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Commémorations du 13-Novembre: une barbarie toujours recommencée

À Saint-Denis puis à Paris, un hommage a été rendu hier aux 132 victimes des attentats islamistes du 13 novembre 2015. En début de soirée, le président Emmanuel Macron a inauguré un jardin mémoriel (notre photo) sur la place Saint-Gervais, à proximité de l’Hôtel de Ville de la capitale. Il est temps de relever la tête, affirme Charles Rojzman. Il est temps de reconnaître que toutes les cultures ne se valent pas. Il est temps de combattre l’islamisme qui s’enracine sur notre sol.


Le rituel se répète : gerbes déposées, visages fermés des autorités, discours calibrés, violons qui pleurent comme s’ils pleuraient pour nous, pour masquer l’essentiel. Les commémorations officielles des attentats du 13 novembre ressemblent de plus en plus à une liturgie républicaine sans foi, sans courage, sans vérité. Quelques minutes de silence, un dépôt de fleurs, et l’on se félicite d’avoir « tenu bon ».

Mais dans cette parole officielle, un mot se dérobe, un mot que l’on enfouit sous des euphémismes : l’islamisme.

Lente fatigue morale

Ce ne sont pas des « exclus », des « paumés », des « déséquilibrés » qui ont criblé Paris de balles et transformé des terrasses en morgue : ce sont des soldats d’une idéologie millénaire, patiemment nourrie, patiemment justifiée, patiemment importée.

On commémore, mais on ne nomme pas. On pleure, mais on ne comprend pas.
On s’incline, mais on ne se relève pas.

Comme si nommer l’islamisme constituait un blasphème dans une société qui préfère commémorer ses morts que protéger ses vivants. Comme si la République avait peur d’elle-même. Peur de rompre avec ses fictions, ses illusions d’un « vivre-ensemble » dont les plus lucides savent déjà qu’il n’existe que dans les brochures ministérielles.

C’est ici que commence le retour de la barbarie.

Non seulement dans les actes terroristes eux-mêmes — ils sont la pointe du glaive — mais dans ce renoncement préalable, dans cette lente fatigue morale qui consiste à éviter le mot juste, à diluer la réalité dans la compassion institutionnalisée.

Car les violences collectives issues du monde arabo-musulman ne surgissent jamais de manière soudaine. Elles ne sont ni des accidents de l’histoire ni des éclats imprévisibles. Elles sont patiemment préparées, longtemps à l’avance, dans le silence des frustrations accumulées, dans les replis amers des ressentiments communautaires. Elles germent dans les failles de sociétés fracturées, rongées de l’intérieur par la défiance, le mépris mutuel, la haine contenue.

Lorsque l’économie vacille, que les structures sociales se disloquent, que les élites perdent toute légitimité, les sociétés cherchent un point d’ancrage. Ce besoin d’identité devient obsessionnel. Et lorsqu’il n’est pas satisfait de manière saine — par l’éducation, la culture, le débat — il se pervertit : identités rigides, mythes simplificateurs, fabrication d’ennemis.

Régressions

On désigne l’hérétique, l’apostat, le riche, le Juif, l’Occidental, la femme trop libre, la laïcité. Peu importe la cible, ce qui compte, c’est la haine comme anesthésiant, comme certitude.

Ces révoltes ne sont pas les signes d’une avancée démocratique. Trop souvent, elles accouchent de régressions. Derrière la colère contre l’injustice se cache parfois une soif de soumission.

Les printemps arabes ont vu naître, après l’espoir, des automnes islamistes. L’histoire européenne a montré que la colère des peuples peut engendrer le fascisme.

Ces « révolutions » n’éveillent pas les consciences : elles les endorment. Elles rejettent l’autorité au nom de la liberté, mais pour mieux adorer ensuite un gourou, un Prophète de substitution, une Vérité révé­lée. Elles crient à l’émancipation tout en réclamant l’idéologie qui pense à leur place. Ce n’est pas un progrès : c’est une démission, une abdication, une régression spirituelle.

La haine est fille de l’humiliation. Mais elle devient poison lorsqu’elle se fait doctrine. Dans un monde désorienté, la pensée complotiste est une drogue douce: elle rassure, elle simplifie, elle déresponsabilise. Mais surtout, elle rend la violence légitime.

A lire aussi, Isabelle Marchandier: Ils n’auront pas notre haine?

Le fanatisme religieux n’a pas le monopole du mal. Le mal s’habille de toutes les couleurs : croix gammée, faucille, croissant. Les djihadistes invoquent le Coran comme les nazis invoquaient la Germanie éternelle. Boko Haram — « l’éducation occidentale est un péché » — ne dit rien d’autre que les Croisés exaltés ou les révolutionnaires de la Terreur : penser est un crime, la nuance une hérésie.

Ce n’est pas une lutte pour la justice : c’est une revanche contre la complexité, contre la liberté d’être autre. Une guerre contre les Lumières et la dignité humaine.

Frapper un policier, incendier une voiture, décapiter un enseignant, mitrailler une foule dans une fosse de théâtre ou sur des terrasses de café : voilà le visage moderne de la barbarie. Ce ne sont pas des actes de courage, mais de lâcheté.

Et que certains intellectuels les excusent au nom d’un antiracisme dévoyé est une trahison — la plus grande.

Meutes lâches

Le fanatique ne s’attaque jamais aux puissants réels : il vise les faibles, les isolés, les enseignants, les symboles. Il hait ce qu’il désire mais n’atteint pas : la liberté, la connaissance. Il agit en meute, comme les lâches. Son idéologie n’est qu’un alibi : ce qu’il aime, c’est détruire.

Et nous, durant ce temps, reculons. Nous hésitons à enseigner Voltaire. Nous craignons de nommer l’islamisme de peur d’être accusés d’islamophobie. Nous appelons « culture » des traditions qui justifient le viol ou l’excision. Nous transformons l’école en champ de bataille idéologique. Nous acceptons, au nom de la tolérance, l’intolérable.

La question de la barbarie est aussi est ici, chez nous : dans les rues d’Europe où l’on crie From the river to the sea sans comprendre que cette phrase signifie l’effacement d’un peuple. Dans les universités américaines où l’on célèbre le Hamas comme on célébrait jadis Che Guevara. Dans les plateaux télé où les journalistes, bardés de moraline, accusent Israël d’être ce qu’ils n’ont pas le courage de nommer ailleurs : un rempart.

Le 7 octobre n’a pas seulement révélé la barbarie des tueurs : il a révélé notre propre barbarie douce — celle du déni, du relativisme, de la lâcheté. Nous sommes devenus les clercs du renversement moral : ceux pour qui la culpabilité occidentale doit être payée par procuration. Et quoi de mieux, pour expier, que de désigner Israël comme le miroir de nos crimes ?

L’Europe, lassée d’elle-même, se lave les mains dans le sang juif. Elle retrouve, sans le savoir, la vieille jubilation des temps obscurs : accuser le Juif pour ne pas se regarder.

C’est là le secret obscène du progressisme contemporain : il hait le Juif en se croyant antiraciste, il justifie le meurtre en se croyant humaniste, il adore la victime quand elle tue au nom du Bien.

Nous sommes à la croisée des chemins. Ce que nous voyons n’est pas un simple accès de violence, mais une bascule. Une menace directe contre ce que l’humanité a mis des siècles à construire.

Le fanatisme avance parce que nous reculons. Il est fort de notre faiblesse, de nos renoncements, de notre peur d’affirmer que certaines valeurs valent mieux que d’autres.

La barbarie revient, mais pas en haillons : elle revient avec micros, réseaux, tribunes, soutiens universitaires. Elle infiltre l’école, les médias, les institutions. Et ceux qui devraient la combattre la justifient. Il est temps de relever la tête. Il est temps de dire que toutes les cultures ne se valent pas. Il est temps de refuser. De combattre. Car le prix du silence est l’effondrement. Et le prix de la complaisance, la soumission. Le combat pour la civilisation n’est pas un luxe : il est vital. Le perdre, c’est condamner l’avenir.

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Les coups de règle de Mme Neveux contre les petits pains de M. Neuhoff

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En 2020, Marine Turchi de Mediapart s’était tapé l’écoute de 96 heures (!) du « Masque et la Plume » pour faire la recension complète des propos sexistes tenus par les critiques de France inter. Tout le monde avait alors raillé la journaliste. Cette semaine, coup de théâtre: tout juste élu à l’Académie française, le terrible Éric Neuhoff ose qualifier la linguiste de gauche Julie Neveux de «petite instit bornée» dans la matinale de la radio publique. Et le respect ? comme disent les jeunes. C’est que cette dernière s’était précédemment émue de l’élection de M. Neuhoff dans les colonnes de Libération


Chère Madame Neveux, vous êtes parvenue à me rendre l’Académie française sympathique, alors qu’elle me laissait jusqu’à présent plutôt indifférent. Susciter contre elle la colère de tant de bonnes âmes la rend terriblement séduisante.

Neuhoff dans le pétrin

Vous avez gratifié Monsieur Neuhoff du terme de « boulanger » dans Libération[1], reprenant ses propres mots pour mieux le moquer[2]. Il vous a répondu à la radio en vous qualifiant de « petite instit bornée » [3]. Je regrette assez la violence de l’injure. La méchante estocade vous a permis de vous draper dans une posture de femme blessée. On vous répond un peu vertement, et c’est tout à la fois Simone de Beauvoir et Ferdinand de Saussure que l’on assassine. Mais passons. Après tout, nul ne peut juger de la sensibilité réelle des gens. Celui-là s’offensera d’un bonjour un peu sec quand une autre se portera la main sur le cœur, comme après un coup de revolver, d’être qualifiée d’institutrice bornée. Je vous vois déjà tomber au champ d’honneur de la recherche en linguistique. J’espère que la France s’en remettra…

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Le souci, avec les violons des cœurs outragés, est que l’on en oublierait presque votre propre mépris, Madame Neveux. Cette tribune où vous vous moquez de l’écriture de Monsieur Neuhoff et à laquelle il se contente, ma foi, de répondre. Vous citez quelques phrases de l’écrivain, avant de conclure: « On ne sait qui souffre le plus, du personnage ou du lecteur. » Quelle pertinence dans l’analyse ! Linguiste, mais aussi critique émérite: votre bonne fée vous a donc pourvue de tous les dons. Quoique, à la lecture de vos remarques, si je puis me permettre, on comprend que ce n’est pas tout à fait l’usage de l’accent circonflexe dans les œuvres complètes de Monsieur Neuhoff qui vous chagrine tant. Surtout quand vous affirmez à son sujet, sans mépris aucun, n’est-ce pas: « La teneur en pensée du cinéma flirte avec le néant, aplatie qu’elle est par le sexisme crasse. » Il me semble là, si vous me permettez, que votre sens esthétique apparaisse furieusement politique. De linguiste, vous devenez critique, et de critique vous voilà Saint.e-Just.e !

Mais c’est surtout la conclusion de votre tribune qui ne peut que m’enchanter : « C’est une chose que de faire du français son outil de travail, c’en est une autre que d’en faire un objet d’étude. La première est un art, la seconde une science. Que l’Académie française s’occupe donc de distribuer ses médailles littéraires, mais, par pitié, qu’elle cesse de vouloir réguler la langue et nos usages. »

Le bon usage

Ah ! vous n’allez pas jusqu’à écrire « bande de manants », mais cela s’entend quand même bien fort après le point final ! Et cela serait admirable si votre courroux ne répondait qu’à un souci d’intégrité de votre noble discipline. Hélas, il suffit de se renseigner un peu sur vos propres interventions publiques pour entrevoir que le jour est sans doute finalement un tantinet plus pur que le fond de votre cœur. Quand, par exemple, dans un entretien pour Brut sur le point médian, vous qualifiez Vaugelas de « personnage sexiste », je me demande à quel concept linguistique vous faites précisément référence ? Et c’est là où l’on comprend que de linguiste qui prétend observer des faits de langue, vous aspirez à devenir prescriptrice. Si vous voulez la fin de l’Académie française, c’est simplement parce que vous souhaitez la remplacer. Vous brûlez d’orienter à votre tour le bon usage.

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Sauf que Vaugelas, que vous réduisez à une sorte de masculiniste excité de la chose grammaticale, avait du moins pour modèle Malherbe. Il croyait, avec le cardinal Bembo, qu’il cite dans sa préface, à une perfection idéale du style. On peut certes critiquer ces positions. Elles ne sont pas les miennes et je crois plus volontiers à la variété des grandes œuvres, avec Pic de la Mirandole. Mais c’était du moins une époque où la plupart des écrivains n’avaient pas déserté tout imaginaire linguistique. Leur écriture portait en elle une certaine idée de la langue. Et vous, Madame Neveux, de quel imaginaire vous réclamez-vous exactement pour prétendre influencer la pratique à travers une relecture politiquement orientée de l’histoire littéraire et grammaticale du français ?

Pour conclure, quiconque n’est pas de mauvaise foi comprend sans peine ce que Monsieur Neuhoff entendait par cette expression de « petite instit bornée ». Non le mépris des femmes universitaires en général, mais simplement votre propre mépris de classe. Celui qui vous fait regarder de haut toute personne qui ne détient pas votre savoir. Il vous fait vous adresser à vos interlocuteurs comme à des enfants à qui on doit faire la leçon.

Cette expression souligne aussi parfaitement votre volonté de légiférer la langue, mais sans le dire, cachée derrière votre Science, au nom d’une norme qui répond non à un idéal de beauté linguistique ou littéraire, mais au seul fantasme politique de moraliser la grammaire pour mieux moraliser les mœurs. Pour ma part, je défendrai toujours ceux qui rêvent la langue au nom de l’art, face à ceux qui la manipulent au nom de la politique.

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[1] https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/eric-neuhoff-un-ecrivain-boulanger-dans-le-petrin-de-lacademie-francaise-20251109_ZB7KNMET5RHMPIQXB2SIWZB244

[2] «La langue française, c’est la farine du boulanger pour les écrivains. C’est à eux de s’en occuper. »

[3] https://www.youtube.com/watch?v=ab5pV-ITrBs

«J’espère aussi pouvoir défendre le roman contre l’autofiction, à l’Académie française!»

Éric Neuhoff, élu à l’Académie française


Âge de 69 ans, auteur notamment de La petite Française (1997) et Un bien fou (2001), il siègera au fauteuil de Gabriel de Broglie, essayiste et haut fonctionnaire décédé en janvier dernier. Florian Zeller, 46 ans, dramaturge, a également été élu ; il siègera à la place de l’historienne Hélène Carrère d’Encausse, décédée en août 2023. Un coup de jeune pour l’Académie ? C’est indéniable. Éric Neuhoff a bien voulu répondre à nos questions.


Contre l’écriture inclusive

Causeur. Que ressentez-vous après avoir été élu à l’Académie française ?

Éric Neuhoff. Surprise et fierté. Première phrase qui me soit venue à l’esprit : recomptez les bulletins !

Vous avez été élu au fauteuil de Gabriel de Broglie, essayiste et haut fonctionnaire ; le connaissiez-vous et que pensez-vous de lui ?

Je ne le connaissais pas personnellement, mais pour préparer mon discours je vais passer les prochains mois en sa compagnie et je vais devenir incollable sur le sujet.

