuire. Lorsqu’on est capable de moquer avec arrogance la vie privée de l’objet de son article, en l’occurrence les personnes que celui-ci invite à son anniversaire, il est certain qu’on à affaire à quelqu’un qui ne s’embarrasse pas de la moindre éthique. Minable. Vous avez acheté Marianne, vous avez du sous-Closer en plus snob. Remboursez !
Lorsqu’il relaie d’éventuelles jalousies de confrères du Figaro, sur le fait que Zemmour refuserait des piges pour se faire rémunérer « grassement » à la télé et à la radio, de qui se moque t-il ? Faut-il voir dans le « grassement » une jalousie personnelle ? Yves Calvi et Eugène Saccomano paieraient-ils moins que Laurent Ruquier et Christophe Baldelli[2. Directeur de RTL.] ? C’est possible mais ce n’est guère glorieux d’étaler tant de rancœur personnelle dans son journal. Au fait, qu’en pensent les autres journalistes de Marianne ? Ont-ils marginalisé Dély à force de le voir sur France 5 ou de l’écouter discuter ballon rond à « On refait le match » ? Quand bien même s’agirait-il de bénévolat de sa part que cela pourrait expliquer la manière dont il bâcle certains papiers, dont celui qui nous occupe.
On pourrait s’arrêter là. L’opinion que nous avons de Renaud Dély et la confiance que nous pouvons lui accorder seraient déjà réduites à peau de chagrin. Mais il y a pire.
Ce que la quasi-totalité des lecteurs de Marianne ne savent pas, c’est que Renaud Dély quitte Marianne et que ce papier fut le dernier rédigé pour l’hebdo de la rue Boulanger. Ce qu’ils ne savent pas – et ils auraient été certainement reconnaissants d’en être informés, c’est qu’il a été embauché par France Inter pour assurer la rédaction en chef de la matinale de France Inter. Joli cadeau de bienvenue à Philippe Val qui ne doit pas apprécier que les audiences de RTL dans cette tranche horaire profitent de l’arrivée récente d’Eric Zemmour. Avant même qu’on lui verse ses premiers émoluments, la recrue travaille déjà pour la bonne cause.
On me dira que la nature humaine est ainsi faite. Certes. Mais Marianne ne nous avait pas habitués à cela. Et l’hebdo a souvent traqué avec raison les conflits d’intérêts qui déconsidèrent la politique, les affaires ou la Presse. Dès lors, qu’on ait confié à Renaud Dély la rédaction d’un article sur Zemmour pose question. Si on est soulagé d’apprendre qu’on n’aura plus à le lire, on s’interroge sur la manière dont est aujourd’hui dirigé notre hebdo – de moins en moins – préféré.
Et, pour tout dire, on attend des réponses.
Si tu avances et que je recule…

On est très injuste, à droite, avec Nicolas Sarkozy. Finalement, ses promesses, ses vraies promesses, celles qui étaient inscrites sur la feuille de route donnée par ses amis du Fouquet’s, il les a tenues et il les tient. Les rapports de force entre capital et travail n’ont jamais été aussi défavorables à ce dernier, le bouclier fiscal est toujours là, le principe de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux est appliqué avec une rigueur qui ferait passer un policier tchékiste pour le clown Popov, il a sauvé les banques victimes d’une crise créée par leur propre rapport psychotique à la spéculation et, pour finir, il a lancé un beau débat sur l’identité nationale, histoire de faire oublier au futur ouvrier délocalisé son triste sort et de l’intéresser, dans un grand souci pédagogique d’émancipation, à des questions philosophiques, politiques, voire métaphysiques : qui es-tu, toi, au fond ? Que signifie être français, oui, toi, là, devant ta raffinerie, et pose cette banderole, s’il te plaît, arrête de mettre le feu à ce pneu ou de casser cette sous-préfecture et assieds-toi, réfléchis à tes ancêtres les Gaulois, ça te changera les idées.
Non, décidément, on est injuste avec le Président. Le voilà, le malheureux, qui se retrouve avec un parti unique qui est passé derrière le PS. Le voilà, aussi qui doit faire face une abstention massive qu’il est difficile de ne pas prendre comme un désaveu personnel : quand bien même on tente de faire accroire le contraire, la carte électorale ne ment pas et les zones où l’on a voté avec les pieds sont celles qui l’avaient plébiscité au premier tour de 2007.
Et, cerise sur le gâteau, c’est le grand retour du FN.
