La France veut interdire les PFAS (“polluants éternels”) avant même l’Europe, au nom du principe de précaution. Mais cette surenchère écologique risque surtout de pénaliser ses propres industries, sans impact réel sur la pollution. Une victoire symbolique aux conséquences bien réelles.
La France aime se faire peur, surtout quand il s’agit d’afficher sa vertu écologique en prenant de vitesse Bruxelles. La dernière illustration de cette tendance ? La « Loi Générations Futures », une proposition de loi (PPL) visant à interdire les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), ces fameux « polluants éternels » que certains voudraient voir disparaître du paysage industriel au nom d’une précaution sans nuance. Adoptée par la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, cette PPL entend aller bien au-delà des régulations européennes en vigueur. Mais cette fronde environnementale repose-t-elle sur une base scientifique solide, ou est-elle avant tout une démonstration de force idéologique ?
Les PFAS ne sont pas tombées du ciel. Depuis les années 1950, ces composés ont révolutionné de nombreux secteurs grâce à leurs propriétés exceptionnelles de résistance à l’eau, aux graisses et aux températures élevées. Qu’il s’agisse de textiles imperméables, de revêtements antiadhésifs, de dispositifs médicaux, ou même de batteries pour véhicules électriques, ils sont omniprésents dans notre quotidien. Mais voilà : leur stabilité a également un revers, celui de leur persistance dans l’environnement. Suffisant pour les jeter tous dans le même sac et en prononcer l’excommunication ?
Une réglementation qui devance Bruxelles
La communauté scientifique, pourtant loin d’être un repaire de lobbyistes de la chimie, rappelle que les PFAS ne forment pas un bloc monolithique. Si certains, comme le PFOA ou le PFOS, sont réellement toxiques et font déjà l’objet de régulations strictes, d’autres sont considérés comme stables et non dangereux. Mais la « Loi Générations Futures » semble peu s’embarrasser de ces nuances. Ce qui compte, c’est d’afficher un volontarisme réglementaire qui flattera certaines ONG et fera office de victoire symbolique contre le « lobby industriel ».
Le problème, c’est que la France joue ici en solo. L’Union européenne, via le règlement REACH, a déjà encadré l’usage des PFAS, avec des interdictions ciblées et des exemptions pour les secteurs où ils restent indispensables. Mais Paris veut faire mieux que Bruxelles : anticiper la future interdiction européenne généralisée (actuellement en discussion), quitte à s’en prendre à des substances qui ne sont ni toxiques ni dangereuses.
Or, cette croisade législative pourrait bien tourner au sabotage économique. En interdisant unilatéralement les PFAS dans l’habillement, les cosmétiques et les textiles imperméabilisants, la France met en difficulté ses propres entreprises, sans que les importations soient soumises aux mêmes contraintes ! Autrement dit, elle se crée une concurrence déloyale au profit de pays qui, eux, ne se gêneront pas pour continuer à produire et exporter ces mêmes substances sur notre marché. On marche sur la tête.
Derrière cette proposition de loi, on retrouve le député Nicolas Thierry (EELV), ardent défenseur de l’interdiction totale. L’argument avancé ? Une réduction de l’exposition aux PFAS et donc, une amélioration de la santé publique. L’intention est louable, mais la méthode prête à discussion.
L’OMS et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont certes identifié certains PFAS comme étant à surveiller, en raison de leurs effets potentiels sur le système hormonal et le risque accru de cancers. Dans d’autres cas de figure le problème (à l’environnement) se pose au moment du recyclage et non pas à l’usage domestique normal. Mais la réponse réglementaire doit-elle être la bétonnière aveugle ou la pince chirurgicale ? Faut-il interdire tous les PFAS sans distinction, alors que la science elle-même reconnaît que certains ne présentent pas de danger avéré ?
Une victoire symbolique, mais à quel prix ?
Le principe de précaution est devenu en France une arme de démolition massive. Qui cible évidemment les entreprises et donc les emplois français à l’exclusion de tout le reste. Quand on sait que SHEIN est le site marchand numéro 1 en France avec 23 millions de clients, et que les produits vendus par SHEIN ne se soumettront pas aux règles que cette proposition de loi va imposer aux industriels français… même chose pour Temu ou AliExpress, et toutes les solderies et hypermarchés français largement alimentés en produits, vêtements, ustensiles de cuisine, venus « d’ailleurs » et nettement moins chers que les produits français ! On sait pourquoi.
La peur du risque l’emporte sur l’analyse rationnelle, et toute nuance est balayée au nom d’une vision simpliste du bien et du mal. Résultat : des industries fragilisées, une réglementation qui va plus loin que l’Europe sans que personne ne prenne le temps d’en mesurer les effets concrets, et au final, une politique qui fait plus pour l’affichage que pour l’intérêt général.
Interdire les PFAS en France ne signifie pas qu’ils vont disparaître de la circulation. Les importations continueront, la pollution restera globale, et les industries devront s’adapter avec des alternatives qui ne sont pas toujours disponibles ni aussi efficaces.
Plutôt qu’une interdiction brutale et idéologique, une approche graduelle et scientifiquement fondée aurait été préférable. Mais la France préfère jouer les premiers de la classe, quitte à tirer contre son propre camp. La « Loi Générations Futures » se présente comme un acte de bravoure politique, mais son impact réel sur la pollution sera marginal, tandis que ses conséquences économiques risquent d’être bien plus tangibles. Une victoire à la Pyrrhus ? Il y a fort à parier que d’ici quelques années, les mêmes qui félicitent aujourd’hui cette interdiction déploreront l’effondrement de certains secteurs industriels sous le poids d’une réglementation déconnectée des réalités.
Elias, 14 ans, n’est jamais rentré de son entrainement de foot. Il décédait le 25 janvier après une agression au couteau dans le 14e arrondissement de Paris. Dans une lettre, ses parents estiment qu’il ne s’agit en rien d’un fait divers et en disent plus sur l’arme du crime passée sous silence par les institutions et les médias.
« Elias aurait dû avoir 15 ans le 14 février 2025… Elias n’aura jamais 15 ans »
Voilà comment commence la lettre que les parents d’Elias ont rédigée. Et dès le premier mot, elle nous arrache le cœur. Vous avez vu comme moi la photo d’Elias, ce jeune adolescent de 14 ans tué par deux voyous guère plus âgés qui voulaient lui voler son téléphone portable alors qu’il rentrait d’un entrainement sportif. Ce jeune garçon ressemble tellement à tous les enfants de cet âge, à nos enfants au même âge. Il en a la coupe de cheveux, les attitudes et cette beauté en devenir du jeune caneton qui se transforme en cygne. Il ressemble à mes enfants et à leurs amis. Il a l’air tellement vivant sur les photos qui tournent sur les réseaux sociaux que la première fois que j’ai découvert son visage, j’ai souri devant ce bel enfant et puis j’ai vu son nom. Elias n’aura jamais 15 ans et cela devrait tous nous donner envie de hurler.
J’ai lu la lettre des parents d’Elias. Elle est digne et lucide. Mais chaque mot fait mal, tellement elle nous renvoie à notre détresse collective et à un sentiment d’abandon profond. Mais surtout elle parle d’un mensonge. D’un mensonge voulu, choisi, délibéré, un mensonge auquel ont participé la presse, les institutions, l’AFP.
Une censure bizarre
Car que nous apprend la lettre des parents d’Elias ? la vérité sur sa mort et sur les circonstances de cette mort et les véritables armes que portaient ses agresseurs. Ils n’avaient pas de simples couteaux, mais une machette et une hachette. Qui se promène en ville, à Paris avec une machette ? On n’est pas en forêt ou dans la brousse et l’utilité de l’arme est difficilement justifiable.
Mais pourquoi certains politiques comme la plupart de nos journalistes ont voulu cacher ce fait ? Pourquoi dissimuler que l’arme qui a tué Elias était une machette ? Parce que cette arme renvoie à un autre espace-temps que le nôtre. Parce que c’est une arme frustre et meurtrière. Son utilisation renvoie à l’Afrique, aux îles lointaines, à d’autres cultures, d’autres usages, d’autres mentalités ou d’autres temps. Culturellement, ce n’est pas une arme utilisée dans l’hexagone. La sauvagerie de l’agression d’Elias renvoie de fait à un autre univers mental que l’Europe, à des références où on n’est pas un homme parce que l’on contrôle sa pulsion, mais parce que l’on est capable d’infliger la mort et que l’on fait peur. A une façon d’être au monde où on n’existe que parce qu’on inspire la peur et qu’on inflige la douleur.
Pour autant la censure reste bizarre. Qu’un taré utilise une machette ne veut pas dire que toute personne venant d’Afrique ou des îles a une machette chez lui ou serait un meurtrier potentiel. Voilà qui serait effectivement délirant. Et pourtant c’est ce pas que franchissent allégrement les censeurs en prêtant cette pensée à la population. C’est parce qu’ils estiment que la société française se définit par un racisme systémique en son sein, qu’il faut donc cacher les origines des meurtriers ou leur arme ou la manière dont ils ont tué. Et ce afin que personne ne fasse le lien avec d’autres mœurs et habitus. C’est ainsi que le mot égorgement a disparu de nos journaux. Aujourd’hui on dit coups de couteaux au cou, parce que l’égorgement renvoie trop à la façon de tuer en islam. Pourtant nos concitoyens montrent plutôt une capacité d’encaisser l’effroyable sans chercher la vengeance qui les honore. Curieux qu’une partie de leurs représentants les envisage en racistes dépourvus d’humanité !
Envie de vomir
Mais ce que disent ces mensonges est pire encore : une fois de plus la victime a été abandonnée pour protéger les coupables. L’injustice qui est faite à la victime a été choisie et délibérée et cela dit à quel point elle ne compte pas. Ces mensonges sont une violence portée à la mémoire d’Elias et au chagrin de sa famille. Car l’histoire ne s’arrête pas là : contrairement à ce qui a été écrit, Elias n’a jamais résisté. Terrorisé, il a remis son portable. Mais comme l’indiquent les parents, les deux ados voulaient exercer leur toute puissance et le coup porté à Elias a été tellement violent qu’il a été fatal. Sa description est atroce. Tellement que les parents ont choisi des termes techniques pour l’évoquer, mais quand vous comprenez ce que cela décrit, c’est l’envie de vomir qui vous saisit. L’enfant a été littéralement découpé.
Et la rage vous prend quand vous lisez ces si justes paroles : « Comment deux adolescents armés, interdits de contact entre eux par la Justice, connus défavorablement des services de police et judiciaires pour des faits similaires ont-ils pu en toute impunité poursuivre leurs exactions ? Comment justifier l’appréciation clémente de la justice qui les a laissés placés sous un contrôle judiciaire inapplicable et inappliqué ». S’en suivent d’autres exemples sur l’incroyable légèreté de la justice des mineurs. Toutes les questions posées par les parents méritent réponses, mais une en particulier est incontournable : pourquoi existe-t-il de fausses peines qui ne servent à rien ? Pourquoi condamner des voyous violents et hors de contrôle à un soi-disant « contrôle judiciaire » qui n’est pas adapté à leur niveau de violence et de désocialisation et qui sera vécu comme une plaisanterie ? Les tueurs d’Elias se vantaient d’ailleurs de commettre des infractions pénales à la barbe de cette justice qu’ils voyaient comme faible et stupide. Et qui l’était, car le non-respect de leurs obligations et leurs vantardises n’entrainaient aucune conséquence pour ces délinquants. Vous me direz que les actes délictueux qui les faisaient « connaitre des services de police » n’avaient pas eu grande conséquence non plus. Alors, finalement, un meurtre, ce doit être tolérable dans une société qui accepte à ce point la violence et n’y répond qu’en entassant fleurs, nounours et bougies sur des coins de trottoir à peine lavés du sang répandu.
Oui, les parents d’Elias ont raison. Elias est mort en raison de l’impunité ressentie par deux mineurs pourtant soi-disant pris en charge par la Justice. Elias est mort parce que l’Etat ne parait plus faire de la protection de ses citoyens, sa priorité. Elias est mort parce que notre Justice est aveugle à la réalité de la violence de certains mineurs et refuse de regarder le problème en face. La lettre s’achève par ses mots : « Nous ne demandons pas aux représentants des partis politiques, aux magistrats, de ressusciter les disparus. Nous leur demandons de protéger les vivants. » Des mots que je partage mais qui, j’en ai bien peur, sont destinés à rester lettre morte.
Certes l’Assemblée nationale a adopté une petite réforme de l’ordonnance sur les mineurs, mais celle-ci ne répond qu’à quelques questions et n’a rien d’une loi exprimant la prise de conscience de la réalité de la montée de la sauvagerie dans une certaine jeunesse. Elle passe à côté de choses essentielles. Et cela devient pénible de voir des politiques faire de la communication pour mettre en scène leur fermeté alors que, quand ils trempotent à peine un orteil dans le courant et le retirent un peu froid, ils essaient de faire croire qu’ils ont franchi le Rubicon. La proposition de loi Attal n’est pas à la hauteur des enjeux mais elle va servir de prétexte pour ne rien faire, parce qu’elle aura eu lieu et qu’on ne va pas revenir tout le temps sur le dossier. Un argument souvent entendu sur le terrorisme, alors qu’il dit juste que, lorsqu’on est trop lâche pour prendre la mesure d’une situation et qu’on fait des lois uniquement pour permettre à un politique de prendre une posture, il faut souvent remettre l’ouvrage sur le métier. Quand la protection des Français nourrira plus la réflexion que les perspectives de carrière d’un ministre, nos lois tiendront davantage la route et seront plus pérennes. Et pourtant il va bien falloir s’attaquer au problème. Parce qu’Elias c’est le mort de trop et pourtant nous savons tous que ce n’est et ne sera pas le dernier.
Aux Etats-Unis, les Américains découvrent avec stupeur les sommes allouées par l’USAID à des causes parfois farfelues. En France, le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici n’a pas le pouvoir d’un Musk pour tailler dans les dépenses publiques…
Le Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) dirigé par Elon Musk est chargé de l’audit des agences gouvernementales américaines. Son objectif : vérifier qu’argent et personnel sont employés judicieusement, sans gaspillage, sans corruption, en tenant strictement compte des missions définies pour chacune d’entre elles. Ce qu’a découvert le DOGE à propos de l’USAID relève, pour les Américains, d’un véritable scandale. Ils n’en croient pas leurs yeux. Ils savaient, bien sûr, que le deep state – cette nébuleuse techno-structure bureaucratique composée d’une myriade d’agences pseudo-indépendantes – leur coûtait cher et avait de nombreux tentacules. Mais les révélations sur l’USAID, l’agence d’aide au développement au budget annuel d’environ 50 milliards de dollars, les laissent pantois. Plutôt que d’être une agence pour le développement international, il s’avère qu’elle était surtout une agence pour développer l’influence américaine à l’étranger et imposer une certaine idée de la « démocratie » ainsi que les théories progressistes et wokes. Son démantèlement va affecter des centaines d’ONG, de médias, d’associations, aux États-Unis, à l’étranger, en France. D’où la panique qui secoue certains milieux « indépendants ».