Comme lui, défendrez-vous avec acharnement l’utilisation de la langue française et non pas de l’américain (il appréciait cependant la langue anglaise, ce qui doit vous plaire, vous, l’amoureux des Beatles !) ?

La langue française est une cour de récréation et un terrain de sport. Elle a ses plaisirs et ses lois. Je suis optimiste et je pense qu’elle est assez grande pour se défendre toute seule, grâce à sa beauté. Cependant, je me battrai de toute ma plume contre l’écriture inclusive qui me semble être un non-sens et une initiative aberrante qui complique et enlaidit ce qu’elle touche. Un dernier détail : je suis plus Rolling Stones que Beatles. Nobody’s perfect (en français dans le texte).

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En dehors de la défense de la langue française, quels seront vos autres chevaux de bataille ?

J’espère pouvoir défendre le roman contre l’autofiction qui me semble une des plaies contemporaines.

Comment s’est passée votre élection ? Postule-t-on à l’Académie française ? Ou est-on plus simplement proposé par des académiciens ?

Des amis – surtout un – m’ont sollicité. Il faut effectivement se présenter, envoyer une trentaine de lettres personnalisées, rendre quelques visites. Effectivement, on ne risque pas d’être élu si on ne s’est pas présenté.

Florian Zeller a été élu en même temps que vous. Ne pensez-vous pas que l’Académie, avec vos deux élections, prend “un coup de jeune” ?

Oui, en ce qui concerne Florian. De mon côté, la jeunesse me semble un souvenir, même si j’ai l’impression de ne pas avoir beaucoup changé.

Vous aimez donc le rock. Pourriez-vous nous citer quelques groupes qui vous ont marqué ?

Les Stones, donc. On ne se refait pas, même si j’ai cessé d’aller les voir en concert. Patti Smith avant qu’elle ne se prenne pour la réincarnation de Rimbaud. Leonard Cohen même s’il ne s’agit pas de rock. Aujourd’hui, je leur préfère Sinatra.

Vos écrivains préférés ?

Déon, Fitzgerald, Hemingway, James Salter, Drieu La Rochelle, Pascal Jardin, Geneviève Dormann. Il y en a trop pour les citer tous.

Un nouveau livre en préparation ?

Deux: un roman, Cahors sous la pluie et un livre sur le cinéma et les années 70.

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Wokisme: la télévision publique mène son enquête…

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Promis: avec son émission consacrée à la prétendue «dictature des bien-pensants», elle n’avait aucune idée en tête!


Le 5 novembre, le journaliste Tristan Waleckx se promettait de tout nous dire sur le wokisme dans l’émission hebdomadaire Complément d’enquête qu’il anime sur France 2. Plusieurs questions le tarabustent : « le “wokisme” est-il réellement un danger pour notre pays ? » ; les adversaires du wokisme ont-ils raison de parler de « dictature des bien-pensants ? » ; le wokisme « serait-il un “nouvel obscurantisme”, comme le qualifient certains hommes politiques ? » Ces questions trouveront rapidement leurs réponses. Dès les premières minutes de l’émission, le chemin est tout tracé et le téléspectateur comprend immédiatement ce que Tristan Waleckx va tenter de lui faire gober.

Thomas Jolly, l’audacieux

Cela commence avec… la cérémonie des JO de Paris, cet « événement qui a rendu fier tout un pays »grâce au « parti pris audacieux de son directeur artistique », Thomas Jolly. Celui-ci ne comprend pas les reproches qui lui ont été adressés. Il s’interroge : « Inclure l’ensemble des Français et Françaises, dans leur diversité, dans une cérémonie qui s’adresse à chacun et chacune d’entre eux et d’entre elles, qui a créé de l’unité, de la fierté nationale, c’est woke ? » M. Jolly ne se rend visiblement pas compte que cette phrase est un pur produit de l’idéologie qui a conçu, entre autres difformités, le verbiage « inclusif ». Sa cérémonie était imprégnée jusqu’au trognon de la même idéologie. Sans le savoir, Tristan Waleckx vend d’ailleurs la mèche lorsqu’il évoque l’abondante présence de « représentants queer », entre autres Nicky Doll, « la plus célèbre drag-queen française, animatrice d’une émission sur France Télévisions, une figure du mouvement LGBT qui défend les droits des minorités sexuelles ». Cette cérémonie n’était effectivement pas destinée à « l’ensemble des Français et Françaises » mais aux différentes « communautés » supposément discriminées qui furent majoritairement représentées dans ce lamentable spectacle.

Au député Julien Odoul qui confie n’avoir pas particulièrement apprécié la prestation d’Aya Nakamura avec la Garde républicaine, le journaliste rétorque : « Elle est quand même la chanteuse francophone la plus écoutée au monde. » Rectificatif : si Aya Nakamura est très écoutée dans le monde entier ce n’est sûrement pas parce qu’elle est une « chanteuse francophone » mais plutôt parce qu’elle est une chanteuse charabiaphone qui baragouine, sur des musiques électro-pop standardisées, des textes incompréhensibles, un salmigondis farci d’argot malien, de verlan français, anglais ou espagnol, d’expressions arabo-africaines à la mode dans les « quartiers », etc. Il y a quelques années, le député socialo-macroniste Rémy Rebeyrotte s’était extasié devant ce galimatias et voyait en Aya Nakamura une ambassadrice de la langue française parce que, disait-il, « elle est en train de porter au niveau international de nouvelles expressions et évolutions de la langue française ». On ne parlait pas encore d’interdire l’alcool à la buvette de l’Assemblée nationale ; pourtant…

Militants identitaires et wokisme pur

Bien entendu, les personnes qui ont critiqué cette cérémonie ne peuvent être que des « militants identitaires » de la pire espèce, des personnalités douteuses, intolérantes, homophobes et racistes. D’ailleurs, insiste le journaliste, un rapport récent[1] a mis en évidence les liens entre ces individus et différentes associations, dont une, « considérée comme très conservatrice », est financée par « le milliardaire catholique Pierre-Édouard Stérin ». L’initiateur de ce rapport, Neil Datta, est le directeur exécutif du Forum parlementaire européen pour les droits sexuels et reproductifs, souligne le reportage qui omet toutefois de préciser, comme c’est bizarre, que ce Forum basé à Bruxelles est financé entre autres par la Commission européenne, la Gates Foundation et… l’Open Society Foundation de George Soros. Interviewé par France TV, Neil Datta livre une réflexion étonnante : « Auparavant, ils [les vilains détracteurs du wokisme] utilisaient “l’idéologie du genre”, ils s’en sont servis et ils ont bien utilisé cette notion d’idéologie du genre. Ça ne sert plus à grand-chose maintenant, les gens s’en lassent, donc tout l’ensemble de cette extrême droite a inventé cette notion de woke qui ne veut rien dire mais, en même temps, on comprend ce que cela veut dire. » Soit Neil Datta est un imbécile qui n’a strictement rien compris au wokisme, soit il fait semblant d’être un imbécile n’ayant strictement rien compris au wokisme pour noyer le poisson – dans ce cas, il fait ça très bien. Quoi qu’il en soit, nous lui recommandons de lire l’essai du philosophe Jean-François Braunstein La Religion woke, qui explique justement que « la théorie du genre est le cœur de la religion woke, la partie la plus originale mais aussi, en quelque sorte, le “produit d’appel”, par son absurdité décomplexée, et aussi par son mystère quasi théologique ». Pour plus d’informations, il pourra également compulser l’ouvrage intitulé Face à l’obscurantisme woke puisque celui-ci a pu paraître malgré la demande acharnée de censure du Grand Inquisiteur du Collège de France Patrick Boucheron qui fut aussi, il n’y a pas de hasard, l’un des co-scénaristes de la cérémonie des JO.

A lire aussi, Dominique Labarrière: Najat Vallaud-Belkacem, la femme qui valait trois milliards

Le sujet de l’islamo-wokisme est ensuite abordé. « Que s’est-il passé à Lyon 2 ? Cette faculté est-elle tombée aux mains des wokes ? », demande Tristan Waleckx en relatant l’affaire Balanche, du nom de cet universitaire qui, parce qu’il avait approuvé l’interdiction d’une soirée consacrée à la rupture du jeûne du ramadan au sein de l’université, a été agressé pendant son cours par des individus masqués le traitant de sioniste et de raciste. Sur France TV, on se demande quand même, l’air de rien, si l’enseignant ne l’aurait pas un peu cherché : deux jours avant cette agression, Fabrice Balanche était effet interviewé sur… CNews, où il dénonçait l’islamo-gauchisme qui gangrène l’université française en général et Lyon 2 en particulier. Les islamo-gauchistes qui l’ont agressé ont posté leur méfait sur les réseaux sociaux. La vidéo, devenue « virale », a surtout été « reprise par des comptes comme celui du syndicat étudiant de droite, l’UNI, et ceux des sites d’extrême droite, Frontières et Boulevard Voltaire », tient à souligner, avec des frissons dans la voix, le journaliste. L’enquête progresse : il semblerait bien que cette affaire ait été montée en épingle par la droite nationale la plus rigide.

L’universitaire Xavier-Laurent Salvador, signataire d’une tribune dénonçant la mouvance islamo-wokiste dans les milieux universitaires et co-directeur de Face à l’obscurantisme woke, est interviewé. Il cite différents intitulés baroques ou nébuleux glanés dans les dizaines et dizaines de publications, de colloques, d’articles universitaires sur le genre, le queer, le racialisme, le décolonialisme, etc., qu’il a recensés en France pour le seul mois de février 2023. Pour contrecarrer ce témoignage, Complément d’enquête a mené « sa propre enquête » et, pour ce faire, s’est tourné vers Étienne Ollion, sociologue au CNRS. D’après celui-ci, Xavier-Laurent Salvador a utilisé une « logique de l’anecdote » au détriment de la « logique scientifique ». Heureusement, Étienne Ollion et son équipe ont lancé une « vaste étude » portant sur l’évolution des sciences sociales depuis 2001 et sont parvenus au résultat suivant : il n’y a guère plus de travaux sur le « genre » ou le « concept de race » en 2022 qu’en 2001. Curieux ! Pour comprendre ce tour de passe-passe, il suffit de lire Ce que le militantisme fait à la recherche (Tract Gallimard n° 29), ouvrage dans lequel la sociologue Nathalie Heinich rappelle un article du Monde citant l’étude d’un chercheur se faisant fort de démontrer, lui aussi, « statistiques et graphiques à l’appui », le très faible pourcentage depuis 2011 de certains termes – « décolonial », « intersectionnel », « racisé », « islamo-gauchisme » – dans les quatre moteurs de recherche universitaire les plus utilisés. Résultat stupéfiant : 0,01 % ! Mais… « il suffit d’ajouter à la liste quelques termes très fréquents dans ce type de travaux (tels que “genre”, “féminin”, “islamophobie”, etc.) et de prendre en compte d’autres sources (annonces de colloques, de journées d’étude, titres de séminaires, ateliers, etc.) pour arriver à un tout autre résultat: ces termes constituent plus de la moitié du corpus ainsi élargi », écrit Nathalie Heinich. Par ailleurs, ironise-t-elle, comment prendre au sérieux certains « experts » du CNRS, en particulier ceux qui défendirent la « géographe du genre » Rachele Borghi, victime, selon eux, « “d’attaques indignes”, malgré “une rigueur et une éthique scientifiques” ne faisant aucun doute pour “celles et ceux qui, depuis le début de sa carrière, ont réalisé des évaluations véritablement scientifiques de ses travaux” ». Et Nathalie Heinich de se demander qui a bien pu expertiser, sans éclater de rire, l’article « scientifique » de Mme Borghi intitulé « De l’espace genré à l’espace queerisé », dans lequel la géographe affirme d’abord que « l’espace public est conçu, géré et modelé sur la base d’une conception dualiste rigide: homme-femme, licite-illicite, homosexuel-hétérosexuel », et conclut ensuite que « la géographie de la sexualité, définie comme branche de la géographie, peut contribuer de manière importante au dévoilement des normes et des structures de pouvoir qui oppriment et excluent de l’espace public les dissident.e.s sexue.le.s ». Présupposé délirant, remise en cause pseudo-foucaldienne des « normes et des structures de pouvoir », militantisme néo-féministe et pro-LGBT, écriture inclusive – bref, du wokisme à l’état pur…

Jean-Michel Blanquer, le sage

À la fin de l’émission, Tristan Waleckx reçoit Jean-Michel Blanquer. Celui-ci est présenté comme « l’un des tout premiers à avoir utilisé en France le mot et le concept de wokisme ». Nous devons rectifier cette assertion : s’il est vrai que, depuis qu’il a quitté le ministère de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer n’a pas manqué de dénoncer les dérives wokes, de nombreux universitaires, journalistes et représentants politiques l’ont devancé dans le combat contre le wokisme. Par ailleurs, la circulaire Blanquer de septembre 2021 – « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » – contredit l’idée que le ministre ait été parmi les premiers à s’opposer à l’idéologie woke, en particulier à la théorie du genre. Cette circulaire entérinait en effet les revendications d’associations transgenres: possibilité pour l’élève de se déclarer du sexe de son choix, de changer de prénom, de bénéficier d’aménagements particuliers pour l’utilisation des toilettes et des vestiaires, de jouir d’un traitement individualisé et, bien sûr, d’une bienveillance sans limite de la part du « personnel éducatif » et des élèves auxquels devaient être proposées des sessions de sensibilisation (c’est-à-dire de rééducation) sur le sujet[2]. Il n’est pas impossible que cette circulaire ait été concoctée dans le dos du ministre, sous la férule de hauts fonctionnaires indéboulonnables suivant à la lettre l’agenda européiste de rééducation de la population, tant en ce qui concerne les questions de sexualité et de genre qu’en ce qui concerne les questions d’écologie ou d’éducation aux médias. Il n’empêche: la signature de M. Blanquer au bas de ce document consternant restera comme l’illustration de sa soumission à l’idéologie transgenre au moment où il aurait dû, au contraire, faire montre de conviction et d’autorité et renvoyer dans leurs cordes les idéologues de la rue de Grenelle.

A lire aussi, du même auteur: Quand Jean-Noël Barrot loue l’immigration africaine

Tristan Waleckx a, depuis le début de son émission, une idée en tête. Il pose par conséquent à Jean-Michel Blanquer une question qui n’est pas une question mais un sous-entendu courant chez les journalistes de l’audiovisuel public : « Le fait d’avoir popularisé le mot woke, ça a permis à l’extrême droite d’imposer un concept dans le débat public ? » Quelques minutes plus tard, après avoir montré un graphique où il apparaît que l’expression « islamo-gauchisme » a été entendue dix à vingt fois plus « sur CNews, la chaîne de Vincent Bolloré » que sur les autres chaînes d’info, le journaliste, toujours aussi lourdingue, interroge faussement l’ex-ministre : « Ça veut dire quelque chose ? » Et lorsque ce dernier affirme que, CNews ou pas, « l’islamo-gauchisme existe », le journaliste sort ce qu’il croit être sa carte maîtresse :« C’est un concept qui est quand même contesté par le CNRS qui est un institut sérieux (sic – voir ci-dessus) expliquant que “l’islamo-gauchisme est un slogan politique ne correspondant à aucune réalité scientifique” » et par des présidents d’universités déclarant que « l’islamo-gauchisme est une pseudo-notion qu’il conviendrait de laisser, sinon aux animateurs de CNews, plus largement à l’extrême droite ». L’argumentation tourne court. Au passage, on remarquera qu’en ce moment, qu’il s’agisse du wokisme, de l’islamo-gauchisme ou de l’écologisme, les gourous de ces nouvelles religions n’ont qu’un mot à la bouche, le mot « science », mot-amulette, mot-talisman, mot magique ayant pour but d’empêcher justement toute démarche scientifique, laquelle ne peut se passer de réflexion critique et de controverses.