Et là, ce n’est vraiment pas juste. Parce que Sarkozy, il faut s’en souvenir, avait promis d’en finir avec Le Pen père et fille, d’éradiquer ces Archaïques aux questions embarrassantes (immigration, insécurité) en les récupérant à son compte et en les ripolinant aux couleurs clinquantes mais acceptables, au moins un temps, du berlusco-populisme. Il a même fait un ministère pour ça…
Alors que s’est-il passé ? Parce que tout de même, tout était bétonné, bouclé, verrouillé grâce, notamment, à cette technique politique très en vogue depuis les années 1990 et qui s’appelle la triangulation. La triangulation, inventée par un conseiller de Clinton, consiste à s’approprier les idées de l’adversaire en les mélangeant avec les siennes, histoire de lui retirer le pain de la bouche. Elle fut utilisée par exemple avec succès par un Tony Blair qui partit du constat sociologique d’un Royaume Uni psychologiquement conservateur malgré sa demande de réduction des inégalités après deux décennies de thatchero-majorisme. Ségolène Royal elle-même surfa un instant sur des sommets de popularité qui lui permirent de s’imposer au PS pour la présidentielle grâce à des thèmes banalement familialistes et sécuritaires qu’elle renomma « égalité homme/femme » ou « ordre juste ».
Nicolas Sarkozy, lui aussi, a été un grand triangulateur. Pour la gauche, la politique d’ouverture a effectivement déstabilisé le camp d’en face. On avait l’impression dans l’opinion que le PS n’avait pas su utiliser ses compétences et que Sarkozy était plus pragmatique qu’idéologue et ne recherchait que le gouvernement des meilleurs. Quant à l’extrême droite, sans trop se forcer, il a repris ses thèmes classiques : immigration et sécurité en leur donnant le sourire politiquement correct de messieurs Hortefeux et Besson. D’ailleurs, un moment, toute critique émise sur cette politique dure risquait la « reductio ad Petainum » et se voyait discréditée : « Enfin, vous exagérez, ce n’est pas la même chose. » Et non, ce n’était pas la même chose, effectivement. C’est même tout l’art de la triangulation d’une idée, qui peut se résumer à ce vers de Verlaine : « Et qui n’est chaque fois ni tout à fait la même ni tout à fait une autre. »
Seulement voilà, en voulant trianguler l’extrême droite, Nicolas Sarkozy ne s’est pas aperçu exactement de ce qui changeait comme une vague de fond dans la société française et explique d’ailleurs aussi bien le score du Front de Gauche que celui des Le Pen : la question sociale, avec la crise, a fait un retour en force.
Le licenciement massif fait plus peur que l’Arabe, le harcèlement au boulot que l’insécurité dans le métro, la silhouette d’une cheminée d’usine désaffectée que celle, hypothétique, d’un minaret. Le plus drôle, dans cette histoire, c’est que le Front National et Marine Le Pen qui en est évidemment le nouveau visage, l’avaient déjà compris. Ils ne sont pas dans l’autisme des palais ministériels, ils sont sur le terrain. Ils ne fantasment pas le peuple, ils le voient. Ceux qui ont suivi la redoutable campagne de Marine Le Pen dans le Nord-Pas-de-Calais et ses 18 % à l’arrivée comprendront ce que je veux dire.
Pour le Nord, vieille terre ouvrière qui a accueilli pour la plus grande gloire de l’industrie française des vagues d’immigrations depuis cent ans, l’étranger n’est pas le problème principal. La misère, si. Marine le sait. L’immigration n’a pas été le thème central de sa campagne, loin de là, et si elle avait fait le commencement de l’ombre d’un début de dérapage, genre Ali Soumaré, on ne l’aurait pas ratée tant elle a été scrutée dans l’espérance d’une faute que l’on se serait empressé de rendre rédhibitoire. Eh bien non, elle a fait une « campagne sociale » sur les thèmes de la désindustrialisation, du pouvoir d’achat, de la mondialisation malheureuse, de la fierté ouvrière.
Comme quoi, au petit jeu de la triangulation, Monsieur le Président, on finit toujours par trouver meilleur que soi.
Gordon Brown toujours pas mort
On peut penser ce que l’on veut du premier ministre anglais, mais sa faculté de récupération et sa pugnacité forcent l’admiration. Conformément à ce que l’on pressentait, il est très loin d’avoir abandonné la partie, bref Gordon y croit encore dur comme fer.