Nébuleuses influences
Sur Sud Radio, André Bercoff n’en est pas revenu, lui non plus. Consterné, il a passé en revue certains « engagements humanitaires » de l’USAID : soutien au développement des véhicules électriques au Viet-Nam, financement d’une clinique transgenre en Inde, subvention de 1,5 million de dollars à une association LGBT serbe, deux millions de dollars pour aider aux opérations chirurgicales de changement de sexe au Guatemala, 4,5 millions de dollars pour lutter contre la désinformation au Kazakhstan, 1,5 million de dollars pour promouvoir les mouvements LGBT en Jamaïque, etc. La Fondation Bill et Melinda Gates aurait bénéficié d’une subvention de l’USAID à hauteur de 5 millards de dollars. Des agences de presse comme Reuters, la BBC ou l’AFP, et des milliers de médias auraient reçu des subsides de l’agence gouvernementale américaine. Politico, média archi-progressiste, pro-démocrate et furieusement anti-Trump, a annoncé de grandes difficultés financières à venir à la suite de la fermeture de l’USAID, un de ses principaux donateurs. Des mouvements atlantistes et des fondations « philanthropiques » auraient profité des largesses de l’USAID pour fomenter ou influencer différentes « révolutions » de couleur (orange en Ukraine, rose en Géorgie, etc.) – c’est ce qu’auraient révélé différents mails et dossiers de l’organisation « humanitaire » qui remontent à la surface du web grâce aux investigations du DOGE. Par ailleurs, des versements d’argent opérés par différentes instances gouvernementales, dont l’USAID, n’ont « aucun code de catégorisation du paiement » – en clair, l’administration ignore pour le compte de qui, individu ou organisation, ils ont été effectués. Des comptables du Trésor américain évaluent à 50 milliards de dollars par an le montant des prestations frauduleuses. Il n’est pas impossible que des organisations terroristes islamistes aient reçu, via ces paiements anonymisés, de l’argent public américain. Le gouvernement a limogé la quasi-totalité des employés de l’USAID pour ne garder que les trois cents qui gèrent les dossiers strictement humanitaires et sanitaires. Tout ce qui relève d’une ingérence directe ou indirecte dans les médias, de la propagation du wokisme ou de toute autre activité l’éloignant de sa mission originelle, se verra financièrement asséché, a annoncé Donald Trump. Les économies ainsi réalisées devraient se compter en milliards de dollars.
Bien entendu, ça râle du côté des progressistes, surtout ceux qui avaient tout intérêt à ce que les malversations de l’USAID n’émergent pas des abysses bureaucratiques. Des médias et des ONG se lamentent. Sur France Inter, Patrick Cohen se fend d’un éditorial furibond contre ce « dictateur » d’Elon Musk et compare l’usage de l’IA par le DOGE à la surveillance numérique made in China. Il s’interroge – « Qui peut garantir que les informations collectées ne seront pas utilisées contre des opposants, comme dans tout régime autoritaire ? » – et feint d’ignorer les pratiques de surveillance de masse initiées de longue date par la National Security Agency (NSA). Edward Snowden n’a pas attendu l’IA pour révéler, en 2013, le programme PRISM permettant à la NSA d’accéder aux communications téléphoniques et numériques de n’importe qui dans le monde – Angela Merkel et Nicolas Sarkozy apprirent ainsi que leurs conversations étaient écoutées par les grandes oreilles de l’Oncle Sam depuis des mois. Patrick Cohen n’a traité personne de dictateur à l’époque. Il faut dire que les États-Unis d’Amérique étaient alors dirigés par le démocrate Barack Obama, donc… pas touche ! Sous la présidence de Joe Biden, Le Sénat a approuvé la prolongation de la loi FISA (Foreign Intelligence Surveillance Act) et étendu les pouvoirs d’espionnage du FBI, de la CIA et de la NSA sur les citoyens américains et non-américains par le biais des communications privées (messageries, réseaux sociaux, téléphonie, etc.) dans tous les pays du monde – je ne me souviens pas d’avoir entendu Patrick Cohen dénoncer un « putsch numérique », des méthodes pouvant « asseoir des dictateurs et des fascistes » ou des « ingérences » douteuses dans les démocraties occidentales. Enfin, on s’étonne que le journaliste france-intérien ne soit pas effaré, et encore moins scandalisé, par le fait que cette agence « humanitaire » américaine ait subventionné autant de médias européens dits indépendants.
6200 journalistes et 700 médias à travers le monde ont en effet, semble-t-il, été arrosés par l’USAID. En Ukraine, par exemple, l’agence est la première contributrice des aides internationales finançant 9 médias sur 10. L’ONG Reporters sans frontières, qui n’a jamais craint de dénoncer « les ingérences étrangères dans le domaine de l’information » quand elle pensait y voir la main des Russes, s’apitoie sur le sort des « médias indépendants » dont le financement était assuré par l’agence américaine. Sur CNews, Mathieu Bock-Côté, après avoir avoué sa surprise en apprenant que l’USAID avait financé un programme promouvant… l’égalité de genre dans l’armée jordanienne, résume la situation : « On nous dit donc que la presse libre et indépendante est compromise par la fin du financement américain – donc le financement américain, c’est la garantie qu’il n’y a pas de biais idéologique !?! C’est lunaire ! Je crois qu’on nous prend vraiment pour des idiots. » Je le crois aussi…
Du côté des ONG, le coup est rude. Le gel des crédits de l’USAID « aura réellement des conséquences vitales, voire mortelles, pour des millions de personnes », affirme solennellement Daryl Grisgraber, en charge des questions humanitaires pour la branche américaine d’Oxfam – la branche française étant dirigée, rappelons-le, par Cécile Duflot. De nombreuses ONG ont transmis à la presse de longues déclarations pour sensibiliser sur les « conséquences dramatiques » de la décision du gouvernement américain mais se montrent moins diserts quand il s’agit de communiquer le montant des subventions de l’USAID qu’elles reçoivent depuis des années et la répartition réelle de leur utilisation : projets, programmes en cours, bureaux, emplois, salaires, etc. C’est pourtant sur ces différents critères que l’administration Trump décidera de continuer de subvenir ou non aux besoins de telle ou telle ONG.
L’efficacité de France Travail questionnée
Ce n’est pas seulement pour réduire les coûts publics que le DOGE a été créé, mais c’est également pour vérifier que l’argent débloqué est utilisé aux seules fins annoncées dans les statuts officiels des différents agences gouvernementales – l’aide humanitaire et l’aide au développement, dans le cas de l’USAID. De plus, le DOGE d’Elon Musk a promis de combattre la surcharge techno-bureaucratique des différentes branches de l’administration américaine, source de dépenses inutiles et d’inefficacité, et de faire en sorte que ces services servent au mieux les citoyens américains sans leur coûter plus que ce qui est strictement nécessaire à leur bon fonctionnement. Si nous avions l’équivalent d’un DOGE en France, sans doute serait-il en train de se pencher sur le cas, par exemple, de France Travail (ex-Pôle Emploi). L’enquête de l’eurodéputée Sarah Knafo révèle en effet un véritable scandale que les médias mainstream se gardent bien de relayer : 43 milliards d’euros de budget, 54 500 employés, pour seulement 12,9 % de chômeurs retrouvant du travail grâce à cette institution publique ; des salaires de cadres atteignant 14 000 euros par mois tandis que les conseillers chargés de suivre les chômeurs plafonnent entre 1700 et 2100 euros mensuels ; une cérémonie pour célébrer la signature de 40 contrats de travail coûtant plus de 300 000 euros. Comme si cela ne suffisait pas, l’enquête de Sarah Knafo nous apprend que France Travail a dépensé en une seule année 1,2 milliard d’euros pour sous-traiter certaines de ses missions à des prestataires privés – formation des conseillers, accompagnement des chômeurs, évaluations professionnelles, etc. – alors que ces tâches auraient pu être assurées en interne. Cette enquête confirme également un mal récurrent dans l’administration française, administration qui accueille, recycle ou recase les représentants d’une caste politique qui n’a pas l’intention de céder sa place. Thibault Guilluy s’est présenté aux législatives de 2017 sous l’étiquette LREM dans la circonscription d’Emmanuel Macron, la 4ème du Pas-de-Calais. Sa suppléante était Tiphaine Auzière, l’une des filles de Brigitte Macron. Ça créé des liens. Après avoir passé, histoire de se faire la main sur le plan de l’inefficacité théodulaire, trois années dans les bureaux du Haut-commissariat à l’Emploi et à l’Engagement des entreprises, M. Guilluy a été nommé directeur général de France Travail. Son salaire n’est pas communiqué – le dernier salaire connu est celui du DG de Pôle Emploi en 2009 : 20 000 euros par mois ! En 2020, notre DOGE à nous, la Cour des comptes, a fait les gros yeux en soulignant l’inefficacité de Pôle emploi, une « hausse importante des effectifs » en son sein, une « perte importante du potentiel de travail » et un « statut particulièrement favorable pour les cadres dirigeants » – en clair, trop de personnel et des cadres dirigeants surpayés pour des résultats plus que médiocres. Et puis ? Et puis rien. Pierre Moscovici n’est pas Elon Musk. La grosse machine administrative continue donc de nous coûter une blinde et d’être d’une inefficacité totale. Encore n’avons-nous évoqué ici qu’un seul des nombreux dispositifs techno-administratifs qui plombent nos finances publiques. Rien ne change. Et rien ne changera. Comme l’a souligné Ivan Rioufol dans sa dernière chronique, que ce soit pour réduire les dépenses publiques, freiner l’immigration ou lutter contre l’insécurité, nos responsables politiques parlent beaucoup mais ne font pas grand-chose, « aucun acte ne suivra, tant que cette caste, bavarde et inutile, s’accrochera à ses pouvoirs ». Que voulez-vous qui change dans un pays où il est apparemment prévu que le macrono-socialiste Richard Ferrand succède au socialo-macroniste Laurent Fabius au Conseil constitutionnel ?
Ce jeudi 13 février 2025, se tenaient à la Maison de la Radio, les « Assises de la lutte contre l’antisémitisme », relancées sous la houlette de la courageuse Aurore Bergé, ministre de l’Egalité et de la lutte contre les discriminations.
La ministre a ouvert les débats avec conviction en présence de la ministre de l’Education nationale Elisabeth Borne qui lui a succédé sur le podium puisque la thématique de ces assises était « la question de l’antisémitisme dans le milieu scolaire et dans l’enseignement supérieur et la qualification de l’antisémitisme dans ses nouvelles formes. »
Aurore Bergé : « On ne les entend pas suffisamment, celles et ceux qui, aujourd’hui, parce qu’ils sont juifs et qu’ils sont en France, subissent cet antisémitisme et ce sentiment de solitude. Ils se sentent seuls à vivre l’antisémitisme. Ils disent que l’on ne s’assoit plus à côté de moi dans un amphi, on ne veut plus faire un TD avec moi. Pourquoi ? Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Je suis juif. Qu’est-ce-ce qu’il s’est passé pour qu’on laisse seuls ces enfants, ces adolescents face à cette vague d’antisémitisme ? C’est absolument inacceptable et intolérable. »
Face à une salle pleine, des jeunes élèves et des étudiants sont venus « livrer leurs expériences et leur vision de l’avenir face à l’ampleur de ce fléau dans notre société ».
De « grands témoins » sont ensuite montés sur scène : l’avocate Muriel Ouaknine-Melki, le recteur délégué pour l’enseignement supérieur de la région académique Occitanie Khaled Bouabdallah et l’historienne Marie-Anne Matard-Bonucci.
Lutter contre l’antisémitisme par l’éducation, c’est bien mais ne manque-t-il pas un élément essentiel dans ce combat ?
Sont-ce les lacunes de l’Education nationale qui nourrissent l’antisémitisme en 2025 ou sont-ce les mensonges déversés par certains médias contre Israël qui le font exploser ?
Comme c’est étrange de chercher à lutter contre l’antisémitisme dans le temple de la propagande wokiste – la Maison de la Radio – qui propage la haine d’Israël sur ses ondes du matin au soir. Tout comme l’AFP et France 5, France Inter et France Info falsifient quotidiennement l’information concernant le Proche-Orient pour accabler Israël, et par voie de conséquence mettre en danger les juifs de France qui y sont assimilés.
Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine en février 2022, le gouvernement français n’a pas tremblé quand il a fallu bannir RT France, la chaîne gouvernementale russe.
Bizarrement, rien n’a jamais été entrepris contre la chaîne qatarie pro Hamas Al Jazeera… alors que même l’Autorité Palestinienne l’a bannie.
Et si pour lutter contre l’antisémitisme, le gouvernement commençait par assainir l’espace médiatique, étatique mais aussi étranger accessible sur le territoire français ?
L’Arcom a condamné C8 à 3,5 millions d’euros d’amende pour avoir insulté Louis Boyard et même fait fermer cette chaîne. Pourtant, cette autorité « indépendante » ne trouve rien à redire quand Israël est traité sur certaines chaînes d’info et sur celles du service public « d’état génocidaire », de « pays d’apartheid » ou de commettre des « crimes contre l’humanité ».
Pour l’Arcom, il vaut donc beaucoup mieux diffamer Israël – et mettre en danger les juifs de France – qu’insulter un député d’un parti d’extrême gauche.
Lors de ces assises, un thème n’a jamais été abordé ni même prononcé : l’islam, l’islamisme, le djihadisme. Il était pourtant dans toutes les têtes.
Un sac où était écrit en grand « Assises de la lutte contre l’antisémitisme » était offert à tous les participants. J’imagine l’embarras de ceux qui – après avoir entendu ces récits d’antisémitisme au quotidien – ont dû emprunter les transports en commun pour rentrer chez eux. On me dit dans l’oreillette qu’ils ont soigneusement plié le sac dans leur poche pour éviter les ennuis.