Nul besoin, je crois, de préciser l’objectif de cette émission. Le procédé pour y parvenir, grossier, est celui qu’utilisent régulièrement les journalistes bien-pensants du service public. Ce « Complément d’enquête » corrobore les déclarations de Delphine Ernotte, la présidente de France TV ayant avoué que l’audiovisuel public n’était pas là pour montrer la France telle qu’elle est mais telle que la caste médiatico-progressiste aimerait qu’elle soit. De ce côté-là, on peut dire que Tristan Waleckx a parfaitement rempli sa mission…

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[1] La prochaine vague : comment l’extrémisme religieux regagne le pouvoir. L’extrémisme religieux en question est bien entendu l’extrémisme… catholique qui, comme chacun sait, ravage l’Europe en ce moment.

[2] Pour plus d’informations sur cette position catastrophique du ministre Jean-Michel Blanquer vis-à-vis des revendications émanant de différents organes politiques et associatifs promouvant l’idéologie sur le genre, je renvoie à mon article du 16 octobre 2021 : https://www.causeur.fr/vallaud-belkacem-blanquer-meme-combat-215169

Macron debout devant Poutine et couché devant Tebboune

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La grâce de Boualem Sansal ne solde pas notre lourd contentieux avec l’Algérie


C’est hier soir que l’avion officiel affrété par l’Allemagne a atterri à Berlin. À son bord, Boualem Sansal, enfin libéré de sa geôle d’Alger où il était emprisonné depuis le 16 novembre 2024 pour de simples faits d’opinion. Suite à l’intervention du président de la République fédérale Frank-Walter Steinmeier, l’écrivain dissident, âgé de 81 ans, a été gracié par le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour motifs « humanitaires ».

Sansal, qui souffre d’un cancer, a été dès son arrivée admis dans un hôpital berlinois, où il pourra bénéficier de soins dignes de ce nom. Qu’il soit permis à l’auteur des lignes d’en pleurer de joie. L’écrivain est un ami de Causeur. Et le système de santé algérien, auquel il avait accès depuis son arrestation, est calamiteux. La preuve : les présidents de ce pays autoritaire et corrompu – et pourtant si riche de son pétrole et de son gaz – préfèrent systématiquement consulter des médecins en Europe quand ils souffrent de maladies graves.

Emmanuel Macron peut à bon droit se féliciter de la « mission de bons offices » effectuée par son homologue allemand, qui lui a permis d’obtenir l’élargissement de Sansal sans avoir à principalement remercier Tebboune, dont la politique reste de toute évidence résolument hostile à la France.

A lire aussi: Compromissions cairotes

Curieusement pourtant, l’Élysée a fait savoir hier que les conditions étaient à présent réunies pour « renouer le dialogue »avec le régime algérien. Alors que celui-ci continue de refuser ses citoyens expulsés de France, maintient toujours en détention le journaliste Christophe Gleizes et est soupçonné par la justice d’être impliqué dans l’enlèvement d’Amir DZ, un opposant algérien réfugié dans notre pays…

« Le bras de fer ne fonctionne pas, c’est clair », a même osé glisser un proche du président français, pour suggérer que le calvaire de Sansal aurait été abrégé plus tôt si Bruno Retailleau n’avait pas fait preuve de détermination vis-à-vis d’Alger dans le dossier des OQTF quand il était Place Beauvau et si le RN n’avait pas fait voter à l’Assemblée nationale le 30 octobre une résolution visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968. Syllogisme typiquement macronien ! La stratégie de lèche-babouches de l’Élysée et du quai d’Orsay n’a pas mieux fonctionné que la fermeté affichée du patron des LR.

Il n’est pas question ici de discuter de la sincérité et de la résolution du chef de l’État dans l’affaire Sansal, ni davantage dans le contentieux du Sahara occidental (dans lequel il a pris le parti du Maroc l’année dernière). Mais simplement de souligner son hypocrisie, aussi humiliante que contre-productive. Macron feint de ne pas voir que, de toute manière, les Algériens ont décidé de punir la France. Sa comédie ne fait que renforcer leur mépris. « On n’obtient rien en se fâchant avec ceux qu’on sollicite », a indiqué hier un conseiller de l’Élysée. On n’obtient rien non plus en leur lâchant tout.

Ils n’auront pas notre haine?

13-Novembre. Les commémorations et les nombreuses émissions proposées dans les médias entendaient à tout prix mettre de côté les «mauvais» sentiments, observe notre contributrice. Mais, on ne vainc pas l’islamisme conquérant, pas plus qu’on ne rend justice, autour d’un «groupe de parole».


Cette semaine, C ce soir a logiquement consacré l’une de ses émissions quotidiennes aux attentats du 13 novembre 2015. Sur le plateau : l’ancien président devenu député socialiste François Hollande, Gaëlle, victime du Bataclan défigurée à vie, Aurélie Silvestre, dont le compagnon et père de ses deux enfants a été assassiné, l’historien Denis Peschanski, codirecteur du Programme 13-Novembre, et Jean-Xavier Delestrade, réalisateur de la série Les Vivants, diffusée cette semaine sur France 2.

Islamiste, ce mot si difficile à prononcer

Les victimes sont mises en avant, à juste titre : on parle de leur souffrance, de celle de leurs proches, des blessures visibles et de celles qui ne le sont pas, de la reconstruction, de la transmission du souvenir aux jeunes générations.

Mais les auteurs, eux, disparaissent du récit. François Hollande prononce bien le mot « islamiste », prudemment, deux ou trois fois, mais personne ne s’y arrête. Et lorsqu’il cite les attaques qui ont précédé le 13-Novembre (Merah, Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher), il ne précise même plus la nature de ce terrorisme. Comme si tout cela relevait désormais d’une malédiction sans visage, d’un mal abstrait, dépolitisé.

L’émission préfère explorer le thème de la guérison, du dialogue, et la fameuse « justice restaurative » : cette approche de la réparation plutôt que de la punition, introduite par la loi Taubira du 15 août 2014 pour les délits de droit commun. Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos djihadistes du 13 novembre, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, a fait savoir par la voix de son avocate qu’il était partant. Oui, partant ! Dans une « démarche restaurative », il souhaite rencontrer certaines victimes.

On cauchemarde. Celui qui, durant son procès, revendiquait son statut de « combattant de l’État islamique », invoquait Allah et le prophète, continue aujourd’hui à consulter en prison des contenus de propagande islamiste sur une clé USB. Et le voilà qui veut participer à un programme de justice restaurative. Restaurer quoi, au juste ? Le lien social ? La confiance ? La paix civile ? Il n’en a probablement rien à faire. Peut-être cherche-t-il simplement à profiter des failles du droit pour continuer à hanter ses victimes sous un vernis humaniste.

Bonjour le groupe de parole !

Comme l’a justement rappelé Riss, directeur de Charlie Hebdo, en réaction à la demande d’Abdeslam : on ne « restaure » pas le lien social avec ceux qui ont voulu le détruire. La justice n’est pas un groupe de parole. Pendant l’émission, la question de la compatibilité entre justice restaurative et terrorisme n’a pas été posée. Trop dérangeante, sans doute.

On préfère s’émouvoir du témoignage de Gaëlle, rescapée du Bataclan défigurée à vie, qui a choisi de rencontrer un terroriste en prison. Cette même victime avait déjà été mise en avant dans Envoyé Spécial par Élise Lucet, une journaliste toujours prompte à transformer l’émotion en leçons de morale. Gaëlle raconte qu’elle est « dénuée de haine », que la colère la paralyse. C’est bien son droit. Et nos médias adorent ce mantra devenu injonction : « Vous n’aurez pas ma haine » – comme l’écrivait Antoine Leiris, qui avait perdu son épouse au Bataclan, auteur du livre éponyme.

C’est que la haine, aujourd’hui, est devenue un mot tabou, presque indécent, un mot des plus sales, un mot quasiment inaudible, presque barbare. Comme si haïr ceux qui veulent notre mort faisait de nous des barbares, ou pire : des électeurs du Rassemblement national. Seule compte l’empathie bien légitime avec les victimes et leurs proches, mais la colère elle est exclue, perçue comme une anomalie. 

Pourtant, peut-il vraiment y avoir une joue tendue, une rédemption possible, avec ceux qui ont voulu exterminer des innocents au nom d’Allah, avec ceux qui ont répondu à l’appel de Daesh de cibler « les méchants et sales Français » ? Ce choix médiatique de se focaliser sur la souffrance et la mémoire n’est pas anodin. Il évite soigneusement de poser la question politique : quel bilan dix ans après ? Que n’avons-nous pas voulu voir ?

Le laxisme migratoire continue

Lors du procès des attentats, François Hollande lui-même a reconnu qu’en 2015, le pouvoir savait que la filière d’immigration syrienne servait de porte d’entrée à des terroristes. Il savait, et il n’a rien fait ? Dix ans plus tard, les frontières sont restées poreuses, et la menace islamiste, elle, n’a pas reculé.

En octobre 2025, trois jeunes femmes radicalisées ont été écrouées à Paris pour préparation d’attentat. Le sixième projet islamiste déjoué depuis le début de l’année. Le discours djihadiste se diffuse toujours sur les réseaux sociaux, aux abords de certaines mosquées, et dans de nombreuses associations sportives à visée séparatiste. Et dans les écoles, on n’ose même plus parler de la hausse des atteintes à la laïcité.

Alors oui, on a le droit de haïr les terroristes islamistes. Les haïr, c’est affirmer qu’il existe des choses qui ne se réparent pas, ne se comprennent pas, ne se pardonnent pas. Les haïr, c’est rappeler que la justice n’est pas une thérapie collective, mais une frontière morale. Et qu’à force de confondre empathie et faiblesse, nous finirons peut-être par ne plus savoir ce que nous devons protéger.

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Djihadisme: les femmes, une nouvelle donne?

Quelques jours avant le dixième anniversaire des attentats du 13 novembre, les Français apprenaient, médusés, que le dernier terroriste survivant Salah Abdeslam disposait d’un ordinateur en prison, qu’il s’était marié par téléphone avec une certaine Maëva B., elle-même radicalisée, que celle-ci avait pu lui faire parvenir de la propagande djihadiste sur une clé USB et que, désormais séparée de lui, elle nourrissait son propre projet d’attentat islamiste. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, s’est dit sidéré.


La première affaire remonte au 17 janvier 2025. Salah Abdeslam, détenu dans la prison de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, est accusé de « recel d’objet illicite » via une « potentielle clé USB » ayant permis, à partir de son ordinateur, des connexions à des fichiers ayant trait à des organisations comme l’État islamique ou Al-Qaïda. L’homme le plus dangereux de France est transféré dans un des quartiers de Haute Sécurité que vient de créer Gérald Darmanin. Près de dix mois plus tard, le 4 novembre 2025, le PNAT (Parquet national antiterroriste) entend à deux reprises le détenu, dans le cadre d’une garde à vue, à propos de « quatre » clés, connectées, entre décembre 2024 et janvier 2025, qui n’ont pas été retrouvées. L’amie (et ancienne « épouse ») de Salah Abdeslam qui le visitait au parloir, interrogée et mise en garde à vue, reconnaît avoir chargé de propagande islamiste une clé USB qu’elle a « fait remettre » à Salah Abdeslam au cours d’un parloir. C’est alors qu’on a aussi découvert une affaire dans l’affaire: celle de la menace imminente d’un attentat.

Pas de menace particulière

Au domicile de Maëva B., les enquêteurs de la Direction nationale de la police judiciaire, et la DGSI, enquêtant sur ses outils numériques, décèlent un projet d’action violente terroriste. Projet qui implique également un homme de 20 ans radicalisé, habitant en Isère, époux religieux de Maëva, avec velléités de rejoindre une organisation terroriste, ainsi qu’une adolescente de 17 ans résidant dans l’Hérault. Ce risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger est-il concomitant avec les commémorations des dix ans des attentats du Stade de France, des terrasses et du Bataclan ? « Pas de menace particulière, a estimé la chef de la DGSI, pour le 13 novembre ».

Et Salah Abdeslam, dans tout ça ? Son avocate et le PNAT notent qu’il n’y a pas d’éléments le reliant à ce projet d’attentat. Mais la chef de la DGSI précise bien que le terroriste « demeure radicalisé et convaincu de l’idéologie mortifère qu’il a suivi pendant des années ». Le PNAT a requis sa mise en examen et celle de son ex-compagne « pour recel d’objet illicite remis à détenu (la clé USB), pour complicité et association de malfaiteurs délictuelle de droit commun ». Maeva B. est mise également en garde à vue, d’une durée exceptionnelle de 96 heures, ainsi que deux autres individus. Si Salam Abdeslam ne semble pas impliqué dans le projet d’attentat, reste à savoir comment et pourquoi cette propagande islamiste est arrivée dans son ordinateur.

Sidération

Ces annonces ont plongé les Français dans la sidération. Comment tout cela est-il possible ? On posera ici des questions sans développer les réponses. Comment Salah Abdelsam pouvait-il être en possession d’un ordinateur depuis 2024 ? Réponse: l’obtention d’un ordinateur (avec accès à internet interdit) est rendue légale, depuis 2009, pour un détenu quand il en fait la demande. Les droits ? La CEDH qui nous gouverne contraint les États à bien traiter les détenus. Étant stricto sensu la privation de la liberté, la prison, est, à elle seule, pense la Cour, une sanction suffisante. C’est ainsi que les détenus doivent jouir de tous les droits dont celui de « se marier »  fût-ce par téléphone. Un criminel de grande envergure a même le droit d’entamer une « démarche de justice restaurative » comme vient de l’annoncer l’avocate d’Abdeslam exprimant le désir de son client « d’entrer en contact » avec les parties civiles.

Apparemment, les deux affaires – la clé USB et le projet d’attentat– sont distinctes. Salah Abdelsam n’est pas concerné ? Pas encore ? C’est là que je me suis souvenue du livre de Hugo Micheron Le jihadisme français et sa partie sur les prisons. On le sait, le jihad se poursuit en prison qui est, par excellence, un lieu de vie idéal, convivial et incubateur de la radicalisation. Salah Abdeslam allait-il avoir un rôle à jouer par l’influence qu’il pourrait avoir ? On sait comme les détenus islamistes acquièrent l’auréole du martyre en prison.