En annonçant la présentation du budget pour le 24 mars, il vient enfin de lancer la campagne électorale pour un scrutin qui devrait désormais se tenir le 6 mai, et compte bien en tirer avantage pour assurer sa régulière remontée dans les sondages. Le budget, son ultime carte, celle qui peut emporter le morceau en convainquant les électeurs et les marchés qu’il dispose d’un plan crédible pour réduire le déficit… La manœuvre semble relever de l’incantation, mais, avec ce diable d’homme, on se prend à croire à l’impossible.
Aux dernières nouvelles, YouGov pour le Sunday Times crédite les conservateurs de 37 % des intentions de vote contre 33 % au Labour. Autrement dit, plus rien. La campagne et surtout les imminents débats télévisés seront décisifs. David Cameron doit se répéter devant sa glace tous les matins en se rasant, non je n’ai pas peur, non je n’ai…
Allègre mais pas trop

Si vous en êtes d’accord, vous serez les arbitres. J’ai un léger différend familial avec mon père qui, s’il n’en est pas moins mon père, a parfois tort. En l’occurrence, il s’évertue à trouver intéressants les plats propos de Claude Allègre. Je crains pour ma part d’y avoir déclaré une allergie.
Bien sûr, cela m’emmerde un peu. Parce que ça me classe notamment avec les écolos et avec un paquet de gens qui croient tenir, là et ailleurs, leur brevet de rectitude morale. Ça me met du côté du Monde ou de Libération. Contre Valeurs Actuelles. Ça, c’est un peu la honte. Fort heureusement, il reste Marianne, qui me permet de me réconcilier avec l’idée que Allègre, c’est bien de la fumisterie, du poujadisme climatique. Et de me sermonner, vertement : être minoritaire n’est pas nécessairement le gage que l’on a raison. La majorité a parfois raison. Notamment quand j’en fais partie.
Et sur le réchauffement climatique, il faut dire qu’Allègre me brise les noix. Remarquez, je n’y connais rien en réchauffement climatique. Comme Allègre, apparemment. Comme l’ensemble des personnes avec lesquelles je m’en entretiens, soit dit en passant. Comme mon père. Oui, même mon père. Qui n’en est pas moins mon père, notez bien. C’est que, j’ai beau retourner le truc dans tous les sens[1. Je parle du réchauffement climatique, donc, et plus de mon père.], j’ai la grosse impression que tout ceci est affaire de présupposés. Comme tout, me direz-vous. Mais plus que tout, vous répondrai-je. Fermez la parenthèse, merde à la fin.
Bon, prenez les libéraux. Ok, Allègre a rejoint Sarkozy. Et l’on se souvient de sa sortie du QG de Sarko, à la dérobée. De son ample et chaloupée démarche, empruntant au mammouth sa grâce printanière. Mais tout de même, voir Valeurs Actuelles chérir ainsi un ancien ministre de Lionel Jospin, ça vous laisse comme deux ronds de flan. Y’a anguille. Moi, qui ne suis que moi – certes, mais c’est déjà ça[2. Pour les incultes, ça commence comme ça : « Et moi, moi qui ne suis que moi / entre mendiant et roi / quand je rentre chez moi / je deviens comédien, mes espoirs, mes chagrins / je les laisse en chemin. »] – je ne peux pas m’empêcher de penser que si les libéraux chérissent Allègre, c’est moins par souci de vérité scientifique, que par allergie à la règlementation. Or voilà, si on laisse l’homme entièrement libre de déterminer son comportement et si l’origine humaine du réchauffement climatique est avérée, il est probable qu’un jour il jure, mais un peu tard, qu’on ne l’y reprendra plus. Alors de fait, on l’encadre un peu.
Vous me direz : de l’autre côté, c’est le goût de l’Etat, c’est le collectivisme, c’est l’intervention dans ma vie et celle du voisin. Ce serait une méfiance à l’égard de l’Homme. Sans aller jusque-là, possible qu’il y ait une méfiance vis-à-vis de la société de consommation. Un certain goût pour la sobriété.
Alors voilà, sur le climat, malheureusement, on part tous de quelques présupposés. Et, sauf surprise, l’immense majorité d’entre nous est incapable d’appuyer son avis sur une connaissance personnelle. Cela dit, tout de même…
Tout de même, il y a des petites choses, des indices, des éléments infimes mais qui suscitent ma méfiance. Il y a ce ton, cette mise en avant personnelle, mise en scène, auto-représentation en chevalier blanc pourfendant la pensée forcément unique, mise en scène qui dérive lorsque, comme le souligne Jade Lindgaard, l’homme ne craint pas d’entamer son propos par un vibrant « Nous, les résistants… » Et de faire un parallèle avec la résistance au nazisme ou au pouvoir soviétique. Faut-il aimer le burlesque ou n’avoir pas le sens du ridicule pour en arriver là ?