En conclusion de ces assises, une campagne publicitaire d’affichage a été dévoilée :
Qui s’est posé la question de l’efficacité ou du potentiel effet contreproductif d’une telle campagne ? C’est ça la France de 2025. Obtenir un changement radical de politique ou quitter le pays. C’est le choix qui s’offre aux juifs de France.
Faire société, c’est un peu plus complexe qu’une simple colocation. Le « vivre-ensemble » est apparu en France quand la République a perdu de sa superbe : un peu comme si, en mal d’idéal collectif, on avait remplacé le grand banquet républicain par un pique-nique où chacun apporte sa morale et pique celle des autres, observent Pierre-Henri Tavoillot et Gil Mihaely dans cet entretien. Et à force de trop inclure, le « vivre-ensemble » risque donc de devenir un « vivre-à-côté ». Comment s’en sortir ?
Causeur. Cette expression de « vivre ensemble » qui fait partie du titre[1] de votre dernier livre nous semble aller de soi… Pourtant, les premières occurrences de cette expression ne datent que des années 1990-1991. Pourquoi les Français ont-ils soudainement ressenti le besoin d’y faire référence ?
Pierre-Henri Tavoillot. En effet, l’expression est apparue dans les années 1990, en même temps que la dévalorisation du mot « République », alors passé de mode. Je la mettrais en lien avec l’émergence du mot « inclusion », qui exprime la même idée de manière ambiguë : soit il s’agit d’intégration (aider un individu à intégrer le collectif), soit, si l’on prend le mot au sens rigoureux du terme — l’inclusion totale de l’individu dans le groupe —, cela implique non seulement d’aider un individu à s’adapter à la société, mais aussi de forcer la société à s’adapter à l’individu. De ce point de vue, cela remet en cause le collectif. Autrement dit, ce qu’on appelle aujourd’hui « société inclusive » est périlleux, car la vie commune devient soumise au veto personnel du moindre individu.
On touche ici à quelque chose de fondamental : l’homme est un animal social. Cette tension entre notre volonté de liberté et notre besoin d’appartenance, est aussi ancienne que la philosophie.
L’homme est un animal social ; seul, il meurt, avec les autres, il tue… La question politique par excellence est donc la suivante : comment vivre avec les autres sans s’entretuer ? Nous avons trouvé des réponses : la morale, le droit, la politique, la civilité, etc. La question qui se pose aujourd’hui est celle des sociétés d’individus — une expression qui peut sembler contradictoire. Les droits individuels, initialement pensés comme des droits en société, sont devenus des droits contre la société. Je reste néanmoins convaincu que cela peut fonctionner. Une société d’individus fonctionne très bien lorsqu’elle parvient à fabriquer des individus (dimension démocratique), qui, à leur tour, fabriquent une société (dimension républicaine).
Depuis des siècles, l’Europe a vu émerger un État puissant, bureaucratique et récemment maternel, qui, avec le capitalisme et l’économie de marché, ont effacé les médiations entre l’individu et l’État. La nation, proposée comme point de ralliement pour unir des millions de citoyens, ne fonctionne plus. Dans ce contexte, quel va être le « ciment » de cette « vie en commun » ?
Précisément parce qu’après trois siècles cette dynamique n’a pas produit l’atomisation qu’on envisageait ! Or en effet pour une bonne part, ça isole, mais pour une autre part, ça reconstruit. La famille par exemple, ne disparaît pas, elle se reconfigure. Autant le lien entre les couples s’est distendu — ce n’est plus le couple qui fait la famille —, autant le rapport à l’enfant, aujourd’hui sacralisé et devenu incroyablement puissant, est structurant pour nos sociétés démocratiques. C’est pourquoi la baisse du nombre d’enfants est, parmi tous les signes, le plus inquiétant à mes yeux. L’intergénérationnel est également un élément central et on observe aussi que les relations entre petits-enfants et grands-parents ont tendance à se renforcer. Là aussi, il y a une reconfiguration du lien. C’est ce que j’ai voulu exprimer dans ce livre : on a raison d’insister sur les signes de déliaison sociale, mais il ne faut pas négliger les signes de reconfiguration du lien.
Autre exemple : les universités populaires, qui sont un trésor français. Le fait que les Français apprécient, le week-end, écouter des intellectuels et des journalistes discuter ensemble, au lieu d’aller au match de foot comme les Anglais ou au concert comme les Allemands, est remarquable. J’interviens souvent dans ces initiatives, et je suis ébahi de leur succès. Les Français ont le goût du débat, lequel a également permis de sortir de la crise des gilets jaunes.
Toutefois, aujourd’hui, le « vivre ensemble » n’est pas évoqué comme remède à la solitude de l’homme moderne dans les grandes villes anonymes ou chez les retraités de la génération baby-boom. Il s’agit plutôt d’une manière de faire face au communautarisme, notamment le séparatisme islamiste.
L’islamisme est un ennemi déclaré : il vise le cœur de notre société, l’école. Il ne s’agit pas ici de « vivre-ensemble », c’est hors de question. L’illusion multiculturaliste consiste à dire que ces personnes sont formidables, qu’elles ne demandent qu’à exprimer leur point de vue, et que nous devons leur laisser de la place. Ce n’est pas vrai. Leur projet est de détruire la société démocratique. Et face à ces ennemis-là, il faut faire la guerre. C’est aussi simple que cela.
Vous avez utilisé le terme « ennemi » et il est intéressant de noter qu’au début des années 1990, au moment même où le terme « vivre ensemble » émerge, la France, pour la première fois de son histoire, se retrouve sans ennemi et donc sans ce ciment puissant de la vie en commun.
Oui, mais aujourd’hui, nous sommes dans une situation différente, car nous avons du mal à comprendre que nous avons de nouveau des ennemis. Nous étions tellement bien installés dans cette logique d’une situation sans ennemis qu’à défaut d’un ennemi extérieur, nous commençons à nous détester. La France devient sexiste, machiste, inégalitaire et islamophobe. Et nous ne voyons pas que nous avons des concurrents, mais aussi de véritables ennemis.
Et si ce qui nous manquait, c’était un bon ennemi ? Les alliances contre un adversaire sont plus faciles que les alliances pour un but commun…
L’ennemi que nous avons aujourd’hui n’est évidemment pas assez puissant pour nous détruire. Il n’y arrivera pas. Le fondamentalisme n’est pas assez fort, mais il crée les conditions d’une déstabilisation profonde. L’islamisme représente aujourd’hui un danger pour nos écoles. La plupart des gens n’en ont aucune idée. C’est un ennemi qui demande un effort d’interprétation, et une bonne partie des élites de notre pays n’y est pas confrontée directement. Il faut se forcer à aller voir ce qui se passe dans un lycée pour comprendre qu’il y a un problème important. Ce n’est pas l’offensive de la Somme, ce n’est pas l’attaque, même fantasmée, des chars russes. C’est beaucoup plus sournois.
Cet ennemi n’offre-t-il pas exactement ce qui manque chez nous ? L’enfant qui défie un professeur s’appuie sur une autorité claire, des vérités, des appartenances, des rituels dont il est fier. Et les adultes autour de lui sont insérés dans un système social dense qui sert de cadre de vie puissant et rassurant ainsi que des réponses claires et simples à des questions fondamentales à commencer par qui je suis et à quoi sert mon existence.
C’est cela ! Il faut reconnaître la puissance de séduction de l’islamisme. Il répond à toutes les angoisses de l’individu : la solitude, l’indétermination, les problèmes d’orientation, les rapports humains. Tocqueville avait déjà pressenti cela. Il explique que la liberté est tellement exigeante et difficile à assumer — car elle implique de nombreux devoirs — que l’individu finit par en être fatigué.
Il se repose alors dans le grand tout : la communauté, la nature. La démocratie en Amérique de Tocqueville est extraordinaire, car il parle de la lassitude de l’individu démocratique. Face à l’incertitude qui pèse sur nos vies, deux réactions sont possibles : la tentation du repli ou la séduction du conflit. Ce sont les deux manières de renoncer à vivre ensemble.
C’est aussi une question de contenu positif pour un cadre commun. Depuis les guerres de religion, l’histoire politique de la France est marquée par une volonté de rester ensemble grâce à Etat qui a vocation — en principe — à rester neutre sur tout ce qui concerne les conceptions du bien et le salut. Résultat : nous gérons des désaccords. L’islamisme, c’est l’inverse : un bunker de dogmes et une cage de normes qui non seulement régissent la totalité de l’existence du matin au soir, mais entendent s’imposer à l’humanité tout entière.
Exactement. Là où nous avons appris à vivre avec nos désaccords, ils proposent un accord presque total sur une bibliothèque de consensus. Face à cela, nous n’avons souvent qu’un cadre minimal, comme celui de ne pas faire de bruit après 23 heures. Comment, sans religion, sans idée de nation, sans identité européenne, pouvons-nous affronter de telles idéologies ?
J’ajouterais aux défis : sans volonté, sans projet explicite et en se détestant autant.
Pouvez-vous citer des sociétés ou des pays où, de ce point de vue, la situation est meilleure qu’en France ?
Spontanément, on cite souvent les pays d’Europe du Nord. Mais ils trichent un peu, car il y a une forte homogénéité sociale et culturelle. Le Danemark, la Suède, la Finlande, c’est une famille, presque communautariste.
En évoquant les sociétés scandinaves vous avez oublié un mot : ethnique… Peut-être qu’il y a une limite aux différences qu’une société peut absorber sans perdre sa boussole ?
J’ai la faiblesse de penser que notre ethnie n’est pas notre code et qu’elle ne constitue pas en soi un obstacle à l’intégration.
Dans votre livre, vous allez plus loin que le constat et la critique pour esquisser une voie de sortie. Comment définiriez-vous votre proposition ?
Ma proposition est la suivante : oui, nous voulons encore vivre ensemble. Mais nous ne savons plus ni pourquoi, ni comment, ni avec qui. Ces doutes affaiblissent l’édifice. Quelle est la « raison d’être » de notre société ?
Pour répondre, il faut faire le détour par l’histoire. Dans une société chrétienne, le rôle du social était de constituer l’écrin permettant à chaque individu d’accéder au salut. L’Eglise fournissait la clé de voûte. Après les guerres de religion, c’est l’Etat qui prend le relais avant qu’il ne se mette, après la Révolution française, au service de la nation, nouvelle clé de voûte et idée « sacrée », c’est-à-dire méritant le sacrifice. Nous sommes sortis de ces grands systèmes, même s’ils n’ont pas totalement disparu : la religion est devenue une foi personnelle et l’amour de la patrie demeure, mais ce ne sont plus des « clés de voûte ». Après la Seconde Guerre mondiale, c’est la liberté et le bien-être individuels qui sont devenus les clés du vouloir-vivre ensemble : droits de l’homme et sécurité sociale.
Cela suffit-il ? Non, car les droits comme le bien-être sont des objectifs infinis. On en veut toujours plus, au point de mettre en péril le collectif. Cette revendication effrénée nous fait oublier ce qui constitue, à mon sens, la nouvelle clé de voûte de notre existence commune. Nous voulons vivre ensemble pour grandir et faire grandir. Cela pourrait sembler naïf et « gentillet », mais c’est, je crois, l’idée qu’on retrouve dans tous les liens qui font société, du privé au public : faire grandir ses enfants, faire grandir son travail, élargir sa vie, améliorer le collectif… On la trouve dans les sept piliers de la convivialité que j’identifie : manger, coucher, convoler, procréer, discuter, travailler, prier ou philosopher… La civilisation démocratique affirme que tous les êtres humains sont grands — ce qu’aucune autre civilisation n’a jamais reconnu—, que tous les humains peuvent grandir et que nous pouvons grandir ensemble. Aujourd’hui, la démocratie et l’Occident font l’objet d’une détestation quasi unanime, alors qu’ils portent ce projet absolument grandiose. Ne serait-il pas temps d’en redevenir fier ?
Justement, puisque vous parlez de grandir. Mais est-ce que nos contemporains le souhaitent ? Par leur comportement et leur consommation, n’expriment-ils l’envie d’être des enfants avec les moyens des adultes ? Le problème de notre société n’est-il pas que trop de gens ne deviennent pas adultes ? Sommes-nous une société d’adolescents ?
Je pense qu’individuellement, nous devenons adultes, et il y a de plus en plus d’adultes. Mais collectivement, nous avons du mal à le devenir. Cette crise de la démocratie est une incapacité collective à atteindre l’âge adulte. Nous sommes dans une phase post-pubère. La démocratie permet à tout un chacun de devenir adulte, mais elle en exige aussi la capacité. Le premier objectif est atteint, mais nous ne sommes pas encore devenus adultes collectivement. Si un projet politique doit être mis en place aujourd’hui, c’est celui de prendre conscience de cette finalité : comment devenir adultes ensemble ?
Je ne suis pas totalement désespéré quant à cette aptitude, sauf sur la question de la démographie. Une démocratie sans enfants perd sa raison d’être.
Directeur de la stratégie numérique (et des levées de fonds) de Reconquête, Samuel Lafont n’a pas été surpris par le revirement idéologique de Mark Zuckerberg, le patron de Facebook. Selon lui, la tech américaine s’éloigne du wokisme pour la simple raison que la majorité des internautes ne sont pas woke.
Causeur. Selon plusieurs journaux américains, la victoire de Donald Trump est due notamment aux conseils de son fils Barron, qui lui a recommandé d’abandonner les médias traditionnels pour se concentrer sur les plateformes numériques. Les partis français doivent-ils suivre cet exemple ?
Samuel Lafont. Je crois qu’on caricature un peu la stratégie médiatique de Donald Trump. Cela dit, il me semble légitime de s’interroger sur l’avenir des journaux classiques. Rien ne dit qu’ils soient éternels. Le philosophe Jacques Bouveresse a souligné le décalage qui existe, par définition, entre le rythme de production de la presse conventionnelle, qui est régulier, et la marche du monde qui, elle, est irrégulière. Certains jours il ne se passe rien dans l’actualité. D’autres jours, il se produit un immense empilement de faits majeurs. Or dans un cas comme dans l’autre, votre quotidien préféré fera à peu près la même taille… Avec les réseaux sociaux, on se délivre de cette contrainte.
Les défenseurs de la presse classique affirment que les réseaux sociaux rétrécissent l’univers du public, en le plaçant dans une bulle politique qui ne lui offre que ce qui correspond à ses idées. Êtes-vous sensible à cet argument ?