Drôle d’atmosphère

À la question que l’on se posait, il y a peu encore : le jihad est-il toujours dans une séquence « à marée basse de reconfiguration à bas bruit » ? on connaît la réponse. On dit « jihadisme d’atmosphère » pour signifier que c’est la société tout entière qui est concernée par la violence des actes et un « entrisme » au quotidien, en tout et partout, d’une rare intensité. Si le fameux colloque « sur la Palestine » du Collège de France a été annulé, et si la dame du perchoir proteste de sa fermeté à venir, les questions demeurent: comment le Collège de France en est-il arrivé là ? Comment des fillettes voilées sont-elles « entrées » récemment – quelle ironie !- » à l’Assemblée nationale pour assister à une séance ? Les élections à venir nous préparent de belles surprises. L’affaire présente montre exemplairement la montée en puissance de Daesh ou Al-Qaïda.

Faut-il voir, enfin, une nouveauté, comme certains le pensent, dans ce nouveau jihad, avec la présence des femmes ? À la différence d’Al-Qaïda, Daesh, « califat genré », accueillait, en son sein, les femmes, « génitrices des lionceaux à venir ». D’où la déstabilisation créée par un commando de femmes, à Paris, le 4 septembre 2016, près de Notre-Dame. Il y a peu, trois Françaises, âgées de 18, 19 et 21 ans, ont été écrouées par le PNAT, pour préparation d’un attentat terroriste dans des bars parisiens ou salles de concerts. Les femmes, disent les experts, sont plus tenaces et plus fiables que les hommes dans la lutte jihadiste. En attendant nous sommes prévenus par les patrons des Renseignements de la gravité de la menace jihadiste sur notre sol. La clé de Salah Abdeslam n’a pas été retrouvée.

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Dix ans après le 13-Novembre, la menace endogène

Dix ans après les attentats sanglants du Bataclan, du Stade de France et des terrasses de cafés parisiens, des experts avancent que la menace extérieure s’est atténuée: les commandements centraux de l’État islamique et d’Al-Qaida ont été considérablement affaiblis. En revanche, l’ennemi intérieur apparaît toujours aussi redoutable et imprévisible. Surtout, depuis 10 ans, une autre insécurité a explosé, observe notre chroniqueur – l’insécurité culturelle.


L’ennemi est là. Parmi nous. Dix ans après les attentats islamistes du 13 novembre 2015, qui ciblèrent notamment des consommateurs sur des terrasses de bistrots parisiens et le public d’un concert au Bataclan, l’islam djihadiste s’est fondu dans la société française qu’il déteste.

Menace endogène

Loin d’avoir été traqué, comme il a pu l’être par Israël et certains pays musulmans, il s’est installé dans les recoins de la nouvelle société « diversitaire ». Céline Berthon, directrice de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), le rappelait lundi sur RTL : la menace islamiste est désormais « endogène » et mobilise auprès d’une jeunesse âgée de 17 à 22 ans. Si l’État islamique semble avoir perdu de sa capacité à projeter des offensives extérieures, ses petits bras armés sont prêts localement à ubériser la guerre sainte, dans des initiatives individuelles difficilement décelables. Or, abordant cette menace, Catherine Vautrin, ministre des Armées, a curieusement estimé, mardi sur Europe 1, comme si elle découvrait le sujet : « Nous devons travailler sur ce sujet ». Cette somnolence de l’Etat mollasson face à l’islam radical fait du pouvoir l’allié benêt d’une idéologie totalitaire qui ne respecte que la force. En 2015, Jean-Yves Le Drian, à ce même ministère des Armées, avait déclaré après les tueries parisiennes : « Je ne parlerai jamais d’ennemi intérieur ». Il craignait d’alimenter une possible guerre civile. Mais ces postures morales sont des lâchetés. Dix ans après, il y a bel et bien un ennemi intérieur. Une 5e colonne a même trouvé de fanatiques collaborateurs auprès d’une extrême gauche qui a vendu son âme pour accompagner électoralement ce qu’elle croit être un islam révolutionnaire.

A lire aussi: Des Talibans en Maine-et-Loire?

Contre l’ennemi intérieur, l’exemple de Ceux de 14

Rien n’est plus contre-productif, pour éviter la guerre intestine, que de fermer les yeux sur les fractures nées d’une société ouverte à l’immigration de peuplement. Un sondage Ifop de 2020 montrait déjà que 74% des jeunes musulmans français (moins de 25 ans) se réclamaient de l’islam plutôt que des valeurs de la République. Les dirigeants, à commencer par le chef de l’État, savent ces échecs.

Leur choix de perpétuer une invasion extra-européenne les rend complices d’une colonisation agressive. Cette situation place de plus en plus de Français en insécurité culturelle, voire en légitime défense. D’autant que la résistance à l’envahisseur, qui dicta le comportement de nos aïeux durant la Grande Guerre, est inenvisageable pour les actuelles élites. Or le courage des Poilus reste un exemple. Il ne doit pas se contenter, comme avant-hier, du rituel républicain du 11-Novembre. Mes deux grands-pères étaient au front. L’un, Jean Rioufol, mobilisé à ses 18 ans, est mort peu après la guerre, à 28 ans, les poumons brûlés par les gaz allemands, laissant une veuve et deux jeunes orphelins. J’ai eu la chance en revanche de connaître mon grand-père maternel, le colonel Mario Ayme, à l’époque capitaine de la 2e Compagnie du 28e Bataillon de chasseurs alpins (28e BCA). Il m’a souvent raconté, notamment, son assaut de la tranchée de Bouchavesnes, le 12 septembre 1916, lors de l’offensive de la Somme, qui allait le blesser grièvement à une jambe et le rendre partiellement sourd. Ces souvenirs sont ceux de nombreuses familles françaises. La mémoire de ces héros nous oblige à chasser l’ennemi infiltré.

Jean-Jacques Goldman et ce que la France est devenue

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Nous vivons dans un étrange pays où un simple message de soutien d’un ancien chanteur populaire à nos forces armées déclenche une vague de commentaires étonnés, observe notre chroniqueur.


Assez régulièrement, je résiste à la tentation d’écrire un nouveau billet sur Jean-Jacques Goldman, ses rares propos publics, ses actions caritatives discrètes, l’aura inaltérable qui le maintient au premier rang de l’affection populaire. Je me rends compte que mes billets ne doivent pas être seulement un moyen d’exprimer son enthousiasme personnel, mais aussi une occasion de le dépasser pour susciter une réflexion plus générale.

Une forme de disruption

Cette belle opportunité m’a été offerte par le message manuscrit que Goldman a adressé, au soir du 11 novembre, en sa qualité d’ambassadeur du Bleuet de France.

Photo : le Bleuet de France

« Pas de paix sans gardien, ni de liberté sans soldat. Nous avons peut-être eu tendance à l’oublier, mais l’actualité nous le rappelle dramatiquement chaque jour. Il me semblait important de montrer notre reconnaissance envers nos armées, leurs blessés, et plus généralement envers toutes les forces de sécurité qui nous protègent au quotidien1. »

Il se dit « heureux et fier » d’être l’ambassadeur de cette association, qui apporte son soutien aux anciens combattants, aux veuves de guerre, aux pupilles de la nation, aux militaires blessés lors des missions de maintien de la paix, ainsi qu’aux victimes du terrorisme.

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Dans un monde où la normalité et la décence prévaudraient, il ne serait même pas nécessaire de s’attarder sur ces évidences adressées à tous les Français. Jean-Jacques Goldman serait sans doute le premier à juger excessive l’attention portée à son message de cœur, de solidarité et de reconnaissance envers tous ceux – et toutes les institutions – qui défendent notre société et veillent, autant que possible, à la tranquillité et à l’intégrité de nos existences.

Mais nous savons bien, pour le subir au quotidien, que le principe, dans le monde intellectuel, artistique et même sportif, est inverse, qui ne manque jamais une occasion de pourfendre ce que Jean-Jacques Goldman honore.

Organes de sauvegarde

Que ce soit à l’égard de nos armées ou de nos forces de l’ordre, on ne compte plus les dénonciations ineptes, injustes ou mensongères. J’ai encore en mémoire la sottise de Kylian Mbappé à la suite de la mort de Nahel, ainsi que les tribunes, pétitions et mises en demeure qui, presque toutes, poursuivent le même dessein : s’en prendre à nos organes de sauvegarde, qu’ils œuvrent à l’intérieur ou à l’extérieur. Et, malheureusement, je ne peux pas exclure de cette responsabilité collective le président de la République lui-même, qui, à plusieurs reprises, s’est cru autorisé à préjuger, toujours dans le même sens.

Dans ce climat où, dans tant de secteurs, le registre est devenu celui de la haine – au détriment de la courtoisie, qui devrait au moins, dans la forme, civiliser les contestations et les contradictions, même les plus vives – la sérénité et la rectitude que distille le message de Jean-Jacques Goldman font du bien. Elles constituent, en effet, un véritable havre de paix et ne font qu’amplifier mon admiration pour une personnalité qui, tout au long de sa carrière comme dans sa vie d’après, n’a jamais proféré la moindre stupidité ni cédé à la moindre facilité démagogique. Nous n’aurons plus jamais, de sa part, d’autres retours que ceux que l’éthique démocratique lui prescrit, que la vérité et la justice lui dictent. Nous nous en contenterons.

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  1. https://www.franceinfo.fr/societe/guerre-de-14-18/11-novembre/document-pas-de-paix-sans-gardien-ni-liberte-sans-soldat-a-l-occasion-des-commemorations-du-11-novembre-jean-jacques-goldman-adresse-un-message-aux-francais_7609268.html ↩︎

Le plus long «shutdown» américain s’achève: mais à quoi tout cela a-t-il servi?

Dans la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 novembre, Donald Trump a promulgué la loi mettant un terme à la paralysie budgétaire qui durait depuis 43 jours. Après cet interminable bras de fer politique, comment les marchés financiers vont-ils se redresser ? Analyses et perspectives.


Après que le Sénat a voté le maintien du financement du gouvernement fédéral jusqu’au 30 janvier, le plus long “shutdown” de l’histoire des États-Unis semble devoir s’achever dans un murmure. La Chambre des représentants doit se prononcer sur le projet de loi dès mercredi, tandis que le président Donald Trump a déjà proclamé « une très grande victoire ». Il reste toutefois difficile de savoir si quelqu’un a réellement gagné quoi que ce soit.

Rattrapage des salaires

Du côté positif pour la consommation américaine, le texte du Sénat garantit le versement rétroactif des salaires aux employés fédéraux mis en congé forcé et annule les licenciements décidés au début du shutdown, en gelant toute nouvelle suppression de postes au moins jusqu’au 30 janvier. Cependant, l’économie américaine montrait déjà des signes d’affaiblissement dans certains secteurs clés avant la fermeture, et l’absence de données actualisées a brouillé le tableau. Le rapport sur l’inflation (CPI) du mois d’octobre a bien été publié à temps, mais l’incertitude demeure concernant la mise à jour prévue pour le 13 novembre, tandis que les retards sur les statistiques d’emplois non agricoles de septembre et octobre continuent d’obscurcir la dynamique de croissance.

A lire aussi: Stabiliser la dette publique: les étranges partis-pris du Conseil d’analyse économique

Anatole Kaletsky, mon collègue, estime que le shutdown a peut-être masqué une faiblesse sous-jacente du marché du travail américain. Les indicateurs du secteur privé, tels que l’augmentation des licenciements annoncés par Challenger ou la forte baisse de l’indice des services de ressources humaines et d’emploi du S&P 1500, pointent clairement vers un mauvais chiffre de l’emploi, voire une contraction, ce qui pourrait provoquer un bref accès d’aversion au risque sur les marchés. À l’inverse, si les données concordent avec les signaux plus robustes des ventes de détail Redbook et de l’indice ISM des services, confirmant la poursuite de la création d’emplois, les investisseurs devraient accueillir leur publication avec sérénité.

Autres dossiers en attente

La liquidité devrait s’améliorer à mesure que le gouvernement rouvre. Après que la loi One Big Beautiful Bill Act a relevé le plafond de la dette en juillet, le Trésor a reconstitué sa réserve de liquidités à environ 950 milliards de dollars, mais a continué de conserver un excès de trésorerie. Le shutdown a pu retarder certains paiements, de sorte que la reprise des décaissements pourrait réduire le solde du Trésor et réinjecter de la liquidité dans le secteur privé. Cette dynamique contribue à expliquer la récente hausse des actions américaines et de l’or, ainsi que l’affaiblissement du dollar à l’approche de la réouverture. Le recul du taux de financement garanti au jour le jour (SOFR) indique lui aussi une diminution des tensions sur la liquidité des marchés monétaires.

La question clé est de savoir jusqu’où cette réserve de trésorerie va diminuer. Le Trésor a récemment reconnu détenir un excès de liquidités et s’est engagé à réduire ses emprunts pour faire baisser le solde. S’il atteint son objectif de 850 milliards de dollars, environ 100 milliards afflueraient vers le secteur privé. Un retour à son repère d’un “débit d’une semaine”, conforme à son objectif post-2016, impliquerait une injection plus importante, de l’ordre de 200 milliards.Toutefois, ce surcroît ponctuel de liquidité ne devrait pas modifier de manière significative les perspectives concernant le bilan de la Réserve fédérale.

Avec la résolution du shutdown, le Congrès peut maintenant se concentrer sur d’autres dossiers en attente. Les élus doivent encore négocier une prolongation des subventions de l’Affordable Care Act, un vote étant prévu pour décembre. Un autre point essentiel est la réautorisation de l’International Development Finance Corporation (DFC), qui a des implications macroéconomiques importantes. La DFC a été suspendue lorsque la loi BUILD a expiré le 1er octobre, sa reconduction ayant été retardée par le shutdown. Durant cette suspension, le Sénat a confirmé Benjamin Black, fils du dirigeant de private equity Leon Black, au poste de directeur général.

La reconduction de la DFC est importante étant donné le projet de l’administration de l’utiliser pour financer des initiatives liées aux priorités de sécurité nationale. Par exemple, la DFC s’est engagée à travailler avec la société d’investissement Orion Resource Partners et avec ADQ, le fonds contrôlé par le gouvernement d’Abou Dhabi, pour investir dans des projets de chaîne logistique concernant des minerais critiques pour les États-Unis et leurs alliés. En résumé, l’impact économique principal du shutdown devrait se limiter à des distorsions temporaires des données, qui devraient rapidement disparaître. L’injection ponctuelle de liquidité liée à la baisse des réserves du Trésor, combinée au retour à un fonctionnement normal du financement public, devrait fournir un soutien à court terme aux marchés — du moins jusqu’au prochain épisode d’affrontement politique.

Commémorations du 13-Novembre: une barbarie toujours recommencée

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Paris, 13 novembre 2025 © Stephane Lemouton/SIPA

À Saint-Denis puis à Paris, un hommage a été rendu hier aux 132 victimes des attentats islamistes du 13 novembre 2015. En début de soirée, le président Emmanuel Macron a inauguré un jardin mémoriel (notre photo) sur la place Saint-Gervais, à proximité de l’Hôtel de Ville de la capitale. Il est temps de relever la tête, affirme Charles Rojzman. Il est temps de reconnaître que toutes les cultures ne se valent pas. Il est temps de combattre l’islamisme qui s’enracine sur notre sol.