Il y a dans tout ce scénario la marque habituelle du complotiste, fier de se draper dans le costume du martyre. Et « l’imposture climatique » de faire écho à « l’effroyable imposture ». De renvoyer à ces diatribes contre ceux qui vous cachent tout, ne vous disent rien, mais qui, c’est certain, s’organisent dans l’ombre.
Ridicule encore lorsque Dominique de Montvalon lui adresse ces questions empressées : « Pourquoi ? Parce que vous êtes foncièrement rebelle ? », « Vous, ils n’ont pas réussi à vous “normaliser” ! », « Vous êtes devenu un véritable “expert” en climat, ne vous en déplaise ! », « Vous êtes décidément l’apôtre de la complexité… »
Faut-il que l’esprit fin soit embrumé pour ne pas discerner là la complaisance et la flagornerie de son intervieweur ?
Ridicule encore lorsque celui qui veut incarner la rigueur scientifique définit le GIEC, sa cible directe, l’instrument du grand complot, comme le « Groupement international pour l’étude du climat », alors qu’il s’agit du « Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat » (cf Le Monde). Moins amusante et révélatrice d’un esprit plus petit qu’il ne voudrait le faire croire, cette pique inutile, déplacée, incongrue et puérile, lorsqu’il évoque « l’incapacité (congénitale ?) des climatologues à maîtriser certaines méthodes statistiques ».
On reprochait à l’article du Monde de faire son marché dans les erreurs qui parsèmeraient le livre de Claude Allègre. Mais n’est-ce pas précisément ainsi que procède Claude Allègre avec les travaux de la communauté scientifique ? Pour celui qui veut se parer des vertus scientifiques, n’est-il pas gênant par exemple de présenter comme le résultat d’un vote de « spécialistes américains du climat » celui de présentateurs météo des chaînes de télévision américaines ?
On s’amusera encore de l’aversion proclamée pour le principe de précaution de celui qui déclame définitivement : « un pays qui n’assume pas l’idée du risque n’avance plus. Le risque, c’est la vie », mais qui, lorsqu’il fut décisionnaire et non pas simple commentateur, provoqua l’évacuation de 76.000 personnes autour de la Soufrière, contre l’avis d’Haroun Tazieff, qui soutenait que l’éruption serait sans danger… ce qui se confirma.
Mais il y a plus substantiel. On pourrait s’étonner que « l’apôtre de la complexité » emploie force comparaisons vulgarisatrices pour faire triompher son point de vue. Comme si, finalement, il ne fallait qu’un peu de bon sens dans tout ça. D’ailleurs, il le soutient. Tant qu’à faire. C’est Jean-Louis Fellous (ancien responsable des programmes d’observation de la Terre du CNES et ancien directeur des recherches océaniques de l’Ifremer) qui lui répond : « »Imposture que d’affirmer qu’on peut prévoir, qu’on sait prévoir le climat qu’il fera dans un siècle. (…) On sait, au contraire, que la météo est imprévisible à plus de quatre jours, et parfois moins. » Élève Allègre, vous êtes recalé ! Vous confondez (mais vous le faites exprès, je n’en doute pas) la prévision météorologique et la projection climatique. Un médecin serait imprudent de prévoir votre disparition à court terme. Mais il lui est facile d’affirmer que dans un siècle vous ne serez plus des nôtres (moi non plus, d’ailleurs). De même, la prévision déterministe du temps météorologique trouve ses limites dans une fourchette de 4 à 15 jours, selon la latitude. Mais on peut prédire la prochaine glaciation, rythmée par les oscillations de l’orbite terrestre sous l’influence des autres astres du système solaire.
Autres erreurs relevées, lorsque Claude Allègre affirme que les climatologues attribueraient à un critère unique le réchauffement climatique, ou que le changement climatique serait le seul problème auquel l’humanité ait à faire face[4. En oubliant l’eau, donc, puisque Claude Allègre aime à se faire passer pour l’un des rares lucides à en percevoir l’enjeu. Et pourtant.].