Il y a toujours eu des bulles politiques. J’ai connu des communistes sincères qui se bornaient à lire L’Humanité tous les matins. Je ne suis pas sûr qu’ils étaient bien informés… Le web a permis au contraire une respiration. Regardez les gilets jaunes, qui n’auraient jamais émergé s’ils avaient dû se fier aux seuls journalistes pour populariser leur mouvement. Les réseaux sociaux permettent à chacun de devenir le média, comme l’a justement répété Elon Musk après la victoire de Donald Trump. Les militants s’imaginent souvent que tous les citoyens se passionnent autant qu’eux pour les élections. Mais la plupart des Français peuvent aussi considérer les militants politiques comme des constructeurs de tour Eiffel en allumettes, tel Monsieur Pignon dans Le Dîner de cons !
Certes, mais il y a bel et bien des contenus politiques sur Facebook, le premier réseau social mondial. Sans quoi il n’y aurait pas la polémique actuelle sur la décision de son patron, Mark Zuckerberg de ne plus faire appel à des officines de censure spécialisées dans le « fact-checking »…
Oui, bien sûr. Quand ils sont bien faits, quand ils prennent le temps de donner la parole aux candidats, sans les couper tout le temps, sans chercher la petite phrase et quand ils parlent des vrais problèmes, les contenus politiques peuvent avoir un immense succès sur le web, avec des millions de vues. Chez Meta, la maison-mère de Facebook, les interrogations sur l’excès de censure ne sont pas nouvelles en réalité. Sans attendre les déclarations fracassantes de Mark Zuckerberg en janvier, les dirigeants de la filiale française ont convié dès le 25 mars dernier à leur siège parisien tous les responsables des grands partis français, dont votre serviteur. Ils voulaient nous dire que leur groupe avait pris la décision, au niveau mondial, de revoir ses pratiques de surveillance des contenus politiques. Certes ils ont promis de rester très vigilants sur les campagnes de désinformation, mais s’agissant des publications d’individus ne cherchant pas à nuire, plus question de suspendre les comptes. Rappelons que Meta avait banni Donald Trump de Facebook et Instagram en 2021. Le 25 mars, ils nous ont même dit une chose que je ne croyais jamais entendre de leur part : « Ce n’est pas à Meta de dire ce qui est vrai ou pas. »
Il est multifactoriel : les intérêts économiques bien compris de Meta, mais aussi son image fâcheuse de « censeur en chef » qu’il fallait changer, et puis, probablement, ses dirigeants ont-ils analysé les types de contenus partagés publiquement sur leurs plateformes. Peut-être même ont-ils fait une étude similaire de ce qu’on appelle le « Dark Social ».
Le « Dark Social » ? De quoi s’agit-il ?
C’est l’ensemble des échanges privés qui ont lieu sur les plateformes numériques.
Est-ce ce que l’on appelle aussi le « Dark Web » ?
Non, pas du tout, c’est un faux-ami. Le « Dark Web » correspond à une partie d’internet que vous ne trouverez pas via votre moteur de recherche. Il est souvent considéré comme le terrain des mafias, des pédophiles et des terroristes. Alors que le « Dark Social » est tout à fait légal. Si vous partagez par exemple, sur un groupe WhatsApp avec vos amis, une interview d’Éric Zemmour qui vous a plu, vous êtes sur le « Dark Social », en ce sens que vous communiquez sur une plateforme (WhatsApp en l’occurrence, qui appartient à Meta), mais sans que cela soit public. Or les internautes font de plus en plus circuler les contenus politiques sur le « Dark Social ».
Pourquoi ?
D’abord parce que ce type d’outils de messagerie s’est multiplié et amélioré… et parce que les internautes ne supportent plus d’avoir à se soumettre à l’autorisation de pseudo-chevaliers blancs du wokisme. Les équipes de Meta ont fini par comprendre que leurs pertes d’audience provenaient de ce phénomène. En arrêtant le « fact-checking », Mark Zuckerberg a pris une décision de bon sens pour enrayer son déclin, rejoignant en cela Elon Musk, qui l’avait déjà prise dès son rachat de Twitter en 2022.
Mais si les réseaux sociaux deviennent des espaces anarchiques, n’est-ce pas dangereux ?
Twitter et maintenant Facebook ne sont pas sans contrôle. Les internautes peuvent rajouter des « notes de communauté » pour corriger les contenus factuellement erronés.
Vous qui vous servez quotidiennement de Twitter – appelé désormais X –, avez-vous vu concrètement ce changement ?
Oui, c’est très net. Avant le rachat par Elon Musk, il était fréquent que des publications établissant un lien entre l’immigration et l’insécurité soient supprimées. Depuis, plus rien.
Les adversaires de Musk, notamment à la Commission de Bruxelles, soupçonnent l’algorithme de X de valoriser désormais davantage les contenus de droite. Est-ce crédible ?
Ma conviction, c’est que, si les contenus de droite rencontrent sur X plus de succès que ceux de gauche, c’est d’abord la preuve que la droite a gagné la bataille culturelle.
Les journalistes sont-ils toujours neutres et objectifs ? Au LA Times, c’est l’IA qui va trancher
Pendant que dans les gazettes du monde entier, les plus fins esprits s’inquiètent de savoir si l’IA ne serait pas un brin woke ou un poil facho, certains pensent encore que les journalistes ont le pouvoir d’influer sur la marche du monde par leurs écrits. Malgré la signature de la charte déontologique de Munich, malgré les dénégations répétées et toutes les assurances données par les médias d’information quant à leur neutralité et leur rigueur, d’aucuns estiment qu’il leur arrive toujours d’être partiaux ! C’est le cas du milliardaire américain Patrick Soon-Shiong. Après avoir fait fortune dans les biotechnologies, il a racheté le Los Angeles Times en 2018 pour un demi-milliard de dollars. Pour s’attirer les bonnes grâces de Donald Trump, le magnat a refusé que son journal apporte son soutien à Kamala Harris l’année dernière, ce que souhaitait pourtant son comité éditorial. 20 000 lecteurs résilient alors leur abonnement. À présent, le fortuné propriétaire entend mesurer la partialité de ses journalistes en affichant un baromètre de l’objectivité (« bias meter ») sur chaque article du journal. « Nous voulons être une source d’information modérée et digne de confiance. La seule façon de survivre est de ne pas être la caisse de résonance d’un seul camp », se justifie le patron de ce titre réputé progressiste jusqu’alors. C’est à l’IA, une activité investie par ailleurs par M. Soon-Shiong, que sera confié cet affichage des biais des sources. Évidemment, les journalistes se sentent insultés. « Tous les membres du journal respectent les règles de déontologie qui exigent équité, rigueur et vigilance vis-à-vis des préjugés », s’est indigné leur syndicat professionnel dans un communiqué. Et au-delà de ces jérémiades prévisibles, il faut bien reconnaître que personne ne sait vraiment qui pourra garantir que le fameux baromètre est lui-même libre de tout biais… Quand nous bouclions notre propre journal, le dispositif n’était pas encore déployé sur le site. Et il n’était pas certain que lire le journal soit alors la priorité des Angelenos qui regardaient les incendies reprendre autour de leur ville sur leurs écrans de télévision.
Depuis maintenant plusieurs années, notre Première dame est victime de rumeurs infamantes. À son époque, Madame Pompidou avait également été la cible d’infox
Depuis quelques mois, je suis inondé de petites vidéos censées prouver que Madame Emmanuel Macron, née Brigitte Trogneux, actuelle femme du président de la République, serait un homme. Ce genre de farce n’est pas nouveau. Dans les années 60, une rumeur persistante prétendait que Sheila aussi était un homme. Jadis, sous Louis XV, des bruits couraient selon lesquels le chevalier d’Éon était une femme. Précisons que dans ce dernier cas, le canular était l’œuvre du chevalier lui-même qui voulait se moquer de ceux qu’ils l’avaient mis en disgrâce. Charles d’Éon avait poussé le bouchon jusqu’à se déguiser en femme pour accréditer la rumeur tout en se moquant de ceux qui la propageaient. Madame Macron serait un homme ? Ah, la belle affaire, et il y en a qui prétendent aussi que la grande Zoa, ce serait un homme… Étant grand amateur de canulars, de travestissements, de bouffonnades et d’escobarderies, je ne blâme jamais les faiseurs de bonnes blagues dans la tradition carnavalesque et rigolarde bien française. En revanche, je m’interroge sur la santé mentale des naïfs qui prennent au sérieux la rumeur au sujet de la femme du président de la République. Il paraît même qu’une influenceuse américaine s’y est mise… Depuis quand laisse-t-on les Américains nous piquer nos blagues ?
Sans vraiment croire à ce canular, je pense que ses diffuseurs souhaitent évidemment nuire au président bien plus qu’à sa femme. Pour eux, la fin justifie les moyens. Ces détracteurs du président Macron emploieront tous les moyens, même les plus avilissants, pour l’atteindre. Ayant publié un livre intitulé Le Procès de Jupiter (Éditions bouquins de Synthèse) que je recommande, on ne peut pas me soupçonner de complaisance envers Emmanuel Macron, mais je fais la distinction entre l’homme et sa politique, entre lui et sa femme. Je m’autorise volontiers le pamphlet, l’instruction à charge contre la politique du Chef de l’État, mais jamais je ne mettrai en cause sa conjointe. Il y a assez de reproches à faire à son mari président pour épargner sa femme. Quant à ceux qui croient vraiment aux billevesées déversées au sujet du sexe de Madame, je leur conseille de consulter les archives à propos de Madame Pompidou et d’appliquer le neuvième commandement. J’ai même envie de leur dire que si c’était vrai, cela ne changerait en rien mon attitude vis-à-vis du couple présidentiel. Deux dernières choses : Sheila, de son vrai nom Annie Chancel, a accouché d’un garçon en avril 1975. Et pour ce qui est de la grande Zoa, on n’a jamais su qui elle était vraiment, car elle fut mangée crue par son boa.
Avec Alain Destexhe, Gil Mihaely et Jeremy Stubbs.
Alain Destexhe, médecin, ancien secrétaire-général de Médecins sans frontières, sénateur honoraire belge et contributeur à Causeur, ainsi qu’à d’autres journaux, vient de publier Mayotte: comment l’immigration détruit une société (aux éditions Texquis). Il livre un témoignage direct sur ce qu’il a trouvé sur cette île qui est un Département français, et analyse les effets sur la société mahoraise de l’immigration de masse en provenance des Comores et même du continent africain. Malgré de grands investissements notamment dans des projets d’infrastructure, l’Etat français semble démuni face à ces flux migratoires qui sont motivés par des besoins économiques plutôt que politiques.
Gil Mihaely nous aide à comprendre en quoi les intérêts vitaux de la France sont engagés par cette crise dans l’Océan Indien et à situer ce qui arrive dans le contexte géopolitique de la rivalité avec d’autres puissances comme la Chine.
Lors d’une conférence de presse dans le Bureau ovale le 11 février, le jeune «Lil X», fils d’Elon Musk, a volé la vedette en grimpant sur les épaules de son père et en lui mettant les doigts dans les oreilles, provoquant l’amusement général. Cette scène a suscité des réactions variées, certains saluant la spontanéité de l’enfant, d’autres estimant qu’il n’avait rien à faire là…
Les quatre lettres, le signe et le chiffre en titre ci-dessus ne forment pas l’énoncé d’une improbable équation. Il s’agit tout simplement du nom qu’Elon Musk a donné à son fils. Le chiffre 12 en fin d’énoncé est sans doute là pour indiquer que le bambin – quatre ans – porte le dossard numéro douze ; l’industrieux, vibrionnant, dérangeant, archi-déconnant et archi-milliardaire ayant à ce jour douze enfants, de trois mères différentes. Oui, prenons la précaution de préciser « à ce jour » car, comme dans le domaine de la fusée malicieuse s’en revenant dans les bras de sa tour de lancement après une escapade dans l’espace, ou celui de la captation de pépites entreprenariales à grands coups de milliards, l’homme n’a peut-être pas dit son dernier mot non plus dans le registre de la paternité.
J’ignore si un tel nom sera difficile à porter pour le gamin à l’école et dans sa vie future. « X Æ A-12, dis-moi que tu m’aimes ! » n’est pas, en effet, à première approche, d’un romantisme formidable.
En le prononçant, on a l’impression de se retrouver dans les pages d’une b.d. de science-fiction des années 1980-1990 où les martiens, visiteurs de l’espace genre « Soupe au Chou », portaient ce type de matricule en guise de blase. De là à subodorer que les martiens seraient d’ores et déjà parmi nous et qu’un de leurs représentants ne serait autre que le très déroutant, le très déjanté Elon Musk, il n’y a qu’un pas que je me sens parfois tout au bord de franchir.
Ils se trouvaient l’autre jour tous les deux, l’enfant et le père, dans le bureau ovale de la Maison-Blanche aux côtés du président Trump, quant à lui conventionnement installé à sa table de travail. Le petit Musk sur les épaules du papa Musk, pour une conférence de presse. Atypique, cela va de soi. Papa Musk debout, donc, casquette « Make America Great again » vissée sur la tête, tenue décontractée, comme s’il était là de passage pour boire un soda (avec paille) en compagnie de son copain Donald au retour de la promenade du petit au Lafayette Square.
Atypique dans la forme, bien évidemment, nous venons de le voir. Mais atypique surtout en cela que, avec ces deux extravagants, bien malin le journaliste qui pourrait prédire ce qui va sortir de leurs bouches, de leurs cerveaux eux-mêmes des plus atypiques. À cet égard, deux phrases lâchées par Musk : « Nous allons vite, donc nous faisons des erreurs mais nous corrigerons ces erreurs rapidement », et celle-ci, plus sidérante encore : « Certaines des choses que je vais dire seront fausses et devront être corrigées. »
Deux phrases qui sont l’expression même d’une manière toute nouvelle d’appréhender la politique et le discours politique. Annoncer les erreurs avant même de les avoir commises et les mensonges avant même de les avoir proférés n’est certes pas une pratique à laquelle nos politiciens conventionnels nous ont accoutumés. Leurs erreurs, ils ne les reconnaissent jamais, au grand jamais, non plus que leurs mensonges. Pour ma part, je ne sais pas si le X Æ A-12 et son papa iront un jour sur Mars, mais, je le répète, ces gens-là me donnent parfois l’impression bizarre d’en être tombé tout droit.