Le rituel se répète : gerbes déposées, visages fermés des autorités, discours calibrés, violons qui pleurent comme s’ils pleuraient pour nous, pour masquer l’essentiel. Les commémorations officielles des attentats du 13 novembre ressemblent de plus en plus à une liturgie républicaine sans foi, sans courage, sans vérité. Quelques minutes de silence, un dépôt de fleurs, et l’on se félicite d’avoir « tenu bon ».

Mais dans cette parole officielle, un mot se dérobe, un mot que l’on enfouit sous des euphémismes : l’islamisme.

Lente fatigue morale

Ce ne sont pas des « exclus », des « paumés », des « déséquilibrés » qui ont criblé Paris de balles et transformé des terrasses en morgue : ce sont des soldats d’une idéologie millénaire, patiemment nourrie, patiemment justifiée, patiemment importée.

On commémore, mais on ne nomme pas. On pleure, mais on ne comprend pas.
On s’incline, mais on ne se relève pas.

Comme si nommer l’islamisme constituait un blasphème dans une société qui préfère commémorer ses morts que protéger ses vivants. Comme si la République avait peur d’elle-même. Peur de rompre avec ses fictions, ses illusions d’un « vivre-ensemble » dont les plus lucides savent déjà qu’il n’existe que dans les brochures ministérielles.

C’est ici que commence le retour de la barbarie.

Non seulement dans les actes terroristes eux-mêmes — ils sont la pointe du glaive — mais dans ce renoncement préalable, dans cette lente fatigue morale qui consiste à éviter le mot juste, à diluer la réalité dans la compassion institutionnalisée.

Car les violences collectives issues du monde arabo-musulman ne surgissent jamais de manière soudaine. Elles ne sont ni des accidents de l’histoire ni des éclats imprévisibles. Elles sont patiemment préparées, longtemps à l’avance, dans le silence des frustrations accumulées, dans les replis amers des ressentiments communautaires. Elles germent dans les failles de sociétés fracturées, rongées de l’intérieur par la défiance, le mépris mutuel, la haine contenue.

Lorsque l’économie vacille, que les structures sociales se disloquent, que les élites perdent toute légitimité, les sociétés cherchent un point d’ancrage. Ce besoin d’identité devient obsessionnel. Et lorsqu’il n’est pas satisfait de manière saine — par l’éducation, la culture, le débat — il se pervertit : identités rigides, mythes simplificateurs, fabrication d’ennemis.

Régressions

On désigne l’hérétique, l’apostat, le riche, le Juif, l’Occidental, la femme trop libre, la laïcité. Peu importe la cible, ce qui compte, c’est la haine comme anesthésiant, comme certitude.

Ces révoltes ne sont pas les signes d’une avancée démocratique. Trop souvent, elles accouchent de régressions. Derrière la colère contre l’injustice se cache parfois une soif de soumission.

Les printemps arabes ont vu naître, après l’espoir, des automnes islamistes. L’histoire européenne a montré que la colère des peuples peut engendrer le fascisme.

Ces « révolutions » n’éveillent pas les consciences : elles les endorment. Elles rejettent l’autorité au nom de la liberté, mais pour mieux adorer ensuite un gourou, un Prophète de substitution, une Vérité révé­lée. Elles crient à l’émancipation tout en réclamant l’idéologie qui pense à leur place. Ce n’est pas un progrès : c’est une démission, une abdication, une régression spirituelle.

La haine est fille de l’humiliation. Mais elle devient poison lorsqu’elle se fait doctrine. Dans un monde désorienté, la pensée complotiste est une drogue douce: elle rassure, elle simplifie, elle déresponsabilise. Mais surtout, elle rend la violence légitime.

A lire aussi, Isabelle Marchandier: Ils n’auront pas notre haine?

Le fanatisme religieux n’a pas le monopole du mal. Le mal s’habille de toutes les couleurs : croix gammée, faucille, croissant. Les djihadistes invoquent le Coran comme les nazis invoquaient la Germanie éternelle. Boko Haram — « l’éducation occidentale est un péché » — ne dit rien d’autre que les Croisés exaltés ou les révolutionnaires de la Terreur : penser est un crime, la nuance une hérésie.

Ce n’est pas une lutte pour la justice : c’est une revanche contre la complexité, contre la liberté d’être autre. Une guerre contre les Lumières et la dignité humaine.

Frapper un policier, incendier une voiture, décapiter un enseignant, mitrailler une foule dans une fosse de théâtre ou sur des terrasses de café : voilà le visage moderne de la barbarie. Ce ne sont pas des actes de courage, mais de lâcheté.

Et que certains intellectuels les excusent au nom d’un antiracisme dévoyé est une trahison — la plus grande.

Meutes lâches

Le fanatique ne s’attaque jamais aux puissants réels : il vise les faibles, les isolés, les enseignants, les symboles. Il hait ce qu’il désire mais n’atteint pas : la liberté, la connaissance. Il agit en meute, comme les lâches. Son idéologie n’est qu’un alibi : ce qu’il aime, c’est détruire.

Et nous, durant ce temps, reculons. Nous hésitons à enseigner Voltaire. Nous craignons de nommer l’islamisme de peur d’être accusés d’islamophobie. Nous appelons « culture » des traditions qui justifient le viol ou l’excision. Nous transformons l’école en champ de bataille idéologique. Nous acceptons, au nom de la tolérance, l’intolérable.

La question de la barbarie est aussi est ici, chez nous : dans les rues d’Europe où l’on crie From the river to the sea sans comprendre que cette phrase signifie l’effacement d’un peuple. Dans les universités américaines où l’on célèbre le Hamas comme on célébrait jadis Che Guevara. Dans les plateaux télé où les journalistes, bardés de moraline, accusent Israël d’être ce qu’ils n’ont pas le courage de nommer ailleurs : un rempart.

Le 7 octobre n’a pas seulement révélé la barbarie des tueurs : il a révélé notre propre barbarie douce — celle du déni, du relativisme, de la lâcheté. Nous sommes devenus les clercs du renversement moral : ceux pour qui la culpabilité occidentale doit être payée par procuration. Et quoi de mieux, pour expier, que de désigner Israël comme le miroir de nos crimes ?

L’Europe, lassée d’elle-même, se lave les mains dans le sang juif. Elle retrouve, sans le savoir, la vieille jubilation des temps obscurs : accuser le Juif pour ne pas se regarder.

C’est là le secret obscène du progressisme contemporain : il hait le Juif en se croyant antiraciste, il justifie le meurtre en se croyant humaniste, il adore la victime quand elle tue au nom du Bien.

Nous sommes à la croisée des chemins. Ce que nous voyons n’est pas un simple accès de violence, mais une bascule. Une menace directe contre ce que l’humanité a mis des siècles à construire.

Le fanatisme avance parce que nous reculons. Il est fort de notre faiblesse, de nos renoncements, de notre peur d’affirmer que certaines valeurs valent mieux que d’autres.

La barbarie revient, mais pas en haillons : elle revient avec micros, réseaux, tribunes, soutiens universitaires. Elle infiltre l’école, les médias, les institutions. Et ceux qui devraient la combattre la justifient. Il est temps de relever la tête. Il est temps de dire que toutes les cultures ne se valent pas. Il est temps de refuser. De combattre. Car le prix du silence est l’effondrement. Et le prix de la complaisance, la soumission. Le combat pour la civilisation n’est pas un luxe : il est vital. Le perdre, c’est condamner l’avenir.

La société malade

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Les coups de règle de Mme Neveux contre les petits pains de M. Neuhoff

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Image d'illustration

En 2020, Marine Turchi de Mediapart s’était tapé l’écoute de 96 heures (!) du « Masque et la Plume » pour faire la recension complète des propos sexistes tenus par les critiques de France inter. Tout le monde avait alors raillé la journaliste. Cette semaine, coup de théâtre: tout juste élu à l’Académie française, le terrible Éric Neuhoff ose qualifier la linguiste de gauche Julie Neveux de «petite instit bornée» dans la matinale de la radio publique. Et le respect ? comme disent les jeunes. C’est que cette dernière s’était précédemment émue de l’élection de M. Neuhoff dans les colonnes de Libération


Chère Madame Neveux, vous êtes parvenue à me rendre l’Académie française sympathique, alors qu’elle me laissait jusqu’à présent plutôt indifférent. Susciter contre elle la colère de tant de bonnes âmes la rend terriblement séduisante.

Neuhoff dans le pétrin

Vous avez gratifié Monsieur Neuhoff du terme de « boulanger » dans Libération[1], reprenant ses propres mots pour mieux le moquer[2]. Il vous a répondu à la radio en vous qualifiant de « petite instit bornée » [3]. Je regrette assez la violence de l’injure. La méchante estocade vous a permis de vous draper dans une posture de femme blessée. On vous répond un peu vertement, et c’est tout à la fois Simone de Beauvoir et Ferdinand de Saussure que l’on assassine. Mais passons. Après tout, nul ne peut juger de la sensibilité réelle des gens. Celui-là s’offensera d’un bonjour un peu sec quand une autre se portera la main sur le cœur, comme après un coup de revolver, d’être qualifiée d’institutrice bornée. Je vous vois déjà tomber au champ d’honneur de la recherche en linguistique. J’espère que la France s’en remettra…

A lire aussi: Wokisme: la télévision publique mène son enquête…

Le souci, avec les violons des cœurs outragés, est que l’on en oublierait presque votre propre mépris, Madame Neveux. Cette tribune où vous vous moquez de l’écriture de Monsieur Neuhoff et à laquelle il se contente, ma foi, de répondre. Vous citez quelques phrases de l’écrivain, avant de conclure: « On ne sait qui souffre le plus, du personnage ou du lecteur. » Quelle pertinence dans l’analyse ! Linguiste, mais aussi critique émérite: votre bonne fée vous a donc pourvue de tous les dons. Quoique, à la lecture de vos remarques, si je puis me permettre, on comprend que ce n’est pas tout à fait l’usage de l’accent circonflexe dans les œuvres complètes de Monsieur Neuhoff qui vous chagrine tant. Surtout quand vous affirmez à son sujet, sans mépris aucun, n’est-ce pas: « La teneur en pensée du cinéma flirte avec le néant, aplatie qu’elle est par le sexisme crasse. » Il me semble là, si vous me permettez, que votre sens esthétique apparaisse furieusement politique. De linguiste, vous devenez critique, et de critique vous voilà Saint.e-Just.e !

Mais c’est surtout la conclusion de votre tribune qui ne peut que m’enchanter : « C’est une chose que de faire du français son outil de travail, c’en est une autre que d’en faire un objet d’étude. La première est un art, la seconde une science. Que l’Académie française s’occupe donc de distribuer ses médailles littéraires, mais, par pitié, qu’elle cesse de vouloir réguler la langue et nos usages. »

Le bon usage

Ah ! vous n’allez pas jusqu’à écrire « bande de manants », mais cela s’entend quand même bien fort après le point final ! Et cela serait admirable si votre courroux ne répondait qu’à un souci d’intégrité de votre noble discipline. Hélas, il suffit de se renseigner un peu sur vos propres interventions publiques pour entrevoir que le jour est sans doute finalement un tantinet plus pur que le fond de votre cœur. Quand, par exemple, dans un entretien pour Brut sur le point médian, vous qualifiez Vaugelas de « personnage sexiste », je me demande à quel concept linguistique vous faites précisément référence ? Et c’est là où l’on comprend que de linguiste qui prétend observer des faits de langue, vous aspirez à devenir prescriptrice. Si vous voulez la fin de l’Académie française, c’est simplement parce que vous souhaitez la remplacer. Vous brûlez d’orienter à votre tour le bon usage.

A lire aussi; Eric Neuhoff: «J’espère aussi pouvoir défendre le roman contre l’autofiction, à l’Académie française!»

Sauf que Vaugelas, que vous réduisez à une sorte de masculiniste excité de la chose grammaticale, avait du moins pour modèle Malherbe. Il croyait, avec le cardinal Bembo, qu’il cite dans sa préface, à une perfection idéale du style. On peut certes critiquer ces positions. Elles ne sont pas les miennes et je crois plus volontiers à la variété des grandes œuvres, avec Pic de la Mirandole. Mais c’était du moins une époque où la plupart des écrivains n’avaient pas déserté tout imaginaire linguistique. Leur écriture portait en elle une certaine idée de la langue. Et vous, Madame Neveux, de quel imaginaire vous réclamez-vous exactement pour prétendre influencer la pratique à travers une relecture politiquement orientée de l’histoire littéraire et grammaticale du français ?

Pour conclure, quiconque n’est pas de mauvaise foi comprend sans peine ce que Monsieur Neuhoff entendait par cette expression de « petite instit bornée ». Non le mépris des femmes universitaires en général, mais simplement votre propre mépris de classe. Celui qui vous fait regarder de haut toute personne qui ne détient pas votre savoir. Il vous fait vous adresser à vos interlocuteurs comme à des enfants à qui on doit faire la leçon.

Cette expression souligne aussi parfaitement votre volonté de légiférer la langue, mais sans le dire, cachée derrière votre Science, au nom d’une norme qui répond non à un idéal de beauté linguistique ou littéraire, mais au seul fantasme politique de moraliser la grammaire pour mieux moraliser les mœurs. Pour ma part, je défendrai toujours ceux qui rêvent la langue au nom de l’art, face à ceux qui la manipulent au nom de la politique.

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[1] https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/eric-neuhoff-un-ecrivain-boulanger-dans-le-petrin-de-lacademie-francaise-20251109_ZB7KNMET5RHMPIQXB2SIWZB244

[2] «La langue française, c’est la farine du boulanger pour les écrivains. C’est à eux de s’en occuper. »

[3] https://www.youtube.com/watch?v=ab5pV-ITrBs

«J’espère aussi pouvoir défendre le roman contre l’autofiction, à l’Académie française!»

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Eric Neuhoff photographié en 2025 © Denis Felix

Éric Neuhoff, élu à l’Académie française


Âge de 69 ans, auteur notamment de La petite Française (1997) et Un bien fou (2001), il siègera au fauteuil de Gabriel de Broglie, essayiste et haut fonctionnaire décédé en janvier dernier. Florian Zeller, 46 ans, dramaturge, a également été élu ; il siègera à la place de l’historienne Hélène Carrère d’Encausse, décédée en août 2023. Un coup de jeune pour l’Académie ? C’est indéniable. Éric Neuhoff a bien voulu répondre à nos questions.


Contre l’écriture inclusive

Causeur. Que ressentez-vous après avoir été élu à l’Académie française ?

Éric Neuhoff. Surprise et fierté. Première phrase qui me soit venue à l’esprit : recomptez les bulletins !

Vous avez été élu au fauteuil de Gabriel de Broglie, essayiste et haut fonctionnaire ; le connaissiez-vous et que pensez-vous de lui ?

Je ne le connaissais pas personnellement, mais pour préparer mon discours je vais passer les prochains mois en sa compagnie et je vais devenir incollable sur le sujet.

Comme lui, défendrez-vous avec acharnement l’utilisation de la langue française et non pas de l’américain (il appréciait cependant la langue anglaise, ce qui doit vous plaire, vous, l’amoureux des Beatles !) ?