D’ailleurs, on ne sait plus bien si c’est l’origine humaine ou carrément le réchauffement climatique que conteste Allègre, puisqu’il soutient que « l’on ne sait dans quel sens, finalement [le changement climatique] aura lieu ». Mais comme le lui rappelle, entre autres, Jean-Louis Fellous : « N’en déplaise à Claude Allègre, il n’y a pas de satellite climato-sceptique. »
C’est que contrairement à ce que soutient Claude Allègre, il semblerait bien que le changement climatique soit mesuré, observé et quantifié. Et modélisé, en prenant compte, comme le souligne realclimate parmi d’autres points de divergences, d’éléments dont Claude Allègre affirme pourtant qu’ils seraient négligés : « Mais il y a mieux : « Comme on ne sait pas bien comment se forment les nuages, on les néglige ! Comme on maîtrise mal le rôle des aérosols et des poussières, on les néglige ! » (p. 104) C’est complètement faux. Nuages, aérosols et poussières (comme variations de l’irradiance solaire et éruptions volcaniques) sont tous pris en compte par les modèles actuels. Les modèles qui négligent l’influence de l’augmentation du CO2 n’arrivent pas à reproduire le réchauffement des derniers trente ans, et c’est précisément pour cette raison que le CO2 a été confirmé comme le responsable principal du réchauffement global. »
Vous me le direz, pourtant je le sais : je n’ai guère de points d’appui évidents pour justifier ma position – même mon radiateur est un mauvais indicateur –, mais au pif, là, je le sens pas. À cause d’une foultitude de trucs qui coincent. À cause d’un boniment qui m’en rappellent bien d’autres, de ces bonimenteurs simplificateurs qui profitent de la complexité du sujet d’étude[5. Comme, tiens, Etienne Chouard et la Constitution européenne.] pour fourguer des idées simplistes et fausses. Et mon pif, d’après ma mère, est fiable. Pour sentir les gens, voyez. Alors, d’accord, c’est ma mère. Mais de la même manière qu’une idée n’est pas forcément fausse parce qu’elle est partagée par la majorité, ma mère a parfois raison en ce qui concerne mes grandes qualités. Et pour ce qui est de l’allègre imposteur, j’emprunterai sa conclusion à Jade Lingaard : « Si Claude Allègre a raison, rien de tout cela n’est très grave. Et la postérité lui reconnaîtra peut-être son mérite. Mais s’il a tort ? Il nous fait perdre un temps précieux. En retardant la mise en place de mesures qui permettraient dès aujourd’hui de réduire les gaz à effet de serre, il prend la responsabilité de mettre des vies humaines en péril. »
Fausse route et match nul

Vaut-il mieux avoir tort avec Élisabeth Badinter ou tort avec Edwige Antier ? Telle semble être l’alternative qui nous est offerte, à nous les femmes de 2010. Et c’est pas joyeux. A ma droite, l’option lénifiante de la maternité niaiseuse et rose bonbon ; à ma gauche, une belle mécanique de pensée mal appliquée. Même s’il est injurieux pour la seconde de les situer au même niveau, dans les deux cas : fausse route. Fausse route, tel était d’ailleurs le titre du dernier essai d’Elisabeth Badinter (Odile Jacob, 2003) consacré aux régressions du féminisme, sur lesquelles elle revient aujourd’hui avec les mêmes arguments : l’instinct maternel n’existe pas, et la maternité n’est qu’un aspect parmi d’autres de la féminité. Sa crainte principale ? La « guerre souterraine » livrée contre les femmes qui travaillent et/ou n’ont pas d’enfant, dont Mme Antier serait le héraut (ses conseils sont, il est vrai, particulièrement gnangnan, mais parler d’une « guerre » est excessif).
[access capability= »lire_inedits »]Difficile de s’attaquer à un tel mythe vivant : Badinter la juste, la pure, celle dont les très courageuses prises de position sur le voile (à bannir) ou sur les quotas (à éviter) ont fait honneur à la France, à la République et aux femmes. Dur, dur, de contredire une telle intelligence, une telle réflexion. Et pourtant.