La France veut interdire les PFAS (“polluants éternels”) avant même l’Europe, au nom du principe de précaution. Mais cette surenchère écologique risque surtout de pénaliser ses propres industries, sans impact réel sur la pollution. Une victoire symbolique aux conséquences bien réelles.
La France aime se faire peur, surtout quand il s’agit d’afficher sa vertu écologique en prenant de vitesse Bruxelles. La dernière illustration de cette tendance ? La « Loi Générations Futures », une proposition de loi (PPL) visant à interdire les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), ces fameux « polluants éternels » que certains voudraient voir disparaître du paysage industriel au nom d’une précaution sans nuance. Adoptée par la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, cette PPL entend aller bien au-delà des régulations européennes en vigueur. Mais cette fronde environnementale repose-t-elle sur une base scientifique solide, ou est-elle avant tout une démonstration de force idéologique ?
Les PFAS ne sont pas tombées du ciel. Depuis les années 1950, ces composés ont révolutionné de nombreux secteurs grâce à leurs propriétés exceptionnelles de résistance à l’eau, aux graisses et aux températures élevées. Qu’il s’agisse de textiles imperméables, de revêtements antiadhésifs, de dispositifs médicaux, ou même de batteries pour véhicules électriques, ils sont omniprésents dans notre quotidien. Mais voilà : leur stabilité a également un revers, celui de leur persistance dans l’environnement. Suffisant pour les jeter tous dans le même sac et en prononcer l’excommunication ?
Une réglementation qui devance Bruxelles
La communauté scientifique, pourtant loin d’être un repaire de lobbyistes de la chimie, rappelle que les PFAS ne forment pas un bloc monolithique. Si certains, comme le PFOA ou le PFOS, sont réellement toxiques et font déjà l’objet de régulations strictes, d’autres sont considérés comme stables et non dangereux. Mais la « Loi Générations Futures » semble peu s’embarrasser de ces nuances. Ce qui compte, c’est d’afficher un volontarisme réglementaire qui flattera certaines ONG et fera office de victoire symbolique contre le « lobby industriel ».
Le problème, c’est que la France joue ici en solo. L’Union européenne, via le règlement REACH, a déjà encadré l’usage des PFAS, avec des interdictions ciblées et des exemptions pour les secteurs où ils restent indispensables. Mais Paris veut faire mieux que Bruxelles : anticiper la future interdiction européenne généralisée (actuellement en discussion), quitte à s’en prendre à des substances qui ne sont ni toxiques ni dangereuses.
Or, cette croisade législative pourrait bien tourner au sabotage économique. En interdisant unilatéralement les PFAS dans l’habillement, les cosmétiques et les textiles imperméabilisants, la France met en difficulté ses propres entreprises, sans que les importations soient soumises aux mêmes contraintes ! Autrement dit, elle se crée une concurrence déloyale au profit de pays qui, eux, ne se gêneront pas pour continuer à produire et exporter ces mêmes substances sur notre marché. On marche sur la tête.
Derrière cette proposition de loi, on retrouve le député Nicolas Thierry (EELV), ardent défenseur de l’interdiction totale. L’argument avancé ? Une réduction de l’exposition aux PFAS et donc, une amélioration de la santé publique. L’intention est louable, mais la méthode prête à discussion.
L’OMS et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont certes identifié certains PFAS comme étant à surveiller, en raison de leurs effets potentiels sur le système hormonal et le risque accru de cancers. Dans d’autres cas de figure le problème (à l’environnement) se pose au moment du recyclage et non pas à l’usage domestique normal. Mais la réponse réglementaire doit-elle être la bétonnière aveugle ou la pince chirurgicale ? Faut-il interdire tous les PFAS sans distinction, alors que la science elle-même reconnaît que certains ne présentent pas de danger avéré ?
Une victoire symbolique, mais à quel prix ?
Le principe de précaution est devenu en France une arme de démolition massive. Qui cible évidemment les entreprises et donc les emplois français à l’exclusion de tout le reste. Quand on sait que SHEIN est le site marchand numéro 1 en France avec 23 millions de clients, et que les produits vendus par SHEIN ne se soumettront pas aux règles que cette proposition de loi va imposer aux industriels français… même chose pour Temu ou AliExpress, et toutes les solderies et hypermarchés français largement alimentés en produits, vêtements, ustensiles de cuisine, venus « d’ailleurs » et nettement moins chers que les produits français ! On sait pourquoi.
La peur du risque l’emporte sur l’analyse rationnelle, et toute nuance est balayée au nom d’une vision simpliste du bien et du mal. Résultat : des industries fragilisées, une réglementation qui va plus loin que l’Europe sans que personne ne prenne le temps d’en mesurer les effets concrets, et au final, une politique qui fait plus pour l’affichage que pour l’intérêt général.
Interdire les PFAS en France ne signifie pas qu’ils vont disparaître de la circulation. Les importations continueront, la pollution restera globale, et les industries devront s’adapter avec des alternatives qui ne sont pas toujours disponibles ni aussi efficaces.
Plutôt qu’une interdiction brutale et idéologique, une approche graduelle et scientifiquement fondée aurait été préférable. Mais la France préfère jouer les premiers de la classe, quitte à tirer contre son propre camp. La « Loi Générations Futures » se présente comme un acte de bravoure politique, mais son impact réel sur la pollution sera marginal, tandis que ses conséquences économiques risquent d’être bien plus tangibles. Une victoire à la Pyrrhus ? Il y a fort à parier que d’ici quelques années, les mêmes qui félicitent aujourd’hui cette interdiction déploreront l’effondrement de certains secteurs industriels sous le poids d’une réglementation déconnectée des réalités.
Elias, 14 ans, n’est jamais rentré de son entrainement de foot. Il décédait le 25 janvier après une agression au couteau dans le 14e arrondissement de Paris. Dans une lettre, ses parents estiment qu’il ne s’agit en rien d’un fait divers et en disent plus sur l’arme du crime passée sous silence par les institutions et les médias.
« Elias aurait dû avoir 15 ans le 14 février 2025… Elias n’aura jamais 15 ans »
Voilà comment commence la lettre que les parents d’Elias ont rédigée. Et dès le premier mot, elle nous arrache le cœur. Vous avez vu comme moi la photo d’Elias, ce jeune adolescent de 14 ans tué par deux voyous guère plus âgés qui voulaient lui voler son téléphone portable alors qu’il rentrait d’un entrainement sportif. Ce jeune garçon ressemble tellement à tous les enfants de cet âge, à nos enfants au même âge. Il en a la coupe de cheveux, les attitudes et cette beauté en devenir du jeune caneton qui se transforme en cygne. Il ressemble à mes enfants et à leurs amis. Il a l’air tellement vivant sur les photos qui tournent sur les réseaux sociaux que la première fois que j’ai découvert son visage, j’ai souri devant ce bel enfant et puis j’ai vu son nom. Elias n’aura jamais 15 ans et cela devrait tous nous donner envie de hurler.
J’ai lu la lettre des parents d’Elias. Elle est digne et lucide. Mais chaque mot fait mal, tellement elle nous renvoie à notre détresse collective et à un sentiment d’abandon profond. Mais surtout elle parle d’un mensonge. D’un mensonge voulu, choisi, délibéré, un mensonge auquel ont participé la presse, les institutions, l’AFP.
Une censure bizarre
Car que nous apprend la lettre des parents d’Elias ? la vérité sur sa mort et sur les circonstances de cette mort et les véritables armes que portaient ses agresseurs. Ils n’avaient pas de simples couteaux, mais une machette et une hachette. Qui se promène en ville, à Paris avec une machette ? On n’est pas en forêt ou dans la brousse et l’utilité de l’arme est difficilement justifiable.
Mais pourquoi certains politiques comme la plupart de nos journalistes ont voulu cacher ce fait ? Pourquoi dissimuler que l’arme qui a tué Elias était une machette ? Parce que cette arme renvoie à un autre espace-temps que le nôtre. Parce que c’est une arme frustre et meurtrière. Son utilisation renvoie à l’Afrique, aux îles lointaines, à d’autres cultures, d’autres usages, d’autres mentalités ou d’autres temps. Culturellement, ce n’est pas une arme utilisée dans l’hexagone. La sauvagerie de l’agression d’Elias renvoie de fait à un autre univers mental que l’Europe, à des références où on n’est pas un homme parce que l’on contrôle sa pulsion, mais parce que l’on est capable d’infliger la mort et que l’on fait peur. A une façon d’être au monde où on n’existe que parce qu’on inspire la peur et qu’on inflige la douleur.
Pour autant la censure reste bizarre. Qu’un taré utilise une machette ne veut pas dire que toute personne venant d’Afrique ou des îles a une machette chez lui ou serait un meurtrier potentiel. Voilà qui serait effectivement délirant. Et pourtant c’est ce pas que franchissent allégrement les censeurs en prêtant cette pensée à la population. C’est parce qu’ils estiment que la société française se définit par un racisme systémique en son sein, qu’il faut donc cacher les origines des meurtriers ou leur arme ou la manière dont ils ont tué. Et ce afin que personne ne fasse le lien avec d’autres mœurs et habitus. C’est ainsi que le mot égorgement a disparu de nos journaux. Aujourd’hui on dit coups de couteaux au cou, parce que l’égorgement renvoie trop à la façon de tuer en islam. Pourtant nos concitoyens montrent plutôt une capacité d’encaisser l’effroyable sans chercher la vengeance qui les honore. Curieux qu’une partie de leurs représentants les envisage en racistes dépourvus d’humanité !
Envie de vomir
Mais ce que disent ces mensonges est pire encore : une fois de plus la victime a été abandonnée pour protéger les coupables. L’injustice qui est faite à la victime a été choisie et délibérée et cela dit à quel point elle ne compte pas. Ces mensonges sont une violence portée à la mémoire d’Elias et au chagrin de sa famille. Car l’histoire ne s’arrête pas là : contrairement à ce qui a été écrit, Elias n’a jamais résisté. Terrorisé, il a remis son portable. Mais comme l’indiquent les parents, les deux ados voulaient exercer leur toute puissance et le coup porté à Elias a été tellement violent qu’il a été fatal. Sa description est atroce. Tellement que les parents ont choisi des termes techniques pour l’évoquer, mais quand vous comprenez ce que cela décrit, c’est l’envie de vomir qui vous saisit. L’enfant a été littéralement découpé.
Et la rage vous prend quand vous lisez ces si justes paroles : « Comment deux adolescents armés, interdits de contact entre eux par la Justice, connus défavorablement des services de police et judiciaires pour des faits similaires ont-ils pu en toute impunité poursuivre leurs exactions ? Comment justifier l’appréciation clémente de la justice qui les a laissés placés sous un contrôle judiciaire inapplicable et inappliqué ». S’en suivent d’autres exemples sur l’incroyable légèreté de la justice des mineurs. Toutes les questions posées par les parents méritent réponses, mais une en particulier est incontournable : pourquoi existe-t-il de fausses peines qui ne servent à rien ? Pourquoi condamner des voyous violents et hors de contrôle à un soi-disant « contrôle judiciaire » qui n’est pas adapté à leur niveau de violence et de désocialisation et qui sera vécu comme une plaisanterie ? Les tueurs d’Elias se vantaient d’ailleurs de commettre des infractions pénales à la barbe de cette justice qu’ils voyaient comme faible et stupide. Et qui l’était, car le non-respect de leurs obligations et leurs vantardises n’entrainaient aucune conséquence pour ces délinquants. Vous me direz que les actes délictueux qui les faisaient « connaitre des services de police » n’avaient pas eu grande conséquence non plus. Alors, finalement, un meurtre, ce doit être tolérable dans une société qui accepte à ce point la violence et n’y répond qu’en entassant fleurs, nounours et bougies sur des coins de trottoir à peine lavés du sang répandu.
Oui, les parents d’Elias ont raison. Elias est mort en raison de l’impunité ressentie par deux mineurs pourtant soi-disant pris en charge par la Justice. Elias est mort parce que l’Etat ne parait plus faire de la protection de ses citoyens, sa priorité. Elias est mort parce que notre Justice est aveugle à la réalité de la violence de certains mineurs et refuse de regarder le problème en face. La lettre s’achève par ses mots : « Nous ne demandons pas aux représentants des partis politiques, aux magistrats, de ressusciter les disparus. Nous leur demandons de protéger les vivants. » Des mots que je partage mais qui, j’en ai bien peur, sont destinés à rester lettre morte.
Certes l’Assemblée nationale a adopté une petite réforme de l’ordonnance sur les mineurs, mais celle-ci ne répond qu’à quelques questions et n’a rien d’une loi exprimant la prise de conscience de la réalité de la montée de la sauvagerie dans une certaine jeunesse. Elle passe à côté de choses essentielles. Et cela devient pénible de voir des politiques faire de la communication pour mettre en scène leur fermeté alors que, quand ils trempotent à peine un orteil dans le courant et le retirent un peu froid, ils essaient de faire croire qu’ils ont franchi le Rubicon. La proposition de loi Attal n’est pas à la hauteur des enjeux mais elle va servir de prétexte pour ne rien faire, parce qu’elle aura eu lieu et qu’on ne va pas revenir tout le temps sur le dossier. Un argument souvent entendu sur le terrorisme, alors qu’il dit juste que, lorsqu’on est trop lâche pour prendre la mesure d’une situation et qu’on fait des lois uniquement pour permettre à un politique de prendre une posture, il faut souvent remettre l’ouvrage sur le métier. Quand la protection des Français nourrira plus la réflexion que les perspectives de carrière d’un ministre, nos lois tiendront davantage la route et seront plus pérennes. Et pourtant il va bien falloir s’attaquer au problème. Parce qu’Elias c’est le mort de trop et pourtant nous savons tous que ce n’est et ne sera pas le dernier.
Aux Etats-Unis, les Américains découvrent avec stupeur les sommes allouées par l’USAID à des causes parfois farfelues. En France, le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici n’a pas le pouvoir d’un Musk pour tailler dans les dépenses publiques…
Le Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) dirigé par Elon Musk est chargé de l’audit des agences gouvernementales américaines. Son objectif : vérifier qu’argent et personnel sont employés judicieusement, sans gaspillage, sans corruption, en tenant strictement compte des missions définies pour chacune d’entre elles. Ce qu’a découvert le DOGE à propos de l’USAID relève, pour les Américains, d’un véritable scandale. Ils n’en croient pas leurs yeux. Ils savaient, bien sûr, que le deep state – cette nébuleuse techno-structure bureaucratique composée d’une myriade d’agences pseudo-indépendantes – leur coûtait cher et avait de nombreux tentacules. Mais les révélations sur l’USAID, l’agence d’aide au développement au budget annuel d’environ 50 milliards de dollars, les laissent pantois. Plutôt que d’être une agence pour le développement international, il s’avère qu’elle était surtout une agence pour développer l’influence américaine à l’étranger et imposer une certaine idée de la « démocratie » ainsi que les théories progressistes et wokes. Son démantèlement va affecter des centaines d’ONG, de médias, d’associations, aux États-Unis, à l’étranger, en France. D’où la panique qui secoue certains milieux « indépendants ».