La langue française est une cour de récréation et un terrain de sport. Elle a ses plaisirs et ses lois. Je suis optimiste et je pense qu’elle est assez grande pour se défendre toute seule, grâce à sa beauté. Cependant, je me battrai de toute ma plume contre l’écriture inclusive qui me semble être un non-sens et une initiative aberrante qui complique et enlaidit ce qu’elle touche. Un dernier détail : je suis plus Rolling Stones que Beatles. Nobody’s perfect (en français dans le texte).

A lire aussi: Patrice Jean: «Je ne défends jamais d’idées réactionnaires»

En dehors de la défense de la langue française, quels seront vos autres chevaux de bataille ?

J’espère pouvoir défendre le roman contre l’autofiction qui me semble une des plaies contemporaines.

Comment s’est passée votre élection ? Postule-t-on à l’Académie française ? Ou est-on plus simplement proposé par des académiciens ?

Des amis – surtout un – m’ont sollicité. Il faut effectivement se présenter, envoyer une trentaine de lettres personnalisées, rendre quelques visites. Effectivement, on ne risque pas d’être élu si on ne s’est pas présenté.

Florian Zeller a été élu en même temps que vous. Ne pensez-vous pas que l’Académie, avec vos deux élections, prend “un coup de jeune” ?

Oui, en ce qui concerne Florian. De mon côté, la jeunesse me semble un souvenir, même si j’ai l’impression de ne pas avoir beaucoup changé.

Vous aimez donc le rock. Pourriez-vous nous citer quelques groupes qui vous ont marqué ?

Les Stones, donc. On ne se refait pas, même si j’ai cessé d’aller les voir en concert. Patti Smith avant qu’elle ne se prenne pour la réincarnation de Rimbaud. Leonard Cohen même s’il ne s’agit pas de rock. Aujourd’hui, je leur préfère Sinatra.

Vos écrivains préférés ?

Déon, Fitzgerald, Hemingway, James Salter, Drieu La Rochelle, Pascal Jardin, Geneviève Dormann. Il y en a trop pour les citer tous.

Un nouveau livre en préparation ?

Deux: un roman, Cahors sous la pluie et un livre sur le cinéma et les années 70.

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Wokisme: la télévision publique mène son enquête…

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Le journaliste Tristan Waleckx © Nathalie Guyon / France TV

Promis: avec son émission consacrée à la prétendue «dictature des bien-pensants», elle n’avait aucune idée en tête!


Le 5 novembre, le journaliste Tristan Waleckx se promettait de tout nous dire sur le wokisme dans l’émission hebdomadaire Complément d’enquête qu’il anime sur France 2. Plusieurs questions le tarabustent : « le “wokisme” est-il réellement un danger pour notre pays ? » ; les adversaires du wokisme ont-ils raison de parler de « dictature des bien-pensants ? » ; le wokisme « serait-il un “nouvel obscurantisme”, comme le qualifient certains hommes politiques ? » Ces questions trouveront rapidement leurs réponses. Dès les premières minutes de l’émission, le chemin est tout tracé et le téléspectateur comprend immédiatement ce que Tristan Waleckx va tenter de lui faire gober.

Thomas Jolly, l’audacieux

Cela commence avec… la cérémonie des JO de Paris, cet « événement qui a rendu fier tout un pays »grâce au « parti pris audacieux de son directeur artistique », Thomas Jolly. Celui-ci ne comprend pas les reproches qui lui ont été adressés. Il s’interroge : « Inclure l’ensemble des Français et Françaises, dans leur diversité, dans une cérémonie qui s’adresse à chacun et chacune d’entre eux et d’entre elles, qui a créé de l’unité, de la fierté nationale, c’est woke ? » M. Jolly ne se rend visiblement pas compte que cette phrase est un pur produit de l’idéologie qui a conçu, entre autres difformités, le verbiage « inclusif ». Sa cérémonie était imprégnée jusqu’au trognon de la même idéologie. Sans le savoir, Tristan Waleckx vend d’ailleurs la mèche lorsqu’il évoque l’abondante présence de « représentants queer », entre autres Nicky Doll, « la plus célèbre drag-queen française, animatrice d’une émission sur France Télévisions, une figure du mouvement LGBT qui défend les droits des minorités sexuelles ». Cette cérémonie n’était effectivement pas destinée à « l’ensemble des Français et Françaises » mais aux différentes « communautés » supposément discriminées qui furent majoritairement représentées dans ce lamentable spectacle.

Au député Julien Odoul qui confie n’avoir pas particulièrement apprécié la prestation d’Aya Nakamura avec la Garde républicaine, le journaliste rétorque : « Elle est quand même la chanteuse francophone la plus écoutée au monde. » Rectificatif : si Aya Nakamura est très écoutée dans le monde entier ce n’est sûrement pas parce qu’elle est une « chanteuse francophone » mais plutôt parce qu’elle est une chanteuse charabiaphone qui baragouine, sur des musiques électro-pop standardisées, des textes incompréhensibles, un salmigondis farci d’argot malien, de verlan français, anglais ou espagnol, d’expressions arabo-africaines à la mode dans les « quartiers », etc. Il y a quelques années, le député socialo-macroniste Rémy Rebeyrotte s’était extasié devant ce galimatias et voyait en Aya Nakamura une ambassadrice de la langue française parce que, disait-il, « elle est en train de porter au niveau international de nouvelles expressions et évolutions de la langue française ». On ne parlait pas encore d’interdire l’alcool à la buvette de l’Assemblée nationale ; pourtant…

Militants identitaires et wokisme pur

Bien entendu, les personnes qui ont critiqué cette cérémonie ne peuvent être que des « militants identitaires » de la pire espèce, des personnalités douteuses, intolérantes, homophobes et racistes. D’ailleurs, insiste le journaliste, un rapport récent[1] a mis en évidence les liens entre ces individus et différentes associations, dont une, « considérée comme très conservatrice », est financée par « le milliardaire catholique Pierre-Édouard Stérin ». L’initiateur de ce rapport, Neil Datta, est le directeur exécutif du Forum parlementaire européen pour les droits sexuels et reproductifs, souligne le reportage qui omet toutefois de préciser, comme c’est bizarre, que ce Forum basé à Bruxelles est financé entre autres par la Commission européenne, la Gates Foundation et… l’Open Society Foundation de George Soros. Interviewé par France TV, Neil Datta livre une réflexion étonnante : « Auparavant, ils [les vilains détracteurs du wokisme] utilisaient “l’idéologie du genre”, ils s’en sont servis et ils ont bien utilisé cette notion d’idéologie du genre. Ça ne sert plus à grand-chose maintenant, les gens s’en lassent, donc tout l’ensemble de cette extrême droite a inventé cette notion de woke qui ne veut rien dire mais, en même temps, on comprend ce que cela veut dire. » Soit Neil Datta est un imbécile qui n’a strictement rien compris au wokisme, soit il fait semblant d’être un imbécile n’ayant strictement rien compris au wokisme pour noyer le poisson – dans ce cas, il fait ça très bien. Quoi qu’il en soit, nous lui recommandons de lire l’essai du philosophe Jean-François Braunstein La Religion woke, qui explique justement que « la théorie du genre est le cœur de la religion woke, la partie la plus originale mais aussi, en quelque sorte, le “produit d’appel”, par son absurdité décomplexée, et aussi par son mystère quasi théologique ». Pour plus d’informations, il pourra également compulser l’ouvrage intitulé Face à l’obscurantisme woke puisque celui-ci a pu paraître malgré la demande acharnée de censure du Grand Inquisiteur du Collège de France Patrick Boucheron qui fut aussi, il n’y a pas de hasard, l’un des co-scénaristes de la cérémonie des JO.

A lire aussi, Dominique Labarrière: Najat Vallaud-Belkacem, la femme qui valait trois milliards

Le sujet de l’islamo-wokisme est ensuite abordé. « Que s’est-il passé à Lyon 2 ? Cette faculté est-elle tombée aux mains des wokes ? », demande Tristan Waleckx en relatant l’affaire Balanche, du nom de cet universitaire qui, parce qu’il avait approuvé l’interdiction d’une soirée consacrée à la rupture du jeûne du ramadan au sein de l’université, a été agressé pendant son cours par des individus masqués le traitant de sioniste et de raciste. Sur France TV, on se demande quand même, l’air de rien, si l’enseignant ne l’aurait pas un peu cherché : deux jours avant cette agression, Fabrice Balanche était effet interviewé sur… CNews, où il dénonçait l’islamo-gauchisme qui gangrène l’université française en général et Lyon 2 en particulier. Les islamo-gauchistes qui l’ont agressé ont posté leur méfait sur les réseaux sociaux. La vidéo, devenue « virale », a surtout été « reprise par des comptes comme celui du syndicat étudiant de droite, l’UNI, et ceux des sites d’extrême droite, Frontières et Boulevard Voltaire », tient à souligner, avec des frissons dans la voix, le journaliste. L’enquête progresse : il semblerait bien que cette affaire ait été montée en épingle par la droite nationale la plus rigide.

L’universitaire Xavier-Laurent Salvador, signataire d’une tribune dénonçant la mouvance islamo-wokiste dans les milieux universitaires et co-directeur de Face à l’obscurantisme woke, est interviewé. Il cite différents intitulés baroques ou nébuleux glanés dans les dizaines et dizaines de publications, de colloques, d’articles universitaires sur le genre, le queer, le racialisme, le décolonialisme, etc., qu’il a recensés en France pour le seul mois de février 2023. Pour contrecarrer ce témoignage, Complément d’enquête a mené « sa propre enquête » et, pour ce faire, s’est tourné vers Étienne Ollion, sociologue au CNRS. D’après celui-ci, Xavier-Laurent Salvador a utilisé une « logique de l’anecdote » au détriment de la « logique scientifique ». Heureusement, Étienne Ollion et son équipe ont lancé une « vaste étude » portant sur l’évolution des sciences sociales depuis 2001 et sont parvenus au résultat suivant : il n’y a guère plus de travaux sur le « genre » ou le « concept de race » en 2022 qu’en 2001. Curieux ! Pour comprendre ce tour de passe-passe, il suffit de lire Ce que le militantisme fait à la recherche (Tract Gallimard n° 29), ouvrage dans lequel la sociologue Nathalie Heinich rappelle un article du Monde citant l’étude d’un chercheur se faisant fort de démontrer, lui aussi, « statistiques et graphiques à l’appui », le très faible pourcentage depuis 2011 de certains termes – « décolonial », « intersectionnel », « racisé », « islamo-gauchisme » – dans les quatre moteurs de recherche universitaire les plus utilisés. Résultat stupéfiant : 0,01 % ! Mais… « il suffit d’ajouter à la liste quelques termes très fréquents dans ce type de travaux (tels que “genre”, “féminin”, “islamophobie”, etc.) et de prendre en compte d’autres sources (annonces de colloques, de journées d’étude, titres de séminaires, ateliers, etc.) pour arriver à un tout autre résultat: ces termes constituent plus de la moitié du corpus ainsi élargi », écrit Nathalie Heinich. Par ailleurs, ironise-t-elle, comment prendre au sérieux certains « experts » du CNRS, en particulier ceux qui défendirent la « géographe du genre » Rachele Borghi, victime, selon eux, « “d’attaques indignes”, malgré “une rigueur et une éthique scientifiques” ne faisant aucun doute pour “celles et ceux qui, depuis le début de sa carrière, ont réalisé des évaluations véritablement scientifiques de ses travaux” ». Et Nathalie Heinich de se demander qui a bien pu expertiser, sans éclater de rire, l’article « scientifique » de Mme Borghi intitulé « De l’espace genré à l’espace queerisé », dans lequel la géographe affirme d’abord que « l’espace public est conçu, géré et modelé sur la base d’une conception dualiste rigide: homme-femme, licite-illicite, homosexuel-hétérosexuel », et conclut ensuite que « la géographie de la sexualité, définie comme branche de la géographie, peut contribuer de manière importante au dévoilement des normes et des structures de pouvoir qui oppriment et excluent de l’espace public les dissident.e.s sexue.le.s ». Présupposé délirant, remise en cause pseudo-foucaldienne des « normes et des structures de pouvoir », militantisme néo-féministe et pro-LGBT, écriture inclusive – bref, du wokisme à l’état pur…

Jean-Michel Blanquer, le sage

À la fin de l’émission, Tristan Waleckx reçoit Jean-Michel Blanquer. Celui-ci est présenté comme « l’un des tout premiers à avoir utilisé en France le mot et le concept de wokisme ». Nous devons rectifier cette assertion : s’il est vrai que, depuis qu’il a quitté le ministère de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer n’a pas manqué de dénoncer les dérives wokes, de nombreux universitaires, journalistes et représentants politiques l’ont devancé dans le combat contre le wokisme. Par ailleurs, la circulaire Blanquer de septembre 2021 – « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » – contredit l’idée que le ministre ait été parmi les premiers à s’opposer à l’idéologie woke, en particulier à la théorie du genre. Cette circulaire entérinait en effet les revendications d’associations transgenres: possibilité pour l’élève de se déclarer du sexe de son choix, de changer de prénom, de bénéficier d’aménagements particuliers pour l’utilisation des toilettes et des vestiaires, de jouir d’un traitement individualisé et, bien sûr, d’une bienveillance sans limite de la part du « personnel éducatif » et des élèves auxquels devaient être proposées des sessions de sensibilisation (c’est-à-dire de rééducation) sur le sujet[2]. Il n’est pas impossible que cette circulaire ait été concoctée dans le dos du ministre, sous la férule de hauts fonctionnaires indéboulonnables suivant à la lettre l’agenda européiste de rééducation de la population, tant en ce qui concerne les questions de sexualité et de genre qu’en ce qui concerne les questions d’écologie ou d’éducation aux médias. Il n’empêche: la signature de M. Blanquer au bas de ce document consternant restera comme l’illustration de sa soumission à l’idéologie transgenre au moment où il aurait dû, au contraire, faire montre de conviction et d’autorité et renvoyer dans leurs cordes les idéologues de la rue de Grenelle.

A lire aussi, du même auteur: Quand Jean-Noël Barrot loue l’immigration africaine

Tristan Waleckx a, depuis le début de son émission, une idée en tête. Il pose par conséquent à Jean-Michel Blanquer une question qui n’est pas une question mais un sous-entendu courant chez les journalistes de l’audiovisuel public : « Le fait d’avoir popularisé le mot woke, ça a permis à l’extrême droite d’imposer un concept dans le débat public ? » Quelques minutes plus tard, après avoir montré un graphique où il apparaît que l’expression « islamo-gauchisme » a été entendue dix à vingt fois plus « sur CNews, la chaîne de Vincent Bolloré » que sur les autres chaînes d’info, le journaliste, toujours aussi lourdingue, interroge faussement l’ex-ministre : « Ça veut dire quelque chose ? » Et lorsque ce dernier affirme que, CNews ou pas, « l’islamo-gauchisme existe », le journaliste sort ce qu’il croit être sa carte maîtresse :« C’est un concept qui est quand même contesté par le CNRS qui est un institut sérieux (sic – voir ci-dessus) expliquant que “l’islamo-gauchisme est un slogan politique ne correspondant à aucune réalité scientifique” » et par des présidents d’universités déclarant que « l’islamo-gauchisme est une pseudo-notion qu’il conviendrait de laisser, sinon aux animateurs de CNews, plus largement à l’extrême droite ». L’argumentation tourne court. Au passage, on remarquera qu’en ce moment, qu’il s’agisse du wokisme, de l’islamo-gauchisme ou de l’écologisme, les gourous de ces nouvelles religions n’ont qu’un mot à la bouche, le mot « science », mot-amulette, mot-talisman, mot magique ayant pour but d’empêcher justement toute démarche scientifique, laquelle ne peut se passer de réflexion critique et de controverses.