D’abord, Badinter s’élève contre un supposé « retour du naturalisme » et ses ravages sur l’émancipation des femmes. Mais en dehors de quelques excitées de la Leache League et des injonctions médiatiques de Mme Antier (on peut changer de chaîne), il me semble au contraire qu’on n’a jamais autant fichu la paix aux femmes concernant leurs choix en la matière. On assiste, c’est vrai, à un retour de mode de l’allaitement (sans oublier, mais oui, que certaines femmes allaitent avec plaisir), mais je n’ai vu nulle part d' »injonctions soutenues par les plus respectables institutions » ni subi d' »oukases des pédiatres ». La « maternité triomphante » est peut-être en vogue, mais elle n’empêche pas les femmes françaises de travailler, au prix d’acrobaties parfois vertigineuses entre nounous, horaires de crèche, pères participant encore peu, etc. Ce que Badinter souligne, mais pour alimenter l’argument inverse ! Les femmes feront bientôt, dit-elle « le calcul des plaisirs et des peines », comme si le désir d’enfant ne pouvait en aucun cas être une envie qui nous dépasse et écrase sous elle tous les arguments les plus raisonnables. « Il faut perdre la tête… ou perdre sa race », disait crûment Paul Valéry, et comme c’est vrai : vouloir un enfant, c’est perdre la tête, et c’est tant mieux (pour ceux qui en veulent). Badinter cite en exemple de résistance à l’air maternel du temps les 25 % de femmes allemandes qui n’ont pas d’enfant : bel exemple, dit-elle, d’un refus de modèle imposé. Or, en Allemagne, avoir un enfant signifie souvent renoncer à toute vie professionnelle puisque les écoles ferment en début d’après-midi et que la garde à domicile n’est ni répandue ni bien vue (en Suède non plus). Dans cette perspective, il me semble au contraire que les Allemandes sont moins libres que les Françaises, qui peuvent mener les deux de front, ce que beaucoup parviennent fort bien à faire. Certes, leur vie est très souvent tiraillée, c’est vrai, et leurs exploits quotidiens, comparables à ceux du marathon, sont admirables et peu reconnus : mais elles continuent. À croire qu’elles aiment ça…
Enfin, un acteur légèrement indispensable de la maternité brille par son absence dans ce livre : le père. Les hommes semblent totalement exclus du désir (ou plutôt du « calcul ») des femmes dans cet ouvrage, dans lequel ils sont avant tout cités comme une donnée entravante et/ou pesante, par leur absence d’aide et leur peu de compréhension des doubles tâches féminines : « Le bébé, écrit-elle, est le meilleur allié de la domination masculine » (propos presque injurieux pour les femmes, qui seraient donc dépourvues de libre-arbitre au point de subir le désir d’enfant d’hommes dominateurs… autour de moi, j’ai plutôt vu l’inverse). Pourtant, les bébés − jusqu’à nouvel ordre ! − se font toujours à deux, détail que Badinter semble négliger. Depuis la fin du XVIIIe siècle et la maîtrise de la fécondité dans notre précoce pays, les hommes et les femmes qui décident ou non d’avoir des enfants y ont souvent pensé ensemble. Choix fous, parfois aliénants, difficiles pour les couples : peut-être, mais choix tout de même. Et c’est là que ça se complique. Car en admettant que « retour du naturalisme » il y ait, ne pourrait-on y lire plutôt une sorte de retour du refoulé, de cette époque si dure − et si douce − où l’on n’avait pas le choix ?
Cette liberté si chèrement acquise ne nous pèse-t-elle pas, par moments ? Avoir un enfant aujourd’hui, c’est l’avoir voulu. Telle est sans doute la vraie question. Et la clef de bien de nos contradictions modernes.[/access]
C’est Graves, docteur ?
L’acteur Peter Graves vient de décéder à l’âge de 83 ans dans sa propriété de Pacific Palissades, près de Malibu. Nous ne verrons plus son élégante silhouette répondre aux injonctions du département d’Etat niant toute responsabilité, etc. Peter Graves était en effet, dans la série Mission Impossible, celui qui incarnait le chef de la dream team sous le nom de Monsieur Phelps. Apparemment, la mort de Peter Graves est naturelle mais des rumeurs insistantes tournent autour d’un mystérieux dictaphone siglé UMP qui serait parvenu à l’acteur dans la soirée de dimanche : « Monsieur Phelps, votre mission, si vous l’acceptez, consistera à mobiliser les abstentionnistes du premier tour en faveur du parti présidentiel… » C’est alors que Peter Graves, fin connaisseur de la politique française, se serait effondré.
PS : Marc Cohen me fait remarquer que Peter Graves a aussi prononcé une des meilleures répliques de l’histoire du cinéma, en l’occurrence dans Y a-t-il un pilote dans l’avion ? des ZAZ : « Joey, est-ce que tu aimes les films de gladiateurs ? » Dans le monde d’avant, on pouvait encore rire de ces choses-là…