Nébuleuses influences
Sur Sud Radio, André Bercoff n’en est pas revenu, lui non plus. Consterné, il a passé en revue certains « engagements humanitaires » de l’USAID : soutien au développement des véhicules électriques au Viet-Nam, financement d’une clinique transgenre en Inde, subvention de 1,5 million de dollars à une association LGBT serbe, deux millions de dollars pour aider aux opérations chirurgicales de changement de sexe au Guatemala, 4,5 millions de dollars pour lutter contre la désinformation au Kazakhstan, 1,5 million de dollars pour promouvoir les mouvements LGBT en Jamaïque, etc. La Fondation Bill et Melinda Gates aurait bénéficié d’une subvention de l’USAID à hauteur de 5 millards de dollars. Des agences de presse comme Reuters, la BBC ou l’AFP, et des milliers de médias auraient reçu des subsides de l’agence gouvernementale américaine. Politico, média archi-progressiste, pro-démocrate et furieusement anti-Trump, a annoncé de grandes difficultés financières à venir à la suite de la fermeture de l’USAID, un de ses principaux donateurs. Des mouvements atlantistes et des fondations « philanthropiques » auraient profité des largesses de l’USAID pour fomenter ou influencer différentes « révolutions » de couleur (orange en Ukraine, rose en Géorgie, etc.) – c’est ce qu’auraient révélé différents mails et dossiers de l’organisation « humanitaire » qui remontent à la surface du web grâce aux investigations du DOGE. Par ailleurs, des versements d’argent opérés par différentes instances gouvernementales, dont l’USAID, n’ont « aucun code de catégorisation du paiement » – en clair, l’administration ignore pour le compte de qui, individu ou organisation, ils ont été effectués. Des comptables du Trésor américain évaluent à 50 milliards de dollars par an le montant des prestations frauduleuses. Il n’est pas impossible que des organisations terroristes islamistes aient reçu, via ces paiements anonymisés, de l’argent public américain. Le gouvernement a limogé la quasi-totalité des employés de l’USAID pour ne garder que les trois cents qui gèrent les dossiers strictement humanitaires et sanitaires. Tout ce qui relève d’une ingérence directe ou indirecte dans les médias, de la propagation du wokisme ou de toute autre activité l’éloignant de sa mission originelle, se verra financièrement asséché, a annoncé Donald Trump. Les économies ainsi réalisées devraient se compter en milliards de dollars.
Bien entendu, ça râle du côté des progressistes, surtout ceux qui avaient tout intérêt à ce que les malversations de l’USAID n’émergent pas des abysses bureaucratiques. Des médias et des ONG se lamentent. Sur France Inter, Patrick Cohen se fend d’un éditorial furibond contre ce « dictateur » d’Elon Musk et compare l’usage de l’IA par le DOGE à la surveillance numérique made in China. Il s’interroge – « Qui peut garantir que les informations collectées ne seront pas utilisées contre des opposants, comme dans tout régime autoritaire ? » – et feint d’ignorer les pratiques de surveillance de masse initiées de longue date par la National Security Agency (NSA). Edward Snowden n’a pas attendu l’IA pour révéler, en 2013, le programme PRISM permettant à la NSA d’accéder aux communications téléphoniques et numériques de n’importe qui dans le monde – Angela Merkel et Nicolas Sarkozy apprirent ainsi que leurs conversations étaient écoutées par les grandes oreilles de l’Oncle Sam depuis des mois. Patrick Cohen n’a traité personne de dictateur à l’époque. Il faut dire que les États-Unis d’Amérique étaient alors dirigés par le démocrate Barack Obama, donc… pas touche ! Sous la présidence de Joe Biden, Le Sénat a approuvé la prolongation de la loi FISA (Foreign Intelligence Surveillance Act) et étendu les pouvoirs d’espionnage du FBI, de la CIA et de la NSA sur les citoyens américains et non-américains par le biais des communications privées (messageries, réseaux sociaux, téléphonie, etc.) dans tous les pays du monde – je ne me souviens pas d’avoir entendu Patrick Cohen dénoncer un « putsch numérique », des méthodes pouvant « asseoir des dictateurs et des fascistes » ou des « ingérences » douteuses dans les démocraties occidentales. Enfin, on s’étonne que le journaliste france-intérien ne soit pas effaré, et encore moins scandalisé, par le fait que cette agence « humanitaire » américaine ait subventionné autant de médias européens dits indépendants.
6200 journalistes et 700 médias à travers le monde ont en effet, semble-t-il, été arrosés par l’USAID. En Ukraine, par exemple, l’agence est la première contributrice des aides internationales finançant 9 médias sur 10. L’ONG Reporters sans frontières, qui n’a jamais craint de dénoncer « les ingérences étrangères dans le domaine de l’information » quand elle pensait y voir la main des Russes, s’apitoie sur le sort des « médias indépendants » dont le financement était assuré par l’agence américaine. Sur CNews, Mathieu Bock-Côté, après avoir avoué sa surprise en apprenant que l’USAID avait financé un programme promouvant… l’égalité de genre dans l’armée jordanienne, résume la situation : « On nous dit donc que la presse libre et indépendante est compromise par la fin du financement américain – donc le financement américain, c’est la garantie qu’il n’y a pas de biais idéologique !?! C’est lunaire ! Je crois qu’on nous prend vraiment pour des idiots. » Je le crois aussi…
Du côté des ONG, le coup est rude. Le gel des crédits de l’USAID « aura réellement des conséquences vitales, voire mortelles, pour des millions de personnes », affirme solennellement Daryl Grisgraber, en charge des questions humanitaires pour la branche américaine d’Oxfam – la branche française étant dirigée, rappelons-le, par Cécile Duflot. De nombreuses ONG ont transmis à la presse de longues déclarations pour sensibiliser sur les « conséquences dramatiques » de la décision du gouvernement américain mais se montrent moins diserts quand il s’agit de communiquer le montant des subventions de l’USAID qu’elles reçoivent depuis des années et la répartition réelle de leur utilisation : projets, programmes en cours, bureaux, emplois, salaires, etc. C’est pourtant sur ces différents critères que l’administration Trump décidera de continuer de subvenir ou non aux besoins de telle ou telle ONG.
L’efficacité de France Travail questionnée
Ce n’est pas seulement pour réduire les coûts publics que le DOGE a été créé, mais c’est également pour vérifier que l’argent débloqué est utilisé aux seules fins annoncées dans les statuts officiels des différents agences gouvernementales – l’aide humanitaire et l’aide au développement, dans le cas de l’USAID. De plus, le DOGE d’Elon Musk a promis de combattre la surcharge techno-bureaucratique des différentes branches de l’administration américaine, source de dépenses inutiles et d’inefficacité, et de faire en sorte que ces services servent au mieux les citoyens américains sans leur coûter plus que ce qui est strictement nécessaire à leur bon fonctionnement. Si nous avions l’équivalent d’un DOGE en France, sans doute serait-il en train de se pencher sur le cas, par exemple, de France Travail (ex-Pôle Emploi). L’enquête de l’eurodéputée Sarah Knafo révèle en effet un véritable scandale que les médias mainstream se gardent bien de relayer : 43 milliards d’euros de budget, 54 500 employés, pour seulement 12,9 % de chômeurs retrouvant du travail grâce à cette institution publique ; des salaires de cadres atteignant 14 000 euros par mois tandis que les conseillers chargés de suivre les chômeurs plafonnent entre 1700 et 2100 euros mensuels ; une cérémonie pour célébrer la signature de 40 contrats de travail coûtant plus de 300 000 euros. Comme si cela ne suffisait pas, l’enquête de Sarah Knafo nous apprend que France Travail a dépensé en une seule année 1,2 milliard d’euros pour sous-traiter certaines de ses missions à des prestataires privés – formation des conseillers, accompagnement des chômeurs, évaluations professionnelles, etc. – alors que ces tâches auraient pu être assurées en interne. Cette enquête confirme également un mal récurrent dans l’administration française, administration qui accueille, recycle ou recase les représentants d’une caste politique qui n’a pas l’intention de céder sa place. Thibault Guilluy s’est présenté aux législatives de 2017 sous l’étiquette LREM dans la circonscription d’Emmanuel Macron, la 4ème du Pas-de-Calais. Sa suppléante était Tiphaine Auzière, l’une des filles de Brigitte Macron. Ça créé des liens. Après avoir passé, histoire de se faire la main sur le plan de l’inefficacité théodulaire, trois années dans les bureaux du Haut-commissariat à l’Emploi et à l’Engagement des entreprises, M. Guilluy a été nommé directeur général de France Travail. Son salaire n’est pas communiqué – le dernier salaire connu est celui du DG de Pôle Emploi en 2009 : 20 000 euros par mois ! En 2020, notre DOGE à nous, la Cour des comptes, a fait les gros yeux en soulignant l’inefficacité de Pôle emploi, une « hausse importante des effectifs » en son sein, une « perte importante du potentiel de travail » et un « statut particulièrement favorable pour les cadres dirigeants » – en clair, trop de personnel et des cadres dirigeants surpayés pour des résultats plus que médiocres. Et puis ? Et puis rien. Pierre Moscovici n’est pas Elon Musk. La grosse machine administrative continue donc de nous coûter une blinde et d’être d’une inefficacité totale. Encore n’avons-nous évoqué ici qu’un seul des nombreux dispositifs techno-administratifs qui plombent nos finances publiques. Rien ne change. Et rien ne changera. Comme l’a souligné Ivan Rioufol dans sa dernière chronique, que ce soit pour réduire les dépenses publiques, freiner l’immigration ou lutter contre l’insécurité, nos responsables politiques parlent beaucoup mais ne font pas grand-chose, « aucun acte ne suivra, tant que cette caste, bavarde et inutile, s’accrochera à ses pouvoirs ». Que voulez-vous qui change dans un pays où il est apparemment prévu que le macrono-socialiste Richard Ferrand succède au socialo-macroniste Laurent Fabius au Conseil constitutionnel ?
Aurore Bergé prononce un discours aux Assises nationales sur l'antisémitisme, Maison de la Radio, Paris, 13 février 2025. DR.
Ce jeudi 13 février 2025, se tenaient à la Maison de la Radio, les « Assises de la lutte contre l’antisémitisme », relancées sous la houlette de la courageuse Aurore Bergé, ministre de l’Egalité et de la lutte contre les discriminations.
La ministre a ouvert les débats avec conviction en présence de la ministre de l’Education nationale Elisabeth Borne qui lui a succédé sur le podium puisque la thématique de ces assises était « la question de l’antisémitisme dans le milieu scolaire et dans l’enseignement supérieur et la qualification de l’antisémitisme dans ses nouvelles formes. »
Aurore Bergé : « On ne les entend pas suffisamment, celles et ceux qui, aujourd’hui, parce qu’ils sont juifs et qu’ils sont en France, subissent cet antisémitisme et ce sentiment de solitude. Ils se sentent seuls à vivre l’antisémitisme. Ils disent que l’on ne s’assoit plus à côté de moi dans un amphi, on ne veut plus faire un TD avec moi. Pourquoi ? Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Je suis juif. Qu’est-ce-ce qu’il s’est passé pour qu’on laisse seuls ces enfants, ces adolescents face à cette vague d’antisémitisme ? C’est absolument inacceptable et intolérable. »
Face à une salle pleine, des jeunes élèves et des étudiants sont venus « livrer leurs expériences et leur vision de l’avenir face à l’ampleur de ce fléau dans notre société ».
De « grands témoins » sont ensuite montés sur scène : l’avocate Muriel Ouaknine-Melki, le recteur délégué pour l’enseignement supérieur de la région académique Occitanie Khaled Bouabdallah et l’historienne Marie-Anne Matard-Bonucci.
Lutter contre l’antisémitisme par l’éducation, c’est bien mais ne manque-t-il pas un élément essentiel dans ce combat ?
Sont-ce les lacunes de l’Education nationale qui nourrissent l’antisémitisme en 2025 ou sont-ce les mensonges déversés par certains médias contre Israël qui le font exploser ?
Comme c’est étrange de chercher à lutter contre l’antisémitisme dans le temple de la propagande wokiste – la Maison de la Radio – qui propage la haine d’Israël sur ses ondes du matin au soir. Tout comme l’AFP et France 5, France Inter et France Info falsifient quotidiennement l’information concernant le Proche-Orient pour accabler Israël, et par voie de conséquence mettre en danger les juifs de France qui y sont assimilés.
Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine en février 2022, le gouvernement français n’a pas tremblé quand il a fallu bannir RT France, la chaîne gouvernementale russe.
Bizarrement, rien n’a jamais été entrepris contre la chaîne qatarie pro Hamas Al Jazeera… alors que même l’Autorité Palestinienne l’a bannie.
Et si pour lutter contre l’antisémitisme, le gouvernement commençait par assainir l’espace médiatique, étatique mais aussi étranger accessible sur le territoire français ?
L’Arcom a condamné C8 à 3,5 millions d’euros d’amende pour avoir insulté Louis Boyard et même fait fermer cette chaîne. Pourtant, cette autorité « indépendante » ne trouve rien à redire quand Israël est traité sur certaines chaînes d’info et sur celles du service public « d’état génocidaire », de « pays d’apartheid » ou de commettre des « crimes contre l’humanité ».
Pour l’Arcom, il vaut donc beaucoup mieux diffamer Israël – et mettre en danger les juifs de France – qu’insulter un député d’un parti d’extrême gauche.
Lors de ces assises, un thème n’a jamais été abordé ni même prononcé : l’islam, l’islamisme, le djihadisme. Il était pourtant dans toutes les têtes.
Un sac où était écrit en grand « Assises de la lutte contre l’antisémitisme » était offert à tous les participants. J’imagine l’embarras de ceux qui – après avoir entendu ces récits d’antisémitisme au quotidien – ont dû emprunter les transports en commun pour rentrer chez eux. On me dit dans l’oreillette qu’ils ont soigneusement plié le sac dans leur poche pour éviter les ennuis.