Nul besoin, je crois, de préciser l’objectif de cette émission. Le procédé pour y parvenir, grossier, est celui qu’utilisent régulièrement les journalistes bien-pensants du service public. Ce « Complément d’enquête » corrobore les déclarations de Delphine Ernotte, la présidente de France TV ayant avoué que l’audiovisuel public n’était pas là pour montrer la France telle qu’elle est mais telle que la caste médiatico-progressiste aimerait qu’elle soit. De ce côté-là, on peut dire que Tristan Waleckx a parfaitement rempli sa mission…

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[1] La prochaine vague : comment l’extrémisme religieux regagne le pouvoir. L’extrémisme religieux en question est bien entendu l’extrémisme… catholique qui, comme chacun sait, ravage l’Europe en ce moment.

[2] Pour plus d’informations sur cette position catastrophique du ministre Jean-Michel Blanquer vis-à-vis des revendications émanant de différents organes politiques et associatifs promouvant l’idéologie sur le genre, je renvoie à mon article du 16 octobre 2021 : https://www.causeur.fr/vallaud-belkacem-blanquer-meme-combat-215169

Macron debout devant Poutine et couché devant Tebboune

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© SYSPEO/SIPA

La grâce de Boualem Sansal ne solde pas notre lourd contentieux avec l’Algérie


C’est hier soir que l’avion officiel affrété par l’Allemagne a atterri à Berlin. À son bord, Boualem Sansal, enfin libéré de sa geôle d’Alger où il était emprisonné depuis le 16 novembre 2024 pour de simples faits d’opinion. Suite à l’intervention du président de la République fédérale Frank-Walter Steinmeier, l’écrivain dissident, âgé de 81 ans, a été gracié par le président algérien Abdelmadjid Tebboune pour motifs « humanitaires ».

Sansal, qui souffre d’un cancer, a été dès son arrivée admis dans un hôpital berlinois, où il pourra bénéficier de soins dignes de ce nom. Qu’il soit permis à l’auteur des lignes d’en pleurer de joie. L’écrivain est un ami de Causeur. Et le système de santé algérien, auquel il avait accès depuis son arrestation, est calamiteux. La preuve : les présidents de ce pays autoritaire et corrompu – et pourtant si riche de son pétrole et de son gaz – préfèrent systématiquement consulter des médecins en Europe quand ils souffrent de maladies graves.

Emmanuel Macron peut à bon droit se féliciter de la « mission de bons offices » effectuée par son homologue allemand, qui lui a permis d’obtenir l’élargissement de Sansal sans avoir à principalement remercier Tebboune, dont la politique reste de toute évidence résolument hostile à la France.

A lire aussi: Compromissions cairotes

Curieusement pourtant, l’Élysée a fait savoir hier que les conditions étaient à présent réunies pour « renouer le dialogue »avec le régime algérien. Alors que celui-ci continue de refuser ses citoyens expulsés de France, maintient toujours en détention le journaliste Christophe Gleizes et est soupçonné par la justice d’être impliqué dans l’enlèvement d’Amir DZ, un opposant algérien réfugié dans notre pays…

« Le bras de fer ne fonctionne pas, c’est clair », a même osé glisser un proche du président français, pour suggérer que le calvaire de Sansal aurait été abrégé plus tôt si Bruno Retailleau n’avait pas fait preuve de détermination vis-à-vis d’Alger dans le dossier des OQTF quand il était Place Beauvau et si le RN n’avait pas fait voter à l’Assemblée nationale le 30 octobre une résolution visant à dénoncer l’accord franco-algérien de 1968. Syllogisme typiquement macronien ! La stratégie de lèche-babouches de l’Élysée et du quai d’Orsay n’a pas mieux fonctionné que la fermeté affichée du patron des LR.

Il n’est pas question ici de discuter de la sincérité et de la résolution du chef de l’État dans l’affaire Sansal, ni davantage dans le contentieux du Sahara occidental (dans lequel il a pris le parti du Maroc l’année dernière). Mais simplement de souligner son hypocrisie, aussi humiliante que contre-productive. Macron feint de ne pas voir que, de toute manière, les Algériens ont décidé de punir la France. Sa comédie ne fait que renforcer leur mépris. « On n’obtient rien en se fâchant avec ceux qu’on sollicite », a indiqué hier un conseiller de l’Élysée. On n’obtient rien non plus en leur lâchant tout.

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Ils n’auront pas notre haine?

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Les responsables politiques réunis autour du président Macron devant le Stade de France le 13 novembre 2025. 10 ans plus tôt, trois islamistes se sont fait exploser autour du stade, faisant une victime © Stephane Lemouton/SIPA

13-Novembre. Les commémorations et les nombreuses émissions proposées dans les médias entendaient à tout prix mettre de côté les «mauvais» sentiments, observe notre contributrice. Mais, on ne vainc pas l’islamisme conquérant, pas plus qu’on ne rend justice, autour d’un «groupe de parole».


Cette semaine, C ce soir a logiquement consacré l’une de ses émissions quotidiennes aux attentats du 13 novembre 2015. Sur le plateau : l’ancien président devenu député socialiste François Hollande, Gaëlle, victime du Bataclan défigurée à vie, Aurélie Silvestre, dont le compagnon et père de ses deux enfants a été assassiné, l’historien Denis Peschanski, codirecteur du Programme 13-Novembre, et Jean-Xavier Delestrade, réalisateur de la série Les Vivants, diffusée cette semaine sur France 2.

Islamiste, ce mot si difficile à prononcer

Les victimes sont mises en avant, à juste titre : on parle de leur souffrance, de celle de leurs proches, des blessures visibles et de celles qui ne le sont pas, de la reconstruction, de la transmission du souvenir aux jeunes générations.

Mais les auteurs, eux, disparaissent du récit. François Hollande prononce bien le mot « islamiste », prudemment, deux ou trois fois, mais personne ne s’y arrête. Et lorsqu’il cite les attaques qui ont précédé le 13-Novembre (Merah, Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher), il ne précise même plus la nature de ce terrorisme. Comme si tout cela relevait désormais d’une malédiction sans visage, d’un mal abstrait, dépolitisé.

L’émission préfère explorer le thème de la guérison, du dialogue, et la fameuse « justice restaurative » : cette approche de la réparation plutôt que de la punition, introduite par la loi Taubira du 15 août 2014 pour les délits de droit commun. Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos djihadistes du 13 novembre, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, a fait savoir par la voix de son avocate qu’il était partant. Oui, partant ! Dans une « démarche restaurative », il souhaite rencontrer certaines victimes.

On cauchemarde. Celui qui, durant son procès, revendiquait son statut de « combattant de l’État islamique », invoquait Allah et le prophète, continue aujourd’hui à consulter en prison des contenus de propagande islamiste sur une clé USB. Et le voilà qui veut participer à un programme de justice restaurative. Restaurer quoi, au juste ? Le lien social ? La confiance ? La paix civile ? Il n’en a probablement rien à faire. Peut-être cherche-t-il simplement à profiter des failles du droit pour continuer à hanter ses victimes sous un vernis humaniste.

Bonjour le groupe de parole !

Comme l’a justement rappelé Riss, directeur de Charlie Hebdo, en réaction à la demande d’Abdeslam : on ne « restaure » pas le lien social avec ceux qui ont voulu le détruire. La justice n’est pas un groupe de parole. Pendant l’émission, la question de la compatibilité entre justice restaurative et terrorisme n’a pas été posée. Trop dérangeante, sans doute.

On préfère s’émouvoir du témoignage de Gaëlle, rescapée du Bataclan défigurée à vie, qui a choisi de rencontrer un terroriste en prison. Cette même victime avait déjà été mise en avant dans Envoyé Spécial par Élise Lucet, une journaliste toujours prompte à transformer l’émotion en leçons de morale. Gaëlle raconte qu’elle est « dénuée de haine », que la colère la paralyse. C’est bien son droit. Et nos médias adorent ce mantra devenu injonction : « Vous n’aurez pas ma haine » – comme l’écrivait Antoine Leiris, qui avait perdu son épouse au Bataclan, auteur du livre éponyme.

C’est que la haine, aujourd’hui, est devenue un mot tabou, presque indécent, un mot des plus sales, un mot quasiment inaudible, presque barbare. Comme si haïr ceux qui veulent notre mort faisait de nous des barbares, ou pire : des électeurs du Rassemblement national. Seule compte l’empathie bien légitime avec les victimes et leurs proches, mais la colère elle est exclue, perçue comme une anomalie. 

Pourtant, peut-il vraiment y avoir une joue tendue, une rédemption possible, avec ceux qui ont voulu exterminer des innocents au nom d’Allah, avec ceux qui ont répondu à l’appel de Daesh de cibler « les méchants et sales Français » ? Ce choix médiatique de se focaliser sur la souffrance et la mémoire n’est pas anodin. Il évite soigneusement de poser la question politique : quel bilan dix ans après ? Que n’avons-nous pas voulu voir ?

Le laxisme migratoire continue

Lors du procès des attentats, François Hollande lui-même a reconnu qu’en 2015, le pouvoir savait que la filière d’immigration syrienne servait de porte d’entrée à des terroristes. Il savait, et il n’a rien fait ? Dix ans plus tard, les frontières sont restées poreuses, et la menace islamiste, elle, n’a pas reculé.

En octobre 2025, trois jeunes femmes radicalisées ont été écrouées à Paris pour préparation d’attentat. Le sixième projet islamiste déjoué depuis le début de l’année. Le discours djihadiste se diffuse toujours sur les réseaux sociaux, aux abords de certaines mosquées, et dans de nombreuses associations sportives à visée séparatiste. Et dans les écoles, on n’ose même plus parler de la hausse des atteintes à la laïcité.

Alors oui, on a le droit de haïr les terroristes islamistes. Les haïr, c’est affirmer qu’il existe des choses qui ne se réparent pas, ne se comprennent pas, ne se pardonnent pas. Les haïr, c’est rappeler que la justice n’est pas une thérapie collective, mais une frontière morale. Et qu’à force de confondre empathie et faiblesse, nous finirons peut-être par ne plus savoir ce que nous devons protéger.

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Djihadisme: les femmes, une nouvelle donne?

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Salah Abdeslam au tribunal à Bruxelles, 5 avril 2023 © Shutterstock/SIPA

Quelques jours avant le dixième anniversaire des attentats du 13 novembre, les Français apprenaient, médusés, que le dernier terroriste survivant Salah Abdeslam disposait d’un ordinateur en prison, qu’il s’était marié par téléphone avec une certaine Maëva B., elle-même radicalisée, que celle-ci avait pu lui faire parvenir de la propagande djihadiste sur une clé USB et que, désormais séparée de lui, elle nourrissait son propre projet d’attentat islamiste. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, s’est dit sidéré.


La première affaire remonte au 17 janvier 2025. Salah Abdeslam, détenu dans la prison de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, est accusé de « recel d’objet illicite » via une « potentielle clé USB » ayant permis, à partir de son ordinateur, des connexions à des fichiers ayant trait à des organisations comme l’État islamique ou Al-Qaïda. L’homme le plus dangereux de France est transféré dans un des quartiers de Haute Sécurité que vient de créer Gérald Darmanin. Près de dix mois plus tard, le 4 novembre 2025, le PNAT (Parquet national antiterroriste) entend à deux reprises le détenu, dans le cadre d’une garde à vue, à propos de « quatre » clés, connectées, entre décembre 2024 et janvier 2025, qui n’ont pas été retrouvées. L’amie (et ancienne « épouse ») de Salah Abdeslam qui le visitait au parloir, interrogée et mise en garde à vue, reconnaît avoir chargé de propagande islamiste une clé USB qu’elle a « fait remettre » à Salah Abdeslam au cours d’un parloir. C’est alors qu’on a aussi découvert une affaire dans l’affaire: celle de la menace imminente d’un attentat.

Pas de menace particulière

Au domicile de Maëva B., les enquêteurs de la Direction nationale de la police judiciaire, et la DGSI, enquêtant sur ses outils numériques, décèlent un projet d’action violente terroriste. Projet qui implique également un homme de 20 ans radicalisé, habitant en Isère, époux religieux de Maëva, avec velléités de rejoindre une organisation terroriste, ainsi qu’une adolescente de 17 ans résidant dans l’Hérault. Ce risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger est-il concomitant avec les commémorations des dix ans des attentats du Stade de France, des terrasses et du Bataclan ? « Pas de menace particulière, a estimé la chef de la DGSI, pour le 13 novembre ».

Et Salah Abdeslam, dans tout ça ? Son avocate et le PNAT notent qu’il n’y a pas d’éléments le reliant à ce projet d’attentat. Mais la chef de la DGSI précise bien que le terroriste « demeure radicalisé et convaincu de l’idéologie mortifère qu’il a suivi pendant des années ». Le PNAT a requis sa mise en examen et celle de son ex-compagne « pour recel d’objet illicite remis à détenu (la clé USB), pour complicité et association de malfaiteurs délictuelle de droit commun ». Maeva B. est mise également en garde à vue, d’une durée exceptionnelle de 96 heures, ainsi que deux autres individus. Si Salam Abdeslam ne semble pas impliqué dans le projet d’attentat, reste à savoir comment et pourquoi cette propagande islamiste est arrivée dans son ordinateur.

Sidération

Ces annonces ont plongé les Français dans la sidération. Comment tout cela est-il possible ? On posera ici des questions sans développer les réponses. Comment Salah Abdelsam pouvait-il être en possession d’un ordinateur depuis 2024 ? Réponse: l’obtention d’un ordinateur (avec accès à internet interdit) est rendue légale, depuis 2009, pour un détenu quand il en fait la demande. Les droits ? La CEDH qui nous gouverne contraint les États à bien traiter les détenus. Étant stricto sensu la privation de la liberté, la prison, est, à elle seule, pense la Cour, une sanction suffisante. C’est ainsi que les détenus doivent jouir de tous les droits dont celui de « se marier »  fût-ce par téléphone. Un criminel de grande envergure a même le droit d’entamer une « démarche de justice restaurative » comme vient de l’annoncer l’avocate d’Abdeslam exprimant le désir de son client « d’entrer en contact » avec les parties civiles.

Apparemment, les deux affaires – la clé USB et le projet d’attentat– sont distinctes. Salah Abdelsam n’est pas concerné ? Pas encore ? C’est là que je me suis souvenue du livre de Hugo Micheron Le jihadisme français et sa partie sur les prisons. On le sait, le jihad se poursuit en prison qui est, par excellence, un lieu de vie idéal, convivial et incubateur de la radicalisation. Salah Abdeslam allait-il avoir un rôle à jouer par l’influence qu’il pourrait avoir ? On sait comme les détenus islamistes acquièrent l’auréole du martyre en prison.