En conclusion de ces assises, une campagne publicitaire d’affichage a été dévoilée :
Qui s’est posé la question de l’efficacité ou du potentiel effet contreproductif d’une telle campagne ? C’est ça la France de 2025. Obtenir un changement radical de politique ou quitter le pays. C’est le choix qui s’offre aux juifs de France.
Faire société, c’est un peu plus complexe qu’une simple colocation. Le « vivre-ensemble » est apparu en France quand la République a perdu de sa superbe : un peu comme si, en mal d’idéal collectif, on avait remplacé le grand banquet républicain par un pique-nique où chacun apporte sa morale et pique celle des autres, observent Pierre-Henri Tavoillot et Gil Mihaely dans cet entretien. Et à force de trop inclure, le « vivre-ensemble » risque donc de devenir un « vivre-à-côté ». Comment s’en sortir ?
Causeur. Cette expression de « vivre ensemble » qui fait partie du titre[1] de votre dernier livre nous semble aller de soi… Pourtant, les premières occurrences de cette expression ne datent que des années 1990-1991. Pourquoi les Français ont-ils soudainement ressenti le besoin d’y faire référence ?
Pierre-Henri Tavoillot. En effet, l’expression est apparue dans les années 1990, en même temps que la dévalorisation du mot « République », alors passé de mode. Je la mettrais en lien avec l’émergence du mot « inclusion », qui exprime la même idée de manière ambiguë : soit il s’agit d’intégration (aider un individu à intégrer le collectif), soit, si l’on prend le mot au sens rigoureux du terme — l’inclusion totale de l’individu dans le groupe —, cela implique non seulement d’aider un individu à s’adapter à la société, mais aussi de forcer la société à s’adapter à l’individu. De ce point de vue, cela remet en cause le collectif. Autrement dit, ce qu’on appelle aujourd’hui « société inclusive » est périlleux, car la vie commune devient soumise au veto personnel du moindre individu.
On touche ici à quelque chose de fondamental : l’homme est un animal social. Cette tension entre notre volonté de liberté et notre besoin d’appartenance, est aussi ancienne que la philosophie.
L’homme est un animal social ; seul, il meurt, avec les autres, il tue… La question politique par excellence est donc la suivante : comment vivre avec les autres sans s’entretuer ? Nous avons trouvé des réponses : la morale, le droit, la politique, la civilité, etc. La question qui se pose aujourd’hui est celle des sociétés d’individus — une expression qui peut sembler contradictoire. Les droits individuels, initialement pensés comme des droits en société, sont devenus des droits contre la société. Je reste néanmoins convaincu que cela peut fonctionner. Une société d’individus fonctionne très bien lorsqu’elle parvient à fabriquer des individus (dimension démocratique), qui, à leur tour, fabriquent une société (dimension républicaine).
Depuis des siècles, l’Europe a vu émerger un État puissant, bureaucratique et récemment maternel, qui, avec le capitalisme et l’économie de marché, ont effacé les médiations entre l’individu et l’État. La nation, proposée comme point de ralliement pour unir des millions de citoyens, ne fonctionne plus. Dans ce contexte, quel va être le « ciment » de cette « vie en commun » ?
Précisément parce qu’après trois siècles cette dynamique n’a pas produit l’atomisation qu’on envisageait ! Or en effet pour une bonne part, ça isole, mais pour une autre part, ça reconstruit. La famille par exemple, ne disparaît pas, elle se reconfigure. Autant le lien entre les couples s’est distendu — ce n’est plus le couple qui fait la famille —, autant le rapport à l’enfant, aujourd’hui sacralisé et devenu incroyablement puissant, est structurant pour nos sociétés démocratiques. C’est pourquoi la baisse du nombre d’enfants est, parmi tous les signes, le plus inquiétant à mes yeux. L’intergénérationnel est également un élément central et on observe aussi que les relations entre petits-enfants et grands-parents ont tendance à se renforcer. Là aussi, il y a une reconfiguration du lien. C’est ce que j’ai voulu exprimer dans ce livre : on a raison d’insister sur les signes de déliaison sociale, mais il ne faut pas négliger les signes de reconfiguration du lien.
Autre exemple : les universités populaires, qui sont un trésor français. Le fait que les Français apprécient, le week-end, écouter des intellectuels et des journalistes discuter ensemble, au lieu d’aller au match de foot comme les Anglais ou au concert comme les Allemands, est remarquable. J’interviens souvent dans ces initiatives, et je suis ébahi de leur succès. Les Français ont le goût du débat, lequel a également permis de sortir de la crise des gilets jaunes.
Toutefois, aujourd’hui, le « vivre ensemble » n’est pas évoqué comme remède à la solitude de l’homme moderne dans les grandes villes anonymes ou chez les retraités de la génération baby-boom. Il s’agit plutôt d’une manière de faire face au communautarisme, notamment le séparatisme islamiste.
L’islamisme est un ennemi déclaré : il vise le cœur de notre société, l’école. Il ne s’agit pas ici de « vivre-ensemble », c’est hors de question. L’illusion multiculturaliste consiste à dire que ces personnes sont formidables, qu’elles ne demandent qu’à exprimer leur point de vue, et que nous devons leur laisser de la place. Ce n’est pas vrai. Leur projet est de détruire la société démocratique. Et face à ces ennemis-là, il faut faire la guerre. C’est aussi simple que cela.
Vous avez utilisé le terme « ennemi » et il est intéressant de noter qu’au début des années 1990, au moment même où le terme « vivre ensemble » émerge, la France, pour la première fois de son histoire, se retrouve sans ennemi et donc sans ce ciment puissant de la vie en commun.
Oui, mais aujourd’hui, nous sommes dans une situation différente, car nous avons du mal à comprendre que nous avons de nouveau des ennemis. Nous étions tellement bien installés dans cette logique d’une situation sans ennemis qu’à défaut d’un ennemi extérieur, nous commençons à nous détester. La France devient sexiste, machiste, inégalitaire et islamophobe. Et nous ne voyons pas que nous avons des concurrents, mais aussi de véritables ennemis.
Et si ce qui nous manquait, c’était un bon ennemi ? Les alliances contre un adversaire sont plus faciles que les alliances pour un but commun…
L’ennemi que nous avons aujourd’hui n’est évidemment pas assez puissant pour nous détruire. Il n’y arrivera pas. Le fondamentalisme n’est pas assez fort, mais il crée les conditions d’une déstabilisation profonde. L’islamisme représente aujourd’hui un danger pour nos écoles. La plupart des gens n’en ont aucune idée. C’est un ennemi qui demande un effort d’interprétation, et une bonne partie des élites de notre pays n’y est pas confrontée directement. Il faut se forcer à aller voir ce qui se passe dans un lycée pour comprendre qu’il y a un problème important. Ce n’est pas l’offensive de la Somme, ce n’est pas l’attaque, même fantasmée, des chars russes. C’est beaucoup plus sournois.
Cet ennemi n’offre-t-il pas exactement ce qui manque chez nous ? L’enfant qui défie un professeur s’appuie sur une autorité claire, des vérités, des appartenances, des rituels dont il est fier. Et les adultes autour de lui sont insérés dans un système social dense qui sert de cadre de vie puissant et rassurant ainsi que des réponses claires et simples à des questions fondamentales à commencer par qui je suis et à quoi sert mon existence.
C’est cela ! Il faut reconnaître la puissance de séduction de l’islamisme. Il répond à toutes les angoisses de l’individu : la solitude, l’indétermination, les problèmes d’orientation, les rapports humains. Tocqueville avait déjà pressenti cela. Il explique que la liberté est tellement exigeante et difficile à assumer — car elle implique de nombreux devoirs — que l’individu finit par en être fatigué.
Il se repose alors dans le grand tout : la communauté, la nature. La démocratie en Amérique de Tocqueville est extraordinaire, car il parle de la lassitude de l’individu démocratique. Face à l’incertitude qui pèse sur nos vies, deux réactions sont possibles : la tentation du repli ou la séduction du conflit. Ce sont les deux manières de renoncer à vivre ensemble.
C’est aussi une question de contenu positif pour un cadre commun. Depuis les guerres de religion, l’histoire politique de la France est marquée par une volonté de rester ensemble grâce à Etat qui a vocation — en principe — à rester neutre sur tout ce qui concerne les conceptions du bien et le salut. Résultat : nous gérons des désaccords. L’islamisme, c’est l’inverse : un bunker de dogmes et une cage de normes qui non seulement régissent la totalité de l’existence du matin au soir, mais entendent s’imposer à l’humanité tout entière.
Exactement. Là où nous avons appris à vivre avec nos désaccords, ils proposent un accord presque total sur une bibliothèque de consensus. Face à cela, nous n’avons souvent qu’un cadre minimal, comme celui de ne pas faire de bruit après 23 heures. Comment, sans religion, sans idée de nation, sans identité européenne, pouvons-nous affronter de telles idéologies ?
J’ajouterais aux défis : sans volonté, sans projet explicite et en se détestant autant.
Pouvez-vous citer des sociétés ou des pays où, de ce point de vue, la situation est meilleure qu’en France ?
Spontanément, on cite souvent les pays d’Europe du Nord. Mais ils trichent un peu, car il y a une forte homogénéité sociale et culturelle. Le Danemark, la Suède, la Finlande, c’est une famille, presque communautariste.
En évoquant les sociétés scandinaves vous avez oublié un mot : ethnique… Peut-être qu’il y a une limite aux différences qu’une société peut absorber sans perdre sa boussole ?
J’ai la faiblesse de penser que notre ethnie n’est pas notre code et qu’elle ne constitue pas en soi un obstacle à l’intégration.
Dans votre livre, vous allez plus loin que le constat et la critique pour esquisser une voie de sortie. Comment définiriez-vous votre proposition ?
Ma proposition est la suivante : oui, nous voulons encore vivre ensemble. Mais nous ne savons plus ni pourquoi, ni comment, ni avec qui. Ces doutes affaiblissent l’édifice. Quelle est la « raison d’être » de notre société ?
Pour répondre, il faut faire le détour par l’histoire. Dans une société chrétienne, le rôle du social était de constituer l’écrin permettant à chaque individu d’accéder au salut. L’Eglise fournissait la clé de voûte. Après les guerres de religion, c’est l’Etat qui prend le relais avant qu’il ne se mette, après la Révolution française, au service de la nation, nouvelle clé de voûte et idée « sacrée », c’est-à-dire méritant le sacrifice. Nous sommes sortis de ces grands systèmes, même s’ils n’ont pas totalement disparu : la religion est devenue une foi personnelle et l’amour de la patrie demeure, mais ce ne sont plus des « clés de voûte ». Après la Seconde Guerre mondiale, c’est la liberté et le bien-être individuels qui sont devenus les clés du vouloir-vivre ensemble : droits de l’homme et sécurité sociale.
Cela suffit-il ? Non, car les droits comme le bien-être sont des objectifs infinis. On en veut toujours plus, au point de mettre en péril le collectif. Cette revendication effrénée nous fait oublier ce qui constitue, à mon sens, la nouvelle clé de voûte de notre existence commune. Nous voulons vivre ensemble pour grandir et faire grandir. Cela pourrait sembler naïf et « gentillet », mais c’est, je crois, l’idée qu’on retrouve dans tous les liens qui font société, du privé au public : faire grandir ses enfants, faire grandir son travail, élargir sa vie, améliorer le collectif… On la trouve dans les sept piliers de la convivialité que j’identifie : manger, coucher, convoler, procréer, discuter, travailler, prier ou philosopher… La civilisation démocratique affirme que tous les êtres humains sont grands — ce qu’aucune autre civilisation n’a jamais reconnu—, que tous les humains peuvent grandir et que nous pouvons grandir ensemble. Aujourd’hui, la démocratie et l’Occident font l’objet d’une détestation quasi unanime, alors qu’ils portent ce projet absolument grandiose. Ne serait-il pas temps d’en redevenir fier ?
Justement, puisque vous parlez de grandir. Mais est-ce que nos contemporains le souhaitent ? Par leur comportement et leur consommation, n’expriment-ils l’envie d’être des enfants avec les moyens des adultes ? Le problème de notre société n’est-il pas que trop de gens ne deviennent pas adultes ? Sommes-nous une société d’adolescents ?
Je pense qu’individuellement, nous devenons adultes, et il y a de plus en plus d’adultes. Mais collectivement, nous avons du mal à le devenir. Cette crise de la démocratie est une incapacité collective à atteindre l’âge adulte. Nous sommes dans une phase post-pubère. La démocratie permet à tout un chacun de devenir adulte, mais elle en exige aussi la capacité. Le premier objectif est atteint, mais nous ne sommes pas encore devenus adultes collectivement. Si un projet politique doit être mis en place aujourd’hui, c’est celui de prendre conscience de cette finalité : comment devenir adultes ensemble ?
Je ne suis pas totalement désespéré quant à cette aptitude, sauf sur la question de la démographie. Une démocratie sans enfants perd sa raison d’être.
Directeur de la stratégie numérique (et des levées de fonds) de Reconquête, Samuel Lafont n’a pas été surpris par le revirement idéologique de Mark Zuckerberg, le patron de Facebook. Selon lui, la tech américaine s’éloigne du wokisme pour la simple raison que la majorité des internautes ne sont pas woke.
Causeur. Selon plusieurs journaux américains, la victoire de Donald Trump est due notamment aux conseils de son fils Barron, qui lui a recommandé d’abandonner les médias traditionnels pour se concentrer sur les plateformes numériques. Les partis français doivent-ils suivre cet exemple ?
Samuel Lafont. Je crois qu’on caricature un peu la stratégie médiatique de Donald Trump. Cela dit, il me semble légitime de s’interroger sur l’avenir des journaux classiques. Rien ne dit qu’ils soient éternels. Le philosophe Jacques Bouveresse a souligné le décalage qui existe, par définition, entre le rythme de production de la presse conventionnelle, qui est régulier, et la marche du monde qui, elle, est irrégulière. Certains jours il ne se passe rien dans l’actualité. D’autres jours, il se produit un immense empilement de faits majeurs. Or dans un cas comme dans l’autre, votre quotidien préféré fera à peu près la même taille… Avec les réseaux sociaux, on se délivre de cette contrainte.
Les défenseurs de la presse classique affirment que les réseaux sociaux rétrécissent l’univers du public, en le plaçant dans une bulle politique qui ne lui offre que ce qui correspond à ses idées. Êtes-vous sensible à cet argument ?
Il y a toujours eu des bulles politiques. J’ai connu des communistes sincères qui se bornaient à lire L’Humanité tous les matins. Je ne suis pas sûr qu’ils étaient bien informés… Le web a permis au contraire une respiration. Regardez les gilets jaunes, qui n’auraient jamais émergé s’ils avaient dû se fier aux seuls journalistes pour populariser leur mouvement. Les réseaux sociaux permettent à chacun de devenir le média, comme l’a justement répété Elon Musk après la victoire de Donald Trump. Les militants s’imaginent souvent que tous les citoyens se passionnent autant qu’eux pour les élections. Mais la plupart des Français peuvent aussi considérer les militants politiques comme des constructeurs de tour Eiffel en allumettes, tel Monsieur Pignon dans Le Dîner de cons !
Certes, mais il y a bel et bien des contenus politiques sur Facebook, le premier réseau social mondial. Sans quoi il n’y aurait pas la polémique actuelle sur la décision de son patron, Mark Zuckerberg de ne plus faire appel à des officines de censure spécialisées dans le « fact-checking »…
Oui, bien sûr. Quand ils sont bien faits, quand ils prennent le temps de donner la parole aux candidats, sans les couper tout le temps, sans chercher la petite phrase et quand ils parlent des vrais problèmes, les contenus politiques peuvent avoir un immense succès sur le web, avec des millions de vues. Chez Meta, la maison-mère de Facebook, les interrogations sur l’excès de censure ne sont pas nouvelles en réalité. Sans attendre les déclarations fracassantes de Mark Zuckerberg en janvier, les dirigeants de la filiale française ont convié dès le 25 mars dernier à leur siège parisien tous les responsables des grands partis français, dont votre serviteur. Ils voulaient nous dire que leur groupe avait pris la décision, au niveau mondial, de revoir ses pratiques de surveillance des contenus politiques. Certes ils ont promis de rester très vigilants sur les campagnes de désinformation, mais s’agissant des publications d’individus ne cherchant pas à nuire, plus question de suspendre les comptes. Rappelons que Meta avait banni Donald Trump de Facebook et Instagram en 2021. Le 25 mars, ils nous ont même dit une chose que je ne croyais jamais entendre de leur part : « Ce n’est pas à Meta de dire ce qui est vrai ou pas. »
Il est multifactoriel : les intérêts économiques bien compris de Meta, mais aussi son image fâcheuse de « censeur en chef » qu’il fallait changer, et puis, probablement, ses dirigeants ont-ils analysé les types de contenus partagés publiquement sur leurs plateformes. Peut-être même ont-ils fait une étude similaire de ce qu’on appelle le « Dark Social ».
Le « Dark Social » ? De quoi s’agit-il ?
C’est l’ensemble des échanges privés qui ont lieu sur les plateformes numériques.
Est-ce ce que l’on appelle aussi le « Dark Web » ?
Non, pas du tout, c’est un faux-ami. Le « Dark Web » correspond à une partie d’internet que vous ne trouverez pas via votre moteur de recherche. Il est souvent considéré comme le terrain des mafias, des pédophiles et des terroristes. Alors que le « Dark Social » est tout à fait légal. Si vous partagez par exemple, sur un groupe WhatsApp avec vos amis, une interview d’Éric Zemmour qui vous a plu, vous êtes sur le « Dark Social », en ce sens que vous communiquez sur une plateforme (WhatsApp en l’occurrence, qui appartient à Meta), mais sans que cela soit public. Or les internautes font de plus en plus circuler les contenus politiques sur le « Dark Social ».
Pourquoi ?
D’abord parce que ce type d’outils de messagerie s’est multiplié et amélioré… et parce que les internautes ne supportent plus d’avoir à se soumettre à l’autorisation de pseudo-chevaliers blancs du wokisme. Les équipes de Meta ont fini par comprendre que leurs pertes d’audience provenaient de ce phénomène. En arrêtant le « fact-checking », Mark Zuckerberg a pris une décision de bon sens pour enrayer son déclin, rejoignant en cela Elon Musk, qui l’avait déjà prise dès son rachat de Twitter en 2022.
Mais si les réseaux sociaux deviennent des espaces anarchiques, n’est-ce pas dangereux ?
Twitter et maintenant Facebook ne sont pas sans contrôle. Les internautes peuvent rajouter des « notes de communauté » pour corriger les contenus factuellement erronés.
Vous qui vous servez quotidiennement de Twitter – appelé désormais X –, avez-vous vu concrètement ce changement ?
Oui, c’est très net. Avant le rachat par Elon Musk, il était fréquent que des publications établissant un lien entre l’immigration et l’insécurité soient supprimées. Depuis, plus rien.
Les adversaires de Musk, notamment à la Commission de Bruxelles, soupçonnent l’algorithme de X de valoriser désormais davantage les contenus de droite. Est-ce crédible ?
Ma conviction, c’est que, si les contenus de droite rencontrent sur X plus de succès que ceux de gauche, c’est d’abord la preuve que la droite a gagné la bataille culturelle.
Les journalistes sont-ils toujours neutres et objectifs ? Au LA Times, c’est l’IA qui va trancher
Pendant que dans les gazettes du monde entier, les plus fins esprits s’inquiètent de savoir si l’IA ne serait pas un brin woke ou un poil facho, certains pensent encore que les journalistes ont le pouvoir d’influer sur la marche du monde par leurs écrits. Malgré la signature de la charte déontologique de Munich, malgré les dénégations répétées et toutes les assurances données par les médias d’information quant à leur neutralité et leur rigueur, d’aucuns estiment qu’il leur arrive toujours d’être partiaux ! C’est le cas du milliardaire américain Patrick Soon-Shiong. Après avoir fait fortune dans les biotechnologies, il a racheté le Los Angeles Times en 2018 pour un demi-milliard de dollars. Pour s’attirer les bonnes grâces de Donald Trump, le magnat a refusé que son journal apporte son soutien à Kamala Harris l’année dernière, ce que souhaitait pourtant son comité éditorial. 20 000 lecteurs résilient alors leur abonnement. À présent, le fortuné propriétaire entend mesurer la partialité de ses journalistes en affichant un baromètre de l’objectivité (« bias meter ») sur chaque article du journal. « Nous voulons être une source d’information modérée et digne de confiance. La seule façon de survivre est de ne pas être la caisse de résonance d’un seul camp », se justifie le patron de ce titre réputé progressiste jusqu’alors. C’est à l’IA, une activité investie par ailleurs par M. Soon-Shiong, que sera confié cet affichage des biais des sources. Évidemment, les journalistes se sentent insultés. « Tous les membres du journal respectent les règles de déontologie qui exigent équité, rigueur et vigilance vis-à-vis des préjugés », s’est indigné leur syndicat professionnel dans un communiqué. Et au-delà de ces jérémiades prévisibles, il faut bien reconnaître que personne ne sait vraiment qui pourra garantir que le fameux baromètre est lui-même libre de tout biais… Quand nous bouclions notre propre journal, le dispositif n’était pas encore déployé sur le site. Et il n’était pas certain que lire le journal soit alors la priorité des Angelenos qui regardaient les incendies reprendre autour de leur ville sur leurs écrans de télévision.
Depuis maintenant plusieurs années, notre Première dame est victime de rumeurs infamantes. À son époque, Madame Pompidou avait également été la cible d’infox
Depuis quelques mois, je suis inondé de petites vidéos censées prouver que Madame Emmanuel Macron, née Brigitte Trogneux, actuelle femme du président de la République, serait un homme. Ce genre de farce n’est pas nouveau. Dans les années 60, une rumeur persistante prétendait que Sheila aussi était un homme. Jadis, sous Louis XV, des bruits couraient selon lesquels le chevalier d’Éon était une femme. Précisons que dans ce dernier cas, le canular était l’œuvre du chevalier lui-même qui voulait se moquer de ceux qu’ils l’avaient mis en disgrâce. Charles d’Éon avait poussé le bouchon jusqu’à se déguiser en femme pour accréditer la rumeur tout en se moquant de ceux qui la propageaient. Madame Macron serait un homme ? Ah, la belle affaire, et il y en a qui prétendent aussi que la grande Zoa, ce serait un homme… Étant grand amateur de canulars, de travestissements, de bouffonnades et d’escobarderies, je ne blâme jamais les faiseurs de bonnes blagues dans la tradition carnavalesque et rigolarde bien française. En revanche, je m’interroge sur la santé mentale des naïfs qui prennent au sérieux la rumeur au sujet de la femme du président de la République. Il paraît même qu’une influenceuse américaine s’y est mise… Depuis quand laisse-t-on les Américains nous piquer nos blagues ?
Sans vraiment croire à ce canular, je pense que ses diffuseurs souhaitent évidemment nuire au président bien plus qu’à sa femme. Pour eux, la fin justifie les moyens. Ces détracteurs du président Macron emploieront tous les moyens, même les plus avilissants, pour l’atteindre. Ayant publié un livre intitulé Le Procès de Jupiter (Éditions bouquins de Synthèse) que je recommande, on ne peut pas me soupçonner de complaisance envers Emmanuel Macron, mais je fais la distinction entre l’homme et sa politique, entre lui et sa femme. Je m’autorise volontiers le pamphlet, l’instruction à charge contre la politique du Chef de l’État, mais jamais je ne mettrai en cause sa conjointe. Il y a assez de reproches à faire à son mari président pour épargner sa femme. Quant à ceux qui croient vraiment aux billevesées déversées au sujet du sexe de Madame, je leur conseille de consulter les archives à propos de Madame Pompidou et d’appliquer le neuvième commandement. J’ai même envie de leur dire que si c’était vrai, cela ne changerait en rien mon attitude vis-à-vis du couple présidentiel. Deux dernières choses : Sheila, de son vrai nom Annie Chancel, a accouché d’un garçon en avril 1975. Et pour ce qui est de la grande Zoa, on n’a jamais su qui elle était vraiment, car elle fut mangée crue par son boa.
Avec Alain Destexhe, Gil Mihaely et Jeremy Stubbs.
Alain Destexhe, médecin, ancien secrétaire-général de Médecins sans frontières, sénateur honoraire belge et contributeur à Causeur, ainsi qu’à d’autres journaux, vient de publier Mayotte: comment l’immigration détruit une société (aux éditions Texquis). Il livre un témoignage direct sur ce qu’il a trouvé sur cette île qui est un Département français, et analyse les effets sur la société mahoraise de l’immigration de masse en provenance des Comores et même du continent africain. Malgré de grands investissements notamment dans des projets d’infrastructure, l’Etat français semble démuni face à ces flux migratoires qui sont motivés par des besoins économiques plutôt que politiques.
Gil Mihaely nous aide à comprendre en quoi les intérêts vitaux de la France sont engagés par cette crise dans l’Océan Indien et à situer ce qui arrive dans le contexte géopolitique de la rivalité avec d’autres puissances comme la Chine.
Lors d’une conférence de presse dans le Bureau ovale le 11 février, le jeune «Lil X», fils d’Elon Musk, a volé la vedette en grimpant sur les épaules de son père et en lui mettant les doigts dans les oreilles, provoquant l’amusement général. Cette scène a suscité des réactions variées, certains saluant la spontanéité de l’enfant, d’autres estimant qu’il n’avait rien à faire là…
Les quatre lettres, le signe et le chiffre en titre ci-dessus ne forment pas l’énoncé d’une improbable équation. Il s’agit tout simplement du nom qu’Elon Musk a donné à son fils. Le chiffre 12 en fin d’énoncé est sans doute là pour indiquer que le bambin – quatre ans – porte le dossard numéro douze ; l’industrieux, vibrionnant, dérangeant, archi-déconnant et archi-milliardaire ayant à ce jour douze enfants, de trois mères différentes. Oui, prenons la précaution de préciser « à ce jour » car, comme dans le domaine de la fusée malicieuse s’en revenant dans les bras de sa tour de lancement après une escapade dans l’espace, ou celui de la captation de pépites entreprenariales à grands coups de milliards, l’homme n’a peut-être pas dit son dernier mot non plus dans le registre de la paternité.
J’ignore si un tel nom sera difficile à porter pour le gamin à l’école et dans sa vie future. « X Æ A-12, dis-moi que tu m’aimes ! » n’est pas, en effet, à première approche, d’un romantisme formidable.
En le prononçant, on a l’impression de se retrouver dans les pages d’une b.d. de science-fiction des années 1980-1990 où les martiens, visiteurs de l’espace genre « Soupe au Chou », portaient ce type de matricule en guise de blase. De là à subodorer que les martiens seraient d’ores et déjà parmi nous et qu’un de leurs représentants ne serait autre que le très déroutant, le très déjanté Elon Musk, il n’y a qu’un pas que je me sens parfois tout au bord de franchir.
Ils se trouvaient l’autre jour tous les deux, l’enfant et le père, dans le bureau ovale de la Maison-Blanche aux côtés du président Trump, quant à lui conventionnement installé à sa table de travail. Le petit Musk sur les épaules du papa Musk, pour une conférence de presse. Atypique, cela va de soi. Papa Musk debout, donc, casquette « Make America Great again » vissée sur la tête, tenue décontractée, comme s’il était là de passage pour boire un soda (avec paille) en compagnie de son copain Donald au retour de la promenade du petit au Lafayette Square.
Atypique dans la forme, bien évidemment, nous venons de le voir. Mais atypique surtout en cela que, avec ces deux extravagants, bien malin le journaliste qui pourrait prédire ce qui va sortir de leurs bouches, de leurs cerveaux eux-mêmes des plus atypiques. À cet égard, deux phrases lâchées par Musk : « Nous allons vite, donc nous faisons des erreurs mais nous corrigerons ces erreurs rapidement », et celle-ci, plus sidérante encore : « Certaines des choses que je vais dire seront fausses et devront être corrigées. »
Deux phrases qui sont l’expression même d’une manière toute nouvelle d’appréhender la politique et le discours politique. Annoncer les erreurs avant même de les avoir commises et les mensonges avant même de les avoir proférés n’est certes pas une pratique à laquelle nos politiciens conventionnels nous ont accoutumés. Leurs erreurs, ils ne les reconnaissent jamais, au grand jamais, non plus que leurs mensonges. Pour ma part, je ne sais pas si le X Æ A-12 et son papa iront un jour sur Mars, mais, je le répète, ces gens-là me donnent parfois l’impression bizarre d’en être tombé tout droit.