Drôle d’atmosphère

À la question que l’on se posait, il y a peu encore : le jihad est-il toujours dans une séquence « à marée basse de reconfiguration à bas bruit » ? on connaît la réponse. On dit « jihadisme d’atmosphère » pour signifier que c’est la société tout entière qui est concernée par la violence des actes et un « entrisme » au quotidien, en tout et partout, d’une rare intensité. Si le fameux colloque « sur la Palestine » du Collège de France a été annulé, et si la dame du perchoir proteste de sa fermeté à venir, les questions demeurent: comment le Collège de France en est-il arrivé là ? Comment des fillettes voilées sont-elles « entrées » récemment – quelle ironie !- » à l’Assemblée nationale pour assister à une séance ? Les élections à venir nous préparent de belles surprises. L’affaire présente montre exemplairement la montée en puissance de Daesh ou Al-Qaïda.

Faut-il voir, enfin, une nouveauté, comme certains le pensent, dans ce nouveau jihad, avec la présence des femmes ? À la différence d’Al-Qaïda, Daesh, « califat genré », accueillait, en son sein, les femmes, « génitrices des lionceaux à venir ». D’où la déstabilisation créée par un commando de femmes, à Paris, le 4 septembre 2016, près de Notre-Dame. Il y a peu, trois Françaises, âgées de 18, 19 et 21 ans, ont été écrouées par le PNAT, pour préparation d’un attentat terroriste dans des bars parisiens ou salles de concerts. Les femmes, disent les experts, sont plus tenaces et plus fiables que les hommes dans la lutte jihadiste. En attendant nous sommes prévenus par les patrons des Renseignements de la gravité de la menace jihadiste sur notre sol. La clé de Salah Abdeslam n’a pas été retrouvée.

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Dix ans après le 13-Novembre, la menace endogène

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Le Bataclan à Paris photographié le 12 novembre 2025 © HENRI WELSCHINGER/OLA NEW/SIPA

Dix ans après les attentats sanglants du Bataclan, du Stade de France et des terrasses de cafés parisiens, des experts avancent que la menace extérieure s’est atténuée: les commandements centraux de l’État islamique et d’Al-Qaida ont été considérablement affaiblis. En revanche, l’ennemi intérieur apparaît toujours aussi redoutable et imprévisible. Surtout, depuis 10 ans, une autre insécurité a explosé, observe notre chroniqueur – l’insécurité culturelle.


L’ennemi est là. Parmi nous. Dix ans après les attentats islamistes du 13 novembre 2015, qui ciblèrent notamment des consommateurs sur des terrasses de bistrots parisiens et le public d’un concert au Bataclan, l’islam djihadiste s’est fondu dans la société française qu’il déteste.

Menace endogène

Loin d’avoir été traqué, comme il a pu l’être par Israël et certains pays musulmans, il s’est installé dans les recoins de la nouvelle société « diversitaire ». Céline Berthon, directrice de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), le rappelait lundi sur RTL : la menace islamiste est désormais « endogène » et mobilise auprès d’une jeunesse âgée de 17 à 22 ans. Si l’État islamique semble avoir perdu de sa capacité à projeter des offensives extérieures, ses petits bras armés sont prêts localement à ubériser la guerre sainte, dans des initiatives individuelles difficilement décelables. Or, abordant cette menace, Catherine Vautrin, ministre des Armées, a curieusement estimé, mardi sur Europe 1, comme si elle découvrait le sujet : « Nous devons travailler sur ce sujet ». Cette somnolence de l’Etat mollasson face à l’islam radical fait du pouvoir l’allié benêt d’une idéologie totalitaire qui ne respecte que la force. En 2015, Jean-Yves Le Drian, à ce même ministère des Armées, avait déclaré après les tueries parisiennes : « Je ne parlerai jamais d’ennemi intérieur ». Il craignait d’alimenter une possible guerre civile. Mais ces postures morales sont des lâchetés. Dix ans après, il y a bel et bien un ennemi intérieur. Une 5e colonne a même trouvé de fanatiques collaborateurs auprès d’une extrême gauche qui a vendu son âme pour accompagner électoralement ce qu’elle croit être un islam révolutionnaire.

A lire aussi: Des Talibans en Maine-et-Loire?

Contre l’ennemi intérieur, l’exemple de Ceux de 14

Rien n’est plus contre-productif, pour éviter la guerre intestine, que de fermer les yeux sur les fractures nées d’une société ouverte à l’immigration de peuplement. Un sondage Ifop de 2020 montrait déjà que 74% des jeunes musulmans français (moins de 25 ans) se réclamaient de l’islam plutôt que des valeurs de la République. Les dirigeants, à commencer par le chef de l’État, savent ces échecs.

Leur choix de perpétuer une invasion extra-européenne les rend complices d’une colonisation agressive. Cette situation place de plus en plus de Français en insécurité culturelle, voire en légitime défense. D’autant que la résistance à l’envahisseur, qui dicta le comportement de nos aïeux durant la Grande Guerre, est inenvisageable pour les actuelles élites. Or le courage des Poilus reste un exemple. Il ne doit pas se contenter, comme avant-hier, du rituel républicain du 11-Novembre. Mes deux grands-pères étaient au front. L’un, Jean Rioufol, mobilisé à ses 18 ans, est mort peu après la guerre, à 28 ans, les poumons brûlés par les gaz allemands, laissant une veuve et deux jeunes orphelins. J’ai eu la chance en revanche de connaître mon grand-père maternel, le colonel Mario Ayme, à l’époque capitaine de la 2e Compagnie du 28e Bataillon de chasseurs alpins (28e BCA). Il m’a souvent raconté, notamment, son assaut de la tranchée de Bouchavesnes, le 12 septembre 1916, lors de l’offensive de la Somme, qui allait le blesser grièvement à une jambe et le rendre partiellement sourd. Ces souvenirs sont ceux de nombreuses familles françaises. La mémoire de ces héros nous oblige à chasser l’ennemi infiltré.

Jean-Jacques Goldman et ce que la France est devenue

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Le chanteur Jean-Jacques Goldman photographié en 1988 © GREGOIRE/SIPA

Nous vivons dans un étrange pays où un simple message de soutien d’un ancien chanteur populaire à nos forces armées déclenche une vague de commentaires étonnés, observe notre chroniqueur.


Assez régulièrement, je résiste à la tentation d’écrire un nouveau billet sur Jean-Jacques Goldman, ses rares propos publics, ses actions caritatives discrètes, l’aura inaltérable qui le maintient au premier rang de l’affection populaire. Je me rends compte que mes billets ne doivent pas être seulement un moyen d’exprimer son enthousiasme personnel, mais aussi une occasion de le dépasser pour susciter une réflexion plus générale.

Une forme de disruption

Cette belle opportunité m’a été offerte par le message manuscrit que Goldman a adressé, au soir du 11 novembre, en sa qualité d’ambassadeur du Bleuet de France.

Photo : le Bleuet de France

« Pas de paix sans gardien, ni de liberté sans soldat. Nous avons peut-être eu tendance à l’oublier, mais l’actualité nous le rappelle dramatiquement chaque jour. Il me semblait important de montrer notre reconnaissance envers nos armées, leurs blessés, et plus généralement envers toutes les forces de sécurité qui nous protègent au quotidien1. »

Il se dit « heureux et fier » d’être l’ambassadeur de cette association, qui apporte son soutien aux anciens combattants, aux veuves de guerre, aux pupilles de la nation, aux militaires blessés lors des missions de maintien de la paix, ainsi qu’aux victimes du terrorisme.

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Dans un monde où la normalité et la décence prévaudraient, il ne serait même pas nécessaire de s’attarder sur ces évidences adressées à tous les Français. Jean-Jacques Goldman serait sans doute le premier à juger excessive l’attention portée à son message de cœur, de solidarité et de reconnaissance envers tous ceux – et toutes les institutions – qui défendent notre société et veillent, autant que possible, à la tranquillité et à l’intégrité de nos existences.

Mais nous savons bien, pour le subir au quotidien, que le principe, dans le monde intellectuel, artistique et même sportif, est inverse, qui ne manque jamais une occasion de pourfendre ce que Jean-Jacques Goldman honore.

Organes de sauvegarde

Que ce soit à l’égard de nos armées ou de nos forces de l’ordre, on ne compte plus les dénonciations ineptes, injustes ou mensongères. J’ai encore en mémoire la sottise de Kylian Mbappé à la suite de la mort de Nahel, ainsi que les tribunes, pétitions et mises en demeure qui, presque toutes, poursuivent le même dessein : s’en prendre à nos organes de sauvegarde, qu’ils œuvrent à l’intérieur ou à l’extérieur. Et, malheureusement, je ne peux pas exclure de cette responsabilité collective le président de la République lui-même, qui, à plusieurs reprises, s’est cru autorisé à préjuger, toujours dans le même sens.

Dans ce climat où, dans tant de secteurs, le registre est devenu celui de la haine – au détriment de la courtoisie, qui devrait au moins, dans la forme, civiliser les contestations et les contradictions, même les plus vives – la sérénité et la rectitude que distille le message de Jean-Jacques Goldman font du bien. Elles constituent, en effet, un véritable havre de paix et ne font qu’amplifier mon admiration pour une personnalité qui, tout au long de sa carrière comme dans sa vie d’après, n’a jamais proféré la moindre stupidité ni cédé à la moindre facilité démagogique. Nous n’aurons plus jamais, de sa part, d’autres retours que ceux que l’éthique démocratique lui prescrit, que la vérité et la justice lui dictent. Nous nous en contenterons.

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  1. https://www.franceinfo.fr/societe/guerre-de-14-18/11-novembre/document-pas-de-paix-sans-gardien-ni-liberte-sans-soldat-a-l-occasion-des-commemorations-du-11-novembre-jean-jacques-goldman-adresse-un-message-aux-francais_7609268.html ↩︎

Le plus long «shutdown» américain s’achève: mais à quoi tout cela a-t-il servi?

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Le président Donald Trump s’exprime avant de signer la loi de financement visant à rouvrir le gouvernement, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche, le mercredi 12 novembre 2025, à Washington © Jacquelyn Martin/AP/SIPA

Dans la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 novembre, Donald Trump a promulgué la loi mettant un terme à la paralysie budgétaire qui durait depuis 43 jours. Après cet interminable bras de fer politique, comment les marchés financiers vont-ils se redresser ? Analyses et perspectives.


Après que le Sénat a voté le maintien du financement du gouvernement fédéral jusqu’au 30 janvier, le plus long “shutdown” de l’histoire des États-Unis semble devoir s’achever dans un murmure. La Chambre des représentants doit se prononcer sur le projet de loi dès mercredi, tandis que le président Donald Trump a déjà proclamé « une très grande victoire ». Il reste toutefois difficile de savoir si quelqu’un a réellement gagné quoi que ce soit.

Rattrapage des salaires

Du côté positif pour la consommation américaine, le texte du Sénat garantit le versement rétroactif des salaires aux employés fédéraux mis en congé forcé et annule les licenciements décidés au début du shutdown, en gelant toute nouvelle suppression de postes au moins jusqu’au 30 janvier. Cependant, l’économie américaine montrait déjà des signes d’affaiblissement dans certains secteurs clés avant la fermeture, et l’absence de données actualisées a brouillé le tableau. Le rapport sur l’inflation (CPI) du mois d’octobre a bien été publié à temps, mais l’incertitude demeure concernant la mise à jour prévue pour le 13 novembre, tandis que les retards sur les statistiques d’emplois non agricoles de septembre et octobre continuent d’obscurcir la dynamique de croissance.

A lire aussi: Stabiliser la dette publique: les étranges partis-pris du Conseil d’analyse économique

Anatole Kaletsky, mon collègue, estime que le shutdown a peut-être masqué une faiblesse sous-jacente du marché du travail américain. Les indicateurs du secteur privé, tels que l’augmentation des licenciements annoncés par Challenger ou la forte baisse de l’indice des services de ressources humaines et d’emploi du S&P 1500, pointent clairement vers un mauvais chiffre de l’emploi, voire une contraction, ce qui pourrait provoquer un bref accès d’aversion au risque sur les marchés. À l’inverse, si les données concordent avec les signaux plus robustes des ventes de détail Redbook et de l’indice ISM des services, confirmant la poursuite de la création d’emplois, les investisseurs devraient accueillir leur publication avec sérénité.

Autres dossiers en attente

La liquidité devrait s’améliorer à mesure que le gouvernement rouvre. Après que la loi One Big Beautiful Bill Act a relevé le plafond de la dette en juillet, le Trésor a reconstitué sa réserve de liquidités à environ 950 milliards de dollars, mais a continué de conserver un excès de trésorerie. Le shutdown a pu retarder certains paiements, de sorte que la reprise des décaissements pourrait réduire le solde du Trésor et réinjecter de la liquidité dans le secteur privé. Cette dynamique contribue à expliquer la récente hausse des actions américaines et de l’or, ainsi que l’affaiblissement du dollar à l’approche de la réouverture. Le recul du taux de financement garanti au jour le jour (SOFR) indique lui aussi une diminution des tensions sur la liquidité des marchés monétaires.

La question clé est de savoir jusqu’où cette réserve de trésorerie va diminuer. Le Trésor a récemment reconnu détenir un excès de liquidités et s’est engagé à réduire ses emprunts pour faire baisser le solde. S’il atteint son objectif de 850 milliards de dollars, environ 100 milliards afflueraient vers le secteur privé. Un retour à son repère d’un “débit d’une semaine”, conforme à son objectif post-2016, impliquerait une injection plus importante, de l’ordre de 200 milliards.Toutefois, ce surcroît ponctuel de liquidité ne devrait pas modifier de manière significative les perspectives concernant le bilan de la Réserve fédérale.

Avec la résolution du shutdown, le Congrès peut maintenant se concentrer sur d’autres dossiers en attente. Les élus doivent encore négocier une prolongation des subventions de l’Affordable Care Act, un vote étant prévu pour décembre. Un autre point essentiel est la réautorisation de l’International Development Finance Corporation (DFC), qui a des implications macroéconomiques importantes. La DFC a été suspendue lorsque la loi BUILD a expiré le 1er octobre, sa reconduction ayant été retardée par le shutdown. Durant cette suspension, le Sénat a confirmé Benjamin Black, fils du dirigeant de private equity Leon Black, au poste de directeur général.

La reconduction de la DFC est importante étant donné le projet de l’administration de l’utiliser pour financer des initiatives liées aux priorités de sécurité nationale. Par exemple, la DFC s’est engagée à travailler avec la société d’investissement Orion Resource Partners et avec ADQ, le fonds contrôlé par le gouvernement d’Abou Dhabi, pour investir dans des projets de chaîne logistique concernant des minerais critiques pour les États-Unis et leurs alliés. En résumé, l’impact économique principal du shutdown devrait se limiter à des distorsions temporaires des données, qui devraient rapidement disparaître. L’injection ponctuelle de liquidité liée à la baisse des réserves du Trésor, combinée au retour à un fonctionnement normal du financement public, devrait fournir un soutien à court terme aux marchés — du moins jusqu’au prochain épisode d’affrontement politique.